M. Jean-Pierre Sueur. Très juste ! Excellente intervention !

M. Jérôme Bascher. J’en arrive à ma conclusion.

Puisque nous débattons de la « direction de l’action du Gouvernement », je ferai remarquer que l’action de Jean Castex est parfaitement illustrée par les mots de Napoléon, qui a créé un certain nombre des institutions dont nous parlons cet après-midi : « En politique, une absurdité n’est pas un obstacle. » Monsieur le ministre, préférez la sagesse du Sénat ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur les juridictions administratives et financières et ne m’attarderai pas non plus sur les programmes de la mission « Pouvoirs publics ». Je mettrai plutôt en exergue quelques points qui me paraissent révélateurs des priorités données par le Gouvernement dans sa conduite de l’État.

Les crédits alloués à la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives se révèlent très insuffisants : l’action correspondante est la seule à ne pas bénéficier d’une augmentation de ses crédits sur l’année 2021.

Les budgets alloués au Défenseur des droits ainsi qu’au Contrôleur général des lieux de privation de liberté sont eux aussi insuffisants : ces deux institutions fondamentales pour le contrôle et la protection des libertés individuelles devraient bénéficier de conditions matérielles améliorées. Le Défenseur des droits a connu une augmentation de 40 % de ses saisines entre 2014 et 2020 et devrait être soutenu dans la nécessaire déconcentration de son activité et dans le renforcement de son réseau de délégués territoriaux. Notre groupe présentera deux amendements tendant à augmenter les moyens humains et matériels de ces deux institutions.

Et que dire de la façon de traiter l’urgence climatique ? Le jeune Haut Conseil pour le climat devrait être une instance utile dans ce cadre. Il a dénoncé, pas plus tard que mardi, le retard considérable de la France dans la rénovation énergétique des bâtiments.

Son budget, son fonctionnement, son indépendance doivent être reconsidérés. Son budget, pour l’instant, est famélique : il s’élève à 500 000 euros. Je vous invite, mes chers collègues, à le comparer, par exemple, à celui de l’Ordre national de la Légion d’honneur, qui se voit allouer 28 millions d’euros. Dans ces conditions, nous soutiendrons l’amendement de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable visant à augmenter le budget du Haut Conseil pour le climat.

Notons qu’un panorama de la mission « Direction de l’action du Gouvernement » permet de relever un recours excessif à de très nombreux contractuels, lesquels peuvent représenter, selon les missions, jusqu’à trois quarts des effectifs.

Si je m’attarde sur cette mission, c’est aussi pour souligner les difficultés que rencontre le Parlement dans le contrôle de l’exécutif, et parfois, j’ose le dire, dans celui de la sincérité du budget.

Je reste persuadé que l’attention doit être portée non seulement sur les fluctuations des montants alloués par le PLF, mais aussi sur les indicateurs permettant d’évaluer leur bon usage.

Par exemple, le taux d’application des lois promulguées depuis plus de six mois, qui est l’un des indicateurs présentés dans le programme 129, est relativement bon, mais il pourrait être un trompe-l’œil. Selon ce dernier, les mauvais élèves seraient les ministères chargés de la transition écologique, de l’éducation nationale et de la cohésion des territoires, soit trois ministères porteurs d’enjeux essentiels. Surtout, quelle est la valeur d’un tel indicateur si de nouvelles lois reviennent sur les avancées des précédentes, à l’instar de celle qui a réintroduit les néonicotinoïdes ? Et que dire de certains programmes, comme celle de la présidence française de l’Union européenne, qui ne sont pas pourvus d’indicateurs de contrôle des performances ?

Concernant le CESE, je partage ce qu’ont dit certains de mes collègues. Je prends acte que les crédits « permettront d’organiser une nouvelle Convention citoyenne ou d’associer la parole citoyenne », notamment par la mise en place de pétitions dématérialisées. Nous sommes favorables à l’allocation de crédits pour stimuler ces nouvelles formes d’expression, que nous estimons revitalisantes pour notre démocratie.

Toutefois, un doute m’envahit, non sur la pertinence de tels travaux, mais sur le manque de prise en compte et de mise en œuvre de leurs conclusions par votre gouvernement. Initialement, le Président de la République avait prévu de reprendre 146 des 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Nous en sommes très loin ! L’ambition écologiste et citoyenne que portent ces conventions est ainsi pervertie. Cette perversion pourrait délégitimer les budgets utilisés à cet effet, ainsi que quelques-uns de mes collègues l’ont déclaré.

Mon dernier point portera sur la Cour nationale du droit d’asile.

Nous avons salué qu’elle puisse, a minima, conserver les postes non pourvus de l’an dernier, mais mon groupe défendra un amendement pour aller plus loin. Notre demande se justifie également par les évolutions du droit d’asile et les conséquences des différentes crises climatiques à venir, entraînant, qu’on le veuille ou non, un afflux plus important de demandeurs dans les prochaines années.

Accueil des migrants, contrôle et protection des libertés individuelles, urgence climatique, prise en compte de la participation citoyenne… : tel est le panorama des chantiers jugés non prioritaires par le Gouvernement, au vu de ces budgets, malgré les menaces que l’urgence climatique et l’urgence sociale font peser sur notre pays.

Monsieur le ministre, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires estime que vous n’affectez pas les crédits sur les priorités que constituent la protection des plus démunis et la sauvegarde de notre planète et de nos habitants. Pour toutes ces raisons, il ne votera pas les crédits de ces missions. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano.

M. Stéphane Artano. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le contexte sanitaire et sécuritaire actuel nous appelle à porter une attention particulière aux crédits des missions budgétaires que nous nous apprêtons à examiner.

En effet, ayant pour vocation de financer une grande partie de notre structure institutionnelle, ces missions combinent à la fois des objectifs de bon fonctionnement de la justice, de contrôle de notre administration et de confiance en l’action publique.

Alors que l’obscurantisme nous met au défi, nous avons le devoir de défendre avec vigueur notre modèle de société, à la fois démocratique, ouverte, mais aussi inflexible avec l’intolérance. Par ailleurs, face à une crise sanitaire dont nous sommes loin d’être sortis, il faut toujours rappeler que la première cause de l’État est de protéger ses citoyens, notamment en garantissant le respect de l’ordre public dans sa dimension sanitaire.

Loin des fantasmes délirants des complotistes ou de l’absence de sens civique des plus irresponsables, nous devons, en tant que législateurs, donner aux pouvoirs publics comme aux organes chargés de leur contrôle tous les moyens nécessaires à leur bon fonctionnement.

La crise sanitaire a notamment conduit de nombreux fonctionnaires à travailler différemment, souvent à distance, en s’adaptant à ces nouvelles contraintes. Je tiens évidemment à saluer leur engagement et leurs efforts dans ce contexte difficile.

Au-delà de ces considérations liminaires, je souhaite profiter du temps qui m’est imparti pour insister sur certaines questions plus spécifiques.

Tout d’abord, il faut noter l’augmentation de 1,95 % des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », permettant notamment la poursuite des efforts entrepris pour la modernisation des hautes instances administratives et financières.

Entre autres, le CESE va bénéficier d’une réforme importante, dont l’objectif est de mieux prendre en compte la parole citoyenne dans le débat public. Partisan, à titre personnel, de la démocratie participative, je ne peux qu’encourager cette réforme, dont nous parachèverons l’examen le 14 décembre prochain. Toutefois, la sous-représentativité des outre-mer, dont le nombre de représentants passerait de 11 à 8, m’inspire de l’inquiétude. Comment imaginer que le représentant de Saint-Pierre-et-Miquelon puisse s’exprimer au nom de la Guadeloupe ? Avec cet exemple, mes chers collègues, je veux vous faire prendre conscience que l’insularité doit évidemment être prise en compte. J’espère que le Sénat reviendra sur ce sujet.

La crise sanitaire a eu et continue d’avoir des conséquences importantes sur l’activité des juridictions administratives et financières. Les stocks et les délais de jugement se sont évidemment dégradés, alors que la juridiction administrative avait entrepris et réussi, depuis plusieurs années, une politique ambitieuse de modernisation de son organisation et de ses méthodes de travail. Malgré tout, je me félicite de la formidable capacité d’adaptation à une situation inédite dont la juridiction administrative a su faire preuve et note une évolution positive des crédits de paiement, qui augmentent de 2,74 %.

Concernant la mission « Direction de l’action du Gouvernement », il faut se réjouir du renforcement des moyens alloués à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, dont une partie des crédits seront consacrés au financement de l’installation d’un site à Rennes, afin de constituer un pôle de compétences en matière de cyberdéfense. C’est une bonne nouvelle pour notre stratégie en matière de cyberdéfense, outil indispensable de la lutte que mène notre pays contre le terrorisme. Cela reflète également la prise de conscience que la criminalité s’est emparée de l’outil numérique pour rançonner ses victimes.

Nos concitoyens exigent à bon droit que leurs élus soient irréprochables, alors que toute crise sociale entraîne son lot d’antiparlementarisme et de populisme. Prenons donc garde non seulement à maintenir les exigences de probité, mais encore à faire savoir que nous le faisons. La crise du covid-19 a aussi eu un impact sur l’organisation des travaux parlementaires : nous avons dû nous adapter à de nouvelles méthodes de travail.

Je terminerai par une remarque sur la Miviludes. J’avais interpellé ici même le Gouvernement – c’est Laurent Nunez qui le représentait à l’époque – pour lui faire part de notre inquiétude face au risque d’un démantèlement de la Miviludes. C’est malheureusement ce qui s’est passé, avec un retour dans leur administration d’origine des plus grands spécialistes français de la lutte contre les dérives sectaires. Je crains par conséquent que nous n’ayons à constater, malgré la volonté du Gouvernement, un affaiblissement de l’action de l’État sur ce sujet.

Le groupe du RDSE votera néanmoins les crédits de cette mission.

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet. (Mme Évelyne Perrot applaudit.)

M. Michel Canevet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Union Centriste apprécie tout particulièrement que l’exemplarité vienne du plus haut niveau, c’est-à-dire que les crédits de la mission « Pouvoirs publics » diminuent. En effet, nous sommes attachés à une bonne gestion des deniers publics et estimons qu’il est important que l’on montre l’exemple au sommet de l’État.

Je veux tout particulièrement souligner l’effort réalisé par le Parlement : l’Assemblée nationale et le Sénat voient leurs crédits stagner pour la dixième année consécutive. Le groupe Union Centriste tient vraiment à saluer l’important effort de gestion consenti par ces deux institutions. Je veux y insister.

Néanmoins, l’ensemble des institutions dont les crédits sont retracés dans cette mission sont affectataires d’un patrimoine historique extrêmement important. Le groupe Union Centriste est attaché à ce que celui-ci soit maintenu en très bon état. Les efforts d’investissements et de maintien en état du patrimoine doivent donc être poursuivis. Il importe qu’ils soient accompagnés d’une recherche d’efficacité thermique, qui est aujourd’hui un objectif de politique publique.

Pour ce qui concerne la mission « Conseil et contrôle de l’État », Jérôme Bascher a évoqué l’augmentation significative des recours des décisions rendues par la CNDA. Le groupe Union Centriste pense que ce n’est pas le seul motif de l’accroissement important de l’activité des juridictions administratives : je rappelle que le recours à ces dernières a augmenté de 20 % ces cinq dernières années hors contentieux lié à la CNDA. À notre sens, cette sollicitation tous azimuts des juridictions administratives justifie la prise de mesures pour réduire les possibilités de recours et l’engorgement de ces juridictions, parce qu’il est important que la justice puisse être rendue, dans notre pays, dans les délais les plus raisonnables possible.

On s’aperçoit aujourd’hui que les juridictions administratives ont entre trois et quatre fois plus de dossiers en stock que ce qu’elles sont capables de traiter dans le courant de l’année. C’est dire le retard pris et l’effort qui reste à réaliser pour que la justice soit rendue dans des délais plus raisonnables !

Peut-être faudra-t-il d’ailleurs envisager la réintroduction du droit de 100 euros qui existait auparavant pour accéder au tribunal administratif, de manière à éviter les recours abusifs qui engorgent nos juridictions, souvent pour des questions de forme et non de fond. (M. Jérôme Bascher applaudit.)

Ces recours empêchent que la justice puisse être rendue de façon sereine sur un certain nombre de sujets importants et mobilisateurs.

Mme Sophie Primas. Très bien !

M. Michel Canevet. S’agissant de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », je tiens tout d’abord à saluer, monsieur le ministre, les efforts de rationalisation et d’optimisation qui sont réalisés depuis des années par la direction des services administratifs et financiers (DSAF) des services du Premier ministre et que j’ai pu constater par moi-même. Je pense que ces efforts permettent une efficience accrue. Il importe également qu’ils servent d’exemple pour l’ensemble des départements ministériels ; il convient que nous y soyons attentifs.

Certains orateurs ont parlé de l’importance de l’Anssi. Oui, dans un contexte d’accentuation de la cybercriminalité et des cyberattaques, il est nécessaire d’être encore plus vigilants sur le sujet. Pour l’heure, on observe que l’ensemble des départements ministériels ne sont pas encore « au top », monsieur le ministre. Les efforts doivent être maintenus pour que ceux qui ont du retard puissent le rattraper, car il n’y a rien de pire que ces cyberattaques. On sait bien aujourd’hui l’importance de l’outil informatique et de la digitalisation dans toutes nos pratiques institutionnelles. Une vigilance accrue est nécessaire sur le sujet, au risque de connaître des difficultés et même de remettre en cause le bon fonctionnement de nos institutions, ce qui serait particulièrement regrettable.

Cette mission regroupe aussi les crédits des autorités administratives indépendantes.

Le groupe Union Centriste apprécie l’effort budgétaire qui est réalisé en direction de la CNIL pour la doter de moyens supplémentaires, car on voit bien que le renforcement de la réglementation, notamment par le règlement général sur la protection des données (RGPD), conduit à des saisines de plus en plus nombreuses. Comme pour les juridictions administratives, l’examen des dossiers dans des délais raisonnables nécessite des moyens. Nous apprécions tout à fait que ces derniers aient été prévus.

Pour conclure, je me félicite, monsieur le ministre, que, à l’instar de la DSAF, la direction de l’information légale et administrative (DILA) semble aussi réaliser des efforts de gestion depuis des années. Cela va dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc Laménie. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quatre minutes, c’est très court pour aborder ces trois missions !

La mission « Pouvoirs publics », dotée de 993,9 millions d’euros, la mission « Conseil et contrôle de l’État », avec 718 millions d’euros, et la mission « Direction de l’action du Gouvernement », avec 860 millions d’euros, se caractérisent par une relative stabilité.

Je salue les trois rapporteurs spéciaux de notre commission des finances et les six rapporteurs pour avis. Quatre commissions sont concernées : la commission des finances, la commission des lois, la commission des affaires étrangères et la commission des affaires sociales. Qu’il me soit permis de saluer ce travail collectif.

Au sein de la mission « Pouvoirs publics », la dotation accordée à la présidence de la République s’élève à 105,3 millions d’euros, ce qui marque une stabilité.

S’agissant des assemblées parlementaires – vous savez, monsieur le ministre, que nous sommes très attachés au bicamérisme –, l’Assemblée nationale et ses 577 députés se voient allouer 517 millions d’euros, quand le Sénat et ses 348 sénateurs et sénatrices sont dotés de 323 millions d’euros.

Les crédits des chaînes parlementaires s’établissent à 34,2 millions d’euros.

La dotation du Conseil constitutionnel se monte à 12 millions d’euros. Avec 77 personnes environ, le Conseil constitutionnel est, parmi les instances comparables au niveau européen, l’une des plus petites en effectifs. Je rappelle qu’il est chargé d’assurer le respect de la Constitution du 4 octobre 1958, dont un exemplaire original figure dans la salle des conférences du Sénat, via notamment les questions prioritaires de constitutionnalité (QPC).

Enfin, la Cour de justice de la République se voit doter de 871 500 euros.

Depuis près de dix ans, sous l’autorité du président Gérard Larcher, la dotation du Sénat est stable, comme celle de l’Assemblée nationale, à hauteur de 323,5 millions d’euros.

Par ailleurs, le Sénat dispose d’un patrimoine important, notamment les vingt-deux hectares du jardin du Luxembourg et le musée du même nom. Il est nécessaire de faire connaître notre institution. Malheureusement, depuis le mois de mars dernier, en raison de la crise sanitaire, nous n’accueillons plus de groupes de visiteurs. Sénateur depuis 2007, j’ai pu mesurer combien il était important que nos concitoyens connaissent le fonctionnement de nos institutions.

Ce matin, nous discutions du budget de l’enseignement scolaire. Il me semble essentiel de continuer d’accueillir des visiteurs, toutes générations confondues : jeunes – collégiens, lycéens, membres des conseils municipaux des enfants… –, élus et non-élus, associations… L’histoire de notre institution est très riche, nous devons la faire connaître.

Eu égard à leur stabilité, le groupe Les Républicains, sous réserve de l’adoption de quelques amendements, votera l’ensemble des crédits de ces missions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Marc Fesneau, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord vous remercier de vos différentes interventions et de la qualité du travail effectué par les rapporteurs spéciaux de la commission des finances, ainsi que par les rapporteurs pour avis, qui ont, comme chaque année, produit une analyse exigeante et précise des crédits sur lesquels le Sénat doit se prononcer aujourd’hui.

À titre liminaire, je rappellerai, comme certains l’ont déjà souligné, que la crise sanitaire a obligé l’ensemble des personnels relevant des missions que nous examinons à travailler différemment, souvent sous des contraintes difficiles, à distance, en s’adaptant dans l’urgence à des méthodes nouvelles. Je voudrais ici saluer leur engagement et les efforts qu’ils ont fournis pour assurer la continuité des missions importantes qui leur sont confiées.

Permettez-moi à présent d’entrer un peu plus dans le détail des crédits qui vous sont présentés et de répondre, dans la mesure du possible, à certaines de vos interrogations.

J’aborderai d’abord les crédits de la mission « Pouvoirs publics » qui demeurent stables, en légère baisse, comme cela a déjà été souligné, par rapport à l’exercice 2020.

Les crédits accordés à la présidence de la République font l’objet d’une analyse détaillée sur la base des questionnaires parlementaires de l’ensemble des rapporteurs et des entretiens avec les rapporteurs spéciaux, conformément à l’article 57 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Monsieur Sueur, on ne gagne jamais à la caricature, à la démagogie ou aux raccourcis en parlant de nos institutions…

M. Jean-Pierre Sueur. Tout à fait, monsieur le ministre ! Je partage ce jugement et je n’ai fait que dire la vérité.

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Je connais la rigueur intellectuelle de M. Sueur. Il sait très bien que la présidence de la République doit disposer de certains moyens et que l’augmentation des crédits est liée en partie à l’internalisation – c’est une question de sincérité budgétaire – d’un certain nombre de postes de personnels de sécurité pour un coût d’environ 2 millions d’euros.

Comme il l’a lui-même souligné, ces besoins découlent du nouveau dispositif de sécurité mis en place en raison du risque terroriste.

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Par ailleurs, certains de ces investissements, qu’il convenait de mener à leur terme, avaient été programmés avant ce quinquennat. Il n’y a donc pas de dérapage des dépenses. Il s’agit seulement de contingences liées à des éléments que M. Sueur a lui-même décrits. Je tenais à le rappeler, car on gagne toujours à la transparence.

La dotation de la présidence de la République est stable en 2021 par rapport à 2020 et le prélèvement sur disponibilités, qui fait souvent l’objet de vos attentions, est en baisse pour atteindre 2,5 millions d’euros.

Ces moyens illustrent les effets positifs de la réorganisation des services de la présidence, amorcée en 2019, qui commence à porter ses fruits, comme l’a rappelé votre rapporteur spécial Jean-Michel Arnaud.

Conformément aux recommandations de la Cour des comptes et avec le soutien financier de l’opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (Oppic), la présidence de la République poursuit son programme d’investissement dans l’entretien et la valorisation de son parc immobilier. Il s’agit d’un impératif, comme l’a très justement souligné M. Canevet.

J’entends les critiques quant à la lisibilité du schéma de financement de ces opérations, mais c’est le même depuis 2009 et jamais la Cour des comptes n’a formulé d’observations particulières.

Enfin, l’Élysée entreprend des travaux de renforcement de sa sécurité, notamment de ses systèmes d’information, ce qui apparaît pour le moins nécessaire dans le contexte de menace terroriste et de tensions géopolitiques que nous connaissons.

Monsieur Bascher, la baisse des crédits du Conseil constitutionnel est liée à la baisse de son activité prévisible, les opérations de contrôle liées à la procédure du référendum d’initiative partagé (RIP) sur la privatisation d’Aéroports de Paris étant désormais closes.

L’année 2021 verra tout de même la mise en place, comme M. Sueur l’a souligné, d’un dispositif national de suivi de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui permettra de mieux connaître son usage, dix ans après son instauration.

Monsieur Laménie, je me permettrai de m’abstenir de tout commentaire concernant le budget de votre assemblée. Il n’appartient pas au Gouvernement, au nom de la séparation des pouvoirs, d’apprécier le niveau de la dotation des assemblées parlementaires.

La crise sanitaire a donné lieu à un certain nombre de plaintes devant la Cour de justice de la République, ce qui a pu conduire à s’interroger sur le niveau de sa dotation. Comme l’ont indiqué vos rapporteurs, cette hausse de l’activité sera financée par le report du solde de la dotation non consommée en 2020, avec l’accord du ministère de l’économie, des finances et de la relance.

La mission « Conseil et contrôle de l’État » retient, comme chaque année, l’attention de l’ensemble des sénateurs. Ces crédits, en hausse de 2 %, traduisent un effort constant d’accroissement de la masse salariale et d’investissement depuis le début du quinquennat.

Le PLF pour 2021 s’inscrit dans la trajectoire d’accroissement des moyens humains des juridictions administratives avec la création de 28 postes, notamment au bénéfice de la nouvelle cour administrative d’appel de Toulouse qui verra le jour en 2022. Cette augmentation des moyens, saluée par MM. Richard et Menonville, s’avère indispensable pour faire face à la hausse importante des contentieux, comme l’a souligné votre rapporteur spécial, M. Bilhac.

La Cour nationale du droit d’asile (CNDA), qui a bénéficié de 80 % des créations d’emplois dans les juridictions administratives depuis cinq ans, soit 375 ETP, a particulièrement souffert de la période de confinement et de la crise sanitaire en général, comme l’ont rappelé MM. Benarroche et Gay.

Je salue, dans la lignée des propos tenus avant moi, le report sur l’année 2021 des créations de postes qui n’ont pu intervenir en 2020 pour les raisons que vous connaissez, afin de poursuivre nos efforts visant à garantir l’effectivité du droit d’asile. Si la situation sanitaire le permet, la CNDA devrait pouvoir se rapprocher de sa capacité de jugement maximale au cours de l’année 2021 et tendre vers les objectifs prévus par la loi.

Le fonctionnement de la Cour des comptes et des juridictions financières appelle moins de commentaires. Elles bénéficient cette année d’un schéma d’emploi positif qui conduira à dix recrutements supplémentaires en 2021.

La hausse des crédits de personnel du Haut Conseil des finances publiques suscite des interrogations dont nous reparlerons. L’Assemblée nationale a ainsi adopté un amendement afin de limiter cette hausse à deux emplois. Le Haut Conseil pourra toutefois effectuer des recrutements supplémentaires afin d’exercer au mieux sa mission d’expertise indépendante tant auprès du Gouvernement que du Parlement.

En dépit de ces recrutements, le Haut Conseil demeurera sur la scène européenne une institution budgétaire indépendante de taille très réduite.

Enfin, le Conseil économique, social et environnemental conserve un budget stable. La réforme, en cours d’examen devant le Parlement, permettra de rénover le fonctionnement du CESE tout en garantissant la juste représentation des territoires – comme vous, monsieur Artano, nous sommes sensibles à cette question.

La réduction du nombre des membres du CESE permettra de dégager les économies nécessaires pour mettre en œuvre les nouvelles prérogatives du Conseil, notamment en matière de participation citoyenne.

J’ai bien entendu que certains, à l’instar de M. Bascher, ont souhaité interpeller le Gouvernement sur la Convention citoyenne – il me semble que nous débattrons d’un amendement sur cette question. Les crédits de 2021 permettront l’organisation de nouveaux exercices de participation citoyenne, malgré les difficultés inhérentes à cet exercice pendant la période de crise sanitaire.

Vous ne serez pas surpris d’apprendre que je soutiens très fortement un principe qui répond à une aspiration de nos concitoyens. J’en profite pour dire à M. Gay et à M. Benarroche qu’ils ne devraient pas s’inquiéter, bien au contraire : les citoyens ont formulé des propositions, le Gouvernement va déposer un projet de loi et, en définitive, conformément à la façon dont fonctionne notre démocratie, le Parlement va statuer. (M. Fabien Gay sesclaffe. – Exclamations ironiques sur lensemble des travées.)