Art. 18
Dossier législatif : projet de loi relatif au divorce
Art. 20

Article 19

Le paragraphe 5 de la section 2 du chapitre III du titre VI du livre Ier du même code devient le paragraphe 4. Il comprend l'article 285-1 ainsi rédigé :

« Art. 285-1. - Si le local servant de logement à la famille appartient en propre ou personnellement à l'un des époux, le juge peut le concéder à bail au conjoint qui exerce seul ou en commun l'autorité parentale sur un ou plusieurs de leurs enfants lorsque ceux-ci résident habituellement dans ce logement et que leur intérêt le commande.

« Le juge fixe la durée du bail et peut le renouveler jusqu'à la majorité du plus jeune des enfants.

« Le juge peut résilier le bail si des circonstances nouvelles le justifient. » - (Adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)

PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif au divorce.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 20.

Chapitre IV

De la séparation de corps

Art. 19
Dossier législatif : projet de loi relatif au divorce
Art.  additionnels après l'art. 20 ou après l'art. 22

Article 20

I. - A l'article 297 du même code, il est inséré, après la première phrase, une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, lorsque la demande principale en divorce est fondée sur l'altération définitive du lien conjugal, la demande reconventionnelle ne peut tendre qu'au divorce. »

II. - Il est créé, après l'article 297 du même code, un article 297-1 ainsi rédigé :

« Art. 297-1. - Lorsqu'une demande en divorce et une demande en séparation de corps sont concurremment présentées, le juge examine en premier lieu la demande en divorce. Il prononce celui-ci dès lors que les conditions en sont réunies. A défaut, il statue sur la demande en séparation de corps.

« Toutefois, lorsque ces demandes sont fondées sur la faute, le juge les examine simultanément et, s'il les accueille, prononce à l'égard des deux conjoints le divorce aux torts partagés. »

III. - L'article 300 du même code est ainsi rédigé :

« Art. 300. - Chacun des époux séparés conserve l'usage du nom de l'autre. Toutefois, le jugement de séparation de corps ou un jugement postérieur peut, compte tenu des intérêts respectifs des époux, le leur interdire. »

IV. - Le troisième alinéa de l'article 303 du même code est remplacé par les deux alinéas suivants :

« Cette pension est soumise aux règles des obligations alimentaires.

« Toutefois, lorsque la consistance des biens de l'époux débiteur s'y prête, la pension alimentaire est remplacée, en tout ou partie, par la constitution d'un capital, selon les règles des articles 274 à 275-1 et 277. Si ce capital devient insuffisant pour couvrir les besoins du créancier, celui-ci peut demander un complément sous forme de pension alimentaire. »

M. le président. L'amendement n° 127, présenté par MM. Darniche et Durand-Chastel, Mme Desmarescaux, MM. Adnot, Seillier et Turk, est ainsi libellé :

« Au début de cet article, insérer un paragraphe additionel ainsi rédigé :

« ... - L'article 296 du code civil est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Tout au long de la procédure de la séparation de corps, le juge sensibilise, chaque fois que nécessaire, le couple à sa coresponsabilité parentale en vue de garantir la sécurité de leurs enfants jusqu'au prononcé définitif du jugement exécutoire.

« Afin de répondre aux situations d'urgence et de prévenir tout déplacement parental des enfants vers l'étranger, il peut statuer, lors des débats, sur leur protection en ordonnant temporairement l'interdiction de sortie du territoire des enfants sans l'autorisation des deux parents. »

La parole est à M. Hubert Durand-Chastel.

M. Hubert Durand-Chastel. Par coordination, je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 127 est retiré.

Je mets aux voix l'article 20.

(L'article 20 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 20

ou après l'article 22

Art. 20
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Art. additionnel après l'art. 20

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune. L'amendement n° 30, présenté par M. Cointat, Mme Brisepierre et M. Guerry, est ainsi libellé :

« I. - Après l'article 20, insérer un article additionnel rédigé comme suit :

« L'article 310 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - Lorsque la loi étrangère compétente réserve l'initiative du divorce ou de la séparation de corps au conjoint de sexe masculin ou, d'une manière générale, comporte des dispositions portant atteinte à l'égalité des droits entre les époux et dans leurs relations avec leurs enfants lors de la dissolution du mariage. »

« II. - En conséquence, après l'article 20, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :

« Chapitre... - Du conflit des lois relatives au divorce et à la séparation de corps. »

L'amendement n° 91, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mme M. André, M. Badinter, Mmes Cerisier ben Guiga et Durrieu, M. Lagauche, Mme Pourtaud et les membres du groupe Socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Après l'article 22, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« L'article 310 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - lorsque la loi étrangère compétente réserve l'initiative du divorce ou de la séparation de corps au conjoint de sexe masculin ou, d'une manière générale, comporte des dispositions portant atteinte à l'égalité des droits entre les époux et dans leurs relations avec leurs enfants lors de la dissolution du mariage. »

L'amendement n° 90 rectifié, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mme M. André, M. Badinter, Mmes Cerisier-ben Guiga et Durrieu, M. Lagauche, Mme Pourtaud et les membres du groupe Socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Après l'article 22, insérer un article additonnel ainsi rédigé :

« L'article 310 du code civil est complété par un alinéa rédigé :

« - lorsque les dispositions des lois étrangères sont contraires à l'ordre public international, au principe de non-discrimination énoncé à l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme et au principe de l'égalité entre les époux inscrit à l'article 5 du protocole additionnel n° 7 de cette convention. »

La parole est à Mme Paulette Brisepierre, pour présenter l'amendement n° 30.

Mme Paulette Brisepierre. Cet amendement est en quelque sorte un amendement de sauvegarde. Il concerne nos compatriotes ayant contracté un mariage à l'étranger, dans des pays où l'égalité ente l'homme et la femme n'est pas toujours reconnue.

En effet, dans certains pays, en cas de séparation, l'initiative du divorce ou de la séparation de corps revient au conjoint de sexe masculin, et il n'est généralement pas tenu compte de l'égalité de droits entre les époux, notamment en ce qui concerne les enfants.

Le 21 février 2002, un amendement identique a déjà été adopté à l'unanimité, avec l'avis favorable de la commission des lois et du Gouvernement, lors de la discussion de la proposition de loi portant réforme du divorce. Comme l'avait alors indiqué M. Patrice Gélard, rapporteur de cette proposition, cet amendement « ne fait que retranscrire la jurisprudence actuelle de la Cour de cassation, jurisprudence qu'il ne faut pas examiner à la lumière de l'arrêt du 3 juillet 2001, qui avait reconnu la validité d'une répudiation mais prononcée en Algérie et impliquant deux Algériens ».

L'amendement a pour objet de donner toute son importance au principe d'égalité entre l'homme et la femme, inscrit dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, dont le législateur doit assurer le respect et qui a été consacré par plusieurs conventions internationales.

Aux termes du troisième alinéa de ce préambule, « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme ».

L'article 16 de la convention des Nations unies du 18 décembre 1979 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes prévoit que « les Etats parties prennent toutes mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans toutes les questions découlant du mariage et dans les rapports familiaux et, en particulier, assurent, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, les mêmes droits et les mêmes responsabilités au cours du mariage et lors de sa dissolution ».

Cette convention a été ratifiée par la France. Il convient de lui donner son plein effet dans la mesure où elle n'est pas, sur ce point, d'application directe par les tribunaux en raison des termes employés - « les Etats parties prennent toutes mesures » -, qui supposent une intervention éventuelle du législateur.

L'article 23, quatrième alinéa, du pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 dispose : « Les Etats parties au présent pacte prendront les mesures appropriées pour assurer l'égalité de droits et de responsabilités des époux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution. En cas de dissolution, des dispositions seront prises afin d'assurer aux enfants la protection nécessaire. »

Le principe constitutionnel de laïcité nous commande également d'assurer la protection des femmes dans les situations difficiles et douloureuses qu'elles peuvent connaître du fait d'institutions réservant l'initiative d'une séparation automatique au mari ou des discriminations existant en matière de régime matrimonial.

De nombreuses femmes qui interviennent auprès de nous ont vu leur vie brisée et ont subi des humiliations intolérables du fait de telles institutions. Il est important que la France, dont le souci est partagé par les pays européens, donne l'exemple, tout particulièrement sur ce point, des valeurs républicaines.

Notre amendement prend en compte le combat livré dans plusieurs pays du Maghreb dans le sens de lois plus égalitaires. Il s'inscrit dans le droit-fil des avancées annoncées par Sa Majesté le roi du Maroc en vue d'une rénovation du code marocain de la famille ainsi que de la jurisprudence tunisienne récente, lui qui n'a pas hésité à opposer le principe de l'égalité des sexes à la reconnaissance d'une répudiation prononcée en Egypte.

Madame la ministre, si vous pouvez nous garantir que nos compatriotes et leurs droits à cet égard seront défendus par la France, nous retirerons cet amendement ainsi que les amendements n°s 31 et 32.

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour défendre les amendements n°s 91 et 90 rectifié.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. L'amendement n° 91 étant un amendement de repli par rapport à l'amendement n° 90 rectifié, c'est essentiellement sur ce dernier que portera mon propos.

Les sénateurs des Français de l'étranger sont confrontés au problème du conflit de lois concernant le divorce et la séparation de corps.

Il serait, de ce point de vue, souhaitable que l'article 310 du code civil soit complété par une disposition qui reprendrait une décision de la cour d'appel de Paris en date du 6 mars 2003, afin de simplifier le travail des juges aux affaires familiales des tribunaux de grande instance, lesquels n'ayant guère l'habitude des affaires de droit international privé, rendent des décisions qui ne sont pas toujours conformes à l'ordre public français. Cela provoque des appels, puis des recours en cassation, ce qui contribue à la surchage de nos juridictions.

Certes, les justiciables français obtiennent finalement gain de cause, mais il serait tout de même beaucoup plus simple de faire en sorte que ces problèmes puissent être facilement traités par n'importe quel juge aux affaires familiales d'un tribunal de grande instance.

C'est la raison pour laquelle je propose que, lorsque les dispositions des lois étrangères sont contraires à l'ordre public international, au principe de non-discrimination énoncé à l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme et au principe de l'égalité entre les époux inscrit à l'article 5 du protocole additionnel n° 7 de cette convention, le divorce soit régi par la loi française.

En conséquence, une répudiation prononcée au Maroc, par exemple, ne pourra être transcrite à l'état civil français comme s'il s'agissait d'un divorce. Car il y a effectivement des jugements aberrants dans ce domaine, ce qui s'explique aussi, sans doute, par la charge considérable de travail à laquelle nos magistrats doivent faire face.

C'est ainsi qu'on a vu, par exemple, le tribunal de grande instance de Toulouse décider tranquillement de transformer en divorce une répudiation prononcée au Maroc à la demande d'un époux de nationalité française au détriment de son épouse française, et cela sans que celle-ci l'accepte, c'est-à-dire en contradiction avec les termes de la convention. Au demeurant, la convention n'était même pas applicable, l'époux étant français. Quoi qu'il en soit, la dame a évidemment fait appel.

La disposition que nous proposons est forte dans la mesure où nous faisons référence à une convention internationale, qui l'emporte sur une convention bilatérale, laquelle l'emporte sur le droit interne. Cela signifie en particulier que la convention européenne oblige la France plus que la convention franco-marocaine. Ainsi, la non-transposition de répudiations en divorces ne pourra être discutée par la partie marocaine ou par d'autres pays.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. En ce qui concerne l'amendement n° 30, il est exact que nous avions examiné un amendement similaire en février 2002. Mais il n'y a pas eu de suite à l'examen de la proposition de loi en question.

Quoi qu'il en soit, s'agissant d'un point qui soulève notamment des problèmes très délicats de droit international privé, il est bien évident que nous ne pouvons pas statuer sans demander l'avis du Gouvernement. Pour sa part, la commission suivra cet avis sur l'amendement n° 30, comme sur l'amendement n° 91.

S'agissant de l'amendement n° 90 rectifié, j'y suis défavorable parce qu'il se réfère à une notion qui n'existe pas, celle d'ordre public international. Pour le reste, cet amendement soulève les mêmes problèmes.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Je dirai d'abord très clairement aux auteurs de ces amendements que je suis particulièrement sensible à ce souci de l'égalité dans les liens du mariage : c'est une préoccupation qui est inscrite dans mes fonctions ministérielles, et qui anime aussi, bien entendu, l'ensemble du Gouvernement.

On peut comprendre l'objet de l'amendement que vous avez présenté, madame Brisepierre, et qui vise à éviter d'introduire dans notre pays des modes de dissolution du mariage discriminatoires.

En vous remerciant d'avoir posé le problème, je veux rappeler que notre droit permet d'ores et déjà d'écarter l'application d'une loi étrangère discriminatoire.

En premier lieu, il est parfaitement établi que jamais une répudiation ne pourrait être prononcée par un tribunal français. D'une façon générale, du reste, nos tribunaux ne sauraient prononcer des mesures discriminatoires. De telles mesures qui seraient prescrites par une loi étrangère seraient donc écartées au nom de l'ordre public, ordre public que rappelle au demeurant l'article 4 de la convention franco-marocaine ; j'évoque cette convention dans la mesure où le Maroc a été plusieurs fois cité.

En second lieu, je rappellerai que les décisions étrangères prises sur le fondement d'une loi discriminatoire à l'encontre d'un ressortissant français ne peuvent trouver à s'appliquer en France. En effet, l'article 3 du code civil dispose que la loi française en matière de statut personnel régit les Français, même s'ils résident à l'étranger, et l'article 310 prévoit que le divorce et la séparation de corps sont régis par la loi française lorsque l'un et l'autre des époux sont de nationalité française.

Enfin, s'agissant des décisions de répudiation concernant deux étrangers et prononcées à l'étranger - car il s'agit principalement de cela -, il semble effectivement difficile de les écarter systématiquement. De ce point de vue, la Cour de cassation applique une jurisprudence qui préserve l'ordre public français. En effet, elle écarte ces décisions lorsqu'elles ont été prononcées en violation des droits de la femme. Conformément à l'article 5 du protocole additionnel n° 7 de la convention européenne des droits de l'homme, la Cour exige que la femme ait été dûment convoquée - et que la preuve en soit apportée - qu'elle ait pu faire valoir ses arguments et qu'une juste compensation financière lui ait été accordée.

Pour toutes ces raisons, en l'état actuel du droit, il est difficile d'accepter ces amendements.

Par ailleurs, il ne vous a pas échappé que, s'agissant du Maroc, un effort tout à fait considérable est mené aujourd'hui pour faire évoluer le droit de la famille. Rien n'exclut que des discussions s'engagent de manière que la rénovation juridique en cours puisse profiter directement à nos concitoyens.

Telle est la réponse que je suis en mesure de vous apporter, madame Brisepierre, en espérant qu'elle sera conforme à votre attente.

M. le président. Madame Brisepierre, l'amendement n° 30 est-il maintenu ?

Mme Paulette Brisepierre. Madame la ministre, votre réponse est tout à fait satisfaisante et je suis prête à retirer cet amendement, ainsi que les amendements n°s 31 et 32.

Je tiens toutefois à signaler que je ne vise pas seulement le Maroc et les pays arabes. En vérité, le pays avec lequel nous avons le plus de difficulté, quand il y a des enlèvements d'enfant, c'est l'Allemagne.

M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est une question distincte de celle du divorce !

Mme Paulette Brisepierre. Un enfant enlevé dans un Land n'est pratiquement pas récupérable, quelles que soient les juridictions.

En tout cas, il ne faut pas faire de cette question une affaire franco-marocaine, d'autant que le Maroc est, en l'occurrence, bien moins concerné que beaucoup d'autres pays. D'ailleurs, il y a des pays qui sont bien pires que les pires pays d'Afrique.

M. Robert Del Picchia. Très bien !

Mme Paulette Brisepierre. C'est donc d'une façon générale qu'il faut que nous prenions la défense de nos compatriotes en ce qui concerne le mariage. Dans tous les cas, il s'agit de sauvegarder les intérêts des femmes françaises en cas de divorce et, par-dessus tout, ceux des enfants.

M. le président. Les amendements n°s 30, 31 et 32 sont retirés.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Je souhaite vous apporter tous apaisements, madame Brisepierre, et vous rappeler que M. le garde des sceaux vient de conclure, à l'échelon européen, notamment avec l'Allemagne, un accord qui a pris la forme d'un règlement et qui permet de résoudre un certain nombre de cas extrêmement sensibles qui vous préoccupent.

M. le président. Madame Cerisier-ben Guiga, l'amendement n° 90 rectifié est-il maintenu ?

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, je souhaite le rectifier en supprimant l'adjectif « international ».

La disposition que nous proposons est donc ainsi rédigée : « - lorsque les dispositions des lois étrangères sont contraires à l'ordre public, au principe de non-discrimination énoncé... », le reste étant sans changement.

Je maintiens cet amendement parce que j'ai sous les yeux des jugements de tribunaux de grande instance qui placent nos compatriotes dans l'obligation de faire appel, voire d'aller en cassation, pour obtenir qu'une répudiation unilatérale ne se transforme pas par décision judiciaire française en divorce.

J'estime qu'en faisant référence à une convention internationale qui prime toute convention bilatérale, cet amendement est de nature à protéger les intérêts de nos concitoyens dans ce domaine.

Par ailleurs, je signale qu'au Maroc, notamment, la répudiation est maintenue dans le projet de réforme du code de la famille. Il ne faut donc pas croire que ce problème se réglera tout seul !

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 90 rectifié bis, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mme M. André, M. Badinter, Mmes Cerisier-ben Guiga et Durrieu, M. Lagauche, Mme Pourtaud et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, et ainsi libellé :

« Après l'article 22, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« L'article 310 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - lorsque les dispositions des lois étrangères sont contraires à l'ordre public, au principe de non-discrimination énoncé à l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et au principe de l'égalité entre les époux inscrit à l'article 5 du protocole additionnel n° 7 de cette convention. »

Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Il me semble qu'avec l'amendement n° 90 rectifié bis nous revenons à la situation de base prévue par les amendements n°s 30 et 91.

Je suis donc contraint d'émettre le même avis défavorable que Mme la ministre, qui a indiqué à l'instant que l'ordre public français s'applique.

Vous avez cependant satisfaction, madame Cerisier-ben Guiga, car s'il peut arriver à certains tribunaux de grande instance de déraper, les cours d'appel et la Cour de cassation permettent de faire appliquer le droit.

S'agissant de à l'amendement n° 91, nous avons eu tout à l'heure la même réponse que celle qui s'appliquait à l'amendement n° 30 et la commission se rallie à l'avis défavorable du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 91.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. En fait, monsieur le président, je m'exprimerai sur l'amendement n° 90 rectifié bis, notre collègue Mme Cerisier-ben Guiga ayant précisé que l'amendement n° 91 était subsidiaire.

Tout en comprenant les propos que vient de tenir M. le rapporteur, j'insiste pour que le Sénat adopte cet amendement dans la mesure où tout le monde est d'accord quant au fond.

Il s'agit simplement d'éviter des longueurs et de donner un signal aux juridictions qui se trompent en s'imaginant qu'elles doivent appliquer la loi du pays étranger. Ce signal est nécessaire compte tenu de l'abondance de la jurisprudence. Je connais d'ailleurs certains cas où la Cour de cassation elle-même prétend appliquer une convention franco-marocaine à un citoyen qui est marocain mais également français.

Dans le cas qui nous occupe, il convient de faire figurer dans la loi une disposition qui évitera des dérapages, des longueurs, des procès. Si elle ne fait pas de bien, elle ne fait pas de mal. Monsieur le rapporteur, puisque nous sommes d'accord sur le fond, inscrivons-la dans la loi !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je m'adresse à l'éminent juriste qu'est M. Dreyfus-Schmidt. Les conventions internationales s'imposent, nous le savons.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Oui !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Il n'est pas de tradition d'introduire dans le code civil des références à de telles conventions. Si nous rompions avec cette tradition, nous nous engagerions dans une voie invraisemblable parce qu'il faudrait citer non pas une, mais dix, vingt ou trente conventions.

Quant au code de commerce, s'il fallait y introduire des références à toutes les conventions internationales, ce serait épouvantable. Je n'ose l'imaginer !

Le problème que vous soulevez, monsieur Dreyfus-Schmidt, madame Cerisier-ben Guiga, c'est que, malheureusement, un certain nombre de magistrats sont insuffisamment formés à la connaissance des conventions internationales qui s'imposent dans notre droit interne.

Je me tourne donc vers Mme la ministre pour que la formation dispensée par l'Ecole nationale de la magistrature soit renforcée en matière de connaissance des conventions internationales.

Mais ce n'est à mon avis ni nécessaire ni utile - et c'est même dangereux - d'inscrire dans notre code civil des références à des conventions internationales qui, en tout état de cause, s'imposent au juge comme au législateur.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous n'en demandons qu'une !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 91.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art.  additionnels après l'art. 20 ou après l'art. 22
Dossier législatif : projet de loi relatif au divorce
Art. 21

Article additionnel après l'article 20

M. le président. L'amendement n° 124, présenté par Mme Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Après l'article 20, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« I. - Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 199 octodecies du code général des impôts, les mots : "25 % du montant des versements effectués" sont remplacés par les mots : "50 % du montant des versements effectués".

« II. - En conséquence, dans la seconde phrase du même alinéa de l'article 199 octodecies du code général des impôts, la somme : "30 500 euros" est remplacée par la somme : "61 000 euros".

« III. - La perte de recettes pour l'Etat découlant de l'application des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des taux fixés au III bis de l'article 125 A du code général des impôts. »

La parole est à Mme Josiane Mathon.

Mme Josiane Mathon. Cet amendement vise à parfaire la logique de la réforme de la prestation compensatoire telle qu'elle avait été amorcée par la loi du 30 juin 2000 qui visait à privilégier le mode de versement en capital dans le but de « liquider » le plus rapidement possible les effets patrimoniaux du divorce.

Néamoins, le législateur n'est pas allé au bout de cette logique puisque, fiscalement, il reste préférable d'opter pour un versement échelonné plutôt que pour un versement unique.

En effet, actuellement, deux solutions sont possibles : la prestation compensatoire est versée soit sous forme de capital fractionné, auquel cas elle suit le régime fiscal de la rente viagère, soit en totalité au cours de l'année qui suit le jugement de divorce et, dans ce cas, elle bénéficie du dégrèvement prévu à l'article 199 octodecies du code général des impôts, c'est-à-dire d'une déduction de 25 % dans la limite de 30 500 euros.

Ce régime fiscal pénalise donc le versement du capital sur le court terme au profit de l'échelonnement, ce qui ne profite ni au règlement rapide de l'après-divorce pour les deux époux ni à l'investissement de ce capital pour l'époux créancier.

Nous vous proposons donc de modifier le présent texte afin de rendre plus attractif le régime fiscal applicable au versement en une fois de cette prestation. Il serait ainsi opportun de multiplier par deux le dégrèvement prévu à l'article 199 octodecies du code général des impôts.

Le rapporteur de la commission des lois s'est montré plutôt favorable à cet amendement, et je souhaiterais connaître la position du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Mme Mathon soulève un problème que la commission a abordé dans son rapport écrit et sur lequel elle a attiré à de nombreuses reprises l'attention du garde des sceaux : il s'agit de la nécessité absolue de revoir les règles fiscales en matière de divorce.

Il est nécessaire, en effet, que le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie soit mis au pied du mur afin qu'il soit amené à corriger des dispositions complètement anormales qui transforment le divorce en « vache à lait » du fisc. Je suis donc totalement d'accord quant au fond avec la mesure que vous proposez, madame Mathon.

Cela étant, il ne paraît pas possible de modifier ainsi à la marge, sans concertation préalable, le régime fiscal de la prestation compensatoire. Cela nous entraînerait trop loin.

Néanmoins, je le répète, je demeure convaincu qu'il s'agit d'un vrai problème et je crois que le garde des sceaux devrait saisir le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de cette question. Par conséquent, nous aurons l'occasion de la revoir ensemble, dans un proche avenir, lorsqu'elle reviendra devant le Parlement.

Mais on ne peut pas, dans le cadre de l'examen d'un texte sur le divorce, régler des problèmes de droit fiscal, étant donné l'ampleur des conséquences qui en résulteraient. De plus, je ne suis pas sûr que nous soyons, si nous agissions ainsi, en conformité avec les règles relatives au droit fiscal.

Aussi, tout en étant d'accord quant au fond avec vous, madame Mathon, je suis contraint d'émettre un avis défavorable sur votre amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Je partage l'avis du rapporteur en précisant à Mme Mathon qu'elle soulève effectivement un vrai problème.

Je vous indique, monsieur le rapporteur, que non seulement le ministre s'engage sur ce point, au nom du Gouvernement, mais que les négociations ont déjà commencé.

Trois avancées nous paraissent opportunes. Elles ont déjà été soumises aux services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, qui s'y sont montrés tout à fait favorables. Un accord interministériel sur ces avancées pourrait d'ailleurs être trouvé avant même l'examen du présent texte par l'Assemblée nationale, et donc donner lieu au dépôt d'amendements.

Il s'agit, je le rappelle, de la mise en place d'un régime unique de taxation, de la réduction d'impôts et de l'extension du bénéfice de la réduction d'impôt en cas de capitalisation de la rente.

Donc, je le répète, c'est là un vrai problème et le Gouvernement a la volonté, comme vous, d'y apporter un règlement. C'est dans cette attente que nous émettons, bien entendu, un avis défavorable sur l'amendement.

M. le président. Madame Mathon, l'amendement n° 124 est-il maintenu ?

Mme Josiane Mathon. Je le maintiens et je pense qu'à la suite des éléments apportés par Mme la ministre le Sénat pourrait l'accepter pour permettre à l'Assemblée nationale de poursuivre la réflexion et au législateur de travailler sur un sujet aussi pointu.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 124.

(L'amendement n'est pas adopté.)