Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Amendement rédactionnel.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Avis favorable.

M. le président. L’amendement n° 1194, présenté par MM. Ouizille et Jomier, Mmes Poumirol, Canalès et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane et Michau, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

peut procéder

par le mot :

procède

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à rendre automatique l’annulation par l’assurance maladie des cotisations sociales prises en charge au bénéfice d’un professionnel de santé reconnu coupable de faits à caractère frauduleux.

En effet, tel qu’il est rédigé, l’article donne à penser que l’assurance maladie peut choisir ou non d’annuler les montants de cotisations sociales pris en charge.

Un professionnel de santé dont la fraude à la sécurité sociale est avérée doit être durement sanctionné. L’annulation des cotisations sociales prises en charge doit donc être automatique.

Par ailleurs, un amendement au dispositif identique avait été adopté par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, mais il n’a pas été retenu dans le texte par le Gouvernement à l’issue du recours à l’article 49.3 de la Constitution et ne figure donc pas dans la version transmise au Sénat.

Je vous invite donc à être nombreux à voter cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 692 rectifié, présenté par Mme Gruny, MM. Milon et Paccaud, Mmes Belrhiti, Petrus, Micouleau et Jacques, MM. Panunzi, Sol, Genet et Belin, Mmes Aeschlimann et Canayer, M. Piednoir, Mme Joseph, MM. Brisson, Cuypers, Klinger, Cadec et Chatillon, Mmes Dumont et Demas, MM. Lefèvre et Darnaud, Mme Ventalon, M. Sido, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Pellevat, Saury et Bouchet, Mme Primas, M. Burgoa, Mme Estrosi Sassone, MM. J.B. Blanc, Sautarel, Gremillet et Reichardt et Mme Lassarade, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

procéder

insérer les mots :

, après respect de la procédure contradictoire,

La parole est à Mme Pascale Gruny.

Mme Pascale Gruny. Cet amendement vise de nouveau à faire respecter la procédure contradictoire. Certes, cela semble normal, mais comme les recours ne sont souvent pas faits correctement, les professionnels ont parfois beaucoup de mal à obtenir que les textes que nous votons soient appliqués.

Il y a d’un côté la fraude, contre laquelle nous sommes d’accord qu’il faut lutter, mais de l’autre, il faut aussi considérer la bonne ou la mauvaise foi des requérants, ainsi que les difficultés d’application de textes de plus en plus compliqués.

M. le président. L’amendement n° 1097 rectifié, présenté par Mme Aeschlimann, M. Sautarel, Mme Micouleau, MM. Khalifé et Paccaud, Mmes Belrhiti, Petrus, Gosselin, Jacques et Lassarade, MM. Tabarot et Cadec, Mme Canayer et MM. Genet, H. Leroy, Longeot et Panunzi, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

dans des conditions définies par les conventions mentionnées à l’article L. 162-14-1

La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Cet amendement vise à redonner toute sa force au dialogue social, en replaçant dans le champ des négociations conventionnelles, en plus des questions relatives au financement des cotisations dues par les professionnels, celles qui concernent les modalités de sanction éventuelles des professionnels.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 1194 vise, d’une part, à rendre automatique l’annulation de la prise en charge des cotisations des professionnels de santé par l’assurance maladie en cas de fraude, et, d’autre part, à prévoir l’application d’une pénalité financière sur les sommes recouvrées à ce titre.

Il me semblerait plus judicieux de remettre aux directeurs des organismes locaux d’assurance maladie le soin d’apprécier l’opportunité d’une telle sanction, en fonction de la nature des faits en cause et de leurs conséquences pour l’assurance maladie. L’avis sera donc défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 692 rectifié vise à préciser que, en cas de fraude, l’annulation de la prise en charge des cotisations d’un professionnel de santé par l’assurance maladie ne peut être mise en œuvre que dans le respect du contradictoire.

Or, lorsqu’il est convaincu d’avoir eu recours à des pratiques frauduleuses, le professionnel de santé est mis en mesure de produire ses observations et de contester le caractère indu des sommes qu’il a perçues.

En outre, lorsqu’une mise en demeure de payer reste sans effet et que le directeur de l’organisme d’assurance maladie délivre une contrainte, le professionnel dispose de la faculté de s’y opposer devant la juridiction judiciaire.

Ce processus garantit donc le respect du contradictoire. J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 692 rectifié.

L’amendement n° 1097 rectifié vise à prévoir la détermination par les conventions médicales des conditions d’annulation de la prise en charge des cotisations des professionnels de santé par l’assurance maladie en cas de fraude.

Or l’article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale interdit aux directeurs des organismes d’assurance maladie de recourir concurremment à une pénalité financière et aux procédures conventionnelles visant à sanctionner les mêmes faits.

En ne permettant d’annuler la prise en charge des cotisations du professionnel de santé qu’au terme d’une procédure conventionnelle, la mesure proposée induirait des délais relativement longs. De fait, la sanction serait largement inapplicable, dans la mesure où la loi prévoit que cette dernière résulte notamment de l’application d’une pénalité financière par l’organisme d’assurance maladie. La commission émet donc, sur cet amendement également, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Un débat a eu lieu à l’Assemblée nationale sur un amendement identique à l’amendement n° 1194.

Je partage l’objectif de renforcer les sanctions à disposition, mais tel qu’il est rédigé, cet amendement vise à rendre la sanction automatique. En ne laissant aucune marge d’appréciation, le dispositif court un risque de censure en raison du non-respect du principe de proportionnalité des sanctions administratives.

Nous n’avions pas souhaité retenir ce dispositif à l’Assemblée nationale, car il est extrêmement fragile juridiquement, même si nous partageons l’objectif de renforcer les sanctions à destination notamment des professionnels.

L’amendement n° 692 rectifié de Mme Gruny tend à imposer une procédure contradictoire préalable à l’annulation de la participation de l’assurance maladie à la prise en charge des cotisations des professionnels de santé : il est satisfait.

Enfin, madame Aeschlimann, j’émets un avis défavorable sur votre amendement tendant à renvoyer aux conventions les modalités d’application de l’annulation de la participation de l’assurance maladie, et ce pour deux raisons.

Tout d’abord, compte tenu du grand nombre de conventions qui existent, il faudrait prévoir des mécanismes différents pour chacune d’elles. Ensuite, les règles de récupération des indus sont fixées par la loi.

Je demande donc le retrait de ces deux derniers amendements ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 207.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1194.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Madame Gruny, l’amendement n° 692 rectifié est-il maintenu ?

Mme Pascale Gruny. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 692 rectifié est retiré.

Madame Aeschlimann, l’amendement n° 1097 rectifié est-il maintenu ?

Mme Marie-Do Aeschlimann. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 1097 rectifié est retiré.

L’amendement n° 1170, présenté par M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane, Ouizille et Michau, Mmes Bonnefoy, Harribey et G. Jourda, MM. Temal, Durain, Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le professionnel ne fait l’objet d’aucune sanction prononcée en application de l’article L. 145-2 ou d’une condamnation pénale dans les cas mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 114-16-2, il dispose d’un délai dont les modalités seront fixées par décret, pour contester les faits dont il est accusé auprès de l’organisme d’assurance maladie.

La parole est à M. Bernard Jomier.

M. Bernard Jomier. Nous pensons, comme tend à le prévoir l’amendement adopté par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, que la sanction doit être automatique, ce qui ne signifie pas qu’elle n’est pas contestable.

À la suite d’un manquement, on peut se voir appliquer une sanction, mais une procédure de contestation de la sanction existe.

Mme Raymonde Poncet Monge. Comme en cas de suppression du RSA !

M. Bernard Jomier. Nous avons bien compris la logique de la commission et du Gouvernement.

Mon amendement étant similaire à celui qu’a présenté Mme Gruny, je le retire.

M. le président. L’amendement n° 1170 est retiré.

L’amendement n° 208, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer les mots :

pour les versements indus de prestations

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 208.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 870, présenté par Mme Bonfanti-Dossat, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque des faits pouvant donner lieu aux pénalités financières, aux sanctions et aux condamnations pénales mentionnées au premier alinéa sont portés à la connaissance de l’organisme d’assurance maladie, le directeur de ce dernier en informe le président du conseil départemental ou régional de l’ordre dont relève ce professionnel de santé. »

La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat.

Mme Christine Bonfanti-Dossat. Le présent amendement tend à prévoir que chaque président de conseil départemental ou régional de l’ordre est informé par la caisse d’assurance maladie des actes de fraude commis par un professionnel de santé inscrit au tableau de celui-ci.

La délivrance d’une telle information permettrait notamment d’introduire, devant la chambre disciplinaire de première instance du Conseil national de l’ordre, une action à l’encontre du professionnel mis en cause.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Chère collègue, vous prévoyez que l’assurance maladie communique aux ordres professionnels de santé les informations relatives aux sanctions.

En l’occurrence, le code de la sécurité sociale fait déjà obligation aux directeurs des organismes locaux d’assurance maladie de « communiquer à l’ordre compétent les informations qu’ils ont recueillies dans le cadre de leur activité et qui sont susceptibles de constituer un manquement à la déontologie de la part d’un professionnel de santé inscrit à un ordre professionnel ».

Les ordres, qui veillent au respect de la déontologie, doivent être informés des pratiques frauduleuses, ainsi que des manquements à la déontologie.

L’amendement étant déjà satisfait, la commission y est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. L’amendement est en effet satisfait, dans la mesure où le code de la sécurité sociale prévoit déjà que les directeurs de caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) transmettent aux ordres professionnels les informations relatives aux manquements à la déontologie des professionnels de santé.

À l’Assemblée nationale, les députés ont proposé d’expliciter la notion de « manquement à la déontologie » afin de préciser qu’elle recouvre notamment les cas de fraude.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Madame Bonfanti-Dossat, l’amendement n° 870 est-il maintenu ?

Mme Christine Bonfanti-Dossat. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 870 est retiré.

Je mets aux voix l’article 7, modifié.

(Larticle 7 est adopté.)

Après l’article 7

Article 7
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Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 805 rectifié et n° 889

M. le président. L’amendement n° 14 rectifié ter n’est pas soutenu.

L’amendement n° 556 rectifié, présenté par MM. Durox, Szczurek et Hochart, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 133-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales peut prendre des mesures conservatoires préventives lorsque des profils de fraudeurs sont détectés. »

La parole est à M. Christopher Szczurek.

M. Christopher Szczurek. Je le retire, monsieur le président.

Article additionnel après l'article 7 - Amendement n° 556 rectifié
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Article additionnel après l'article 7 - Amendement n° 679

M. le président. L’amendement n° 556 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 805 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

L’amendement n° 889 est présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. L’article L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 133-4-2. – En cas de nouvelle constatation pour travail dissimulé dans les cinq ans à compter de la notification d’une première constatation pour travail dissimulé ayant donné lieu à redressement auprès de la même personne morale ou physique, la majoration est portée à 90 % lorsque la majoration de redressement prononcée lors de la constatation de la première infraction était de 25 % et à 120 % lorsque la majoration de redressement prononcée lors de la constatation de la première infraction était de 40 %. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 805 rectifié.

Mme Raymonde Poncet Monge. Nous proposons de majorer le redressement en cas de nouvelle constatation de travail dissimulé dans les cinq ans suivant la notification d’une première constatation ayant donné lieu à un redressement.

Le Haut Conseil du financement de la protection sociale estime que le montant de la fraude patronale aux cotisations sociales s’élevait entre 10 milliards et 11,2 milliards d’euros en 2022. Cette somme représente plusieurs fois le coût de la fraude aux prestations sociales versées par les caisses d’allocations familiales, qui, selon une estimation de la Caisse nationale des allocations familiales datant de 2019, serait compris entre 1 et 2,3 milliards d’euros, c’est-à-dire bien moins que le montant du non-recours.

En février 2020, la Cour des comptes pointait le laxisme des pouvoirs publics envers la fraude aux cotisations patronales.

Ce même laxisme ne caractérise pas la politique menée à destination des bénéficiaires de certaines allocations, notamment les allocataires du RSA, soumis par le projet de loi pour le plein emploi à des sanctions allant jusqu’à la suspension et la suppression du RSA – à eux de déposer des recours…

De la réforme de l’assurance chômage à celle des retraites en passant par la réforme du RSA, les projets de loi successifs n’ont de cesse d’accroître les sanctions contre les travailleurs ou les allocataires, sans jamais questionner la responsabilité des employeurs.

Par conséquent, cet amendement tend à proposer, de manière plus ferme et moins laxiste, d’augmenter les sanctions contre les fraudes aux cotisations patronales, qui privent les salariés de droits.

M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l’amendement n° 889.

Mme Silvana Silvani. Le 12 décembre prochain, un chef d’entreprise de l’Essonne sera jugé pour avoir soustrait 1,4 million d’euros à l’Urssaf. Ce gérant d’un groupe de BTP avait embauché 193 ouvriers sans les déclarer.

La lutte contre le travail dissimulé devrait être la priorité du Gouvernement, d’autant que le montant total des fraudes des entreprises est estimé entre 6 et 8 milliards d’euros.

Le Conseil constitutionnel a même reconnu que la lutte contre la fraude revêt le caractère d’une exigence constitutionnelle. Elle concerne désormais de grands groupes, comme Ryanair, condamné à payer près de 4,5 millions d’euros à l’Urssaf.

Mais la fraude au travail dissimulé concerne également les petites et moyennes entreprises, comme ces soixante-cinq entreprises du Lot qui ont dû s’acquitter de plus de 259 000 euros de redressements à l’Urssaf en 2023.

Face à l’ampleur de la fraude patronale, le Gouvernement doit prendre les décisions qui s’imposent. Pour cette raison, nous proposons par cet amendement d’augmenter les sanctions en cas de récidive, car cette fraude porte atteinte à notre modèle social.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ces deux amendements visent à augmenter encore les sanctions existantes, qui sont pourtant déjà importantes et dissuasives.

À ces sanctions s’ajoute l’annulation des réductions et exonérations de cotisations sociales dont bénéficie l’auteur de l’infraction, ainsi que des sanctions pénales et administratives. Il me semble qu’il faut s’arrêter, à un moment…

Par ailleurs, votre amendement vise à modifier l’article L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale. C’est une erreur, car son adoption aurait pour effet d’écraser les dispositions prévoyant l’annulation des réductions et exonérations de cotisations dont bénéficie l’employeur en cas de travail dissimulé.

J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques en raison, d’une part, du caractère dissuasif des amendes et des annulations de réductions de cotisations déjà existantes ; d’autre part, de l’argument rédactionnel que je viens d’invoquer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. La lutte contre la fraude sociale est une priorité du Gouvernement. Ces amendements identiques semblent contre-productifs, car leur adoption aurait pour effet de supprimer l’annulation des exonérations de prélèvements sociaux en cas de fraude. Or cette annulation représente une sanction financière importante – en 2022, elle s’élevait à 27 millions d’euros.

Par ailleurs, l’Urssaf peut prononcer des majorations complémentaires de redressement, selon un mécanisme identique à celui que vous proposez.

En définitive, vos amendements auraient pour effet de restreindre le nombre de sanctions applicables en cas de fraude aux cotisations et aux contributions sociales. Il me semble que c’est contraire à l’objectif que vous cherchez à atteindre.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le ministre, en mai dernier, votre prédécesseur M. Attal avait annoncé un certain nombre de dispositifs de lutte contre la fraude, en particulier l’augmentation des contrôles et des moyens préventifs pour lutter contre la fraude aux cotisations. Il s’était rendu en Belgique pour visiter la Banque Carrefour de la sécurité sociale, qui propose des dispositifs de détection précoce des fraudes.

Où en sont ces dispositifs, qui nous semblaient alors très positifs ?

M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.

Mme Silvana Silvani. Loin de moi l’idée de vous manquer de respect, madame la rapporteure générale, mais il m’est tout de même difficile d’entendre qu’il faut savoir s’arrêter et ne pas aller trop loin en termes de sanctions.

Si l’on veut être dissuasif et lutter contre la fraude, comme on sait le faire dans d’autres situations, on peut le faire.

Monsieur le ministre, vous ne vous êtes pas exprimé sur le dispositif de ces amendements, qui visent simplement à majorer les sanctions. Le calcul est relativement simple…

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Madame Goulet, vous avez raison de rappeler l’ambition de mon prédécesseur et de m’interroger sur les suites données au plan de lutte contre la fraude sociale qu’il avait annoncé.

Ce plan avait notamment une traduction très concrète : l’article 6 du PLFSS, que vous avez supprimé il y a quelques minutes. Il permettait de lutter contre la non-déclaration et le non-paiement des cotisations sur les plateformes, qui se font au détriment, d’une part, des travailleurs de ces plateformes, qui n’ont pas de droits, et, d’autre part, de la sécurité sociale.

Je regrette ainsi que votre assemblée ait supprimé l’une des pièces importantes du plan de lutte contre la fraude sociale que vous appelez de vos vœux.

M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Mme Monique Lubin. Monsieur le ministre, vous pouvez développer ce genre d’arguments, mais nous vous répondons qu’à vouloir institutionnaliser de la sorte de travail des plateformes, vous le rendez parfaitement normal dans notre société.

Ce que nous voulons, c’est que la directive proposée à l’échelon européen soit appliquée.

Ce que nous voulons, c’est que ces plateformes n’existent plus, en tout cas plus dans la forme dans laquelle elles existent, et qu’elles arrêtent de traiter les salariés comme des sous-hommes. (M. Thomas Cazenave proteste.)

En effet, nous assumons d’avoir supprimé l’article 6 qui pouvait apparaître comme une avancée, car nous voulons que, en miroir et en contrepartie, vous alliez bien plus loin : en 2023, on ne peut plus laisser des gens être traités de la sorte.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 805 rectifié et 889.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 805 rectifié et n° 889
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Article 7 bis (nouveau)

M. le président. L’amendement n° 679, présenté par Mme Romagny, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de fraude avérée, le bénéfice des aides prévues au présent article est suspendu et les sommes versées durant la fraude sont recouvrées. Le recouvrement est assis sur les revenus professionnels servant de base au calcul de la cotisation personnelle d’allocations familiales. Elle est recouvrée par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations personnelles d’allocations familiales. Les niveaux de cette contribution, leurs modalités d’application, de modulation ou de répartition entre régimes sont définis dans la ou les conventions mentionnées au présent article. »

La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny.

Mme Anne-Sophie Romagny. Cet amendement vise lui aussi à lutter contre les fraudes, leitmotiv de nos conversations – c’est dire à quel point le problème est grand.

Cet amendement vise à sanctionner les professionnels de santé qui fraudent les prestations de l’assurance maladie. Ceux-ci ayant abusé du système social et porté atteinte à l’équilibre des finances publiques, nous demandons de suspendre les aides publiques qui leur sont attribuées et de recouvrer les sommes leur ayant été indûment versées.

Il n’est pas acceptable de continuer de verser de l’argent public aux fraudeurs à l’assurance maladie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le code de la sécurité sociale prévoit déjà que la participation au financement des cotisations peut être partiellement ou totalement suspendue pour les professionnels de santé ne respectant pas tout ou partie des obligations prévues par la convention.

En outre, l’article 7 du présent PLFSS permettra d’annuler la prise en charge accordée aux professionnels sanctionnés pour fraude.

Ainsi, cet amendement étant satisfait, la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. J’apporterai deux éléments de réponse à votre amendement, madame la sénatrice.

D’une part, la loi permet déjà aux caisses primaires d’assurance maladie de radier un professionnel de santé de sa convention en cas de violation des engagements prévus. Cela entraîne de facto la suspension de tous les avantages et aides prévus.

D’autre part, votre amendement, tel qu’il est rédigé, présente, comme le précédent, un risque sérieux de censure du Conseil constitutionnel en raison de son caractère automatique.

Pour ces deux raisons, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Les professionnels de santé qui fraudent le plus sont, on le sait, les infirmières. Le fait, par exemple de coter dix pansements non réalisés constitue une fraude, sans doute, mais il doit y avoir une proportionnalité de la sanction. Il n’y a pas que l’automaticité du dispositif qui pose problème, il y a aussi la disproportion entre la fraude commise et la sanction proposée.

Ainsi, notre infirmière qui a déclaré dix pansements qu’elle n’a pas réalisés a commis une fraude, à n’en pas douter ; elle doit être sanctionnée pour cela, écoper d’une pénalité et restituer les sommes indues, mais ensuite, stop ! Nous sommes là dans une forme d’escalade, qui ne serait pas juste. Il y a des fraudeurs qui fraudent massivement, à une échelle industrielle, et puis il y a les autres, ceux qui fraudent intentionnellement et ceux qui commettent simplement des erreurs.

Nous ne voterons donc pas cet amendement.