Mme la présidente. La parole est à M. Claude Raynal.

M. Claude Raynal. Je veux remercier Mme la ministre de sa réponse, notamment de sa dernière phrase.

Effectivement, le droit est bien pauvre en la matière, compte tenu du nombre de cas concernés et du caractère parfois dramatique des situations.

Recourir préventivement au juge me paraît bien complexe et ne résout pas vraiment le problème.

Il nous semble qu’il faudrait peut-être, à l’avenir, par le truchement d’un texte de loi, d’un règlement ou un décret, voire une information des mairies, que les choses soient traitées de manière plus solide.

En tout état de cause, j’appelle à une réflexion du ministère sur ce sujet. J’aimerais savoir s’il est nécessaire qu’une proposition de loi soit déposée ou si d’autres solutions techniques permettraient de répondre aux difficultés.

droits d'auteur et musiques traditionnelles

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet, auteur de la question n° 113, adressée à Mme la ministre de la culture.

M. Michel Canevet. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur le fonctionnement de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, la SACEM, qui est une institution importante dans notre pays, puisqu’elle défend les droits de près de 160 000 membres adhérents. Elle perçoit, pour cela, un budget tout à fait important, issu des droits de diffusion des musiques, pour un montant légèrement inférieur à 1 milliard d’euros.

Sur nos territoires, diverses manifestations sont organisées, telles que des animations, des bals ou des repas, qui impliquent le recours à des prestations de musique. Les organisateurs en sont souvent des associations.

Bien souvent, en Bretagne, où je suis élu, des ensembles pratiquent de la musique traditionnelle bretonne lors de différentes manifestations culturelles territoriales.

Les associations organisatrices sont souvent sollicitées par la SACEM pour payer des droits, ce qui pose des difficultés quand leurs recettes sont faibles. Le fait même qu’elles doivent acquitter des droits sur la diffusion de musique populaire traditionnelle régionale suscite régulièrement des doutes.

Pourriez-vous m’éclairer à ce sujet, madame la ministre ? Comment les organisateurs pourraient-ils éventuellement être dispensés de payer les droits si les morceaux diffusés sont tombés dans le patrimoine depuis déjà très longtemps ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de la culture.

Mme Françoise Nyssen, ministre de la culture. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement au sujet du versement d’une rémunération pour l’exécution de musiques traditionnelles, par exemple bretonne, tombées dans le domaine public à la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, la SACEM.

Comme vous le savez, le code de la propriété intellectuelle précise que la durée de protection d’une œuvre musicale est de soixante-dix ans après le décès de son compositeur.

À l’expiration de ce délai, l’œuvre peut être exploitée librement, sous réserve du droit moral de l’auteur, et gratuitement.

La SACEM n’a donc pas vocation à percevoir de rémunération pour la diffusion d’une œuvre musicale tombée dans le domaine public, sauf dans l’hypothèse où cette œuvre ferait l’objet d’arrangements ou d’adaptations.

Dans le cas de l’association que vous avez évoqué auprès de mes services, les morceaux exécutés n’ont fait l’objet d’aucune adaptation susceptible de donner naissance à des droits d’auteur. Par conséquent, en vertu de la législation en vigueur pour toute manifestation musicale et après examen du programme des œuvres interprétées par le groupe d’accordéonistes, le dossier a été clos par la SACEM et n’a donné lieu à aucune suite administrative ou facturation au titre des droits d’auteur.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet.

M. Michel Canevet. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Il était important de clarifier les choses, en particulier de bien mettre en évidence qu’il n’y a pas de droits à payer sur la diffusion de morceaux de musique traditionnelle, dès lors que celle-ci n’a pas fait l’objet d’arrangements particuliers.

dégradations constatées à l'opéra de paris

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Dumas, auteur de la question n° 122, adressée à Mme la ministre de la culture.

Mme Catherine Dumas. Madame la ministre, comme tous mes collègues sénateurs membres de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, j’ai été mise en copie de deux alertes qui vous ont été adressées par un représentant du personnel de l’Opéra de Paris, le 27 septembre puis le 17 octobre derniers, s’agissant de dégradations constatées dans la salle et les loges du Palais Garnier.

S’il est avéré, le reportage photo joint à ces alertes est édifiant : boiseries détériorées, tapis usés, fauteuils dégradés, murs et tapisseries délabrés, etc.

L’Opéra de Paris, classé monument historique en 1923, est l’un des édifices structurants de la capitale, mais aussi l’une des vitrines du patrimoine français.

Alors que le Président de la République a fait du patrimoine un axe prioritaire de son action culturelle, comme vous l’avez rappelé hier dans cet hémicycle, je suggère qu’une inspection soit diligentée par votre ministère afin que des explications soient apportées sur la préservation de cette salle de renommée mondiale.

Le cas échéant, je souhaite connaître, à travers un état des lieux, le plan de mesures et de travaux de réfection qui mettra à contribution les savoir-faire des artisans d’art français.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de la culture.

Mme Françoise Nyssen, ministre de la culture. Madame la sénatrice, comme nombre de vos collègues parlementaires, vous interrogez le Gouvernement sur la situation de l’Opéra Garnier.

Alors que votre assemblée a adopté hier les crédits budgétaires de notre ministère, je tiens à rappeler que les investissements réalisés à l’Opéra national de Paris, c’est-à-dire le Palais Garnier, l’Opéra Bastille, l’école de danse et les ateliers Berthier, qui accueillent près de 1,6 million de spectateurs et visiteurs chaque année et plus de 1 500 salariés chaque jour, sont de l’ordre de 10 à 12 millions d’euros pour 2018.

La subvention d’investissement y concourt. S’y ajoutent les ressources propres de l’établissement, liées à la capacité d’autofinancement engendrée chaque année par son activité, soit 6 millions d’euros environ, la mise à contribution éventuelle, en complément, du fonds de roulement et les ressources de mécénat affectées à certaines opérations de travaux.

Concernant plus particulièrement la salle du Palais Garnier, un programme de rénovation comprenant la restauration des tissus des loges, des fauteuils d’orchestre, de l’éclairage, le déplacement des projecteurs et de la zone publique a été établi en août 2014 et mis en œuvre depuis.

Le programme de rénovation de la salle va se poursuivre, pour un coût total d’environ 2,5 millions d’euros ces quatre prochaines années. Les rénovations de la galerie et de la rotonde du Glacier pourraient, elles, faire l’objet d’un financement par voie de mécénat.

Les opérations d’investissement de l’Opéra national de Paris font l’objet d’un plan pluriannuel d’investissement examiné régulièrement par les ministères de la culture et du budget.

Soyez certaine que mes services assurent un suivi attentif et accompagnent l’établissement dans ces rénovations d’ampleur et dans l’importante transition que représente le transfert de la maîtrise d’ouvrage du bâtiment du Palais Garnier.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Dumas.

Mme Catherine Dumas. Madame la ministre, je veux tout d'abord vous remercier de vous être déplacée personnellement au Sénat pour répondre à ma question.

Je vous remercie également de votre réponse.

En tant qu’élue de Paris, je suis évidemment très sensible au plan de rénovation que vous avez évoqué. Je serai particulièrement attentive à la suite qui y sera donnée.

Mme la présidente. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

3

Candidatures à un organisme extraparlementaire

Mme la présidente. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à quatorze heures, sous la présidence de M. David Assouline.)

PRÉSIDENCE DE M. David Assouline

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

4

Décès d’un ancien sénateur

M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue James Marson, qui fut sénateur de la Seine-Saint-Denis de 1975 à 1986.

5

Articles additionnels après l'article 49 A (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
Deuxième partie

Loi de finances pour 2018

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
Sécurités - Compte d'affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale, pour 2018 (projet n° 107, rapport général n° 108, avis nos°109 à 114).

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

SECONDE PARTIE (SUITE)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Sécurités

Compte d’affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
État B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurités » (et articles 62 ter et 62 quater) et du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » (et article 67).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale ». Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, avant d’aborder l’examen de cette mission, je souhaite saluer l’efficacité et le courage de nos forces de l’ordre, dont la mobilisation est particulièrement forte. Leur activité opérationnelle s’effectue dans un contexte de grande tension, comme en témoignent, par exemple, les plus de 900 perquisitions administratives menées en 2016 au titre de l’état d’urgence ou les millions de contrôles aux frontières réalisés au titre du rétablissement temporaire de ces dernières. Je veux également rappeler, avec gravité, les nombreux suicides qui ont eu lieu ces dernières semaines.

Pourtant, malgré le caractère prioritaire de cette mission, le présent projet de budget ne semble pas à la hauteur des enjeux.

Premièrement, les crédits sont en baisse dans le projet de loi de programmation triennale.

Si, en 2018, les moyens de la police et de la gendarmerie nationales sont en légère hausse, il est prévu que les crédits de la mission « Sécurités » augmentent de seulement 2,1 % sur la période 2018–2020, contre une augmentation moyenne de 3 % pour les missions du budget général. En prenant en compte les prévisions d’inflation du Gouvernement, l’évolution sera négative, puisque les crédits diminueront de 0,4 %.

Cette évolution est surprenante, alors que la sécurité nationale est toujours présentée comme une priorité.

Par ailleurs, la mise en place d’une « police de la sécurité du quotidien » ne s’accompagne d’aucun volet budgétaire et devrait donc s’appuyer sur les moyens existants. Les annonces faites ne dissipent donc pas à ce stade la crainte de voir émerger un nouveau dispositif créant une charge de travail supplémentaire pour les forces de l’ordre.

Deuxièmement, la hausse des effectifs s’effectue au détriment des moyens de fonctionnement et de l’investissement, perpétuant ainsi la principale faiblesse des budgets de la fin du quinquennat précédent.

S’il est vrai que le nombre total d’emplois créés s’est élevé à 8 837 au cours des cinq dernières années, le rythme de recrutement devrait sensiblement croître sur le quinquennat actuel, puisque le Président de la République s’est engagé à créer 10 000 emplois sur la période 2018–2022 pour renforcer les forces de sécurité intérieure. Dans ce cadre, la police nationale bénéficiera de 7 500 équivalents temps plein – les ETP – et la gendarmerie nationale de 2 500 ETP. Ainsi, le nombre de policiers et de gendarmes devrait augmenter, en 2018, de 1 835 ETP, dont 459 pour les gendarmes et 1 376 pour les policiers.

Mais la conséquence de cette constante augmentation des effectifs depuis 2014 est que la part des dépenses de personnel sur l’ensemble des crédits, au sein des deux programmes, atteindra 86,78 % en 2018. Ce ratio ne permettra pas de garantir la capacité opérationnelle des policiers et gendarmes.

Depuis 2006 – en dix ans, donc –, les dépenses de personnel ont augmenté de plus de 31 %, tandis que les autres dépenses ont connu une baisse de 4,98 %.

Je rappelle, par ailleurs, que les comparaisons internationales ne témoignent pas d’une sous-dotation des forces de sécurité intérieure de notre pays, bien au contraire. Parmi nos principaux voisins européens, seule l’Italie a des effectifs supérieurs aux nôtres.

Troisièmement, le maintien de ce ratio à un niveau si élevé induit désormais une paupérisation de nos forces.

La faiblesse des dépenses d’investissement et de fonctionnement a des conséquences directes sur le vieillissement du parc immobilier. Je veux citer l’exemple de la dette des loyers de la gendarmerie, pour 114 millions d’euros en autorisations d’engagement et 92 millions d’euros en crédits de paiement, et le plan nécessaire, sur cinq ans, pour résorber cette dette.

Le budget présenté ne permettra pas d’assurer un abaissement de l’âge de la flotte de véhicules, lui aussi en constante augmentation, puisqu’il est passé de 4 ans et 10 mois en 2006 à 6 ans et 9 mois en 2016, alors même qu’il y a de moins en moins de véhicules. Depuis 2006, un véhicule de police est supprimé pour trois postes créés…

L’équipement des agents va également pâtir d’un important sous-financement. Plusieurs centres de tir ont dû fermer depuis le mois de septembre dernier, d’où un fort mécontentement des forces de police et de gendarmerie, qui ne peuvent s’entraîner que douze heures annuellement et ne tirer que 92 cartouches par an.

Quatrièmement, une meilleure organisation des forces aurait permis de gagner en capacité opérationnelle.

L’application à la gendarmerie, pour la première fois à partir de 2017, de la directive européenne de 2003 relative au temps de travail a engendré une baisse de la capacité opérationnelle des forces de 5 % des ETPT – équivalents temps plein travaillé – comme je l’avais prévu l’an dernier. Les recrutements prévus ne compenseront donc pas l’application de cette directive.

Pour la police nationale, l’entrée en vigueur de la vacation forte devrait entraîner, en 2018, une perte opérationnelle s’élevant à 433 ETPT. Mais il est possible que davantage d’effectifs soient, à terme, concernés par ce cycle, qui n’est pas appliqué, par exemple, à la préfecture de police de Paris. La perte opérationnelle pourrait s’accroître dans les années à venir, et cette réforme peut donc toujours être qualifiée de « bombe à retardement ».

Le principal levier permettant de « dégager des effectifs » est le recentrage des forces de l’ordre sur leur cœur de métier, par la suppression progressive des tâches indues, qui mobilisent l’équivalent d’environ 6 000 ETPT. Je pense notamment aux transfèrements judiciaires, à la gestion des procurations et aux tâches administratives, qui détournent les forces de l’ordre de leurs missions premières.

Mes chers collègues, je vous présenterai un amendement visant à substituer à des crédits du titre 2 des dépenses d’investissement et de fonctionnement, afin de donner aux hommes les moyens d’accomplir leur mission. Cet amendement doit être interprété comme la volonté d’aboutir à une vision constructive, dans le cadre de ce budget, sur un sujet si important pour notre pays.

Si le Gouvernement veut, pour ce premier budget du quinquennat, maintenir sa version initiale, si peu conforme aux exigences de la situation, votre rapporteur vous proposera le rejet des crédits de la mission « Sécurités ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur spécial de la commission des finances, pour le programme « Sécurité et éducation routières ». Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, je vais évoquer un autre fléau, particulièrement meurtrier : l’accidentalité routière.

Certes, l’augmentation du nombre de morts tend à décélérer en 2016 et 2017, mais la courbe de la mortalité routière n’est toujours pas inversée, et la France vient de connaître trois années consécutives de légère augmentation du nombre de victimes de la route. L’objectif que s’était assigné le gouvernement de Manuel Valls – descendre sous le seuil des 2 000 morts en 2020 – paraît de plus en plus hors de portée.

En effet, sur les dix premiers mois de l’année 2017, on dénombre encore 2 878 personnes tuées en France métropolitaine, soit plus de 9 par jour, tandis que le nombre d’accidents – 160 chaque jour – et de blessés – plus de 200 quotidiennement – continue d’augmenter.

Ce bilan doit cependant être resitué dans l’espace et dans le temps. Évidemment, la mortalité routière est bien moins élevée que dans les années soixante-dix, où le nombre de morts dépassait les 18 000. Réduire encore la mortalité est donc de plus en plus ardu. Néanmoins, sur le plan européen, la France ne se situe qu’au quatorzième rang dans cette lutte. De plus, lorsque l’on tient compte de la distance parcourue sur les réseaux routiers, laquelle se mesure en milliards de kilomètres parcourus, plusieurs de nos voisins, comme l’Allemagne, le Royaume-Uni ou la Suisse, font mieux que nous. Une marge de progression existe donc encore.

La politique de sécurité routière, telle qu’elle a été infléchie en 2015, n’a pas encore produit de résultats sensibles et ne saurait être centrée sur les seuls radars. Elle doit s’accompagner d’une lutte intensive contre les autres causes d’accidentalité, telles que l’alcool, les stupéfiants ou l’inattention, et d’une politique de prévention renforcée, dont l’efficacité doit être encore mieux évaluée.

J’en arrive maintenant au programme « Sécurité et éducation routières » de la mission « Sécurités » et au compte d’affectation spéciale.

Sur le programme « Sécurité et éducation routières », je note que les dépenses inscrites augmentent légèrement, de près de 3 %, passant de 38,8 millions d’euros en 2017 à 39,9 millions d’euros en 2018. Je salue également l’effort de sincérité des dépenses de communication : régulièrement sous-budgétées ces dernières années, elles ont été nettement relevées pour 2018.

J’observe également que le ralentissement de l’opération « permis à un euro par jour » semble se confirmer, malgré la création d’un prêt complémentaire de 300 euros. Pourriez-vous nous indiquer, monsieur le ministre d’État, si vous envisagez de relancer ce dispositif ?

Sur le compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », dit « CAS Radars », mes observations sont les suivantes.

Le produit total des amendes de la circulation et du stationnement devrait atteindre, en 2018, 1,83 milliard d’euros, sachant que 73 % de cette somme sont inscrits en dépenses sur le compte d’affectation spéciale « Radars », ce qui représente 1,34 milliard d’euros, soit un montant en légère baisse – de 3,6 % – par rapport à 2017.

La politique du nouveau gouvernement s’inscrit pour le moment dans celle qu’a arrêtée le comité interministériel de la sécurité routière du 2 octobre 2015.

Cette stratégie, qui s’appuie sur le déploiement de nouveaux radars moins prévisibles et dotés de nouvelles fonctionnalités et sur le remplacement du point de contrôle par le « parcours sécurisé », devrait commencer à porter ses fruits.

Toutefois, l’implantation et le parcours de ces équipements – je pense notamment aux voitures radars – doivent être mieux liés à la carte de l’accidentalité. L’objectif demeure, bien entendu, la diminution du nombre d’accidents et de morts, et non l’augmentation du produit des amendes.

Les départements d’outre-mer et les réseaux routiers secondaires, où l’accidentalité est particulièrement élevée, doivent être privilégiés. Sur ce sujet, je vous renvoie au rapport d’information de notre collègue Vincent Delahaye, réalisé dans le cadre de sa mission de contrôle budgétaire.

Le développement des radars « tronçons » ou « vitesse moyenne », mieux acceptés des usagers, doit être encouragé, tandis que l’alternance des limitations de vitesse doit être rationalisée et encore mieux signalée. Trop de conducteurs dépassent la vitesse maximale autorisée parce qu’ils n’ont pas perçu un changement de limitation. Cependant, la réglementation sur les limitations de vitesse doit être définie en considération de l’état d’une route, de sa dangerosité et de l’accidentalité, et non en fonction de son statut, comme on en entend parler en ce moment pour les routes nationales.

Afin d’améliorer les résultats de la sécurité routière, ses acteurs – notamment les collectivités territoriales, les usagers, les employeurs, sans oublier les concessionnaires d’autoroutes – doivent être encore mieux associés à la définition de cette politique.

À cet égard, je propose deux amendements qui visent à réduire l’ampleur de la baisse des versements servant aux collectivités locales pour améliorer leurs infrastructures routières. En effet, à ce stade, l’impact de la décentralisation du stationnement payant est encore difficile à apprécier, y compris au niveau de ses conséquences financières à court terme. Il semblerait imprudent de trop anticiper sur les effets de cette réforme.

Par ailleurs, la dimension interministérielle de la politique de sécurité routière doit impérativement être renforcée. Le comité interministériel de la sécurité routière ne s’est réuni que deux fois depuis 2011. Pourriez-vous nous confirmer, monsieur le ministre d’État, qu’un prochain comité va bientôt être réuni et nous annoncer quelles inflexions vont être apportées à la stratégie arrêtée en 2015, afin d’améliorer ces résultats ?

S’agissant de la gestion du permis à points, il est prévu que plus de 22 millions de lettres de notification ou de retrait de points seront adressées aux conducteurs en 2018, pour une dépense estimée à 17,5 millions d’euros. Je note, pour la première fois, l’effort de dématérialisation d’une partie de ces courriers. Cependant, cet effort, qui ne couvre en 2018 que 10 % des crédits de ce poste, doit être poursuivi, dans la mesure où il permet d’engendrer des économies de traitement des documents.

Enfin, je constate, une fois encore, que le fonds de roulement de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, l’ANTAI, s’avérait, au 1er janvier 2017, plus de deux fois supérieur – à hauteur de 37 millions d’euros – au niveau préconisé. C'est la raison pour laquelle je défendrai un amendement visant à diminuer les crédits destinés à cette agence.

En effet, les justifications apportées par les documents budgétaires, de même que les réponses aux questionnaires, me semblent, à ce jour, peu probantes sur l’évolution de ce besoin. Mais peut-être le Gouvernement aura-t-il des explications à nous apporter sur ce point ?

En conclusion, la commission des finances propose d’adopter les crédits de la mission, dans sa partie sécurité routière, sans modification et ceux du compte spécial, ainsi modifiés.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances, pour le programme « Sécurité civile ». Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, les crédits du programme « Sécurité civile », qui ne représentent en crédits de paiement, que 54 % des dépenses de l’État consacrées à la sécurité civile au sens large, connaissent cette année une hausse importante.

Les crédits de paiement et les autorisations d’engagement demandés sont respectivement en augmentation de 5,36 % et de 82,34 % par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2017. Cette hausse importante s’explique toutefois par les autorisations d’engagement affectées au renouvellement de la flotte d’avions Tracker, qui représente, en 2018, quelque 404,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et 61,4 millions d’euros en crédits de paiement.

Si l’on neutralise l’impact de l’acquisition des avions dans les budgets 2017 et 2018, le budget, hors titre 2, du programme « Sécurité civile » est stable en autorisations d’engagement – plus 0,3 % – et en baisse en crédits de paiement – moins 5 %.

Le renouvellement de la flotte de Tracker était devenu indispensable, en raison de son vieillissement – 60 ans ! – et de l’atteinte prochaine du potentiel de vol maximal fixé à 25 000 heures de vol. À cet effet, le marché d’acquisition d’un avion « multirôles » s’inscrivant dans le contexte de retrait du service des avions Tracker avait été lancé dès 2016. Le ministre de l’intérieur a confirmé, en juillet 2017, que ces derniers seraient remplacés par six bombardiers d’eau « multirôles » de type Dash 8, sans que ce choix soit formalisé juridiquement.

Si ces avions présentent l’inconvénient d’être particulièrement coûteux, leur caractère « multirôles » plaidait en leur faveur. Les Dash 8 ont pour principal avantage de pouvoir être convertis en avions de transport, ce qui n’était pas le cas des Tracker.

On ne peut donc que se féliciter de ce renouvellement. Il ne doit toutefois pas masquer le vieillissement du reste de la flotte, qui entraîne de nombreuses indisponibilités. Nous l’avons vu cette année, les pilotes de bombardiers d’eau se sont plaints de l’indisponibilité de la flotte, qui s’est parfois élevée à 25 % en pleine saison des feux.

À cet égard, je plaide pour qu’une rénovation des Canadair soit envisagée le plus tôt possible par la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, la DGSCGC, pour pallier ces indisponibilités et éviter les surcoûts liés à une prise en compte trop tardive des problèmes.

Le budget 2018 est aussi marqué par la poursuite du déploiement du système d’alerte et d’information aux populations, ou SAIP, dont les choix stratégiques, fortement contestables, ne sont toujours pas remis en cause. Je vous avais alerté, monsieur le ministre d’État, par le biais de mon rapport d’information, du fait que ce projet concentrait près de 80 % des crédits alloués au volet « sirènes », alors même que son impact apparaît beaucoup plus faible que celui de la téléphonie mobile qui ne bénéficie pourtant que de 80 % des crédits consommés ou prévus pour ce budget.

Après un an de fonctionnement, et à la suite des recommandations formulées dans mon rapport, l’application pour smartphone, dont j’avais relevé les insuffisances, fait l’objet actuellement d’une évaluation par l’Inspection générale de l’administration, laquelle doit se prononcer sur les améliorations possibles et les technologies alternatives pouvant être mises en œuvre. Si vous en avez eu connaissance, monsieur le ministre d’État, je vous serais reconnaissant de nous faire part des conclusions de l’Inspection générale.

Si cette évaluation est bienvenue, il me semble nécessaire de procéder à une réorientation stratégique plus large de ce projet avant que l’affectation des crédits de la phase 2, qui commence en 2020, ne soit effectuée.

Enfin, il me semble important d’évoquer la situation financière des SDIS, les services départementaux d’incendie et de secours, dont les budgets ont diminué de 1,27 % en valeur brute et de 1,47 % en volume en 2016, alors même qu’ils ont réalisé près de 4,5 millions d’interventions, en hausse de 2 %.

Cette baisse des budgets doit être compensée par la multiplication des mesures visant à parvenir à une meilleure maîtrise des dépenses des SDIS, ce qui passe notamment par une plus grande mutualisation. À cet égard, la réduction du nombre de numéros d’appel d’urgence et la recherche d’une plus grande mutualisation avec le SAMU, ainsi qu’entre les SDIS, doivent impérativement être poursuivies.

Cependant, le point le plus alarmant me semble concerner l’évolution des dépenses d’investissements des SDIS, en baisse de 4,58 % en 2015 et de 6,49 % en 2016. Ces baisses ne peuvent se poursuivre sans entraîner une perte de leur capacité opérationnelle.

Le Gouvernement ne semble pas avoir pris la mesure du problème, puisque la dotation aux investissements structurants des SDIS est réduite de 60 % en 2018. Cette dotation sera très majoritairement consacrée au financement du projet de système d’information unifié des SDIS et de la sécurité civile – le système de gestion des appels-système de gestion opérationnelle, ou SGA-SGO –, considéré à juste titre comme stratégique par le ministère de l’intérieur.

Toutefois, de l’avis général, son montant – 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour 2018 – est très insuffisant. Il me paraît indispensable que cette dotation soit réévaluée dans les années à venir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)