Articles additionnels avant l'article 33
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration
Article additionnel avant l'article 34

Article 33

L'article L. 213-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par les mots : «, soit d'un arrêté de reconduite à la frontière pris, moins d'un an auparavant, sur le fondement du 8° du II de l'article L. 511-1 et notifié à son destinataire après la publication de la loi n°          du                   relative à l'immigration et à l'intégration ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 196 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et  M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 394 est présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° 196.

M. Richard Yung. En l'occurrence, il s'agit d'un amendement de suppression, ce qui ne surprendra personne.

La proposition qui nous est faite, en effet, fait partie, à nos yeux, de cette politique du « tout-répressif » - nous avons déjà amplement développé notre point de vue sur ce sujet - mais aussi du « tout-inutile ». (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'esclaffe.)

En effet, il existe déjà des procédures grâce auxquelles l'interdiction d'accès au territoire dans les conditions prévues dans la nouvelle rédaction de l'article 33 peut être prononcée : l'article L. 213-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui permet d'interdire l'accès au territoire pour la préservation de l'ordre public, par exemple en cas d'interdiction d'accès au territoire ou d'arrêté d'expulsion ; la loi du 18 mars 2003, qui permet la reconduite à la frontière si la personne concernée, qu'elle soit ou non en possession d'un visa, trouble l'ordre public ; la loi du 26 novembre 2003, qui a étendu le dispositif à ceux qui travaillent de façon clandestine alors qu'ils n'ont qu'un visa touristique.

La rédaction qui nous est proposée est inutile et, en fait, dangereuse, puisqu'elle tend surtout à ce que l'accès du territoire puisse être refusé sans que cette interdiction soit motivée. Il y a là une atteinte aux droits fondamentaux. C'est une disposition très grave au regard des droits de l'homme. Il est possible que cette mesure soit déférée au Conseil constitutionnel et que celui-ci soit donc amené à se prononcer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 394.

Mme Josiane Mathon-Poinat. La loi du 26 novembre 2003 a prévu la possibilité de prononcer contre une personne étrangère une mesure de reconduite à la frontière sur le fondement de la menace à l'ordre public édictée au 8°de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

L'article 33 du présent projet de loi prévoit la possibilité de lui refuser l'accès au territoire français pendant un an : est ainsi réintroduite dans la législation l'interdiction administrative du territoire. Si l'on y accole la disposition de l'article L. 624-1, qui fait du retour un délit punissable de trois ans de prison, tous les éléments sont réunis pour que la mesure de reconduite à la frontière emporte de plein droit l'interdiction du territoire.

Il y a là un glissement très dangereux, une nouvelle double peine, en quelque sorte.

De plus, est confié au préfet le contrôle de l'accès au territoire.

La possibilité de prendre un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ne visait jusqu'alors qu'à mettre fin à une situation irrégulière. La menace à l'ordre public devait être établie pour interdire l'accès au territoire lors de l'examen de la demande de visa. Demain, si cet article était adopté, et comme le souligne très justement la commission, « la menace à l'ordre public n'aurait pas à être spécialement établie ». Une menace « simple » pourra donc entraîner un refus de visa.

La disposition insérée dans l'article 33 a pourtant été censurée par le Conseil constitutionnel, dans une décision en date du 13 août 1993 prise sur le fondement de l'article VIII de la Déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée. »

Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a considéré qu'une punition, à savoir l'interdiction du territoire, était prononcée sans égard quant à la gravité du comportement ayant motivé l'arrêté de reconduite à la frontière et sans possibilité d'en dispenser l'intéressé, ni d'en faire varier la durée.

L'automaticité de la mesure prévue par l'article 33 ignore ce critère de gravité et interdit tout aménagement de la peine.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet article 33 vise à ce que soit refusée l'entrée sur le territoire français aux étrangers qui, moins d'un an auparavant, ont été frappés d'un arrêté de reconduite à la frontière édicté au cours d'un séjour de moins de trois mois. Il tend, notamment, à lutter contre le travail clandestin et les filières liées à cette situation.

Aussi, la commission est défavorable à ces deux amendements de suppression.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. J'aimerais que chacun sache exactement de quoi nous parlons.

À qui s'applique la double peine ? Je n'ai pas envie de faire de polémique...

M. Christian Estrosi, ministre délégué. ...mais je rappelle que, sur ce sujet, nous avons partagé les mêmes convictions. Vous avez proposé la suppression de la double peine. M. Nicolas Sarkozy a inscrit dans notre législation la suppression de cette double peine.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Mais pas encore dans la réalité !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Si ! La double peine concerne un étranger installé en France de manière durable, ayant des intérêts personnels, une famille, et qui commet un délit : le fait de le sanctionner pour ce délit et de l'expulser constitue une double peine.

Dans le cas présent, il ne s'agit absolument pas de cette situation, il s'agit des visas Schengen, c'est-à-dire des visas touristiques d'une durée maximale de trois mois.

Ne me dites pas, madame le sénateur, que la mesure prévue à l'article 33 - le fait d'interdire le territoire national à un étranger venu pour trois mois en France et qui y commet un délit - s'assimile à une double peine !

J'attire votre attention sur le fait qu'au cours de l'année écoulée cent trente personnes, dans notre pays, ont été frappées par un tel arrêté. Qui étaient-elles ? Il s'agissait d'individus extrêmement dangereux, à savoir des proxénètes, des trafiquants d'armes, de drogue, d'enfants, des individus qui sont à la tête de filières criminelles particulièrement dangereuses.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils ne sont pas en prison ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Grâce à l'expulsion de ces cent trente personnes particulièrement dangereuses qui organisaient des filières pouvant, à tout instant, menacer la sécurité personnelle des citoyens français ou étrangers vivant en France, des centaines d'autres qui étaient exploitées et des milliers d'autres qui en subissaient les conséquences se sont trouvées mises à l'abri.

Comprenez bien une chose : de telles expulsions ne s'assimilent pas du tout à une double peine ; grâce à elles, nous mettons hors d'état de nuire sur le territoire national un certain nombre d'individus dangereux.

Par cet article 33, il ne s'agit de rien d'autre que de renforcer les moyens dont dispose l'État français pour lutter contre ces filières et contre ces individus. Je ne comprends donc pas vos arguments. Mais sans doute n'aviez-vous pas compris que ces mesures visaient ce genre d'individus ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. S'ils sont aussi dangereux, pourquoi ne sont-ils pas en prison ?

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 196 et 394.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 33.

(L'article 33 est adopté.)

Article 33
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Article 34

Article additionnel avant l'article 34

Mme la présidente. L'amendement n° 268, présenté par M. Frimat, Mme Alquier, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 213-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... . - Lorsque l'étranger  sollicite son admission au titre de l'asile, la décision de refus d'admission ne peut être prononcée qu'en raison du caractère manifestement infondé de la demande d'asile.

« Une demande d'asile a un tel caractère lorsqu'elle est manifestement insusceptible de se rattacher à des motifs de reconnaissance de la qualité de réfugié au sens de l'article L. 711-1 du présent code ou d'octroi de la protection subsidiaire au sens de l'article L. 712-1 du présent code. »

 

La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Par cet amendement, il s'agit de tenter de préciser la notion de demande manifestement infondée.

Nous sommes tous conscient des conséquences graves qu'une décision erronée, et il peut s'en produire, peut avoir pour le demandeur d'asile. Il convient donc de préciser juridiquement ce que signifient les mots « manifestement infondée ». Je reconnais que ce n'est pas chose aisée, car le terme « infondé » vient d'un barbarisme anglais mal traduit et on se trouve donc souvent dans une situation juridique incertaine.

Nous proposons de retenir la définition fondée sur les conclusions du comité exécutif du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés, auquel on peut reconnaître une certaine expertise en ce domaine. Cette définition renvoie aux articles L. 711-1 et L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui reprennent ces éléments.

En effet, selon l'article L. 711-1 du présent code, « la qualité de réfugié est reconnue à toute personne persécutée en raison de son action en faveur de la liberté ainsi qu'à toute personne sur laquelle le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés exerce son mandat aux termes des articles 6 et 7 de son statut tel qu'adopté par l'Assemblée générale des Nations unies le 14 décembre 1950 ou qui répond aux définitions de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ». L'objectif de notre amendement est donc de nous permettre de disposer d'une référence plus précise.

Ensuite, selon l'article L. 712-1, « sous réserve des dispositions de l'article L. 712-2, le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mentionnées à l'article L. 711-1 et qui établit qu'elle est exposée dans son pays à l'une des menaces graves suivantes :

« a) la peine de mort ;

« b) la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

« c) s'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ».

Il s'agit donc d'une tentative de précision juridique afin que l'on sache exactement de quoi on parle.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Actuellement, c'est l'OFPRA, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui se prononce sur les demandes d'asile à la frontière. Compte tenu de sa compétence particulière en la matière, il est tout à fait susceptible d'appréhender ces situations de la meilleure façon possible. C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 268.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 34
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Article 35

Article 34

L'intitulé du titre Ier du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé : « L'obligation de quitter le territoire français et la reconduite à la frontière ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 197 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et  M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 395 est présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Frimat, pour présenter l'amendement n° 197.

M. Bernard Frimat. Il s'agit d'un amendement de coordination.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 395.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, je n'ai pas demandé à intervenir tout à l'heure afin de ne pas allonger le débat, mais je profite d'avoir la parole pour vous faire part de mon étonnement. Comment se fait-il que les 130 personnes - proxénètes, trafiquants et autres dangereux individus - dont vous nous avez parlé ne soient pas en prison et continuent à se balader en Europe ? Je ne comprends pas ! (Exclamations sur le banc des commissions.) On entend beaucoup de choses dans cet hémicycle. Vous me permettrez donc de formuler quelques remarques sur la façon dont vous nous présentez les choses.

J'en viens à l'amendement n° 395. Si l'article 34 paraît de pure forme, il s'agit en fait d'une disposition qui anticipe la décision de notre assemblée concernant l'article 36, qui crée cette mesure. Notre demande de suppression de cet article, ou en quelque sorte de coordination préventive, est ainsi conforme à notre refus de voir adoptée cette nouvelle mesure administrative d'éloignement qu'est l'obligation de quitter le territoire français, l'OQTF - sigle formidable ! -, qui serait associée à une décision préfectorale statuant sur un titre de séjour.

Dans l'état actuel de la législation, un étranger qui fait l'objet d'un refus de délivrance, de renouvellement ou de retrait de titre de séjour se voit notifier par l'administration une décision correspondant à une de ces trois situations et invitant en général l'étranger à quitter le territoire. Celui-ci peut alors engager, dans le délai de deux mois, les recours administratifs habituels, s'il conteste la décision prise à son encontre.

Si l'article 36 était adopté, ce dispositif serait bouleversé. Sous couvert de simplification et de réduction du contentieux - ce qui reste à prouver -, cette nouvelle mesure constitue une atteinte de plus aux droits fondamentaux des personnes et un affichage de la façon dont vous entendez traiter les étrangers.

Il s'agit d'une mesure de contrainte - « l'invitation » devenant « obligation », car vous jouez en plus sur les mots - réglant en une seule fois la situation de l'étranger concerné. Quant au nouveau dispositif de recours, il constitue une régression par rapport à la situation actuelle.

Ainsi que le dénoncent de nombreuses organisations, cette disposition rendrait très difficile toute possibilité d'examen de la situation des personnes, dans un premier temps quant à leur droit au séjour, dans un second temps quant à leur souhait de repartir volontairement, et enfin quant aux conséquences d'un retour forcé au regard de leurs droits fondamentaux.

Nous reviendrons bien entendu au cours du débat sur tous ces éléments et sur leurs conséquences. Mais, d'ores et déjà, nous demandons la suppression de l'article 34.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.

S'agissant du fond, nous nous expliquerons au moment de l'examen de l'article 36.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Même avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 197 et 395.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 34.

(L'article 34 est adopté.)

Article 34
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Article 36

Article 35

L'intitulé du chapitre Ier du titre Ier du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé : « Cas dans lesquels un étranger peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 200 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et  M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 396 est présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Frimat, pour présenter l'amendement n° 200.

M. Bernard Frimat. Il s'agit d'un amendement de coordination.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 396.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est également un amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 200 et 396.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 35.

(L'article 35 est adopté.)

Article 35
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Article 37

Article 36

L'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Les dispositions actuelles constituent un II ;

2° Au début de l'article, il est inséré un I ainsi rédigé :

« I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa.

« La même autorité peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse à quitter le territoire français lorsqu'elle constate qu'il ne justifie plus d'aucun droit au séjour tel que prévu par l'article L. 121-1.

« L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Durant ce délai, l'étranger a la possibilité de solliciter le dispositif d'aide au retour financé par l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration.

« Les dispositions du titre V du présent livre peuvent être appliquées à l'étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès l'expiration du délai prévu à l'alinéa précédent. » ;

3° Les 3° et 6° sont abrogés.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 201 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et  M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 397 est présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° 201.

M. Richard Yung. Cet article réforme de façon importante le contentieux administratif en matière de droit des étrangers.

Actuellement, dans trois hypothèses - le refus de délivrance, le refus de renouvellement et le retrait d'un titre de séjour -, l'administration procède de la façon suivante : la décision de refus ou de retrait est assortie d'une invitation à quitter le territoire dans un délai d'un mois. Ce délai coïncide avec la possibilité de solliciter le dispositif d'aide au retour financé par l'ANAEM, l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations, qui a remplacé l'OMI, l'Office des migrations internationales.

Cette décision est alors susceptible d'un recours gracieux ou d'un recours contentieux auprès du tribunal administratif. Mais aucun de ces recours n'est suspensif de la décision de refus ou de retrait. Passé le délai d'un mois à compter de l'invitation à quitter le territoire, l'administration a la possibilité de prendre un arrêté de reconduite à la frontière, mesure d'éloignement contraignante qui peut, à son tour, faire l'objet d'un recours contentieux devant le tribunal administratif dans un délai de 48 heures.

Dans les trois mêmes hypothèses, le projet de loi prévoit que l'administration peut assortir sa décision de refus ou de retrait d'un titre de séjour ou du récépissé de demande de carte de séjour d'une OQTF. L'étranger dispose alors d'un délai d'un mois pour quitter le territoire volontairement.

En revanche, passé ce délai, l'OQTF vaut mesure d'éloignement contraignante : l'administration n'a pas besoin de prendre une nouvelle décision. Ainsi, le refus de délivrance, de renouvellement ou de retrait d'un titre de séjour, et l'OQTF qui peut l'accompagner constituent les deux volets d'une décision unique, qui ne peut faire l'objet que d'un seul recours devant le tribunal administratif. Celui-ci doit être introduit dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision de refus ou de retrait, assortie d'une OQTF. Ce recours suspend l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, sans pour autant faire obstacle au placement en rétention administrative.

Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine.

Si l'obligation de quitter le territoire est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance et l'étranger est muni d'un titre de séjour provisoire jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas.

Présentée abusivement comme une simplification administrative, la radicalisation apparente de l'éloignement repose sur une logique d'affichage. Elle peut s'avérer le cas échéant, et dans l'hypothèse de la mise en place de quotas nationaux ou ethniques, être une arme d'autant plus redoutable que l'appel reste non suspensif.

Sous prétexte de désengorger les tribunaux et de fusionner les décisions de refus ou de retrait du titre de séjour avec la décision de reconduite à la frontière, cet article prive les étrangers du droit de se défendre, ce qui représente, à nos yeux, une régression inacceptable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 397.

Mme Éliane Assassi. L'article 36 crée l'OQTF, mesure directement inspirée du projet de directive européenne sur les normes et procédures communes en matière d'éloignement du territoire.

Il s'agit d'associer à une décision de l'administration préfectorale statuant sur un titre de séjour non plus une mesure d'invitation à quitter le territoire français, comme c'est le cas actuellement, mais une décision distincte, l'obligation de quitter le territoire français. Cette mesure de contrainte, car il s'agit d'une obligation et non plus d'une invitation, présente l'avantage, pour les préfectures, de ne plus avoir à prendre, après une décision rendue sur un titre de séjour, une mesure de reconduite à la frontière quelques semaines après.

Le cas de l'étranger serait ainsi réglé en une seule fois, le refus de séjour étant associé automatiquement à l'obligation de quitter le territoire. L'étranger aurait donc un mois après la notification conjointe pour quitter le territoire français. Une fois passé ce délai, l'OQTF deviendrait elle-même une décision permettant la mise en oeuvre d'une mesure d'éloignement, à l'instar de l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière.

Le Gouvernement justifie ce nouveau régime en arguant du fait que l'OQTF va simplifier les procédures et désengorger les tribunaux administratifs, grâce à la mise en place d'un contentieux unique pour le refus de séjour et la reconduite à la frontière.

Or, ces objectifs ne seront pas atteints, bien au contraire !

Tout d'abord, le recours unique ne désengorgera pas les tribunaux : il conduira à systématiser les recours contentieux contre les décisions de refus de séjour, car cette réforme empêchera tout recours administratif, hiérarchique ou gracieux.

Ensuite, l'OQTF introduit confusion et complexité dans la mesure où le nouveau régime va coexister avec le recours en référé contre les refus de séjour et avec le recours contre les arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière, les APRF, notifiés par voie administrative.

Par ailleurs, le fait que l'audiencement des recours contre le refus de séjour et contre l'OQTF soit dissocié en cas de placement en rétention administrative laisse persister le système actuel.

Enfin, contrairement aux recours contre les APRF, la nouvelle procédure durera trois mois et fera appel à un commissaire au Gouvernement, même si le rôle de ce dernier est remis en cause par l'article 41 du projet de loi.

Cette garantie disparaît si l'étranger est en centre de rétention. Dans ce cas, le préfet informe le tribunal, qui statue en soixante-douze heures. Il paraît difficile d'organiser en trois jours une audience collégiale, ou même devant un juge unique, avec conclusions du commissaire au Gouvernement, d'autant que ce contentieux comporte une dimension humaine et subjective très forte qui devrait empêcher une justice trop expéditive.

Nous sommes foncièrement opposés à cette fusion des décisions de refus de séjour, d'invitation à quitter le territoire et de reconduite à la frontière qui ne vise qu'à rejeter les étrangers le plus facilement possible et le plus rapidement possible du territoire français.

Voilà donc la philosophie de votre texte, et tant pis pour les garanties procédurales et les droits fondamentaux des étrangers !

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter notre amendement de suppression de l'article 36.

Mme la présidente. L'amendement n° 49, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. Supprimer la deuxième phrase du troisième alinéa du texte proposé par le 2° de cet article pour le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

II. Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par un alinéa ainsi rédigé :

« L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français peut solliciter le dispositif d'aide au retour financé par l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations, sauf s'il a été placé en rétention. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L'article 36 prévoit que l'aide au retour peut être sollicitée par l'étranger au cours du délai d'un mois qui suit la notification de l'obligation de quitter le territoire français, c'est-à-dire pendant la période où cette décision n'est pas exécutoire.

Dans la droite ligne de la recommandation n° 39 de la commission d'enquête, la commission des lois propose d'étendre la possibilité de solliciter l'aide au retour à l'étranger sous le coup d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière.

Naturellement, cette mesure ne s'appliquerait pas aux personnes placées en centre de rétention en vue de leur éloignement.

Je demande, madame la présidente, la priorité pour le vote de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Favorable.

Mme la présidente. La priorité est de droit.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 201 et 397 ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Le projet de loi regroupe les deux procédures distinctes, l'une relative au titre de séjour, l'autre à l'éloignement, qui coexistent aujourd'hui et qui sont assez lourdes pour les juridictions administratives.

À ce jour, les voies de recours prévues pour chacune de ces deux procédures obéissent à des délais très différents. Au-delà de la simplification administrative, l'unification de la procédure s'accompagnera d'une unification du délai à un mois, ce qui constituera d'ailleurs un avantage par rapport à la situation actuelle. En effet, pour les APRF, les recours doivent être exécutés dans un délai de quarante-huit heures ou de sept jours, alors que l'étranger aura désormais un mois pour effectuer un recours.

Faut-il également rappeler qu'à l'occasion des auditions menées par la commission d'enquête le président du tribunal administratif de Paris avait jugé cette réforme utile ? Elle l'est d'autant plus que le projet de loi supprime la notification postale des arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière, qui se sont révélés peu efficaces.

La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements identiques nos 201 et 397.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. J'ai bien compris que Mme Assassi comme M. Yung, en présentant de manière générale leur amendement, exprimaient en fait leur position d'ensemble sur les articles 36 à 58 du projet de loi. Ils me permettront d'en profiter pour exprimer la position du Gouvernement à la fois sur ces deux amendements en particulier et, en général, sur ces articles relatifs à la réforme des mesures d'éloignement et du contentieux qui s'y rapporte.

Je commencerai par préciser que c'est le Conseil d'État qui, en tant que gestionnaire des tribunaux administratifs, a expressément demandé au Gouvernement d'engager cette réforme.

Pour repositionner le problème, je rappellerai aussi que le contentieux du séjour des étrangers devant les tribunaux administratifs a littéralement explosé : on est passé de 20 000 affaires en 2000, soit 16 % du total des requêtes, à 40 000 affaires en 2005, soit 24 % du total des requêtes.

Ces contentieux sont d'autant plus nombreux qu'il y a des décisions « doublons » : d'abord, la décision n° 1 du refus du séjour, puis, décision n° 2, l'arrêté de reconduite à la frontière éventuellement pris un mois après la décision n° 1. Préfectures et tribunaux administratifs font donc deux fois le même travail.

À la demande expresse du Conseil d'État, le Gouvernement a travaillé depuis près d'un an à la définition d'un nouveau système qui respecte l'équilibre entre deux exigences, la simplification administrative et le respect des droits des étrangers.

Le dispositif a reçu l'avis favorable du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et a été approuvé par l'assemblée générale du Conseil d'État.

Mme Assassi, vous avez abordé la question de la collégialité, qui a plus particulièrement trait à l'article 41 qu'à l'article 36 lui-même.

M. Bernard Frimat. On y reviendra !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Mon propos est général : tout ce que j'ai à dire aura été dit, mais vous aurez, bien sûr, tout loisir de revenir sur ces questions si vous le souhaitez.

D'abord, il est exact que le recours formé par l'étranger placé en centre de rétention administrative contre la décision d'obligation de quitter le territoire français sera jugé par un juge administratif. Selon la procédure de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, repris dans l'article L. 776-1 du code de justice administrative, le jugement doit se faire dans un délai très bref, soit soixante-douze heures. C'est, ni plus ni moins, la procédure actuellement prévue - juge unique donc - pour les arrêtés de reconduite à la frontière qui s'appliquera.

Ensuite, la loi ne se prononce pas sur la question de la formation de jugement retenue par le tribunal administratif pour juger des recours contre la décision de refus de titre de séjour assortie d'obligation de quitter le territoire français lorsque l'étranger n'est pas placé en centre de rétention administrative.

Sur ce point, le Conseil supérieur des tribunaux administratifs, qui a approuvé, je le rappelle, le texte qui vous est soumis, estime que cette question relève non pas de la loi mais de la partie réglementaire du code de justice administrative, préparée par le ministère de la justice.

Il est donc totalement exclu d'accepter un amendement qui se prononcerait sur la composition de la formation de jugement, formation collégiale ou juge unique, en cette matière réglementaire.

Enfin, j'entends bien que des organisations syndicales des magistrats des tribunaux administratifs ne sont pas de cet avis. Ces organisations sont cependant représentées au sein du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et il leur appartient dans cette enceinte, et dans cette enceinte seulement, de faire valoir leurs arguments.

Telle est donc la position du Gouvernement s'agissant des articles 36 à 58 ; bien évidemment, il émet un avis défavorable sur les amendements nos 201 et 397, et un avis favorable sur l'amendement n° 49.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il est suffisamment rare que des juges administratifs se mettent en grève pour que leurs propos méritent que l'on y prête attention.

En l'occurrence, monsieur le ministre, vous arguez de la simplification des procédures, mais nous arguons, nous, des droits fondamentaux, et nous considérons que, quel que soit l'engorgement des tribunaux, qui constitue en lui-même une question dont on pourrait longtemps discuter, il est inacceptable que l'on puisse admettre, parce qu'il s'agirait de personnes étrangères, un recul de ces droits.

C'est la raison pour laquelle nous avons déposé des amendements, sur cet article et sur les suivants.

Mme la présidente. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.

Mme Bariza Khiari. L'article 36 nous éloigne des procédures actuelles, qui offraient aux étrangers un minimum de garanties en leur permettant de présenter deux recours distincts et de voir leur situation personnelle réellement étudiée.

Il est indubitable que les tribunaux administratifs sont débordés par l'explosion des contentieux liés aux refus de séjour et aux reconduites à la frontière. Le contentieux du droit des étrangers représentait 10 % des requêtes présentées aux tribunaux administratifs voilà dix ans, contre 25 % aujourd'hui. Une forte pression s'exerce donc sur les juges du fait du poids de ce contentieux.

Pour autant, la solution à cet engorgement des tribunaux ne doit absolument pas être la remise en cause des recours telle que vous la proposez.

Monsieur le ministre, vous subordonnez l'équité du procès et les droits de la défense à l'efficacité administrative.

Les tribunaux administratifs ont besoin d'une augmentation substantielle de leurs moyens et de leurs effectifs pour mener à bien leurs missions et pour que la qualité du jugement soit préservée. Vous ne pouvez prétendre réformer la justice et la rendre plus efficace en supprimant les contentieux et en ne permettant pas aux personnes de se défendre contre des décisions administratives trop souvent arbitraires.

Alors que vous prétendez apporter de la clarté et de la cohérence aux procédures de recours juridictionnel, vous ne faites que les obscurcir et les rendre encore plus difficilement applicables dans les faits.

Cette réforme des procédures de recours vise en fait à détourner ces procédures de leur objectif initial, qui est de permettre aux étrangers de contester lors d'un procès équitable les décisions qui ont été prises à leur détriment.

Cette réforme des procédures de recours, destinée en fait à priver les étrangers de leurs droits, n'est pas sans rappeler les méthodes prescrites par votre circulaire de février 2006.

Cette circulaire, adressée aux préfets et procureurs, organise en effet une véritable « traque » des étrangers irréguliers, avec, une nouvelle fois, l'efficacité administrative comme objectif affiché. Elle précise par exemple, avec un cynisme certain, la procédure à suivre pour piéger les requérants au droit d'asile ou à un titre de séjour dans les préfectures : il suffit de les y faire venir grâce à une convocation qui doit exclure, bien entendu, « toutes indications relatives à l'éventualité d'un placement en rétention, tout descriptif [étant] à proscrire ».

Ces méthodes montrent que l'on aurait bien tort de manquer de vigilance quant aux droits fondamentaux et aux libertés publiques.

C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à voter la suppression de l'article 36.

Mme la présidente. Je mets aux voix, par priorité, l'amendement n° 49.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 201 et 397 n'ont plus d'objet.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l'article 36.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le ministre, j'ai été attentive à vos arguments mais sur le fond, ils ne m'incitent pas à modifier le vote contre du groupe communiste républicain et citoyen sur l'article 36. C'est terrible ! (Sourires.)

Comme nous avons déjà eu l'occasion de le dire, sous prétexte notamment d'aménagements techniques ou de simplification des procédures, votre réforme revient, en réalité, à réserver aux étrangers un traitement expéditif - et c'est sur ce point que nous ne sommes pas d'accord, monsieur le ministre -, au mépris de leurs garanties et de leurs droits les plus élémentaires.

Faut-il rappeler qu'il s'agit ici de la liberté d'aller et venir de personnes de droit ?

J'insiste sur le fait que, loin de désengorger les tribunaux administratifs, loin de simplifier les procédures, cette réforme produira exactement l'effet inverse.

N'est-ce pas d'ailleurs le constat qu'a fait la commission d'enquête du Sénat sur l'immigration clandestine. Elle notait en effet, à propos de cette simplification des procédures, que « l'impact sur l'activité des juridictions ne serait peut-être pas aussi important qu'espéré ».

Notre collègue M. Buffet lui-même doute de l'efficacité de ce dispositif puisqu'il écrit dans son rapport : « Toutefois, pour que la réforme du contentieux de l'éloignement soit réellement efficace, il semble à votre rapporteur que les services de police et de gendarmerie devront se donner les moyens d'exécuter rapidement les OQTF. À défaut, ils risquent d'être exécutés aussi rarement que les APRF notifiés par voie postale. »

Je pense sincèrement qu'il s'agit là d'un mauvais dispositif, inefficace, dangereux au regard des droits de la personne et des garanties procédurales, inutile... et que nous devons le retirer du présent projet de loi.

Aussi, je vous invite, mes chers collègues, à ne pas voter l'article 36 tel qu'il est rédigé. Nous demandons un scrutin public, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 36, modifié.

Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 210 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 329
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 202
Contre 127

Le Sénat a adopté.