M. le président. Madame Lubin, l’amendement n° 15 rectifié est-il maintenu ?

Mme Monique Lubin. Non, je le retire, monsieur le président.

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 15 rectifié
Dossier législatif : projet de loi portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 81 rectifié

M. le président. L’amendement n° 15 rectifié est retiré.

L’amendement n° 26 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Il est constitué un Conseil non permanent d’orientation de l’assurance chômage. Ce Conseil est indépendant. Il a pour objectif de récolter des données sur l’assurance chômage, le public qu’elle indemnise, ses recettes, ses dépenses, ses perspectives financières, de produire des préconisations améliorant l’assurance chômage. Il fournit un rapport annuel appuyé sur des données publiques de manière à éclairer le débat public.

II. – Ce Conseil est composé majoritairement de représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel. Il est également composé de dix députés et dix sénateurs désignés respectivement par le Président de l’Assemblée nationale et le Président du Sénat, issus de chaque groupe parlementaire, de manière à assurer une représentation équilibrée des groupes politiques. Les ministères en charge de la production des données mentionnées au I du présent article sont également représentés. Un décret pris après l’avis de l’union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce précise la composition du Conseil.

III. – Pour mener à bien les missions mentionnées au I du présent article, le Conseil peut mener toutes auditions qu’il juge utiles. Tous les renseignements et documents d’ordre financier et administratif qu’il demande, y compris tout rapport établi par les organismes et services chargés du contrôle de l’administration, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité extérieure de l’État et du respect du secret de l’instruction et du secret médical, doivent lui être fournis.

IV. – Le Conseil est dépourvu de la personnalité juridique.

V. – Les membres du Conseil ne perçoivent aucune forme de rémunération distincte.

VI. – Le Conseil ne dispose d’aucun moyen public de fonctionnement.

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à créer un conseil d’orientation de l’assurance chômage.

Le débat public sur la réforme qui fait l’objet du présent projet de loi est biaisé par le manque de données publiques sur l’assurance chômage : public indemnisé, perspectives financières, impact des précédentes réformes…

Cela conduit à considérer comme efficaces pour inciter le demandeur d’emploi à trouver un emploi des propositions infirmées par la recherche économique, comme la dégressivité de l’allocation, la baisse de ses montants ou la hausse de la durée d’indemnisation.

L’abondance d’amendements anti-indemnisation, alors même que seulement 40 % des demandeurs d’emploi en bénéficient en est une illustration supplémentaire.

Nous proposons donc la création d’un conseil d’orientation de l’assurance chômage, qui pourrait prendre modèle sur le Conseil d’orientation des retraites. Instance indépendante du pouvoir exécutif, il fournirait un rapport annuel appuyé sur des données publiques, de manière à éclairer le débat.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à créer un conseil non permanent d’orientation de l’assurance chômage. Or le recueil et le traitement de données sont déjà assurés par la Dares et par l’Unédic ; il nous semble donc superfétatoire de créer une nouvelle instance à cette fin.

En outre, les concertations et les négociations en matière d’assurance chômage ont vocation à se tenir dans le cadre du paritarisme, et le Parlement peut en être informé grâce à ses prérogatives d’évaluation et de contrôle.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. L’idée défendue dans cet amendement est intéressante. En effet, un avis d’expert peut être utile pour la mesure des indicateurs économiques, par exemple dans le cas de la contracyclicité, que vous contestez, pour la mise en œuvre de modulations ou pour l’évaluation des perspectives financières de l’Unédic.

En revanche, cela relève de la négociation entre les partenaires sociaux sur la gouvernance de l’assurance chômage, que j’ai annoncée pour le premier semestre 2023.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Madame Lubin, l’amendement n° 26 rectifié est-il maintenu ?

Mme Monique Lubin. L’idée est intéressante, donc je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 26 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 26 rectifié
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Article 1er bis AA (nouveau) (début)

M. le président. L’amendement n° 81 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac, Cabanel, Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant les mesures qui permettraient de lutter contre le non-recours aux droits en matière d’assurance chômage.

La parole est à M. Éric Gold.

M. Éric Gold. La loi du 5 septembre 2018 prévoit un rapport sur les conséquences du non-recours aux droits d’assurance chômage. L’étude réalisée par la Dares visait à apporter un éclairage quantitatif à ce phénomène, à caractériser la population concernée et à proposer des pistes d’explication.

Il en ressort que l’estimation du taux de non-recours des personnes non inscrites à Pôle emploi dans l’année qui suit leur fin de contrat varie entre 25 % et 42 %, selon le champ et les hypothèses retenus. Cela représente entre 390 000 et 690 000 personnes environ, essentiellement des salariés en contrat court.

Ces chiffres sont édifiants ; aussi, il nous semble important que le Gouvernement propose des pistes d’amélioration permettant d’assurer un meilleur recours au droit en matière d’assurance chômage.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cette étude nous est parvenue tardivement, lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, mais elle est intéressante. Il est vrai que nous manquons de certaines données sur l’assurance chômage, alors que nous devons dresser le bilan de certaines mesures et disposer de chiffres pour éclairer les débats.

Pour autant, nous avons déjà maintenu deux demandes de rapport dans ce texte, aux articles 6 et 7.

Toutes les informations relatives au non-recours sont intéressantes, monsieur le ministre, communiquez-nous des chiffres, nous avons besoin d’informations sur la gestion de l’Unédic et, au-delà, sur la façon dont le marché de l’emploi fonctionne dans notre pays.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Ce rapport a, certes, été rendu avec retard : il a été transmis au Parlement le 29 septembre dernier. Pour autant, il constitue une bonne base de travail.

Il présente une conclusion rassurante, même si elle n’est pas satisfaisante : parmi les causes de non-recours, il permet de repérer la trace de la volonté des personnes concernées, par exemple dans le cas d’un demandeur d’emploi qui, terminant un contrat, ne s’inscrit pas, car il sait qu’une autre période d’activité va s’ouvrir dans un délai court. En outre, ce travail indique que le taux de non-recours en matière de chômage est à peu près identique à celui que l’on a identifié pour d’autres prestations sociales. Les taux ne sont pas satisfaisants, mais ils ne sont pas moins bons que dans d’autres secteurs.

Nous devons travailler encore sur l’information et sur l’accès aux droits, mais nous n’avons pas besoin d’un second rapport sur le même sujet. Je demande donc le retrait de cet amendement.

M. le président. Monsieur Gold, l’amendement n° 81 rectifié est-il maintenu ?

M. Éric Gold. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 81 rectifié est retiré.

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 81 rectifié
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Article 1er bis AA (nouveau) (interruption de la discussion)

Article 1er bis AA (nouveau)

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 1243-11, il est inséré un article L. 1243-11- 1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1243-11- 1. – Lorsque l’employeur propose que la relation contractuelle de travail se poursuive après l’échéance du terme du contrat à durée déterminée sous la forme d’un contrat à durée indéterminée pour occuper le même emploi, ou un emploi similaire, assorti d’une rémunération au moins équivalente, de la même classification et sans changement du lieu de travail, il notifie cette proposition par écrit au salarié et transmet cette notification à Pôle emploi. » ;

2° La sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre IV de la cinquième partie est ainsi modifiée :

a) Le I de l’article L. 5422-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« S’il est constaté qu’un demandeur d’emploi a reçu à trois reprises, au cours des douze mois précédents, une proposition de contrat de travail à durée indéterminée dans les conditions prévues à l’article L. 1243-11-1, le bénéfice de l’allocation d’assurance ne peut lui être ouvert au titre du 1° du présent I que s’il a été employé dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée au cours de la même période. » ;

b) Il est ajouté un article L. 5422-2-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 5422-2-2. – Les conditions d’activité antérieure pour l’ouverture ou le rechargement des droits et la durée des droits à l’allocation d’assurance peuvent être modulées en tenant compte d’indicateurs conjoncturels sur l’emploi et le fonctionnement du marché du travail. »

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 33 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 70 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 79 rectifié est présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel et M. Roux.

L’amendement n° 103 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° 33 rectifié.

M. Yan Chantrel. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain est fermement opposé à la philosophie de culpabilisation des chômeurs portée par ce projet de loi. Nous ne souscrivons donc pas à l’aggravation de cette logique que constitue la suppression, introduite en commission, de l’indemnisation chômage après trois offres d’emploi en CDI refusées à l’issue d’un CDD.

Il en est de même avec le principe de contracyclicité, inscrit sur l’initiative des rapporteurs dans le code du travail et qui vise à faire varier à la baisse ou à la hausse les indemnités des chômeurs en fonction de la situation économique du pays.

D’où cet amendement de suppression de l’article.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 70.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement vise à supprimer cet article, qui prévoit que, en cas de refus à trois reprises d’un CDI, un salarié en CDD ne pourra plus prétendre à l’indemnisation du chômage.

Cette mesure nous semble absurde et, en tout cas, injuste. Vous êtes prompts à nous expliquer que les chefs d’entreprise ont besoin des CDD et vous nous avez vanté la précarité avec tellement d’excès que l’on en voit maintenant les effets négatifs. En revanche, le salarié serait obligé d’accepter un CDI !

Si je devais choisir, je choisirais moi-même le CDI, mais au nom de quoi imposerions-nous cela aux salariés qui cotisent, alors que les CDD existent ?

Ensuite, monsieur le ministre, vous avez avancé, de mémoire, le chiffre de 40 % d’augmentation des créations de CDI, mais vous comparez l’année 2022 à l’année 2021. Or il serait plus juste de prendre comme base février 2020, dernier mois avant la pandémie. Ainsi, l’augmentation du nombre de CDI n’est que de 12 %. C’est mieux que rien, mais c’est insuffisant pour apporter la preuve d’une efficacité du dispositif de bonus-malus.

M. le président. La parole est à M. Éric Gold, pour présenter l’amendement n° 79 rectifié.

M. Éric Gold. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er bis AA, introduit par la commission des affaires sociales et qui prévoit de refuser l’indemnisation du chômage au salarié qui décline à trois reprises une proposition de CDI à l’issue d’un CDD.

Ce dispositif nous semble ne contenir aucun garde-fou permettant de vérifier si le refus du salarié est justifié ou non.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 103.

Mme Raymonde Poncet Monge. Ce florilège d’inventivité pour traquer les chômeurs qui ne voudraient pas retourner au travail va vraiment à contre-courant des phénomènes sociaux récents, comme la vague de démissions qui a suivi le confinement.

Ces épisodes révèlent l’aspiration des Français à des emplois de qualité et leur refus d’un travail dépourvu de sens, mal rémunéré, aux conditions dégradées.

Cet article ne fait que prolonger la politique du soupçon permanent envers des demandeurs d’emploi, qui seraient allergiques au travail et accros aux prestations, et qui refuseraient délibérément des offres d’emploi pour se complaire dans le chômage. Ils vivraient donc aux dépens des travailleurs, dont ils ont pourtant fait partie, puisqu’ils ont ouvert les droits qu’ils gaspilleraient ainsi.

M. Vincent Segouin. Oh là là !

Mme Raymonde Poncet Monge. Ce récit a une fonction essentiellement idéologique. Il progresse malheureusement, à force d’être martelé, ce qui n’en fait pas pour autant une vérité. On peut toutefois regretter de le voir parfois complaisamment repris.

Selon l’OFCE – comment faut-il vous le dire ? – 8 % seulement des allocataires de l’assurance chômage ne rechercheraient pas vraiment d’emploi. Or, selon Pôle emploi, ces personnes sont le plus souvent déjà rattrapées par les contrôles et par les radiations pour non-recherche d’emploi ou refus de ces offres prétendument raisonnables.

De plus, la temporalité de douze mois semble ignorer que, selon l’Unédic, sept allocataires sur dix sont indemnisés durant moins d’un an.

Cet article a donc pour seul but l’affichage politique et idéologique !

M. Vincent Segouin. Oh là là !

Mme Raymonde Poncet Monge. C’est nous qui devrions crier « oh là là ! » depuis deux heures !

Cet article n’ajoute rien au dispositif, déjà fourni, de sanctions envers les demandeurs d’emploi, mais il renforce l’entreprise, en visant à faire des chômeurs les responsables de leur situation.

Cet amendement vise donc à le supprimer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. L’article 1er bis AA, que ces amendements visent à supprimer, a deux objectifs. Le premier est de priver les salariés de l’ARE en cas de refus répété d’offres d’emploi en CDI au terme d’un CDD, le second est d’inscrire dans le code du travail la dimension contracyclique du dispositif, déjà énoncée dans cet hémicycle.

Pour ce qui concerne le premier point, je vais vous répéter une phrase, issue de l’article L. 5422-1 du code du travail, qui résume l’essence même du droit de l’allocation chômage : « ont droit à l’allocation d’assurance chômage les travailleurs aptes au travail [qui] recherch[e]nt un emploi […] et dont […] la privation d’emploi est involontaire ».

Le code du travail dispose aujourd’hui qu’un salarié qui refuse, au terme d’un CDD, un CDI sur un même emploi avec une même rémunération n’a pas droit à la prime de précarité, laquelle s’élève à 10 % du salaire brut. Il s’agit là d’un premier pas qui permet de considérer qu’il n’y a pas, dans ce cas, privation involontaire d’emploi.

M. Vincent Segouin. Exactement !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Quand on est en CDD et que l’on refuse un CDI, peut-on être considéré comme étant en privation d’emploi involontaire ? Non. On fait un choix de vie.

Cet article ne vise pas à empêcher nos concitoyens de faire les choix de vie qu’ils souhaitent. Nous ne nous permettrons jamais de dire à des personnes qui veulent enchaîner les CDD sans signer de CDI que nous le refusons. Pour autant, à partir du moment où l’on fait ce choix, on n’a pas droit à l’allocation d’aide au retour à l’emploi. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.) On ne peut pas faire financer ses choix de vie par le système assurantiel.

M. Laurent Burgoa et Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Exactement !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission est donc défavorable à la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Madame la rapporteure l’a dit : l’article 1er bis AA a la particularité d’avoir deux objets très distincts.

L’un d’eux est d’inscrire dans la loi le principe de contracyclicité en fonction de la conjoncture économique. J’ai indiqué dans mon intervention liminaire que le Gouvernement considérait que cette piste était intéressante et y était favorable. Cela me conduit donc à ne pas souhaiter la suppression pure et simple de cet article.

En revanche, nous ne sommes pas favorables à l’autre objet de cet article, à savoir la disposition adoptée par la commission des affaires sociales consistant à priver d’ARE un demandeur d’emploi en cas de refus à trois reprises d’un CDI à la fin d’un CDD. J’aurai l’occasion de m’en expliquer en présentant l’amendement n° 95.

Dans cette attente, et indépendamment de ce désaccord sur sa deuxième partie, je ne souhaite pas la suppression de cet article, afin de préserver la contracyclicité introduite par la commission des affaires sociales.

Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Mme Monique Lubin. Mes chers collègues, j’aimerais savoir sur quelles statistiques vous vous appuyez !

M. Laurent Burgoa. Sur la réalité !

Mme Monique Lubin. La réalité, vous la voyez depuis votre fauteuil ? (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Vincent Segouin. Arrêtez donc !

Mme Monique Lubin. Je ne souhaite pas vous fâcher de nouveau, mes chers collègues, mais, comme je l’ai déjà indiqué lors de l’examen d’un autre projet de loi, il me semble par moments que nous sommes non plus au Sénat, mais ailleurs…

Mme Monique Lubin. Disposez-vous donc de statistiques concernant le nombre de demandeurs d’emploi qui refusent un CDI à trois reprises après un CDD ? Nous ne pouvons pas inscrire des dispositions dans le marbre de la loi en nous fondant sur des éléments que nous avons glanés de-ci de-là. Comme M. Vanlerenberghe, dont j’ai apprécié l’intervention lors de la discussion générale, j’estime que ce n’est pas sérieux, car de telles dispositions peuvent pénaliser durablement.

Prenons l’exemple d’une personne de 50 ans qui, à cause de la fermeture de son entreprise, perd son emploi après trente ans de carrière, alors qu’elle avait le salaire correspondant à une telle ancienneté ; cela arrive partout en France, particulièrement dans mon territoire. Au bout de quelques mois, n’ayant pas retrouvé d’emploi équivalent à celui qu’elle a perdu et arrivant en fin de droits, elle accepte de travailler dans une entreprise industrielle située près de chez elle, par exemple dans l’agroalimentaire. Cet emploi est moins rémunéré, moins intéressant et peut-être un peu difficile, si bien que lorsque l’on va lui proposer un CDI, elle ne l’acceptera pas. À cet âge, j’estime qu’il est légitime que cette personne aspire à retrouver un emploi qui corresponde à son expérience et qui soit compatible avec son état de santé et son âge.

Qui sommes-nous donc pour inscrire dans le marbre des dispositions qui le lui interdiront et qui mettront en difficulté des personnes dont nous ne connaissons pas la vie ? Qui sommes-nous, mes chers collègues ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. Je voterai naturellement contre ces amendements, mais je souhaite adresser un petit clin d’œil à Mme le rapporteur.

Madame le rapporteur, vous avez émis un avis défavorable sur l’amendement n° 2 rectifié présenté par M. Paccaud, car vous estimiez que le dispositif de l’offre raisonnable d’emploi ne peut pas fonctionner.

Pouvez-vous affirmer que ce dispositif proposé par la commission, qui consiste à supprimer l’ARE à des personnes qui refusent trois fois un CDI à l’issue d’un CDD, fonctionnera mieux que l’offre raisonnable d’emploi ? Permettez-moi d’en douter, car cela me semble relever tout autant de l’usine à gaz…

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Prenons la situation par l’autre bout : si cette personne se trouve dans cette situation, c’est qu’elle s’est vu proposer trois fois un CDD. Or je rappelle que ce sont les contrats courts et les ruptures de contrat qui coûtent le plus à l’assurance chômage – on a parlé d’un coût de 2 milliards d’euros, mais je crois que c’est bien davantage.

Je propose donc que l’on oblige les employeurs à proposer trois fois un CDI !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 33 rectifié, 70, 79 rectifié et 103.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 62, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le code du travail est ainsi modifié :

1° L’article L. 1242-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 1242-2. – Le contrat de travail ne peut être conclu pour une durée déterminée que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas suivants :

« 1° Remplacement d’un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail et pour pourvoir directement le poste de travail du salarié absent ;

« 2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise. Au titre de ce motif, le nombre de salariés occupés en contrat de travail à durée déterminée ne peut excéder 10 % de l’effectif moyen occupé au cours de l’année civile précédente dans les entreprises d’au moins onze salariés. Le nombre obtenu est arrondi à l’unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d’ancienneté dans l’entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée ;

« 3° Emplois à caractère saisonnier de courte durée définis par décret ou pour lesquels dans certains secteurs d’activité définis par décret, il est d’usage constant et établi de recourir à des emplois temporaires en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;

« 4° Remplacement d’un chef d’entreprise temporairement absent ;

« 5° Réalisation d’un contrat d’apprentissage. » ;

2° Les articles L. 1242-3 et L. 1242-4 sont abrogés.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. À rebours de l’article 1er bis AA, qui pénalise les salariés en CDD, cet amendement vise à encadrer les contrats de travail à durée déterminée afin que ceux-ci cessent d’être utilisés comme un mode de gestion de la main-d’œuvre des entreprises, pour lesquelles les CDD constituent parfois une variable d’ajustement.

Nous proposons donc, au travers de cet amendement, de limiter le nombre de personnes en contrat à durée déterminée à 10 % de l’effectif total dans les entreprises d’au moins onze salariés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement tend à réécrire les dispositions du code du travail relatives aux cas de recours au contrat à durée déterminée de manière à les limiter. Il s’agit en particulier de prévoir que le nombre de salariés employés en CDD pour cause d’accroissement temporaire d’activité ne puisse excéder 10 % de l’effectif moyen de l’entreprise au cours de l’année précédente.

Il en résulterait un cadre excessivement rigide et, de surcroît, cet amendement vise à supprimer l’article permettant de conclure des CDD au titre de dispositions légales destinées à favoriser le recrutement de certaines catégories de personnes sans emploi, privant ainsi de base juridique certains contrats aidés.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 62.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 95 est présenté par le Gouvernement.

L’amendement n° 111 rectifié est présenté par MM. Lévrier et Iacovelli, Mme Havet, MM. Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, MM. Haye, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, M. Rambaud, Mme Schillinger, M. Théophile, Mme Dumont, M. Cadic, Mme Ract-Madoux et MM. Verzelen, Calvet et Guerriau.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 2, 3, 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 95.