M. Jean Boyer. En outre, monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais être rassuré sur la possibilité d’accorder une certaine souplesse dans le versement des fonds aux PER qui n’auraient pas respecté les délais, pour des raisons justifiées.

En effet, en décembre dernier, 106 PER avaient un taux d’engagement inférieur à 60 %. Or la circulaire du 9 août 2007 précisait que les travaux devraient, dans tous les cas, être achevés en décembre 2009. Beaucoup craignent de perdre des crédits à la fin de l’année 2009 si toutes les actions ne sont pas encore engagées.

Dans certains cas, le retard accumulé n’est pas volontaire. Il peut être lié à des législations très précises et contraignantes comme la loi sur l’eau ou les règles d’urbanisme, pour lesquelles il existe des délais d’instruction compréhensibles. Au-delà de cette tolérance pour les PER retardataires, ne serait-il pas envisageable à l’avenir d’allonger le délai de réalisation au moins à trois ans ?

Dans la perspective d’une deuxième génération de PER, il me semble indispensable de tirer les leçons du dispositif actuel et d’améliorer le cadre général.

Ma première remarque concerne le financement.

J’ai déjà eu l’occasion de souligner, dans cet hémicycle, la complexité administrative des dossiers de PER, qui décourage parfois les meilleures volontés. De même, la multiplicité des fonds concourant au financement des PER rend celui-ci particulièrement obscur pour les porteurs de projets. La procédure d’attribution des offres est également trop contraignante. Il est nécessaire de faire évoluer les règles de gestion des contributions et de les rendre plus souples, si l’on veut garantir l’efficacité de la politique des PER. Plus que jamais, il est important que l’État s’efforce de respecter ses engagements afin de donner à l’excellence rurale les moyens de s’exprimer pleinement autour de projets finalisés et mûrement réfléchis.

L’idée d’une ligne budgétaire spécifique pour les PER est avancée. Elle aurait, monsieur le secrétaire d'État, le mérite de la clarté par rapport au fonds ministériel mutualisé, qui est peu visible pour les porteurs de projets.

En outre, si les PER ont permis de mobiliser des fonds d’État et des collectivités qui n’auraient pu être collectés autrement, les montants versés ont souvent été décevants par rapport aux enveloppes prévues au départ. Ainsi, il a parfois fallu négocier des plans de financement, certains aspects n’ayant pas été pris en compte lors du montage de l’opération. Dans certains cas, tous les financements n’ont pu être réunis.

Ma seconde remarque a trait au calendrier.

La durée de montage des dossiers a été trop rapide. En tant que membre de la commission nationale de présélection des pôles d’excellence rurale, j’ai pu noter la différence entre des projets qui visiblement avaient été prévus de longue date et pour lesquels seul le financement posait problème et des dossiers montés dans la précipitation, par des candidats voulant profiter de l’effet d’aubaine de ces nouveaux financements.

Il me semble indispensable de laisser au moins six mois aux porteurs de projet pour présenter leur dossier, afin que le partenariat puisse s’exercer entre tous les acteurs. Il est tout aussi indispensable que les porteurs de projets puissent bénéficier de conseils, et d’une ingénierie apte à les accompagner dans le montage de leur dossier.

Pour conclure, je souhaite tout d’abord remercier les deux ministres de l’époque qui ont pris la décision de labelliser plus de pôles qu’il n’avait été initialement prévu. Il fallait oser le faire dans le contexte budgétaire et social difficile de la France !

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez compris que nous attendons avec impatience la mise en œuvre d’une deuxième génération de PER, qui permette de faire écho au dynamisme des territoires ruraux.

Je vous remercie infiniment, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, de m’avoir écouté.

J’adresse également mes remerciements au groupe de travail, dont le capitaine, Rémy Pointereau, vient d’un département et d’une ville, Vierzon, où l’on fabriquait autrefois des locomotives.

M. Rémy Pointereau. Bientôt des TGV ? (Sourires.)

M. Jean Boyer. On y « fabrique » aujourd'hui des sénateurs qui ont envie de se battre pour leurs territoires ruraux et pour la France ! (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste et de lUMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui amenés à débattre sur les pôles d’excellence rurale.

Monsieur le secrétaire d’État, vous avez annoncé, à la fin de l’année 2008, vouloir lancer un nouvel appel à projets des pôles d’excellence rurale. Cet appel à projets aurait pour objectif de soutenir les projets de mutualisation de services publics dits innovants, tels que des relais de services publics ou encore des maisons de santé, ainsi que le développement durable des territoires.

Au préalable, il paraît judicieux de dresser un bilan des premiers projets labellisés depuis les trois dernières années.

Les pôles d’excellence rurale, qui avaient pour objectif de favoriser le développement des territoires ruraux, au même titre que les pôles de compétitivité envers les zones urbaines, ont connu, lors de leur lancement, un vif intérêt. En témoignent les 800 dossiers déposés en 2005, lors du premier appel à projets.

Ces pôles ont été créés afin de soutenir des initiatives locales, porteuses de projets créateurs d’emplois et innovants, autour de partenariats public-privé.

Sur le territoire, ce sont 379 projets qui ont reçu le label « pôle d’excellence rurale » en juin et décembre 2006. Ainsi, à titre d’exemple, dans le département des Côtes-d’Armor, quatre projets ont été labellisés. Le premier s’intitule « De l’amélioration de l’offre de soins à la production de biocarburants », le deuxième « Agricultures durables et nouveaux marchés », le troisième « Valorisation touristique du patrimoine rural en Trégor-Goëlo » et le quatrième « Cheval en Penthièvre ».

Les premiers éléments récoltés au plan local par les acteurs de PER concernent le manque de temps pour préparer et concrétiser les différentes actions.

En effet, les difficultés s’accumulent parfois, comme l’a souligné Jean Boyer – temps de coordination, permis de construire, normes, comité de défense contre les projets –, et cela pénalise financièrement la bonne volonté des acteurs locaux.

Dans les motivations des PER transparaissent des faiblesses réelles du territoire. Les PER traduisent une volonté de compensation de politiques qui ont fait défaut.

Je prendrai deux exemples.

Le premier concerne l’amélioration de l’offre de soins et la construction de trois maisons de santé. Il traduit le souci majeur des élus locaux de créer toutes les conditions pour accueillir ou maintenir des professionnels de santé en milieu rural.

Maire d’une commune proche de ce PER, je vais devoir accueillir la semaine prochaine un médecin roumain, car il est devenu impossible de faire venir des médecins français dans nos secteurs, et ce n’est pas la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » qui va régler le problème, tant s’en faut ! Alors, construire des maisons de santé, c’est bien, à condition que des professionnels veuillent bien s’y installer demain.

L’autre exemple concerne le PER « Cheval en Penthièvre », un projet d’animation équestre autour du haras national de Lamballe. Ce PER tente de compenser l’affaiblissement progressif des effectifs des haras nationaux et la politique d’abandon du Gouvernement. À intervalles réguliers, des menaces de fermeture définitive pèsent sur les deux seuls haras bretons subsistant : Lamballe et Hennebont.

Les pôles auraient à peine besoin d’exister s’il n’y avait eu auparavant toutes ces politiques d’abandon de la ruralité. Le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux voté en 2005 avait permis de mettre en évidence toutes les faiblesses de la ruralité sans apporter de solutions réellement efficaces.

L’ensemble des projets labellisés, représentant un investissement global de 1,2 milliard d’euros, devait permettre la création de 35 000 emplois dont 13 000 emplois directs. La participation financière de l’État était de 235 millions d’euros.

Dans votre bilan, monsieur le secrétaire d’État, vous vous félicitez d’avoir mis en place « un outil concret au service de la relance grâce aux investissements et aux créations d’emplois ». Cependant, lors du conseil des ministres du 13 mai dernier, vous annonciez la création de 6 000 emplois directs sur les 13 000 prévus, soit moins de la moitié !

Aujourd’hui, qui peut assurer que ces territoires ruraux connaissent véritablement la relance et le nouveau dynamisme tant espéré à travers la mise en place de ces pôles ? En témoignent les nombreux PER encore au stade de la mise en place. Comment le Gouvernement peut-il donc présenter un bilan si positif ?

Vous souhaitez lancer d’ici peu une troisième vague d’appel à projets. Aussi, il me semble important de faire remonter certaines des réserves et limites exprimées au sujet de la mise en œuvre de cette politique.

Concernant le mode de sélection, l’Union nationale des acteurs et des structures du développement local, l’UNADEL a émis quelques réserves. En effet, l’appel à projets consiste à mettre en concurrence les porteurs de projets. Au lieu d’encourager la coopération en faveur du développement de ces territoires, ce système favorise la concurrence des territoires. Ne serait-il donc pas judicieux de définir de nouvelles modalités de sélection des projets candidats ? Le but n’est-il pas d’aménager harmonieusement et de manière solidaire le territoire ?

Pour ce qui est du financement, les pôles d’excellence rurale ne prennent en charge que l’investissement. Ils n’apportent pas les ressources nécessaires au fonctionnement des équipements réalisés. Leur rôle ne risque-t-il pas d’être trop ponctuel et de laisser à terme aux collectivités locales la charge totale des projets ?

Cette labellisation s’ajoute à de nombreuses procédures existantes, comme les pays, les projets européens « Leader + » animés par les groupes d’action locaux, et le volet territorial des contrats de plan État-région. N’y a-t-il pas un risque de perte de lisibilité et de compréhension ?

La sélection des pôles par l’État est faite au détriment des collectivités territoriales, alors que ces dernières sont sollicitées afin de compléter le plan de financement, notamment les régions, qui sont les collectivités « chefs de file » en matière d’aménagement du territoire et de développement économique.

Les délais de mise en œuvre des projets paraissent inadaptés aux contraintes locales. À ce jour, 357 PER ont effectivement engagé leur projet d’investissement mais seul 100 l’ont fait en totalité, selon un article du 15 mai 2009, que l’on peut consulter sur le site internet « Portail du Gouvernement ».

En conclusion, il me semble prématuré d’engager une nouvelle vague d’appel à projets tant que les projets labellisés n’auront pas été complètement finalisés.

Je m’interroge aussi sur le mode de gouvernance des différents pôles, aussi bien PER que pôles de compétitivité. En effet, le principe des partenariats imposés public-privé accorde aux entreprises privées une place prépondérante dans l’aménagement du territoire.

Ce mode de gouvernance accentue également la disparité entre les territoires. Effectivement, les territoires bien dotés d’entreprises dynamiques et pouvant investir dans les partenariats public-privé vont profiter de cette aubaine au détriment des autres territoires.

La ruralité a besoin d’une égalité de traitement dans de multiples domaines. Complémentaire et interactive avec les zones urbaines, elle mérite mieux que des pôles d’excellence rurale. L’excellence est un « éminent degré de qualité, en un genre ». Sans vouloir atteindre ce niveau ponctuel ni créer quelques arbres pour cacher la forêt, nous demandons le maintien des services de proximité et des services publics dans leur globalité – soins, sécurité, écoles, poste, communications, déplacements –, ainsi que le soutien aux activités économiques, touristiques et agricoles.

Nous sommes loin du compte et ce ne sont pas la réforme territoriale et la volonté de l’État de contraindre les dépenses des collectivités locales qui vont contribuer, demain, au renouveau si attendu des espaces ruraux. Mais il n’est pas interdit de faire beaucoup plus et beaucoup mieux.

M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau.

M. Rémy Pointereau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Emorine, a souhaité, et je m’en réjouis, que la commission dresse cette année un bilan des pôles d’excellence rurale et formule des propositions. A été constitué un groupe de travail, qui m’a fait l’honneur de me choisir comme président. C’est à ce titre que je voudrais vous remercier, chers Jean-Paul Emorine et Jean Boyer, de cette occasion qui m’est donnée de présenter quelques réflexions que je peux tirer des auditions que nous avons menées depuis la mise en place de ce groupe de travail, au début du mois d’avril dernier. Autant dire qu’il s’agit aujourd’hui d’un bilan d’étape, avant la présentation de notre rapport, à l’automne prochain.

Le développement se fonde de plus en plus sur la mise en valeur des atouts propres à chaque territoire, et non sur des décisions centralisées déclinées uniformément d’un bout à l’autre de la France. De ce point de vue, la France a su – si on la compare avec les autres pays européens – conserver un espace rural riche. C’est ainsi que les communes rurales montrent leur attractivité en attirant de nouveaux résidents, depuis les années 1990.

Pourtant, la situation est très variable d’une région à l’autre : de nombreux territoires se sont retrouvés au fil des années livrés à eux-mêmes, à l’écart des grandes infrastructures de transports – s’il n’y a plus de locomotives à Vierzon,…

Mme Nathalie Goulet. À Granville non plus !

M. Rémy Pointereau. … j’espère bien que nous aurons, un jour, le TGV ! – et des réseaux numériques, loin des centres urbains des métropoles. L’agriculture et l’artisanat restent les moteurs traditionnels de l’économie rurale. Plus récemment, une nouvelle économie résidentielle, fondée sur les services aux habitants et aux touristes, modifie les termes du débat du développement rural.

Du fait même de cette diversité, et compte tenu de la multiplicité des niveaux de décision – à la réduction desquels nous travaillons par ailleurs – et de l’incertitude économique croissante, le territoire apparaît de plus en plus comme une échelle pertinente pour l’élaboration de l’action publique. Le territoire dont je parle, c’est d’abord le bassin de vie (M. Raymond Vall opine), qui correspond à l’espace vécu quotidiennement par nos concitoyens et par les entrepreneurs, qui travaillent ensemble.

La grande qualité de la politique des pôles d’excellence rurale, c’est d’avoir favorisé les projets qui prennent en compte l’échelle du territoire : d’abord, l’initiative et la conception du projet sont locales ; ensuite, le contenu du projet est fondé sur la mise en valeur des ressources naturelles et patrimoniales ; enfin, la gouvernance associe les acteurs locaux, aussi bien publics que privés.

Voilà une vraie nouveauté par rapport aux anciennes politiques d’aménagement du territoire fondées sur des schémas et des plans de développement décidés « d’en haut » !

Les PER ont fait confiance à « l’intelligence territoriale », c’est-à-dire à la capacité des territoires ruraux à être les acteurs de leur développement, en menant des actions fondées sur leurs atouts propres. En effet, qui peut mieux que les entrepreneurs ou les élus locaux se rendre compte que, dans telle vallée, une petite industrie agroalimentaire ne demande qu’à se lancer ? Que, dans tel département, la géothermie et la biomasse permettent de développer de nouvelles activités ? Et qu’ailleurs, les ressources touristiques locales peuvent faire naître des projets de formation innovants ?

Parmi les enseignements que notre groupe de travail a tirés des auditions menées, je retiens surtout l’investissement particulier des acteurs locaux autour de projets qu’ils ont imaginé et qu’ils animent tout au long de leur déroulement. Il faudra d’ailleurs certainement mettre en place des fonds d’animation pour permettre le lancement des projets. Tous nous ont signalé le dynamisme qui s’est manifesté lors des deux appels à projets de 2006 et 2007, lorsque plus de 700 dossiers ont été déposés en un temps record, parmi lesquels 379 ont été retenus – le même enthousiasme avait été constaté lors de la création des pôles de compétitivité. Les pays, les communautés de communes, les groupes d’action locale, les parcs naturels régionaux ont répondu présents à l’appel à projets et ont montré leur capacité à monter des projets, malgré toutes les difficultés qui s’y attachent, notamment pour boucler les plans de financement dans le délai de quelques mois imparti par les deux appels à projets.

L’intelligence territoriale, cela ne doit pas signifier que l’État abandonne son rôle dans l’aménagement du territoire, dans la solidarité nationale et dans les grandes impulsions. En effet, l’État a conservé, et doit conserver, un rôle essentiel.

Désormais, au lieu de faire, il fait faire. Pour cela, il fixe des orientations, mais fait confiance aux initiatives locales pour la définition précise des projets et pour leur mise en œuvre. La première génération des PER a ainsi privilégié la promotion des richesses patrimoniales, la valorisation des bio-ressources, l’offre de services et l’excellence technologique. L’État a orienté l’activité des PER vers des priorités qui apparaissent pertinentes à l’époque actuelle.

L’État a également apporté une reconnaissance, par un label « PER », lequel constitue un signe fédérateur qui fait connaître l’ambition du pôle.

L’État a, enfin, mobilisé des financements et ses services, comme nous avons pu le constater au cours de nos auditions. La DIACT, anciennement DATAR, a montré son rôle toujours moteur dans la modernisation des politiques d’aménagement du territoire. Les préfectures, chargées de la mise en œuvre au niveau local, ont été au contact des responsables de pôles et des maîtres d’ouvrage, en collaboration avec le CNASEA, Centre national pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles, devenu l’Agence de services et de paiement, pour le versement des aides.

Nous avons reçu des représentants de ces organismes, notamment le délégué interministériel Pierre Dartout, qui nous ont confirmé que les PER demeuraient un axe majeur de la politique de développement des territoires ruraux. Nous allons également rencontrer sur le terrain les 10 et 17 juillet prochain des acteurs locaux qui ont bénéficié du label « PER ».

L’État s’est mobilisé, car les PER sont soutenus au plus haut niveau. Je me réjouis que le Président de la République lui-même, qui fut à l’origine de la politique des PER alors qu’il était ministre de l’intérieur en 2005, ait, depuis l’an dernier, réaffirmé à plusieurs reprises son soutien au dispositif.

Monsieur le secrétaire d’État, vous êtes vous-même un excellent avocat des PER, dont vous avez dressé un bilan positif au cours du conseil des ministres du 13 mai dernier.

Initiatives locales et soutien de l’État, ces facteurs de succès des PER ne doivent toutefois pas masquer certaines limites du dispositif, qui pourrait être encore plus efficace.

Monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez fait l’honneur, dès le début du mois d’avril, de répondre à notre invitation. À cette occasion, j’ai été particulièrement sensible à vos propos sur la nécessaire souplesse qu’il convient d’observer dans la gestion de ces pôles. Nous l’avons constaté, certains pôles auront sûrement besoin, à la fin de l’année, d’un délai supplémentaire de quelques mois. N’abandonnons pas en route des initiatives prometteuses. Pourriez-vous confirmer cette volonté de souplesse ? En effet, il s’agit d’un vrai sujet d’inquiétude pour un certain nombre de pôles.

La question des modes de financement fait également l’objet de réflexions au sein de notre groupe de travail. À plusieurs reprises, on nous a signalé que les porteurs de projets manquaient de visibilité sur l’origine et la disponibilité des fonds, ce qui semble aussi être lié aux conditions dans lesquelles le mécanisme a été, à l’origine, mis en place. Ne faudrait-il pas prévoir des fonds spécifiques ciblés PER ?

Il convient, enfin, de réfléchir aux thématiques qui pourraient fédérer, dans les années à venir, les acteurs à l’échelle d’un territoire pour un nouvel appel à projets. Pour prendre un exemple, monsieur le secrétaire d’État, vous savez à quel point les services publics et au public, dont vous êtes d’ailleurs venu débattre ici même le 26 mars dernier, constituent un enjeu majeur en zone rurale. Ainsi, le vieillissement de la population française crée des besoins particuliers en zone rurale, où la population est souvent plus âgée et où les problèmes de déplacement sont plus aigus : voilà un vrai gisement d’emplois pour les territoires ruraux, les aides aux personnes fragiles devant représenter un quart des créations d’emplois d’ici à 2015, selon un rapport du Centre d’analyse stratégique !

Pour conclure, les pôles d’excellence rurale sont l’un des moyens qui permettent à des territoires ruraux de se prendre en charge pour organiser leur développement par le biais d’une contractualisation, ce qui est une bonne chose. Toutefois, ils ne peuvent pas tout faire : souvent, les projets qui naissent localement ne peuvent être couronnés de succès que si les infrastructures sont de qualité, si le marché de l’emploi local est adapté et si la réglementation en vigueur facilite la vie des projets. Notre soutien aux PER doit donc être compris comme une volonté de contribuer à un développement plus équilibré des territoires grâce à la conjugaison de toutes les dimensions de l’action publique, afin de donner à chacun d’entre eux les chances d’exploiter les atouts dont il dispose.

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de votre implication en faveur de la ruralité et de votre volonté de lancer une deuxième génération de pôles d’excellence rurale. Nous aurons l’occasion de débattre à nouveau de ce sujet dès l’automne prochain, lors de la remise de notre rapport. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Raymond Vall. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

M. Raymond Vall. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier le président Jean-Paul Emorine, Jean Boyer et Rémy Pointereau d’avoir accepté la création de ce groupe de travail sur les pôles d’excellence rurale ; nous en avions discuté dès nos premières rencontres. Je tiens également à féliciter Rémy Pointereau du travail qu’il a réalisé tout au long des auditions.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie, ainsi que vos collaborateurs, de votre écoute. En effet, lors de chacune de nos entrevues, la rencontre a été fructueuse et le dialogue positif. (Très bien ! sur plusieurs travées du RDSE.)

Je le dis d’emblée, je suis un fervent partisan des pôles d’excellence rurale.

Mme Nathalie Goulet. Moi aussi !

M. Raymond Vall. Je suis élu d’un territoire où nous avons vu émerger ces pôles de compétitivité, et je parle en présence de l’un de mes collègues de la région Midi-Pyrénées, président d’un pôle de compétitivité.

Lorsque Toulouse est passée d’un seul coup à trois pôles de compétitivité, nous avons bien sûr eu peur. En effet, concentrer sur une métropole la recherche, l’université, les entreprises et les moyens financiers privés comme publics pouvait aboutir à la création de trous noirs – si vous me permettez cette expression, s’agissant d’un territoire qui traite de l’astronomie ! – et à la désertification de toutes les zones périphériques.

La création de ces pôles a suscité beaucoup d’espoir. Nous nous sommes jetés à corps perdu dans cette démarche. Je ne reviendrai pas sur le fait qu’un délai de quatre mois est trop court. La première génération de PER étant axée sur la création d’emplois, il était très difficile de faire émerger un projet dans un tel délai.

À cette occasion, nous avons bien sûr constaté le déficit d’ingénierie de ces territoires, qu’il s’agisse de pays, d’intercommunalités, de communes ou de syndicats. Nous avons également relevé la faiblesse de la coopération avec les chambres consulaires et tous ceux qui pouvaient fournir des informations pour le lancement des pôles.

Toutefois, le résultat est excellent. En effet, ont été sauvés 372 pôles, qui ont donné de l’espoir et permis à des territoires d’engager une dynamique, de faire coopérer des élus, des entreprises, des partenaires tels que les préfectures, mais aussi les collectivités territoriales lorsqu’elles ont bien voulu participer et quand les compétences le permettaient.

Il faut bien sûr tirer les enseignements de ce qui s’est passé. D’un côté, l’État accepte de labelliser un projet qu’il reconnaît comme efficace, notamment dans le domaine économique ou dans celui des services à la personne, et octroie des moyens financiers permettant d’investir et incitant d’autres partenaires à faire de même ; de l’autre, sur le même territoire, il continue à fermer des services publics. Une telle situation est incohérente ; ce n’est pas acceptable. Il s’agit d’un sujet qui me tient à cœur et dont nous avons discuté lorsque nous nous sommes rencontrés, monsieur le secrétaire d’État.

Dans le nouveau cahier des charges qui doit être élaboré, il faudra donner plus de temps et encourager, comme l’a rappelé mon collègue Rémy Pointereau, le choix d’une échelle correspondant à un bassin de vie, c'est-à-dire un territoire réunissant de 15 000 à 30 000 habitants, qui n’est pas encore totalement intégré dans une intercommunalité, mais qui devra l’être dans trois ans.

M. Raymond Vall. Ce territoire doit être un partenaire à qui l’on dit : nous reconnaissons votre projet, nous reconnaissons qu’il va contribuer à fixer des populations actives et donc à endiguer la désertification. En contrepartie, l’État doit, par une convention, s’engager à maintenir les services publics sur ce territoire ! (Marques d’approbation sur plusieurs travées du RDSE.) Cette rencontre historique, il faut l’organiser. C’est la dernière chance pour la survie de la ruralité.

M. Raymond Vall. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre écoute. J’espère que vos réponses nous laisserons un peu d’espoir. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de lUnion centriste et de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Paul Raoult.

M. Paul Raoult. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous venons d’entendre des propos très lyriques. Je suis d’accord avec la plupart d’entre eux, car des projets de développement rural de ce type sont positifs. Leur création a d’ailleurs reçu un accueil extrêmement favorable. Les pôles d’excellence rurale ont en effet apporté élan et espoir à l’immense majorité des zones rurales.

Beaucoup de territoires s’y sont donc investis. Pour ma part, en tant que président de pays et du parc naturel régional de l’Avesnois, je veux indiquer que deux projets ont été lancés : l’un concernant la pierre bleue et le bois, l’autre touchant au Maroilles.

Je le répète, l’idée des PER est excellente. Cela étant, même si je ne veux pas jouer les rabat-joie, il faut regarder les choses avec lucidité.

Après la sortie du film Bienvenue chez les Ch’tis, nous espérions pouvoir développer la production de Maroilles. Il faut dire qu’elle est nettement plus faible dans le Nord qu’en Picardie. Un bâtiment a été construit, une équipe de production a été mise en place, mais, il y a un mois environ, on a dû déposer le bilan. Nous sommes aujourd’hui dans l’expectative quant à la poursuite de ce projet, qui est pourtant excellent. Par parenthèse, je sais que la promotion de la pierre bleue et le développement de la filière bois présentent des perspectives plus favorables.

Comment tirer les leçons de cet échec, qui me désespère ?

Premièrement, il me paraît évident, comme cela a déjà été dit, que les zones rurales manquent d’ingénierie.