compte rendu intégral

Présidence de Mme Sophie Primas

vice-présidente

Secrétaires :

M. François Bonhomme,

Mme Nicole Bonnefoy.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Demande de retour à la procédure normale pour l’examen d’un projet de loi

Mme la présidente. Mes chers collègues, Mme Cécile Cukierman, présidente du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, et M. Patrick Kanner, président du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, demandent, par courriers datés respectivement des jeudi 7 et vendredi 8 décembre 2023, que le projet de loi autorisant l’approbation de l’avenant entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg au protocole d’accord du 20 mars 2018 relatif au renforcement de la coopération en matière de transports transfrontaliers et à la convention du 23 octobre 2020 relative au financement d’aménagements visant à renforcer la desserte ferroviaire et favoriser les mobilités durables, inscrit à l’ordre du jour du mercredi 20 décembre à 16 heures 30, soit examiné selon la procédure normale et non selon la procédure simplifiée.

Acte est donné de cette demande.

Dans la discussion générale, nous pourrions attribuer un temps de parole de quarante-cinq minutes aux orateurs des groupes.

Le délai limite pour les inscriptions de parole serait fixé au mardi 19 décembre, à quinze heures.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

3

Article additionnel après l'article 55 bis - Amendements n° II-1100 rectifié et n° II-1105 rectifié (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
Deuxième partie

Loi de finances pour 2024

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
Motion d'ordre

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2024, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (projet n° 127, rapport général n° 128, avis nos 129 à 134).

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

seconde partie (suite)

Moyens des politiques publiques et dispositions spéciales

Motion d’ordre

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
Sport, jeunesse et vie associative

Mme la présidente. La parole est à M. le vice-président de la commission des finances.

M. Stéphane Sautarel, vice-président de la commission des finances. Madame la présidente, mes chers collègues, en application de l’article 46 bis, alinéa 2, du règlement du Sénat, le président de la commission des finances propose l’examen séparé de certains amendements portant sur les crédits des missions « Sport, jeunesse et vie associative » et « Justice ». Cela permettra des regroupements thématiques et évitera de trop longues discussions communes.

Mme la présidente. Mes chers collègues, je suis donc saisie, en application de l’article 46 bis, alinéa 2, du règlement du Sénat, d’une demande de la commission des finances d’examen séparé de certains amendements portant sur les crédits des missions « Sport, jeunesse et vie associative » et « Justice ».

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

Sport, jeunesse et vie associative

Motion d'ordre
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
État B

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » (et articles 66 et 67).

La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, il est au premier abord étonnant, étant donnée la tenue, en 2024, des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP), que les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » diminuent de 2 %, pour atteindre 1 794,8 millions d’euros en crédits de paiement.

Cette baisse est en réalité due uniquement à celle des crédits du programme 350, qui finance la livraison des ouvrages olympiques. Elle était tout à fait attendue : les travaux entrent en effet dans leur phase finale et les dépenses les plus importantes ont déjà été engagées au cours des années précédentes.

À ce sujet, j’ai pu auditionner Nicolas Ferrand, le directeur général exécutif de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo). Les informations qui m’ont été transmises sont rassurantes : dans l’ensemble, les ouvrages olympiques devraient être livrés dans les temps.

Toutefois, cela ne signifie pas que toutes les incertitudes concernant les JOP soient levées. La tarification des transports fait aujourd’hui l’objet d’une controverse et le sujet de la sécurité des Jeux est loin d’être totalement éclairci. Si l’hypothèse de la mobilisation des forces de sécurité de l’État devait être confirmée, ce recours pourrait générer des coûts supplémentaires pour le Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop).

Les autres politiques du sport bénéficient globalement du dynamisme impulsé par les Jeux. Les crédits du programme 219 « Sport » progressent de 26,6 % en autorisations d’engagement et de 8,5 % en crédits de paiement.

Une part de cette hausse est conjoncturelle, comme la revalorisation des primes aux médaillés, mais le programme enregistre également des augmentations bien réelles. Ainsi, le financement de l’Agence nationale du sport (ANS) progresse de 6,2 millions d’euros et le programme gagne 100 millions d’euros en autorisations d’engagement au titre du plan « 5 000 terrains de sport ».

J’en viens au versant « Jeunesse et vie associative » de la mission. En effet, même en 2024, celle-ci ne se limite pas au sport ! Les politiques en faveur des associations et de la jeunesse ne doivent pas être oubliées.

Je commencerai par rappeler que l’inflation touche durement les associations. En raison de leur public cible, celles-ci sont réticentes à augmenter les prix. Le renforcement, prévu à l’article 67, du mécanisme de fléchage des avoirs inactifs vers le fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) est à cet égard une bonne nouvelle : cette mesure permettra de mobiliser environ 20 millions d’euros supplémentaires pour la vie associative.

Le service national universel (SNU) continue sa montée en charge : on relève une hausse de 14,3 % de ses crédits, pour atteindre 160 millions d’euros.

Une nouveauté est que, cette année, le séjour de cohésion – un séjour en hébergement collectif de deux semaines – pourra être réalisé sur le temps scolaire. Cette nouvelle organisation doit permettre de faire des économies en réutilisant les hébergements d’un séjour à l’autre. Néanmoins, même si l’objectif de généralisation du SNU reste officiellement affirmé, nous ne savons pas quel est son calendrier et quelle forme prendra cette obligation. J’espère qu’un projet de loi sera déposé sur ce sujet, afin que le Parlement puisse en débattre.

Je conclurai mon propos en évoquant le service civique. Celui-ci voit ses crédits maintenus à 518,8 millions d’euros pour la deuxième année consécutive.

Cependant, rien n’est connu, à l’heure actuelle, quant à son avenir, malgré la promesse de généralisation du dispositif. Or ce serait à mon sens une erreur que de faire subir au service civique un retour en arrière dans son développement. Sachant que les regards sont aujourd’hui tournés vers le SNU, ce risque est-il réel, madame la secrétaire d’État ?

Je tiens à réaffirmer ici que le service civique est une politique publique importante, qui a fait ses preuves et qui ne doit pas tomber dans l’oubli.

J’ai été d’ailleurs sensibilisé au cours de mes auditions au fait que les indemnités octroyées aux jeunes qui accomplissent un service civique, d’un montant de 489,59 euros net par mois, sont aujourd’hui trop faibles pour que le dispositif puisse être vraiment attractif. Je vous interpelle donc sur cette question, madame la secrétaire d’État, et je souhaite qu’une réflexion soit engagée, à laquelle je suis prêt à prendre part si vous le voulez bien.

L’épisode de l’été 2023 montre l’importance, pour la cohésion de la Nation, des politiques en faveur de la jeunesse, qui devrait rester au centre de nos préoccupations.

Dans l’ensemble, le budget pour 2024 apporte de réelles avancées. La commission des finances a donc décidé de proposer au Sénat d’adopter sans modification les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous attendions beaucoup de ce budget du sport pour 2024, compte tenu de la tenue des jeux Olympiques et Paralympiques et du choix de promouvoir l’activité physique et sportive au rang de grande cause nationale 2024.

Quel constat dresser sur ce budget ? Il faut se rendre à l’évidence : il n’est pas à la hauteur des enjeux. Les crédits consacrés au sport sont en décalage avec l’ambition de bâtir une « nation sportive », d’autant que le niveau atteint est sans doute un plafond, en raison de la diminution des crédits consacrés aux JOP qui s’amorce dès l’an prochain.

En dehors du programme consacré aux JOP, l’augmentation des crédits du programme « Sport », pris isolément, est elle-même la conséquence de dépenses induites par les Jeux, donc non reconductibles.

Les taxes affectées à l’Agence nationale du sport voient quant à elles leur montant total rester inchangé par rapport à l’an dernier. Le dynamisme de ces taxes n’est pas en cause, mais, comme vous le savez, leur rendement est obéré par un plafond fixé arbitrairement par l’État.

D’un point de vue budgétaire, enfin, le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 n’annonce pas des lendemains meilleurs.

Les orientations de ce budget sont bonnes, mais les moyens sont insuffisants. Certes, la préparation des JOP est satisfaisante. Il faudra toutefois rester vigilant dans la dernière ligne droite. L’écho de cet événement dans la société et sa capacité à être un commencement autant qu’un aboutissement restent évidemment aléatoires à ce stade.

La reconduction du plan « 5 000 terrains de sport » est une bonne nouvelle. L’État investira 300 millions d’euros sur trois ans, la moitié de cette somme concernant des équipements structurants. Nous saluons cette décision, même si les montants demeurent modestes au regard des besoins. Je pense notamment à l’effort nécessaire en faveur des piscines. Des projets de rénovation ont été financés, mais à une échelle insuffisante. La situation de nombreuses piscines demeure préoccupante en raison de leur vétusté, de l’augmentation du coût de l’énergie et de la difficulté à recruter des maîtres-nageurs.

La création d’emplois supplémentaires dans les services déconcentrés du ministère est bienvenue, pour lutter contre les violences et les phénomènes de radicalisation.

Les mesures en faveur du sport scolaire vont dans la bonne direction, mais elles devront être évaluées. Il faudra aller plus loin, notamment en faveur du sport universitaire. Quant au Pass’Sport, il devra probablement être révisé pour pouvoir monter pleinement en charge.

Enfin, je m’interroge sur plusieurs annonces faites par le Président de la République au début du mois de septembre dernier, qui ne trouvent pas à cette date de traduction budgétaire.

Pour que nous soyons à la hauteur des enjeux, des mesures emblématiques doivent être prises. Je pense au déplafonnement de la taxe sur les paris sportifs, au remboursement de l’activité physique adaptée (APA) prescrite pour certaines pathologies, à l’instauration d’une fiscalité incitative pour les entreprises ou encore à l’application du taux réduit de la TVA au-delà des seuls centres équestres.

Ces questions se posent d’autant plus que ce projet de loi de finances comportait des mesures d’exonération fiscale en faveur des fédérations sportives internationales, difficilement compréhensibles pour nombre de nos concitoyens.

Dans ce contexte, l’impulsion donnée par les Jeux risque de s’essouffler rapidement. C’est pourquoi la commission de la culture a émis un avis défavorable sur les crédits consacrés au sport dans le projet de loi de finances pour 2024. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST. – M. le président de la commission de la culture et M. Michel Savin applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. Yan Chantrel, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, la commission de la culture a examiné le programme 163 « Jeunesse et vie associative », doté pour 2024 de 901 millions d’euros.

L’augmentation de 64 millions d’euros que nous constatons s’explique en grande partie par la pérennisation des « colos apprenantes », financées jusqu’à présent par redéploiement de crédits. La création d’une enveloppe spécifique, de 40 millions d’euros, doit être saluée. Ces efforts doivent toutefois être poursuivis pour permettre à plus d’enfants de partir en colonies de vacances dans les années à venir.

À ce propos, les classes de découverte constituent le premier pas vers les départs en colonies de vacances. Je déplore le désintérêt du Gouvernement pour ces séjours qui contribuent pourtant grandement à l’émancipation des jeunes enfants. Il est impératif de donner aux établissements scolaires les moyens d’organiser davantage de voyages scolaires.

J’en viens aux nouveaux crédits du programme 163. La majorité d’entre eux demeurent, cette année encore, largement absorbés par le déploiement du SNU, avec 20 millions d’euros supplémentaires.

Pourtant, l’objectif de 64 000 jeunes participant au séjour de cohésion du SNU en 2023 a encore été revu à la baisse : seulement 40 000 jeunes y ont pris part cette année. Le coût par jeune du séjour, quant à lui, ne cesse d’augmenter, alors que la formation des encadrants n’est toujours pas à la hauteur.

Plus alarmant encore, les contours du dispositif ne sont toujours pas clairs : la mise en place de séjours sur le temps scolaire marque un changement de paradigme étonnant, qui ne fera que multiplier les difficultés déjà rencontrées, notamment en matière d’encadrement et d’hébergement.

Les efforts en faveur des politiques tournées vers la jeunesse sont également décevants : certes, le mentorat bénéficie d’un abondement bienvenu de 5 millions d’euros, mais il mériterait d’être mieux valorisé, notamment à l’école.

De manière générale, nombre de dispositifs existent pour accompagner les jeunes dans leurs parcours, mais ils sont mal articulés entre eux et manquent par conséquent de visibilité. Il est urgent de mettre en place une politique claire et ambitieuse en faveur de la jeunesse !

Enfin, j’aimerais évoquer la situation du secteur associatif. Le contexte inflationniste entrave grandement le fonctionnement des associations : 38 % d’entre elles ont dû adapter, voire annuler, leurs activités à cause de l’inflation en 2022 !

Fait plus notable encore, le secteur est confronté à une recomposition profonde des pratiques bénévoles, en raison de l’engagement croissant des moins de 35 ans, le repli continu des plus de 65 ans et le développement d’un bénévolat plus irrégulier. Il est essentiel de renforcer le soutien aux associations sur le terrain pour contrer les effets de la crise et encourager les formes d’engagements qui s’inscrivent dans la durée.

Comme vous pouvez le constater, mes chers collègues, la répartition des crédits supplémentaires en faveur de la jeunesse et de la vie associative pose question au regard des enjeux. C’est pourquoi la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a émis un avis défavorable à l’adoption des crédits du programme 163. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

La parole est à M. Ahmed Laouedj. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Ahmed Laouedj. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous sommes à l’aube d’un événement sportif majeur pour la France, les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Cet événement, qui va mettre notre pays sous les feux de la rampe, se traduit par une évolution logique et significative des moyens mis en œuvre.

En effet, dans le projet de loi de finances pour 2024, les moyens alloués aux politiques sportives au sein des crédits de cette mission sont en nette augmentation, de 7,3 %. C’est une véritable aubaine pour le sport français.

Reste que l’on peut se poser la question de l’héritage des Jeux dans le temps pour nos territoires. Si la construction d’infrastructures pour les jeux Olympiques est une bonne chose, il est essentiel que cet investissement se fasse ressentir sur le long terme et ne représente pas un poids pour les communes qui en hériteront.

Le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale a d’ailleurs souligné la nécessité d’associer le Parlement à une évaluation approfondie des différentes mesures relatives à l’héritage des Jeux.

Cet événement, de portée internationale, devrait également permettre de mener des travaux de réhabilitation d’équipements sportifs ou d’en créer de nouveaux dans nos territoires.

Toutefois, alors que le Gouvernement demande aux élus locaux de se mobiliser dans le cadre de la grande cause nationale que sera en 2024 la promotion de l’activité physique et sportive, ceux-ci réclament un renforcement des moyens, qu’ils jugent insuffisants, consacrés au cofinancement d’infrastructures souvent vieillissantes et insuffisantes pour la pratique du sport, d’autant que la crise de l’énergie, corrélée à des infrastructures vétustes, pèse lourdement sur les finances des clubs sportifs.

Au-delà des moyens consacrés aux Jeux dans le budget pour 2024, d’autres mesures ont été mises en place, dans l’ambition de développer le sport pour tous et d’augmenter la pratique d’une activité sportive. Toutefois, dans la réalité, nous constatons que les inégalités persistent entre les hommes et les femmes, entre les territoires et entre les classes sociales. Il est essentiel de continuer à lutter contre ces inégalités, qui sont de véritables enjeux de politique publique.

Nous nous interrogeons également sur l’élargissement du dispositif des trente minutes d’activité sportive quotidienne à l’école. Cette mesure, qui vise à lutter contre le surpoids et l’obésité, est incompatible dans la pratique avec les programmes scolaires, souvent très chargés.

On note enfin que les maisons sport-santé bénéficieront d’une enveloppe enrichie de 2 millions d’euros. Si ces structures assument une mission essentielle – promouvoir l’activité physique et sportive comme facteur de santé et de bien-être –, elles se heurtent dans la réalité à des difficultés principalement liées à leur modèle économique. Il convient d’augmenter davantage les crédits qui leur sont consacrés, ce qui permettrait notamment d’accroître les prescriptions médicales.

Les crédits du programme 163 « Jeunesse et vie associative » sont surtout consacrés au service civique, ainsi qu’à la montée en puissance du service national universel.

Le service civique, créé sur l’initiative de notre ancien collègue Yvon Collin, est un dispositif qui vise à renforcer la cohésion nationale et la mixité sociale. Nous nous réjouissons que l’esprit de la loi défendue en 2010 par le groupe du RDSE vive toujours. Les crédits alloués à ce dispositif témoignent d’une réelle ambition citoyenne, mais sa mise en lumière ne doit pas faire oublier la nécessité de se consacrer à d’autres chantiers en faveur de la jeunesse.

Nous devons par ailleurs soutenir les associations. Celles-ci connaissent actuellement des difficultés importantes : entre la crise financière et la diminution du nombre de bénévoles, elles peinent à survivre et les budgets sont largement insuffisants.

Nous devons défendre en la matière une politique volontariste, en renforçant le soutien aux associations.

La grande majorité des membres du RDSE votera en faveur des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Rambaud.

M. Didier Rambaud. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, le sport français est entré dans une période exceptionnelle. Après la Coupe du monde de rugby, un autre compte à rebours s’approche de son terme : dans 228 jours, 8 heures et 18 minutes, une fête unique au monde débutera dans notre pays, celle des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.

Nous devrons donc redoubler de vigilance durant ces derniers mois, afin de réussir le sprint final ! (M. le rapporteur général de la commission des finances sexclame.)

C’est dans cet esprit que nous votons, ce matin, le dernier exercice budgétaire de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » avant le début des Jeux. C’est pour le groupe RDPI l’occasion de saluer la pertinence de la répartition des crédits de la mission.

Si les Jeux représentent des défis logistiques colossaux, je crois qu’ils constituent avant tout une formidable occasion de promouvoir et de développer la pratique sportive en France.

Véritable « école de vie », comme le disait Aimé Jacquet, le sport sera la grande cause nationale de l’année 2024.

À grande cause moyens exceptionnels : pas moins de 10 millions d’euros supplémentaires seront déployés à ce titre, pour que notre nation puisse faire corps avec le sport.

S’il est créateur d’espoir et d’inclusion, le sport est également catalyseur de valeurs telles que le respect, la discipline, le partage ou encore le dépassement de soi.

C’est la raison pour laquelle nous devons renforcer la pratique sportive de notre jeunesse.

La reconduction du Pass’Sport en 2024 est donc une très bonne nouvelle. L’objectif est ambitieux : atteindre 2 millions de bénéficiaires en 2024. J’invite l’ensemble du mouvement sportif à mieux faire connaître ce dispositif auprès des familles.

Je salue également l’effort de l’État en faveur des équipements sportifs de proximité, avec la création d’une nouvelle enveloppe pour l’Agence nationale du sport, dotée de 100 millions d’euros en 2024, dans le cadre du plan « 5 000 terrains de sport – Génération 2024 ».

Cette enveloppe est bienvenue, en cohérence avec les trente minutes d’activité physique quotidienne souhaitées par le Président de la République, ainsi que les deux heures de sport supplémentaires pour les collégiens sur le temps périscolaire. Pour ces élèves, 14,6 millions d’euros seront déployés dans un objectif clair : passer de 700 à 2 000 collèges participants à la rentrée de septembre 2024.

Mes chers collègues, ce budget renforcera la pratique sportive dans notre pays ; je m’en réjouis.

Mais il doit également clôturer la préparation titanesque des Jeux. À ce titre, la Solideo bénéficiera de 104 millions d’euros pour finaliser les opérations d’aménagements et la livraison de l’ensemble des ouvrages olympiques, qu’il soit question des équipements ou des différents villages.

Par ailleurs, le Cojop bénéficiera de 30 millions d’euros au titre de la contribution de l’État. Depuis 2022, ce soutien avoisine au total les 80 millions d’euros.

Préparer les Jeux est indispensable, mais préparer leur héritage l’est tout autant. Il importe de ne pas passer à côté de ce défi. Comment financer la phase post-Jeux de sorte que ces derniers, aussitôt clôturés, ne sombrent pas dans les abysses du passé ?

Je ne doute pas, madame la ministre, de votre engagement sur ce sujet, aux côtés de Tony Estanguet.

Mes chers collègues, j’évoque rapidement les crédits dédiés à la jeunesse et à la vie associative.

Je salue les 20 millions d’euros supplémentaires alloués au service national universel. Ce dispositif doit prendre une autre envergure. L’objectif de faire participer 80 000 jeunes en 2024, ainsi que la mise en place de séjours sur le temps scolaire, avec des classes et des lycées labellisés, sont des initiatives positives, que je tenais à saluer, madame la secrétaire d’État.

Je conclurai mon intervention sur la grande cause nationale de cette année 2023, à savoir le mentorat. Je me réjouis de voir les financements du dispositif « 1 jeune, 1 mentor » augmenter de plus de 5 millions d’euros en 2024. C’est un signal très encourageant envoyé aux nombreux acteurs engagés pour l’égalité des chances, à l’image de la fédération Des territoires aux grandes écoles, qui accompagne des centaines de lycéennes et de lycéens des territoires les plus ruraux pour les aider dans leur orientation.

Esprit olympique, es-tu là ? Il me semble que la course au dénigrement bat son plein depuis quelques semaines, notamment parmi ceux qui n’ont d’objectifs que politiciens. N’en jetez plus ! Arrêtons de tirer contre notre camp et jouons collectif, a-t-on envie de crier avec Tony Estanguet !

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Kanner. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Patrick Kanner. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, faut-il voir dans ce budget une piscine à moitié pleine ou une piscine à moitié vide ? (Sourires.)

N’oublions pas que cette mission concerne quelque 30 millions de nos concitoyens, si l’on cumule les licenciés sportifs, les bénévoles associatifs et les nombreux jeunes concernés par les différents dispositifs que nous examinons. Nous verrons si le compte y est !

Le budget consacré au sport ne représentera toujours en 2024 que 0,18 % du budget de la Nation. On en oublierait presque que c’est une année d’accueil des JOP dans notre pays. Au vu de la faiblesse des moyens consacrés au sport, on oublierait presque que le Président de la République, qui voulait faire de la France une grande nation sportive, a fait de la promotion de l’activité sportive une grande cause nationale en 2024.

Certes, le Pass’Sport a été mis en place, mais, aujourd’hui, qui connaît vraiment ce dispositif ? Son manque de visibilité, mais aussi le périmètre resserré des associations sportives pouvant être mobilisées ont entraîné une sous-consommation des crédits qui lui étaient alloués cette année. Pour 2024, ces crédits sont réduits, alors même qu’on devrait les augmenter. Si l’on voulait réellement développer les pratiques sportives, on augmenterait cette aide, qui n’est que de 50 euros par bénéficiaire. Un reste à charge plus modique permettrait aux familles les plus modestes de se saisir plus avant de ce dispositif, à supposer qu’elles en aient connaissance.

Quant au sport à l’université, madame la ministre, c’est le plus grand angle mort de la politique sportive dans notre pays. Alors que les études supérieures pourraient être une période favorable pour les activités sportives, sous réserve d’une réelle volonté politique, la France reste bien en deçà du niveau des pays anglo-saxons, pour ne citer qu’eux.

Madame la ministre, le 7 avril dernier, vous avez signé, avec votre collègue Sylvie Retailleau une feuille de route sur le développement du sport universitaire. Où en est-on aujourd’hui ? Je vous serais reconnaissant de bien vouloir informer la Haute Assemblée de vos avancées en la matière.

Vous le savez, nous défendons année après année le déplafonnement des trois taxes fiscales servant à financer l’ANS, qui a été évoqué par M. Lozach. Dans le même état d’esprit, comme les recettes liées aux paris sportifs en ligne sont en constante augmentation et que les taxes sur ces recettes servent à financer l’ANS, il nous paraît incompréhensible de plafonner les montants alloués à cette agence et, ainsi, de la priver des recettes supplémentaires tirées de l’explosion des paris sportifs en ligne. C’est d’autant plus incompréhensible que la dotation de l’ANS n’est même pas augmentée à hauteur de l’inflation, a fortiori l’année des Jeux.

Madame la ministre, vous vous étiez engagée il y a quelques mois, ici même, à mener une réflexion pour faire bénéficier l’ANS et le secteur sportif d’une partie du dynamisme des paris sportifs en ligne. Où en est-on aujourd’hui ?

Concernant la jeunesse et la vie associative, je constate que le SNU voit son budget augmenter régulièrement depuis sa mise en place, alors que les crédits alloués au service civique sont en chute libre, puisque 200 millions d’euros lui avaient été alloués au sein du plan de relance. Il conviendrait plutôt, selon nous, de développer, de renforcer et de mieux valoriser le service civique ; c’est d’ailleurs l’objet d’une proposition de loi que j’ai déposée au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Dans ces conditions, pourquoi vous obstiner sur le SNU, qui, depuis sa création en 2019, n’a concerné qu’un peu plus de 100 000 jeunes ? Je ne dis pas qu’il faut le supprimer, mais il convient à tout le moins d’évaluer sa réelle opportunité politique pour notre pays et notre jeunesse.

Les crédits destinés au développement de la vie associative servent avant tout à soutenir le bénévolat. Ils sont certes en augmentation, madame la secrétaire d’État, mais on ne parvient pas à rattraper le coup de rabot que vous avez décidé l’année dernière. Je vous rappelle que la baisse de 10,6 % de ce budget a entraîné une division par deux de la subvention du compte d’engagement citoyen.

Qui plus est, à les examiner dans le détail, la majeure partie des hausses iront, non pas à de véritables actions à destination des associations, mais au développement de plateformes numériques. Le tissu associatif est pourtant l’un des piliers de notre cohésion sociale. Les plateformes numériques peuvent répondre à beaucoup de choses, mais elles ne sont pas créatrices de liens ; en outre, elles ne sont pas adaptées à toute notre population. La dématérialisation ne peut être la réponse à tout, quand, dans notre pays, l’illectronisme concerne toujours une partie de la population, notamment parmi les seniors, qui sont pourvoyeurs de nombreuses heures de bénévolat.

La baisse de 7 millions d’euros des sommes versées au fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep) plombera davantage encore l’emploi associatif, d’autant que les 2 000 postes Fonjep créés dans le cadre du plan de relance arrivent à leur terme. Nous regrettons qu’aucune disposition ne soit prévue pour prolonger l’effort, alors que ces emplois sont indispensables pour des centaines de petites associations.

Après les suppressions des contrats aidés et de la réserve parlementaire, le secteur subit une baisse de moyens considérable, non compensée par le FDVA, qui ne permet de satisfaire que 25 % des demandes. Le compte d’engagement citoyen (CEC), mis en place en 2016, a par exemple vu sa subvention divisée par plus de deux en 2023.

La hausse du budget de cette mission étant largement orientée vers des actions de communication ou vers le SNU, et ce au détriment du soutien au tissu associatif et aux jeunes des quartiers difficiles, le groupe SER ne peut être favorable à la ventilation de ces crédits.

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, en conclusion, je reprendrai les mots de Marie-George Buffet, ancienne ministre des sports, dans la presse, voilà quelques jours : « Le sport français est malade et fragilisé. » Ce constat pourrait aussi valoir pour la vie associative.

À la veille des jeux Olympiques et Paralympiques, cette situation n’est pas acceptable pour le groupe SER, que j’ai l’honneur de présider. En l’occurrence, mesdames les ministres, nous voyons la piscine à moitié vide plutôt qu’à moitié pleine. (M. Michel Savin rit.) Nous voterons contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)