Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er bis, qui permet de préciser dès la convention matrimoniale, et donc au moment du mariage, l’éventuel maintien d’avantages matrimoniaux en cas de séparation.

Alors que le couple n’a pas encore de vie en commun, que le partage des revenus et les inégalités qui ont pu s’y créer ou empirer ne sont pas encore connus, l’article permet de déterminer en avance qu’au moment du divorce certains avantages seraient maintenus. Toutefois, si les personnes pouvaient déterminer le maintien ou non de ces avantages au moment où elles divorcent, elles pourraient alors éventuellement se rendre compte que certains de ces avantages sont devenus indus, et qu’elles souhaitent les révoquer.

C’est ce que j’expliquais lors de la discussion générale avec l’exemple des pots de yaourt vides avec lesquelles certaines se retrouvent après une séparation, en se disant que cela n’est pas juste.

M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour présenter l’amendement n° 12.

M. Thani Mohamed Soilihi. L’amendement vise à maintenir les dispositions actuellement en vigueur de l’alinéa 2 de l’article 265 du code civil. Il a été excellemment défendu par ma collègue.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° 16.

M. Pascal Savoldelli. Le groupe CRCE – Kanaky considère que cet article est particulièrement grave, car il renforcerait les inégalités entre les femmes et les hommes pendant et après le mariage.

L’article prévoit d’exonérer un ex-conjoint de l’obligation d’intégrer ses biens professionnels à son patrimoine final au moment du divorce. En conséquence, la différence entre le patrimoine final et le patrimoine originaire, qui sert à calculer la créance de participation, serait significativement diminuée.

Autrement dit, en donnant à un époux la possibilité de minorer son patrimoine, l’article lui permet de devoir beaucoup moins d’argent à son ex-épouse si celle-ci ne s’est pas enrichie de la même manière.

L’adoption de cette disposition creuserait les inégalités au sein du couple. L’écart moyen de patrimoine entre les hommes et les femmes est passé de 7 000 euros en 1998 à 24 500 euros en 2015. L’écart de patrimoine relatif entre femmes et hommes a quasiment doublé entre 1998 et 2015, passant de 9 % à 16 %. Cette proportion est même passée de 20 % à 60 % pour les personnes mariées ou pacsées sous le régime de la séparation des biens.

Souvent, la différence genrée intervient non pas tant avant le mariage que pendant celui-ci, l’un s’enrichissant plus que l’autre, notamment grâce à la valeur patrimoniale que prennent ses biens professionnels.

Enfin, exclure ces derniers revient à faire un cadeau injustifiable aux plus aisés, notamment lorsque le mariage a provoqué des inégalités de revenus entre les membres du couple.

Voilà les données qui fondent notre jugement. Nous préférons nous en tenir à l’interprétation que la Cour de cassation a donnée de l’article 265 du code civil. Il est juste que ce principe soit appliqué : le membre du couple qui s’est le plus enrichi pendant le mariage s’acquitte de sa dette à l’égard de son conjoint ou de sa conjointe au moment de la dissolution du mariage, donc du divorce.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. Les présents amendements tendent à revenir sur la suppression de l’article 1er bis opérée lors de l’examen du texte en commission.

Or, d’une part, les époux prévoient déjà aujourd’hui de telles clauses, qui sont révoquées à rebours de leur volonté par une application littérale de la loi. Il y a quelque étrangeté à protéger les époux contre eux-mêmes en la matière.

D’autre part, disposer de biens professionnels n’est pas que le seul fait des hommes. Seriez-vous vraiment d’accord avec une disposition qui priverait certaines femmes, du simple fait qu’elles se séparent, de leur outil de travail et de leurs moyens de subsistance ?

Enfin, l’ensemble des professionnels que nous avons auditionnés, notaires comme magistrats, se sont montrés très favorables à cette disposition.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Ces amendements visent à supprimer la faculté donnée aux époux de prévoir dans leur contrat de mariage que les clauses constitutives d’un avantage matrimonial ne seront pas révoquées en cas de divorce.

J’y suis défavorable : la modification adoptée par la commission des lois répond à une demande formulée depuis de nombreuses années par les praticiens.

L’objectif de cette disposition est d’apporter une meilleure sécurité juridique à tous les époux. À ce titre, je rappelle que les époux peuvent déjà prévoir, dans leur contrat de mariage, que les clauses contributives d’un avantage matrimonial ne seront pas révoquées en cas de divorce. Le texte de la commission ne fait que consacrer, de manière certaine, la validité de ces clauses, ce qui va dans le sens d’une meilleure sécurité juridique pour les deux membres du couple.

Ce type de clause a toute sa place dans les contrats de mariage, qui sont aussi conclus pour anticiper les effets d’une dissolution du mariage.

Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. Thani Mohamed Soilihi. Je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 12 est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 10 et 16.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er bis.

(Larticle 1er bis est adopté.)

Article 1er bis
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Après l’article 2

Article 2

(Non modifié)

I. – Le septième alinéa de l’article L. 247 du livre des procédures fiscales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Peut être considérée comme une personne tenue au paiement d’impositions dues par un tiers la personne remplissant les conditions fixées aux 1 et 3 du II de l’article 1691 bis du code général des impôts. »

II. – (Supprimé)

M. le président. L’amendement n° 19, présenté par M. Savoldelli, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Remplacer les mots :

Peut être

par le mot :

Est

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. L’article 2, introduit par la rapporteure du texte à l’Assemblée nationale, constitue une solution de rechange apparue sous la plume de Bercy, en réaction à l’adoption par le Sénat de cinq amendements identiques lors de l’examen du dernier projet de loi de finances.

Il crée la possibilité, pour l’ex-conjoint, de bénéficier d’une procédure de décharge gracieuse laissée à la seule interprétation de l’administration.

Nous proposons que, si l’absence de manœuvre frauduleuse est effectivement constatée après la séparation, l’ex-conjoint soit automatiquement délié de ses obligations fiscales.

En l’état, la portée de l’article est extrêmement réduite. Selon le Bulletin officiel des finances publiques (Bofip), les demandes de ce type sont réservées au contribuable « dans l’impossibilité de payer par suite de gêne ou d’indigence » ou « lorsque ces pénalités et, le cas échéant, les impositions auxquelles elles s’ajoutent sont définitives ».

La procédure contribuera à rallonger le parcours des personnes déboutées de leur demande gracieuse, qui entameront donc une procédure de décharge de responsabilité solidaire.

Il est de bon aloi que le juge se prononce lors des litiges qui opposent l’administration fiscale et les contribuables. Le volume de dossiers à traiter semble tout à fait adéquat à nos positions, et il est toujours dangereux de chercher à contourner le juge – je pense que le ministre de la justice m’accompagnera dans ce raisonnement.

Enfin, l’article ne prévoit que la possibilité, et non l’obligation, d’être déchargé de ses obligations fiscales au titre de la procédure gracieuse, ce à quoi notre amendement vise à remédier. Nous proposons de rendre cette avancée concrète et de ne pas nous en tenir à une simple faculté, afin que l’administration ne soit pas laissée sans consigne.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. Mon cher collègue, comme vous l’avez vous-même relevé, votre amendement tend à faire une obligation de la faculté, pour l’administration, d’octroyer une décharge à titre gracieux, ce à quoi la commission ne saurait être favorable.

En effet, d’une part, lier la compétence de l’administration pour une décharge à titre gracieux paraît contraire au principe même de l’octroi d’une telle décharge, qui implique que l’administration soit dotée d’une certaine liberté de manœuvre. Cet élément important est conforté, me semble-t-il, par le texte tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale.

D’autre part, cette modification reviendrait à priver de tout effet l’article 1691 bis du code général des impôts, car l’octroi de la décharge de responsabilité solidaire serait désormais de droit dès lors que seulement deux des trois critères prévus à cet article seraient remplis.

Au vu de ces deux arguments, et pour sauvegarder l’avancée que représente la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en matière de recours à titre gracieux – nous aurons l’occasion de revenir sur ce point –, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Monsieur le sénateur, vous conviendrez avec moi qu’il faut bien que l’administration fiscale procède de temps en temps à des contrôles ; c’est un peu sa raison d’être ! L’automaticité proposée de la décharge à titre gracieux nous choque donc quelque peu, d’autant que Thomas Cazenave, ministre délégué aux comptes publics, a pris tout à l’heure, de la plus belle des manières – publiquement, à la tribune de cet hémicycle – des engagements en la matière.

J’insiste : l’automaticité que vous proposez pour la décharge à titre gracieux ouvrirait le bénéfice de celle-ci à tous les demandeurs. Il faut quand même que la demande soit instruite, qu’un contrôle, fût-il a minima, s’exerce. Cependant, soyez serein : je le redis, des engagements ont été pris devant vous par M. Cazenave.

Telles sont les raisons qui justifient l’avis défavorable du Gouvernement sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 19.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 28, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le I s’applique aux personnes pour lesquelles la demande de décharge de l’obligation de paiement mentionnée au II de l’article 1691 bis du code général des impôts n’a pas donné lieu, à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, soit à une décision définitive de la part de l’administration fiscale, soit à une décision de justice passée en force de chose jugée.

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Cet amendement vise à renforcer la portée du dispositif créé à cet article, en précisant qu’il s’applique également à toutes les personnes qui connaissent aujourd’hui des difficultés.

Ainsi, pourront déposer une demande de décharge gracieuse, qui sera instruite selon les modalités qui ont été présentées, toutes les personnes pour lesquelles une demande de décharge de responsabilité solidaire (DRS) est en cours d’examen par les services de l’administration fiscale ou n’a pas donné lieu à une décision de justice passée en force de chose jugée à la date d’entrée en vigueur du présent texte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. Je tiens à remercier M. le garde des sceaux de ses explications, mais aussi M. le ministre délégué chargé des comptes publics pour le travail d’écoute qu’il a mené, en lien avec l’association dont les représentants sont présents dans nos tribunes – je les salue à cette occasion.

Ce travail se traduit à présent dans cet amendement, qui tend à apporter une souplesse bienvenue en permettant, pour les affaires déjà examinées, sinon une rétroactivité, du moins le dépôt d’une nouvelle demande de décharge, à titre gracieux, et son examen suivant les modalités prévues dans le présent texte.

La commission n’a pu examiner cet amendement ; à titre personnel, j’émets un avis favorable, eu égard notamment aux engagements qui ont été pris dans la discussion générale par M. le ministre Cazenave.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le garde des sceaux, voilà un amendement mis sur la table à la dernière minute, que nous n’avons pas pu examiner avant cette séance. Il est affirmé, dans l’exposé de ses motifs, qu’il « a pour objet de préciser le champ d’application de la nouvelle procédure ». C’est peut-être de la sémantique, mais il me semble que, plutôt que d’une précision, il s’agit bien d’une restriction de ce champ !

L’enjeu de cette nouvelle procédure est que toutes les femmes puissent en bénéficier, qu’elles aient ou non entamé une démarche au titre de la DRS et que cette démarche ait ou non abouti. Ce n’est donc pas un amendement positif et progressiste que vous nous soumettez, mais bien un amendement de restriction, qui dénature l’esprit d’une disposition qui nous rassemble.

De surcroît, si j’ai bien compris, s’il devait être adopté, il n’y aurait plus de rétroactivité. (Mme la rapporteure le conteste.) Pour ma part, comme tous les membres du groupe CRCE-K, j’estime que, quand une injustice ou une inégalité est constatée par le législateur, sa correction doit être rétroactive, car les injustices comme les inégalités doivent être réparées !

M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.

M. Hussein Bourgi. Je voudrais à cette occasion saluer notre rapporteure Isabelle Florennes. Lorsque nous avons examiné ce texte en commission la semaine dernière, nous ne disposions pas de cette information ; elle nous avait alors demandé de lui faire confiance dans les négociations qu’elle menait avec Bercy. L’amendement gouvernemental est arrivé aujourd’hui, en aboutissement de ce dialogue fructueux.

Je ne m’attarderai pas sur le dispositif de cet amendement. Vous le savez, mes chers collègues, la décharge existe déjà depuis plusieurs années. Mais il faut distinguer entre la loi, l’esprit de la loi et, surtout, la culture de celles et de ceux qui sont censés appliquer la loi, en l’occurrence les fonctionnaires du ministère des finances. Je n’ai absolument rien contre ce ministère ni contre ses fonctionnaires ; toutefois, quand je rencontre des représentants d’une association de femmes divorcées, qui m’apprennent qu’entre 60 % et 80 %, selon les années, des demandes de décharge sont refusées, je me dis qu’un travail de pédagogie est nécessaire : cette faculté existe, mais ces demandes sont, encore aujourd’hui, très majoritairement rejetées par les agents du ministère des finances, ce qui m’interpelle et me chagrine.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 28.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2
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Article 2 bis (nouveau)

Après l’article 2

M. le président. Je suis saisi de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L’amendement n° 3 rectifié bis est présenté par Mmes Schalck et Noël, MM. Savin, Burgoa et Reichardt, Mmes Di Folco, M. Mercier et Gosselin, M. Pointereau, Mmes Petrus et Carrère-Gée, MM. Brisson et Bacci, Mmes Aeschlimann et Belrhiti, MM. Gremillet et Saury, Mmes Canayer et Micouleau, M. Grosperrin, Mme Drexler, MM. Sido et Belin, Mme Borchio Fontimp, MM. Tabarot et Genet, Mme de Cidrac, MM. Reynaud et Meignen, Mmes Nédélec et Estrosi Sassone, MM. Frassa, Bouchet, D. Laurent, Lefèvre, Pellevat, Cadec, Sautarel et H. Leroy, Mmes Josende, Lassarade, Deseyne, Richer et Joseph et M. Rojouan.

L’amendement n° 7 est présenté par M. Savoldelli, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 11 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 2 du II de l’article 1691 bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. La situation financière nette du demandeur est appréciée sur une période n’excédant pas trois années. La décharge de l’obligation de paiement est alors prononcée selon les modalités suivantes » sont supprimés ;

2° Après le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« 1° Dans le cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. La situation financière nette du demandeur est appréciée sur une période n’excédant pas trois années ;

« 2° Dans le cas où le montant de la dette fiscale résulte d’un contrôle fiscal personnel de son ancien conjoint ou partenaire de pacte civil de solidarité ayant donné lieu, par suite d’un manquement aux obligations déclaratives, d’une soustraction frauduleuse ou d’une tentative de soustraction frauduleuse au paiement des impositions mentionnées aux 1° et 2° du I ainsi qu’à l’article 1723 ter-00 B, à une rectification d’un bénéfice ou revenu propre au conjoint ou au partenaire de pacte civil de solidarité du demandeur. La décharge de l’obligation de paiement n’est alors accordée que si le demandeur ne s’est pas enrichi à la faveur de cette fraude fiscale commise par son ancien conjoint ou partenaire de pacte civil de solidarité et n’a pas participé directement ou indirectement à celle-ci ;

« 3° La décharge de l’obligation de paiement est alors prononcée selon les modalités suivantes : »

II. – Le I est applicable aux demandes en décharge de l’obligation de paiement déposées à compter du 1er janvier 2024.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Elsa Schalck, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié bis.

Mme Elsa Schalck. Dans la continuité des arguments que j’ai exposés au cours de la discussion générale, je rappellerai d’abord que le dispositif de cet amendement a déjà été adopté par le Sénat lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2024, mais n’a pas été retenu dans la version que le Gouvernement a fait adopter en définitive en recourant à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Cette mesure est soutenue par plusieurs groupes politiques, elle est donc transpartisane ; je tiens à cette occasion à saluer le travail qui a été mené avec le collectif de femmes divorcées engagé sur cette question.

Sans trop entrer dans le détail, cet amendement vise à inclure parmi les conditions d’examen de la demande de décharge la prise en compte de l’origine frauduleuse de la dette : un conjoint qui n’aurait pas bénéficié de cette activité frauduleuse et n’en aurait pas été informé pourra obtenir une telle décharge. Cette mesure concorde pleinement avec les engagements pris par M. le ministre délégué chargé des comptes publics au cours de la discussion générale. Il importe d’aller un peu plus loin que l’article 2 de ce texte, car on voit bien les freins qui s’opposent aujourd’hui à la mise en œuvre de cette décharge. L’assouplissement que nous proposons permettrait de mettre fin à des situations profondément injustes subies par les personnes divorcées.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° 7.

M. Pascal Savoldelli. J’abonderai dans le sens des propos de notre collègue Elsa Schalck : lors de l’examen du dernier projet de loi de finances, 54 sénateurs et sénatrices de tous les groupes politiques avaient soutenu cette même mesure, que notre assemblée avait alors adoptée, mais qui a ensuite été balayée par le Gouvernement au travers du 49.3.

Monsieur le garde des sceaux, je veux aborder ce débat de manière très apaisée : je ne mets pas en cause la sincérité des propos tenus par tel ou tel membre du Gouvernement. Mais il faut comprendre dans quel contexte on se trouve : notre assemblée travaille avant ou après des 49.3. On vote un budget, pour se voir annoncer peu après un décret procédant à un coup de rabot de 10 milliards d’euros ! Vous comprendrez bien qu’il est ici question de sincérité politique et non de sincérité de la personne, que je ne me permettrais pas de mettre en doute. Mais il n’en demeure pas moins un problème pour nous tous, membres de cette assemblée. Que peut-on croire sur parole, puisque, même quand on vote quelque chose, il arrive que ce vote soit détourné ? Je le dis dans un esprit de responsabilité – je sais que ce terme plaît !

La situation actuelle n’est pas acceptable. L’administration fiscale accepte le « quoi qu’il en coûte » pour ce qui est de recouvrer ses créances ! On entame des procédures contentieuses alors même que peu d’entre elles aboutissent. Ce sujet a été évoqué tout à l’heure, ce qui m’a incité à regarder les chiffres. Eh bien, depuis 2014, sur les 2 984 demandes de décharge reçues par la DGFiP, une demande sur deux est rejetée ! Nous ne mettons nullement en cause l’administration fiscale ni ses compétences ; simplement, il faut faire la loi, c’est bien pour cela que nous siégeons aujourd’hui et que nous déposons ces amendements, dont la diversité politique des signataires n’a pu vous échapper : tous, nous tenons à obtenir gain de cause au profit des associations qui nous ont sollicités.

Je le redis, il faut respecter le vote émis par notre assemblée, presque à l’unanimité, si je me rappelle bien, lors de l’examen du dernier projet de loi de finances.

M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 11.

Mme Mélanie Vogel. Il a été brillamment défendu par nos collègues Elsa Schalck et Pascal Savoldelli.

M. le président. Les deux amendements suivants sont également identiques.

L’amendement n° 1 rectifié est présenté par M. Bourgi, Mme Rossignol, M. Ziane, Mmes Blatrix Contat et de La Gontrie, MM. Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 8 rectifié bis est présenté par Mme Billon, MM. Bonneau, Longeot et Courtial, Mmes Sollogoub et Romagny, M. Laugier, Mme Saint-Pé, M. Menonville, Mmes Antoine, Morin-Desailly et Vermeillet, MM. Lafon et J.M. Arnaud, Mme Jacquemet, MM. Cambier et Parigi et Mme Perrot.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 2 du II de l’article 1691 bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. La situation financière nette du demandeur est appréciée sur une période n’excédant pas trois années. La décharge de l’obligation de paiement est alors prononcée selon les modalités suivantes » sont supprimés ;

2° Après le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« 1° Dans le cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. La situation financière nette du demandeur est appréciée sur une période n’excédant pas trois années ;

« 2° Dans le cas où le montant de la dette fiscale résulte d’un contrôle fiscal personnel de son ancien conjoint ou partenaire de pacte civil de solidarité ayant donné lieu, par suite d’un manquement aux obligations déclaratives, d’une soustraction frauduleuse ou d’une tentative de soustraction frauduleuse au paiement des impositions mentionnées aux 1° et 2° du I ainsi qu’à l’article 1723 ter-00 B, à une rectification d’un bénéfice ou revenu propre au conjoint ou au partenaire de pacte civil de solidarité du demandeur. La décharge de l’obligation de paiement n’est alors accordée que si le demandeur ne s’est pas enrichi à la faveur de cette fraude fiscale commise par son ancien conjoint ou partenaire de pacte civil de solidarité et n’a pas participé directement ou indirectement à celle-ci ;

« 3° La décharge de l’obligation de paiement est alors prononcée selon les modalités suivantes : ».

II. – Le I est applicable aux demandes en décharge de l’obligation de paiement déposées à compter du 1er janvier 2025.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Hussein Bourgi, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié.

M. Hussein Bourgi. Les motivations de cet amendement ont été extrêmement bien exposées par Elsa Schalck et Pascal Savoldelli. L’unique différence entre celui-ci et ceux qu’ils ont présentés est que nous proposons ici d’appliquer le dispositif à compter du 1er janvier 2025 et non du 1er janvier 2024.

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.