SOMMAIRE

présidence de m. jean-claude gaudin

1. Procès-verbal (p. 1).

2. Décès d'un ancien sénateur (p. 2).

3. Désignation d'un sénateur en mission (p. 3).

4. Communication du Gouvernement (p. 4).

5. Dépôt de rapports du Gouvernement (p. 5).

6. Dépôt d'un rapport de la Cour des comptes (p. 6).

7. Décision du Conseil constitutionnel (p. 7).

8. Questions orales (p. 8).

RESTAURATION DE LA CASERNE DE GENDARMERIE

DE MORTAGNE (p. 9)

Question de M. Daniel Goulet. - MM. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants ; Daniel Goulet.

MESURES EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT RURAL (p. 10)

Question de M. Dominique Mortemousque. - MM. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ; Dominique Mortemousque.

RÉGLEMENTATION DES AIDES COMMUNAUTAIRES

AUX GRANDES CULTURES (p. 11)

Question de M. Michel Doublet. - MM. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ; Michel Doublet.

DROIT AUX ALLOCATIONS D'ASSURANCE CHÔMAGE

DES AGENTS DES COLLECTIVITÉS LOCALES (p. 12)

Question de Mme Gisèle Gautier. - M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat ; Mme Gisèle Gautier.

TRANSPOSITION D'UNE DIRECTIVE EUROPÉENNE

SUR LES DROITS D'AUTEUR

ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR (p. 13)

Question de M. Francis Grignon. - MM. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication ; Francis Grignon.

BASE DE CALCUL DU FCTVA 2002

POUR LES COMMUNES DE SAÔNE-ET-LOIRE (p. 14)

Question de M. Jean-Patrick Courtois. - MM. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales ; Jean-Patrick Courtois.

DÉCENTRALISATION DES PORTS MARITIMES (p. 15)

Question de M. Josselin de Rohan. - MM. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer ; Josselin de Rohan.

RESPONSABILITÉ DES ORGANISATEURS

DE TRANSPORTS SCOLAIRES (p. 16)

Question de M. André Lardeux. - MM. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer ; André Lardeux.

INVENTAIRE DES ZONES NATURELLES D'INTÉRÊT ÉCOLOGIQUE,

FAUNISTIQUE ET FLORISTIQUE (p. 17)

Question de M. Pierre Hérisson. - Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Pierre Hérisson.

GESTION DES DÉCHETS (p. 18)

Question de M. Alain Vasselle. - Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Alain Vasselle.

CONSÉQUENCES DE LA FERMETURE

DE METALEUROP NORD (p. 19)

Question de M. Yves Coquelle. - Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle ; M. Yves Coquelle.

SITUATION DES ÉTABLISSEMENTS D'HÉBERGEMENT

DES PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES (p. 20)

Question de M. Jean-Pierre Bel. - Mme Nicole Ameline, ministre délégué à la parité et à l'égalité professionnelle ; M. Jean-Pierre Bel.

MENACE DE FERMETURE DE L'HO^PITAL DE LA RÉOLE

EN GIRONDE (p. 21)

Question de M. Bernard Dussaut. - Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle ; M. Bernard Dussaut.

PLAN DE LUTTE ANTI-CANCER (p. 22)

Question de Mme Marie-Claude Beaudeau. - Mmes Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle ; Marie-Claude Beaudeau.

CONSÉQUENCES DE LA DÉLOCALISATION D'ARCELOR (p. 23)

Question de M. Jean-Pierre Masseret. - MM. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur ; Jean-Marc Todeschini, en remplacement de M. Jean-Pierre Masseret.

CONDITIONS DE SCOLARISATION

DES ENFANTS EN BAS ÂGE (p. 24)

Question de M. Gérard Delfau. - MM. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire ; Gérard Delfau.

SITUATION FINANCIÈRE DE L'UNIVERSITÉ PARIS-XII (p. 25)

Question de Mme Hélène Luc. - M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire ; Mme Hélène Luc.

Suspension et reprise de la séance (p. 26)

présidence de m. daniel hoeffel

9. Conférence des présidents (p. 27).

10. Lutte contre la violence routière. - Discussion d'un projet de loi (p. 28).

Discussion générale : MM. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice ; Lucien Lanier, rapporteur de la commission des lois ; Mme Nicole Borvo, M. André Lardeux, Mme Gisèle Gautier, MM. Gérard Delfau, Jacques Mahéas, Daniel Goulet, Philippe Arnaud, Jean Boyer.

MM. le ministre, le garde des sceaux, Gérard Delfau.

présidence de M. GUY FISCHER

Clôture de la discussion générale.

Division et articles additionnels avant le chapitre Ier (p. 29)

Amendement n° 88 de M. Daniel Goulet. - Réserve.

Amendements n°s 89 et 90 de M. Daniel Goulet. - MM. Daniel Goulet, le rapporteur, le ministre. - Retrait des deux amendements.

Amendement n° 91 de M. Daniel Goulet. - MM. Daniel Goulet, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Amendement n° 92 de M. Daniel Goulet. - MM. Daniel Goulet, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Amendement n° 88 (précédemment réservé) de M. Daniel Goulet. - Devenu sans objet.

Article 1er (p. 30)

Amendement n° 93 de M. Daniel Goulet. - MM. Daniel Goulet, le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.

Adoption de l'article.

Article additionnel après l'article 1er (p. 31)

Amendement n° 65 de M. Bernard Joly. - M. Bernard Joly. - Retrait.

Suspension et reprise de la séance (p. 32)

Article 2 (p. 33)

Amendement n° 55 de Mme Gisèle Gautier. - Mme Gisèle Gautier, MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.

Amendement n° 94 de M. Daniel Goulet. - MM. Daniel Goulet, le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.

Amendement n° 56 de Mme Gisèle Gautier. - Retrait.

Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Amendement n° 33 de M. Bernard Joly. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.

MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le garde des sceaux.

Adoption de l'article modifié.

Article 2 bis (p. 34)

Amendements identiques n°s 2 de la commission, 35 de Mme Nicole Borvo et 72 de M. Jacques Mahéas ; amendements identiques n°s 32 de M. Pierre Fauchon et 108 de M. Laurent Béteille ; amendement n° 31 rectifié de M. Nicolas About. - M. le rapporteur, Mme Nicole Borvo, MM. Jacques Mahéas, Pierre Fauchon, Laurent Béteille, Nicolas About, le garde des sceaux, René Garrec, président de la commission des lois.

Suspension et reprise de la séance (p. 35)

MM. le président de la commission des lois, Pierre Fauchon, Michel Dreyfus-Schmidt, André Lardeux, Philippe Arnaud, Paul Girod, Nicolas About, Paul Blanc, Mme Sylvie Desmarescaux. - Adoption des amendements n°s 2, 35 et 72 supprimant l'article, les autres amendements devenant sans objet.

Article additionnel après l'article 2 bis, (p. 36)

Amendement n° 87 de M. Nicolas About. - Non soutenu.

Article 3 (p. 37)

Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 4 (p. 38)

Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Jacques Mahéas. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 5 (p. 39)

M. Michel Dreyfus-Schmidt.

Adoption de l'article.

Article 6 (p. 40)

Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Amendement n° 73 de M. Jacques Mahéas. - MM. Jacques Mahéas, le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.

Amendement n° 106 de M. Daniel Goulet. - MM. Daniel Goulet, le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.

Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Amendement n° 114 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 6 bis (p. 41)

Amendements identiques n°s 8 de la commission, 36 de Mme Nicole Borvo et 74 de M. Jacques Mahéas ; amendement n° 107 de M. Daniel Goulet. - Retrait de l'amendement n° 107 ; adoption des amendements n°s 8, 36 et 74 supprimant l'article.

Article additionnel après l'article 6 bis (p. 42)

Amendement n° 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 7 (p. 43)

Amendement n° 10 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Amendement n° 12 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Amendement n° 13 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Amendement n° 14 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Jacques Mahéas. - Adoption.

Amendement n° 48 du Gouvernement. - MM. le garde des sceaux, le rapporteur, Jacques Mahéas. - Adoption.

Amendement n° 15 rectifié de la commission et sous-amendement n° 49 du Gouvernement. - MM. Lucien Lanier, le garde des sceaux, Jacques Mahéas. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.

MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le garde des sceaux.

Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 7 (p. 44)

Amendement n° 37 de Mme Nicole Borvo. - MM. Robert Bret, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Amendement n° 109 du Gouvernement et sous-amendement n° 115 de la commission.

- MM. le ministre, le rapporteur, Jacques Mahéas. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article additionnel.

Article 7 bis (p. 45)

Amendement n° 95 de M. Daniel Goulet. - MM. Daniel Goulet, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Adoption de l'article.

Renvoi de la suite de la discussion.

11. Dépôt de questions orales avec débat (p. 46).

12. Transmission d'un projet de loi (p. 47).

13. Dépôt de propositions de loi (p. 48).

14. Renvoi pour avis (p. 49).

15. Dépôt d'un rapport (p. 50).

16. Dépôts rattachés pour ordre au procès-verbal de la séance du 10 avril 2003 (p. 51).

17. Ordre du jour (p. 52).

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le procès-verbal de la séance du jeudi 10 avril 2003 a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté.

2

DÉCÈS D'UN ANCIEN SÉNATEUR

M. le président. J'ai le regret de vous rappeler le décès de notre ancien collègue Michel Alloncle, qui fut sénateur de la Charente de 1980 à 1998.

3

DÉSIGNATION D'UN SÉNATEUR EN MISSION

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une lettre en date du 11 avril 2003 par laquelle il a fait part au Sénat de sa décision de placer en mission temporaire auprès du ministre des sports M. Pierre Martin, sénateur de la Somme.

Acte est donné de cette communication.

4

COMMUNICATION DU GOUVERNEMENT

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de l'Assemblée de la Polynésie française une communication en date du 4 avril 2003, relative à l'avis de cette assemblée sur le projet de loi de programme pour l'outre-mer (n° 214, 2002-2003).

Acte est donné de cette communication.

Ce document a été transmis à la commission des finances.

5

DÉPÔT DE RAPPORTS DU GOUVERNEMENT

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre :

- le rapport relatif aux perspectives d'activité et aux fonds propres de la future société DCN, établi en application de l'article 78 de la loi n° 2001-1276 du 28 décembre 2001 ;

- le rapport sur les transferts transfrontaliers de déchets en 2000, établi en application de l'article L. 541-49 du code de l'environnement.

Acte est donné du dépôt de ces rapports.

6

DÉPÔT D'UN RAPPORT

DE LA COUR DES COMPTES

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier président de la Cour des comptes le rapport sur les pensions des fonctionnaires civils de l'Etat.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

7

DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel, par lettre en date du 24 avril 2003, le texte de la décision rendue par le Conseil constitutionnel sur la loi relative aux assistants d'éducation.

Acte est donné de cette communication.

Cette décision du Conseil constitutionnel sera publiée au Journal officiel, édition des lois et décrets.

8

QUESTIONS ORALES

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

RESTAURATION DE LA CASERNE

DE GENDARMERIE DE MORTAGNE

M. le président. La parole est à M. Daniel Goulet, auteur de la question n° 216, adressée à Mme la ministre de la défense.

M. Daniel Goulet. Monsieur le président, mes chers collègues, j'ai interrogé Mme la ministre de la défense sur le suivi qu'elle entend donner au projet de restauration de la caserne relevant de la compagnie de gendarmerie de l'arrondissement de Mortagne, implantée actuellement sur la commune de Saint-Langis.

Le maire de la commune et son conseil municipal, parfaitement conscients du bien-fondé et de l'impérieuse nécessité de restaurer les locaux d'hébergement des familles de gendarmes et en particulier les services administratifs de la compagnie, ont répondu favorablement à la demande du colonel de gendarmerie en poste à Alençon dès 1997 et ont décidé d'un projet de restauration sur un nouveau site de la commune.

Le conseil municipal a ainsi réuni toutes les conditions d'accueil et de fonctionnement devant répondre aux nécessités exprimées par les autorités du groupement de gendarmerie de l'Orne et par celles de la compagnie de l'arrondissement du Perche.

Pour ce faire, le maire et son conseil municipal ainsi que le conseiller général concerné se sont attachés les services techniques d'un architecte de renom et la participation de l'Office départemental de l'office public d'HLM de l'Orne qui régira les habitations. Ils ont enfin réuni, ce qui n'est pas le moins important, toutes les contributions financières nécessaires à cette opération sur un terrain constructible qui est placé dans un environnement excellent.

Postérieurement, la ville-centre de l'arrondissement de Mortagne a déposé un dossier pour installer également une gendarmerie.

Aussi, en tant que sénateur, je souhaite interroger le Gouvernement sur la décision qu'il compte prendre. Il me paraît toutefois important, pour ce faire, d'avoir les deux propositions ; or il semble qu'une seule d'entre elles ait été instruite.

Mes interrogations sont simples : quels sont les critères de choix pris en considération ? Quelles sont les autorités compétentes en la matière ? Quelle est la place laissée, dans la décision définitive, au choix des gendarmes, directement concernés ? Quelles sont les voies de recours en cas de contestation, et dans quels délais ?

Telles sont les questions simples, objectives, que je souhaitais poser à Mme la ministre de la défense, en excluant toute dimension polémique ou politique à un dossier qui m'apparaît essentiel tant pour les gendarmes que pour le service que nous attendons d'eux.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser Mme Alliot-Marie qui, en déplacement à l'étranger, ne peut répondre personnellement à votre question.

Les interrogations que vous venez de soulever, monsieur le sénateur, sont tout à fait légitimes. Les différentes unités de la compagnie de Mortagne-au-Perche sont actuellement hébergées, comme vous le savez, dans un casernement situé sur le territoire de la commune de Saint-Langis-lès-Mortagne.

La commune de Mortagne est propriétaire des locaux abritant les services administratifs et logistiques. Les logements des gendarmes sont, quant à eux, la propriété de l'office départemental d'HLM de l'Orne.

Comme vous l'avez indiqué, monsieur le sénateur, l'édification d'un nouveau casernement est nécessaire et urgente. Pour répondre à ce besoin, la commune de Mortagne a, depuis assez longtemps, manifesté son intention de prendre en charge la construction d'une nouvelle caserne devant accueillir l'ensemble des éléments composant la compagnie de Mortagne.

Depuis 2001, elle a donné une forte impulsion à ce projet. C'est ainsi que la gendarmerie a obtenu du conseil général un appui sans réserve. En particulier, la commune de Mortagne et le conseil général ont créé un syndicat mixte dont l'objet est d'assurer la maîtrise d'ouvrage de cette édification.

De son côté, la direction générale de la gendarmerie a émis un avis très favorable et a demandé au commandant de groupement de gendarmerie de l'Orne d'appuyer un tel projet.

Or, depuis quelques mois, la commune de Saint-Langis a présenté, sur sa propre initiative, un projet concurrent.

Nous avons étudié les deux projets. Evidemment, le dernier projet est beaucoup moins avancé. Celui de la commune de Mortagne est d'ailleurs incontestablement le plus intéressant, car il permet le regroupement homogène et fonctionnel de l'ensemble de la compagnie.

Par ailleurs, je me permets de rappeler, monsieur le sénateur, que la règle veut que la caserne de gendarmerie où se trouve le siège du groupe de commandement de la compagnie soit installée dans la commune chef-lieu de l'arrondissement, ce qui va de soi en termes de fonctionnalité.

Aussi, monsieur le sénateur, je confirme que le projet présenté par la commune de Mortagne-au-Perche, avec l'appui du conseil général et l'avis très favorable de la direction générale de la gendarmerie, est bien entendu retenu, dans l'intérêt même de la mission de cette unité.

M. le président. La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Monsieur le secrétaire d'Etat, il ne s'agit pour moi ni d'entrer dans des considérations particulières, ce qui serait indécent dans cette assemblée, ni de polémiquer : la politique politicienne n'est pas mon affaire.

Cependant, je voudrais vous faire remarquer - et, si vous voulez davantage de renseignements, j'ai entre les mains tous les documents - que le projet initié entre le colonel Vanderperre, qui commandait alors le groupement de gendarmerie de l'Orne, et la commune concernée date, lui, de 1996.

Par ailleurs, pour implanter une caserne, il faut disposer d'un terrain constructible. Or, à ma connaissance, la seconde solution - celle que vous préconisez - ne répond pas à cette condition : le terrain n'est pas constructible, et il n'a pas été acheté pour la bonne raison qu'il ne peut pas l'être !

C'est, je le répète, sans esprit polémique que je soumets ces éléments à la réflexion du ministre de la défense et des forces armées.

MESURES EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT RURAL

M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque, auteur de la question n° 215, à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

M. Dominique Mortemousque. Monsieur le ministre, lors de la séance de questions orales du 17 décembre dernier, j'avais interrogé le Gouvernement sur la réorganisation des services publics en milieu rural, question lancinante, car leur démantèlement risque de se traduire par l'abandon de nos communes rurales.

Je crois devoir rappeler que, dans le premier mois qui a suivi sa prise de fonctions, M. le Premier ministre avait souhaité que les parlementaires soient associés aux assises régionales des libertés locales dont les travaux ont constitué une nouvelle étape dans la décentralisation.

En Dordogne, lors de ces assises, le thème du service public en milieu rural a constitué la première priorité pour l'ensemble des élus. Un projet d'aménagement du territoire donnant des perspectives à chaque commune permettrait en effet à celles-ci d'offrir un avenir attractif à l'ensemble de leur administrés.

C'est la raison pour laquelle j'avais présenté quatre suggestions au Gouvernement : dresser l'inventaire des services publics dans chaque département ; faire le point sur les nouvelles technologies, que ce soit la téléphonie mobile ou la couverture par le réseau ADSL ; organiser les moyens d'agir afin que les établissements publics soient soumis à une seule autorité locale ; prévoir une évaluation annuelle de la réorganisation des services publics afin, le cas échéant, d'adapter le dispositif.

A ces questions, il m'avait été répondu en trois points.

D'abord, le Gouvernement affirmait sa volonté de tendre à un égal accès au service public pour chaque Français sur l'ensemble du territoire.

Ensuite, il préconisait la mise en place d'un nouveau contrat qui soit « gagnant-gagnant » et qui s'appuie sur les nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Enfin, il insistait sur la nécessité d'engager une démarche cohérente fondée sur un schéma d'organisation territoriale des services publics.

Je constate, monsieur le ministre, que, depuis ma dernière intervention, les choses ont évolué. A cet égard, je tiens particulièrement à remercier le Gouvernement d'avoir respecté ses engagements dans un contexte difficile.

Indépendamment de l'annonce, le 19 mars dernier, par M. le président du Sénat de son intention d'organiser un débat au Sénat d'ici à l'été prochain sur les services publics, M. Delevoye a fait part du lancement d'une expérimentation sur l'offre de services publics dans trois départements.

Le département de la Dordogne a été retenu, et je voudrais vous en remercier.

Les modalités de mise en place de l'expérimentation sont en cours d'élaboration. Sur le terrain, je serai particulièrement attentif au bon déroulement des opérations, et j'espère que l'expérimentation se traduira par l'adoption de mesures concrètes.

Dans la suite logique de mon intervention du 17 décembre dernier sur la réorganisation des services publics en milieu rural en vue d'assurer des services modernes et de qualité à tous, j'interroge aujourd'hui le Gouvernement sur le développement économique des territoires ruraux.

Comme vous le savez, monsieur le ministre, l'agriculture française, qui assure à notre pays la place de second exportateur agroalimentaire mondial, accomplit depuis près d'un demi-siècle un parcours intéressant, alliant performance, solidarité territoriale et solidarité humaine.

En tant que parlementaire et agriculteur, je souhaite insister sur ces trois termes.

S'agissant de la performance, il est important de rappeler que les paysans ont été les pionniers de la construction européenne. A cet égard, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, car l'action que vous avez menée depuis un an a permis de rétablir la crédibilité de la France au sein de l'Europe et d'ouvrir des perspectives à la profession.

J'en viens à l'aspect territorial. On a su mettre en place un système qui nous permet aujourd'hui de disposer d'un territoire attractif, dont l'intérêt est d'ailleurs reconnu à l'échelon européen, puisque nombre de ressortissants des pays voisins, et notamment des retraités, cherchent à acquérir des terrains chez nous. Ils y trouvent en effet, dans une campagne que l'on peut souvent comparer à un jardin, des équipements et des services, bref, une vie que l'on ne trouve plus dans d'autres territoires européens.

Le troisième aspect est humain. Un système équilibré a été mis en place : chacun y avait sa place, et il doit être remarqué qu'en matière de fiscalité et de charges des solutions différentes ont été trouvées pour les zones de montagne et les zones défavorisées, les zones dites de plaine relevant de systèmes moins dérogatoires.

Ce point doit être évoqué, car, hélas ! des critiques ont parfois été formulées à l'encontre du monde paysan, ne serait-ce que par votre prédécesseur, monsieur le ministre, et l'organisateur agricole que j'ai été pendant trente ans l'a mal vécu.

L'efficacité de notre système a été le résultat d'une ambition et d'un esprit de conquête. Chacun, je le répète, y avait sa place. Pour quelle raison ne procéderait-on pas de même aujourd'hui pour l'ensemble des métiers dans nos zones rurales en déclin afin d'assurer la revitalisation globale de nos services marchands ?

Les agriculteurs s'interrogent sur leur avenir, et les membres de diverses professions, comme les médecins, reconnaissent que les perspectives en milieu rural ne sont pas toujours encourageantes. Ne serait-il pas utile d'envisager une approche différente ?

Pour sortir de la logique du fatalisme, une nouvelle fois le Gouvernement tient son engagement : il travaille actuellement à un projet de loi sur l'avenir de nos campagnes.

Le texte préparatoire, qui se veut ambitieux et dont l'examen en première lecture devrait être programmé d'ici à l'été, comporte six grands volets : les mesures prises en faveur des territoires ruraux isolés ; la promotion du partenariat avec, notamment, la mise en place d'une organisation du travail plus stable pour les travailleurs saisonniers ; la reconnaissance accrue de la pluriactivité ; l'encouragement à la diversité dans les activités, notamment pour le tourisme ; un contexte fiscal plus favorable afin de faciliter la transmission des exploitations agricoles et de favoriser l'installation de jeunes agriculteurs, et, enfin, l'amélioration de la compétitivité dans la filière bois.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Dominique Mortemousque. Je souhaite, monsieur le ministre, que, dans l'optique de la revalorisation de nos services marchands, vous nous apportiez plus de précisions sur les orientations de ce texte de loi.

Mon collègue Roger Besse, rapporteur spécial du budget de l'aménagement du territoire, avait souligné dans son dernier rapport budgétaire l'insuffisance des dépenses fiscales dans les zones rurales.

Le Gouvernement envisage-t-il de déployer des moyens comparables à ceux qui ont été accordés aux zones franches urbaines et de favoriser la redynamisation urbaine afin de soutenir la création d'emplois ?

Par ailleurs, envisage-t-il de réformer le zonage en faveur des zones rurales, par exemple la réintégragion des bourgs-centres dans des zones de revitalisation rurale ?

Le rapport parlementaire Perrin-Gaillard sur l'insuffisance du développement économique rural avait souligné que 20 % de nos communes classées en zones de revitalisation rurale présentaient des espaces remarquables - parc, réserves, etc. - inexploités. Quels moyens humains et financiers seront-ils mis en oeuvre pour apporter à ces territoires ruraux une plus-value économique et une richesse renforçant le potentiel de maintien des emplois ?

Enfin, dans une logique de territorialisation, le système de zonages, qui, en l'état, est trop abstrait, va-t-il évoluer pour tendre vers des projets de territoire garantissant la nécessaire complémentarité entre développement économique et préservation de l'espace rural ?

Je souhaiterais donc, monsieur le ministre, que vous nous expliquiez comment les ambitions du Gouvernement, exprimées, dans leurs grandes lignes, dans l'avant-projet de loi sur le développement rural, se traduiront concrètement en vue de contribuer à la mise en place de services marchands de qualité, représentant un vivier d'emplois nouveaux et conservant aux territoires ruraux leur attractivité.

Je puis vous assurer que les maires et les élus sont tous soucieux d'apporter leur contribution à la mise en oeuvre de ce processus, très attendu dans nos communes rurales. Je vous remercie par avance de votre réponse, monsieur le ministre, car, j'en suis convaincu, elle constituera un message fort pour l'ensemble des Périgourdins.

M. le président. Je rappelle que chaque orateur dispose de trois minutes pour poser sa question, temps de parole que je vous invite à l'avenir, mon cher collègue, à respecter !

La parole est à M. le ministre.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le sénateur, comme vous le soulignez - et vous le savez mieux que quiconque -, notre politique rurale n'a de sens que si elle est sous-tendue par une activité agricole vigoureuse. Sans paysans actifs, il n'y aura pas de campagne dynamique. Les agriculteurs doivent demeurer le « coeur battant » de nos campagnes, même si, bien évidemment, nous devons également tenir compte des autres activités créatrices de richesses dans le monde rural et favoriser leur développement.

Le projet de loi en faveur du monde rural se fonde, d'abord, sur le constat de la diversité croissante de ce monde et des problèmes auxquels il est confronté. « La France se nomme diversité », écrivait Fernand Braudel, et votre beau département de la Dordogne l'illustre parfaitement : tous les vingt ou trente kilomètres, un paysage cède la place à un autre.

La réalité de nos territoires ruraux est d'ailleurs plus diverse que les Français eux-mêmes ne l'imaginent souvent. Qu'y a-t-il de commun entre les zones agricoles périurbaines dynamiques, mais dont les terres sont « bousculées » et soumises à la pression croissante de l'urbanisme, commercial notamment, et les communes qui continuent de connaître un déclin important ? Bien peu de choses en vérité, sinon parfois un sentiment d'abandon et de délaissement !

Favoriser les initiatives et les partenariats, simplifier les procédures pour développer l'activité économique des territoires ruraux, préserver les espaces sensibles à enjeux spécifiques, aménager les territoires ruraux pour renforcer leur attractivité, faire évoluer l'organisation de l'Etat et doter notre pays des outils d'observation et d'évaluation du monde rural, tels sont les principaux objectifs qui me guident dans la préparation de ce projet de loi.

Dans cette perspective générale, les réflexions en faveur des partenariats, de la pluriactivité, de la diversification et de la transmission des exploitations viseront directement à conforter la place de l'agriculture dans le milieu rural.

Ce projet de loi a un autre objectif : favoriser, au nom de l'égalité des chances, l'accès de tous aux services en milieu rural. L'offre de services est un élément déterminant de l'attractivité et de l'animation des territoires, pour les entreprises comme pour les populations. Il convient donc d'améliorer leur accessibilité et leur qualité.

J'avais déjà souligné mes orientations en la matière, dans le cadre de ma communication en conseil des ministres du 20 novembre 2002 sur la politique en faveur du développement du monde rural, en rappelant que le développement économique des territoires ruraux repose sur la création d'activités nouvelles, lesquelles supposent elles-mêmes un accès à des services de qualité.

Le comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire ou CIADT, du 13 décembre 2002 a intégré cette volonté en décidant, dans son volet consacré aux orientations de la politique rurale, l'engagement en matière de services publics et de services de proximité d'une série de démarches par les différents ministères concernés, notamment par le ministère chargé des affaires rurales, en liaison, bien évidemment, avec le ministère chargé de l'aménagement du territoire.

Les travaux et réflexions qui ont été engagés par la délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale, la DATAR, et au sein de mon ministère dans l'optique de la préparation du projet de loi en faveur du monde rural visent à mettre en oeuvre ces orientations.

Dans le cadre de ce projet de loi, le régime juridique des maisons de services publics, les MSP, fixé par la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations devrait évoluer, de façon notamment à mieux combiner, au sein de ces maisons, les services publics et les services privés, dans le respect des règles de la concurrence. Les MSP pourraient ainsi accueillir plus aisément des services privés.

En outre, également en application du CIADT du 13 décembre 2002, la conclusion d'un accord-cadre national sera recherchée pour favoriser la concertation locale, la coordination entre les acteurs concernés et la transparence quant à la nécessaire modernisation des services.

Les modalités de fonctionnement des commissions départementales d'organisation et de modernisation des services publics pourraient aussi évoluer, en vue d'une meilleure adaptation aux contextes locaux.

De ce point de vue, les expérimentations sont extrêmement importantes. Vous avez vous-même souligné, monsieur le sénateur, que votre département avait été retenu par M. Jean-Paul Delevoye dans cette perspective. Cela me semble satisfaisant, tant il est clair que c'est grâce à une expérimentation tendant, d'une part, à la réorganisation des services de l'Etat dans les départements et, d'autre part, à un partenariat avec les collectivités décentralisées et les chambres consulaires que l'on arrivera à rendre un meilleur service au public.

Pour conclure, monsieur le sénateur, je voudrais vous donner quelques éléments d'information sur le calendrier de l'élaboration de ce projet de loi, ainsi que sur les grands principes qui la régissent.

Premièrement, il s'agira d'un texte interministériel. Certes, le ministère de l'agriculture joue le rôle de chef de file, mais nous travaillons, bien évidemment, avec l'ensemble des ministres concernés, notamment avec M. Jean-Paul Delevoye au titre de l'aménagement du territoire.

Deuxièmement, les mesures que nous prendrons ne seront pas toutes d'ordre législatif ; beaucoup d'entre elles seront d'ordre réglementaire ou relèveront de la politique gouvernementale et n'impliqueront donc pas l'adoption d'une loi. C'est la raison pour laquelle le Premier ministre a décidé la tenue, à la fin du mois d'août, d'un comité interministériel d'aménagement du territoire rural. A cette occasion seront présentés le projet de loi en faveur du monde rural, d'une part, et l'ensemble des mesures concernant ce dernier, d'autre part.

Troisièmement, je voudrais souligner, sans prétendre être exhaustif, que, au regard des concertations auxquelles j'ai déjà procédé, trois grands sujets apparaissent.

Le premier, que vous avez longuement développé, monsieur le sénateur, concerne les services publics et les services au public dans les territoires ruraux.

Le deuxième grand sujet est celui de l'attractivité économique des territoires ruraux. A cet égard, se posent bien évidemment la question des infrastructures, s'agissant notamment des infrastructures numériques, que traite M. Jean-Paul Delevoye, mais également la question fiscale, celle des zones de rénovation rurale et de leur avenir, celle enfin des aides à projet, tous thèmes sur lesquels nous travaillons.

Le troisième et dernier sujet a trait à la question foncière. Je suis frappé de constater à quel point l'utilisation du foncier et les conflits d'usage sont désormais des problèmes criants dans nombre de nos territoires.

Quoi qu'il en soit, ne doutez pas, monsieur le sénateur, que l'ensemble de ces sujets, et beaucoup d'autres encore puisque, comme je l'ai dit, je n'ai pas été exhaustif, seront abordés à l'occasion du très important comité interministériel d'aménagement du territoire rural que j'ai évoqué. Celui-ci sera suivi d'un débat parlementaire, qui se déroulera à l'automne prochain afin que la loi en faveur du monde rural puisse êre adoptée avant la fin de l'année.

Tels sont les quelques éléments que je souhaitais vous communiquer, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque. Je vous invite à être bref, mon cher collègue, car nous ne devons pas abuser du temps des ministres qui nous font l'honneur de leur présence.

M. Dominique Mortemousque. Monsieur le ministre, je voudrais vous remercier de la qualité de vos réponses.

Par ailleurs, monsieur le président, je vous promets de ne jamais oublier, à l'avenir, que mon temps de parole est limité à trois minutes ! (Sourires.)

RÉGLEMENTATION DES AIDES COMMUNAUTAIRES

AUX GRANDES CULTURES

M. le président. La parole est à M. Michel Doublet, auteur de la question n° 217, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

M. Michel Doublet. Le dispositif réglementaire communautaire relatif au versement des aides aux grandes cultures exclut que celles-ci puissent concerner des terres dont les exploitants ont bénéficié de la prime à l'arrachage.

Or l'impossibilité de rendre ces surfaces éligibles à la politique agricole commune, la PAC, pénalise d'ores et déjà de nombreux agriculteurs de la région délimitée « cognac » qui, dans leur déclaration relative à la PAC 2002, les ont mentionnées et se voient aujourd'hui lourdement sanctionnés. Cette sanction est particulièrement sévère, car elle peut aller jusqu'à la suppression pure et simple des compensations pour l'année concernée.

En effet, jusqu'en 2002, la France bénéficiait d'un régime dérogatoire, qui offrait aux agriculteurs la possibilité de recevoir des compensations, au titre de la PAC, pour des surfaces anciennement plantées en vigne et ayant fait l'objet de la prime d'incitation à l'arrachage. Depuis, cette dérogation n'est plus accordée.

Au-delà de ce cas d'espèce, la suppression de l'éligibilité à la PAC des surfaces arrachées pose un problème de fond. En effet, que faire des terres sur lesquelles les vignes ont été arrachées ? Vous savez en outre, monsieur le ministre, l'importance que revêtent, malheureusement, ces compensations pour le revenu de l'agriculteur.

Les agriculteurs du sud de la Charente-Maritime ont pratiqué, ces dernières décennies, le reboisement de ces surfaces. Non seulement cette pratique n'engendre pas de revenus, mais la tempête de décembre 1999 a anéanti les investissements réalisés.

Dans le cadre du projet d'avenir de la viticulture charentaise, il avait été prévu de laisser aux viticulteurs la possibilité d'arracher leurs vignes ; c'était là, pour certains d'entre eux, la seule solution envisageable.

Cependant, quelles sont les perspectives aujourd'hui ouvertes à un agriculteur approchant de la retraite et n'ayant d'autre solution que d'arracher tout ou partie de sa vigne s'il ne peut relouer ses terres parce qu'elles ne seront pas éligibles à la PAC ?

Dans l'optique de la révision de la PAC, il serait donc très souhaitable de modifier les dispositions communautaires correspondantes.

De même, une autre voie pourrait être explorée. En effet, la réglementation européenne laisse la possibilité aux agriculteurs d'opérer un transfert d'éligibilité au profit de ces surfaces. Ainsi, un exploitant peut demander qu'une certaine parcelle, non éligible à la PAC parce que non labourée au 31 décembre 1991, puisse devenir éligible à la place d'une autre dans la mesure où la nouvelle surface en céréales et oléoprotéagineux de l'exploitation, la SCOP, est inférieure ou égale à celle qui avait été déclarée antérieurement.

Au regard de ce principe, il serait plus aisé de recenser les surfaces éligibles dont la destination a été modifiée pour permettre la réalisation d'équipements collectifs, tels que des routes, ou l'aménagement de lotissements ou de zones d'activité diverses. Aux échelons départemental ou régional, la SCOP, qui est donc éligible à la PAC, a diminué de ce fait. Par conséquent, il pourrait être envisagé de mettre en place une « bourse » départementale ou régionale qui permettrait de transférer l'éligibilité à la PAC des surfaces consacrées à la réalisation d'équipements collectifs à des surfaces plantées en vigne restant dans le domaine agricole.

Une telle gestion ne pénaliserait pas la France, dont le potentiel, en termes de SCOP, serait maintenu, et permettrait de résoudre la question à laquelle la région délimitée « cognac » est confrontée.

En conséquence, monsieur le ministre, quelles mesures entendez-vous mettre en oeuvre pour remédier à une situation particulièrement préjudiciable aux agriculteurs concernés ? Quid, par ailleurs, des pénalités appliquées au titre des déclarations « PAC 2002 » ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, le règlement communautaire actuellement en vigueur établi par le Conseil des ministres de l'agriculture prévoit que les terres susceptibles d'ouvrir droit à des aides à la surface au titre des grandes cultures ne peuvent avoir porté des cultures permanentes, notamment de la vigne, au 31 décembre 1991.

Par ailleurs, les producteurs ayant arraché des vignes reçoivent des aides spécifiques qui comprennent une indemnisation pour perte de revenu. Il n'est donc pas prévu, dans les dispositions relatives à la viticulture, de mesures de reconversion particulières vers la production de céréales ou d'oléoprotéagineux.

Les pratiques contraires aux règlements communautaires étant susceptibles de faire encourir de fortes pénalités aux Etats membres, il n'est pas possible d'admettre des dérives qui entraîneraient des risques financiers insupportables. Telle est la situation actuelle.

S'agissant de la révision à mi-parcours de la PAC, aucune mesure visant à faciliter les restructurations économiques des exploitations n'est prévue à ce stade sur la base des propositions de la Commission européenne. C'est là une des faiblesses des options retenues par cette dernière, qui ne recueillent pas, sur le plan général et dans l'état actuel du projet, l'assentiment de la France. Le Sénat a d'ailleurs publié un excellent rapport sur ce sujet, dont le sous-titre est : Précipitation n'est pas raison. Il s'inscrit tout à fait dans la ligne suivie par le Gouvernement, qui déplore que les propositions de la Commission européenne ne comportent aucune des avancées dont nombre de secteurs de notre agriculture ont besoin.

Enfin, je formulerai une dernière observation concernant la situation spécifique du vignoble de votre département, monsieur le sénateur, que connaît bien également M. Dominique Bussereau, qui vient de rejoindre le banc des ministres.

Soyez assuré, monsieur Doublet, de notre détermination totale à fournir les réponses adaptées aux difficultés que ce vignoble doit affronter. Nous procédons encore à des consultations et travaillons actuellement sur ce thème, dans le cadre d'un ordre du jour particulièrement chargé, mais ne doutez pas, monsieur le sénateur, que nous saurons apporter dans les semaines qui viennent, du point de vue des mesures tant nationales qu'européennes, les réponses appropriées qu'attendent les viticulteurs de votre département.

Tels sont, monsieur le sénateur, les quelques éléments de réponse que je voulais vous communiquer, sachant que nous avons encore beaucoup de travail devant nous. Cela étant, compte tenu de l'excellent état d'esprit qui préside aux négociations, je crois que nous serons en mesure, avant l'été, d'envisager l'avenir de manière plus sereine.

M. le président. La parole est à M. Michel Doublet.

M. Michel Doublet. Je remercie M. le ministre de sa réponse, et je profite de cette occasion pour saluer mon ami Dominique Bussereau, lui aussi élu de la Charente-Maritime.

Nous avons eu avec vous, monsieur le ministre, des échanges très fructueux. J'espère que les annonces seront rapidement suivies d'effets, car c'est tout l'avenir du nouveau schéma de structures agricoles et viticoles de la Charente-Maritime et de la Charente en secteur délimité « cognac » qui est en jeu. Nous sommes à vos côtés pour défendre ce dossier primordial pour l'économie agricole de notre département.

DROIT AUX ALLOCATIONS D'ASSURANCE CHÔMAGE

DES AGENTS DES COLLECTIVITÉS LOCALES

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier, auteur de la question n° 206, adressée à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

Mme Gisèle Gautier. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur les dispositions du code du travail, notamment sur l'article L. 351-12 de celui-ci, résultant de la loi du 30 juillet 1987.

En effet, cet article dispose que les agents des collectivités territoriales ont droit aux allocations d'assurance chômage dans les conditions prévues pour les salariés du secteur privé.

Ainsi, la révocation pour faute n'exclut pas du bénéfice de cette allocation l'agent public s'étant rendu coupable d'un fait répréhensible ayant entraîné une condamnation à une peine d'emprisonnement. Compte tenu des droits et obligations des fonctionnaires inscrits dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, je souhaiterais savoir quelle adaptation de ce dispositif pourrait être envisagée.

En effet, il est aujourd'hui indispensable, me semble-t-il, d'adapter certaines dispositions, afin qu'un fonctionnaire faisant l'objet d'une révocation en raison de la commission d'un crime ou d'un délit tels que, par exemple, faux en écriture publique ou harcèlement moral, ne puisse bénéficier d'une allocation pour perte d'emploi. L'article L. 351-12 susvisé ne prévoit pas l'exclusion du bénéfice de ces allocations en cas de licenciement pour motif disciplinaire, lesquelles sont donc versées par la collectivité, qui se voit contrainte d'assumer une double charge, en termes de masse salariale, en raison du remplacement de l'agent.

Par conséquent, s'agissant de situations que l'on peut qualifier de graves, je souhaiterais savoir s'il est envisagé de procéder à une révision des dispositions en question, afin que puissent être prises, dans des circonstances exceptionnelles, des sanctions justes et équitables.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Madame le sénateur, votre question reflète les préoccupations des responsables de nombreuses collectivités territoriales, qui comprennent difficilement pourquoi, en cas de révocation pour faits graves, s'agissant notamment des délits que vous avez évoqués, l'employeur est tenu de verser une allocation chômage.

Comme vous l'avez rappelé, cela tient à l'application de l'article L. 351-12 du code du travail, selon lequel les agents des collectivités territoriales révoqués, qu'ils soient ou non titulaires, ont effectivement droit aux allocations d'assurance chômage dans les conditions prévues pour les salariés du secteur privé à l'article L. 351-3 du même code, qui dispose que « l'allocation d'assurance est attribuée aux travailleurs mentionnés à l'article L. 351-1 qui satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure ». Une analogie est donc établie entre le régime d'indemnisation des salariés du secteur privé et celui des fonctionnaires des collectivités territoriales.

Par conséquent, un revenu de remplacement est attribué tant aux fonctionnaires titulaires qu'aux agents non titulaires involontairement privés d'emploi, et les procédures de prise en charge prévues par la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale n'ont pas lieu de s'appliquer.

Aucune disposition législative ou réglementaire, aucune disposition de la convention du 1er janvier 2001 n'a exclu du bénéfice de ce revenu de remplacement les personnels, notamment ceux des collectivités territoriales, involontairement privés d'emploi à la suite d'un licenciement pour motif disciplinaire. Cette situation a été confirmée à plusieurs reprises par la jurisprudence administrative, en particulier par l'arrêt du Conseil d'Etat du 25 janvier 1991 « Ville de Marseille », qui fait référence.

Le principe de l'alignement des régimes d'indemnisation du chômage des agents des collectivités locales sur celui des salariés du secteur privé permet d'assurer une bonne lisibilité des règles d'indemnisation. Il n'est pas, pour l'heure, envisagé d'instaurer une dérogation à ce régime commun visant à éviter aux seules collectivités territoriales de verser les allocations d'aide au retour à l'emploi à leurs anciens agents licenciés pour motif disciplinaire. Une telle dérogation nuirait à la lisibilité des règles d'indemnisation du chômage et pourrait créer, à situation identique et en vertu des règles d'indemnisation actuelles, une inégalité de traitement entre employeurs publics et employeurs privés.

En effet, l'agent d'une collectivité locale licencié pour motif disciplinaire mais ayant travaillé plus longtemps pour un employeur du secteur privé que pour son employeur territorial voit le versement de son indemnisation chômage pris en charge par le régime d'assurance chômage général. L'instauration d'une dérogation au profit des collectivités locales aurait pour effet de contraindre, dans certains cas, le régime d'assurance chômage à prendre en charge l'indemnisation de l'agent, alors que l'employeur territorial serait exonéré d'une telle obligation.

Madame le sénateur, il s'agit donc d'une question qui ne peut être soulevée que dans un cadre général et qui concerne aussi bien les employés du secteur privé que les agents du secteur public.

Cela dit, je vous rappelle que des règles statutaires propres à la fonction publique territoriale prennent en compte cette situation et permettent de pénaliser l'agent territorial licencié pour motif disciplinaire.

Ainsi, selon l'article 43 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984, lorsque le licenciement d'un agent non titulaire intervient pour des motifs disciplinaires, ce dernier n'a pas droit à l'indemnité de licenciement. Il en va de même pour les fonctionnaires territoriaux en vertu de l'article 93 de la loi portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

Ce régime présente donc un certain équilibre, même s'il est vrai que, dans certains cas particulièrement choquants, les collectivités locales ne comprennent pas qu'elles doivent indemniser des agents qui ont commis des fautes graves. Le Gouvernement en a conscience, mais le dispositif ne pourra être réexaminé qu'après une concertation d'ensemble, car serait concernée l'intégralité du régime d'assurance chômage.

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier.

Mme Gisèle Gautier. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai écouté avec beaucoup d'attention vos propos, qui, malheureusement, ne peuvent me satisfaire.

Il est, en effet, difficilement supportable pour une collectivité de devoir rémunérer pendant de longs mois un ancien agent qui a été destitué de la fonction publique territoriale pour faute grave et, parallèlement, d'assumer le poids de son remplacement en termes de masse salariale.

Il y a, me semble-t-il, une certaine carence qu'il faudra peut-être - je reprends vos propos - intégrer dans une réflexion globale relative aux collectivités territoriales.

TRANSPOSITION D'UNE DIRECTIVE EUROPÉENNE SUR LES DROITS D'AUTEUR ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, auteur de la question n° 228, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Francis Grignon. Monsieur le ministre, tout d'abord, permettez-moi de vous remercier de vous être déplacé pour répondre à cette seule question, qui sera courte, concise et précise.

M. le président. Le Sénat apprécie beaucoup la présence des ministres aux séances de questions orales. Je suis heureux de leur en faire part et de les remercier, car ce n'était pas le cas dans le passé.

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Francis Grignon. Ma question porte sur le projet de transposition en droit français de la directive européenne n° 2001-29 du 22 mai 2001 relative à l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information par une modification du code de la propriété intellectuelle.

Les conditions de cette transposition peuvent avoir, selon l'option choisie, de graves conséquences pour l'enseignement supérieur et la recherche.

En effet, cette directive européenne pourrait offrir la possibilité d'exempter l'enseignement supérieur et la recherche du paiement des droits et de toute compensation financière. Cette position correspond au choix effectué par la plupart des Etats de l'Union européenne ; c'est aussi celle du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

Les universités acquittent déjà la redevance pour les photocopies, laquelle a atteint un montant de 2,4 millions d'euros en 2002. Ajouter les droits d'auteur et les droits voisins pour les documents numériques alourdirait les charges financières des universités ; dès lors, les établissements se tourneraient bien évidemment vers leur ministère de tutelle pour un abondement proportionnel de leurs dotations.

En outre, l'accès des chercheurs, enseignants-chercheurs et des étudiants aux documents numériques risquerait d'être limité.

Compte tenu de ces éléments, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous nous indiquiez la position du ministère de la culture et de la communication sur les conditions de cette transposition.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, j'estime qu'il est du devoir des ministres de se rendre au Sénat pour répondre aux questions de la représentation nationale. Pour ma part, je le fais toujours très volontiers, en toute amitié.

Monsieur le sénateur, la propriété littéraire et artistique ne doit pas être considérée comme l'ennemi de l'enseignement et de la recherche. Au contraire, dans la mesure où elle assure aux productions de l'esprit, c'est-à-dire de la recherche, protection et juste rémunération, elle en est le complément.

Ainsi, l'introduction, dans la loi de transposition de la directive du 22 mai 2001, d'une exception pédagogique de caractère général au profit des établissements d'enseignement supérieur, ne peut, à mes yeux, être envisagée, car elle serait incompatible, dans la lettre comme dans l'esprit, avec cette directive et certains traités internationaux, comme l'accord relatif aux droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce. En effet, l'ensemble de ces textes interdisent toute exception générale de nature à porter atteinte à l'exploitation normale des oeuvres ou à causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes des ayants droit.

Sur le plan économique, une telle initiative serait de nature à spolier les créateurs, les auteurs, les chercheurs de leur droit de propriété en associant d'ailleurs à cette spoliation ceux qui produisent les oeuvres ou les éditent.

La prise en compte des besoins réels des établissements d'enseignement supérieur ne peut, de mon point de vue, résulter que d'un dialogue, pouvant déboucher sur des conventions, entre les représentants des universités - sans doute sous la tutelle de leur ministère - et les ayants droit. Au cours des années récentes, ces derniers ont démontré leur disponibilité à conclure des accords avec le ministère chargé de l'éducation et de la recherche ; ils ont tous consenti, à cette occasion, des efforts de modération concernant les rémunérations.

Au demeurant, le Gouvernement est pleinement conscient des préoccupations des établissements d'enseignement supérieur. C'est pourquoi, avec mes collègues Luc Ferry, Xavier Darcos et Claudie Haigneré, j'ai mis en place des groupes de travail conjoints associant les représentants des ayants droit et les représentants des différents secteurs de l'enseignement supérieur.

Ces groupes de travail doivent permettre de trouver une voie adéquate pour parvenir, avant la fin de cette année, à un juste équilibre entre le respect des droits de propriété littéraire et artistique et les intérêts publics.

Monsieur le sénateur, je sens que ma réponse va vous décevoir mais il ne faut pas oublier que les chercheurs trouvent dans l'édition de leurs travaux une source de rémunération. Si tous ceux qui en sont les destinataires bénéficient d'emblée de mesures d'exemption, qui demain financera ces travaux ?

C'est la raison pour laquelle il nous faut garder une juste mesure entre l'ouverture de la documentation à l'enseignement supérieur et le respect scrupuleux du droit des auteurs, qui est l'un des fondements du droit français.

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.

M. Francis Grignon. Même si l'exemption générale est impossible - je l'ai bien compris, monsieur le ministre -, vous avez néanmoins pris en compte le problème et trouvé des mesures qui permettront d'adoucir un peu les contraintes des universités.

BASES DE CALCUL DU FCTVA 2002

POUR LES COMMUNES DE SAÔNE-ET-LOIRE

M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Courtois, auteur de la question n° 140, adressée à M. le ministre délégué aux libertés locales.

M. Jean-Patrick Courtois. Monsieur le ministre, je me suis permis d'appeler votre attention sur le problème que rencontrent un grand nombre de communes du département de Saône-et-Loire que j'ai l'honneur de représenter pour l'établissement des bases de calcul du fonds de compensation de la TVA, le FCTVA, pour 2002.

En effet, France Télécom ne participant plus à l'enfouissement des lignes, certaines communes ont pris ces travaux à leur charge en effectuant cet enfouissement au cours de l'année 2000. Or l'administration refuse de prendre en compte ces travaux dans l'assiette du FCTVA 2002 en application d'une directive du ministère du budget datant de 2001.

Il est certain que, si les communes avaient su en 2000, lorsqu'elles ont effectué les travaux, que ceux-ci ne seraient pas éligibles au FCTVA 2002, nombre d'entre elles auraient hésité à engager de telles dépenses.

Ainsi, le département de Saône-et-Loire est essentiellement peuplé de petites communes rurales qui disposent de moyens financiers très limités. La charge financière liée au fait que les travaux d'enfouissement des lignes ne soient pas éligibles au FCTVA 2002 constitue une dépense beaucoup trop importante pour elles.

Cette charge financière, qui grève lourdement le budget des communes, les empêche de financer des dépenses d'investissement, ce qui est contraire à une politique d'aménagement du territoire de qualité et ne fait qu'accentuer la désertification des zones rurales.

En conséquence, je vous serais très reconnaissant, monsieur le ministre, de bien vouloir m'indiquer les mesures que vous envisagez de prendre pour rendre éligibles au FCTVA 2002 les travaux d'enfouissement des lignes effectués au cours de l'année 2000, afin d'éviter aux communes une perte de ressources parfois importante.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur le sénateur, la règle de droit est claire. Elle résulte de l'article L. 1615-1 du code général des collectivités territoriales, qui prévoit, en particulier, que le FCTVA a pour objet de compenser la TVA acquittée par les collectivités territoriales sur leurs dépenses propres. Or les lignes téléphoniques demeurent, après les travaux, la propriété de France Télécom. Les travaux d'enfouissement sont donc bien réalisés pour le compte de tiers et, à ce titre, ne sont pas légalement éligibles au FCTVA.

Toutefois, la tempête que la France a connue a montré tout l'intérêt de l'enfouissement des lignes. Il est donc indispensable, si l'on veut progresser dans ce domaine, d'apporter un soutien important aux collectivité territoriales.

J'observe d'ailleurs que France Télécom ne procède plus à l'enfouissement de ses propres lignes depuis qu'elle est assujettie à la taxe professionnelle, ce qui représente pour elle une charge supplémentaire.

Aussi, monsieur le sénateur, en raison de l'importance du coût que représentent ces opérations pour les collectivités locales, la prise en compte des dépenses est actuellement examinée en liaison avec le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Toutefois, ce n'est pas par le biais du FCTVA que les dépenses des collectivités locales pourront être allégées ; elles le seront par d'autres dispositifs.

Ainsi, en région parisienne, le syndicat de l'électricité a pris en charge 40 % des dépenses et le département des Hauts-de-Seine en a financé 15 %, ce qui représente au total pour les collectivités territoriales un allégement de 55 %. Ce n'est pas si mal : voilà une solution. Ce dispositif pourrait peut-être se développer.

En tous les cas, il est indispensable de soulager les collectivités territoriales et de les aider à enfouir ces lignes afin, à la fois, d'embellir nos villages et de protéger les installations contre les intempéries.

M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Courtois.

M. Jean-Patrick Courtois. Monsieur le ministre, je vous remercie de vos informations.

Je sais bien que les travaux en cause ne peuvent donner lieu à compensation par le FCTVA. Mais le problème concerne l'année 2000, et cette année seule, puisque la directive date de 2001.

En 2000, les communes ont pris des délibérations pour accepter de procéder à ces travaux. Elles ont établi des plans de financement intégrant la récupération de la TVA. Les préfets ont accepté ces délibérations et maintenant, en 2002, ces communes se trouvent pénalisées. Il faudrait donc envisager, notamment pour les plus petites d'entre elles, l'octroi d'une aide exceptionnelle.

Reconnaissez que, pour des communes de 400 habitants qui ont la chance ou, dans ce cas-là, la malchance d'avoir un bâtiment classé sur leur territoire et auxquelles on a fait réaliser plus de 300 000 francs de travaux, le fait d'apprendre au dernier moment qu'elles ne percevront pas les 60 000 francs auxquels elles pensaient avoir droit au titre du remboursement de la TVA peut poser des problèmes financiers, d'autant que le conseil général avait fondé ses subventions sur le hors-taxe, considérant qu'il y aurait récupération de la TVA.

DÉCENTRALISATION DES PORTS MARITIMES

M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan, auteur de la question n° 234, adressée à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.

M. Josselin de Rohan. Monsieur le secrétaire d'Etat, à la demande du Premier ministre, un projet de loi transférant la responsabilité des ports maritimes aux collectivités locales est en préparation.

Dans le discours qu'il a prononcé le 28 février dernier à Rouen, le Premier ministre annonçait une dévolution générale des ports à la région, tout en précisant qu'il faudrait nécessairement tenir compte des situations locales. Je me réjouis de ce constat car, en matière portuaire, chaque infrastructure pose un problème spécifique.

Certains ports, classés ports d'intérêt national, comme Le Fret ou Roscanvel, en rade de Brest, dont vous n'ignorez certainement pas l'existence, monsieur le secrétaire d'Etat (Sourires), n'ont été rangés dans cette catégorie qu'en raison de l'activité militaire du port principal, alors qu'ils devraient plutôt être des ports communaux.

D'autres, comme ceux de Lorient ou Brest, comportent des sites dédiés au commerce, à la pêche, à la réparation militaire ou à la marine de guerre.

D'autres encore, comme celui de Concarneau, sont presque exclusivement tournés vers la pêche.

Les lois de décentralisation de 1982 et 1983 avaient attribué en toute propriété les ports de pêche aux départements et ceux-ci se sont acquittés de leur tâche de manière très satisfaisante en termes de gestion, que ces ports soient gérés en régie ou en concession.

Quant aux régions, elles ont largement contribué au financement des investissements maritimes dans les ports de pêche et de commerce, qu'ils soient d'intérêt national ou départementaux.

La région Bretagne a demandé, en 2002, en application de la loi sur la démocratie de proximité, à gérer à titre expérimental les ports de commerce de Brest, Saint-Malo et Lorient, sous réserve d'un audit préalable de la situation financière et matérielle de ces ports.

Au moment où les textes relatifs aux ports maritimes font l'objet d'arbitrages interministériels décisifs, nous souhaitons obtenir quelques éclaircissements sur les choix retenus.

Le Gouvernement est-il prêt, fort de l'expérience intervenue depuis 1982, à transférer immédiatement aux départements, non seulement la responsabilité de la création des ports, mais encore celle de la gestion des ports dont l'activité est majoritairement ou intégralement constituée par la pêche, tel le port de Concarneau ?

Est-il disposé à admettre que des ports tels que Brest, Lorient ou Saint-Malo, où les activités sont mixtes, soient transférés aux régions, mais gérés par des établissements publics où figureraient la région, le département et l'agglomération siège du port, les infrastructures de ces ports étant financées, d'une part, par des fonds émanant des collectivités associées dans l'établissement public et, d'autre part, par l'Etat ?

Accepterait-il, monsieur le secrétaire d'Etat, que fassent l'objet d'une concertation préalable les espaces propriétés des diverses administrations faisant l'objet de transfert aux régions, ainsi que les modalités du rattachement à leur nouveau gestionnaire des personnels portuaires ?

Est-ce que sera maintenu, avant chaque transfert, le principe d'un audit préalable de la situation financière et matérielle des ports dont le transfert est envisagé ?

Soyez assuré, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous serons très attentifs aux réponses que vous voudrez bien m'apporter sur tous ces points.

Pour que la décentralisation des ports soit réussie, elle doit s'opérer dans la clarté, la cohérence et la logique. Il faut qu'elle permette aux nouveaux attributaires de faire face à leurs responsabilités sur le plan financier et aux exigences d'une gestion efficace, rationnelle et compétitive.

Sous peine de renoncer à toute ambition maritime, la France doit disposer de ports bien équipés et performants. C'est assez dire que la gestion de proximité doit être, pour nos ports, un facteur de développement et non une régression, un auxiliaire du progrès et non du déclin, une source d'homogénéité et non de confusion.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'avoir attiré l'attention du Premier ministre et du Gouvernement sur la décentralisation des ports maritimes d'intérêt national. Au moment où - vous l'avez vous-même rappelé - les arbitrages ont lieu, votre intervention est particulièrement importante. Le président de l'Association des régions de France est d'ailleurs intervenu, lui aussi, sur ce point.

La décentralisation de ces ports d'intérêt national ne se fera pas à travers un schéma trop uniforme. M. le Premier ministre l'a dit lui-même le 28 février, lors de la synthèse des Assises des libertés locales à Rouen. Si le Gouvernement envisage effectivement de confier aux régions la responsabilité des ports d'intérêt national, le Premier ministre a également précisé que tel ou tel port pouvait relever du département ou de la commune et que c'est le dialogue qui permettra d'en décider.

Je tiens à dire que l'idée d'établissement public que vous avez mentionnée dans votre question est actuellement difficile à soutenir dans certaines discussions ; sans doute votre appui sera-t-il nécessaire dans ce domaine.

J'ai bien conscience de la grande diversité des ports maritimes d'intérêt national selon la nature de leurs activités - commerce, pêche, réparation navale, plaisance - leur configuration et leurs accès maritimes et terrestres.

S'agissant des ports décentralisés en 1983, il est tout à fait exact que les départements littoraux ont acquis depuis vingt ans une grande compétence pour les ports de pêche. Les départements de la région que vous présidez en sont la parfaite illustration.

Comme pour les autres infrastructures de transport, le projet de loi de décentralisation des ports maritimes est actuellement en cours d'élaboration en étroite collaboration avec Gilles de Robien et les autres membres du Gouvernement.

La loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité prévoit déjà la possibilité de décentraliser aux régions, à titre d'expérimentation et sur une base volontaire, certains ports d'intérêt national, après un audit. Seules les régions sont concernées par ces dispositions.

Le nouveau projet de loi devrait précisément permettre de diversifier les possibilités de choix des collectivités territoriales qui acquerront les compétences actuellement exercées par l'Etat, après une phase de concertation locale. L'objectif de cette décentralisation est bien de parvenir à ce que, port par port, comme vous le souhaitez, monsieur de Rohan, les compétences de gestion soient exercées au niveau le plus pertinent par la collectivité territoriale la plus concernée - et, du même coup, la plus motivée - par le développement économique du port en question. L'expérience déjà acquise par certaines collectivités est aussi un facteur à prendre en compte.

Dans le projet en préparation, est envisagée une décentralisation globale des ports d'intérêt national, permettant d'adapter au mieux le niveau de compétence suivant les ports et leurs activités. A ce titre, je retiens avec intérêt votre proposition de transférer autant que faire se peut l'activité pêche aux départements.

Notre souci est bien de parvenir à une décentralisation des ports d'intérêt national qui tienne compte de la diversité des situations. Aussi, l'idée d'un audit peut apporter un éclairage utile à la concertation locale.

Par ailleurs, l'orientation que vous proposez de pouvoir également s'appuyer sur la complémentarité des compétences locales est tout à fait pertinente et sera intégrée dans les propositions actuellement en cours d'élaboration.

Monsieur le sénateur, je vous remercie de tout l'intérêt que, au nom de votre groupe et au nom de la grande région maritime que vous présidez, vous manifestez sur ces problèmes maritimes et du concours précieux que vous apportez au Gouvernement par rapport au travail qu'il mène dans ce domaine.

M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan.

M. Josselin de Rohan. Monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens à vous remercier des précisions que vous avez bien voulu m'apporter et qui sont susceptibles d'apaiser quelques craintes que nous pouvions éprouver à partir de ce qui filtrait des délibérations interministérielles.

Il est important que cette réforme s'engage dans la concertation, et j'ai bien noté votre souhait, monsieur le secrétaire d'Etat, de voir celle-ci s'exercer pleinement et dans la plus grande clarté. Rien ne serait pire, en effet, que de laisser les collectivités locales se disputer la responsabilité d'un port ou, au contraire, refuser quelque responsabilité que ce soit. Cette dévolution doit donc se faire dans l'ordre et dans la clarté.

Je vous remercie également, monsieur le secrétaire d'Etat, de tenir compte des avis que le président Longuet ou moi-même avons exprimés.

RESPONSABILITÉ DES ORGANISATEURS

DE TRANSPORTS SCOLAIRES

M. le président. La parole est à M. André Lardeux, auteur de la question n° 227, adressée à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.

M. André Lardeux. Monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi d'attirer votre attention sur les inquiétudes des autorités organisatrices de transports scolaires, particulièrement les conseils généraux. Je précise que les faits qui m'amènent à poser cette question ne se sont pas déroulés dans le département que je représente.

Il existe un vide juridique en ce qui concerne la responsabilité des autorités organisatrices de transports scolaires. Si leur responsabilité est engagée, comme c'est logique, à l'intérieur des véhicules et aux points d'arrêt établis en vertu des règlements existants, la plus grande imprécision semble régner quand un accident survient alors que les enfants sont éloignés des véhicules.

A une époque où la judiciarisation de la vie en société prend toujours plus d'ampleur, une telle situation permet bien des interprétations. C'est ainsi qu'une cour d'appel vient de condamner un département en tant que personne morale à la suite d'un accident qui s'était produit à vingt-cinq mètres du point d'arrêt et sans que l'autobus scolaire ait une quelconque implication dans l'accident.

Je rappelle que, s'agissant de l'éducation nationale, cette difficulté n'existe pas puisque, aux termes de la loi, un enfant cesse d'être sous la responsabilité de cette administration dès qu'il quitte l'enceinte scolaire, pour se retrouver sous celle de ses parents. Une telle disposition me paraît parfaitement cohérente : la SNCF n'est pas plus responsable d'un accident subi par un voyageur dès lors que celui-ci a quitté la gare ! Il me semblerait donc logique qu'une disposition de même nature puisse s'appliquer au bénéfice des autorités organisatrices de transports scolaires.

Les imprécisions qui peuvent être actuellement constatées laissent en effet au juge la possibilité d'envisager de façon très extensive la responsabilité des associations et des collectivités concernées. Car, dans l'état actuel de la législation, rien ne l'empêche d'imputer la responsabilité d'un accident se produisant à cinquante mètres ou à cent mètres d'un point d'arrêt, voire bien au-delà, à l'organisateur des transports scolaires, en l'absence d'autres responsables identifiés.

Une telle situation, si elle devait perdurer, pourrait inciter les organisateurs à limiter le service rendu afin d'éviter de se trouver mis en cause.

Aussi, je souhaiterais savoir si le Gouvernement envisage de faire apporter par le Parlement les précisions qui me paraissent nécessaires, notamment par une modification, à cet égard, de la loi d'orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur la possibilité d'établir, au bénéfice des départements organisateurs de transports scolaires, une exemption de responsabilité pour les accidents survenus aux enfants qui ne se trouvent plus à bord du véhicule.

Des accidents graves se produisent malheureusement encore aux points d'arrêt des transports scolaires. Leur nombre, s'il est réduit, est encore beaucoup trop élevé, car il s'agit d'enfants. En 2002, il y a eu quatorze accidents, qui ont fait deux tués et huit blessés graves, selon les chiffres fournis par le groupe de travail permanent sur la sécurité des transports d'enfants du Conseil national des transports. Le plus souvent, des bousculades évitables et la traversée des chaussées en ont été la cause. Nous avons tous été enfants et nous savons bien comment les choses peuvent se passer !

La sécurisation de ces déplacements nécessite, au niveau national comme au niveau local, une sensibilisation de tous : des enfants, des automobilistes, des parents d'élèves, des conducteurs d'autocar, dont la tâche n'est pas facile, des organisateurs. Des actions allant dans ce sens ont été développées de longue date.

La sécurisation passe également par l'amélioration de la visibilité des autocars de transport scolaire. Un renforcement des contrôles et des sanctions dans le cadre de la grande politique en faveur de la sécurité routière voulue par le Président de la République est également nécessaire.

Ces précisions préalables m'apparaissaient indispensables, même si elles ne répondent pas précisément à votre question, monsieur Lardeux.

Les départements se sont vus confier par la loi d'orientation des transports intérieurs - hors périmètre des transports urbains - la responsabilité de l'organisation et du fonctionnement des transports scolaires. A ce titre, ils concluent avec des entreprises de transport des conventions. Celles-ci déterminent les établissements et points d'arrêt à desservir, fixent l'itinéraire à suivre, la fréquence et les horaires à respecter. Elles précisent les responsabilités des parties en matière de garde des enfants.

En cas d'accident subi par un élève utilisant le service, et si la faute invoquée est imputable à un défaut de surveillance ou à l'organisation du service, la responsabilité des départements peut être engagée devant le juge administratif ou judiciaire. La jurisprudence est constante sur ce point.

Mais cette responsabilité est très loin d'être exclusive. Les circonstances propres à chaque situation peuvent l'atténuer - là encore, la jurisprudence est abondante - ou la dégager complètement si d'autres fautes ont été commises, quel qu'en soit l'auteur. Elles peuvent être le fait du transporteur, d'automobilistes, de la victime, des parents de celle-ci ou d'une collectivité publique, titulaire du pouvoir de police ou gestionnaire de la voirie. La jurisprudence est plus nuancée à ce sujet. Un guide élaboré par le CERTU, le centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques, et le centre de documentation de l'assurance la répertorie.

Dans le cas des établissements scolaires, le principe d'exclusion que vous évoquez est aujourd'hui largement battu en brèche par le développement des activités et sorties extrascolaires.

Le « privilège légal » au bénéfice du département que vous proposez serait contesté au nom de l'équité. Il ferait en effet peser une plus lourde responsabilité sur les autres intervenants, y compris les victimes elles-mêmes. Or celles-ci sont souvent de très jeunes enfants.

Pour répondre précisément à votre question, monsieur le sénateur, si le Gouvernement reste ouvert à vos suggestions, il n'envisage pas pour l'instant de modifications législatives. Le Gouvernement estime préférable de privilégier des mesures de prévention pour améliorer la sécurité de ces transports. Nombre de départements mènent d'ailleurs actuellement des politiques dans ce sens, en liaison avec les communes, les enseignants et les parents d'élèves. Il y a même des parents d'élèves qui accompagnent bénévolement les enfants dans des cars pour assurer leur encadrement.

Toutefois, monsieur le sénateur, si vous considérez qu'il faut aller plus loin, nous sommes prêts, bien entendu, à y travailler avec vous.

M. le président. La parole est à M. André Lardeux.

M. André Lardeux. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre réponse.

Je partage très largement vos appréciations sur la nécessité de protéger les enfants, car un accident dont est victime un enfant est toujours un événement terrible. A cet égard, comme vous l'avez dit, des actions de prévention sont indispensables. Le département que je représente en mène d'ailleurs un certain nombre.

Il demeure que l'imprécision que j'ai signalée existe bel et bien. Bien sûr, s'agissant des accidents survenant dans le car ou autour du car, les départements sont pleinement responsables, et le président de conseil général que je suis est tout à fait conscient de ce que cela implique.

Cela dit, jusqu'où s'étend cette responsabilité ? Un transporteur ne peut pas être indéfiniment responsable. Sans doute ne s'agit-il pas de définir simplement un rayon exprimé en mètres, mais je crois effectivement qu'il conviendrait de réfléchir sur cette question, de manière que les juges puissent trancher en toute équité.

INVENTAIRE DES ZONES NATURELLES

D'INTÉRÊT ÉCOLOGIQUE, FAUNISTIQUE ET FLORISTIQUE

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, auteur de la question n° 219, adressée à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.

M. Pierre Hérisson. Madame la ministre, l'inventaire national des ZNIEFF, zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique, qui répertorie des espaces naturels exceptionnels ou représentatifs en matière de faune et de flore, a été entrepris dès 1982 par le ministère de l'environnement et le Muséum national d'histoire naturelle. Il est devenu un très bel outil pour la connaissance du patrimoine naturel national et constitue l'une des bases scientifiques principales de la politique de protection de la nature dans notre pays.

Cet inventaire délimite deux types de zone : l'un concerne les secteurs d'une superficie limitée, l'autre les grands ensembles naturels riches et peu modifiés ou qui offrent des potentialités biologiques importantes.

Les données de cet inventaire doivent être prises en compte par les aménageurs dans le cadre des études d'impact ou de l'élaboration des documents d'urbanisme.

En Rhône-Alpes, par exemple, l'inventaire initial, établi entre 1984 et 1991, identifiait 1821 ZNIEFF de type I et 167 de type II, intéressant 47 % de la superficie régionale. A ce jour, après une nouvelle évaluation, la superficie inventoriée passerait, pour le type I, de 16 % à 17 % de la superficie régionale et, pour le type II, de 50 % à 60 % de cette même superficie régionale. Ainsi, environ 80 % des communes de la région seraient territorialement concernées par des ZNIEFF.

Si ces dispositions tendent à protéger notre environnement, elles risquent aussi, à en pousser trop loin la logique, de paralyser l'action des acteurs locaux et de geler des territoires entiers. D'autant que cet inventaire est réalisé en dehors de toute concertation avec les élus : tout au plus, ils sont informés avant sa validation finale par les instances scientifiques.

Aussi souhaiterais-je, madame la ministre, que soient précisés et allégés, en concertation réelle avec des collectivités territoriales, les critères de classement des zones. Ces zones naturelles doivent être définies de manière « raisonnable », afin que ne soient pas entravées la vie et l'activité des populations vivant sur les territoires. Il y va notamment de l'avenir et du développement de nos infrastructures et de nos équipements publics.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, vous l'avez rappelé, une ZNIEFF est un secteur du territoire national particulièrement intéressant sur le plan écologique. L'ensemble de ces secteurs constitue l'inventaire des espaces naturels exceptionnels ou représentatifs du patrimoine faunistique et floristique de notre pays.

L'identification d'une ZNIEFF se fait selon une méthode scientifique, à partir de critères définis sous le contrôle du Muséum national d'histoire naturelle.

Cette identification ne correspond donc en aucune façon à un « classement » et n'est accompagnée d'aucune mesure réglementaire de protection. Elle signifie simplement que le site en question a été répertorié pour sa qualité biologique et écologique.

L'actualisation périodique de cet inventaire est nécessaire du fait de l'évolution des usages de l'espace : urbanisme, intensification ou, au contraire, abandon des activités agricoles. Cela peut donner lieu soit à l'ajout de nouvelles zones, soit au retrait des zones ayant perdu leur intérêt patrimonial.

La première génération de l'inventaire a permis de répertorier près de 15 000 ZNIEFF de types I et II - leur nombre est particulièrement important dans votre région, monsieur le sénateur, ce qui est aisément compréhensible - , représentant environ 25 % du territoire national. Ce taux de couverture varie suivant les régions en fonction de l'importance de la biodiversité, les zones de montagne et les régions méditerranéennes étant les plus riches.

Dans sa conception, l'inventaire ZNIEFF est donc un outil de connaissance et non une procédure de protection des espaces naturels. Il n'a pas de portée normative.

En matière d'aménagement, il est un outil d'appréciation ou d'aide à la décision et ne saurait imposer en lui-même aucune contrainte juridique directe, même si, comme vous le soulignez, ses données doivent être prises en compte, notamment, dans les documents d'urbanisme ainsi que dans les études d'impact.

Je précise que le code de l'environnement prévoit l'information des collectivités territoriales lors de l'élaboration de ces inventaires. Je veillerai à ce que cette information soit apportée le plus en amont possible.

Je le dis souvent, je suis extrêmement attachée à la concertation dans toutes les procédures de labellisation. J'ai pris les moyens nécessaires à cette concertation, par exemple en ce qui concerne Natura 2000. Les institutions qui s'en exonèrent condamnent à l'échec des démarches par ailleurs intéressantes et dressent les Français les uns contre les autres.

J'ajoute que la présence d'une ZNIEFF dans une commune constitue une preuve de la qualité environnementale du territoire communal et un atout pour le développement local en lien avec un tourisme rural respectueux du milieu naturel. Les départements utilisent ainsi régulièrement l'inventaire des ZNIEFF pour définir leurs espaces naturels sensibles, et il serait extrêmement dommageable qu'une concertation insuffisante condamne cette procédure de labellisation par ailleurs fort intéressante.

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson.

M. Pierre Hérisson. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse précise et de ce rappel concernant la nécessité de procéder à une concertation.

J'entends bien que l'identification d'une ZNIEFF n'a pas d'implications juridiques directes. Il n'en demeure pas moins qu'elle a des répercussions médiatiques qui affectent finalement, à travers des actions de lobbying, le déroulement des enquêtes publiques, d'autant que la population est aujourd'hui beaucoup plus sensible aux problèmes d'environnement, ce dont il faut d'ailleurs se féliciter.

Quoi qu'il en soit, madame la ministre, j'ai bien noté que vous veillerez à ce que les élus soient informés le plus en amont possible, et c'était là, pour moi, une préoccupation importante.

GESTION DES DÉCHETS

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, auteur de la question n° 220, adressée à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.

M. Alain Vasselle. Madame le ministre, un certain nombre de collectivités locales en charge de la gestion des déchets ménagers rencontrent des difficultés récurrentes en ce qui concerne tant la collecte que le traitement de ces déchets.

Lorsqu'elles n'assurent pas ce service de salubrité publique dans le cadre d'une régie directe, les collectivités font appel à un prestataire privé. Mais force est de constater qu'il leur est toujours plus difficile de contracter avec les opérateurs dans le cadre de la procédure d'appel d'offres ouvert, compte tenu des tarifs proposés. Les collectivités, face à des augmentations de 60 %, pouvant même atteindre plus de 80 %, se trouvent dans l'impossibilité financière d'accepter de telles offres ; elles n'ont d'autre choix que de tenter la négociation, en général sans grand succès.

Pour justifier ces augmentations, les opérateurs invoquent principalement le passage aux 35 heures, la modification des tonnages résultant du développement des collectes sélectives, des normes de travail de la profession désormais respectées ou bien encore des prix antérieurs anormalement bas - selon eux - du fait d'une prétendue compétition acharnée entre opérateurs pour conquérir des parts de marché.

Malgré des cahiers des charges de plus en plus précis, qui permettent aux collectivités de maîtriser et de contrôler davantage le service d'élimination des déchets, malgré le recours à plus de matière grise tant interne qu'externe, malgré d'importants investissements, malgré une prise de conscience positive de l'ensemble des acteurs de la vie locale, l'absence ou la faiblesse de la concurrence dans ce secteur semble également faciliter l'augmentation jugée abusive des prix, de surcroît peu réellement contrôlable par les collectivités.

Les collectivités confrontées à ce type de situation informent et alertent régulièrement les services départementaux de la concurrence et de la répression des fraudes, lesquels ne peuvent que constater, dans la plupart des cas, des positions quasi dominantes, voire, sans être jamais en mesure de le prouver, des offres s'apparentant à des couvertures.

Ce constat est d'ailleurs confirmé par la Cour des comptes, qui observe, dans son rapport public de 2002, que les collectivités sont en position de faiblesse face aux puissants groupes industriels. Elle précise que l'analyse des conditions de mise en concurrence des prestataires susceptibles de contracter avec les collectivités démontre que, même lorsque les formes sont respectées, la concurrence effective est faible et que les collectivités ont rarement les moyens de négocier les contrats dans une situation d'égalité. Aussi, la Cour des comptes préconise-t-elle, notamment, l'élaboration de « contrats de référence qui soient des guides pour la négociation des principales clauses de contrats ».

Face à une situation qui ne cesse de se détériorer depuis plusieurs années, je vous demande, madame le ministre, de bien vouloir m'indiquer si le Gouvernement entend prendre des mesures pour remédier à ces difficultés et permettre aux collectivités d'exercer, dans des conditions économiques satisfaisantes, la mission qui est la leur en matière de gestion des déchets, car nos concitoyens s'inquiètent de l'explosion des dépenses liées aux déchets malgré le développement du tri, dont l'impact financier n'est d'ailleurs pas toujours nul pour l'usager-contribuable.

J'ajoute au passage qu'il serait peut-être opportun de procéder à une nouvelle révision du barème des aides à l'éco-emballage, de façon à parvenir à une neutralité complète du coût engendré par le tri sélectif.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, vous soulevez une question qui sera un défi dans les prochaines années : la gestion des déchets.

Nous nous réjouissons tous des progrès faits en matière de maîtrise de traitement et, plus globalement, de la modernisation de la gestion des déchets au cours des dernières années. Mais la hausse des coûts de collecte et de traitement des déchets est un sujet de préoccupation de plus en plus important.

Il convient de s'assurer que l'augmentation constatée du coût du traitement des ordures ménagères s'est effectivement traduite par un bénéfice environnemental ou social, ce qui n'est pas toujours le cas.

La mise aux normes des incinérateurs ou l'amélioration sensible des conditions de collecte constatée au cours des dernières années ont un coût, qui est justifié. En revanche, il est important de veiller à ce que les collectes sélectives permettent effectivement une valorisation de certains flux de déchets dans un cadre de maîtrise des dépenses globales. Des excès ont pu être constatés au cours des années passées, des actions présentées comme des valorisations ayant été promues alors qu'elles n'avaient pas un bilan écologique et économique satisfaisant.

Je suis frappée de voir à quel point ces coûts son mal connus. Leur meilleure connaissance, notamment par la mise en place d'observatoires, est un préalable nécessaire. En disposant d'éléments de comparaison, il sera plus simple de prendre les mesures nécessaires pour mieux maîtriser ces hausses, voire pour diminuer les coûts.

Monsieur le sénateur, vous avez souligné le faible nombre d'opérateurs dans ce secteur, ce qui peut entraîner de mauvaises conditions de concurrence et donc avoir un effet négatif sur les coûts. La fixation d'exigences plus strictes en matière de traitement de déchets a effectivement pu entraîner un resserrement du nombre des acteurs actifs dans ce domaine, même si nos services s'attachent à ne pas créer de situations de monopole.

Il faut veiller à un bon respect des conditions de concurrence. Je tiens à cet égard à préciser que les dispositions du plan départemental d'élimination des déchets ménagers et assimilés ne peuvent en aucun cas faire obstacle au strict respect du code des marchés publics. L'élaboration d'un plan est un exercice important qui permet de disposer d'orientations utiles pour la gestion des déchets du département ; mais la mise en concurrence prévue par le code des marchés public doit toujours être réalisée.

Il faut enfin prendre conscience de la raréfaction des installations de traitement de déchets, qui conduira prochainement à des situations critiques dans un nombre important de départements. Si les acteurs du système ne se mobilisent pas pour empêcher cette évolution, celle-ci aura pour conséquence, au-delà d'impacts potentiels supplémentaires sur l'environnement, une hausse mécanique des coûts qui aggravera encore la situation que vous avez décrite, monsieur le sénateur.

J'ajoute, monsieur Vasselle, que, dans les prochaines semaines, je ferai des annonces substantielles sur cet important dossier.

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.

M. Alain Vasselle. Madame le ministre, je me réjouis de constater que le diagnostic est partagé, mais je reste sur ma faim quant aux solutions qui permettront de maîtriser la situation que nous vivons aujourd'hui.

Vous annoncez des solutions qui nous permettront d'être rassurés. Je les attends avec impatience ! Il nous reste à nous mettre tous au travail pour que cette situation ne perdure pas et que nos concitoyens voient la situation s'améliorer.

M. le président. Mme Bachelot-Narquin doit être auditionnée par une commission de l'Assemblée nationale à onze heures, et elle ne pourra répondre à la question de M. Coquelle. C'est donc Mme Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle, qui interviendra au nom du Gouvernement : certains de nos collègues, du fait de mon libéralisme, ont en effet largement dépassé leur temps de parole... (Sourires.)

CONSÉQUENCES DE LA FERMETURE

DE METALEUROP NORD

M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle, auteur de la question n° 242, adressée à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.

M. Yves Coquelle. Madame la ministre, le plan social concernant l'usine Metaleurop Nord va atténuer quelque peu les souffrances et les douleurs des 830 salariés qui sont maintenant au chômage.

Pour autant, les problèmes sont très loin d'être réglés pour l'ensemble des salariés même si l'Etat, par la création de zones franches, s'est fortement engagé à favoriser la création d'emplois dans ce secteur où le taux de chômage dépasse souvent 25 % de la population active dans de nombreuses communes.

Ce plan sera d'ailleurs accompagné par divers partenaires, dont la région Nord - Pas-de-Calais, notamment sur les questions de la formation professionnelle, pour tenter de réduire l'impact de la perte de plus 2 000 emplois induits après la fermeture de l'entreprise.

Par ailleurs, madame la ministre, même si le liquidateur a commencé les travaux de dépollution et que l'Etat se tient à ses côtés pour accélérer ceux-ci, trois grandes questions restent à ce jour sans réponse.

La première a trait à la sécurité du site et des environs immédiats, car même si cette usine, classée Seveso 2, est en cours de sécurisation, les problèmes demeurent.

Qu'adviendra-t-il, par exemple, des diverses conventions partenariales qui disparaissent avec le dépôt de bilan ? Je veux parler des concessions qui concernent les exploitants agricoles et les compensations liées à la perte d'exploitation pour cause de pollution, la gestion des espaces verts entourant le site et la gestion des eaux de la nappe.

Qui protégera désormais la nappe phréatique au regard de la pollution des sols ?

Qui assurera l'entretien de l'importante station d'épuration ?

Sur l'ensemble de ces questions, l'Etat se doit d'assumer ses responsabilités face à la scandaleuse défaillance de l'entreprise.

La deuxième interrogation porte sur la pollution de ce site de 45 hectares, qui est l'un des endroits les plus pollués de France.

Le taux de plombémie dans la plupart des communes environnante est également hors normes, ce qui entraîne un risque important pour les populations concernées au regard de leur santé.

Madame la ministre, quelles mesures concrètes, rapides et efficaces compte prendre le Gouvernement pour rassurer ces populations et pour endiguer cette pollution endémique ?

Par ailleurs, madame la ministre, qu'adviendra-t-il des 170 salariés de Metaleurop Nord âgés de plus de cinquante ans qui ont travaillé pendant des décennies au contact de l'amiante et qui, de plus, ont été confrontés au risque de maladies professionnelles liées au plomb et au cadmium, substances classées cancérogènes.

Nous pensons que l'Etat doit permettre à ces salariés de bénéficier dans les plus brefs délais de l'allocation de cessation anticipée d'activité.

Cette mesure de justice sociale permettra de réduire quelque peu le nombre de chômeurs sur le site.

Enfin, troisièmement, madame la ministre, qu'en est-il de notre demande de création d'une commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner les causes et les conséquences de la fermeture de l'usine Metaleurop Nord ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser le départ anticipé de Mme Bachelot. Je vais vous répondre en son nom.

A la suite de l'arrêt de l'activité de l'installation de Metaleurop Nord à Noyelles-Godault, la mise en sécurité du site a constitué une priorité pour les services de l'Etat. Il s'agit en particulier d'éviter le risque d'intrusion sur le site et d'assurer l'évacuation des produits et déchets dangereux. La DRIRE, la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, a prescrit ces dispositions dès les premiers jours aux liquidateurs de Metaleurop Nord et elle en a contrôlé l'exécution à plusieurs reprises. Toutes les actions seront engagées pour faire en sorte que ce chantier soit intégralement mené à bien. A ce jour, la grande majorité des produits dangereux a été d'ores et déjà évacuée.

Malgré les réductions importantes des rejets, qui avaient été obtenues ces dernières années à la suite de l'action de l'inspection des installations classées, l'accumulation dans le sol des polluants déjà rejetés est à l'origine d'impacts très préoccupants, comme vous l'avez souligné, monsieur le sénateur. Lors de la dernière campagne de mesures d'imprégnation saturnine des enfants sur l'ensemble de la zone polluée, une trentaine d'entre eux présentait une plombémie supérieure à 100 microgrammes par litre, chiffre ne traduisant pas une amélioration significative par rapport aux précédentes campagnes. L'exposition au cadmium appelle également une action.

Conformément à la législation, Metaleurop Nord a théoriquement l'obligation d'assurer la maîtrise des risques résultant de ses activités passées, mais aussi celle de remettre en état son site. L'Etat a engagé les procédures pour que les responsables directs ou indirects du site réalisent les actions nécessaires. Il a souhaité compléter les procédures administratives classiques par des actions visant à mettre en cause la responsabilité des actionnaires français et étrangers. En cas d'échec ou d'issue trop incertaine, et conformément à la législation, le ministère de l'écologie et du développement durable peut autoriser l'intervention de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, sur fonds publics avec comme objectif la maîtrise des risques, pour accomplir des actions telles que l'achat des exploitations agricoles mises en vente, l'indemnisation des productions animales et végétales impropres à la consommation, ou d'assainissement des terres des jardins privés. L'Etat poursuivra également, et intensifiera si besoin, le suivi sanitaire des populations, notamment des enfants et des travailleurs.

D'ores et déjà, et sans attendre l'issue des procédures en cours, l'ADEME a commencé à travailler pour définir les premières mesures à prendre. La commission nationale des aides de l'ADEME a ainsi décidé le déblocage de 600 000 euros pour financer des actions immédiates.

En ce qui concerne l'entrée des salariés dans le dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, elle est de droit dès l'âge de cinquante ans pour les salariés souffrant d'une maladie liée à l'amiante. En revanche, l'éligibilité de l'ensemble des salariés ayant travaillé dans l'établissement est juridiquement impossible. Ce traitement n'est en effet réservé qu'aux sites dans lesquels l'utilisation de l'amiante a été si importante qu'elle occasionnera une probabilité très élevée de maladies professionnelles. Cette situation est réservée à la production d'amiante, au calorifugeage et à certains métiers de la construction et de la réparation navale.

Enfin, pour l'exposition à tous les autres agents, notamment le plomb ou le cadmium, les réparations prévues par la Caisse nationale de l'assurance maladie, la CNAM, sont bien évidemment applicables.

M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle.

M. Yves Coquelle. Je remercie beaucoup Mme la ministre des explications qu'elle vient d'apporter. Je considère, de ce point de vue, que des efforts ont été réalisés. Néanmoins, l'attitude de Glencore international AG est condamnable à plus d'un titre. Je souhaite donc la création, à l'Assemblée nationale et au Sénat, d'une commission d'enquête.

En ce qui concerne l'amiante, madame la ministre, un problème me préoccupe beaucoup : ne sont reconnus atteints de maladies professionnelles que les salariés ayant travaillé dans des entreprises qui fabriquaient de l'amiante, c'est-à-dire dont la finalité était la fabrication d'amiante. Mais quelle différence y a-t-il entre ceux qui fabriquaient de l'amiante et ceux qui étaient au contact de l'amiante à longueur de journée pour calfeutrer des fours ou procéder à d'autres opérations de ce type ? Il faudrait peut-être revoir le dispositif afin de permettre à des personnes sérieusement malades parce qu'elles ont travaillé dans des conditions très pénibles de partir à la retraire. Cela contribuerait de plus à diminuer de cent soixante-dix le nombre des chômeurs dans notre région.

SITUATION DES ÉTABLISSEMENTS D'HÉBERGEMENT

DES PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel, auteur de la question n° 205, adressée à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. Jean-Pierre Bel. Les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ont entamé, en 2001, une démarche de conventionnement, d'une part, avec l'Etat, au titre de l'assurance maladie, d'autre part, avec les départements en vue de permettre une amélioration de la qualité des prises en charge.

En 2000, un plan pluriannuel d'amélioration de la qualité en maison de retraite avait été adopté. Il devait se traduire par cinq tranches annuelles d'un montant de 182 millions d'euros par an. En 2001 et en 2002, ces engagements ont été respectés. Pour tenir compte du retard pris dans cette réforme, le Gouvernement a proposé de reporter à décembre 2005 la date butoir de signature des conventions qui était initialement prévue en 2003.

Cependant, l'engagement du Gouvernement de signer 1 800 conventions pour 2003 ne sera pas respecté puisque les moyens financiers affectés en 2003 à la signature de ces conventions ne semble pas permettre aujourd'hui d'en conclure plus du dixième.

Cette carence dans le financement se traduit concrètement par une absence de prise en charge par l'assurance maladie des soins que de nombreuses personnes âgées dépendantes paient elles-mêmes, par l'impossibilité pour un grand nombre d'établissements de recruter du personnel soignant supplémentaire, par l'impossibilité aussi de créer de nouveaux établissements même - c'est le cas dans le département de l'Ariège dont je suis l'élu - dans des zones où pourtant la demande est forte et l'offre insuffisante, et par la fin du contrat qui fondait cette réforme et permettait de dégager des moyens supplémentaires afin de rendre possibles des améliorations de la qualité.

Dès lors que le Gouvernement a reconnu que cette réforme est nécessaire, quelles sont aujourd'hui ses intentions à ce sujet ? Est-il prêt à effectuer les ajustements nécessaires ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention de M. François Fillon, qui m'a priée de vous répondre sur l'amélioration de la qualité des prises en charge dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, laquelle constitue l'objectif premier de la démarche de conventionnement effectivement engagée à partir de 2000 et du plan pluriannuel de médicalisation pour la période 2001-2005.

Le rapport annexé à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 souligne l'importance de cette orientation. Permettre à chacun de vieillir en toute dignité, donner un sens aux années d'espérance de vie supplémentaires, telle est bien l'ambition du Gouvernement. C'est à cette fin que nous avons poursuivi la réfome de la tarification. Ces objectifs sont bons, même si le rythme lent de signatures constaté en 2000, en 2001 et au début de 2002 traduit des difficultés de mise en oeuvre. Sur bien des aspects, la réforme demeure donc encore trop complexe, insuffisamment transparente, parfois incomprise.

Néanmoins, les objectifs restent largement partagés. Ils visent notamment à promouvoir la qualité dans chaque établissement et à réduire les inégalités tarifaires.

Depuis notre arrivée au Gouvernement, nous avons poursuivi la démarche de conventionnement. Les chiffres l'attestent : 330 conventions avaient été signées en 2000-2001 ; 1 100 conventions l'ont été en 2002, dont 400 au premier semestre et 700 au second.

Nous entendons prolonger le processus d'amélioration de la qualité. C'est pourquoi une instruction ministérielle du 13 janvier 2003 a été diffusée à tous les acteurs pour lever certains obstacles qui pouvaient subsister dans les procédures et la méthodologie de conventionnement.

Par ailleurs, un objectif volontariste de conventionnement a été formellement, et pour la première fois, inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale.

Sur le plan budgétaire, l'instruction annuelle est en cours d'élaboration. Elle sera diffusée dans les prochaines semaines. L'objectif de conventionnement pourra être atteint par différents moyens et sous certaines conditions.

Sur le plan des moyens, des conventions ont été signées avec des établissements déjà médicalisés tels que, à titre d'exemple, les unités de soins de longue durée, pour lesquelles la démarche qualité n'en demeure pas moins essentielle.

La réglementation en vigueur - l'article 32 du décret du 26 avril 1999 - selon laquelle les conventions, sauf accord entre les parties pour anticiper la date d'application, entrent en vigueur à compter de l'exercice budgétaire qui suit la date de leur conclusion sera appliquée.

Les marges budgétaires disponibles seront utilisées. Des redéploiements pourraient également intervenir.

S'agissant des conditions, étant données les contraintes qui pèsent aujourd'hui sur l'assurance maladie, nous devrons, en revanche, veiller au strict respect des montants plafonds des conventions.

Contrairement aux déclarations de certains, une enveloppe spécifique destinée au conventionnement n'est pas identifiée, en tant que telle, dans la loi de financement de la sécurité sociale. Ce n'est pas plus le cas aujourd'hui qu'hier.

Une marge globale de l'ordre de 300 millions d'euros - précisément 291 millions d'euros - est dégagée par l'ONDAM, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, pour couvrir l'ensemble des besoins, notamment en termes de revalorisations salariales, de nouveaux programmes et de conventionnements.

Telles sont, monsieur le sénateur, les informations dont je souhaitais vous faire part.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel.

M. Jean-Pierre Bel. Je vous remercie, madame la ministre, d'avoir bien voulu me répondre en lieu et place de M. Fillon.

J'ai bien entendu vos propos, qui se veulent rassurants. Je ne suis cependant pas certain que cette réponse soit de nature à rassurer tous ceux, professionnels, collectivités et mouvement mutualiste, qui ont manifesté une inquiétude forte sur les règles, actuelles et à venir, relatives à la prise en charge et la solvabilisation des personnes âgées dépendantes dans notre société.

Si cette situation devait se confirmer, ce serait grave car on pourrait facilement conclure à un renoncement de l'Etat à tenir ses engagements quant à la prise en charge de l'amélioration des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Cela pourrait également décourager l'ensemble des professionnels engagés dans les évolutions qui ont été voulues par les pouvoirs publics, telles que la mise en oeuvre d'une démarche de qualité et la prévention de la maltraitance.

Il est vrai aussi que l'on peut s'interroger sur la cohérence et la justification qu'il y a à créer un comité national de lutte contre la maltraitance, à s'impliquer dans le droit à compensation des personnes handicapées et, dans le même temps, à supprimer ou à fortement diminuer les crédits destinés aux soins des personnes âgées dépendantes et donc handicapées.

MENACE DE FERMETURE DE L'HÔPITAL

DE LA RÉOLE EN GIRONDE

M. le président. La parole est à M. Bernard Dussaut, auteur de la question n° 218, adressée à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

M. Bernard Dussaut. L'hôpital de La Réole est un hôpital de proximité qui joue un rôle essentiel auprès de la population. Or ses services sont régulièrement remis en cause depuis quelques années : la maternité est fermée depuis le 31 mars 2001, et ce sont désormais, ainsi que nous le redoutions tous, les services actifs de chirurgie et des urgences qui sont menacés.

La population est très inquiète et se mobilise de nouveau aux côtés des élus.

Le chirurgien de l'hôpital de La Réole assure autant d'interventions que ceux des hôpitaux voisins. Aucun incident n'est à déplorer, et les différentes enquêtes ont mis en évidence la fiabilité de ce service.

Par ailleurs, on sait qu'une hospitalisation de proximité a des atouts incontestables : les rétablissements y sont plus rapides et - cela ne devrait pas vous laisser insensible, madame la ministre - les coûts y sont donc réduits. Ce constat vaut d'autant plus dans cet hôpital que 60 % des patients en chirurgie y sont âgés de plus de soixante ans.

Madame la ministre, des décisions ont-elles été prises sur l'avenir de ce service de chirurgie de l'hôpital de La Réole ?

En ce qui concerne le service des urgences, l'inquiétude est plus forte encore. Si l'accueil des urgences était supprimé à La Réole, les populations des communes environnantes se trouveraient alors à une distance qui ne permettrait pas une prise en charge dans un délai satisfaisant. Les habitants du canton de Monségur - que j'ai l'honneur de représenter au conseil général de la Gironde -, où, chaque année, plus de cent personnes sont transportées en urgence par les sapeurs-pompiers et accueillies à l'hôpital de La Réole dans les trente minutes, devraient alors effectuer un trajet de plus d'une heure pour se rendre à Langon, où se situe l'hôpital le plus proche.

L'éloignement est donc encore plus préjudiciable en matière d'urgences qu'en matière de chirurgie, et la population éprouvera un véritable sentiment d'abandon si leur prise en charge n'est plus assurée.

Un travail de réflexion a permis d'élaborer un projet dont l'objet est la création, en collaboration avec les praticiens libéraux, d'une maison médicale qui serait hébergée au centre hospitalier de La Réole. Il semblerait en effet que la solution la plus satisfaisante, celle qui permettrait de conserver et de développer le service des urgences, serait de constituer avec l'hôpital de Langon des « urgences organisées » comprenant une équipe commune et, surtout, une garde commune.

Madame la ministre, ce qu'il nous faut aujourd'hui, c'est votre accord et votre aide pour expérimenter cette collaboration entre le service public hospitalier et les médecins libéraux, avec un service mobile d'urgence et de réanimation, un SMUR, basé à La Réole. Cela permettrait d'assurer la continuité du service des urgences, notamment la nuit.

Madame la ministre, nous aiderez-vous à mener à bien ce projet essentiel pour les femmes et les hommes qui vivent sur ce territoire excentré et très rural du département de la Gironde ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Monsieur le sénateur, vous avez souhaité appeler l'attention de M. Jean-François Mattei sur le devenir de l'hôpital de La Réole.

M. le ministre de la santé partage votre souci d'assurer à la population des soins de proximité, pour autant que les impératifs de qualité et de sécurité soient respectés et que les contraintes de la démographie médicale le permettent.

Votre intervention, monsieur le sénateur, appelle trois réponses.

Premièrement, en ce qui concerne la maternité du centre hospitalier de La Réole, le site d'accouchement n'est effectivement plus autorisé, conformément aux préconisations du schéma régional d'organisation sanitaire, pour des raisons de sécurité sanitaire. Afin d'assurer une prise en charge de proximité en liaison avec les maternités environnantes, un centre périnatal de proximité a été créé sur place.

Deuxièmement, s'agissant des urgences, l'agence régionale de l'hospitalisation poursuit activement sa réflexion sur le sujet. Parmi les solutions envisagées figure la réorganisation du dispositif, qui pourrait s'appuyer sur la participation coordonnée des médecins libéraux de La Réole et sur celle des praticiens du centre hospitalier de Langon. La permanence des soins se trouverait particulièrement renforcée par une telle coopération.

Enfin, pour ce qui est de la chirurgie, la mission d'expertise diligentée l'hiver dernier par le ministère de la santé conduit à se poser la question de la légitimité du maintien de cette activité au regard du volume d'actes réalisés et de la disponibilité, dans un contexte démographique extrêmement contraint, des ressources médicales qualifiées. Une telle orientation, si elle était définitivement retenue, ne ferait pas obstacle au maintien d'une activité d'anesthésie et de chirurgie ambulatoire. Pour répondre aux besoins de la population, une reconversion d'activité en soins de suite pourrait être utilement mise en place par redéploiement interne des moyens disponibles ; elle permettrait en outre de garantir l'emploi local.

M. le ministre de la santé ne doute pas que ces nouvelles orientations seront de nature à mieux adapter l'offre de soins aux besoins de la population desservie par le pôle hospitalier sud-girondin.

M. le président. La parole est à M. Bernard Dussaut.

M. Bernard Dussaut. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais je ne suis pas rassuré pour autant.

Je sais bien qu'une réflexion est actuellement en cours sur l'organisation d'un pôle, que nous souhaitons, incluant des médecins libéraux ; mais, pour l'instant, cette réflexion n'a pas abouti. Or, puisque le Gouvernement semble souhaiter que des expérimentations aient lieu, saisissons cette occasion d'expérimenter un tel service des urgences ! Il est en effet très préoccupant de se trouver à soixante minutes d'un hôpital.

Mieux vaut avoir un infarctus près de Bordeaux qu'à Monségur : l'inégalité dans la prise en charge de l'urgence en milieu rural existe déjà ! Alors, quand une structure qui est à trente minutes de distance donne satisfaction, il n'est pas rassurant d'apprendre sa fermeture, sachant que, en cas d'urgence, il faudra effectuer trente minutes de trajet supplémentaires !

PLAN DE LUTTE ANTI-CANCER

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, auteur de la question n° 230, adressée à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

Mme Marie-Claude Beaudeau. J'interviens une nouvelle fois en faveur du droit à l'emprunt pour tous, malheureusement contesté ou refusé par certaines compagnies d'assurances ou certaines banques. Persistent notamment des discriminations que répriment pourtant, je le rappelle, les articles 225-1 et suivants du code pénal s'appliquant à des personnes handicapées, malades ou pouvant contracter une maladie.

Plusieurs dizaines de milliers de personnes seraient concernées qui auraient vu en 2002 leur dossier refusé, retiré ou non déposé. Les assurances ne contestent pas ces chiffres, qui sont en augmentation.

D'après un récent sondage, 43 % des personnes interrogées reconnaissent ces inégalités, 53 % d'entre elles estiment injustifié le questionnaire de santé préalable au traitement d'un dossier d'emprunt, et 58 % d'entre elles voient dans les surtarifications une discrimination. Combien de dossiers de telles pratiques, qui concernent une personne sur quatre, conduisent-elles à refuser ?

Le problème est là, réel, avec ses dérives que je juge inhumaines, illégales et immorales. Un droit est bafoué : il doit être rétabli, confirmé, préservé. Est-ce possible ?

Je pense que la solution passe par le préalable d'une nouvelle campagne de sensibilisation et d'information du grand public afin de rappeler les droits et devoirs des citoyens en matière d'égalité et de non-discrimination par les assureurs.

Une autre mesure résiderait dans l'application et l'extension de la convention Belorgey, qui, signée le 19 septembre 2001 pour deux ans, définit, en partant pour chaque personne de ses données spécifiques, la convention des risques pour le crédit. Elle met également en place une commission de suivi qui délibère et justifie ses décisions.

Cette convention, de l'avis de tous, reconnaît le principe du droit à l'emprunt pour chaque citoyen. En ce sens, elle constitue un progrès incontestable.

Mais M. Belorgey, conseiller d'Etat, reconnaît lui-même que le législateur aurait dû aller plus loin et fixer un contenu minimal de contraintes pour les assurances. Le moment est donc venu de donner force de loi à cette convention, qui arrive à échéance à l'automne prochain, en profitant de son renouvellement pour légiférer. Evidemmment, il reste à savoir dans quel sens légiférer !

Tout d'abord, un fonds d'aide et de répartition doit être créé pour répondre à toutes les démarches, à commencer par celles qui portent sur un risque très aggravé. La commission de suivi, qui s'est réunie le 25 avril, a rejeté un certain nombre de dossiers faute de solution. Ce fonds pourrait être alimenté par une participation de l'Etat et des assurances et avoir pour mission de placer les malades ou les personnes handicapées dans une situation semblable à celle de tout citoyen - ni plus ni moins.

Ensuite, une loi prolongeant la convention Belorgey pourrait élargir les compétences et le champ d'application de celle-ci à l'ensemble des prêts immobiliers, d'équipement ou de consommation, au lieu qu'elle ne concerne que le seul risque décès.

Enfin, des obligations doivent être rappelées et définies et des sanctions prévues, s'il le faut, en matière de discriminations pour que le questionnaire de santé soit supprimé. Les articles 225-1 et suivants du code pénal doivent être appliqués dans toute leur rigueur afin que ne soit pas remise en cause la couverture des risques d'invalidité et de décès dans le cadre de l'obtention d'un prêt à la consommation ou à l'immobilier, ou d'un prêt à caractère professionnel.

Les associations ont notamment relevé, dans la présentation du plan de lutte contre le cancer, le point 54 - d'ailleurs présenté par le Président de la République -, qui concerne le renforcement de l'accès aux dispositions de la convention Belorgey. Il faut maintenant passer aux actes, et le renouvellement de la convention Belorgey est propice à la mise en place de cet ensemble.

Ma question est donc simple : quelles mesures législatives le Gouvernement compte-t-il proposer pour que les personnes malades ou handicapées ne soient plus victimes de discriminations liées à la santé ou au handicap ?

A cet égard, nous ne savons d'ailleurs pas où est la limite entre la légalité et l'illégalité, personne n'étant capable de dire si les textes peuvent ou non aller plus loin !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Madame la sénatrice, vous avez souhaité attirer l'attention du ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur la convention Belorgey.

Sans qu'il soit nécessaire d'envisager d'autres dispositions législatives, le dispositif conventionnel oblige d'ores et déjà ses signataires au respect d'un ensemble de mesures permettant un accès plus favorable à l'assurance emprunteur.

C'est ainsi que sont prévus, sous conditions d'âge, de montant et de durée de remboursement, d'une part, la suppression du questionnaire de santé pour l'assurance des prêts à la consommation et, d'autre part, pour l'assurance des prêts au logement ainsi que des prêts professionnels, un dispositif de réexamen individualisé de toute demande ayant fait l'objet d'un premier refus dans le cadre des contrats d'assurances de groupe existants. La convention prévoit également des garanties de confidentialité pour les données personnelles de santé collectées dans le cadre des opérations d'assurance.

Concrètement, la commission de suivi et de proposition, présidée par M. Belorgey, a été installée officiellement le 17 janvier 2002 et s'est réunie, depuis, à plusieurs reprises.

Il est vrai que, au premier anniversaire de la convention, la mise en place du dispositif par les établissements de crédit et par les entreprises d'assurance n'était pas complètement achevée et que la convention n'était pas totalement connue du public ni des conseillers des établissements de crédit. Un effort reste à faire.

Cependant, les données communiquées à la commision de suivi et de proposition tant par les professionnels que par les associations ne confirment pas, madame la sénatrice, le nombre que vous avancez de refus de crédit sur le seul motif de l'existence d'un risque aggravé.

Pour l'avenir, le ministre de la santé partage la conviction des associations qu'il faut conforter le rôle de la commission, en particulier dans le domaine de l'interprétation de la convention et de la formulation de recommandations fondées sur les données qui lui seront ouvertes.

Toutefois, dans ce dispositif essentiellement conventionnel, l'Etat n'a pas vocation à intervenir pour le financement de prêts ou d'assurances : son rôle est de garantir l'intérêt général et celui des patients. A ce titre, M. Jean-François Mattei entend veiller au respect des engagements pris pour faciliter l'accès à l'assurance à l'ensemble des personnes malades. Le plan de mobilisation nationale contre le cancer - vous l'avez évoqué, madame la sénatrice -, comporte ainsi des mesures contenues dans la convention Belorgey.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Je relève néanmoins que, malgré toute votre bonne volonté, elle reste insuffisante.

Je ferai référence, car ce sont surtout les compagnies d'assurance qui se trouvent mises en cause, à une déclaration récente du président des assureurs français selon laquelle « un risque instable n'est pas assurable ». Cela sous-entend, me semble-t-il, que l'assurance doit être rentable.

Certes, madame la ministre, il se peut que le chiffre que j'ai avancé soit excessif. Mais, faute de pouvoir contrôler le nombre des dossiers qui n'ont pas abouti, j'ai cité le chiffre qui m'a été fourni par les associations. Quoi qu'il en soit, les dossiers refusés sont nombreux et les dossiers non présentés ou retirés au moment de remplir le questionnaire sur l'état de santé le sont encore plus.

M. Gérard Delfau. C'est vrai !

Mme Marie-Claude Beaudeau. En effet, les personnes reculent, souvent, devant l'obligation de remplir un dossier médical dans lequel doivent figurer des interventions chirurgicales qui peuvent avoir eu lieu vingt ans ou trente ans plus tôt.

Mme Hélène Luc. Absolument !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Il est impossible de remplir un dossier aussi important sur le coin d'un guichet !

La contrainte est donc nécessaire pour qu'une assurance qui est souhaitée par tous puisse être attribuée et pour éviter toute discrimination. Or, seule une loi peut imposer une telle obligation et reconnaître ce droit.

La convention Belorgey doit devenir une loi et être assortie d'un engagement de l'Etat. Je ne demande pas que celui-ci prenne tout en charge, car, effectivement, son rôle est d'apporter une garantie : cette mission pourrait être assumée par un fonds, qui ne serait pas nécessairement amené à intervenir sur le plan financier.

Pour terminer, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vous rapporterai une anecdote qui me semble extrêmement grave. Une personne est enfin guérie d'une grave maladie. Son médecin veut lui donner espoir et l'exhorte à se battre : « Vous êtes guéri, vous allez vivre. Tout dépend maintenant de vous, de la façon dont vous allez vous comporter. Il faut que vous viviez comme tout le monde. » Mais lorsque cette personne se présente ensuite à sa banque ou chez son assureur, l'employé qui la reçoit lui dit : « Ecoutez ! Vous êtes malade, il n'est pas possible que vous obteniez un prêt quelconque ! »

Madame la ministre, certaines choses ne vont pas, et c'est la raison pour laquelle je pense qu'une loi est nécessaire.

CONSÉQUENCES

DE LA DÉLOCALISATION D'ARCELOR

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, en remplacement de M. Jean-Pierre Masseret, auteur de la question n° 213, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président, Jean-Pierre Masseret, Gisèle Printz et moi-même sommes tous les trois très concernés par l'annonce que vient de faire Arcelor de la fin programmée de sa filière à chaud en Moselle. Cette mesure concerne les hauts-fourneaux d'Hayange, l'aciérie de Serémange, l'agglomération de Rombas et, peu après, la cockerie de Serémange.

L'entreprise privée Arcelor, qui gagne de l'argent sur ces sites et y réalise entre 8 % et 9 % de profits nets, a choisi d'exploiter une main-d'oeuvre jugée moins chère à l'étranger, notamment au Brésil et en Pologne. Au mépris de toute considération morale, elle a donc opté pour la rentabilité boursière, écartant d'un revers de main méprisant toute notion de responsabilité à l'égard aussi bien des salariés que des collectivités territoriales.

Cette décision s'inscrit dans la logique de la fusion d'Usinor, d'Arbed et d'Aceralia conduite par M. Mer alors qu'il tentait de se présenter comme le sauveur de la sidérurgie lorraine. Aujourd'hui ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, il poursuit le travail qu'il a commencé en tant que PDG.

Les dirigeants actuels d'Arcelor vont nous promettre, comme d'habitude, de s'employer à une réindustrialisation du bassin d'emploi. Mais quelle crédibilité les Mosellans peuvent-ils encore accorder à de telles paroles, alors qu'on leur a toujours demandé des sacrifices censés garantir la survie de la sidérurgie lorraine ? Ces paroles, ces promesses ne se traduisent jamais, dans les faits, par les actes qu'attendent les salariés, leurs familles et les élus.

Nous nous interrogeons aussi sur la filière à froid.

En outre, la décision d'Arcelor, qui coïncide avec l'annonce à mots couverts de l'ennoyage des galeries des mines de fer dans le Pays-Haut, plonge les populations du bassin dans la détresse la plus totale.

Il est urgent de mettre l'économie au service des hommes, et non plus les femmes et les hommes au service de l'économie.

Monsieur le ministre, quelles sont les initiatives et les mesures envisagées par le Gouvernement pour sauvegarder l'activité en Moselle en rappelant les dirigeants d'Arcelor à leurs obligations morales et industrielles ?

Quelles mesures compte-t-il mettre en oeuvre pour contraindre l'entreprise, le cas échéant, à dépolluer les terrains avant de les proposer à un prix symbolique aux collectivités ? Cette perspective ultime est à envisager dès maintenant, car il ne s'agit pas qu'Arcelor se soustraie à cette obligation. Pour cela, ne convient-il pas de prévoir des provisions financières importantes auprès de la Caisse des dépôts et consignations, afin que la charge réelle soit supportée, au pire moment, non par les collectivités, mais par les actionnaires d'Arcelor ? A défaut de législation contraignante existante, le Gouvernement devra, avant la fin de l'année 2003, prendre l'initiative de déposer un projet de loi et demander à sa majorité de le voter.

Que ferez-vous, monsieur le ministre, pour garantir aux communes concernées, qui sont organisées en une communauté d'agglomération, l'intégralité des impôts locaux acquittés par Arcelor, et ce pour les vingt années suivant l'arrêt de l'activité ? Ces sommes, qui sont nécessaires pour faire face aux charges multiples occasionnées par le départ d'Arcelor, devraient faire chaque année l'objet d'un prélèvement complémentaire auprès d'Arcelor dont le produit serait mis en réserve dans les caisses du Trésor.

Quelles décisions comptez-vous prendre pour favoriser d'ores et déjà le remplacement du tissu industriel historique et puissant, qui aurait subsisté longtemps si l'« argent roi » ne l'avait pas condamné ?

Pouvez-vous nous garantir que vous prendrez les mesures nécessaires pour maintenir bien au-delà de 2006 les fonds structurels européens indispensables ?

Pour conclure, monsieur le ministre, je rappellerai que, à la suite de la décision d'Arcelor et vu la gravité de la situation, cinq parlementaires mosellans avaient sollicité un rendez-vous avec le Premier ministre. Or, à ce jour, les élus du peuple que nous sommes n'ont même pas reçu un simple accusé de réception. Où se trouve donc cette démocratie de proximité dont le gouvernement auquel vous appartenez ne cesse de se prévaloir ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, vous avez posé une question extrêmement longue ; ma réponse sera beaucoup plus courte. Au fond, vous essayez, vous aussi, de déterminer le programme d'Arcelor pour les dix prochaines années. Mais pourquoi ne devrait-on pas se réjouir qu'une entreprise puisse indiquer, dix ans à l'avance, ses intentions ? Cela permet d'envisager les mesures qui sont nécessaires.

Le groupe Arcelor a annoncé, en janvier dernier, ses orientations stratégiques pour les dix années à venir. Celles-ci le conduiraient à concentrer les investissements concernant l'amont de la filière des produits plats en acier au carbone sur les sites industriels situés en bord de mer. Cette orientation est liée à un avantage de compétitivité sur le coût du transport des sites côtiers par rapport aux sites continentaux.

Au regard des échéances liées à la réfection des hauts fourneaux, l'arrêt de la partie amont de l'usine de Florange serait concerné à l'horizon 2009-2010.

Cette perspective donne tout le temps à ce groupe industriel de mettre en place la concertation nécessaire, aussi bien avec les représentants du personnel qu'avec les collectivités territoriales concernées, pour limiter les effets social et territorial de ces décisions et veiller au strict respect des règles sociales et environnementales qui s'appliquent en la matière. Croyez bien, monsieur le sénateur, que le Gouvernement y veillera le moment venu.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.

M. Jean-Marc Todeschini. Tout d'abord, je remercie M. Loos de m'avoir répondu. Mais, monsieur le président, vous vous êtes peut-être félicité trop vite, ce matin, de la présence des ministres lors des séances de questions orales, en évoquant le passé. M. Aillagon a affirmé qu'un ministre avait le devoir de venir répondre à un parlementaire. Sans vouloir être désagréable avec M. Loos et même si je peux comprendre les impératifs du ministre des finances j'aurais préféré que M. Mer lui-même me réponde. Les Lorrains et les Mosellans jugeront.

Sur le fond, inutile de vous dire, monsieur Loos, que votre réponse ne peut pas convenir aux Mosellans.

Comme je l'ai dit dans mon intervention, des promesses ont été faites. Des réductions de salaires ont été décidées par le passé pour le maintien de cette sidérurgie continentale en Lorraine. Vous n'apportez pas de réponse aux collectivités locales.

Vous vous félicitez de l'annonce par le groupe Arcelor d'une fermeture programmée dans neuf ans. Mais je vous rappelle que cette entreprise réalise en Lorraine des bénéfices de l'ordre de 8 % à 9 %. C'est aujourd'hui qu'il faut prévoir les mécanismes pour sortir de cette mono-industrie.

Les collectivités locales concernées seront frappées de plein fouet. On assistera à des faillites, à des dépôts de bilan.

Si vous ne mettez pas en place dès aujourd'hui les mécanismes qui permettront à ces collectivités locales d'avoir une garantie quant à la réindustrialisation possible de ces sites, dans sept ou huit ans, nous serons plus sinistrés encore qu'à l'heure actuelle.

Vous avez évoqué, monsieur le ministre, les obligations du groupe Arcelor à l'égard de ses salariés. Certes, je sais bien que nous ne sommes pas là en présence de patrons « voyous », mais j'aurais préféré obtenir une réponse plus sérieuse et plus complète sur l'avenir des collectivités territoriales concernées.

CONDITIONS DE SCOLARISATION

DES ENFANTS EN BAS ÂGE

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, auteur de la question n° 235, adressée à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

M. Gérard Delfau. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire et concerne l'inquiétude des associations de parents d'élèves, des enseignants et des élus face aux mesures de réduction drastique des effectifs des personnels d'encadrement de l'éducation nationale.

Les conséquences de ces décisions sont particulièrement graves quand elles s'appliquent au premier degré, qui est la base de l'école publique. Or, que constate-t-on ? De nombreux postes alloués au soutien psychologique des élèves en difficulté ne sont pas remplacés. Des postes d'emplois-jeunes ou d'aides éducateurs ne sont pas renouvelés. Enfin, le Gouvernement s'attaque à ce qui fait légitimement l'orgueil de la France : son école maternelle, facteur irremplaçable de socialisation des enfants et d'égalité des chances.

Au détour de propos alambiqués durant tout l'hiver, puis en fonction des décisions annoncées tout récemment par les inspecteurs d'académie, nous apprenons non seulement que l'extension de la scolarisation des enfants dès l'âge de deux ans serait stoppée, mais encore qu'elle pourrait être interrompue là où elle existe depuis quinze à vingt ans ; c'est le cas dans la commune dont je suis le maire, monsieur le ministre, et, je vous le dis sans périphrase, c'est inacceptable.

Depuis, la colère gronde chez les personnels, les parents et les maires, qui ont accompli un effort budgétaire important pour l'école.

A ce motif s'ajoutent l'inquiétude des personnels quant à leur régime de pension et l'incompréhension devant l'annonce des mesures de transferts à la région de certaines catégories de personnels du deuxième degré, sans que la moindre concertation ait eu lieu.

Une telle politique de désengagement de l'Etat va frapper plus durement encore un département comme l'Hérault, où le produit intérieur brut par habitant est le plus faible du territoire métropolitain et où la croissance démographique galopante, en raison de l'attraction du sud, oblige les communes à multiplier les équipements, notamment les écoles, les crèches et les haltes-garderies.

Les familles aux revenus modestes feront les frais de ce choix du Gouvernement, monsieur le ministre, faute de moyens financiers pour faire garder leurs enfants et en raison d'une pénurie constante d'assistantes maternelles qualifiées. Ne vous étonnez pas s'il y a des réactions !

Au moment où l'on voit, à la rentrée des vacances de Pâques, se multiplier les mouvements de grève à l'éducation nationale, il serait judicieux pour le Gouvernement de dégager les postes nécessaires à l'accueil des trente-cinq mille enfants supplémentaires qui, en raison du mini baby boom de l'an 2000, atteignent l'âge de deux ans à la rentrée 2003.

S'il y a des économies à réaliser - et il y en a - et s'il faut alléger l'impôt sur le revenu - pourquoi pas ? -, faut-il que cela se fasse au détriment de l'école publique, socle de la République ? Vous connaissant bien, monsieur le ministre, je ne crois pas que vous le pensiez.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur Delfau, vous évoquez bien des problèmes au détour d'une question qui porte essentiellement sur la préscolarisation à deux ans et sur les moyens qui sont affectés aux écoles de votre département.

En ce qui concerne tout d'abord la préscolarisation à deux ans, permettez-moi de me répéter, car j'ai déjà répondu au Sénat sur cette question. Il ne faut pas aborder cette question avec des a priori idéologiques et pédagogiques. Il existe d'ailleurs des idéologies différentes puisque, dans nombre de pays d'Europe, la loi interdit la scolarisation des enfants avant l'âge de quatre ans.

Il ne faut pas non plus traiter cette question en se focalisant sur les moyens.

Actuellement, 35 % des enfants de moins de trois ans sont scolarisés, avec des écarts très importants d'un département à l'autre. Les effets d'une telle politique sont-ils perceptibles ? On a souvent affirmé que la préscolarisation favorisait la réussite à l'école élémentaire. Vous savez bien, monsieur Delfau - vous êtes, comme moi, un universitaire -, que l'impact de la préscolarisation à deux ans sur le taux de redoublement des enfants au CP est quasi nul. En fait, c'est le diplôme de la mère et le milieu social qui influent le plus sur les chances de réussite : plus la mère est diplômée, plus les chances d'accès au CE 2 sans redoublement sont élevées.

La préscolarisation à deux ans réduit-elle les inégalités sociales ? En réalité, ce sont les enfants de cadres, d'une part, et les élèves étrangers ou issus de l'immigration, d'autre part, qui bénéficient le plus des effets positifs d'une entrée précoce en maternelle. En revanche, l'effet est nul pour les enfants d'employés ou d'ouvriers. Je ne polémique pas : je rappelle simplement les faits !

Devons-nous pour autant poursuivre la préscolarisation à deux ans ? Oui, sans ambiguïté ! Il n'est pas question de supprimer ce dispositif. Il faut simplement l'instaurer là où c'est nécessaire, c'est-à-dire dans les zones et dans les réseaux d'éducation prioritaire, là où les conditions d'accueil ou de socialisation peuvent être meilleures à l'école que dans le milieu familial.

Il s'agit non pas de remettre en cause radicalement la préscolarisation, mais d'ouvrir un débat sur l'accueil de la petite enfance. En principe, l'école maternelle est un lieu d'apprentissage scolaire et elle ne peut se contenter de suppléer l'absence de structures de garde, qui dépendent d'autres responsabilités.

S'agissant de la carte scolaire, celle-ci est élaborée en concertation avec les élus, les représentants des enseignants et les parents d'élèves. Les rééquilibrages à l'échelon national s'effectuent en fonction de la démographie et de données sociales et territoriales, qui sont les mêmes pour tous. Tous les ans, dans chaque département, des classes sont créées ou supprimées, selon l'évolution démographique.

S'agissant du département de l'Hérault, vous auriez tort de vous plaindre, monsieur Delfau, car, à la rentrée 2003, quatre-vingts postes d'enseignant du premier degré seront créés. J'étais moi-même sénateur d'un département où l'on supprime des postes. C'est plus difficile à expliquer que la création de quatre-vingts postes ! Vous constatez donc que le souci du ministère est de voir votre département traité convenablement compte tenu du fait que le nombre d'élèves supplémentaires évalué pour cette rentrée devrait être d'un peu plus de mille.

Bien sûr, des réajustements devront être opérés au sein même du département de l'Hérault pour tenir compte des disparités et des micro-mouvements de population. Mais la politique conduite par le Gouvernement reste tout à fait favorable à l'Hérault puisque, je le répète, des postes seront créés pour accueillir les nouveaux élèves.

La politique mise en oeuvre est cohérente par rapport aux appréciations que la Cour des comptes a portées récemment sur la gestion du système éducatif. La haute juridiction financière a mis en évidence l'augmentation continue des moyens de l'éducation nationale depuis 1990, dans un contexte de forte décrue des effectifs d'élèves et, hélas ! d'une stagnation relative des résultats.

La situation n'est pas idéale, mais il faut tout de même faire ces constats.

L'analyse de la haute juridiction financière conforte donc notre politique, qui renforce la programmation et le pilotage du système éducatif en introduisant une démarche de contrôle de gestion et un pilotage par les objectifs et non par les moyens.

Monsieur le sénateur, je peux vous assurer que la rentrée scolaire dans le département de l'Hérault s'effectuera dans de bonnes conditions grâce au dispositif prévu par les services académiques.

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire que la Cour des comptes ne gère pas nos communes. Si tel était le cas, elle saurait où se trouvent les difficultés et quels sont les domaines où un effort doit être accompli en priorité.

La politique mise en oeuvre est cohérente, dites-vous. Mais nous avons deux approches différentes de la question. La socialisation des jeunes enfants dès l'âge de deux ans, pour toutes les familles qui le désirent, constitue une avancée dans notre pays et il faut poursuivre dans cette voie.

Vous avez dit que le dispositif serait maintenu. Ma commune subit de plein fouet une démographie croissante. En effet, les personnes qui souhaitent vivre à Montpellier ne peuvent se loger qu'à trente kilomètres alentour, c'est-à-dire dans ma commune, par exemple, où les loyers restent cependant trop élevés. Depuis quinze ans, les enfants y sont scolarisés dès l'âge de deux ans. Or, cette année, l'inspecteur d'académie a brusquement décidé que nous n'accueillerions pas les enfants âgés de deux ans. Qu'allons-nous faire ?

Par ailleurs, nous avons prévu la création d'une crèche. Cela signifie donc que l'Etat se désengage dans cette commune pourtant pauvre, où le taux de chômage est très important, où les RMIstes sont nombreux et où les revenus salariaux sont faibles. En outre, la crèche ne sera pas ouverte cette année. Que vont devenir ces enfants ?

J'ai évoqué la question des assistantes maternelles qualifiées, qui ne sont pas assez nombreuses. Vous ne m'avez pas répondu, monsieur le ministre.

En tant que parlementaire, je n'accepte pas cette régression, ce retour à un conservatisme que je croyais révolu dans notre pays.

SITUATION FINANCIÈRE DE L'UNIVERSITÉ PARIS-XII

M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, auteur de la question n° 207, adressée à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

Mme Hélène Luc. Monsieur le ministre, depuis l'automne dernier, l'inquiétude et le mécontentement de la communauté universitaire n'ont fait que s'amplifier, vous le savez. En effet, l'annonce et le vote d'un budget de l'enseignement supérieur en nette diminution par rapport à 2002, amputé, de surcroît, de 2 millions d'euros sur l'initiative de nos collègues de la majorité sénatoriale, ainsi que le gel de 234,41 millions d'euros qui vient d'intervenir, n'ont fait qu'accentuer la détérioration flagrante des conditions de fonctionnement des universités françaises.

Cette dégradation est telle, monsieur le ministre, qu'elle s'est traduite par la fermeture pendant une semaine de deux universités, celles de Toulouse-le-Mirail et de Paris XI, au mois de février dernier, afin de réaliser des économies.

Cette situation est inacceptable pour un pays développé au xxe siècle. La France se trouve parmi les derniers pays d'Europe pour le montant des crédits alloués à l'éducation nationale par rapport à son PIB.

La manifestation inédite en faveur des crédits de la recherche, à la tête de laquelle se trouvait Axel Kahn, a témoigné de l'inquiétude des chercheurs pour l'avenir. Tous les domaines sont concernés, le développement économique comme la santé.

Pour illustrer mon propos, monsieur le ministre, je citerai l'exemple de l'université Paris XII Créteil, que je connais bien pour siéger au conseil d'administration. Le 11 mars dernier, devant l'urgence de la situation, le conseil d'administration a organisé une journée d'information sur la détérioration croissante des conditions d'accueil et d'enseignement des étudiants. Quatre cents étudiants et enseignants y ont assisté, ainsi que de nombreux élus du Val-de-Marne. Cet établissement, qui accueille aujourd'hui 27 000 étudiants - cet effectif n'a cessé d'augmenter ces dernières années, puisqu'à sa création, monsieur le ministre, l'université comptait 10 000 étudiants -, voit ses dotations en emplois diminuer pour 2003. En effet, alors que les calculs de dotation théorique en emplois d'enseignants et d'enseignants-chercheurs font apparaître un déficit de près de 300 emplois, les attributions pour 2003 ont été de quatre emplois, hors IUT et bibliothèques. C'est dérisoire !

Je sais, monsieur le ministre, que nous ne calculons pas le nombre d'étudiants de la même manière, car vous ne prenez pas en compte la formation continue, qui est pourtant appelée à se développer tout au long de la vie.

Par ailleurs, la dotation des emplois en personnels IATOS - ingénieurs, administratifs, techniciens, ouvriers - est de sept emplois en 2003 contre onze en 2001. Or les calculs de dotation théorique reconnaissent un déficit de 140 emplois, hors IUT et bibliothèques.

De ce fait, on observe un accroissement des coûts salariaux pour les établissements dus notamment à l'augmentation des heures supplémentaires. Cela se traduit par une réduction des investissements.

Un grand journal du soir titrait, le jeudi 24 avril dernier : « L'académie de Créteil concentre les maux de l'école en banlieue. » Un rapport d'évaluation a été réalisé sur cette académie. Il fait suite aux importants mouvements de grève des enseignants de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne en 2000 et en 2001, et à la demande que j'avais adressée au conseil départemental de l'éducation nationale, au nom du conseil général du Val-de-Marne, de création d'un observatoire. Celui-ci s'est réuni deux fois et fut l'occasion de discussions très intéressantes.

L'université Paris-XII a la responsabilité d'accueillir en particulier les bacheliers du Val-de-Marne, de la Seine-et-Marne et d'une partie de la Seine-Saint-Denis, dont les résultats sont inférieurs de dix points à la moyenne nationale.

Cette université, construite en 1970, sera enfin terminée grâce à notre lutte acharnée avec les présidents d'université successifs et le conseil général. Elle abrite des pôles d'excellence de renommée nationale, comme, notamment, le CHU Henri-Mondor, le cursus AES, l'Institut d'urbanisme de Paris, les IUT de Créteil-Vitry et de Sénart-Fontainebleau, la faculté de droit.

Ne croyez-vous pas, monsieur le ministre, que cette université, comme celles de Paris-VIII et de Paris-XIII, devrait bénéficier de crédits supplémentaires pour assurer la réussite des étudiants qui sont en moyenne 47 % à échouer au DEUG ?

Je sais que d'autres facteurs interviennent dans les résultats scolaires, et en premier lieu l'environnement social. C'est la raison pour laquelle il ne faut pas supprimer de crédits.

Monsieur le ministre, un tel constat de pénurie appelle un plan d'urgence pour cette université, comme pour d'autres, d'ailleurs. Je vous demande que soit attribuée à l'université Paris XII une dotation supplémentaire importante afin de créer des conditions d'accueil et d'encadrement à la hauteur des besoins.

Monsieur le ministre, les représentants de l'université Paris-XII présents dans les tribunes et moi-même attendons avec impatience votre réponse. Je sais bien que vous ne pourrez pas nous donner aujourd'hui une réponse suffisamment approfondie, aussi souhaiterais-je qu'une rencontre ait lieu au ministère de l'éducation pour envisager quelles peuvent être les solutions.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Madame Luc, une fois de plus, vous posez une longue question, qui s'adresse d'ailleurs à Luc Ferry, dont je vous prie d'excuser l'absence. Je vous réponds donc à sa place.

Le ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche a pleinement conscience des besoins, en termes de moyens, de l'université Paris-XII - Val-de-Marne. Luc Ferry a dû vous le faire savoir. De fait, les chiffres ne sont pas défavorables, même s'ils ne disent pas tout.

Au cours de la période 1997-2001, les effectifs des étudiants ont augmenté de 9,5 %. Dans le même temps, le potentiel des enseignants a augmenté de 27,3 % - 184 emplois créés - et celui des personnels IATOS de 17,6 % - 55 emplois créés -, tandis que la dotation globale de fonctionnement progressait de 58 %, passant de 4 045 000 euros à 6 410 907 euros.

En outre, le contrat quadriennal de développement 2001-2004 conclu entre l'Etat et l'université prévoit un financement sur les quatre années de 22,6 millions d'euros, dont 8,8 millions d'euros au titre du fonctionnement, qui s'ajoute à la dotation globale.

Certes, je ne suis pas, je le répète, un spécialiste des chiffres universitaires - c'est Luc Ferry qui suit ces questions -, mais ils ne sont pas, me semble-t-il, défavorables. C'est dire que l'Etat a souhaité accompagner le développement de l'université et répondre à ses besoins, au-delà de la seule évolution de ses effectifs, pour rattraper le décalage, en termes de moyens, par rapport à l'ensemble des universités.

Malgré cet effort, et comme vous le souligniez, madame Luc, l'Etat et l'université n'y sont que partiellement parvenus. Deux facteurs peuvent l'expliquer : une augmentation des surfaces immobilières de 31 % entre 1997 et 2001 et, surtout, l'évolution de la structure de l'offre de formation, avec le doublement du nombre de diplômes professionnels proposés par l'université.

La professionnalisation des formations, évidemment souhaitable, requiert néanmoins des taux d'encadrement sensiblement plus élevés que pour les formations générales : elle est donc très consommatrice de postes et de crédits, alors même que les effectifs étudiants n'augmentent pas au même rythme.

Le prochain contrat de l'université devra permettre, dans le cadre du dispositif Licence-Master-Doctorat, de rendre plus cohérentes entre elles l'offre de formation et la politique des moyens de l'université.

C'est ainsi que l'Etat continuera d'apporter son meilleur soutien à l'université Paris XII - Val-de-Marne, à la situation de laquelle nous demeurons, bien évidemment, très attentifs. Je ne doute pas que M. Monteil, directeur de l'enseignement supérieur, sera prêt à recevoir les représentants des personnels de l'université, puisque vous en avez manifesté le souhait.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.

Mme Hélène Luc. Monsieur le ministre, je connais bien les chiffres que vous avez cités, mais je crois qu'il faut vraiment prendre en compte les deux arguments suivants.

En premier lieu, l'université a été créée en 1970 pour 10 000 étudiants ; or ils sont maintenant 27 000. En second lieu, le plan d'évaluation qui a été établi par les inspecteurs généraux ne peut pas vous laisser indifférent et appelle des mesures.

La réponse que vous venez de me faire n'est pas du tout à la hauteur des besoins. Je suis déçue, je dois vous le dire, mais j'espère que vous accepterez la rencontre que je vous ai proposée.

Votre réponse ne permet pas de réaliser la politique universitaire que les enseignants et les étudiants appellent de leurs voeux, c'est-à-dire une politique ambitieuse de formation supérieure de la jeunesse qui crée de véritables conditions de réussite, chaque étudiant devant être capable - vous le dites vous-même - de s'adapter à plusieurs métiers au cours de sa vie.

Par ailleurs, à la suite du vote récent par la majorité sénatoriale de la loi constitutionnelle relative à l'organisation décentralisée de la République qui prévoit un droit à l'expérimentation régionale en matière de gestion des universités, la crainte est grande de voir se développer une France universitaire inégalitaire : à région pauvre, université pauvre !

Il faut souligner la levée « en masse » - vous le constaterez le 6 mai prochain - des enseignants, des aides-éducateurs et des surveillants contre la suppression de ces emplois, mais aussi celle des 130 000 personnels de l'éducation nationale, des assistantes sociales, des infirmières, des conseillers d'orientation, des personnels du Centre national de documentation pédagogique, le CNDP, qui ne veulent pas être décentralisés pour ne pas briser les équipes éducatives qui sont déjà difficiles à constituer. Sans oublier la retraite à soixante-six ou soixante-sept ans promise aux professeurs des écoles ainsi qu'aux instituteurs ! (M. le ministre délégué fait un signe de dénégation.)

Notre inquiétude est donc grande, monsieur le ministre, pour l'avenir du recrutement des enseignants. Or l'on sait que, d'ici à 2010, la moitié des professeurs et le quart des maîtres de conférence, soit 16 000 enseignants-chercheurs, partiront à la retraite : les universités de banlieue risquent d'en pâtir.

C'est dire l'importance et les moyens qu'il faut donner aux IUFM. Celui de Créteil, par exemple, ne dispose même pas de locaux pour la formation des enseignants du second degré !

La volonté des enseignants, des aides-éducateurs, de tous les personnels de l'éducation nationale d'exiger les moyens d'une véritable politique de formation primaire, secondaire et supérieure s'exprimera, vous le savez, le 6 mai prochain dans toute la France, et nous serons avec eux dans la rue. Le président du conseil général du Val-de-Marne, M. Favier, qui a placé les collèges en toute première priorité dans la gestion des affaires du département, veut que l'effort tout à fait exceptionnel qui est fait par le département se poursuive au lycée et à l'université.

Voilà ce que je tenais à vous dire, monsieur le ministre.

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Daniel Hoeffel.)

PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

9

CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :

Mercredi 30 avril 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et, éventuellement, le soir :

Suite du projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière (n° 223, 2002-2003).

Mardi 6 mai 2003 :

A 9 h 30 :

1° Dix-huit questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :

- n° 135 de M. Claude Biwer à M. la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation (Situation des artisans du bâtiment) ;

- n° 137 de Mme Brigitte Luypaert à Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées (Prise en charge des personnes handicapées âgées) ;

- n° 157 de M. Thierry Foucaud à M. le ministre délégué au commerce extérieur (Négociations de l'accord général sur le commerce et les services) ;

- n° 203 de M. Jacques Oudin à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire (Levée du secret professionnel liant les commissaires aux comptes) ;

- n° 210 de M. Fernand Demilly à M. le garde des sceaux, ministre de la justice (Fichier national des empreintes génétiques) ;

- n° 214 de M. Jean-Pierre Masseret à Mme la ministre déléguée à l'industrie (Fermeture des Houillères du bassin lorrain) ;

- n° 221 de M. Ivan Renar à Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies (Situation inquiétante de la recherche en France) ;

- n° 222 de M. Jean-Pierre Godefroy à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Situation des conseillers territoriaux des activités physiques et sportives) ;

- n° 224 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Reconnaissance de la profession d'aide-soignant) ;

- n° 225 de M. Bernard Fournier à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Désenclavement du département de la Loire) ;

- n° 226 de M. Jean-François Le Grand à Mme la ministre déléguée à l'industrie (Conditions de réalisation d'un réseau à haut débit de fibres optiques) ;

- n° 229 de M. Jean-Yves Autexier à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Risques de déstabilisation des entreprises françaises des secteurs stratégiques) ;

- n° 231 de M. Bernard Piras à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Droits de reprographie des oeuvres reproduites dans les écoles du premier degré) ;

- n° 232 de M. Gilbert Barbier à M. le ministre de la culture et de la communication (Réglementation applicable aux entrepreneurs de spectacles) ;

- n° 236 de M. Ernest Cartigny à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer (Conditions d'immatriculation des aéronefs) ;

- n° 237 de M. Jean-Paul Emorine à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales (Mise en place des réseaux de surveillance des risques zoosanitaires) ;

- n° 238 de M. Georges Mouly à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Besoins de places dans le service d'éducation spéciale et de soins à domicile de la Corrèze) ;

- n° 243 de M. Adrien Gouteyron à M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées (Situation des établissements d'hébergement pour les personnes âgées dépendantes) ;

A 16 heures et le soir :

2° Nomination d'un membre de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, en remplacement de M. Jean-Paul Alduy ;

Ordre du jour prioritaire

3° Sous réserve de sa transmission, projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de simplification et de codification du droit (AN, n° 710) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 5 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 5 mai 2003.)

Mercredi 7 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et, éventuellement, le soir :

1° Eventuellement, suite du projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de simplification et de codification du droit ;

2° Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction (n° 245, 2002-2003).

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 6 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 6 mai 2003.)

Mardi 13 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 9 h 30, à 16 heures et le soir :

1° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif au mécénat, aux associations et aux fondations (n° 234, 2002-2003) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 12 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 12 mai 2003.)

2° Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages (n° 204, 2002-2003) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 12 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cet texte ;

- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 12 mai 2003.)

Mercredi 14 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :

- sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi organisant la consultation des électeurs de Corse sur la modification du statut particulier de la collectivité territoriale de Corse ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 13 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 13 mai 2003.)

Jeudi 15 mai 2003 :

A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi organisant la consultation des électeurs de Corse sur la modification du statut particulier de la collectivité territoriale de Corse ;

A 15 heures et le soir :

2° Questions d'actualité au Gouvernement ;

(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;

3° Communication de M. Bernard Stasi, Médiateur de la République, sur son rapport annuel, en application de la loi n° 2003-23 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Ordre du jour prioritaire

4° Suite de l'ordre du jour du matin.

Mardi 20 mai 2003 :

Ordre du jour réservé

A 9 h 30 :

1° Question orale avec débat n° 16 de M. Gérard César à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur la réforme de la politique agricole commune :

(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 19 mai 2003) ;

A 16 heures et, éventuellement, le soir :

2° Question orale avec débat n° 15 de M. Gérard Larcher à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur l'avenir des services publics ;

(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 19 mai 2003) ;

3° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de MM. Jean-Claude Carle et Jean-Pierre Schosteck relative à l'application des peines concernant les mineurs (n° 228, 2202-2003) ;

(La conférence des présidents a décidé de fixer au lundi 19 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)

Mercredi 21 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :

1° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux privilèges et immunités de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge en France (n° 203, 2002-2003) ;

(La conférence des présidents a décidé de fixer au mardi 20 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte) ;

2° Sous réserve de sa transmission, proposition de loi relative à la représentation au sein du conseil d'administration et des instances représentatives des fonctionnaires, des agents sous contrat et des ouvriers de l'Etat mis à la disposition de l'entreprise nationale DCN en application de l'article 78 de la loi de finances rectificative pour 2001 (AN, n° 735) ;

(La conférence des présidents a décidé de fixer au mardi 20 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte) ;

3° Projet de loi de programme pour l'outre-mer (n° 214, 2002-2003) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 20 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 20 mai 2003.)

Jeudi 22 mai 2003

Ordre du jour prioritaire

A 9 h 30 :

1° Suite du projet de loi de programme pour l'outre-mer ;

A 15 heures et le soir :

2° Questions d'actualité au Gouvernement ;

(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;

Ordre du jour prioritaire

3° Suite de l'ordre du jour du matin.

Lundi 26 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 16 heures et le soir :

Sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 26 mai 2003, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 23 mai 2003.)

Mardi 27 mai 2003 :

A 9 h 30 :

1° Questions orales.

A 16 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Suite du projet de loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.

Mercredi 28 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et, éventuellement, le soir :

Suite du projet de loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.

Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...

Ces propositions sont adoptées.

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LUTTE CONTRE LA VIOLENCE ROUTIÈRE

Discussion d'un projet de loi

 
Dossier législatif : projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière
Division et art. additionnels avant le chapitre Ier

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 223, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, renforçant la lutte contre la violence routière. [Rapport n° 251 (2002-2003).]

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, accepter comme une fatalité 8 000 tués et plus de 120 000 blessés chaque année sur les routes était devenu intolérable.

C'est la raison pour laquelle le Président de la République a décidé, le 14 juillet 2002, de faire de la lutte contre l'insécurité routière l'un des trois chantiers de son quinquennat.

Les chiffres sont en effet effrayants : malgré la décrue régulière du nombre des victimes depuis le pic, atteint en 1972, de 16 545 morts, au cours des quarante dernières années ce sont près de 500 000 vies qui, dans notre pays, ont été perdues, brisées, volées par la route.

Ce sont aussi plus de 11 millions de blessés qui souffrent dans leur chair des conséquences de drames que l'on ne peut pas imputer - comme on l'a fait trop longtemps - à la fatalité.

Cette situation est d'autant plus inacceptable que dans 60 % des cas les victimes sont totalement innocentes : elles ont été victimes du comportement et de l'inconscience d'autrui.

Si la circulation est un domaine qui a toujours été très réglementé, elle est en effet aussi, par voie de conséquence, un domaine où les occasions de violer la norme - et de le faire assez aisément - sont nombreuses. A force d'arrangements personnels, de nombreux conducteurs tendent à considérer les règles du code de la route comme des règles optionnelles.

La lutte contre les comportements infractionnistes ne doit pas pour autant nous conduire à éluder les autres causes d'accidents.

Les insuffisances ou certains défauts présentés par nos infrastructures sont bien réels, et il nous faut traiter les zones les plus accidentogènes afin de limiter la gravité des accidents quand ils ne peuvent être évités.

Des retards ont également été pris dans l'amélioration de la sécurité active et passive des véhicules. Trop longtemps, l'amélioration de la performance a été privilégiée à la sécurité.

Nous ne devons cependant pas pour autant perdre de vue l'essentiel, à savoir que rien ne changera vraiment sans une transformation radicale du comportement du conducteur.

Tel est bien l'objectif du projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière qu'avec Dominique Perben nous vous présentons aujourd'hui.

Ce projet de loi, qui s'inscrit dans le cadre du programme d'action pluriannuel arrêté le 18 décembre dernier, lors du comité interministériel de la sécurité routière, dont l'objet était de rappeler la nécessité de mieux faire respecter les règles existantes, a un double objectif.

Il s'agit, d'une part, de renforcer l'efficacité de la justice pénale dans le traitement du contentieux routier afin que cesse le sentiment d'impunité qui, trop souvent, habite le conducteur. Ce dispositif est prévu par les chapitres Ier et II du projet de loi.

Il s'agit, d'autre part, de renforcer la prévention des accidents par des mesures visant à la fois la sécurité des transports routiers, celle des infrastructures et celle des véhicules, mais aussi de favoriser une responsabilisation accrue des conducteurs, tous particulièrement des nouveaux conducteurs et des récidivistes. Ces dispositions relèvent des chapitres III et IV du projet de loi.

Dans son premier volet, le texte prévoit l'aggravation des peines pour les délits les plus graves, le renforcement de l'effectivité des sanctions et l'accélération des procédures. M. le garde des sceaux précisera l'ensemble des mesures tendant à atteindre ces objectifs.

Contrairement aux commentaires que l'on a pu lire et entendre ici ou là, ce projet de loi ne comporte pas seulement des mesures qui accentuent la répression. Il permet également un renforcement des moyens de prévention des accidents grâce à une série de dispositions que je vais maintenant présenter dans leurs grandes lignes.

La mesure la plus significative concerne l'instauration du permis probatoire.

Lors de notre audition le 9 avril devant la commission des lois, vous aviez insisté, mesdames, messieurs les sénateurs, sur la nécessité d'une meilleure formation et d'une sensibilisation accrue du conducteur. L'article 8 du projet de loi répond à cette attente en permettant un meilleur apprentissage de la conduite et en instaurant un système qui vise à développer la responsabilisation. Le nombre total de douze points ne sera obtenu par le conducteur novice qu'à l'issue d'une période probatoire de trois années sans infractions, période ramenée à deux années en cas d'apprentissage anticipé dans le cadre de ce que l'on appelle souvent la conduite accompagnée.

Le dispositif sera particulièrement rigoureux. A titre d'exemple, un nouveau conducteur qui commettrait au cours de ces trois premières années de conduite un délit ou une contravention pour conduite sous l'empire d'un état alcoolique - cela entraînera prochainement un retrait non plus de trois, mais de six points - verrait son permis invalidé.

Ces dispositions sont justifiées puisque le pourcentage de tués au cours des premières années de conduite est, hélas ! trois fois supérieur au taux moyen. Les jeunes âgés de quinze à vingt-quatre ans représentent 13 % de la population mais 27 % des victimes tuées sur la route, et ce sont ainsi des tranches importantes de vie qui, chaque année, sont gâchées ou perdues à jamais.

Nous, élus, qui, tous, un jour ou l'autre, avons dû aller annoncer à des parents le décès accidentel de leur fils ou de leur fille, connaissons peut-être mieux que quiconque les conséquences tragiques de l'insécurité routière.

Ce choix de la prévention, nous l'avons également inscrit dans d'autres dispositions du projet de loi.

Il en est ainsi de la lutte contre l'achat de kits pour le débridage des cyclomoteurs ou l'équipement de détecteurs de radars visés à l'article 12. Ces pratiques ne peuvent plus être tolérées et doivent être sanctionnées avec la plus extrême sévérité.

Aussi est-il prévu dans le projet de loi d'aggraver les sanctions contre ceux qui commercialisent de tels appareils et d'habiliter les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à constater ces infractions, qui deviennent des délits.

Comme je le disais dans mon propos introductif, le Gouvernement veut également s'attaquer aux causes d'accidents pouvant provenir de l'infrastructure ou des véhicules.

Telle est la raison pour laquelle il convient de faciliter les possibilités de déplacement des obstacles fixes situés en bordure de route, comme les poteaux ou les murets, qui interviennent dans 1 250 accidents mortels par an. Pour ce faire, il faut permettre aux gestionnaires de voirie d'imposer la prise en charge financière des travaux qui s'imposent par les concessionnaires. C'est l'objet de l'article 13.

Bien qu'elle ne soit pas du domaine de la loi, cette culture de la prévention du risque routier doit aussi être développée chez les aménageurs et les gestionnaires d'infrastructures par une prise en charge de la sécurité routière au « quotidien » : de l'urbanisme à la gestion des déplacements, de la conception à l'entretien et à l'exploitation routière, de la planification territoriale à la réalisation d'aménagements.

Le projet de loi vise également à redéfinir le rôle des experts automobiles, lesquels seront dotés de nouveaux pouvoirs lorsqu'ils constateront le caractère dangereux d'un véhicule gravement endommagé.

Nous avons voulu renforcer également la protection des délégués et des inspecteurs à la formation du permis de conduire et de la sécurité routière, qui travaillent dans des conditions souvent difficiles pour assurer leur mission de service public. C'est ainsi que, aux termes de l'article 15, le candidat à l'examen du permis de conduire ayant eu un comportement violent envers un inspecteur pourra se voir interdire de se représenter à l'épreuve avant un délai de trois ans.

Une bonne politique de sécurité routière nécessite aussi un diagnostic précis des causes des accidents. L'importance que revêt aujourd'hui une bonne connaissance de l'accidentologie pour pouvoir combattre celle-ci plus efficacement nous a conduits à prévoir à l'article 16 la fourniture par les collectivités territoriales gestionnaires de voirie de tout renseignement utile aux services de l'Etat pour établir les données statistiques nécessaires à l'observatoire national interministériel de la sécurité routière et à la connaissance des phénomènes locaux.

Les mesures proposées concernent également les professionnels de la route : les dispositifs de prévention existants sont renforcés par les articles 17 et 18.

Nous vous proposons ainsi de compléter le code de la route afin de permettre l'immobilisation immédiate des véhicules routiers en infraction aux prescriptions de la réglementation du transport des marchandises dangereuses. Il est en effet nécessaire de pouvoir exiger d'un transporteur qu'il interrompe un transport de marchandises dangereuses effectué dans des conditions contraires à la sécurité et procède aux remises en conformité requises avant de poursuivre son trajet.

Il s'agit ensuite de confirmer dans la loi d'orientation des transports intérieurs, la LOTI, que la profession de déménageur et de commissionnaire de transport est bien soumise aux mêmes règles que les autres entreprises de transport.

Il s'agit aussi de prendre en compte la mise en place prochaine du chronotachygraphe électronique, prévue pour le mois d'août 2004 par la réglementation européenne. L'appareil actuel, de technique horlogère, va être progressivement remplacé par un appareil entièrement numérique auquel sera associée une carte propre à chaque conducteur et sur laquelle seront enregistrées les données qui le concernent. Les infractions et sanctions actuellement prévues doivent donc être adaptées pour tenir compte de cette évolution technologique.

Il faut enfin simplifier l'organisation des commissions des sanctions administratives en plaçant celles-ci auprès des préfets de région. Ces commissions sont chargées de veiller au respect par les entreprises de transport de la réglementation, notamment au respect des règles de la sécurité routière.

Mesdames, messieurs les sénateurs, en faisant de la lutte contre l'insécurité routière une grande cause nationale, le Président de la République a fait le choix de la vie contre la mort, le choix d'un comportement pacifié sur la route, le choix d'une société qui refuse la violence et la transgression.

La rupture, que le Gouvernement appelle de ses voeux, nécessite la mobilisation de tous, sans état d'âme, loin de tout esprit partisan.

Nous voulons simplement nous donner les moyens d'améliorer durablement, grâce à ce projet de loi, les premiers résultats constatés.

Mille vies ont été sauvées au cours des derniers mois. C'est un premier résultat encourageant, mais il est encore très insuffisant. S'en tenir à la tendance actuelle reviendrait à accepter longtemps encore 6 000 morts chaque année, ce que nous refusons !

Je voudrais à ce moment dire combien nous devons remercier toutes les associations d'avoir sans relâche rappelé aux pouvoirs publics, aux élus et aux médias qu'il n'était pas possible de tolérer plus longtemps de tels comportements et qu'il était désormais temps de mettre un terme à la barbarie routière et à cette fâcheuse tendance qui consistait à toujours essayer de comprendre les coupables sans jamais parler des victimes. Nous ne pouvons aujourd'hui oublier le chemin parcouru non plus que le courage et le dévouement déployés par tous les bénévoles.

La qualité des travaux de votre commission des lois et l'implication forte, depuis de nombreuses années, de votre rapporteur, M. Lucien Lanier, en faveur de cette grande cause vont nous permettre de nous doter d'un outil efficace pour agir à travers cette loi, qui sera complétée par de nombreuses dispositions d'ordre réglementaire.

Il est des circonstances où l'individualisme doit s'effacer devant la règle civique : sauver chaque année des milliers de vies, épargner des centaines de milliers de souffrances justifie quelques efforts en termes de discipline et de respect de l'autre.

La Haute Assemblée, par ses initiatives et ses propositions, saura apporter, je n'en doute pas, une contribution essentielle à la lutte contre le fléau national de l'insécurité routière. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, face à ce scandale national que représentent l'insécurité routière et ses dizaines de milliers de victimes, mortes ou blessées, les pouvoirs publics se devaient de réagir avec le plus grand volontarisme. Ils l'ont fait à l'invitation du Président de la République, qui a demandé au Gouvernement de traduire dans le concret son souhait d'une action concertée, énergique et opiniâtre.

A la suite de M. Gilles de Robien, je voudrais saluer les efforts de toutes les associations qui ont contribué, depuis de nombreuses années, à faire en sorte que la violence routière soit aujourd'hui, aux yeux des Français, aussi inacceptable que toutes les autres formes de violence.

Cette prise de conscience est salutaire. Elle est reflétée par le titre même du projet de loi, l'insécurité routière n'étant que la conséquence de la violence, volontaire ou involontaire, des comportements individuels.

Le comité interministériel de sécurité routière du 18 décembre dernier a ouvert la voie à ce changement de perspective en arrêtant un ensemble sans précédent de mesures, inscrites dans ce projet de loi ainsi que dans des textes réglementaires qui ont déjà été pris ou qui sont à venir, comme l'indiquait à l'instant M. de Robien.

Deux mots clefs me paraissent pouvoir résumer notre action, particulièrement celle de la justice : responsabilité et efficacité.

L'institution judiciaire joue évidemment un rôle de premier plan ; en témoigne la coordination de la politique interministérielle de sécurité routière, assurée depuis quelques semaines par un magistrat.

L'un des aspects fondamentaux de ce projet de loi est donc le renforcement de l'efficacité de la justice pénale dans le traitement du contentieux routier, notamment par l'institution d'une responsabilisation pénale accrue des conducteurs.

Je me félicite de constater que ces orientations trouvent d'ores et déjà un écho favorable à la fois dans l'opinion publique et auprès des membres de la Haute Assemblée, dont la commission des lois, sur la proposition de son rapporteur, M. Lucien Lanier, préconise l'adoption des dispositions du projet de loi, après les avoir améliorées et complétées sur un certain nombre de points, poursuivant et parachevant ainsi le travail déjà effectué par l'Assemblée nationale.

Je tiens à remercier tout spécialement M. Lanier pour la qualité de son travail, qui s'inscrit dans la droite ligne de celui qu'il avait accompli au début de l'année lors de l'élaboration de la loi relative à l'usage de stupéfiants au volant.

Permettez-moi maintenant, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous présenter en quelques mots les principales dispositions de ce projet de loi qui relèvent au premier chef de la compétence du ministère de la justice.

Le projet de loi vise tout d'abord à procéder à une aggravation sensible des dispositions de droit pénal applicables en cas d'accidents mortels ou corporels de la circulation.

Ces dispositions prévoient une première aggravation des peines encourues lorsque l'accident mortel ou corporel est causé par l'imprudence d'un conducteur. La dangerosité intrinsèque d'un véhicule justifie en effet un surcroît d'attention et de prudence de la part de la personne qui l'utilise. Elle rend ainsi plus blâmable la commission d'une faute d'imprudence au volant, une telle faute, qui constitue d'ailleurs une contravention au code de la route, demeurant en tout état de cause nécessaire pour caractériser une infraction.

Les peines prévues pour les homicides et les blessures involontaires résultant de l'imprudence d'un conducteur sont ainsi respectivement portées par le projet de loi de trois ans à cinq ans d'emprisonnement et de deux ans à trois ans d'emprisonnement.

Une deuxième augmentation des peines est prévue lorsque les faits sont commis avec l'une des six circonstances aggravantes suivantes : conduite sous l'empire d'un état alcoolique, conduite après avoir fait usage de stupéfiants, mise en danger délibérée d'autrui, délit de fuite, conduite sans permis de conduire ou délit de grand excès de vitesse.

Les peines sont de nouveau aggravées si sont réunies deux ou plus de ces circonstances, et s'élèvent alors à dix ans d'emprisonnement en cas d'homicide involontaire et à sept ans d'emprisonnement en cas de blessures involontaires.

Je précise que la peine de dix ans d'emprisonnement n'est pas une nouveauté : elle est déjà prévue par notre législation en cas d'homicide involontaire avec, d'une part, alcoolémie, usage de stupéfiants ou délit de fuite, et, d'autre part, mise en danger délibérée de la vie d'autrui.

Bien évidemment, il ne s'agit là que de peines maximales, les juridictions répressives devant apprécier pour chaque affaire, en fonction des circonstances de l'espèce et au regard de la personnalité des prévenus, les sanctions qui devront être effectivement prononcées.

Ces peines maximales sont destinées à faire prendre conscience aux conducteurs de la gravité des actes de violence routière. Je me réjouis, en conséquence, qu'elles aient été adoptées par la commission des lois du Sénat.

Le second objectif visé au travers du présent projet de loi est, d'une manière plus générale, de renforcer la sévérité, l'efficacité et surtout le caractère effectif de la répression des infractions portant atteinte à la sécurité routière.

Il est ainsi proposé d'apporter trois séries de modifications à la législation actuelle : ces modifications concernent la récidive, les peines complémentaires et la procédure de l'amende forfaitaire.

S'agissant de la répression des infractions commises en récidive, il convient tout d'abord de mieux sanctionner les conducteurs qui, après avoir commis une première infraction, continuent d'avoir un comportement dangereux sur la route. L'efficacité des règles applicables en cas de récidive en matière de sécurité routière doit donc être accrue.

Ainsi, en ce qui concerne les contraventions de la cinquième classe au code de la route devenant des délits en récidive, comme le défaut de permis ou le grand excès de vitesse, le délai de récidive est allongé de un an à trois ans.

De même, certains délits relevant de la violence sont assimilés les uns aux autres au regard du régime de la récidive : par exemple, le conducteur qui, par ses fautes de conduite répétées, commet un premier accident et blesse un piéton, puis un second accident causant la mort d'un automobiliste sera dorénavant considéré comme récidiviste. De la même façon, la personne poursuivie pour usage de stupéfiants au volant après avoir été condamnée pour conduite sous l'empire de l'alcool sera également considérée comme récidiviste.

En ce qui concerne la diversification et le renforcement de l'efficacité des peines complémentaires, il s'agit à mes yeux d'un élément très important, y compris sur le plan pédagogique.

A cet égard, des modifications significatives paraissent indispensables. Les dispositions du projet de loi les plus notables en la matière sont celles qui tendent à supprimer la possibilité d'aménagement de la peine de suspension du permis de conduire en cas de délit mettant en danger la vie d'autrui. Cela ne signifie pas que toute possibilité d'aménagement sera supprimée ; seuls sont visés les cas les plus graves. Cela étant, la pratique dite des « permis blancs » a entraîné d'importants contentieux et paraît par nature incompatible avec la condamnation de conducteurs au comportement vraiment dangereux ainsi qu'avec la nécessaire dimension pédagogique de la sanction. Bien évidemment, le tribunal conservera la faculté de fixer la durée de la suspension du permis de conduire pour réprimer les infractions en cause.

Le projet de loi tend ensuite à la poursuite de la diversification des peines complémentaires, commencée avec l'entrée en vigueur du nouveau code pénal, afin de permettre au juge de mieux personnaliser la peine s'agissant des comportements au volant les plus dangereux.

A cet effet, de nouvelles peines complémentaires sont créées : celles de stage de formation à la sécurité routière et d'interdiction de conduire certains véhicules.

D'autres peines sont ajoutées pour des incriminations déjà existantes, comme la peine complémentaire de confiscation du véhicule, notamment en cas d'homicide involontaire ou de conduite sans permis en récidive.

La commission des lois du Sénat propose opportunément de prévoir la possibilité de prononcer une peine de stage de sensibilisation à la sécurité routière en matière contraventionnelle, ce qui avait été omis dans le projet de loi. Elle complète avec raison la liste des peines prévues en cas de risques causés à autrui, en prévoyant la possibilité de confisquer ou d'immobiliser le véhicule.

Enfin, le projet de loi a pour objet de faciliter - ce n'est pas la moindre de nos ambitions - le traitement du contentieux routier par l'institution judiciaire.

La procédure de l'amende forfaitaire est ainsi rendue plus opérationnelle, par la subordination de la recevabilité des contestations émanant des personnes titulaires de la carte grise à la consignation préalable de l'amende dans les cas où sont applicables les dispositions de l'article L. 121-3 du code de la route prévoyant à leur encontre une présomption de responsabilité pécuniaire.

Parallèlement, la possibilité de recourir à des contrôles automatisés des infractions routières est expressément prévue par le texte afin de permettre le développement et la montée en puissance de ces dispositifs, pour le déploiement desquels une mission interministérielle est au travail depuis plusieurs semaines.

De même, est instituée une présomption de domiciliation, trop de contrevenants échappant actuellement aux poursuites en ne déclarant pas leur changement d'adresse au fichier national des immatriculations.

On aboutira ainsi à un renforcement de l'efficacité de la chaîne de « contrôle-sanction », qui est indispensable si l'on souhaite éviter l'engorgement des tribunaux tout en permettant une surveillance accrue du comportement des automobilistes sur les routes.

Là encore, je me félicite que ces dispositions pragmatiques et cohérentes reçoivent l'accord de la commission des lois du Sénat, qui propose de les améliorer sur différents points.

En particulier, il me paraît tout à fait judicieux de préciser la force probante des constatations effectuées par le biais d'appareils automatiques, dès lors qu'ils sont homologués.

L'amendement de la commission des lois du Sénat tendant à réglementer le traitement automatisé de ces informations dans des conditions plus cohérentes que ce qui avait été prévu par l'Assemblée nationale est également bienvenu.

Le Gouvernement a déposé sur ce sujet quelques amendements qui visent à compléter les améliorations proposées par M. le rapporteur, notamment pour faciliter l'application des nouvelles dispositions aux conducteurs étrangers, qui ne doivent pas, du seul fait qu'ils sont étrangers, échapper au système présenté. Je m'en expliquerai plus en détail lorsque ces amendements viendront en discussion.

Enfin, pour être complet s'agissant du dispositif pénal figurant dans ce projet de loi, j'indique que deux nouvelles incriminations sont créées afin d'aggraver la répression de la commercialisation et de l'utilisation des « détecteurs de radars » ou de la promotion des « kits de débridage » des cyclomoteurs, destinés à en augmenter la puissance.

J'ai, par ailleurs, déposé un amendement dont l'objet est de permettre l'aggravation des sanctions en cas de stationnement sur les places réservées aux personnes handicapées, de tels faits étant actuellement insuffisamment réprimés.

Comme je l'ai indiqué devant l'Assemblée nationale, les dispositions de ce projet de loi répondent à une attente forte et légitime des Français, chez qui on peut déceler une véritable prise de conscience de l'importance et de la gravité de la délinquance routière. Les chiffres de la sécurité routière de ces derniers mois en témoignent.

Pour autant, le droit pénal et la procédure pénale ne sauraient constituer les seules réponses à la violence routière. Cependant, ils ont leur place dans le combat que notre société engage contre ce fléau.

L'objet de ces nouvelles dispositions n'est évidemment pas d'augmenter le nombre des automobilistes incarcérés dans des établissements pénitentiaires. L'objectif est de renforcer le caractère dissuasif des sanctions applicables, en prévoyant des peines cohérentes et surtout lisibles, et d'améliorer l'efficacité du dispositif de contrôle et de sanction, en rendant les contrôles effectifs sur l'ensemble du réseau routier.

La seule annonce de la présente réforme semble d'ailleurs produire des effets bénéfiques, ce qui impose de ne pas relâcher l'effort engagé par les pouvoirs publics, avec l'appui de nombreuses associations. C'est dans cet esprit que je demande au Sénat d'adopter, à la suite de l'Assemblée nationale, le présent projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le Sénat s'est penché à plusieurs reprises sur le problème aigu de la sécurité routière, en mars 1998, en 1999, en 2000 et, plus récemment, en décembre 2002.

Pourquoi ? Parce que, par comparaison avec ce qui se passe chez nos voisins de l'Union européenne, le problème avait pris en France des aspects de plus en plus dramatiques, comme vous l'avez souligné, messieurs les ministres. Ainsi, plus de 8 000 personnes ont été tuées sur nos routes en 1998 et en 1999, et près de 170 000 autres ont été blessées, un trop grand nombre d'entre elles restant handicapées à vie. Bien des familles ont été profondément et durablement marquées, tant moralement que matériellement. Dans le même temps, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne ou le Royaume-Uni se protégeaient mieux du fléau.

Les causes du mal s'étaient certes multipliées, avec l'augmentation du trafic routier, la prolifération des conducteurs et des véhicules, la diversité croissante des moyens de transport routier, mais surtout, peut-être, l'inadaptation des mentalités devant l'évolution des trafics routiers.

Ainsi, un grand nombre d'usagers font preuve d'incompréhension face aux efforts du législateur ou du pouvoir réglementaire, tandis que, a contrario, les associations de victimes présentent des exigences de plus en plus fermes, à bon droit mais de façon insuffisamment coordonnée.

Nous étions ainsi placés, de plus en plus nettement, au carrefour des intérêts et des sentiments. Il était urgent de mettre un terme à toutes les incantations rhétoriques : le 14 juillet dernier, le Président de la République décida de faire de la lutte contre l'insécurité routière l'un des grands chantiers du Gouvernement.

Sans tarder, le 18 décembre 2002, un comité interministériel a décidé d'un programme pluriannuel, et, le 31 mars dernier, un second comité interministériel a pris acte des dispositions du projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui après avoir été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale.

Comment celui-ci se présente-t-il ?

Le premier mérite du texte, je tiens à le dire, est d'être interministériel. Il résulte des efforts conjugués du garde des sceaux et du ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Un grand pas vient donc d'être fait dans un domaine qui, de par sa nature, concerne la plupart des départements ministériels ; deux d'entre eux, principalement intéressés, coordonnent aujourd'hui leur action : il s'agit de la chancellerie, d'une part, pour une meilleure approche de la répression, et de l'équipement et des transports, d'autre part, pour un début d'action préventive.

M. le garde des sceaux résume le projet de loi en deux mots clefs : responsabilité et efficacité. La responsabilité implique, et j'y insiste, la pédagogie de la sanction, et l'efficacité, par un meilleur traitement des infractions tout au long de la chaîne pénale, exige une action coordonnée des magistrats, dont le pouvoir d'appréciation est heureusement respecté.

Troisième constatation, le projet de loi, dans la logique d'une pédagogie de la sanction, vise à aggraver de manière substantielle le maximum prévu des peines. Il cible cependant plus particulièrement cette augmentation sur six circonstances aggravantes, dont quatre figurent parmi les principales causes des accidents : l'alcoolémie, l'usage de drogue, la conduite sans permis, le délit de fuite, le grand excès de vitesse, la mise en danger de la vie d'autrui.

Examinons plus en détail le texte qui nous est soumis, à la fois dans son volet relatif à la répression et dans son volet concernant la prévention.

Le projet de loi tend en effet à une mise en oeuvre législative des nombreuses mesures décidées par le comité interministériel du 18 décembre 2002.

Des dispositions pénales importantes visent à renforcer le dispositif actuel et à améliorer sa cohérence.

Tout d'abord, des peines aggravées sont prévues, plus diversifiées mais aussi plus lisibles.

Ainsi, les articles 1er et 2 créent des infractions spécifiques d'homicide et de blessures involontaires commises lors de la conduite d'un véhicule.

Le conducteur ayant commis un homicide involontaire encourra cinq ans de prison, contre trois ans actuellement. De même, le fait d'infliger des blessures involontaires en conduisant, si celles-ci ont entraîné plus de trois mois d'incapacité totale, pourra être sanctionné de trois ans d'emprisonnement, contre deux ans actuellement. Si l'incapacité est de moins de trois mois, la peine pourra être de deux ans de prison, alors que, pour l'heure, seule une contravention de cinquième classe est prévue.

Ces peines seront aggravées jusqu'à dix ans d'emprisonnement si les faits commis s'accompagnent de deux ou plus des six circonstances aggravantes que j'ai déjà citées.

Il convient de remarquer une fois encore que ces aggravations portent sur des peines maximales destinées à instaurer une pédagogie de la sanction et à marquer la responsabilité du conducteur, tout en laissant au juge le soin d'apprécier, en fonction des circonstances, le degré de la sanction.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a inséré un article 2 bis créant une nouvelle infraction spécifique d'interruption involontaire de la grossesse et prévoyant des peines spécifiques lorsque cette interruption est provoquée par le conducteur responsable d'un accident. La peine encourue est de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. Le Gouvernement a précisé que cet ajout lui paraissait justifié, car il permettra de combler une lacune de notre législation dénoncée par les praticiens.

L'article 4 du projet de loi tend à renforcer les règles relatives à la récidive. C'est ainsi que, pour les contraventions de cinquième classe devenant des délits en récidive, le délai d'appréciation est porté de un an à trois ans. Certains délits seront désormais assimilés au regard de la récidive : celui qui provoquera des blessures après avoir déjà commis un homicide sera considéré comme étant en récidive ; il sera également impossible de repasser le permis de conduire pendant un an en cas d'invalidation du permis moins de cinq ans après une première invalidation.

Les articles 5 et 6 prévoient des modifications significatives concernant les peines complémentaires.

Il s'agit, en premier lieu, de la suppression du « permis blanc ». Ce point est important, car il ne recueille pas l'unanimité. Je rappelle que le permis blanc limitait la suspension du permis de conduire à la conduite hors de l'activité professionnelle. Aux termes du projet de loi, le tribunal conservera la faculté de fixer la durée de la suspension du permis de conduire mais ne pourra plus l'aménager quand il l'aura prononcée, le principe étant qu'un conducteur dangereux le week-end peut l'être aussi les autres jours de la semaine.

Deux nouvelles peines complémentaires sont proposées : l'interdiction de conduire certains véhicules et l'obligation de stages de formation à la sécurité routière.

Notons, enfin, l'extension possible de la peine d'annulation du permis de conduire à l'ensemble des homicides et blessures involontaires aggravées, ainsi que la confiscation du véhicule.

L'article 7 a essentiellement pour objet de renforcer l'efficacité de la chaîne contrôle-sanction, afin d'éviter l'engorgement des tribunaux, en développant des contrôles automatisés, tout en confirmant la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule. L'amende forfaitaire est rendue plus opérationnelle, et plus ciblée, toute contestation étant soumise au dépôt d'une consignation préalable du montant de l'amende, et, pour éviter toute échappatoire, il est constitué une présomption de domiciliation du contrevenant à l'adresse figurant au fichier national des immatriculations.

En revanche, l'article 8 tend à renforcer l'efficacité de la prévention, en instaurant un permis probatoire pour les conducteurs novices. Ce permis sera affecté de six points seulement, au lieu de douze, les six points restants n'étant attribués qu'après une période probatoire de conduite de trois ans sans infraction. L'Assemblée nationale a ramené à deux ans le délai de probation s'il y a apprentissage anticipé de la conduite, ce que l'on appelle la conduite accompagnée.

Notons également qu'un récent décret du 29 mars 2003 sanctionne d'un retrait de trois points l'absence de casque ou de ceinture de sécurité et de deux points l'usage du téléphone mobile en conduisant.

M. Robert Badinter. Très bien !

M. Lucien Lanier, rapporteur. Une série de dispositions nouvelles font l'objet des articles 12 à 24 du projet de loi. Elles concernent les infrastructures et les véhicules : répression de la commercialisation des kits de débridage pour les cyclomoteurs et des détecteurs de radars ; recherche de meilleurs emplacements pour les obstacles latéraux à partir d'une distance minimale de la chaussée ; confirmation et extension du pouvoir des experts concernant les véhicules endommagés ; cas de violence ou d'outrage à l'encontre d'un inspecteur du permis de conduire ; obligation pour les collectivités locales gestionnaires d'un réseau routier d'informer l'Observatoire national de sécurité routière ; renforcement des possibilités d'immobilisation d'un véhicule.

Enfin, nous relevons deux « cavaliers », mais qui sont justifiés par l'urgence : l'un concerne les causes d'accidents des avions militaires, l'autre redéfinit le problème de la cellule individuelle des prévenus couverts par la présomption d'innocence.

Tel que je viens de l'exposer synthétiquement, le présent projet de loi recueille l'approbation de notre commission des lois moyennant certaines remarques.

Tout d'abord, il convient d'approuver un texte dont la nécessité apparaît à l'évidence, si l'on veut endiguer ce mal qui court de la violence routière et des drames irréversibles qu'il engendre, que le laxime ne saurait apaiser. C'est pourquoi le projet de loi table sur deux moyens forts. Premièrement, une répression, plus clairement exposée, qui engage la responsabilité, plus justement comprise par le conducteur d'un véhicule. Deuxièmement, une prévention, adaptée à son temps, et dont les meilleurs exemples sont la suppression du permis blanc - mesure parfaitement logique - et, surtout, l'instauration d'un permis probatoire pour les conducteurs novices, mesure particulièrement appréciable pour protéger les plus jeunes, âgés de dix-huit à vingt-quatre ans, qui paient le plus lourd tribut au drame de la route : 21,4 % de décès et près de 23 % de blessés en l'an 2000.

La commission des lois a également souhaité conforter le présent projet de loi dont elle approuve les objectifs, en renforçant la cohérence du texte : éviter un hiatus entre les dispositions actuellement en vigueur et la promulgation de la nouvelle loi ; étendre la possibilité d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière aux contraventions, et pas seulement aux délits ; prévoir la possibilité d'une immobilisation, voire d'une confiscation du véhicule, en cas de mise en danger de la vie d'autrui ; prévoir l'inéluctable développement des contrôles automatisés par la suppression des barrières aux péages, afin d'en faciliter la fluidité, mais en sanctionnant le véhicule fraudeur ; supprimer, à l'article 13 bis, les contraintes enfermant les gestionnaires de voirie dans des obligations incompatibles avec la configuration du réseau ; enfin, prévoir la compensation des charges financières supportées par les collectivités locales au titre du système d'information sur le réseau routier qu'elles doivent transmettre au représentant de l'Etat.

Mais la commission des lois s'est plus particulièrement penchée sur les articles 2 bis et 24.

L'article 2 bis prévoit, en effet, la création d'une infraction d'interruption involontaire de grossesse, infraction spécifique lorsque cet acte est commis à l'occasion de la conduite automobile. Le texte adopté prévoit les mêmes circonstances aggravantes qu'en cas d'homicide involontaire et de blessures involontaires.

Après un très large, très long et très profond débat, la commission des lois a souhaité disjoindre cette disposition du projet de loi. Pourquoi ? Parce qu'une telle disposition concerne les principes fondamentaux du droit pénal et touche au statut même du foetus. Compte tenu de l'importance du sujet et du débat juridique qu'il implique, cette disposition mérite d'être traitée spécifiquement, et pas seulement à l'occasion de la seule sécurité routière.

MM. Jacques Mahéas et Gérard Delfau. Très bien !

M. Lucien Lanier, rapporteur. Enfin, concernant l'article 24, la loi du 15 juin 2000, qui renforce la protection de la présomption d'innocence, prévoit que les prévenus soumis à la détention préventive devraient disposer d'une cellule individuelle - s'ils la demandent - à compter du 15 juin 2003.

La situation des établissements pénitentiaires et l'augmentation de la population carcérale rendent actuellement impossible l'application de cette disposition, compte tenu de l'attente de prisons supplémentaires dont les délais de construction sont incertains et lointains.

La commission des lois refuse l'abandon du principe d'incarcération individuelle prévu par la loi du 15 juin 2000 et propose un nouveau délai de cinq ans au terme duquel il ne pourra être dérogé au principe déjà posé.

Compte tenu des remarques et des amendements de la commission, le projet de loi qui nous est soumis présente de nombreux aspects opportuns, malgré une tendance au durcissement et à l'aggravation de la répression de nombreuses infractions aux dispositions régissant la conduite automobile.

Trois raisons principales incitent à l'adopter.

Premièrement, il est le résultat de deux comités interministériels - décembre 2002 et mars 2003 - dont la permanence doit assurer la continuité de l'action, la définition d'une politique efficace de sécurité routière, autant que sa mise en oeuvre.

Deuxièmement, l'annonce et les premières mesures réglementaires - nombreuses - ont d'ores et déjà porté leurs fruits de manière spectaculaire. En effet, le bilan provisoire de février 2003 fait état d'une baisse de 35,8 % du nombre de tués et d'une diminution de 27,3 % du nombre d'accidents corporels.

Or ces résultats font suite à huit mois consécutifs de baisse. A quoi est-ce dû ? D'abord au fait que le Président de la République a décidé de traiter le sujet comme un chantier prioritaire et que le Gouvernement a agi. Le présent projet de loi interpelle la nation par tous ses citoyens.

Ainsi, durant l'année 2002, les médias dans leur ensemble, et tout d'abord la télévision, ont martelé le thème de la sécurité routière et en ont fait quotidiennement un sujet d'actualité. L'efficacité d'une telle action a été considérable, ce qui prouve qu'une information soutenue est indispensable.

Un net changement des mentalités et des comportements à l'égard de la sécurité routière est apparu. Il tient, pour une part, à la peur du gendarme et, pour une autre part plus noble, à une prise de conscience, de la part du conducteur, de sa responsabilité vis-à-vis des problèmes de violence routière et du fait que le drame n'arrive pas seulement aux autres.

Ces changements de comportement, je les ai moi-même ressentis lors des nombreuses auditions auxquelles la commission des lois a procédé. Chaque fois, j'ai d'emblée posé la même question : « Cette loi est-elle bonne ? », et tous, sans exception, ont répondu : « Cette loi est bonne et nécessaire », quelles que soient les modifications qu'ils souhaitaient y apporter.

Un tel consensus qui fait taire les sceptiques et rallie les associations, dont le travail est ainsi récompensé, doit être maintenu, en engageant une action interministérielle sans faille, susceptible d'épouser l'évolution constante de la sécurité routière pour l'adapter à son temps.

Voilà pourquoi la commission des lois vous propose d'approuver ce projet de loi, avec certaines modifications, parce qu'il est attendu dans ses effets, parce qu'il doit protéger des vies et des familles, et parce qu'il doit redonner à la circulation routière l'aspect humain qu'elle n'aurait jamais dû perdre.

Beaucoup reste à faire pour cela, mais c'est une raison de plus pour commencer sans tarder.

Et que l'on ne nous reproche pas de sonner le tocsin face à une situation inadmissible, contre laquelle il est grand temps d'agir efficacement. Car, je le répète ici, mieux vaut le tocsin, qui invite à agir, que le glas, qui constate la mort. A ceux qui pensent que le mal n'arrive qu'aux autres, je rappelle cet adage en exergue d'un des meilleurs ouvrages d'Hemingway : « Ne demande jamais pour qui sonne le glas, il sonne pour toi. » (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 52 minutes ;

Groupe socialiste, 28 minutes ;

Groupe de l'Union centriste, 13 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes ;

Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 10 minutes ;

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, hélas ! d'ici à la fin du mois, plusieurs dizaines de personnes seront tuées en France dans un accident de la route et plusieurs milliers seront blessées. A la veille de plusieurs longs week-ends, la discussion du projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière prend évidemment une dimension particulière.

Depuis 1997, la lutte contre le fléau que constituent les accidents de la route est devenue une priorité nationale. En 1999, pour la première fois, était adoptée en France une loi spécifique à la sécurité routière qui affichait une volonté résolue de ne plus accepter comme une fatalité le triste record de notre pays en matière d'insécurité routière. Cette loi alliait une répression accrue contre les comportements les plus dangereux - c'est l'institution du délit de très grande vitesse, qui avait d'ailleurs rencontré les plus vives réserves sur certaines travées de cet hémicycle - et la volonté d'agir en amont en développant les actions en matière d'éducation à la sécurité routière et la formation des conducteurs. Le fait, en 2000, d'ériger la sécurité routière en cause nationale favorisait une prise de conscience nationale des accidents de la route et une véritable mobilisation de tous les acteurs, publics ou privés, nationaux ou locaux.

Cette irruption dans le débat public est évidemment essentielle et il faut s'en réjouir, car elle permet de passer outre les obstacles, notamment financiers, qui subsistent pour enclencher une politique volontariste de réduction du nombre de blessés et de morts sur les routes françaises.

La sécurité routière a été l'un des thèmes importants de la campagne présidentielle en 2002, et l'exclusion des délits routiers de la loi d'amnistie s'est imposée peu à peu comme une évidence. La poursuite des chantiers ouverts sous le précédent gouvernement - ils n'avaient pourtant pas toujours reçu un bon accueil -, comme la « publicité » faite autour du présent projet de loi, apparaît aujourd'hui comme la preuve d'un consensus national autour de la question : je veux y voir les causes d'une baisse importante du nombre de morts depuis 1999, baisse dont je me réjouis.

Pour autant, ce consensus n'implique pas une lecture univoque des actions à mener en ce domaine. Le présent texte en apporte aujourd'hui l'illustration.

En effet, loin de l'ambition que nous attendions, la lecture du projet de loi a été, pour nous, source de déceptions, autour desquelles j'organiserai mon intervention.

La première déception, c'est l'instrumentalisation du texte, par le Gouvernement dans un premier temps, par certains députés UMP ensuite. Il en est ainsi, bien sûr, de l'article 24, aux termes duquel est remis en cause le principe de l'encellulement individuel, principe que le Parlement, dans son ensemble, avait largement soutenu il n'y a pas si longtemps. Je regrette particulièrement que la majorité de la commission des lois ait accepté d'en débattre dans le cadre du présent texte et accepte la logique du Gouvernement, en proposant de reporter de cinq ans l'entrée en application de cette disposition. Cela aurait mérité bien d'autres débats que celui qui concerne la sécurité routière.

La deuxième disposition en cause a trait à l'interruption involontaire de grossesse. Là, du moins en apparence, on est plus dans le sujet puisqu'il s'agit, selon les auteurs de la disposition, de « combler un vide juridique » qui aboutirait à nier la souffrance de ceux qui perdent un enfant à l'occasion d'un accident de la circulation.

Voilà quinze jours, après un long débat, la commission des lois du Sénat avait rejeté à la quasi-unanimité le texte venant de l'Assemblée nationale qui, en fait, remet en cause le large consensus existant concernant le statut de l'embryon et du foetus et dépasse très largement le cadre de la sécurité routière.

Ce matin, M. Fauchon a cru bon de revenir sur la position de la commission, mais, par un nouveau vote, celle-ci a repoussé le texte de l'Assemblée nationale. J'ose espérer que vous en resterez là !

En tout état de cause, il est regrettable que ces dispositions aient été introduites dans le présent texte car elles brouillent le message et suscitent la polémique sur un sujet qui devrait nous rassembler.

L'absence de dimension réellement pédagogique du projet de loi est une autre cause d'insatisfaction des sénateurs communistes républicains et citoyens.

Bien que vous vous en défendiez fortement, messieurs les ministres, avec votre texte, la sanction est érigée en vertu cardinale de la lutte contre l'insécurité routière.

Cette option ressort d'abord de l'intitulé même du projet de loi : « lutte contre la violence routière ». Ce choix terminologique n'est pas anodin, spécialement dans un contexte d'aggravation généralisée des peines, qui met l'accent sur la dimension répressive par l'identification entre la violence et la délinquance. Que ne voyons-nous M. Sarkozy dans l'hémicycle !

Cette approche est d'ailleurs confirmée par le contenu même du texte qui, par un formidable effet d'accumulation, aboutit à mettre au même niveau de sanction le délit d'inattention en récidive et les délits les plus graves, telles les agressions sexuelles sur mineurs commises à l'aide d'une arme.

Or cette option est discutable à plus d'un titre.

D'abord, je ne suis absolument pas certaine qu'elle ait l'effet dissuasif recherché. Il est au contraire à craindre qu'elle n'entretienne une véritable « mise à distance » du sujet, peu de gens s'estimant violents au volant, quand ils ne se considèrent pas très largement comme de bons conducteurs.

Monsieur le ministre, vous définiriez-vous comme violent au volant ? Vous-même, monsieur le rapporteur, vous êtes-vous immédiatement reconnu dans ce délinquant visé par le texte ? Je ne le pense pas. Et pourtant, lequel d'entre nous n'a jamais sciemment dépassé une limitation de vitesse, accéléré à un feu orange ou omis d'attacher sa ceinture de sécurité ?

Ce sont pourtant ces petites fautes qui sont au coeur du problème. Il s'agit de petits accommodements avec la règle, que chacun d'entre nous s'autorise un jour ou l'autre sans pour autant se sentir réellement délinquant ; les prétextes invoqués sont multiples : « ce n'était pas réellement dangereux », « il n'y avait personne », « il faisait nuit », « le trajet n'était que d'une centaine de mètres », etc. Qui ne se reconnaît pas dans ces petites phrases ?

En effet, il ne faut pas oublier que la délinquance routière a cela de particulier qu'il s'agit d'une délinquance de masse : la loi a donc vocation à s'attaquer non pas seulement à ces criminels de la route qui la prennent pour un circuit de formule 1, mais à nous tous.

Pour être efficace, la sanction doit être comprise. Pour être comprise, elle doit être exemplaire. Or je doute que l'affichage de l'allongement des peines aille dans ce sens.

Certes, la création de délits spécifiques d'homicide involontaire et de coups et blessures involontaires à l'occasion de la conduite d'un véhicule doit être approuvée en ce qu'elle induit une prise de conscience de la part de chaque automobiliste quant au danger de son véhicule, lequel peut devenir une véritable arme, comme la jurisprudence l'a parfois défini.

Pour autant, fallait-il allonger la durée des peines de prison encourues, alors que la véritable question est celle de l'application de la loi, spécialement dans un contexte où les tribunaux s'avèrent très sévères, comme M. le rapporteur l'a souligné dans son rapport, avec parfois un souci d'exemplarité extrême. Je pense au cas du cafetier condamné au bénéfice d'une conception particulièrement extensive du délit de complicité.

Que la prison soit nécessaire pour réprimer des comportements directement criminels, cela ne fait aucun doute. Mais ceux-ci ne concernent en réalité qu'une faible part des personnes mises en cause à l'occasion d'un accident de la route et pour lesquelles la question du sens de la peine de prison peut être posée. Le caractère dissuasif de la prison avec sursis existe mais n'éduque pas. Les stages de formation routière en hôpital ou en centre de rééducation pour accidentés de la route ont certainement une valeur très supérieure. Mais avons-nous les moyens de les mettre en pratique à grande échelle ? Je souhaiterais à ce propos avoir des statistiques précises sur le nombre de peines de travaux d'intérêt général, ou TIG, prononcées en ce sens.

Que penser des comportements transgressifs de ces jeunes dont tout le monde se plaît à souligner qu'ils sont à la fois les premières victimes et les premiers auteurs d'accidents routiers ? Pour cette catégorie d'automobilistes, c'est sur la prise de risque qu'il faut agir. Or, de ce point de vue, les solutions offertes par le projet de loi sont bien minces.

Si l'institution d'un permis probatoire est de nature à développer la responsabilisation, il devrait s'intégrer dans un schéma global de travail sur les représentations qui fait encore largement défaut, ce qui serait préférable à l'institution d'un cadre pénal ultra-renforcé qui occulte la dimension psychologique des comportements à risque des jeunes : recherche de puissance et de sensations, fuite, interrogations, autonomisation, etc. Tels sont les facteurs explicatifs donnés par le psychologue Jean-Pascal Assailly quant à la surreprésentation des jeunes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans dans les accidents de la route.

C'est grâce à une éducation et à une formation renforcées - elles étaient au coeur de la politique de Jean-Claude Gayssot - que nous pourrons faire évoluer ces représentations. Il est, de ce point de vue, fort heureux que les comités interministériels des 18 décembre 2002 et 31 mars 2003 aient continué dans cette voie, en posant le principe d'une évaluation médicale de l'aptitude à la conduite, du développement des études et des recherches pour la prévention des accidents, ainsi que de la nécessité d'une éducation routière tout au long de la vie.

Au-delà de l'apprentissage purement technique, il convient d'innover pour que les règles de la conduite deviennent des règles de conduite au volant. A cet égard, nous avons déposé un certain nombre d'amendements qui tendent à renforcer l'éducation et la formation de l'ensemble des automobilistes, et pas seulement des professionnels de la route, tout au long de leur vie ; le lieu de travail est particulièrement propice à cette formation, quand on sait que la majorité des accidents ont lieu sur le trajet entre le domicile et le lieu de travail.

S'agissant toujours de la lutte contre les représentations, il convient selon nous de rompre enfin avec cette vision persistante de la voiture comme vecteur de puissance et de vitesse : c'est en ce sens que nous proposons le bridage des moteurs et l'insertion de mentions publicitaires mettant en garde contre les dangers de la vitesse. Ce sont autant de pistes qui permettraient d'étoffer un projet de loi bien maigre sur le plan de la prévention. Il n'y a qu'à voir les publicités pour les voitures de grosse cylindrée qui sont présentées tous les jours sur toutes les chaînes de télévision.

Le peu d'enthousiasme que nous éprouvons pour ce texte s'explique aussi par l'absence de vision prospective et globale sur la sécurité routière.

Centrer la lutte contre les accidents de la route sur la responsabilité individuelle du conducteur est nécessaire, mais cela aboutit en réalité à évacuer une réflexion de fond sur les causes structurelles de l'insécurité routière.

Nous aurions souhaité une réflexion déconnectée de son aspect pénal pour aborder la question de fond du primat de la route en France, parce que c'est cette question qui doit être débattue.

Il faut bien avoir conscience en effet que l'objectif « zéro mort », tel qu'il est pratiqué en Suède, ne pourra être mis en oeuvre en France, pays de transit important en raison du tourisme, tant que nous resterons structurés autour de la route. Pour mémoire, je rappellerai que le fret ferroviaire atteignait en 1970 près de 20 % de parts de marché ; il ne représente aujourd'hui qu'à peine 8,4 % du total des marchandises transportées.

C'est la force de Jean-Claude Gayssot de l'avoir compris : tant au travers de la réflexion sur la sécurité des infrastructures que dans son implication en faveur de la liaison Lyon-Turin, il avait opté pour un rééquilibrage du rail par rapport à la route, donné la priorité à l'intermodalité, plaidé pour la croissance du ferroutage, du transport combiné et des « autoroutes roulantes ».

Mme Hélène Luc. Absolument !

Mme Nicole Borvo. Comme vous le savez, la DATAR, la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale dans un rapport récent intitulé La France en Europe : quelle ambition pour la politique des transports ?, affirme de façon très résolue la nécessité d'une politique volontariste en matière de transports alternatifs. La DATAR préconise en particulier de réserver les axes ferroviaires aux marchandises grâce à la fameuse « magistrale Ecofret » et d'encourager le développement du transport fluvial et du cabotage.

Une telle option a évidemment un coût et il n'est pas certain que le Gouvernement souhaite l'endosser : le gel de la liaison Lyon-Turin par l'Etat, que la région a choisi récemment de dépasser, permet malheureusement d'en douter. Pourtant, le gain tant en termes de vies humaines que d'environnement ne fait aucun doute. Comme le soulignait la Commission européenne dans son Livre blanc, « de tous les modes de transport, le transport par route est de très loin le plus dangereux et le plus coûteux en vies humaines ». C'est pour cette raison que nous préconisons une évaluation régulière des initiatives menées en ce domaine.

Messieurs les ministres, en l'état actuel du texte, nous nous abstiendrons lors du vote, car, comme je vous l'ai dit, nous ne l'approuvons pas globalement. Nous verrons bien ce qui ressortira des débats. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. André Lardeux.

M. André Lardeux. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous ne pouvons qu'être tous d'accord sur l'économie générale de ce projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière, tant la mort, notamment des jeunes, sur les routes est un drame pour les familles, mais aussi pour la collectivité.

Les mesures proposées sont les bienvenues, et il semble bien que leur effet dissuasif fonctionne déjà puisque, dès leur annonce, on a pu observer une nette diminution du nombre d'accidents et de morts sur les routes. Il s'agit donc d'un bon projet de loi.

Cependant, rien n'est définitivement acquis : le nombre des décès - quarante-deux - survenus lors du week-end de Pâques le confirme. Il suffit en effet de s'apercevoir que c'est beaucoup plus que le nombre des décès provoqués par la catastrophe d'AZF, laquelle a pourtant fortement marqué les esprits. Or l'émotion qui s'est manifestée lors de ce week-end a été bien moindre.

Ce texte a le mérite d'allier une nécessaire répression et une indispensable prévention, car l'on ne peut mettre un gendarme ou un policier derrière chaque Français. Je voterai donc ce texte parce qu'il va dans la bonne direction, mais je pense qu'il devra à l'avenir être amélioré, voire durci sur certains points.

En effet, c'est bien le comportement des automobilistes qui est au coeur du problème. A ce propos, je citerai un détail qui n'est plus anecdotique : le changement de direction est de moins en moins signalé, à croire que le clignotant est devenu un outil facultatif sur nos véhicules ! A travers ce comportement, c'est le manque de respect et de civisme qui se manifeste tout simplement.

Même si on ne peut pas, bien sûr, tout faire en un instant, la discussion de ce texte aurait pu être l'occasion de traiter d'autres aspects de la sécurité routière.

Le premier aspect concerne le taux d'alcoolémie. Notre objectif devrait être le taux zéro, la tolérance zéro. Pour des raisons pédagogiques, nous aurions peut-être dû abaisser le seuil de 0,8 gramme par litre à 0,5 gramme par litre, par exemple. En effet, dans notre pays, les pesanteurs liées à nos habitudes et les craintes - d'ailleurs injustifiées - exprimées par certaines catégories de personnes empêchent que le pas ne soit franchi d'emblée. On sait que les effets perturbateurs de l'alcool se manifestent à partir de 0,3 gramme par litre, taux qui est d'ailleurs préconisé par le ministère de la santé et par la Commission européenne.

Certains envisagent des seuils inférieurs pour les jeunes conducteurs, les professionnels de la route ou les récidivistes. A mes yeux, cette discrimination serait à la fois inutile et fort peu civique. En tout état de cause, nous devrons nous pencher sur ce sujet, car des études locales montrent l'existence de fortes tendances à l'alcoolisation chez les jeunes, quel que soit le milieu auquel ils appartiennent.

Le second point, qui concerne la vitesse, est largement abordé par le projet de loi, mais il ne suffit pas de sévir contre la vitesse en tant que telle - une automobile est certes dans certains cas une arme par destination -, il faut aussi sévir contre l'incitation à la vitesse. La publicité en matière automobile doit être davantage encadrée. Les constructeurs pratiquent souvent une communication sournoise en faisant de la vitesse un argument de vente, mais ils ne sont pas les seuls en cause : je pense au verbiage imprudent des médias, qu'il s'agisse des producteurs, des présentateurs ou de leurs invités, qui se laissent parfois aller à une incitation à la vitesse sans en mesurer les conséquences.

Les problèmes concernant les deux roues sont, dans l'ensemble, bien traités par le projet de loi. Il faudra tout de même imposer un jour le port du casque pour les usagers du vélo, mais cette mesure relève, me semble-t-il, du domaine réglementaire.

Bien que cela n'entre pas dans le cadre de ce texte, il serait également nécessaire d'éviter à l'avenir le vote d'une loi d'amnistie à l'occasion de chaque élection présidentielle, d'autant que le vote d'une telle loi reviendrait dorénavant tous les cinq ans. L'espérance en cette amnistie a, en effet, des effets dévastateurs sur les comportements des automobilistes.

J'évoquerai un peu plus longuement deux autres points du projet de loi.

Le premier concerne les obligations faites aux collectivités telles qu'elles apparaissent dans le texte transmis au Sénat.

L'article 13 bis, introduit par l'Assemblée nationale, a pour objet de créer une distance minimale en deçà de laquelle aucun obstacle latéral nouveau ne pourra être implanté.

Ce qui est gênant dans ce texte, ce n'est pas tant la prérogative accordée au Conseil d'Etat pour déterminer cette distance que l'inapplicabilité d'une telle disposition : en effet, faudra-t-il déplacer les immeubles ou arracher les arbres ? Par ailleurs, cette mesure me semble en contradiction avec beaucoup d'autres textes, ne serait-ce que ceux qui concernent la protection des sites.

L'article 16 prévoit la mise en place d'un système d'information sur le réseau routier. Du point de vue des collectivités - et là, c'est le président de conseil général qui s'exprime -, on pourrait considérer que c'est un moindre mal au regard des demandes excessives de certaines associations en la matière. Cependant, cette solution technique, classique dans son concept, donnerait à penser que tout peut se résoudre par des procédures. Or son efficacité, à mon avis, sera faible, et la mesure risquera de créer des contentieux.

Si le Gouvernement souhaite néanmoins maintenir une telle disposition, le coût supporté par les collectivités concernées devra être intégralement compensé par l'Etat. Une absence de compensation constituerait, à mon sens, un fâcheux précédent dans la perspective de décentralisation et rappellerait, à plus petite échelle, certes, des pratiques déjà expérimentées dans d'autres domaines.

Certaines associations souhaitaient que, en cas d'accident, la collectivité compétente soit contrainte de réaliser immédiatement des travaux. Ce serait ignorer les obligations d'enquêtes publiques, comme celles du code des marchés publics. Cette proposition n'a pas été retenue et, même si certains ont du mal à le comprendre, c'est, à mon avis, mieux ainsi : la solution actuelle est beaucoup plus pragmatique, car chaque cas est particulier.

En effet, comme nous pouvons facilement le vérifier dans nos départements, de trop nombreux aménagements de voirie sont des incitations à « foncer », ce qui démontre que ce sont bien nos comportements qui priment. Si nous faisions véritablement preuve de civisme au volant, les questions relatives aux infrastructures se poseraient beaucoup moins.

Le second point que je voudrais aborder concerne la protection de l'enfant à naître. De ce point de vue, l'article 2 bis introduit à l'Assemblée nationale me paraît aller dans le bon sens. L'enfant à naître est une personne qui mérite protection...

M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas une personne !

M. André Lardeux. ... et le législateur, en écoutant les parents privés de leur enfant, s'honorerait. D'ailleurs, dans beaucoup d'accidents, le terme légal de l'interruption volontaire de grossesse est dépassé : cette proposition ne remet donc nullement en cause le principe de la loi Veil, comme certains tentent de le faire croire. Causer, à l'occasion d'un accident de la route, la mort d'un être humain, qu'il soit né ou non, est un homicide involontaire.

Peut-être eût-il été plus simple d'intégrer cette notion dans l'article 221-6 du code pénal que d'en faire l'objet d'un article nouveau ; cependant, telle qu'elle figure désormais dans le texte elle me convient car elle permet de franchir un pas essentiel.

Au-delà de ces remarques, ce projet de loi recueille mon soutien, car ses points positifs sont évidents : la clarté des dispositifs proposés devrait en assurer l'efficacité ; je pense, en l'occurrence, au permis probatoire.

Il reste à souhaiter que les tribunaux aient les moyens nécessaires pour assurer l'application des sanctions et que la rédaction des rapports mentionnés dans le projet de loi - il y en a un certain nombre - ne se fasse pas au détriment de l'action sur le terrain. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier.

Mme Gisèle Gautier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi relatif à la lutte contre la violence routière est un texte fondamental. Chacun d'entre nous est concerné - on a pu le constater à travers les différents propos - par la sécurisation du trafic, et la récente diminution du nombre des accidents ne doit pas nous faire oublier le nombre considérable de morts sur la route qu'il y eut en 2002.

Au-delà de ces chiffres intolérables, pensons à toutes ces vies brisées, à toutes ces souffrances ineffaçables ! Aussi, afin que nous ne sombrions pas dans l'abstraction, comme c'est parfois le cas sur des sujets graves, j'aimerais attirer votre attention sur le sort de ces mères et de ces pères en devenir qui, au détour d'un carrefour, voient mourir leur enfant.

Actuellement, le fait de provoquer involontairement la mort d'un foetus n'est pas sanctionné pénalement.

L'Assemblée nationale a amendé le texte qui nous est soumis en créant un délit d'interruption involontaire de grossesse. Ce progrès est incontestable. Or il semblerait que la commission des lois de notre assemblée ait l'intention de l'effacer.

Mes chers collègues, au nom de ces « parents orphelins » qui ont perdu leur enfant avant la naissance dans des accidents de la circulation, au nom de ces hommes et de ces femmes qui comptent sur nous, nous ne pouvons nous permettre de laisser subsister un vide juridique aussi choquant.

Depuis la décision de la Cour de cassation refusant d'incriminer l'atteinte involontaire à la vie de l'enfant à naître, cette action fait l'objet d'une impunité que je qualifierai de scandaleuse.

La création d'un délit d'interruption involontaire de grossesse n'est en rien contraire à la Constitution ni au code pénal. En effet, la victime de ce délit serait la mère et non le foetus, et notre droit pénal reconnaît, depuis 1994, la notion de délit non intentionnel.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale visent à protéger la mère et non à instaurer un statut de l'enfant à naître, sujet qui, bien entendu, relève de la bioétique.

En outre, la loi dite « Fauchon » du 10 juillet 2000, qui a considérablement restreint la responsabilité pénale du fait de fautes non intentionnelles, n'est pas remise en cause par ce texte.

J'ajouterai que la loi relative à l'IVG est fondée sur la liberté de la femme de disposer d'elle-même. La loi permet ainsi à la femme de mettre fin à sa grossesse, mais seule la femme peut prendre cette décision ; en aucun cas, il n'est permis à un tiers d'interrompre cette grossesse, que ce soit par son irresponsabilité ou ses inconséquences.

Bien entendu, la sanction prévue pourrait être modulée selon la présence ou non de l'une ou plusieurs des six circonstances aggravantes énoncées dans ce projet de loi, notamment la conduite sous l'emprise de l'alcool ou de la drogue, l'excès de vitesse et le délit de fuite.

Je veux enfin évoquer un point qui concerne l'enfant et son devenir.

Il arrive que certains enfants survivent à un accident de la route intervenu quand leur mère les portait. Ils en gardent cependant toute leur vie des séquelles physiques, voire mentales. Il paraît donc justifié que la société leur reconnaisse un droit d'action en réparation de leur préjudice personnel. C'est la raison pour laquelle nous soutiendrons un amendement visant à étendre à ces enfants le dispositif de l'article 2 relatif à l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne.

Parce que seules une démarche volontariste et une prise de conscience collective seront susceptibles d'aboutir à une sécurisation de la personne, nous pensons que ce texte clé est l'occasion pour la représentation nationale de rendre justice à des parents et à des enfants qui souffrent. Il est de notre devoir de la saisir : il y va de notre dignité. (M. Jean-Paul Amoudry applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. Messieurs les ministres, votre projet de loi s'inscrit dans une longue liste d'initiatives prises par les gouvernements successifs pour renforcer la sécurité routière et faire reculer ce drame, si particulier à la France et à quelques nations latines, qui voit chaque année mourir des milliers de personnes du fait de la route, sans parler de très nombreux blessés.

Il s'agit d'une grande cause nationale, a dit le Président de la République, et nous sommes bien sûr prêts à appuyer cette action. Pourtant, une différence fondamentale sépare votre position de celle que j'ai soutenue du temps où M. Jean-Claude Gayssot était en charge des transports.

En effet, l'esprit du présent projet s'inscrit d'emblée dans son titre. Il ne s'agit non plus de « sécurité » routière mais de « violence » routière. Ce changement de terminologie illustre parfaitement la volonté du Gouvernement de mettre en place une politique presque uniquement répressive. C'est là une orientation sans doute nécessaire, et que j'approuve, mais est-ce bien la seule façon d'aborder la question ?

L'insécurité routière constitue dans notre pays l'un des fléaux les plus insupportables, d'autant que, parmi tous ceux de nos concitoyens qui en sont victimes, les jeunes adultes sont particulièrement frappés.

Il est donc urgent d'intervenir et il est indéniable qu'un certain nombre de mesures prévues dans ce projet de loi vont dans le bon sens, telles la suppression des « permis blancs » ou l'instauration du permis probatoire.

Toutefois, je le dis incidemment, ces mesures poseront biens des problèmes à ceux de nos concitoyens qui utilisent leur véhicule pour des raisons professionnelles. Je m'y résigne cependant.

Faut-il pour autant que tout le dispositif, ou presque, que nous examinons aujourd'hui repose sur la répression, l'aggravation des peines et sur une logique d'emprisonnement sans discernement ?

Il n'est pas bon d'intervenir seulement en aval de l'accident, quand le drame a déjà eu lieu. Il faut intervenir aussi en amont. La répression, même si elle est nécessaire, ne ramène pas les victimes de la route à la vie, hélas ! La prévention doit donc constituer l'autre fondement de l'action des pouvoirs publics en la matière, et vous semblez l'avoir oublié.

La législation de nos voisins européens fréquemment cités en exemple, telle la Grande-Bretagne, ne se caractérise pas par une sévérité extrême. La sécurité routière y est avant tout le fruit d'un état d'esprit, d'une prise de conscience, et celle-ci doit être provoquée dès le plus jeune âge.

A cet égard, je déplore vivement qu'aucune mesure de ce projet ne s'inscrive dans l'environnement scolaire : l'introduction de l'apprentissage du code de la route et des règles de comportement sur le trottoir et sur la chaussée, par des enseignants formés à cet effet, constituerait pourtant une formidable avancée.

De la maternelle à la terminale, dans notre pays, cinq heures seulement sont réservées à l'éducation à la sécurité routière, contre plus d'un centaine d'heures en Allemagne. Ne nous contentons donc pas d'envier les bonnes performances des pays qui nous entourent : imitons-les !

D'autres solutions préventives sont également envisageables, notamment la mise en place d'un enregistreur de vitesse dans tous les véhicules ; j'ai déposé un amendement à ce sujet.

Il faut, par ailleurs, se garder des effets d'annonce : le fait de créer un délit de grand excès de vitesse restera lettre morte sans la mise en place d'une telle « boîte noire ». De plus, il est à craindre - et ce serait un effet pervers - que cette disposition ne crée dans les esprits l'idée d'une tolérance de 50 km/h au-dessus de la vitesse autorisée.

La vitesse est une cause majeure d'accident. Il est donc temps de sortir de l'hypocrisie qui prévaut sur ce sujet et de prévoir enfin un dispositif de bridage des moteurs ; ce sera l'objet de mon deuxième amendement.

Les constructeurs qui vantent la puissance de leurs véhicules créent bien souvent chez les jeunes un état d'esprit qui associe, de manière illusoire, puissance et liberté. Il ne faut plus permettre la vente de véhicules affichant des vitesses qui encouragent les excès.

Je sais bien que cette mesure met en jeu des intérêts économiques considérables, y compris français. Je n'ignore pas que toutes les dispositions de ce type devraient recevoir l'aval de nos partenaires européens. Mais, dans sa réponse à ma question d'actualité du 20 juin 2000, le ministre des transports de l'époque, M. Jean-Claude Gayssot, m'annonçait que ce sujet était à l'ordre du jour du Conseil européen des ministres des transports du lendemain. Il faisait état d'un projet d'étude d'un « limitateur de vitesse-avertisseur ». Je suis étonné de votre silence à cet égard, monsieur le ministre des transports, et je souhaiterais que vous nous apportiez des éclaircissements.

Par ailleurs, il n'est pas raisonnable d'insérer dans un texte relativement consensuel une disposition aussi controversée que l'est celle qui se rapporte à l'encellulement individuel. En effet, ce sujet mérite un débat de fond.

Ainsi que le Sénat l'a montré dans un rapport qui a eu un grand écho voilà deux ans, nos prisons sont aujourd'hui incontestablement en état de surpopulation et il est certain que les suicides de détenus sont au moins en partie causés par ces mauvaises conditions de détention. Mon département, l'Hérault, connaît d'ailleurs sur ce point une situation particulièrement grave en regard de la moyenne nationale, et la presse locale s'en fait régulièrement l'écho, ce dont je la félicite au passage.

Le groupe auquel j'appartiens a toujours plaidé pour que se développent d'autres formes de rappel à la loi, notamment à travers le texte sur le placement sous surveillance électronique.

La population carcérale ne doit pas être augmentée seulement parce qu'on veut réprimer l'insécurité routière. Il faut mettre en oeuvre toutes les sanctions alternatives possibles.

Il convient d'abord, bien sûr, de retirer cette forme d'arme qu'est le véhicule motorisé des mains de celui qui commet le crime ou le délit. Le présent projet de loi, dans son article 6, prévoit certes la confiscation du véhicule et l'annulation automatique du permis de conduire, mais je déplore que ces sanctions ne se limitent qu'aux délits routiers les plus graves. Même si certaines professions peuvent s'en trouver pénalisées, il faut accentuer ce type de mesures dissuasives qui, précisément, permettent d'éviter l'emprisonnement.

Ensuite, il convient de multiplier les stages de sensibilisation et les peines de réparation sous forme de travaux d'intérêt général. De ce point de vue, sans doute faut-il inventer des formules qui frappent l'imagination.

Enfin, sur les infrastructures, les véhicules, les équipements de sécurité, votre texte ne dit rien, ou presque. Or, si les accidents sont évidemment bien souvent provoqués par l'imprudence des constructeurs, ils ont parfois aussi des causes matérielles.

Il reste à faire un sort à la création d'un délit ayant trait à une interruption de grossesse provoquée par l'imprudence d'un conducteur.

Cet ajout de l'Assemblée nationale au texte initial du projet de loi a suscité une double réprobation : celle des juristes et celle de tous les citoyens et citoyennes engagés dans la défense du droit des femmes à la libre disposition de leur corps. Car il y a manifestement, derrière cette initiative parlementaire, une atteinte à ce qui, pour l'instant encore, fait à peu près consensus.

Avec sagesse, la commission des lois de la Haute Assemblée a décidé de supprimer l'article en cause. Je souhaite que, au cours du débat, le Gouvernement soutienne cette position sans ambiguïté. J'attends de vous, messieurs les ministres, un éclaircissement à ce sujet. L'adoption d'une position contraire à celle de notre commission des lois me conduirait à voter contre ce projet de loi. J'en serais d'autant plus navré que, malgré les réserves que je viens d'énoncer, j'incline à soutenir votre texte, ne serait-ce que pour conforter les Français dans l'idée que la représentation nationale est unanime lorsqu'il s'agit de lutter contre l'insécurité routière.

Si, personnellement, je ne me déterminerai au sujet de mon vote qu'à la fin du débat, l'honnêteté intellectuelle m'amène à indiquer dès à présent qu'une grande majorité du groupe du RDSE adoptera votre texte.

Il reste que mon souhait est de pouvoir vous apporter mon soutien jusqu'au bout, car il est des signaux qu'il importe de donner. A vous, messieurs les ministres, et à vous, chers collègues de la majorité, de faire aussi le bout de chemin nécessaire ! (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, en faisant de la sécurité routière une cause nationale inscrite dans les trois grands chantiers de son quinquennat, le Président de la République a décidé de mettre fin à ce qu'il appelle à juste titre un « scandale national ».

Son engagement personnel, même s'il eût pu intervenir plus tôt, concourt à la mobilisation du Gouvernement, et nous nous en réjouissons tous. En effet, il est des sujets de société face auxquels les choix partisans s'effacent devant ce devoir du citoyen : éviter une multitude de drames.

L'insécurité routière, ce sont des chiffres qui ont été déjà maintes fois énoncés mais qu'il convient de rappeler : plus de 100 000 accidents corporels, 8 000 tués et 150 000 blessés en 2001. Mais c'est aussi la souffrance des proches, des familles, des amis, une douleur que l'on ne peut quantifier ni consoler.

Depuis la déclaration formelle du Président de la République, le 14 juillet 2002, et grâce à la mobilisation des policiers et des gendarmes, l'opinion publique a été marquée de manière significative, comme en témoigne la diminution importante du nombre de morts et de blessés sur la route. Au cours des quatre derniers mois, le nombre de tués sur la route a chuté de près de 30 %. Cette année, on a pu compter, par rapport aux années précédentes, deux fois moins de tués durant le week-end de Pâques : ce fut le moins meurtrier depuis quarante ans ! Tout au long de ces trois jours, 20 000 gendarmes et policiers ont été mobilisés. Je tiens donc à saluer les bons résultats obtenus avant même l'adoption de nouvelles mesures législatives.

L'action visible et plus massive des forces de l'ordre, relayée par les médias, y est pour beaucoup. Ainsi, il ne se passe pas un jour sans que la presse relate des accidents graves ayant entraîné la mort d'un conducteur et de passagers ou qu'elle évoque le sort dramatique de piétons fauchés.

N'oublions pas l'action des associations de victimes, qui oeuvrent pour le respect d'une route mieux partagée et pour une meilleure prise de conscience des dangers de la route. La période récente souligne donc ce paradoxe : l'annonce du renforcement des contrôles - et non pas des sanctions encourues, peu connues des justiciables - ainsi que la présence des gendarmes sur les routes contribuent à réduire le nombre d'accidents. La peur du gendarme fait lever le pied et l'aggravation des sanctions n'est peut-être pas aussi indispensable que vous le croyez, messieurs les ministres.

Réjouissons-nous donc, mais gardons-nous de tout triomphalisme, car rien n'est définitivement acquis tant que la peur d'être puni prévaudra sur la prise de conscience individuelle et sincère. La peur du gendarme pourrait n'être qu'éphémère.

Vous nous invitez à légiférer pour mettre en place des dispositifs à effet durable, pour frapper les consciences. Le durcissement du dispositif pénal permettra peut-être de faire cesser le sentiment d'impunité qu'éprouvent de trop nombreux conducteurs. Mais il nous faut surtout les responsabiliser. Où se trouvent les mesures de prévention et d'éducation, cette éducation par l'école et par les auto-écoles, qui doivent délivrer un enseignement de qualité, par les circuits pédagogiques, par des méthodes modernes d'évaluation, par une formation pointue des moniteurs ?

Au sein du groupe socialiste, nous sommes un certain nombre à nous intéresser depuis longtemps à ce sujet et, pour ma part, je suis tout à fait engagé sur le terrain. Nos amendements participeront donc de cette volonté de voir mener des actions d'éducation et de prévention, car l'action des pouvoirs publics doit être globale et ne peut se limiter à la punition.

Le Président de la République l'avait pourtant rappelé : « Les Français sont prêts à accepter des mesures courageuses. »

En effet, la conduite transgressive, qui touche tous les milieux et tous les âges, ne doit pas faire oublier les autres causes d'accident : le manque d'éducation routière dans nos collèges, notamment, l'aménagement des points noirs sur nos routes, la méconnaissance des cinq gestes qui sauvent. Seule la prise de conscience à l'échelle collective et individuelle permettra de mettre un terme à des drames d'autant plus inacceptables que 60 % des victimes n'ont aucune responsabilité dans l'accident.

Dans ce projet de loi, les mesures louables ne manquent pas. D'ailleurs la qualité du débat en commission, loin de tout esprit partisan, mérite d'être saluée : elle met en relief la prise de conscience qu'un tel sujet suscite.

Ainsi, il faut espérer que l'instauration du permis probatoire va permettre d'améliorer l'apprentissage de la conduite : les douze points du permis définitif ne seront accordés qu'au terme de trois années de conduite sans infraction. Cependant, afin d'encourager la conduite accompagnée, qui constitue un excellent mode d'apprentissage - les chiffres le prouvent -, il nous paraîtrait plus incitatif de réduire ce délai à un an.

Par ailleurs, les utilisateurs et les fournisseurs de matériel pour le débridage des cyclomoteurs et pour la détection de radars doivent être sévèrement punis.

L'article 15, qui vise à renforcer la protection des délégués à la formation et des inspecteurs du permis de conduire, lesquels remplissent leur mission de service public dans des conditions souvent difficiles, est nécessaire. Ainsi, le candidat à l'examen qui a eu un comportement violent envers un inspecteur pourra se voir interdire de se représenter avant un délai de trois ans.

Cependant, nous ne pouvons fermer les yeux sur l'attitude contradictoire du Gouvernement et sur les « cavaliers » que contient ce texte.

Comment croire à votre plan miracle quand certains crédits, à peine votés, ont été mis en réserve, pour être finalement annulés le lendemain même de l'adoption par l'Assemblée nationale de ce projet de loi ? Comment peut-on prétendre vouloir mener à bien un tel chantier et, dans le même temps, annoncer l'annulation de 133,2 millions d'euros au titre « Transports et sécurité routière » ?

Bien sûr, vous avez déclaré, monsieur le ministre des transports, que les « actions de la sécurité routière » ne seraient pas touchées.

Je ne citerai que quelques annulations. Le chapitre 53-46, relatif à l'entretien préventif, à la réhabilitation et aux aménagements de sécurité et d'exploitation des infrastructures, fait l'objet d'annulations de crédits de 230 000 euros en autorisations de programme et de 7,84 millions d'euros en crédits de paiement. De même, le chapitre 53-47, relatif au développement des infrastructures, à l'organisation des transports, à la sécurité, aux expérimentations et aux études générales, fait l'objet d'annulations de crédits de 67,17 millions d'euros en autorisations de programme et de 59,42 millions d'euros en crédits de paiement.

Ainsi, la sécurité routière est l'une de vos priorité mais, dans le même temps, vous diminuez les crédits !

Je dois attirer aussi votre attention sur le fait que, autrefois, en milieu urbain, des policiers surveillaient la sortie des écoles. Voilà trois ou quatre ans, à Neuilly-sur-Marne, ville dont je suis maire, il en était ainsi. Ces policiers pouvaient non seulement assurer la sécurité des élèves, mais également nouer utilement un contact privilégié avec eux. Il y avait donc là quelque chose de très intéressant.

Or l'Etat s'est totalement retiré de cette action, notamment en Seine-Saint-Denis. Comment pouvez-vous dire que la sécurité routière est une priorité quand vous renoncez à ce que les policiers puissent surveiller les sorties d'école ?

Je signale au passage que, dans ma ville, il manque vingt-cinq policiers, et que le commissaire n'a été remplacé qu'au bout de six mois. Ces erreurs doivent être corrigées.

Permettez-moi également d'évoquer les sanctions.

Nous avons mis en place le travail d'intérêt général, mais celui-ci est très peu utilisé : la sécurité routière est l'une de vos priorités, mais les sanctions ne sont pas appliquées et les travaux d'intérêt général sont devenus inexistants.

Vous affirmez par ailleurs que la vitesse est un facteur d'insécurité, mais M. Estrosi, l'un des vôtres, propose de porter la vitesse maximale autorisée à 150 km/h sur les autoroutes à trois voies.

L'esprit même de votre projet de loi me paraît discutable : faut-il vraiment mettre sur le même plan les homicides involontaires causés par des manipulations imprudentes d'armes à feu et ceux qui sont perpétrés au volant ? Conduire un véhicule est un acte social, qui peut mettre en danger la vie d'autrui. La délinquance routière a ceci de particulier que nous sommes tous, potentiellement, victimes et délinquants.

S'il est important d'être beaucoup plus sévère avec ceux qui font de leur véhicule une véritable arme, en revanche, considérer tout conducteur comme un délinquant, voire un assassin en puissance prêt à poser ses mains sur un volant comme ses doigts sur la détente d'une arme, est loin d'être une évidence qui s'impose à chacun et qui légitimerait les aggravations de peines qui nous sont proposées en conséquence.

Vous avez raison, le permis de conduire n'est pas le permis de tuer. Mais il n'est pas non plus le permis de punir ou de conduire en prison !

La présence renforcée des forces de l'ordre sur la voie publique me semble plus efficace en matière de sécurité routière que la surenchère effective de l'aggravation des peines. Ne confondons pas conducteurs et délinquants et distinguons bien la simple maladresse de la faute criminelle, même s'il ne faut évidemment pas sous-estimer l'impact des mesures répressives.

Certes, tous les gouvernements ces vingt dernières années ont manifesté leur détermination à lutter contre l'insécurité routière. Ainsi, la loi du 10 juillet 1989 a institué le permis à points, que l'opposition de l'époque jugeait trop répressif ; la loi du 18 juin 1999 a créé le délit de grand excès de vitesse, que la même opposition rejetait au motif que le retrait automatique de six points portait atteinte de manière excessive, selon elle, à la liberté individuelle.

M. Gérard Delfeu. Eh oui !

M. Jacques Mahéas. Attention, là encore, aux surenchères : c'est un peu désormais à qui sera le plus sécuritaire !

S'agit-il d'augmenter le nombre des automobilistes en prison ? Pourquoi vouloir renforcer le quantum des sanctions ? Ce ne sont pas, en général, les sanctions qui rendent une loi opérante dans notre société ; sinon, il n'y aurait plus de criminels ! Ce qui limite le nombre d'actes criminels, ce sont les valeurs transmises par l'éducation, la pression de l'organisation sociale et l'adéquation entre la faute et la peine encourue.

L'insécurité routière n'est pas une fatalité, mais un fléau à combattre sur son terrain : la route. Dire, à propos de l'inflation des sanctions, qu'il ne s'agit « évidemment que des peines maximales et qu'en conséquence les juridictions répressives doivent apprécier dans chaque cas d'espèce la sanction à appliquer » ne résout rien. Cette inflation est le témoignage de la croyance propre à la droite dans le tout-sécuritaire. Ces peines maximales seraient destinées à faire prendre conscience de la gravité des actes de violence routière. Mais les peines maximales étaient-elles auparavant connues ?

C'est une affaire de responsabilisation et de pédagogie. Au lieu d'alourdir l'arsenal répressif, appréhendons la politique de sécurité routière de manière globale : faisons jouer la responsabilité du conducteur - par la formation, la prévention et, si nécessaire, la sanction -, mais aussi celle des constructeurs automobiles, qui continuent de présenter la voiture comme un véhicule entièrement sécurisé et sans danger.

Enfin, deux dispositions n'ont absolument pas leur place dans ce projet : celles de l'article 24 et celles qui figurent dans l'amendement de M. Garraud, auquel M. Perben s'est déclaré très favorable à l'Assemblée nationale. Le statut des embryons et l'encellulement individuel n'ont rien à voir avec la sécurité routière ! Des décisions prises sur ces deux points dépendra notre vote.

Tout d'abord, l'article 24 vise à réduire à néant un principe essentiel. L'encellulement individuel ne serait plus obligatoire, que ce soit à la demande du détenu ou en raison des contraintes liées à la personnalité de celui-ci, à l'organisation de sa formation ou de son travail ainsi qu'à « la distribution intérieure de la maison d'arrêt ou au nombre de détenus ». Autant dire que l'encellulement individuel n'est plus !

La proposition faite par la commission d'un moratoire de cinq ans me paraît en comparaison constituer une petite avancée. Cependant, ce texte ne doit pas être l'occasion de faire passer en catimini une décision qui mérite un vrai débat sur un sujet qui est « une honte et une humiliation pour notre pays ». Rappelez-vous : ce sont les termes de notre propre commission d'enquête.

Vous nous dites que les prisons sont encombrées. Aussi envisagez-vous comme solution une augmentation du nombre de places. Bien ! Le parc pénitentiaire est en voie de modernisation, mais cela sera-t-il suffisant pour que les prisons françaises ne soient plus ce qu'elles sont actuellement ? Vous êtes-vous demandé pourquoi elles sont continuellement sur le point d'exploser ?

Il faudrait trouver de vraies solutions, car ce sont les modalités d'enfermement actuelles qui aboutissent à ce résultat. Aujourd'hui, à quoi sert la prison ? Loin d'en sortir meilleur, on se retrouve endurci, déstructuré, brisé, résigné à survivre dans l'assistanat, avec la haine au coeur, résolu à se venger des humiliations subies.

Et que dire des suicides ? On en a dénombré 120 dans nos prisons en 2002. Et, bien sûr, je parle du suicide des prisonniers, mais n'oublions pas le personnel de l'administration pénitentiaire qui, confronté jour et nuit à une relation difficile, voire explosive, avec les détenus, est lui aussi une victime ! Et ce ne sont pas quelques spots à la télévision entonnant : « La prison change, changez-la avec nous » qui vont résoudre le problème de la dévalorisation de ces professions, celui des effectifs ou de la surcharge de travail. Les personnels récemment recrutés ne se résoudront pas à être des porte-clés ou des agents de sécurité. L'administration pénitentiaire est consciente de la nécessité d'une vraie loi pénitentiaire, adaptée à son temps.

Le problème posé par la prison ne se résout pas seulement par de nouvelles constructions et il se résoudra encore moins à l'occasion du vote d'un article sur la sécurité routière !

Peut-être devriez-vous penser à incarcérer moins, à utiliser davantage les sanctions dites alternatives à l'incarcération : travaux d'intérêt général, placement sous surveillance électronique, semi-liberté. Peut-être aussi faudrait-il cesser de prendre les prisons pour des hospices, en y enfermant des malades atteints de souffrance psychiatrique ou des toxicomanes qui n'y trouveront pas, c'est sûr, l'environnement favorable à une prise en charge thérapeutique.

Il y a plus de deux siècles que le problème des prisons se pose, depuis que la « peine de prison » a pris, dans le code pénal, la place que l'on sait : c'est la sanction de référence.

Alors, à quand une vraie loi pénitentiaire ? (M. Robert Badinter approuve.) A quand une prison où le détenu, après avoir purgé sa peine, pourra, à sa sortie, retrouver ou trouver dans la société des hommes une place où il pourra s'épanouir et se sentir utile ? N'est-il pas temps de reprendre le projet de loi pénitentiaire élaboré en 2001, après une large concertation régionale et nationale, par les services de Mme Lebranchu, alors ministre de la justice ?

Plus de 59 000 détenus - quel triste record ! - occupent déjà, dans des conditions qu'on n'ose imaginer, les 48 600 places des établissements pénitentiaires français. Si l'on n'y prend pas garde, on dépassera bientôt une surpopulation explosive : 121,7 %. Quel gouvernement pourrait ignorer ce danger ?

Au nom de la tolérance zéro, notamment dans ce projet de loi sur la sécurité routière, les petites peines de prison se multiplient, là où des mesures alternatives étaient prises auparavant. Les juges sont continûment incités à plus de sévérité. Sans doute y voit-on l'occasion de justifier la construction de places de prison : plus il y a de places et plus il y a de personnes enfermées !

Il est donc pervers d'utiliser le support d'un texte sérieux sur un sujet consensuel pour faire passer une disposition sans rapport avec le sujet.

Je désire aussi attirer votre attention sur la suppression d'une règle qui tient à coeur à tout le monde : il s'agit du respect d'un principe de dignité humaine, « un détenu une cellule », enfin inscrit dans la loi du 15 juin 2000. Ce texte prévoit que la distribution intérieure des maisons d'arrêt ou leur encombrement temporaire ne peuvent justifier que les prévenus ne soient pas emprisonnés individuellement. La mesure, introduite par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, était envisageable grâce à la diminution attendue du nombre de détentions provisoires et elle devait entrer en vigueur en juin prochain, soit trois ans après avoir été votée.

Si Mme Guigou, alors garde des sceaux, s'était opposée à son application immédiate, c'est qu'elle craignait, en toute honnêteté, de ne pas disposer des places nécessaires pour respecter la loi nouvelle et elle avait alors demandé un délai supplémentaire de deux ans.

Hormis cette divergence de vues, aucune voix ne s'était élevée contre le principe lui-même. Chacun savait que le défi allait être difficile à relever, mais tout le monde estimait que les enjeux en valaient la peine. Tout a été dit dès le mois de mars 1999. Personne ne peut donc prétendre qu'il ne savait pas à quoi s'en tenir !

Par ailleurs, nous nous élevons contre l'article 2 bis, qui crée le délit d'interruption involontaire de grossesse.

Cet article est juridiquement inacceptable dans le cadre d'une loi sur la sécurité routière. Bien sûr, je suis sensible à la peine que peut engendrer un accident de la circulation provoquant la perte d'un foetus. Mais la Cour de cassation, en séance plénière, a contesté l'imputation d'homicide involontaire lorsque les faits avaient provoqué la perte d'un enfant à naître ou d'un foetus au motif que cette disposition relève des textes particuliers sur l'embryon ou le foetus et non pas de la loi pénale.

Mais cela ne veut pas dire que la Cour ait constaté un vide juridique : d'après elle, le problème ne se pose pas, ce qui est différent.

Par ailleurs, avant d'introduire l'incrimination de l'article 223-12, il faut créer une incrimination générale sur la mise en cause de la vie de l'enfant à naître, et donc déterminer si l'enfant à naître est ou non une personne. On ne peut pas échapper à ce débat !

La Cour de cassation ne nous a jamais demandé, en tout cas, de créer un nouvel article 223-11 !

De plus, les dispositions incriminées renvoient au « consentement de la mère », alors qu'il n'est pas possible d'articuler cette notion avec les éléments constitutifs du délit.

Enfin, si le conducteur est le père, celui-ci sera-t-il incriminé ?

Ce débat ne peut avoir lieu dans le cadre d'une discussion sur la sécurité routière. Par conséquent, je vous conjure de retirer ces dispositions !

Cette manoeuvre n'augure rien de bon, au demeurant, à la veille du débat sur la bioéthique.

Pour conclure, ce projet de loi contient des dispositions que nous soutiendrons, mais on ne peut fermer les yeux sur l'existence en son sein de deux cavaliers ainsi que sur la faiblesse du volet consacré à la prévention, écrasé sous le poids des mesures répressives. L'intitulé du projet de loi est d'ailleurs éloquent : la conduite routière est désormais considérée comme un facteur de violence et tout conducteur comme un délinquant en puissance.

Ce n'est pas dans cet esprit qu'il faudrait agir : seule une politique de terrain, une politique concrète, visible, alliant éducation, prévention et répression nous permettra d'agir sur le long terme dans un domaine qui doit devenir la préoccupation majeure de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous sommes tous des victimes potentielles de la route. Aucun d'entre nous, en effet, ne peut aujourd'hui savoir s'il sera victime, demain, de ce fléau qualifié à juste titre par le Président de la République, le 14 juillet dernier, de « grande cause nationale ».

Le texte qui nous est proposé est-il seulement répressif ? On peut se poser la question, car la répression ne me paraît pas suffisante pour obtenir le résultat que nous espérons.

Comme vous, monsieur le ministre, je pense que ce fléau n'est pas une fatalité.

Qu'est-ce que la violence routière ? C'est d'abord et avant tout une marque d'incivilité, plus grave qu'un simple tag sur les murs puisqu'elle met en cause non seulement le non-respect de l'autre, mais aussi la vie même, qui est brisée, et parfois la destruction du milieu familial.

Dans cette intervention, je vous parlerai essentiellement des victimes, car elles n'ont pas, me semble-t-il, une place suffisante dans le présent projet de loi. Nous devrions avoir une pensée pour elles et je vous dirai pourquoi plus précisément tout à l'heure. Ce texte n'est-il pas destiné à en réduire le nombre ?

Permettez-moi tout d'abord quelques observations générales sur les paramètres de l'insécurité routière.

S'agissant de la peur du gendarme, M. le rapporteur souligne, à la page 12 de son excellent rapport, que le nombre des heures de contrôle sur les routes par les forces de l'ordre a diminué de 19 % entre 2000 et 2001. Il faut donc souhaiter, à cet égard, que la politique du ministère de l'intérieur et le redéploiement des forces de police et de gendarmerie puissent permettre des contrôles accrus.

Mais je n'oublie pas le financement des actions de sécurité routière, monsieur le ministre ! Comment concilier les besoins ressentis et chiffrés avec le gel des crédits de votre ministère, et plus particulièrement de ceux du département de la sécurité routière ? Soyez assuré que nous seront à vos côtés sur ce sujet.

Faut-il craindre aussi les effets de la décentralisation et du transfert des personnels des directions départementales de l'équipement aux départements, impliquant par exemple dans l'Orne la suppression de plus de 50 % des subdivisions ?

La sécurité routière, c'est aussi l'aménagement des routes et des autoroutes. Or le président du conseil régionale de Basse-Normandie, également président de la commission des lois du Sénat, me comprendra certainement si je pose la question : comment les départements, qui font déjà face à des charges sociales insupportables, pourront-ils assumer l'entretien et la restauration des routes alors que les ressources transférées ne seront probablement pas à la hauteur des besoins ?

Dans mon département de l'Orne, que vous connaissez bien, monsieur le président du conseil régional de Basse-Normandie, il n'y a à ce jour aucun kilomètre d'autoroute. Nous espérons une amélioration à l'avenir, parce que nous y avons consacré beaucoup de crédits, vous le savez bien.

Cependant, comment espérer une amélioration quand les travaux d'aménagement et de sécurité ainsi que l'exécution de certains contrats de plan Etat-région sont retardés en raison des restrictions budgétaires ? L'Orne, département rural, détient l'un des plus tristes records de France, celui des accidents de la route. De très nombreuses communes réclament, à juste titre, des aménagements de sécurité pour la traversée de leur bourg. Vous connaissez bien, monsieur le président du conseil régional - nous en parlons souvent -, Bourg-Saint-Léonard ou Saint-Denis-sur-Sarthon, zones de transfert entre l'Ile-de-France et la Bretagne et passage obligé pour de nombreux camions qui, régulièrement - on en compte au moins un par semaine -, se retrouvent dans un fossé ou viennent s'encastrer dans les habitations.

Parler de ce sujet devant le président du conseil régional de Basse-Normandie n'est pas innocent, parce j'espère qu'il saura ainsi soutenir notre action au niveau de la région ! (Sourires.)

Il faut donc absolument - c'est une priorité si nous voulons rester logiques et cohérents avec nous-mêmes - mettre des fonds à notre disposition et établir des priorités en fonction des zones « accidentogènes » pour les faire disparaître et contourner ce qu'une étude prospective de la DATAR a appelé « l'impasse de l'endettement ». Cette même étude mentionnait les chiffres de la sécurité routière, ou plutôt de l'insécurité routière. Notre pays n'est pas le meilleur élève de l'Europe en la matière - cela a déjà été dit -, même si l'on note une diminution sensible du nombre des accidents. Est-ce le fruit d'une meilleure application de la réglementation ? Nous pouvons nous interroger, comme l'a fait lui-même M. le rapporteur.

Peut-être est-ce aussi le fruit d'une prise de conscience des conducteurs et des actions de sensibilisation qui ont été menées. Sur ce point, je crois que nous devons poursuivre la politique entreprise.

Ne pensez-vous pas également, mes chers collègues, messieurs les ministres, qu'il faille considérer la sensibilisation, la prévention et, surtout, l'éducation à la civilité routière comme une priorité ? C'est pourquoi je vous proposerai d'adopter un certain nombre d'amendements visant à insérer dans le projet de loi un titre spécifique visant à la prévention des accidents.

Les actions d'éducation et de sensibilisation à la sécurité routière sont certes prévues, monsieur le rapporteur, aux articles 5 et 6 de la loi, mais en tant que peines complémentaires, ce qui ne m'apparaît pas suffisant.

Les jeunes d'aujourd'hui seront les conducteurs de demain. Il faut donc dès maintenant les sensibiliser dans le cadre scolaire, qui me paraît le plus adapté. A cet égard, il faut distinguer les enfants de la maternelle et du primaire - c'est là qu'on apprend le mieux et qu'on les sensibilise le plus - des adolescents qui fréquentent les collèges et les lycées.

Combien d'enfants ont connu un destin tragique en descendant d'un car scolaire, notamment en milieu rural, ou simplement en traversant la rue ? Nous ne pouvons pas rester indifférents devant ces drames et devons réfléchir pour alléger leurs conséquences.

J'ai donc déposé un amendement n° 89 visant à insérer dans le code de l'éducation nationale une disposition concernant l'éducation à la sécurité routière. Son adoption donnerait une base légale à l'action volontaire entreprise par Xavier Darcos, action dont les orientations ont été présentées en conseil des ministres le 2 avril dernier et qui a été confortée par les déclarations du président du comité des constructeurs français d'automobile, lequel a déclaré, dans le numéro d'avril de la lettre d'information de cette instance, que l'éducation routière constitue un apprentissage de la citoyenneté.

Un amendement n° 90 vise à ajouter le même dispositif au code de la route.

Dans le même ordre d'idée, j'ai déposé avec un certain nombre de mes collègues les amendements n°s 92 et 96 visant à compléter la formation des futurs conducteurs par des tests de premiers secours et, surtout, par l'introduction dans l'examen du permis de conduire de questions portant sur les sanctions pénales assorties aux délits routiers. Les futurs conducteurs seront ainsi avertis de ce qui les attend si, d'aventure, ils n'étaient pas sérieux dans leur conduite. Je crois à l'effet dissuasif de cette mesure.

Toujours au chapitre de la prévention, je proposerai également à la Haute Assemblée d'aider les familles désargentées qui n'ont pas les moyens de payer des cours d'auto-école à leurs enfants ou qui se limitent aux vingt heures réglementaires. Dans certains milieux, si des jeunes volent des véhicules et provoquent des accidents, c'est parce qu'ils veulent, eux aussi, avoir la joie de conduire une voiture.

Ne peut-on imaginer aussi un système de bourses ou d'aides pour leur assurer une formation suffisante dont dépendra peut-être leur sécurité, mais aussi la nôtre ?

Beaucoup de jeunes gens, comme j'ai pu le faire en mon temps, ont passé leur permis de conduire lors de leur service militaire, gratuitement donc. La fin du service militaire obligatoire a de facto supprimé cette possibilité de formation gratuite, le code de la route ne prévoyant, me semble-t-il, que des dispositions pour l'enseignement à titre onéreux.

Ma dernière interrogation concerne les victimes et leurs droits.

Le projet de loi concerne certes la répression, mais il doit aussi concerner la réparation, et ce chapitre n'est pas abordé. J'espère qu'il le sera un jour, tant il est d'une actualité permanente et brûlante, comme vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre, dans votre intervention.

Il s'agit de prévoir l'accès des familles aux procès-verbaux, pour que ces dernières n'attendent plus des mois avant de connaître les circonstances de la mort de leur enfant ou de leur proche.

Il convient également de donner la possibilité à la victime partie civile de faire appel, y compris de la sanction pénale. Cette mesure est réclamée dans toutes les matières et pas seulement pour ce qui concerne les accidents de la route.

« Les victimes sont en colère » ! C'est un titre que vous connaissez bien. Les victimes constituent des associations qui se battent, avec des moyens dérisoires et dans des circonstances souvent insoutenables, contre des compagnies d'assurance qui ont détourné l'esprit de la loi Badinter, qui est pourtant une excellente loi.

A titre d'exemple, l'association nationale « Victimes en colère » présidée par Mme Jéhanne Collard - elle réalise un travail remarquable, que vous avez souligné, monsieur le ministre - n'en peut plus d'être confrontée à des interlocuteurs irresponsables.

La première revendication des victimes que représente cette association est que la loi stigmatise la violence routière certes, mais surtout que la vitesse y figure clairement comme une cause aggravante. Cette mention figure bien dans le texte qui nous est proposé, mais au même titre que la conduite en état d'ébriété ou la violation manifeste d'une obligation de prudence.

Le présent texte instaure un seuil qui rend cette disposition totalement inefficace et peu crédible au regard des automobilistes. Plus grave, cette disposition est inapplicable par les tribunaux.

La vitesse excessive est la cause majeure de la mortalité routière car elle combine deux effets : d'une part, elle est, au même titre que l'alcool, une cause majeure d'accidents ; d'autre part, elle est, pour des raisons de physique cinétique, le facteur essentiel de la gravité des accidents.

Une étude du ministère britannique des transports indique qu'une élévation de 10 % de la vitesse accroît le taux des accidents de 20 %.

En France, les études du professeur Got indiquent qu'un renforcement des contrôles de vitesse permettrait de réduire d'au moins 1 000 par an le nombre des tués sur nos routes.

Les vitesses autorisées sur le réseau routier sont déjà maximales. Pourquoi introduire une certaine tolérance ?

De plus, on ne peut créer de symétrie entre les seuils de l'alcoolémie et ceux de l'excès de vitesse.

Le projet de loi, s'il reste en l'état, aboutira à ce qu'un automobiliste circulant à 110 km/h par temps de brouillard sur l'autoroute et provoquant un accident échappera aux circonstances aggravantes, de même que le chauffard qui percutera un abribus à 90 km/h en ville, tuant de jeunes enfants et leur mère, comme cela s'est produit, voilà quelques mois, en région parisienne. Ce texte est, de ce point de vue, insuffisant car il incite au dépassement des vitesses qui, comme je l'indiquais, sont déjà maximales.

Il va à l'encontre des objectifs de sécurité annoncés et attendus par les victimes.

Je ne peux pas croire qu'il ménage les constructeurs, qui sont peut-être inquiets. La vitesse est strictement limitée sur les routes américaines sans que l'industrie automobile n'en souffre, me semble-t-il.

Nous devons faire un choix politique. Mais les victimes attendent à juste titre que la vitesse soit à elle seule une cause aggravante et que le législateur marque sa fermeté en supprimant le seuil de dépassement de 50 km/h inscrit au projet et en le remplaçant par une disposition prenant en considération les circonstances de l'accident.

Messieurs les ministres, avant de conclure, je tiens à dire que, loin de m'être laissé convaincre par je ne sais quel lobby de victimes d'accidents de la route, j'ai, hélas ! connu dans ma famille un drame de la route. Mon gendre a été mortellement blessé par un chauffard en excès de vitesse, et ses deux jeunes enfants ont attendu plus de dix ans avant d'être indemnisés. Voilà pourquoi je m'exprime, sans passion, avec beaucoup de sérénité, mais aussi sans faiblesse.

Le chauffard, qui n'avait pas une égratignure, a écopé de six mois de prison avec sursis. Il conduit encore aujourd'hui, sans aucun contrôle et en toute impunité.

Quant au règlement des condamnations civiles, il a fallu attendre des années pour que le dossier soit soldé, les compagnies d'assurance ayant, dans ce cas - assez banal, je crois - joué la carte du temps contre les familles.

Autant que d'autres, je connais les ravages que peuvent faire les voyous de la route et je crois très sincèrement qu'il ne faut pas laisser le moindre espace de tolérance lorsque de tels agissements délictueux entraînent la mort d'innocents.

C'est à nous, législateur, de faire un signe fort. C'est bien ce que nous a demandé M. le Président de la République et ce qu'attendent les usagers de la route que nous sommes tous ici.

En tout état de cause, nous ne pouvons que vous encourager à poursuivre sur la voie dans laquelle vous vous êtes engagés, messieurs les ministres, voie que nous allons suivre avec vous. Mais nous entendons dans le même temps enrichir ce projet de loi du fruit de nos expériences et de notre volonté politique.

En tant que responsables de l'élaboration de ce texte, nous ne devons pas prendre le risque d'être, demain, complices d'un fléau.

C'est une grande cause nationale que M. le Président de la République nous presse instamment d'aborder, certes sans passion, mais sans indulgence et, surtout, sans faiblesse coupable. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'Union centriste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Arnaud.

M. Philippe Arnaud. Déclarée « priorité nationale », la lutte contre l'insécurité routière devient aujourd'hui un véritable engagement qui se traduit par une action politique déterminée, exprimée dans le projet de loi qui est soumis à notre examen.

Avec plus de 7 000 tués l'an dernier, les routes françaises détiennent un triste record et je ne peux donc, comme tout un chacun, que saluer l'initiative du Gouvernement.

Déjà depuis quelques mois - en fait, depuis l'annonce d'une série de mesures préconisées par le comité interministériel sur la sécurité routière en décembre et les campagnes publicitaires choc qui ont suivi -, on constate une réduction de 30 % des tués sur nos routes, et, pour le seul week-end pascal - considéré traditionnellement, hélas ! comme particulièrement meurtrier -, le nombre de morts a été divisé par deux.

Il faut donc persévérer et, sans aucun doute, adapter notre arsenal législatif ou réglementaire dans les domaines tant de la prévention et de la formation que de la répression, sans oublier la réglementation des équipements automobiles.

Le combat contre la violence routière - je préfère, pour ce qui me concerne, l'expression « combat pour la sécurité routière » - est et doit être le combat de tous et de tout instant.

Pourtant, c'est animé d'une certaine inquiétude que je rends aujourd'hui hommage à votre travail, messieurs les ministres : je m'interroge en effet sur les conséquences de la surenchère pénale que ce projet de loi semble consacrer.

Un durcissement des peines peut être un mal nécessaire, mais il faut aussi conserver à notre droit répressif une certaine cohérence afin de ne pas mettre à mal l'important effort de codification réalisé en 1994.

Suis-je moins coupable d'avoir violenté une personne âgée dans la rue pour lui voler son sac que d'avoir commis une erreur de conduite ayant entraîné un accident corporel ? La réponse apportée par le présent projet de loi à cette question semble positive.

C'est inquiétant et, à certains égards, je trouve cela assez choquant. C'est d'autant plus inquiétant que la solution pénale, même si elle fait partie - et doit faire partie - de la panoplie, n'est peut-être pas la plus efficace pour faire reculer le nombre des accidents graves.

Le recul spectaculaire du nombre d'accidents au cours des derniers mois est en grande partie dû à la légendaire peur du gendarme suscitée par la présence ostensible, sur les routes, de la police et la gendarmerie. A ce « décasernement » salutaire s'ajoute une prise de conscience collective et individuelle, liée à la large diffusion d'un discours de responsabilisation. A cet égard, la campagne de sensibilisation qui vient de s'ouvrir est assurément très positive.

Devons-nous pénaliser ? Peut-être. Mais il nous faut aussi et surtout éduquer, apprendre à conduire autrement. N'est-il pas temps de revoir les modalités de formation des professeurs d'auto-écoles et de mettre en oeuvre des méthodes d'apprentissage de la conduite plus rigoureuses, plus actives ? Ne devons-nous pas imposer, par exemple, que les premières heures de conduite s'effectuent sur des circuits et qu'un stage de maîtrise du véhicule en situation d'urgence soit obligatoirement inclus dans la formation au permis de conduire ?

Il nous appartient, mes chers collègues, d'apporter une réponse à ces questions, qui font d'ailleurs l'objet d'amendements.

A la question de savoir s'il nous faut pénaliser et créer un délit d'interruption involontaire de grossesse, je dis : Attention, prudence ! Ou risquons-nous d'aller ? Outre l'impéritie juridique, une telle mesure renvoie à des questions fondamentales, philosophiques, morales, éthiques - quelle est la nature de l'embryon ? Quel est son statut juridique ? - sur lesquelles nos sages, les experts en bioéthique, n'ont pas encore parfaitement tranché.

J'émets sur ce point, en l'état actuel de nos connaissances, d'expresses réserves. Ou alors, à quand une société de l'excès où une femme enceinte ayant glissé sur un parquet trop bien ciré et ayant perdu son enfant pourrait envoyer en prison la ménagère ou le technicien de surface trop zélé ? Prudence, prudence !

Messieurs les ministres, mes chers collègues, que les dispositions que nous nous apprêtons à voter ne nous fassent pas oublier une autre exigence : les pouvoirs publics sont tenus d'adapter les réseaux routiers au trafic.

Le Charentais que je suis parle en connaissance de cause. Avec la RN 10 et la RN 141, notre département détenait, en effet, le triste record de la gravité des accidents routiers, notamment entre les voitures et les poids lourds. Aujourd'hui, fort heureusement, les travaux réalisés sur ces deux routes nationales sont en cours, et ils devraient s'achever à l'expiration du plan.

Si nous n'avons pas peur de durcir la répression sur le conducteur, osons, messieurs les ministres, utiliser les technologies parfaitement fiables qui sont aujourd'hui à notre disposition.

Certains équipements, tel le limiteur de vitesse, rendraient la voiture plus active en matière de sécurité. Avec mes collègues de l'Union centriste, nous avons déposé un amendement sur ce point.

Vous l'aurez compris, j'approuve et je soutiens l'orientation du projet de loi en ce qu'il va créer un électrochoc, mais je suis réservé sur certains dispositifs de pénalisation que vous proposez, messieurs les ministres.

Au cours de ce débat, la voiture a été qualifiée à maintes reprises d'« arme ». Je regrette que l'on n'agisse que sur l'utilisateur de l'arme et que l'on ne s'attaque pas à l'arme elle-même pour la rendre moins offensive.

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je ne saurais conclure sans renouveler mes encouragements et mon soutien au Gouvernement et sans remercier la commission des lois et son rapporteur, M. Lucien Lanier, pour la remarquable qualité de leurs travaux. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, comme nous le savons tous, chaque jour, la route tue ou handicape, parfois pour la vie, et les jeunes sont souvent les premiers concernés.

Afin de nous sensibiliser, dans certains départements, des stèles transpercées symbolisant les silhouettes de vies trop rapidement arrachées à l'affection des leurs nous le rappellent. Sur certains itinéraires, on arrive à recenser cinq, voire sept silhouettes, pour le même accident.

Doit-on laisser l'insécurité routière, l'inconscience humaine, l'inacceptable l'emporter sur la vie, brisant à tout jamais des familles ?

Nous le savons tous, et nous pouvons le dire sans aucune démagogie : l'action du Gouvernement est exemplaire en ce sens ; les chiffres en témoignent.

Ces résultats laissent entendre que le grand public a pris conscience des risques de la route, mais rien n'est acquis pour autant.

C'est à juste titre qu'une grande majorité de Français estime que la vitesse excessive est l'une des causes majeures de l'insécurité routière, car la vitesse demeure la première cause de mortalité sur nos routes.

Certes, la répression est un élément indispensable, mais il ne suffit plus : nous ne devons pas attendre que la mort réveille notre civisme national. Alors que bon nombre de directives viennent régir plus que de raison certains domaines, pourquoi n'en est-il pas ainsi dans un domaine aussi important que celui de la sécurité routière ? Ne peut-on imposer à nos constructeurs des normes qui rendraient service à nos concitoyens, comme M. Philippe Arnaud vient de le suggérer ?

Que les autoroutes soient équipées d'équipements automatiques est indiscutablement une bonne chose en soi, mais elles ne sont pas les seuls espaces d'infractions : quid de nos routes nationales, de nos routes départementales ? Comment l'Etat entend-il remédier aux infractions commises au hasard de l'itinéraire ? En effet, on ne peut mettre des radars ou des policiers partout.

Permettez-moi d'élargir mon propos et d'oser une comparaison. Une certaine similitude peut être trouvée entre la pratique de la conduite automobile et celle du sport, par exemple celle du football : toutes deux sont réglementées, encadrées par des règles strictes, et requièrent une sportivité, un état d'esprit, mais aussi un sens du civisme particuliers.

Cependant, la comparaison doit s'arrêter là, car conduire un véhicule ne constitue pas un jeu. Bien au contraire, la conduite doit faire appel à un certain nombre de réflexes, de mécanismes. Une voiture n'est pas un jouet. C'est une machine capable de l'utile, de l'indispensable, du meilleur, mais aussi du pire.

L'action est positivement engagée ; il faut maintenant réfléchir à davantage de dissuasion, donc d'efficacité. Ne pourrait-on pas, monsieur le garde des sceaux, monsieur le ministre, imaginer un contrôle de nos routes et autoroutes par des voitures banalisées plus nombreuses - il en circule déjà - afin de contraindre nos concitoyens à une plus grande vigilance, à une plus grande prudence ? Ce serait une garantie nouvelle et supplémentaire. Comme dans le sport, que j'ai déjà cité en exemple, le contrôle serait une contrainte exercée en permanence et s'adaptant à la réalité.

La route ne peut être le lieu d'un défoulement, d'un dépassement de soi, d'une démonstration de ses forces ou de sa puissance ; au contraire, elle appelle chacun des automobilistes à une certaine vigilance, à une certaine prudence, à une grande attention. Une route n'est ni un sentier de randonnée ni une aire de jeux.

Pour que l'infraction soit identifiée, comme dans le sport, la mobilité de l'arbitre est indispensable. Cette mobilité a encore plus de raisons d'être là où il y a danger de mort.

Nous devons faire naître chez nos concitoyens un état d'esprit, un sentiment de responsabilité, qui aboutiront à l'affirmation d'une obligation et d'un devoir. Aujourd'hui, nous ne sommes plus à l'heure du choix : dans l'action de conduire, il y a un engagement. La liberté de circuler s'arrête où commence celle des autres. La route n'est pas un territoire conquis, elle n'appartient à personne : elle est le chemin de la communication et de la relation entre les hommes ; elle ne saurait en aucun cas être un lieu d'affrontement ou de pouvoir.

Cependant, si nous voulons que nos concitoyens respectent la règle du jeu, il ne faut pas non plus que l'Etat tombe dans l'excès inverse d'une trop grande banalisation de la répression et de la sanction. Le législateur ne peut ni ne doit encourager la généralisation, la mise en place des procès-verbaux de la facilité. Au moment où l'on souhaite simplifier la vie quotidienne des Français par une amélioration des démarches administratives, il serait contradictoire d'opposer un veto systématique à l'application d'une règle perçue comme trop rigide, particulièrement pour les toutes petites infractions de la vie de tous les jours.

Je ne cherche pas à donner des circonstances atténuantes aux adeptes des papiers oubliés ou égarés, des contrôles techniques dépassés depuis peu. Mais il faut appliquer la règle avec bon sens et pragmatisme. Lorsque la conduite devient irrespectueuse de la vie d'autrui, dangereuse, susceptible d'attenter à la vie humaine ou aux droits élémentaires de la personne, alors, il convient de frapper fort. Le modèle de la sanction doit être dissuasif pour être efficace. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, si vous le permettez, M. le garde des sceaux et moi-même allons nous partager les réponses. En effet, certains aspects des différentes interventions relèvent directement de la sécurité routière et des transports, alors que d'autres, qui concernaient les juridictions et les peines, sont du domaine de M. Perben.

Je remercierai d'abord M. Lanier de son intervention très complète. Elle révèle le spécialiste, le connaisseur, depuis de nombreuses années, des problèmes de sécurité routière.

Il a bien fait d'insister sur le caractère interministériel de ce projet de loi. M. le garde des sceaux et moi-même avons beaucoup travaillé, en bonne intelligence, avec le ministre de la santé, le ministre de l'éducation nationale et le ministre de l'intérieur, pour parvenir au texte qui vous est soumis et qui, je l'ai déjà souligné, a été largement amélioré par la commission des lois.

Monsieur le rapporteur, vous avez également rappelé, à juste titre, l'aspect pédagogique des sanctions. En effet, on dit toujours que les sanctions, c'est de la répression. Je crois pour ma part que la meilleure façon possible de les comprendre est de les considérer comme une incitation à ne pas commettre le délit. On arrive ainsi très vite à confondre prévention et répression, ou tout au moins à ne plus trop faire la distinction entre les deux.

Vous avez raison, monsieur le rapporteur, de souligner que ce texte a vocation à inscrire dans la durée la bonne tendance actuelle. Car une hirondelle ne fait pas le printemps : nous sommes aujourd'hui au mois d'avril, et c'est le huitième ou le neuvième mois où nous connaissons une réduction du nombre de tués et du nombre de blessés. Certes ! mais qu'est-ce que huit ou neuf mois ? Considérons les tendances dans la durée : des sauts qualitatifs très marqués se sont produits chaque fois que des mesures importantes ont été prises. Ce fut particulièrement vrai en 1973, quand, alors que l'on comptait 16 000 tués sur les routes de France, on a pu constater une baisse de 3 000 ou 4 000 du nombre de morts. Nous espérons aujourd'hui parvenir au moins aux mêmes résultats ; mais, au fur et à mesure que l'on progresse, on atteint des paliers qu'il est de plus en plus difficile de franchir. Quoi qu'il en soit, et vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur, nous sommes encore très loin des bons résultats obtenus, notamment, en Grande-Bretagne.

Madame Borvo, vous avez presque ironisé en objectant en substance que nous ne sommes pas des délinquants simplement parce que nous oublions de marquer un stop. Mais si ! Nous sommes aussi des délinquants ! Moi-même, je m'accuse aujourd'hui - et je pense ne pas être le seul à pouvoir le faire, hélas ! - d'avoir commis des délits routiers.

Mme Nicole Borvo. Vous m'avez mal comprise !

M. Gilles de Robien, ministre. Pourquoi la bonne perception du délit que nous avons commis nous a-t-elle échappé ? Probablement parce que, à cet endroit-là, il n'y avait pas de forces de police ou de gendarmerie et parce que, à ce moment-là, Dieu merci, il n'y avait personne sur la route pour matérialiser ce délit, pour qu'il devienne un accident automobile causant des blessés ou des tués.

Nous avons probablement tous commis, hélas ! des contraventions ou des délits qui sont restés sans conséquences. Ils n'ont pas été relevés ; n'empêche que tous, d'une manière ou d'une autre, devons faire amende honorable et, maintenant, nous montrer exemplaires sur la route.

Vous nous avez interrogés, madame le sénateur, sur le bridage automatique. Peut-être y viendrons-nous un jour. Ce qui, pour l'instant, nous importe, est de mettre l'accent sur le comportement, sur la responsabilisation du conducteur. Le problème serait-il résolu parce que tous les véhicules seraient bridés, par exemple à 130 km/h ? Je vous rappelle que la majorité des accidents surviennent non pas sur les autoroutes, mais sur les routes, dans un rayon de cinq, dix ou quinze kilomètres du domicile, c'est-à-dire sur des routes limitées à 90 km/h. Le bridage des véhicules à 130 km/h n'aurait donc qu'un effet relatif, ce qui ne nous empêche pas d'être tous partisans d'autres formes de limitateurs de vitesse, par exemple de régulateurs.

Vous avez également estimé que l'audit des infrastructures mettait en évidence une politique qui était quasi exclusivement une politique de la route. Je vous rappelle, madame le sénateur, que cet audit est une photographie de la politique passée, c'est-à-dire - je le dis sans aucun esprit de polémique - de l'héritage reçu, de l'ensemble des infrastructures promises, annoncées, en cours de réalisation, voire presque terminées pour certaines, je pense, par exemple, au TGV Est, au moins jusqu'à Baudrecourt. Si l'audit montre qu'une part trop belle est faite à la route, c'est là le résultat de la politique de mon prédécesseur, disons-le clairement !

Le rapport de la DATAR, en revanche, met en perspective ce qui pourrait être une politique des transports. Nous aurons ici même, au début du mois de juin, un débat sur les transports, à la suite duquel le Gouvernement vous proposera la politique des transports qu'il envisage. Vous verrez alors si l'accent sera mis sur la route ou si, au contraire, nous privilégierons l'ensemble des moyens de transport, notamment l'intermodalité et le fret ferroviaire.

Le projet de loi n'est pas un texte « tout répressif », et, disant cela, je réponds également à d'autres intervenants. Le permis probatoire, notamment, est l'une des grandes innovations que nous proposons. Il signifie que l'obtention du permis de conduire n'est pas définitive, mais qu'une longue expérience de la route est encore nécessaire pour apprendre par la pratique ce qu'est, par exemple, une distance de freinage, pour acquérir progressivement des réflexes. Le permis probatoire a donc une visée pédagogique et pratique, mais en aucun cas répressive.

M. Lardeux approuve le projet de loi, et je l'en remercie. Il souhaite que le taux retenu pour l'alcoolémie soit le taux zéro. (M. Gérard César lève les bras au ciel.) C'est un vrai débat que, bien sûr, j'accepte, et qui a déjà eu lieu - ce n'est un secret pour personne, puisque cela a fait l'objet d'articles parus dans la presse - au sein même du Gouvernement. Le Premier ministre s'est exprimé sur ce sujet en disant qu'aujourd'hui les taux de 0,5 gramme et 0,8 gramme seraient maintenus...

M. Gérard César. Très bien !

M. Gilles de Robien, ministre. ... et que nous ferions le point dans six mois, dans un an ou dans deux ans. Si l'expérience acquise au cours de cette période montre que c'est nécessaire, nous reviendrons alors sur cette mesure, comme sur d'autres, de façon à ajuster la législation aux véritables besoins. Nous avons donc choisi une démarche pragmatique...

M. Gérard César. Et cohérente !

M. Gilles de Robien, ministre. ... et cohérente.

Je remercie Mme Gautier de son approche très humaniste des phénomènes de l'accidentologie. Nous sommes là - vous l'avez souligné, madame le sénateur - pour éviter des drames, pour éviter les trop nombreuses victimes, que ce soient des adultes ou des enfants, pour que des jeunes qui ne demandent qu'à vivre ne soient pas fauchés par un chauffard en traversant la route et pour éviter que certains, parce qu'ils ont obtenu le permis, ne se croient autorisés à conduire vite ou à faire de l'esbroufe. C'est à ces jeunes que nous avons pensé en vous proposant le projet de loi.

M. Delfau a salué le bien-fondé de nombre des mesures contenues dans le texte, mais il réfute l'expression : « lutte contre la violence routière ». Nous assumons pleinement l'intitulé du projet de loi, monsieur Delfau, car il ne faut pas avoir peur des mots. Présenter les mesures pour la sécurité routière de manière positive peut certes avoir quelque chose de charmant, mais, aujourd'hui, nous sommes engagés dans une véritable bagarre contre la violence routière qui nécessite cette mobilisation ; car cette violence nous paraît avoir dépassé les limites.

Par ailleurs, je le répète, le dispositif n'est pas uniquement coercitif - n'oubliez pas le permis probatoire ! -, et les textes législatifs s'accompagnent toujours de textes réglementaires. Ainsi, M. Darcos et moi-même mettons l'accent sur la nécessaire formation à l'école, matérialisée par la délivrance de la fameuse attestation scolaire de sécurité routière en classe de cinquième et en classe de troisième, et sur le brevet de sécurité routière. L'école voit donc une montée en puissance de la pédagogie de la sécurité routière qui, je pense, va dans le bon sens.

Enfin, les dispositifs d'automaticité du relevé de l'infraction et de la sanction contribuent aussi à la dissuasion.

Vous avez également évoqué, monsieur le sénateur, la question des boîtes noires : nous y travaillons. Avec l'aide des constructeurs automobiles, nous évaluons le coût de l'installation d'un tel dispositif ou de puces qui donneraient des informations sur les événements qui se sont déroulés pendant les vingt ou trente secondes précédant un accident ou un choc.

S'agissant du bridage des véhicules, comme je l'ai déjà indiqué, la réponse doit être apportée sur le plan communautaire.

Depuis un an, j'ai participé à cinq ou six réunions des ministres des transports de l'Union européenne. Hélas ! Je n'ai pas encore entendu aborder ce sujet.

La France a présenté des propositions pour améliorer la sécurité des enfants dans les cars scolaires et pour réduire la durée pendant laquelle ils n'auront toujours pas de ceinture. Elle a obtenu - c'est une information que je vous livre - que ce délai soit fixé à cinq ans, alors que ses partenaires proposaient huit ans.

Vous affirmez, monsieur le sénateur, que la loi ne dit rien des infrastructures. Ce n'est pas tout à fait vrai, car le projet de loi traite des obstacles latéraux, qui, on le sait, provoquent de nombreuses victimes, même si ces dernières, par leur comportement, sont quelquefois responsables de leur glissade sur la chaussée. Les motards ont d'ailleurs beaucoup insisté sur la nécessité de supprimer les obstacles latéraux.

M. Mahéas se félicite de l'engagement de M. le Président de la République en matière de sécurité routière et de lutte contre la violence routière.

En ce qui concerne les chiffres, notamment ceux du budget, plus que dans le Journal officiel, c'est peut-être dans Le Canard enchaîné que M. Mahéas trouve ses sources, car j'y ai lu, en effet, un « écho » sur le gel des crédits. (M. Jacques Mahéas fait un signe de dénégation.)

Non, monsieur Mahéas ! Le budget de la sécurité routière augmentera en 2003 et représentera par rapport à 2002 une forte dépense supplémentaire de l'ordre de 15 % !

M. Jacques Mahéas. Nous vérifierons !

M. Gilles de Robien, ministre. Nous ferons les comptes à la fin de l'année : vous verrez alors que j'ai raison, et nous en tirerons les conséquences. Pour ce qui est de 2004, le budget de la sécurité routière ne connaîtra aucune diminution, je suis presque en mesure d'en prendre l'engagement aujourd'hui ; mais cela dépendra également du Parlement, et je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de m'y aider.

Quant à porter à 150 km/h la limitation de la vitesse sur les autoroutes, c'est de l'ordre de l'anecdote ! Un député, en effet, a émis cette idée. Pourquoi ? Parce que le ministre des transports italiens, M. Pietro Lunardi, avait proposé d'autoriser la vitesse de 150 km/h sur les autoroutes italiennes. Quelques jours plus tard s'est produit un accident épouvantable faisant vingt et une victimes : M. Pietro Lunardi est revenu sur sa proposition. En tout cas, je n'en ai plus entendu parler, ni en France ni en Italie.

Vous avez affirmé, monsieur Mahéas, que le projet de loi ne contenait aucune mesure de prévention. Je vous rappelle néanmoins l'instauration du permis probatoire. De plus, nous encourageons la conduite accompagnée en ramenant à deux ans la durée de probation du permis, qui, dans le cas commun, est de trois ans. Nous considérons en effet que la pratique de la conduite accompagnée, qui représente un apprentissage précoce et progressif de la conduite automobile, mérite récompense, et je pense que cette mesure aussi va dans le bon sens.

Monsieur Goulet, vous avez évoqué les budgets de la sécurité routière pour 2003 et pour 2004. Je vous répondrai très simplement : aidez-moi à obtenir le meilleur budget possible !

Je le rappelle, la sécurité routière est également liée à l'action des services du ministère de l'intérieur. Or, en janvier et en février, derniers mois pour lesquels nous disposons de statistiques, le nombre des contrôles portant sur l'alcoolémie et sur la vitesse a augmenté de plus de 30 % par rapport à la même période de l'année dernière. Je pense que cela n'est pas sans rapport avec les bons résultats obtenus, puisque nous enregistrons une diminution de 34 % du nombre de tués en janvier et de 35 % en février.

En ce qui concerne la décentralisation, la Constitution pose le principe selon lequel le transfert de compétences s'accompagnera du transfert des moyens correspondants. Nous n'avons donc pas de craintes particulières à avoir.

M. Daniel Goulet. Ah !

M. Gilles de Robien, ministre. Sur la vitesse, M. Goulet a délivré un message tout à fait émouvant compte tenu du deuil qui a frappé sa famille, et je partage son point de vue. C'est la raison pour laquelle nous centrerons toute notre campagne de communication - vous l'avez peut-être vue ces derniers jours - sur ce thème de la vitesse, non pas sur la vitesse qui tue, parce que c'est l'automobiliste qui la choisit et qui en est responsable, mais sur la vitesse qui est à l'origine d'accidents lorsque l'on prend des libertés avec elle.

La deuxième campagne, je vous en informe, sera consacrée à l'alcool, car celui qui boit est celui qui ne devrait pas conduire. L'alcool est en tout cas l'une des causes d'accidents.

Je vous remercie, monsieur Goulet, d'avoir également évoqué le sort réservé aux ayants droit des victimes, et vous savez de quoi vous parlez. Les dernières condamnations montrent que les magistrats ont pris conscience de l'acuité de cette question, qui sera probablement traitée par M. Perben.

M. Arnaud invite à la prudence dans l'application du dispositif répressif. Ayons confiance dans la justice pour faire preuve de nuance et pour utiliser les marges qui sont les siennes ! Pour ma part, ce sont les automobilistes que j'inviterai à la prudence plutôt que l'appareil judiciaire.

Grâce aux technologies nouvelles, nous entrons certainement dans l'ère d'une route et de véhicules plus intelligents et plus interactifs, par exemple au moyen de panneaux à messages variables ou d'une signlisation en temps réel.

J'ai visité l'INRETS, l'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité, maison de l'équipement qui fait de la recherche sur la sécurité routière.

C'était extrêmement intéressant. Par exemple, le GPS permettra aux automobilistes d'obtenir demain sur un petit écran, ou par transmission vocale pour qu'ils puissent ne pas quitter la route des yeux, des informations leur rappelant de respecter scrupuleusement les limitations de vitesse à tel endroit particulièrement dangereux. Ou encore, si le véhicule circule sur une route départementale où la vitesse est normalement limitée à 90 km/h, des indications leur préciseront, en fonction de la situation sur la route, de la fluidité du trafic ou de l'heure à laquelle ils circulent, comment mieux moduler leur vitesse. La recherche et la technologie peuvent donc contribuer à une meilleure prise de conscience et à une meilleure modulation des règles de conduite.

En tout cas, nous incitons fortement au développement du limitateur et du régulateur de vitesse ; nous travaillons avec les constructeurs au quotidien. L'Etat va donner l'exemple, puisque, le 1er janvier 2004, l'ensemble des véhicules du ministère de l'équipement sera doté d'appareils de régulation ou de limitation de vitesse au fur et à mesure de l'achat de véhicules neufs.

Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments de réponse que je voulais vous donner, étant entendu que d'autres vous seront apportés, certainement avec beaucoup de talent, par M. le garde des sceaux. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je souhaite simplement donner quelques éléments de réponse complémentaires de nature plus strictement juridique.

S'agissant du renforcement des peines encourues, madame Borvo, ce choix est clairement assumé par le Gouvernement. Il s'agit d'envoyer un message très clair de renforcement de la sévérité en matière de violence routière. Mais nombre de Françaises et de Français en ressentent également la nécessité, nous semble-t-il.

Comme l'a dit tout à l'heure Gilles de Robien, nous avons beaucoup travaillé avec les associations de victimes, les associations de familles de victimes, des psychologues, des psychiatres, des sociologues, ainsi qu'avec de nombreuses personnes qui ont longuement étudié le sujet : il apparaît clairement que la culture nationale eu égard à la violence routière doit changer. Cette remarque constitue un élément de réponse à d'autres interventions.

On ne peut pas dire que la route tue ou blesse par hasard. Quasiment à chaque fois, l'accident est dû à un comportement qui doit être assumé par celui qui en est responsable. Conduire en état d'ivresse, en ayant fumé du cannabis, ou en commettant manifestement un grand excès de vitesse, résulte d'un choix. L'accident n'est pas le résultat du hasard ; il faut bien intégrer cela dans notre culture. C'est ce type de comportement qui justifie la proposition du Gouvernement d'aggraver un certain nombre de peines.

Nous avons tous l'occasion de circuler sur les routes et nous voyons bien - pour employer un terme faible - la goujaterie d'un certain nombre d'automobilistes, qu'il s'agisse de vitesse, de manière de doubler ou de prise de risques pour les autres. J'ai la faiblesse de penser que l'aggravation des peines constitue un point de passage obligé si nous voulons lutter avec efficacité contre la situation actuelle.

Le présent texte a pour objet non pas de modifier les règles en vigueur, mais de faire en sorte qu'elles soient respectées, qu'il s'agisse des vitesses maximales, du taux d'alcoolémie, etc. La grande faiblesse de notre dispositif de sécurité routière réside dans le fait que nous affichons des règles, souvent sévères - quelquefois pas assez, selon certains -, sans nous donner les moyens de les faire respecter.

La question du prononcé de peines de prison ou de peines alternatives constitue un sujet très important. Comme vous le savez peut-être, M. Jean-Luc Warsmann, député des Ardennes, m'a remis, pas plus tard qu'hier, un rapport sur les modalités d'exécution des courtes peines et les alternatives à l'incarcération. Son analyse, comme d'ailleurs certaines analyses faites par l'inspection générale des services judiciaires, montre, par exemple, une baisse régulière, depuis cinq ans, du nombre de peines de travaux d'intérêt général décidées par les tribunaux.

Nous devons réagir face à cette situation. M. Warsmann a présenté une série de propositions, que nous sommes en train d'examiner. Il est vrai que l'exécution des peines constitue la grande faiblesse de notre système.

La non-exécution des peines alternatives conduit de plus en plus les tribunaux à prononcer des peines de prison. Or, si des peines alternatives avaient été mises en oeuvre de manière efficace dès la première infraction, on aurait sans doute évité la réitération des actes de délinquance et, par conséquent, la peine de prison.

Je partage donc tout à fait votre souci de voir se développer de nouveau les peines alternatives. Nous aurons sans doute l'occasion d'en reparler ici même.

Monsieur Lardeux, pour ce qui est du taux d'alcoolémie, le Gouvernement a fait le choix - Gilles de Robien l'a dit tout à l'heure - de ne pas changer les règles : il s'agit de faire en sorte qu'elles soient effectivement appliquées. L'avenir dira s'il faut les modifier.

En ce qui concerne la loi d'amnistie, j'ai souvenir des débats qui ont eu lieu ici même voilà bientôt un an. La dernière loi d'amnistie était très prudente sur un certain nombre d'infractions, en particulier les infractions routières. Il appartiendra aux candidats aux futures élections présidentielles de se prononcer clairement, avant les élections, sur leurs intentions en la matière, l'essentiel étant de tenir les mêmes propos avant et après l'élection.

M. Mahéas a posé une série de questions sur le renforcement des peines de prison. J'ai déjà dit un certain nombre de choses à ce sujet. A l'évidence, l'objectif du Gouvernement n'est pas de remplir les prisons d'automobilistes !

Je vous ai fait part des propositions formulées dans le rapport Warsmann, propositions que nous avons commencé à examiner depuis hier. Les infractions routières devraient précisément être l'occasion de développer les peines alternatives. Il s'agit là d'un domaine où, lorsqu'il n'y a pas récidive, il faut véritablement aller vers la peine alternative.

M. Gérard Delfau. Monsieur le garde des sceaux, me permettez-vous de vous interrompre ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je vous en prie, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, avec l'autorisation de M. le garde des sceaux.

M. Gérard Delfau. Le moment est important, car, à la suite de vos deux déclarations sur l'importance des peines alternatives, monsieur le garde des sceaux, le Sénat tout entier affirme une politique qui doit, sans aucun doute, être mise en oeuvre de façon urgente. La décrue regrettable des travaux d'intérêt général au cours de ces six ou sept dernières années, que vous avez soulignée, montre la nécessité de se remobiliser.

Toutefois, monsieur le garde des sceaux - et c'est pourquoi j'ai demandé à vous interrompre -, vous savez bien que l'une des raisons de cette décroissance est liée à l'absence de programme d'incitation pour les dépenses d'encadrement, qu'il s'agisse des associations ou des collectivités locales. La mise en oeuvre de la peine alternative nécessite un ensemble de professionnels chargés d'une responsabilité, capables d'en répondre, et disposant des moyens financiers pour ce faire.

Je souhaite donc savoir, à cet instant du débat, si, dans le rôle qui est le vôtre, monsieur le garde des sceaux, s'agissant des problèmes de justice, vous avez un projet à ce sujet.

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. La question est très large et mériterait un débat en elle-même. Je dirai simplement que, dans le cadre de la loi d'orientation dont nous avons débattu l'été dernier, de nombreuses créations de poste sont prévues pour l'ensemble des systèmes de protection judiciaire de la jeunesse.

Par ailleurs, nous allons analyser de façon précise les constats dressés par M. Warsmann et les équipes qui ont travaillé avec lui.

Les processus de décision doivent également faire l'objet de simplifications, afin de favoriser l'exécution des peines, en particulier des peines autres que la prison.

En ce qui concerne l'encellulement individuel - nous aurons certainement l'occasion d'en parler lors de l'examen de l'article 24 -, l'intention du Gouvernement n'est pas du tout, monsieur Mahéas, de le reporter aux calendes grecques.

C'est sans doute avec raison que le législateur a posé le principe de l'encellulement individuel en 2000. Depuis un an, j'essaie de gérer le mieux possible la situation de l'univers carcéral. Mais la date d'application du dispositif au 1er septembre prochain, qui avait été fixée par l'ancien gouvernement, me paraît quelque peu irréaliste.

En matière d'administration pénitentiaire, vous le savez, j'ai le devoir d'accueillir les prévenus et les condamnés qui font l'objet d'une mesure d'incarcération. Dans l'état actuel des choses, l'encellulement individuel est un voeu pieux.

Votre commission a proposé une rédaction différente de celle de l'Assemblée nationale. Nous en discuterons ! Pour ma part, cette rédaction ne me pose pas de problème particulier. Simplement, je demande un délai pour prendre les mesures nécessaires.

J'aurais été très heureux que le gouvernement précédent mette en oeuvre plus rapidement un programme de construction de places de prisons. Cela nous aurait permis de tenir le délai qu'il s'était fixé à lui-même, pensant peut-être qu'il appartiendrait à d'autres de le respecter.

S'agissant de l'amendement présenté par M. Garraud et relatif à l'avortement subi, nous aurons l'occasion d'en débattre, mais, à ce point de notre discussion, je suggère que l'on ne se trompe pas de débat sur le plan du droit.

M. Gérard César. Exactement !

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le texte qui a été voté à l'Assemblée nationale, à la demande de M. Garraud, ne vise absolument pas à définir le statut de l'embryon.

MM. Nicolas About et Gérard César. Bien sûr que non !

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Dans cette affaire, la personne protégée est non pas l'embryon, mais la mère, car c'est elle qui subit un préjudice. C'est tout à fait différent ! Ce manque de protection pénale avait été relevé par la Cour de cassation dans son rapport annuel de 1999. Par conséquent, il ne s'agit pas de l'invention d'un parlementaire ! Ce vide juridique avait été souligné par les professionnels du droit.

Il est une autre remarque que je ne peux pas accepter en tant que ministre de la justice : le bien-fondé des infractions involontaires. On ne peut pas tenir ce raisonnement ! Nombre d'infractions, notamment en matière routière, mais pas seulement, dépendent des conséquences de la faute involontaire. Par conséquent, qu'on ne me dise pas aujourd'hui que cette mesure, qui émane du reste d'un parlementaire, représente une innovation juridique extravagante. Notre code pénal comporte une série de dispositions du même type.

Enfin, dans le texte de l'Assemblée nationale, la faute d'imprudence doit être « caractérisée », par référence à un article que certains connaissent bien dans cet hémicycle - je pense, en particulier, à Pierre Fauchon : l'article 121-3 du code pénal relatif à la responsabilité. C'est bien de cela qu'il s'agit !

Je tenais à apporter cette précision afin que l'on ne se trompe pas de débat. Le Sénat décidera de la position qu'il souhaite adopter sur ce texte, mais il convenait de bien clarifier les enjeux en matière de sécurité routière.

M. Goulet a souhaité que les victimes soient davantage prises en considération. Il a raison ! L'action que je mène depuis quelques mois tend à remettre les victimes au coeur du débat.

C'est ainsi que nous avons commencé à améliorer le soutien aux victimes dès le dépôt de plainte. Nous avons aussi prévu la possibilité de recourir à un avocat grâce à l'aide juridictionnelle, l'amélioration de l'écoute par les juridictions, l'information de la victime au cours du procès pénal, ainsi qu'un meilleur fonctionnement de l'expertise, qui est une nécessité absolue. A cet égard, ce que vous avez dit sur l'aspect civil est également très important et nous devrons effectivement poursuivre le travail de reconnaissance de la victime dans notre système juridique.

En ce qui concerne la surenchère pénale, en quelque sorte, qui a été évoquée par certains, je rappellerai simplement à M. Arnaud que les infractions routières les plus graves ne procèdent pas de comportements anodins. Conduite en état d'ivresse, vitesse excessive, usage de stupéfiants, conduite sans permis, donc mise en danger de la vie d'autrui, tous ces comportements sont le résultat non pas du hasard, mais d'une volonté, ou plutôt d'une absence de volonté, et ils doivent donner lieu à sanction. Il s'agit là d'un élément important que je me devais de rappeler à l'occasion de ce débat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. Dans mon intervention précédente, je n'ai pas répondu à M. Jean Boyer, qui a beaucoup insité sur l'intérêt des voitures banalisées. A l'évidence, c'est une bonne idée, qui est d'ailleurs en cours de mise en place : il existe déjà des voitures et des motos banalisées. Plus tard, nous disposerons de systèmes de relevés d'infractions embarqués dans le véhicule avec automaticité de la sanction.

Aujourd'hui, quelques dizaines de véhicules, autos et motos, sont concernés. Dans les années à venir, nous assisterons à une montée en puissance de ce dispositif qui, évidemment, est extrêmement dissuasif et répond à la nécessité de faire perdre cette espèce de sentiment d'impunité à ceux qui pensent que, en l'absence d'appels de phares - disons les choses crûment - ou d'uniforme à l'horizon, tout est permis !

Eh bien ! sachons tous que nous pouvons nous retrouver, à un moment donné, à côté d'une voiture qui relèvera une infraction. Quelques jours après, nous serons informés de la sanction par La Poste et, le cas échéant, dans cette hypothèse fâcheuse - que j'exclus ici, bien sûr, compte tenu de l'esprit citoyen qui règne dans cet hémicycle, nous serons convoqués pour l'exécution de cette sanction.

(M. Guy Fischer remplace M. Daniel Hoeffel au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. GUY FISCHER

vice-président

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Division et articles additionnels avant le chapitre Ier

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière
Chapitre 1er

M. le président. L'amendement n° 88, présenté par MM. Goulet, Lardeux et César, est ainsi libellé :

« Avant le chapitre Ier (avant l'article 1er), ajouter une division additionnelle ainsi rédigée :

« Chapitre...

« De la prévention ».

M. Lucien Lanier, rapporteur. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Monsieur le président, je demande la réserve de cet amendement jusqu'après la discussion des amendements n°s 89, 90, 91 et 92, qui donneront, le cas échéant, un contenu à cette division additionnelle.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?

M. Gilles de Robien, ministre. Favorable.

M. le président. La réserve est ordonnée.

Je suis saisi de deux amendements, qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 89, présenté par MM. Goulet, Lardeux et César, est ainsi libellé :

« Avant le chapitre Ier (avant l'article 1er) ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

« Avant la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 111-2 du code de l'éducation, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Dans le cadre de la formation scolaire, il recevra à la fois au sein de l'enseignement primaire et de l'enseignement secondaire un enseignement portant sur la sécurité routière approprié à son âge. »

L'amendement n° 90, présenté par MM. Goulet, Lardeux et César, est ainsi libellé :

« Avant le chapitre Ier (avant l'article 1er) ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

« Avant le chapitre 2 du titre Ier du livre 2 du code de la route, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Dans le cadre de la formation scolaire les enfants recevront à la fois au sein de l'enseignement primaire et de l'enseignement secondaire un enseignement portant sur la sécurité routière approprié à leur âge. »

La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Je voudrais tout d'abord remercier M. le rapporteur. En effet, en demandant la réserve de l'amendement n° 88, il préjuge le bien-fondé des amendements n°s 89, 90, 91 et 92.

Ceux-ci s'inscrivent tout naturellement dans la proposition contenue dans l'amendement n° 88, proposition qui invite le Sénat à rester dans sa logique de bon sens et à réfléchir à cette grande cause nationale, comme le Président de la République nous y a incités. C'est plutôt une bonne nouvelle, monsieur le rapporteur. En effet, la prévention en ce domaine est déterminante, comme nous le savons, pour mener des campagnes de prévention destinées à combattre d'autres fléaux.

Mais, après avoir salué la méthode adoptée par M. le rapporteur, j'en viens maintenant aux deux amendements.

La sécurité routière est une forme d'incivilité. Il faut donc former les enfants à respecter les règles qui sont établies, et ce alors qu'ils sont trop souvent les premières victimes des chauffards. C'est pourquoi le cursus scolaire doit intégrer cet enseignement au même titre que l'instruction civique.

Si l'article 6 du projet de loi institue une peine complémentaire en cas d'infraction commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule, l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière est tout à fait indiquée. Cette obligation sera d'autant moins nécessaire a posteriori que la sensibilisation aura eu lieu plus tôt.

Cette prévention à l'adresse de nos jeunes enfants me paraît donc indispensable. Des enfants sensibilisés à la sécurité routière ne manqueront pas, sur la route des vacances, de rappeler leur papa à plus de prudence, comme ils l'auront appris à l'école, peut-être pour le plus grand profit du père ! (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. Monsieur Goulet, vous savez le respect et l'estime dans lesquels vous tiennent la commission des lois et son rapporteur, qui savent reconnaître, derrière l'éthique de l'enseignant, sa passion de faire partager de nobles idées aux enfants. J'ai donc écouté avec beaucoup d'intérêt votre présentation des amendements n°s 89 et 90.

L'amendement n° 89 vise à introduire dans la loi l'obligation de dispenser, dans le cadre scolaire, une formation de sécurité routière. Or, depuis que je siège au Sénat et à la commission des lois, j'ai toujours remarqué le soin que prenait cette commission de ne pas « bourrer » la loi de dispositions d'ordre réglementaire. Et c'est de bonne et sage méthode que de lutter contre une certaine propension à vouloir faire dire à la loi ce qui, en définitive, relève du règlement, et totalement du règlement.

La disposition que vous proposez d'inscrire dans la loi est déjà prévue par le décret du 12 février 1993 relatif à l'enseignement des règles de sécurité routière et à la délivrance du brevet de sécurité routière.

Par ailleurs, des attestations scolaires de sécurité routière peuvent d'ores et déjà être délivrées aux élèves des classes de cinquième et de troisième, ainsi que le brevet de sécurité routière. Ces formations seront renforcées. Elles constitueront, en effet, une étape importante de l'apprentissage de la sécurité routière.

Enfin, pour les jeunes qui atteindront l'âge de seize ans à compter du 1er janvier 2004, le brevet de sécurité routière, qui comprend l'attestation scolaire validée en classe de cinquième et une formation pratique de trois heures, sera nécessaire pour conduire un cyclomoteur. De même, pour ces mêmes jeunes, l'attestation scolaire de deuxième niveau obtenue en classe de troisième sera indispensable pour se présenter à l'examen du permis de conduire.

Laissons donc au Gouvernement le soin de parfaire dans le temps l'enseignement même de la sécurité routière, et laissons à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche le soin de savoir dans quelle mesure il peut compléter l'enseignement et jusqu'où il peut aller.

La commission, qui vous invite à la prudence, mes chers collègues, a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, bien qu'elle reconnaisse son bien-fondé et la générosité qui anime son auteur.

L'amendement n° 90 suscite les mêmes observations dans la mesure où il vise à inscrire dans la loi l'obligation de dispenser, dans le cadre scolaire, une formation de sécurité routière. Le débat qui s'est engagé à ce sujet au sein de la commission des lois n'a pas été mené à la sauvette, monsieur Goulet, mais il en résulte que, comme pour l'amendement précédent, cette disposition relève du domaine réglementaire. Or, fidèle à sa tradition, la commission des lois ne souhaite pas que le règlement empiète sur la loi, parce que cela affaiblit la loi et donc son exécution.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 90 également.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Le Gouvernement remercie beaucoup M. Goulet d'avoir pensé à l'éducation, mais, dès l'école primaire, il existe déjà ce que l'on appelle l'APER, l'attestation de première éducation à la route. C'est tout un cursus en faveur de la sécurité routière qui se met ainsi en place.

Je vous rappelle encore qu'aux termes de l'article L. 312-13 du code de l'éducation, l'enseignement du code de la route est obligatoire et inclus dans les programmes. Votre préoccupation est légitime, monsieur le sénateur, mais vous pouvez être rassuré, elle est d'ores et déjà satisfaite.

M. le président. Monsieur Goulet, maintenez-vous vos amendements ?

M. Daniel Goulet. Je ne veux pas mettre dans l'embarras ni la commission ni mes collègues, qui - j'en suis sûr - approuvent les propos qui ont été tenus de part et d'autre.

En revanche, j'aimerais avoir l'assurance que M. Ferry et M. Darcos useront de leur pouvoir réglementaire pour faire en sorte que les enseignants, dans leur enseignement, insistent sur la prévention et la sécurité routières en tant que telles, plus qu'ils ne le font actuellement, comme je suis bien placé pour le savoir.

Monsieur le rapporteur, notre responsabilité est engagée ici, et je ne suis pas du tout sensible aux arguments qui me sont opposés. Cela étant, dans l'espoir que ce débat n'aura pas été inutile, j'accepte de retirer les deux amendements.

M. le président. Les amendements n°s 89 et 90 sont retirés.

M. Jacques Mahéas. C'est dommage !

M. le président. L'amendement n° 91, présenté par MM. Goulet, Lardeux et César, est ainsi libellé :

« Avant le chapitre Ier (avant l'article 1er), ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

« Avant le chapitre 2 du titre Ier du livre II du code de la route, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - L'enseignement de la conduite pourra faire l'objet d'une prise en charge, en toute ou partie, selon les conditions fixées par décret, lorsque des candidats potentiels justifient qu'ils ne disposent pas de moyens financiers nécessaires.

« Des bourses pourront être attribuées selon des critères fixés par décret. »

La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Songeant, notamment, aux nombreux jeunes de nos banlieues sortis du système scolaire et dont les familles n'ont pas de moyens financiers suffisants pour leur permettre de passer leur permis de conduire, j'ai souhaité, par cet amendement, qu'une aide substantielle puisse leur être accordée.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. L'amendement de M. Goulet tend à instituer un système de bourse pour aider les personnes qui n'en ont pas les moyens à assumer le prix d'une formation au permis de conduire. A titre d'information, je rappelle que, en 2000, 3 600 jeunes ont bénéficié d'une aide financière au permis de conduire dans le cadre d'une politique d'insertion sociale et professionnelle. Lors de sa réunion du 25 octobre 2000, le comité interministériel de sécurité routière a décidé de porter ce nombre à 5 000 par an. Des actions sont donc déjà sérieusement menées en ce domaine.

En outre, mon cher collègue, la commission a remarqué que le coût de la mesure que vous proposez n'a fait l'objet d'aucune évaluation, ce qui lui fait craindre que l'article 40 de la Constitution ne soit invoqué à l'encontre de votre amendement.

C'est la raison pour laquelle, avec regret d'ailleurs, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur Goulet, auparavant, des droits devaient être acquittés pour pouvoir passer le permis de conduire ; ils ont été supprimés, ce qui constitue déjà un progrès.

Par ailleurs, la mesure que vous proposez créerait une charge supplémentaire pour l'Etat, avec les risques constitutionnels que cela comporte.

Je rappelle, au surplus, que le Fonds social européen finance des actions d'insertion par le permis de conduire au bénéfice des jeunes en difficulté. Ce dispositif est utilisé dans le cadre, notamment, de la politique de la ville.

Voilà quelques précisions de nature à vous satisfaire en partie, monsieur le sénateur.

M. le président. Monsieur Goulet, l'amendement est-il maintenu ?

M. Daniel Goulet. Cet échange n'a pas été inutile, puisque nous avons pu obtenir des informations sur une question qui me préoccupait, comme sans doute un certain nombre de mes collègues. Les propos tant de M. le rapporteur, tout à fait explicites, que de M. le ministre me suffisent. Par conséquent, je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 91 est retiré.

L'amendement n° 92, présenté par MM. Goulet, Lardeux et César, est ainsi libellé :

« Avant le chapitre Ier (avant l'article 1er), ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

« Avant le chapitre 2 du titre Ier du livre II du code de la route, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Devront figurer aux questionnaires simples ou à choix multiples des épreuves du permis de conduire des questions relatives aux sanctions pénales infligées en cas de violation des dispositions du code de la route. »

La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Nous ne sommes plus cette fois dans la prévention à l'école ou l'aide financière pour le permis de conduire : cet amendement vise le livre II du code de la route. Il s'agit simplement de faire figurer aux questionnaires simples ou à choix multiples des épreuves du permis de conduire des questions relatives aux sanctions pénales prévues au cas de violation des dispositions du code de la route, cette disposition permettant aux candidats d'être mieux informés de la sanction qu'ils encourent. On peut croire à l'effet dissuasif d'une telle démarche et à une prise de conscience des peines encourues.

Cette disposition n'est pas inutile. D'expérience, je sais qu'il serait bon qu'elle puisse être institutionnalisée.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. L'amendement tend à préciser les types de questions qui doivent figurer dans le questionnaire de l'épreuve théorique du permis de conduire. A l'évidence, de telles dispositions sont actuellement de nature réglementaire et même infraréglementaire, c'est-à-dire qu'elles relèvent du domaine de la circulaire.

Des questions relatives aux sanctions pénales en cas d'alcoolémie figurent d'ailleurs déjà aux épreuves de l'examen théorique du permis de conduire. Autant de raisons pour lesquelles je souhaiterais, monsieur Goulet, que vous acceptiez de retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Je voudrais compléter les propos de M. le rapporteur et rassurer M. Goulet : cette mesure existe déjà. Elle est effectivement de nature infraréglementaire, mais elle est d'ores et déjà appliquée.

M. Daniel Goulet. Dans ces conditions, je retire l'amendement !

M. le président. L'amendement n° 92 est retiré.

Je constate que, les amendements n°s 89, 90, 91 et 92 ayant été retirés, l'amendement n° 88 n'a plus d'objet.

Chapitre Ier

Répression des atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule

Division et art. additionnels avant le chapitre Ier
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Art. 1er

Article 1er

Chapitre 1er
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Art. additionnel après l'art. 1er

M. le président. Il est inséré, après l'article 221-6 du code pénal, un article 221-6-1 ainsi rédigé :

« Art. 221-6-1. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par l'article 221-6 est commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'homicide involontaire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende.

« Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 EUR d'amende lorsque :

« 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;

« 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;

« 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;

« 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;

« 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;

« 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir.

« Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 150 000 EUR d'amende lorsque l'homicide involontaire a été commis avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »

L'amendement n° 93, présenté par M. Goulet, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le septième alinéa (5°) du texte proposé par cet article pour l'article 221-6-1 du code pénal :

« 5° Le conducteur circulait à une vitesse excessive eu égard aux circonstances et compte tenu de la réglementation ; ».

La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Cet amendement mérite de retenir l'attention tout à fait particulière non seulement du Gouvernement mais aussi de la commission et de tous nos collègues, car il concerne un problème grave dont on pourrait sans doute débattre longtemps. Il s'agit de savoir si, oui ou non, il est important que la vitesse soit prise en compte en tant que circonstance aggravante.

Le projet de loi instaure en effet un seuil de tolérance qui permettrait aux conducteurs roulant à une vitesse supérieure à celle qui est autorisée d'être, en fait, protégés contre toute mise en cause de leur responsabilité.

Prenons l'exemple d'un conducteur qui circule à 50 km/h dans un village : il pourra circuler jusqu'à 100 km/h sans être pénalisé ! (M. le garde des sceaux fait des signes de dénégation.) Or la vitesse excessive, on le sait, est la première cause de la mortalité routière, pour des raisons de pure physique cinétique et surtout quand elle est combinée à l'alcool, autre cause d'accidents.

Hélas ! cette lutte nécessaire contre la vitesse s'inscrit en France dans un contexte très défavorable. En effet, la pratique des forces de l'ordre a contribué jusqu'à présent à installer une sorte de marge de tolérance dans la sanction des vitesses excessives. Ainsi, on ne verbalise plus qu'au-delà de 40 km/h ou 50 km/h au-dessus de la vitesse autorisée ; de surcroît, on sait que, de toutes les contraventions, ce sont celles qui ont été infligées pour excès de vitesse qui « sautent » le plus souvent.

Prenant acte de ce laxisme, les conducteurs français ne respectent plus les limitations de vitesse.

Dans un tel contexte, le projet de loi qui nous est soumis risque de légitimer le laxisme des années précédentes. Et je ne vois pas comment, si l'on pérennise les dérives actuelles, les conducteurs pourront être incités à la prudence ceux qui, de toute façon, seront protégés par cette tolérance de fait qui ruine l'objectif affiché d'une tolérance zéro.

C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas accepter le texte tel qu'il nous est soumis. Je propose donc que l'on ajoute un septième alinéa dans le nouvel article 221-6-1 du code pénal ainsi libellé : « Le conducteur circulait à une vitesse excessive eu égard aux circonstances et compte tenu de la réglementation. »

Je ne souhaite pas que l'on puisse maintenir cet « excès de vitesse autorisé » qui est une tolérance, à mon avis, néfaste.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. Mon cher collègue, le projet de loi prend en compte l'excès de vitesse de plus de 50 km/h au-dessus de la vitesse maximale autorisée dont il fait une circonstance aggravante du délit d'homicide involontaire. Cela figure dans le texte qui nous est proposé. C'est clair : lorsque la vitesse est limitée à 90 km/h, si vous roulez à 140 km/h et que vous causez un accident mortel, vous tombez sous le coup du délit d'homicide involontaire.

Le présent amendement prévoit, lui, que la circonstance aggravante est constituée dès lors que le conducteur « circulait à une vitesse excessive eu égard aux circonstances et compte tenu de la réglementation ». Cette rédaction est beaucoup trop imprécise, en tout cas certainement beaucoup plus imprécise que la référence à l'excès de vitesse de plus de 50 km/h ; elle remettrait donc en cause le texte qui nous est soumis.

La rédaction laisse en effet toute liberté d'appréciation aux juridictions en ce qui concerne les circonstances qui permettent de considérer qu'une vitesse est excessive. Or la loi pénale doit être extrêmement précise pour faire l'objet, sur tout le territoire, d'une application homogène et cohérente.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, mais peut-être M. Goulet acceptera-t-il de le retirer après les explications que je vais lui apporter.

Monsieur le sénateur, le présent article ne vise en aucun cas à considérer qu'un excès de vitesse inférieur à 50 km/h ne constitue pas une infraction. Il détermine les conditions d'aggravation des peines. Ces peines pourront aller, je le rappelle, jusqu'à dix ans de prison en cas d'homicide et sept ans de prison en cas de blessures. Il ne s'agit donc pas de peines légères. Il nous paraît indispensable que les motifs d'aggravation des peines soient clairement définis.

Or l'amendement de M. Goulet - et c'est la raison pour laquelle j'y suis défavorable - fait une trop grande part à la subjectivité et à l'indétermination, ce qui me paraît dangereux.

Le procureur doit administrer la preuve de ce qu'il avance. Comment pourra-t-il requérir eu égard à une vitesse excessive mais subjective ? C'est pourquoi nous avons défini précisément une circonstance aggravante en cas de grand excès de vitesse, soit 50 km/h au-dessus de la limite autorisée, qui rend possible le doublement de la peine.

Par conséquent, contrairement à ce que vous avez affirmé, monsieur le sénateur, cette rédaction n'a pas pour effet indirect d'autoriser les excès de vitesse inférieurs à 50 km/h. L'excès de vitesse reste punissable par ailleurs. Nous ne visons que les circonstances aggravantes.

Ces explications conduiront peut-être M. Goulet à retirer son amendement. En tout état de cause, le Gouvernement ne peut qu'y être défavorable.

M. le président. Monsieur Goulet, l'amendement n° 93 est-il maintenu ?

M. Daniel Goulet. Monsieur le président, j'ai été sollicité mais je ne suis pas convaincu. Il ne sera laissé en la circonstance, me semble-t-il, aucune appréciation au magistrat en cas d'accident pour lequel aucune circonstance atténuante ou aggravante ne serait retenue. Pouvez-vous me répondre brièvement sur ce sujet, monsieur le garde des sceaux, afin que je retire, le cas échéant, mon amendement ?

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Tout dépend de ce que vous entendez, monsieur le sénateur, par « appréciation du magistrat ».

S'agissant de la réquisition, il est évident que le procureur, s'il souhaite retenir l'existence de circonstances aggravantes, devra indiquer qu'il y a eu effectivement un dépassement de la vitesse maximale autorisée de 50 km/h. Ensuite, au niveau du parquet comme du tribunal, il reste une possibilité d'appréciation en fonction des circonstances et de la personnalité du délinquant, ce qui est la règle générale de toute juridiction.

M. Daniel Goulet. Je retire l'amendement !

M. le président. L'amendement n° 93 est retiré.

Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Art. 1er
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Art. 2

Article additionnel après l'article 1er

M. le président. L'amendement n° 65, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :

« Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Dans le I de l'article 234-1 du code de la route, les mots : "0,80 gramme par litre" sont remplacés par les mots : "0,10 gramme par litre". »

La parole est à M. Bernard Joly.

M. Bernard Joly. Cet amendement tend à ramener à 0,10 gramme par litre le seuil prévu par le code de la route pour caractériser le délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique.

Je suis l'élu d'un département qui est classé parmi les premiers du point de vue des accidents de la route, en particulier mortels. Cette année, on observe effectivement une amélioration de ce sombre tableau.

Je constate que la vitesse est mise en cause, et nombre de décisions ont été prises en ce sens, qu'il s'agisse des voitures banalisées, des radars, ... Bref une véritable armada ! Or, sauf dans les agglomérations, l'examen des affaires jugées devant les tribunaux fait souvent apparaître un problème d'alcoolémie. Toutefois, il y a beaucoup de mesures de surveillance de la vitesse, mais peu de l'alcoolémie.

J'ai entendu, à la suite d'une intervention de M. Goulet sur le même sujet, que le Gouvernement n'envisageait pas de diminuer le taux d'alcoolémie autorisé. Je connais donc le sort qui sera réservé à mon amendement. C'est dommage, car les jeunes Français sont capables d'adopter la même attitude que les jeunes nordiques, c'est-à-dire de choisir parmi eux un conducteur qui ne boive pas et qui soit chargé de les ramener sains et saufs.

Je devancerai donc les désirs du rapporteur et du Gouvernement.

M. Gérard César. Et de vos collègues ! (Sourires.)

M. Bernard Joly. ... en retirant mon amendement. Mais nous viendrons un jour à une telle disposition et ce refus, aujourd'hui, est regrettable. (M. Michel Dreyfus-Schmidt s'exclame.)

M. Gérard César. Le groupe de travail sur la viticulture de qualité est justement favorable à l'éducation du consommateur.

M. le président. L'amendement n° 65 est retiré.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, renforçant la lutte contre la violence routière.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 2.

Art. additionnel après l'art. 1er
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Art. 2 bis

Article 2

M. le président. « Art. 2. - I. - Il est inséré, après l'article 222-19 du code pénal, un article 222-19-1 ainsi rédigé :

« Art. 222-19-1. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par l'article 222-19 est commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 EUR d'amende.

« Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 EUR d'amende lorsque :

« 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;

« 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;

« 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;

« 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;

« 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;

« 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir.

« Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 EUR d'amende lorsque l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »

« II. - Il est inséré, après l'article 222-20 du même code, un article 222-20-1 ainsi rédigé :

« Art. 222-20-1. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par l'article 222-19 est commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail d'une durée inférieure ou égale à trois mois est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende.

« Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 EUR d'amende lorsque :

« 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;

« 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;

« 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;

« 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, suspendu ou invalidé ;

« 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;

« 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir.

« Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 EUR d'amende lorsque l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »

L'amendement n° 55, présenté par Mme G. Gautier et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :

« Après le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour insérer un article 222-19-1 dans le code pénal, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ces dispositions bénéficient pleinement aux individus ayant subi une atteinte à l'intégrité de leur personne antérieurement à leur naissance. »

La parole est à Mme Gisèle Gautier.

Mme Gisèle Gautier. Cet amendement vise à étendre à l'enfant à naître victime d'un accident de la route, en cas de séquelles physiques ou psychiques, le dispositif de l'article 2 relatif à l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne.

Je ne m'étendrai pas plus longuement sur ce sujet, que j'ai déjà évoqué tout à l'heure.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. L'objet de l'amendement présenté par Mme Gautier est tout à fait respectable, puisqu'il s'agit de prévoir que les dispositions du projet de loi relatives aux blessures involontaires s'appliqueront aux enfants venant au monde avec des séquelles physiques ou psychiques dues à un accident de la route survenu avant leur naissance.

Je suis heureux de pouvoir vous dire, madame Gautier, que cet amendement est satisfait par le droit actuel. En effet, dès lors que l'enfant naît vivant, des poursuites peuvent être engagées contre l'auteur des faits. Je vous invite donc, ma chère collègue, à retirer votre amendement.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Infans conceptus...

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Il est absolument conforme à celui de la commission.

La jurisprudence de la Cour de cassation est tout à fait claire : à partir du moment où l'enfant vient au monde, s'il a subi des malformations consécutives à un accident, cela emporte, en termes de responsabilité, les conséquences qu'évoquait à l'instant M. le rapporteur. C'est pourquoi il n'est pas du tout nécessaire de modifier la législation existante.

J'ajoute que, si cet amendement devait être maintenu et adopté, l'introduction d'une telle disposition à cet endroit du texte risquerait a contrario de poser problème. En effet, un doute pourrait apparaître à chaque fois que le cas de l'enfant à naître ne serait pas expressément visé. L'amendement présenté pourrait donc avoir un effet rigoureusement opposé à ce qui est recherché.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Notamment pour les successions !

M. le président. Madame Gautier, l'amendement est-il maintenu ?

Mme Gisèle Gautier. Pleinement satisfaite des explications qui m'ont été données, je le retire.

M. le président. L'amendement n° 55 est retiré.

L'amendement n° 94, présenté par M. Goulet, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le septième alinéa (5°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article 222-19-1 du code pénal :

« 5° Le conducteur circulait à une vitesse excessive eu égard aux circonstances et compte tenu de la réglementation ; ».

La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Au contraire de M. Joly, j'ai été satisfait tout à l'heure par les réponses qui nous ont été apportées, et j'ai retiré les amendements que j'avais déposés.

Cependant, n'étant pas, comme M. le ministre, M. le rapporteur et M. le président de la commission, un éminent juriste, je voudrais, afin de bien comprendre et d'apaiser une fois pour toutes ma conscience, demander s'il existe bien un délit de grand excès de vitesse.

Par ailleurs, le code de la route fixe des limites de vitesse. En conséquence, le fait, pour un automobiliste ayant causé un accident, de ne pas avoir respecté une telle limite constitue en quelque sorte une circonstance aggravante. Pourquoi alors avoir prévu un seuil de 50 km/h au-delà de ces limites pour caractériser le délit de grand excès de vitesse, ce qui apparaît, à mes yeux en tout cas, comme une forme de seuil de tolérance ?

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. Pour les mêmes raisons que tout à l'heure, s'agissant ici de blessures involontaires et non plus d'homicide involontaire, je vous demanderai, monsieur Goulet, de bien vouloir retirer cet amendement, qui mérite toutefois d'être discuté. La commission des lois ne peut que confirmer la position qu'elle a adoptée précédemment.

Quant aux circonstances dans lesquelles survient l'accident, n'oubliez pas que le texte laisse aux juges une très grande marge d'appréciation,...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pas du tout !

M. Lucien Lanier, rapporteur. ... puisqu'il ne fixe que des peines maximales. Certes, vous m'objecterez que l'on constatera des variations d'un juge à l'autre ; mais c'est là le propre de la justice. La faculté d'apprécier les circonstances est laissée au juge, qui est un être humain doué d'intelligence.

Telles sont les raisons qui m'incitent à vous demander de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Goulet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. J'indiquerai, en réponse à la question de M. Goulet, que nous avons repris la définition du délit de grand excès de vitesse pour établir celle de la cinquième circonstance aggravante. C'est rigoureusement là ce que nous avons fait.

Cependant, le code de la route prévoit par ailleurs des limites de vitesse dont le dépassement est bien évidemment sanctionné, le délit de grand excès de vitesse étant constitué en cas de dépassement de 50 km/h ou plus de la vitesse maximale autorisée. Nous avons repris cette dernière définition pour les raisons que j'ai indiquées tout à l'heure, afin de caractériser de manière très précise une circonstance aggravante susceptible d'entraîner le doublement de la peine.

M. le président. Monsieur Goulet, l'amendement est-il maintenu ?

M. Daniel Goulet. Je finirai par comprendre ! Cela étant, mettons un terme à cette discussion. Je retire l'amendement.

M. le président. L'amendement n° 94 est retiré.

L'amendement n° 56, présenté par Mme G. Gautier et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :

« Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour insérer un article 222-20-1 dans le code pénal, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ces dispositions bénéficient pleinement aux individus ayant subi une atteinte à l'intégrité de leur personne antérieurement à leur naissance. »

La parole est à Mme Gisèle Gautier.

Mme Gisèle Gautier. Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 56 est retiré.

L'amendement n° 1, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après les mots : "été annulé,", rédiger comme suit la fin du sixième alinéa (4°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article 222-20-1 du code pénal : "invalidé, suspendu ou retenu ;". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec d'autres dispositions du projet de loi, une circonstance aggravante étant retenue, en cas d'homicide involontaire, lorsque le responsable de l'accident conduisait bien que son permis ait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu. S'agissant des blessures involontaires, la mention du cas de la rétention du permis de conduire a disparu à la suite d'une erreur. Cet amendement vise donc à la rétablir.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 33, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 222-20-1 du code pénal :

« Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 EUR d'amende lorsque le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir. »

La parole est à M. Bernard Joly.

M. Bernard Joly. Cet amendement a pour objet d'enrayer la progression d'un comportement que je trouve absolument lamentable et qui consiste à prendre la fuite après avoir causé un accident. Une telle attitude me semble mériter une peine dissuasive. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. Je comprends très bien les motivations qui ont poussé M. Joly à présenter cet amendement, lequel vise à aggraver les peines encourues en cas de délit de fuite lorsque le conducteur responsable de l'accident a causé des blessures ayant entraîné une incapacité totale de travail d'une durée inférieure ou égale à trois mois. Le délit de fuite serait alors puni de la même manière quelles que soient la gravité des blessures et la durée de l'incapacité totale de travail.

Une telle évolution porterait gravement atteinte à l'équilibre du projet de loi, ce qui n'est pas souhaitable. En outre, il conviendrait de procéder de la même manière s'agissant des autres circonstances aggravantes, afin de préserver la cohérence d'ensemble du texte.

C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, tout en reconnaissant qu'il était bon que l'on évoquât ce sujet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.

M. le président. Monsieur Joly, l'amendement est-il maintenu ?

M. Bernard Joly. En cas d'accident, monsieur le rapporteur, le conducteur responsable se demandera donc s'il a causé à sa victime une incapacité totale de travail d'une durée supérieure à trois mois, auquel cas il prendra la fuite ! Je trouve que cela est tout de même curieux !

Je suis franchement déçu de ne pas avoir reçu de soutien s'agissant de cet amendement, et l'on ne m'empêchera pas, à cet instant, d'avoir une pensée pour une malheureuse gamine qui a été traînée sous des kilomètres par une voiture.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je comprends l'émotion de M. Joly, mais je crois que nous ne nous sommes pas bien compris. Je souhaite donc expliciter plus en détail la portée du texte.

Je rappelle que le délit de fuite constitue une circonstance aggravante pouvant entraîner le doublement de la peine de prison. Ce n'est pas du tout anodin ! En cas d'homicide involontaire ou de blessures involontaires avec délit de fuite, il est probable qu'une autre des six circonstances aggravantes mentionnées à l'article 2 pourra être retenue, et le tribunal aura la faculté de doubler la peine.

Par conséquent, aucune « impunité » n'est prévue s'agissant du délit de fuite. Le texte me semble même assez sévère à cet égard.

M. le président. Dans ces conditions, l'amendement est-il toujours maintenu, monsieur Joly ?

M. Bernard Joly. Je le retire, tout en soulignant que la fuite est l'attitude la plus répandue aujourd'hui en cas d'accident.

M. le président. L'amendement n° 33 est retiré.

La parole est M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'article 2.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je développerai beaucoup moins d'arguments que je ne serais porté à le faire.

S'agissant de la plupart de ces dispositions, je suis effaré de constater que tout ce que propose le Gouvernement, c'est de doubler les peines encourues. Pourquoi ne rétablit-il pas les minima qui ont été supprimés ? L'étude d'impact n'indique aucunement combien ont été rendus de jugements, et il ne doit pas y en avoir beaucoup, condamnant les prévenus au maximum de la peine. Aussi, ces quelque ving-cinq articles que l'on ajoute à la législation pour continuer à aggraver les peines encourues sont autant de coups d'épée dans l'eau.

Vous laissez de moins en moins de liberté au juge. Personnellement, je comprends parfaitement M. Joly, car l'habitude consiste à punir plus ou moins selon la gravité des conséquences, ce qui est souvent totalement idiot. En effet, les conséquences peuvent dépendre de l'angle d'attaque, si j'ose dire, du véhicule, de l'endroit où la victime a été touchée, de la hauteur du véhicule, etc.

Monsieur Joly, vous avez raison, un délit de fuite, c'est un délit de fuite. Il ne me semblerait pas choquant que celui qui se rend coupable d'un délit de fuite encoure la même peine quelles que soient les conséquences de l'accident. On vous répond : ce n'est pas la tradition, car, en la matière, celle-ci consiste à considérer les conséquences qui ne peuvent pas être mesurées par l'auteur.

Selon moi, deux articles étaient nécessaires dans un texte tendant à renforcer la lutte contre la violence routière.

Premièrement, il aurait fallu demander aux fabricants, français en tout cas, de ne pas construire de voitures qui roulent à plus de - allez, soyons larges ! - 180 km/h, et non à 260, vitesse que l'on voit ajourd'hui inscrite sur les compteurs.

Deuxièmement, il aurait fallu obliger les constructeurs - et je suis sûr que nos constructeurs vendraient ainsi beaucoup plus de voitures, y compris à l'étranger - à installer sur tous les nouveaux modèles des limitateurs de vitesse - des amendements ont été déposés en ce sens mais n'ont pas été retenus par la commission. En effet, tous ceux qui en ont sur leur voiture - mais il n'y en a que sur les grosses voitures - s'en servent, car, si un dispositif permet de limiter la vitesse, les usagers l'utilisent. Techniquement, de tels dispositifs n'empêchent ni de ralentir ni même, en cas de nécessité, d'accélérer.

Vous voulez envoyer de plus en plus de gens en prison, alors que celles-ci sont déjà surpeuplées. Certes, il n'y aura plus de violence routière lorsque plus personne n'aura de permis de conduire, quand toutes les voitures auront été confisquées et lorsque tous les anciens conducteurs seront en prison !

Avec cet article 2, la peine actuelle de deux ans d'emprisonnement passerait à trois ans, voire à cinq ou sept ans. Ainsi, pour une incapacité temporaire de travail de plus de trois mois, la peine serait de trois ans, au lieu de deux, sans autre circonstance aggravante. A quoi cela rime-t-il ?

Monsieur le ministre, je vous pose une question très précise : à votre connaissance, beaucoup de condamnations à deux ans de prison ont-elles été prononcées dans le seul cas de blessures ayant entraîné une incapacité temporaire de travail de plus de trois mois ? J'apprécierais que vous me répondiez. En effet, si vous n'avez pas ces statistiques, il n'y a aucune raison d'accepter de doubler les peines encourues, notamment en passant de deux ans à quatre ans, ou de cinq ans à dix ans, comme cela est prévu pour les suspensions de permis de conduire. Selon le projet de loi, il pourrait être interdit de repasser le permis de conduire avant dix ans, contre cinq ans actuellement. Avez-vous beaucoup d'exemples de personnes qui ont été condamnées à ne pas repasser le permis de conduire avant cinq ans ? L'étude que vous avez dite « d'impact » devrait tout de même contenir ces précisions. Si vous les avez, merci de nous les donner !

En tout cas, nous voterons contre l'article 2. J'indique d'ores et déjà que, personnellement, je voterai contre l'ensemble du projet de loi.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je voudrais d'abord, à la lumière de ce qui a été dit par M. Dreyfus-Schmidt, apporter une précision à M. Joly. Dans le texte en son état actuel, pour le délit de fuite après un accident, la peine encourue est de deux ans de prison ferme ou 30 000 euros d'amende. Je réponds ainsi à M. Dreyfus-Schmidt, qui expliquait au Sénat, d'une manière erronée, que nous ne prévoyions de peine que s'il y avait des conséquences,...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas ce que j'ai dit !

M. Dominique Perben, garde des sceaux. ... ce qui est tout à fait inexact. En effet, le texte prévoit que, pour un délit de fuite simple, on encourt une peine de deux ans de prison.

Pour le reste, monsieur Dreyfus-Schmidt, je vous donnerai, si je le peux, avant la fin de la séance, en tout cas avant la fin de l'examen du projet de loi, les chiffres sur lesquels vous m'avez interrogé.

Si j'ai bien compris, vous êtes partisan de ne rien faire, puisque vous êtes contre le texte.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non !

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Autrement dit, monsieur le sénateur, vous n'avez pas entendu l'appel fort de toutes les associations de victimes ou de familles de victimes qui, depuis des années, vous ont dit - sans résultat ! - et nous ont dit - avec résultat ! - qu'il fallait effectivement mettre en place une politique capable de faire baisser substantiellement le nombre des victimes, le nombre des blessés dans notre pays, car l'exception française est inacceptable.

Certes, on peut dire : « Continuons, faisons comme si il n'y avait rien à faire. » Les simples annonces qui ont été le résultat du débat national qui s'est ouvert voilà six mois ont montré l'efficacité de cette politique. (M. Jacques Mahéas s'exclame.) Monsieur le sénateur, ne jouons pas sur les mots. Il faut tout de même être sérieux !

M. Jacques Mahéas. Nous sommes sérieux, c'est vous qui ne l'êtes pas !

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Qu'avez-vous fait pendant cinq ans ?

M. Jacques Mahéas. Le délit de grande vitesse, le permis à point, c'est nous !

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Vous devriez écouter les associations qui, publiquement, se sont félicitées de ce projet de loi, de l'engagement du Président de la République et de la majorité qui le soutient. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.

Mme Nicole Borvo. Le groupe CRC s'abstient !

(L'article 2 est adopté.)

Art. 2
Dossier législatif : projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière
Art. additionnel après l'art. 2 bis

Article 2 bis

M. le président. « Art. 2 bis. - I. - Les articles 223-11 et 223-12 du code pénal sont ainsi rétablis :

« Art. 223-11. - L'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée causée, dans les conditions et selon les distinctions prévues par l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 EUR d'amende.

« Si les faits résultent de la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, la peine est de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende.

« Art. 223-12. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par le premier alinéa de l'article 223-11 est commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende.

« Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 EUR d'amende lorsque :

« 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;

« 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;

« 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou le conducteur a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;

« 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;

« 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;

« 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté ou a tenté d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir.

« Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 EUR d'amende lorsque l'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »

« II. - A l'article 223-10 du même code, les mots : "cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende" sont remplacés par les mots : "sept ans d'emprisonnement et de 100 000 EUR d'amende". »

Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L'amendement n° 2 est présenté par M. Lanier, au nom de la commission.

L'amendement n° 35 est présenté par Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 72 est présenté par MM. Mahéas, Badinter et Lagauche, Mme Printz, M. Todeschini, Mme M. André, MM. Courrière, Debarge, Dreyfus-Schmidt, Frécon, Frimat, C. Gautier, Peyronnet, Sueur, Sutour et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer cet article. »

Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 32 est présenté par M. Fauchon.

L'amendement n° 108 est présenté par M. Béteille.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Au premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 223-11 du code pénal, supprimer les mots : "sans le consentement de l'intéressée". »

L'amendement n° 31 rectifié, présenté par M. About, est ainsi libellé :

« Après le I de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :

« ... - Après l'article 223-12 du même code, il est inséré un article 223-12-1 ainsi rédigé :

« Art. 223-12-1. - Les dispositions des articles 223-11 et 223-12 ne sont applicables qu'aux grossesses déclarées au sens des dispositions du code de la sécurité sociale ou, à défaut d'une telle déclaration, qu'à l'issue de la période mentionnée à l'article L. 2212-1 du code de la santé publique. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 2.

M. Lucien Lanier, rapporteur. En l'occurrence, nous abordons un sujet qui a vraiment occupé la moitié du temps que la commission a consacré à ce texte. C'est dire si elle l'a étudié de manière approfondie et avec un soin jaloux pour déterminer l'attitude qu'elle devait avoir à l'égard de cette disposition.

Le présent article, qui a été inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale sur l'initiative du député M. Jean-Paul Garraud, tend à rétablir les articles 223-11 et 223-12 du code pénal pour créer un délit d'interruption involontaire de grossesse. Le Gouvernement n'avait proposé aucune disposition sur ce point. Il a demandé simplement une modification de l'amendement Garraud. Finalement, il a laissé adopter une disposition : celle que nous avons examinée avec soin en commission. Notre commission l'a examiné à deux reprises : il y a deux semaines et ce matin.

Cet article 2 bis vise à créer un délit d'interruption involontaire de grossesse et une incrimination spécifique punie de peines aggravées lorsque cet acte est commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule, autrement dit, si l'interruption involontaire de grossesse est commise par le conducteur d'un véhicule à la suite d'un choc, physique ou psychologique. Après mûre réflexion, la commission propose de supprimer cet article.

Il existe en effet un vide juridique, mais le problème a une portée considérable, et il ne peut être résolu par un simple amendement dans un projet de loi relatif à la sécurité routière.

M. Jacques Mahéas. Tout à fait !

M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission a considéré qu'un tel sujet nécessite un débat et un texte spécifiques. Il ne lui a pas semblé souhaitable de trancher une telle question au détour d'un projet de loi concernant la sécurité routière. En effet, on peut s'interroger également - la commission n'a pas manqué de le faire - sur le statut même du foetus, remis en cause dans un simple projet de loi relatif à la sécurité routière.

M. Nicolas About. Je ne le crois pas.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Le sujet mérite de faire l'objet d'une discussion propre, ou - pourquoi pas ? - d'être examiné à l'occasion d'un débat sur la bioéthique, qui doit avoir lieu.

Enfin, la commission s'est demandé si cet article ne remettait pas en cause les principes mêmes du code pénal selon lesquels les infractions non intentionnelles demeurent une exception. On m'objectera que, dans ce cas, c'est tout l'ensemble du projet de loi qui n'a plus d'objet, car tout est exception, bien sûr, puisque les infractions ne sont pas intentionnelles, sauf si le conducteur du véhicule est fou ou irresponsable. En effet, il ne va pas percuter un mur ou un véhicule qui vient en face s'il n'est pas sous l'influence d'une drogue ou pris de boisson, etc.

Par conséquent, les infractions non intentionnelles n'ont qu'une valeur de principe. Cependant, un sujet aussi important que le statut du foetus, vu par le code pénal et vu différemment par le code civil, mérite que l'on pose le problème de l'intention.

Selon la commission, il paraît difficile d'adopter, dans le cadre de ce projet de loi sur la violence routière, une disposition dont on ne peut encore mesurer toutes les conséquences. Elle a donc choisi de proposer, pas du tout à la légère, après de nombreuses discussions, après bien des hésitations, voire des revirements pour certains, la suppression de cet article pour les raisons que je viens d'indiquer.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 35.

Mme Nicole Borvo. J'ai déjà dit, lors de la discussion générale, que je regrettais que la commission des lois ait débattu deux fois d'un sujet qui a été traité une première fois avec beaucoup de sérieux et à propos duquel la commission, à l'unanimité moins une voix, s'est prononcée pour la suppression du texte proposé. En tout cas, j'espère maintenant, mes chers collègues, que vous allez entendre mes arguments et que l'avis de la commission sera suivi.

Avec cet article, on nous propose d'introduire un « délit d'interruption involontaire de grossesse » permettant, aux dires de ses défenseurs, de combler un manque de notre législation qui ferait que ne serait pas prise en compte la souffrance de celles et ceux qui perdent leur enfant à naître lors de la commission d'un délit et singulièrement à l'occasion d'un accident de la route.

J'ai été particulièrement choquée de constater que ceux qui s'opposaient à l'institution de ce délit étaient taxés d'indifférence à l'égard de ces drames humains,...

M. Nicolas About. Mais non !

Mme Nicole Borvo. ... et je m'inquiète beaucoup de l'instrumentalisation de cette disposition à des fins en réalité très éloignées des considérations affichées.

Dans ce contexte, il apparaît indispensable de bien resituer le problème : il s'agit non pas de nier cette souffrance des parents mais de se demander à quel titre la justice et le droit doivent la prendre en compte.

Ainsi, il est faux de dire que la perte de l'enfant à naître à l'occasion d'un délit n'est pas prise en compte par notre droit : l'article 223-10 du code pénal prévoit déjà que « l'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende ».

Par ailleurs, la perte d'un embryon à l'occasion d'un accident de la route ou de tout autre délit, si elle n'entraîne pas pour le responsable de sanction pénale, constitue un préjudice effectif qui trouve sa traduction immédiate par l'octroi de dommages et intérêts.

En outre, la définition de cette nouvelle infraction est en contradiction avec la Constitution en ce qu'elle fait l'impasse sur la nécessité d'un élément intentionnel pour caractériser l'infraction, puisque l'état de grossesse n'est pas connu. Le fait qu'il existe désormais des délits non intentionnels n'y change rien, comme l'a rappelé notre collègue Pierre Fauchon, qui a, semble-t-il, changé d'avis.

On constatera d'ailleurs que l'article 2 bis aboutit à mettre au même niveau le conducteur qui, sans avoir connaissance de la grossesse de la personne, par son comportement, entraîne l'interruption involontaire de la grossesse et celui qui, en tout conscience, va porter des coups à une femme enceinte entraînant pour celle-ci une incapacité de travail de moins de huit jours, la commission de ce délit étant punissable de trois ans d'emprisonnement, peine portée à cinq en cas d'interruption temporaire de travail.

Enfin, une telle disposition met directement en question le statut juridique de l'enfant à naître.

M. Nicolas About. C'est absolument faux !

Mme Nicole Borvo. La Cour de cassation, dans son arrêt du 29 juin 2002, a en effet estimé que ce statut relevait de textes particuliers sur l'embryon ou le foetus et non pas des dispositions générales du code pénal. C'est le contre-pied de cette jurisprudence qu'il nous est proposé de prendre aujourd'hui par l'insertion, dans le code pénal, d'une disposition d'ordre très général permettant de sanctionner pénalement toute faute d'imprudence, de maladresse ou d'inattention qui causerait la mort du foetus, au-delà du délit spécifique en matière routière.

C'est toute notre conception juridique du foetus qui serait ainsi remise en cause si une telle disposition était adoptée. Elle pourrait conduire à une véritable remise en question du droit à l'avortement.

Sans mépriser nullement la souffrance de ceux ou de celles qui perdent un enfant attendu par le fait d'autrui, je veux expliquer aux femmes concernées en quoi un tel dispositif pourrait être très dangereux.

Les courriers que nous avons reçus à ce sujet sont éloquents : il s'agit, nous dit-on, de « faire sanctionner par la loi le fait de causer involontairement la mort de l'enfant à naître en tant qu'il est un homicide involontaire, une atteinte à la vie d'autrui au sens de l'article 221-6 du code pénal ». Mais, dès lors que la mort d'un foetus sera considérée comme un homicide, l'avortement sera logiquement un crime !

Les associations ne s'y sont pas trompées. Elles ont fait connaître leur opposition à l'introduction de cette disposition dans le code pénal. Je pense que les parlementaires doivent prendre une position ferme et ne pas se laisser entraîner par une interprétation abusive de ce que l'on désigne sous l'expression de « souffrance des parents ».

Si la présente disposition devait figurer dans la loi, nous en appellerions à l'ensemble des responsables pour saisir le Conseil constitutionnel de la question.

M. Nicolas About. Très intéressant !

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour présenter l'amendement n° 72.

M. Jacques Mahéas. Monsieur le président, je vous indique d'emblée que le groupe socialiste demandera un scrutin public sur cet amendement.

M. le président. J'en prends acte.

M. Jacques Mahéas. L'article 2 bis vise la situation des personnes qui perdent leur enfant lors d'un accident de la circulation. Il s'intéresse directement à la situation de la mère doublement victime. Mais, sous la louable intention d'assurer une prise en charge psychologique qui ne relève pas du domaine de la loi, cet article met indirectement en cause le statut de l'enfant à naître, question fondamentale qui ne doit pas être posée dans le cadre de ce projet de loi relatif à la sécurité routière.

En effet, l'article 2 bis crée d'emblée une incrimination générale sur la mise en cause par imprudence de la vie de l'enfant à naître. Or l'assemblée plénière de la Cour de cassation, instance la plus solennelle, a estimé que la mort d'un foetus ne constituait pas un homicide involontaire puisque le foetus n'est pas une personne.

Elle a considéré que cette question ne peut relever de la loi pénale et elle renvoie aux textes particuliers sur l'embryon ou sur le foetus.

Certes, le nouveau code pénal qui a été présenté par M. Robert Badinter en 1986 et qui a été adopté à l'unanimité par le Parlement en juillet 1992 réprime, dans son article 223-10, des faits volontaires destinés à interrompre une grossesse parce que, dans ce cas, l'élément intentionnel peut être relevé.

Aucun article ne prévoit les infractions involontaires parce qu'il est impossible de connaître l'état de la victime et que l'article 121-3 du code pénal prévoit bien qu'il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre.

Enfin, le texte proposé pour l'article 223-11 du code pénal pose le problème de la responsabilité pénale des actes médicaux.

Il permettra, en cas de faute médicale, d'engager des poursuites pénales alors que, jusqu'à présent, seule la reponsabilité civile pouvait être mise en cause.

Nous sommes sur un sujet qui n'a plus rien à voir avec la sécurité routière.

En fait, je le répète, le cas est déjà prévu dans l'article 223-10 du code pénal, qui dispose : « L'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. »

Alors, dans la nuit du 19 au 20 mars 2003, à l'Assemblée nationale, malgré l'opposition du groupe socialiste, a-t-on voulu, par le biais du projet de loi contre la violence routière, en sanctionnant la mort d'un foetus considérée comme homicide involontaire, donner insidieusement au foetus le statut juridique de personne ? Je ne le pense pas.

Dès lors, il nous faut les uns et les autres faire en sorte que soit supprimé cet article, qui n'a pas sa place dans ce projet de loi relatif à la sécurité routière.

M. le président. La parole est à M. Pierre Fauchon, pour présenter l'amendement n° 32.

M. Pierre Fauchon. Mes chers collègues, j'ai déposé un amendement visant à modifier l'article, ce qui signifie évidemment que j'étais partisan de son maintien. Toutefois, j'expliquerai tout à l'heure pourquoi j'ai changé d'avis.

Pour l'instant, je dirai simplement que cet article ne mérite pas le débat qu'il a suscité, débat nourri par des interprétations abusives. Il tend simplement à combler une lacune de notre droit, qui est absurde.

Cette lacune a été relevée à plusieurs reprises par la Cour de cassation, notamment dans son rapport de la fin de l'année 1999.

Selon l'arrêt qui est commenté dans ce rapport, « le fait de provoquer involontairement une interruption de grossesse ne constitue pas un délit d'homicide involontaire prévu et réprimé par l'article 221-6 du code pénal. La loi pénale, qui est d'interprétation stricte, n'a pas étendu à l'enfant à naître la protection due à la personne d'autrui contre les atteintes involontaires à la vie. »

Or, dans le cas visé, les fautes, les négligences et l'inattention du médecin étaient caractérisées puisque, confondant une patiente venue consulter pour un examen de grossesse avec une autre patiente, en l'absence de tout examen clinique, le médecin avait fait subir à cette patiente un traitement qui avait provoqué l'interruption de sa grossesse. Il s'agissait donc d'une faute très lourde.

Le commentaire concluait ainsi : « L'arrêt portant cassation sans renvoi, qui censure en termes lapidaires cette décision, sans se prononcer sur le moment de l'apparition de la personne humaine pendant le cours de la progressive différenciation du produit de la conception, met en évidence l'absence dans notre droit d'une protection pénale spécifique de l'être humain contre les atteintes involontaires à la vie avant la naissance. »

Il y a donc une lacune.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale tend à combler cette lacune, bien entendu pour les délits involontaires.

En fait, aujourd'hui, si l'on est responsable d'un accident qui entraîne une incapacité de faible durée, si par exemple, on casse le doigt d'une femme, entraînant une incapacité permanente de quinze jours, on commet un délit, alors que si on provoque chez elle un avortement, il n'y a pas délit. Voilà la situation !

Imaginez ce que cela peut donner dans une salle d'audience !

Dans notre droit actuel, un tel agissement ne peut être pris en compte que si c'est un homicide ; or il ne peut pas être qualifié d'homicide, nous sommes tous d'accord sur ce point.

Il n'y a pas homicide, il n'y a pas non plus atteinte à un membre de cette femme ; on ne peut donc parler de délit. Et pourtant, que je sache, l'embryon est dans la femme, c'est elle qui est atteinte. On pourrait même soutenir qu'elle est atteinte personnellement d'une blessure. Je le répète : s'il y a un bras cassé, c'est un délit, et si c'est l'embryon qui est atteint, ce n'est pas un délit. Reconnaissez que cette situation est tout à fait absurde, tout à fait inique.

Madame Borvo il n'est pas du tout question de s'apitoyer sur le sort des victimes.

Mme Nicole Borvo. Mais, monsieur Fauchon, vous avez défendu la thèse inverse de celle que vous défendez actuellement !

M. Pierre Fauchon. Je vous ai écoutée attentivement. Vous seriez aimable de me rendre la politesse.

Certes, il peut y avoir une action civile. Mais le problème n'est pas là. Il s'agit de maintenir la cohérence de notre justice pénale. On ne peut pas à la fois, lorsqu'une personne casse le bras d'une autre, dire que c'est un délit et infliger une amende ainsi qu'une peine de prison avec sursis et, lorsqu'un avortement a été provoqué, dire : là ce n'est pas un délit.

Lors d'une audience correctionnelle, il est très difficile pour un procureur de soutenir, à dix minutes d'intervalle, deux thèses aussi contradictoires. Il est dès lors très difficile pour les juges du fond de ne pas condamner. Ils invoquent parfois la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. En tout cas, ils trouvent une raison de condamner pour ne pas se trouver dans une situation absurde.

Lorsque l'affaire remonte à la Cour de cassation, qui est chargée d'appliquer notre droit d'une manière rigoureuse - a fortiori lorsqu'il s'agit du droit pénal -, la Cour dit qu'il n'y a pas d'homicide, qu'aucun délit n'est prévu dans le code pénal, et, sans délit prévu, il n'y a pas de condamnation pénale.

La démarche de notre collègue Garraud - elle a d'ailleurs été approuvée par le Gouvernement - consistait à dire qu'il n'y avait pas homicide lorsqu'on portait atteinte à la vie d'un embryon mais qu'il fallait constituer un délit original n'ayant rien à voir avec le statut du foetus et concernant seulement le statut de la femme enceinte. Dès lors, si une personne provoquait, par imprudence, négligence ou faute caractérisée, l'interruption involontaire de grossesse d'une femme enceinte, il s'agirait d'un délit comme si on lui casse le bras ou la jambe. Cette solution relève du bon sens, et il n'y a pas lieu d'émettre à son égard des raisonnements philosophiques extravagants sur le statut du foetus, qui n'est pas du tout en cause.

Nous créerions ainsi un délit nouveau très particulier : l'interruption de grossesse imposée à une femme de l'extérieur par une imprudence. (Mme Nicole Borvo s'exclame.) Voilà pourquoi ce texte m'a paru très utile.

Cela dit, la rédaction de l'Assemblée nationale m'a semblé assez bonne. Elle comporte néanmoins une phrase qui n'est pas très heureuse. M. Béteille ayant déposé le même amendement que moi, pour ne pas abuser de mon temps de parole, je lui laisse le soin d'expliquer les raisons pour lesquelles je propose de modifier légèrement la rédaction de cet article. (Applaudissements sur certaines travées de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, pour présenter l'amendement n° 108.

M. Laurent Béteille. Cet amendement, identique à celui qu'a présenté Pierre Fauchon, me semble marqué au coin du bon sens.

Pour ma part, je ne comprends pas l'acharnement que l'on peut mettre à vouloir absolument supprimer cet article 2 bis, qui, à mon sens, a été ajouté avec beaucoup de bonheur par l'Assemblée nationale.

Il y a, dans notre droit pénal, un certain parallélisme entre les incriminations pour les infractions volontaires et les incriminations pour les infractions involontaires, lesquelles sont naturellement sanctionnées moins lourdement.

Ainsi, à l'homicide volontaire va correspondre l'homicide involontaire aux coups et blessures volontaires vont correspondre les coups et blessures involontaires. Or, une exception tout à fait incompréhensible existe : à l'interruption volontaire de grossesse en dehors du consentement de la mère, qui est sévèrement sanctionnée, ne correspond pas d'incrimination pour interruption involontaire de grossesse par faute, maladresse, imprudence ou autre. Il s'agit bien là d'une lacune qui, comme l'a dit Pierre Fauchon avec à-propos, a été mentionnée dans un rapport de la Cour de cassation.

Comment s'explique cette exception alors qu'est en cause un préjudice grave, beaucoup plus important que ne l'est une simple blessure ? Je pense que tout le monde est conscient que le fait de perdre un enfant qui est attendu constitue un préjudice grave. Or l'acte qui en est la cause n'est pas sanctionné.

Plusieurs arguments ont été avancés ; il a notamment été question du statut du foetus. Mais il ne s'agit pas du tout de cela ! Je comprends qu'on ne souhaite pas, au travers d'un débat sur la sécurité routière, traiter du statut du foetus, mais, dans le cas présent, il s'agit uniquement de l'interruption de grossesse.

La femme doit être maître de sa grossesse, j'en suis tout à fait d'accord. Qu'on lui donne la possibilité de l'interrompre dans les premières semaines est une bonne chose.

Mais peut-être a-t-elle aussi le droit de mener à terme cette grossesse ! N'est-ce pas la moindre des choses que, si elle désire cet enfant, on ne vienne pas contrecarrer son projet d'une manière brutale ?

En fait, il ne s'agit ni du droit des femmes ni du statut du foetus, il s'agit de réparer un oubli et de faire en sorte qu'un chauffard qui, par maladresse, imprudence, cause un trouble grave en assume les conséquences.

On me rétorque que le délit n'est pas intentionnel. Mais c'est la même chose pour celui qui tue quelqu'un parce qu'il conduisait en regardant ailleurs. Celui qui renverse une vieille dame sur un passage clouté, il ne le fait pas exprès !

Par ailleurs, la gravité des conséquences va avoir une incidence sur la nature de l'infraction. Si la vieille dame qui a été renversée est tuée, il s'agira d'un homicide involontaire. Si c'est un jeune, sportif, souple, et qu'il n'est que blessé, il s'agira de blessures involontaires.

Autrement dit, la nature du préjudice détermine la gravité de l'infraction : ce n'est pas nouveau et c'est tout à fait admis.

Il n'y a pas intention dès lors que l'on a causé un accident en conduisant de manière inattentive, parce qu'on regardait le paysage au lieu de regarder la route, et cela vaut qu'il s'agisse de blessures involontaires, d'un homicide involontaire ou d'une interruption involontaire de grossesse.

En tout état de cause, il s'agit d'une faute très grave qu'il est nécessaire de sanctionner.

Imaginons le cas d'un automobiliste qui renverse deux piétons. L'un est blessé : il pourra se constituer partie civile et demander réparation lors de l'audience pénale. L'autre, une femme enceinte, perd son enfant mais n'a pas elle-même des blessures telles qu'on puisse parler de blessures involontaires : elle ne pourra donc pas se constituer partie civile ; il lui faudra demander réparation de son préjudice devant une autre juridiction. Selon moi, c'est tout à fait anormal.

Faisons confiance aux tribunaux. Ils sont capables d'apprécier la gravité de la faute qui est à l'origine du dommage. Au moins, on aura comblé un vide juridique et permis à quelqu'un qui a souffert d'un préjudice grave d'en demander réparation dans des conditions normales. (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas About, pour défendre l'amendement n° 31 rectifié.

M. Nicolas About. La commission des lois, nous a dit M. le rapporteur, a longuement débattu sur ces amendements.

La commission des lois a commencé par se fourvoyer puisqu'elle est partie dans une direction qui n'était pas la bonne en se posant la question de savoir si le texte qui nous était soumis soulevait la question du statut du foetus. Or il ne s'agissait absolument pas du foetus. La commission s'en est rendu compte et une nouvelle réflexion s'est engagée. S'est ainsi constituée une majorité un peu hétéroclite, une majorité de circonstance, grâce à l'appoint des voix communistes et socialistes. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. Robert Bret. Pas du tout ! Nous étions tout de même avec le doyen Gélard, avec M. Ulrich ! C'est vous qui êtes hétéroclites !

M. Nicolas About. Je répète qu'une majorité de circonstance s'est constituée autour de l'idée que, finalement, la question du statut du foetus était soulevée et qu'il convenait, par conséquent, de supprimer l'article 2 bis.

Or, selon moi, il s'agit d'une disposition particulièrement utile, car elle permet de combler un vide dans notre législation.

La jurisprudence nous offre de nombreux exemples de fautes très graves, commises dans un cadre médical ou par des automobilistes imprudents, qui entraînent l'interruption de la grossesse d'une femme. Hélas ! quelle que soit la gravité de la faute, aucune poursuite n'est possible à l'encontre de ceux qui commettent ces fautes. Sans répéter ce qu'a très bien dit mon ami Pierre Fauchon, je veux simplement rappeler que, lorsque la Cour de cassation a refusé d'assimiler la mort d'un foetus à un homicide involontaire, elle l'a fait à juste titre dès lors que notre droit positif n'assimile pas le foetus à une personne, et je n'entends pas revenir sur ce point ce soir, car ce n'est pas l'objet du présent débat.

Pour autant, pouvons-nous rester dans une situation d'impunité totale pour les auteurs de dommages extrêmement graves ? J'ai consulté la jurisprudence de la Cour de cassation. Certains arrêts sont extrêmement éclairants.

J'évoquerai le cas d'une femme dont la grossesse était à terme depuis le 10 novembre 1991 et qui est entrée en clinique le 17 novembre en vue de son accouchement. Placée sous surveillance vers vingt heures trente, elle signale une anomalie du rythme cardiaque perceptible sur le récepteur. La sage-femme refuse d'appeler le médecin, considérant qu'il n'y a rien là d'alarmant. Le lendemain matin, de nouveau, elle appelle l'attention sur l'anomalie du rythme cardiaque et demande que le médecin soit appelé pour déclencher promptement l'accouchement. On n'en fait rien. Une heure après, le coeur s'arrête et une césarienne est pratiquée : l'enfant est mort-né.

M. Jacques Mahéas. Où est l'accident de la route ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Où est la violence routière ?

M. Nicolas About. J'ai écouté les uns et les autres avec attention et je souhaite pouvoir aller au bout de mon argumentation. Il me semble que, dans ce genre de débat, la première marque de respect consiste à s'écouter mutuellement ! La première des violences, c'est de refuser à l'autre de s'exprimer !

M. Jacques Mahéas. La première des violences, c'est de nous faire prendre des vessies pour des lanternes !

M. Nicolas About. Je demande donc simplement qu'on me permette de continuer.

M. le président. Continuez sereinement, cher collègue !

M. Nicolas About. Je vous remercie, monsieur le président.

M. Robert Bret. Vous aussi, vous avez apostrophé Mme Borvo tout à l'heure !

M. Nicolas About. Non, j'ai dit simplement que je n'étais pas d'accord !

La cour d'appel a déclaré la sage-femme coupable d'homicide involontaire et le médecin responsable des conséquences civiles de ce délit. Mais la Cour de cassation, appliquant strictement nos textes législatifs, a cassé l'arrêt et n'a pas renvoyé l'affaire devant une autre cour d'appel, observant que les faits n'étaient susceptibles d'aucune qualification pénale.

Je ne fais que mentionner le cas évoqué tout à l'heure par Pierre Fauchon : celui du médecin qui, au lieu d'enlever un stérilet, a rompu la poche des eaux et provoqué la mort de l'enfant.

Mme Nicole Borvo. Qu'est-ce que cela a à voir ?

M. Nicolas About. En tant que médecin, je considère que ce n'est pas un accident que de se tromper de malade.

L'article 2 bis prévoit donc la création d'une incrimination d'interruption involontaire de grossesse qui serait punie de peines aggravées lorsque l'infraction est commise à l'occasion de la conduite automobile. Cela revient à accorder une protection tout à fait justifiée à la femme enceinte.

Provoquer l'interruption de grossesse d'une femme, c'est lui infliger une blessure, c'est porter atteinte gravement à son intégrité physique de femme enceinte. Effectivement, une femme enceinte, c'est une femme qui a des liens physiques plus qu'étroits avec un être en devenir. La femme enceinte a donc droit au respect de son intégrité physique.

Cette blessure doit pouvoir être sanctionnée lorsqu'elle résulte d'une faute pénale.

Naturellement, la nouvelle incrimination ne pourra s'appliquer que si les conditions prévues par la loi à laquelle notre collègue Pierre Fauchon a donné son nom sont remplies. Il faut un lien de causalité directe entre la faute et le dommage. Il faut aussi que la faute soit caractérisée et que celui qui l'a commise ait exposé autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer.

Je ne suis pas juriste, c'est vrai, mais il me semble, à la lumière des quelques années que j'ai passées à la commission des lois, que ce dispositif est tout à fait conforme aux principes du nouveau code pénal, entré en vigueur en 1994, monsieur le rapporteur.

Je crois cependant que le dispositif proposé mérite d'être précisé.

L'article 2 bis vise, je l'ai dit, à la protection de l'intégrité de la femme enceinte en tant que telle. Souvenons-nous que l'expression « femme enceinte » signifie bien que la femme constitue une enceinte de l'être en devenir qu'elle porte. Cependant, petit à petit, notre droit a évolué de telle façon que cette enceinte de protection a été mise autour de la femme enceinte elle-même, ainsi qu'en témoignent diverses dispositions de notre droit du travail ou du droit de la sécurité sociale.

Par conséquent, peu à peu, s'est constituée une spécificité des droits de la femme enceinte, et on a jugé utile de la protéger.

Je propose donc, par mon amendement n° 31 rectifié, que la nouvelle incrimination ne s'appplique qu'à compter de la déclaration de grossesse que toute femme est tenue d'effectuer aux termes du code de la sécurité sociale, déclaration par laquelle la femme signifie qu'elle entend mener sa grossesse à son terme. Elle doit donc être protégée à cette fin, y compris par des dispositions pénales, applicables dès lors que des fautes graves sont commises à son encontre.

Mon amendement prévoit que, à défaut de déclaration, l'incrimination s'applique à compter de la fin de la période durant laquelle la femme peut choisir de mettre fin à sa grossesse, parce que c'est cela aussi le respect d'un des droits de la femme enceinte. (Mme Nicole Borvo s'esclaffe.)

Ne riez pas, madame Borvo ! Rire sur un tel sujet, c'est pitoyable !

Mme Nicole Borvo. C'est incroyable !

M. Nicolas About. Il est, en effet, des situations où la déclaration de grossesse n'aura pas été faite, par exemple lorsque des femmes ne sont pas résidentes en France ou qu'elles ont été simplement négligentes.

Cet amendement souligne bien le fait que la victime de la nouvelle infraction est non pas le foetus mais la femme enceinte.

Telles sont, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles je vous demande d'adopter l'amendement n° 31 rectifié et donc, avant tout, de rejeter les amendements de suppression de l'article 2 bis, dont on voit bien par qui ils sont défendus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. Je relève d'abord que les amendements n°s 35 et 72 sont identiques à l'amendement de la commission.

Les amendements identiques n°s 32 et 108 sont complètement contraires à la position de la commission, qui a été arrêtée, je le répète, après mûre réflexion.

Il y a là deux points de vue qui s'opposent, étayés d'ailleurs par des arguments aussi nobles les uns que les autres. Il existe, certes, un vide juridique qu'il conviendrait de combler. Mais notre débat même montre qu'il s'agit d'un sujet extrêmement vaste et qu'on ne saurait le traiter à l'occasion d'un texte relatif à la sécurité routière. Il mérite d'être étudié d'une manière spécifique et approfondie, car il convient de l'aborder sous tous ses angles. Tel est le point de vue de la commission.

M. Nicolas About. C'est une astuce !

M. Lucien Lanier, rapporteur. L'amendement n° 31 rectifié est également contraire à la position de la commission et celle-ci ne peut, par conséquent, émettre un avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je dirai d'abord qu'il n'y a, en l'occurrence, dans l'expression de mon point de vue, aucun amour-propre d'auteur puisque, comme vous le savez, cet article 2 bis ne figurait pas dans le projet du Gouvernement. Un député a en effet proposé l'introduction de cet article, qui m'est apparu juridiquement tout à fait acceptable, et je vais m'en expliquer. Cela étant, le Sénat prendra ses responsabilités.

Sur le fond, je regrette infiniment que, à propos d'un article tout à fait circonscrit, qui n'évoque en rien le statut du foetus, qui ne soulève aucunement des questions de bioéthique, on en revienne à un débat sur l'IVG. Il y a là, à mon sens, une erreur, et je pense que ce rapprochement est juridiquement infondée.

Je rappellerai d'abord que la Cour de cassation, dans son rapport annuel de 1999, a mis en évidence, comme l'a souligné M. Fauchon, l'absence, dans notre droit, d'une protection pénale spécifique de l'être humain contre les atteintes involontaires à la vie avant la naissance. Ce constat a été fait à plusieurs reprises par la Cour de cassation. Ce ne sont ni le député Jean-Paul Garraud ni le garde des sceaux qui le disent, mais bien la Cour de cassation qui le constate.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Voir le commentaire de Mme Rassat !

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Par ailleurs, le texte qui a été adopté par l'Assemblée nationale et dont l'objet est de combler cette lacune s'inspire directement de l'actuel article 223-10 du code pénal. Cet article résulte de la réforme du code pénal adoptée à l'unanimité par le Parlement en 1992 ; il figurait déjà dans le projet présenté par M. Badinter en 1986, projet qui tendait à réprimer de façon spécifique l'interruption de grossesse commise intentionnellement sans l'accord de la femme enceinte, ce qui prouve bien que cet article ne met pas en cause le statut du foetus.

M. Nicolas About. Bien sûr !

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Car il faut tout de même que l'on sache de quoi on parle aujourd'hui ! Si M. Badinter ne mettait pas en cause le statut du foetus, M. Garraud ne le fait pas non plus !

J'ajoute que l'inscription de ce dispositif dans notre code pénal est tout à fait conforme aux récentes évolutions de ce dernier et, en particulier, à l'esprit de la loi Fauchon de juillet 2000.

Enfin, il ne me paraît pas possible d'affirmer que cette disposition ne serait pas conforme à la Constitution au motif que l'auteur de l'infraction ne connaissait pas l'état de la victime, à moins de remettre en cause toute une série d'articles de notre code pénal !

Je suis donc, logiquement, défavorable aux amendements n°s 2, 35 et 72 tendant à la suppression de l'article 2 bis.

S'agissant des amendements identiques n°s 32 et 108, je considère qu'ils améliorent le texte du projet de loi.

Sur l'amendement n° 31 rectifié, je m'en remettrai à la sagesse du Sénat.

Telle est la position du Gouvernement sur cette affaire que je crois strictement juridique et qui pourrait, selon moi, ne pas être passionnelle.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. René Garrec, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, de suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Le débat qui nous occupe aujourd'hui est très difficile.

Voilà un texte du Gouvernement amendé par l'Assemblée nationale. Au sujet du comportement de nos concitoyens sur la route, un problème est soulevé que certains d'entre nous considèrent comme un problème de société.

Du point de vue juridique, M. le garde des sceaux a raison : la question est celle de la femme enceinte dont la grossesse est interrompue et des dégâts psychiques ou psychosomatiques qui peuvent en résulter.

Ecoutant tout à l'heure mon collègue M. About s'exprimer sur ce même thème, j'ai noté qu'il n'avait pu s'empêcher de faire appel à d'autres notions. En vérité, nous sommes sur une frontière : s'agit-il du foetus, de son existence, de son statut ?

Je n'oublie pas que nous avons eu ce même débat sur la responsabilité à propos de l'arrêt Perruche. Nous retrouvons un problème de droit, un problème de société, un problème de religion, pour certains, un problème qui concerne l'individu, la vie et la mort. C'est un vrai problème dans notre société judéo-chrétienne.

Je me permets de rappeler que Pierre Fauchon, voilà trois semaines, en commission, avait fait une construction juridique impeccable, approuvée par le doyen Gélard et par moi-même, d'ailleurs. Il s'est ressaisi, aujourd'hui, en reconnaissant qu'il existait effectivement un vide juridique. Peu à peu, nous nous sommes aperçus que se posait un autre problème, qui dépassait le problème initial. Je le dis d'autant plus volontiers que j'ai voté avec lui et que j'ai été battu au sein de la commission.

Souhaitant une concertation avant les explications de vote, je demande, monsieur le président, une suspension de séance d'environ un quart d'heure.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-trois heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. le président de la commission.

M. René Garrec, président de la commission. A l'issue de cette suspension de séance, monsieur le président, mes chers collègues, je confirme que nous sommes bien ici confrontés à un véritable problème de société, à un problème que nous ne pouvons pas traiter au détour de l'examen d'un texte dont l'objet est tout autre. Bref, nous sommes en présence d'un cavalier, pour l'appeler par son nom.

C'est si vrai que mon ami et collègue Nicolas About, qui s'est exprimé avec sa compétence habituelle, nous a emmenés en des territoires qui se situaient au-delà du champ du présent texte.

Oui, nous sommes ici face à un problème de fond, et je crois que, ce soir, nous n'avons pas à le traiter.

Une solution s'offre cependant à nous : que M. Fauchon, avec quelques-uns de ses collègues, dépose une proposition de loi pour traiter spécifiquement cette question. Je le soutiendrai alors et je cosignerai son texte. Mais ne chargeons pas le présent projet de loi, qui a sa propre cohérence, avec une telle disposition.

J'ajoute que, juridiquement, nos collègues de l'Assemblée nationale n'ont pas fait d'erreur, mais nous ne pouvons accepter que leur dispositif figure dans ce texte. Une bonne proposition de loi règlera le problème, elle sera la solution à notre débat de ce soir, qui nous aura au moins permis de progresser.

M. le président. La parole est à M. Pierre Fauchon, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 2, 35 et 72.

M. Pierre Fauchon. Je crois nécessaire d'expliquer à nos collègues que, si j'ai changé de position, c'est que, lors de la première délibération de la commission, il m'avait semblé - à tort, c'est possible - qu'il s'agissait uniquement de faire de l'interruption involontaire de grossesse une circonstance aggravante, d'une manière générale, des délits de blessures ou d'homicides par imprudence. Or, en réalité, il s'agit de tout autre chose, comme je l'ai expliqué tout à l'heure. C'est parce que je n'avais pas bien compris, lors de la première délibération, que j'avais pris cette position. Je n'ai donc pas changé d'avis, mais le problème m'est apparu différemment.

Cela étant dit, j'admets que nous sommes en présence d'un cavalier un peu trop exorbitant par rapport au strict domaine de la circulation routière. Puisque nous avons décidé que cette question ferait l'objet d'un texte distinct, nous allons donc, comme l'a suggéré le président de la commission des lois, rédiger une proposition de loi que nous demanderons au Sénat d'inscrire à son ordre du jour de manière qu'elle soit votée en toute autonomie, en toute clarté, à l'occasion d'un débat portant uniquement sur la création de ces délits nouveaux.

Telles sont les raisons pour lesquelles, personnellement, je m'abstiendrai.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le problème n'est pas si simple !

Vous avez pris une décision et nous ne pouvons que vous en féliciter. Si c'était vous qui aviez proposé cet article 2 bis, il vous suffirait de le retirer ! Cependant, il figure dans le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale. Vous ne pouvez donc pas le retirer, et il faut donc que nous nous prononcions sur cet article. C'est pourquoi nous tenons à expliquer notre vote.

Cet article 2 bis contient, en vérité, deux dispositions tout à fait différentes.

Le texte proposé pour l'article 223-11 du code pénal est, en effet, un cavalier pur. Il pose un problème qui est discuté, et discutable. Sur ce point, la position de notre collègue Nicolas About, qui consistait à faire une différence suivant l'ancienneté de l'embryon, me paraissait plus rationnelle.

Quel est, en fait, le problème ? Vous avez cité deux arrêts de la Cour de cassation.

M. Nicolas About. Il y en a d'autres !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mais tous deux s'appliquent à autre chose qu'à la violence routière ! Ils s'expliquent par le fait que les cours d'appel ne sont pas du tout convaincues et que nous pouvons parfaitement connaître un jour un revirement de jurisprudence.

Par ailleurs, on peut se demander s'il faut tout pénaliser. Il y a certes un préjudice, les actes visés ici peuvent ouvrir droit à une réparation au civil.

Vous avez cependant considéré à juste titre, pendant la suspension de séance, que cela posait des problèmes extrêmement graves qui n'ont rien à voir avec le texte sur la violence routière.

Vous vous apprêtez donc à supprimer cet article.

Vous aurez alors à réfléchir - je le dis très amicalement à M. Fauchon - pour savoir si finalement sa première idée n'était pas la bonne et si vous ne devriez pas renoncer au dépôt de cette proposition de loi. Il peut y avoir d'ici là un revirement de jurisprudence ! En outre, vous ne semblez pas favorable au « tout pénal » ; après tout, la justice civile a du bon !

Le deuxième article visé par cet article 2 bis, l'article 223-12 du code pénal, concerne bien la violence routière. Mais, comme nous l'a dit M. Hyest ce matin, ce serait le seul cas, dans le code de la route, où l'on tiendrait compte de l'état d'une victime alors que l'auteur de l'infraction ne le connaît pas !

M. Nicolas About. Et les coups et blessures ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mais il y a un autre argument. Contrairement à ce que vous nous avez dit, monsieur About, la mère n'est pas obligée d'aller devant le tribunal civil pour obtenir réparation. Elle peut se porter partie civile devant le tribunal correctionnel,...

M. Nicolas About. Ce n'est pas un problème de réparation !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... lequel a toutefois le droit de décider la relaxe, encore qu'il soit bien rare que dans un accident de la circulation il n'y ait pas d'autres conséquences telles que arrêt de travail, contusions, etc.

Au demeurant, même si, par impossible, c'était le cas, le tribunal correctionnel a parfaitement le droit, depuis une réforme réalisée par M. Badinter, en 1983 je crois, de statuer au civil. Cela ne retarde donc en rien la procédure et, en tout état de cause, la mère aura réparation de son préjudice,...

M. Nicolas About. Pas toujours !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... ce qui est - n'est-il pas vrai ? - l'essentiel.

N'ayez donc pas de regret, il est bon que cet article qui nous venait cavalièrement de l'Assemblée nationale ne soit pas retenu.

M. le président. La parole est à M. André Lardeux, pour explication de vote.

M. André Lardeux. Chers collègues, je ne vais pas reprendre tout le débat juridique, très intéressant, auquel nous venons d'assister, mais simplement expliquer le sens de mon vote.

Je me rallie à la proposition faite par le président Garrec : rédigeons et déposons une proposition de loi pour traiter ce sujet particulier. Permettez-moi cependant de faire valoir une clause de conscience : supprimer l'article 2 bis ne signifie pas remettre en cause son contenu. En effet, je croyais que cette loi était une loi de protection de la vie.

Si, juridiquement, l'article 2 bis est un cavalier, philosophiquement, il ne l'est peut être pas tant que cela, puisqu'il s'agit de protéger la vie.

Il est certain qu'une femme subit un préjudice si elle perd l'espérance d'un enfant attendu depuis plusieurs mois, parfois depuis plusieurs années parce que la grossesse ne survient pas forcément toujours quand on le décide.

Selon certains - je ne partage pas leur opinion, mais je la respecte -, l'embryon n'est pas une personne. Personnellement, je pense le contraire, et je demande à mon tour que l'on respecte mon opinion sur le sujet.

Je ne voterai donc pas la suppression de cet article, mais, s'il est supprimé, je signerai la proposition de loi qui a été évoquée par M. Garrec.

M. le président. La parole est à M. Philippe Arnaud, pour explication de vote.

M. Philippe Arnaud. Dans la discussion générale, j'ai exprimé mes plus expresses réserves à propos de la création d'un délit d'interruption involontaire de grossesse à l'occasion de l'examen de ce texte sur la répression de la violence routière. « Prudence, prudence ! », ai-je alors dit.

J'ai écouté avec beaucoup d'attention les différents intervenants et j'ai été extrêmement attentif à l'argumentation très forte des uns et des autres.

Pour ce qui me concerne, je me rallierai à la proposition de suppression de cet article, sans méconnaître la réalité de ce problème. En effet, ce n'est pas à l'occasion de l'examen de ce texte - qui, par ailleurs, fait l'objet d'un très large consensus, car nous sommes tous d'accord pour lutter contre la violence routière - que nous pourrons régler cette question.

A mon avis - mais je ne suis pas juriste -, il existe de nombreuses autres situations qui pourraient mettre en cause des personnes physiques, des mères. Par exemple, si une femme enceinte chute sur un trottoir mal entretenu et que cette chute provoque une interruption involontaire de grossesse, que se passe-t-il ?

M. Nicolas About. Rien !

M. Philippe Arnaud. Je suis donc très heureux de la proposition de la commission des lois : traitons ce problème de façon globale et en dehors de ce projet de loi. Il s'agit en effet d'un sujet beaucoup plus complexe que la seule violence routière.

Je voterai donc la suppression de l'article 2 bis, et je participerai à l'élaboration de la prochaine proposition de loi ainsi qu'aux discussions qui suivront.

M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour explication de vote.

M. Paul Girod. Nous savons tous que nous sommes en train de vivre un moment important, parce qu'il s'agit d'un problème grave, d'un problème de fond.

J'aurais été tenté de retenir le raisonnement du cavalier - et ne voyez là aucun mauvais jeu de mots s'agissant d'un texte sur la sécurité routière ! -, mais je me rallierai finalement aux amendements de suppression. Toutefois, je tiens à dire que je suis en opposition totale avec les propos de M. Dreyfus-Schmidt. Autant je comprends son argument relatif à l'insertion un peu incongrue d'une disposition aussi grave dans le cadre d'une loi sur la sécurité routière, autant je désapprouve totalement l'argumentation qu'il a développée ensuite sur le fond du problème : à mes yeux, un véritable problème de société sous-tend ce texte.

La raison pour laquelle je vais, en définitive, me rallier aux amendements de suppression, c'est que, comme l'a dit il y a un instant le président de la commission des lois, une proposition de loi que, pour ma part, je m'honnorerai de signer avec lui, sera déposée, et j'ai l'espoir que, dans le cadre des niches parlementaires, cette proposition viendra très vite en discussion, pour que nous puissions débattre au fond d'une solution qui permette de combler un vrai vide juridique.

On ne peut pas à la fois évoquer le droit du foetus et celui de la femme enceinte. De deux choses l'une : ou bien ce sont deux personnes distinctes, et quelles que soient les circonstances de l'interruption involontaire de grossesse, celui qui en est la cause se trouve être l'auteur d'un délit éventuel contre une personne existante ; ou ce ne sont pas deux personnes distinctes, et il n'y a aucune raison que la femme soit privée de toute capacité de reconnaissance du dommage qui lui a été causé - et autrement que sur le plan civil - au motif que ce n'est pas une partie constituante de son propre corps.

Par conséquent, la solution vers laquelle nous nous dirigeons, c'est-à-dire la suppression de l'article 2 bis dans le projet de loi mais sa reprise le plus rapidement possible dans un texte autonome, me paraît la plus sage.

M. le président. La parole est à M. Nicolas About, pour explication de vote.

M. Nicolas About. Le président Garrec a d'autant plus raison que, ce matin, il penchait encore pour le maintien de la disposition votée par l'Assemblée nationale.

Il a raison parce que, comme de nombreux collègues, comme M. le ministre, il considère que le problème n'est pas seulement juridique.

Il a surtout raison lorsqu'il demande si, par le biais d'un texte consacré à la sécurité routière, on peut traiter un sujet aussi important que celui du statut de la femme enceinte, de son intégrité, de sa protection. Et je ne parle volontairement pas, comme certains l'ont fait, du statut du foetus.

Chacun a sa propre idée de ce problème. Pour ma part, je m'en tiens aux dispositions de la loi et j'estime que la femme enceinte est une entité en elle-même. J'en veux pour preuve - je l'ai rappelé - les nombreuses dispositions législatives qui protègent la femme enceinte.

Nous avons la chance - le président Garrec et moi-même en avons parlé - qu'il existe un texte sur la bioéthique dont le Sénat discutera en deuxième lecture. Un tel débat trouverait mieux sa place dans le cadre d'un texte relatif à la bioéthique ou d'une proposition de loi séparée.

Et je mettrai au défi quiconque de le soumettre au Conseil constitutionnel et d'obtenir gain de cause ! Cette menace avait déjà été formulée à propos de l'arrêt Perruche. (M. Michel Dreyfus-Schmidt s'exclame.) Si M. Dreyfus-Schmidt soumettait le texte au Conseil constitutionnel pour obtenir la suppression de cette disposition, je serais sans crainte. En effet, comme M. le président Garrec et M. le ministre, je pense que ce dispositif ne présente aucune difficulté sur le plan juridique.

Voilà pourquoi, en tout état de cause, j'approuve la proposition qui nous est faite par le président de la commission des lois et je me prépare à une nouvelle discussion dans un autre cadre.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est à propos de l'arrêt Perruche que vous aviez une majorité hétéroclite !

M. Nicolas About. Vous n'avez pas saisi le Conseil constitutionnel ! Pourtant, vous l'aviez promis !

M. le président. La parole est à M. Paul Blanc, pour explication de vote.

M. Paul Blanc. Puisque j'accepte la proposition de mon collègue M. Lardeux, je voterai contre les amendements de suppression.

J'agirai ainsi parce que je n'oublie pas que je suis médecin. Pour moi, un traumatisme routier qui entraîne un éclatement de la rate nécessitant une splénectomie est aussi important que le décollement du placenta qui provoquera une interruption de grossesse. Il s'agit d'une atteinte à l'intégrité de la femme enceinte. Je ne vois pas pourquoi elle ne serait pas prise en compte.

C'est la raison pour laquelle, en conscience, je voterai contre les amendements n°s 2, 35 et 72.

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Desmarescaux, pour explication de vote.

Mme Sylvie Desmarescaux. Avant d'être sénateur, je suis mère de famille et je considère que, pour une femme enceinte, il est beaucoup plus grave de perdre un enfant, même à quelques semaines de grossesse, que d'avoir un bras cassé ou qu'être blessée physiquement. Or, dans ce dernier cas, l'automobiliste serait puni alors que, dans le premier cas, il ne le serait pas.

Je voterai donc contre la suppression de l'article 2 bis.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 2, 35 et 72.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

1502942921472857 En conséquence, l'article 2 bis est supprimé et les amendements n°s 32, 108 et 31 rectifié n'ont plus d'objet.

Art. 2 bis
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Art. 3

Article additionnel après l'article 2 bis

M. le président. L'amendement n° 87, présenté par M. About, est ainsi libellé :

« Après l'article 2 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Il est inséré, après l'article 223-12 du code pénal, un article ainsi rédigé :

« Art. ... _ Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions définies à la présente section.

« La peine encourue par les personnes morales est l'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

Art. additionnel après l'art. 2 bis
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Art. 4

Article 3

M. le président. « Art. 3. - I. - Le deuxième alinéa de l'article 434-10 du code pénal est complété par les mots : "hors les cas prévus par les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1".

« II. - L'article L. 234-11, le II de l'article L. 234-12, le deuxième alinéa de l'article L. 234-13 et l'article L. 235-5 du code de la route sont abrogés.

« III. - Dans le 2° de l'article 398-1 du code de procédure pénale, les références : "222-19, 222-20" sont remplacées par les références : "222-19-1, 222-20-1". »

L'amendement n° 3, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après le paragraphe II de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :

« II bis . _ Les dispositions de l'article L. 234-11, du II de l'article L. 234-12, du deuxième alinéa de l'article L. 234-13 et de l'article L. 235-5 du code de la route, ainsi que celles du deuxième alinéa de l'article 434-10 du code pénal dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente loi, demeurent applicables aux infractions commises avant cette entrée en vigueur. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Le projet de loi abroge les dispositions du code de la route prévoyant un doublement des peines en cas d'homicide ou de blessures involontaires sous l'empire d'un état alcoolique ou après avoir fait usage de stupéfiants et limite celles du code pénal prévoyant un doublement similaire en cas de délit de fuite, en raison de la création de nouvelles infractions spécifiques.

Ces nouvelles dispositions, plus sévères que les précédentes, ne seront toutefois applicables qu'aux infractions commises après l'entrée en vigueur de la loi.

Pour éviter que, pendant une période transitoire, les auteurs d'homicides ou de blessures involontaires ne soient moins réprimés du fait de l'abrogation ou de la modification des anciennes dispositions, la commission des lois a pensé qu'il convenait de préciser que celles-ci demeurent applicables aux faits commis avant l'entrée en vigueur de la réforme.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Chapitre II

Récidive, peines complémentaires

et amende forfaitaire

Section 1

Dispositions relatives à la répression des infractions commises en récidive

Art. 3
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Art. 5

Article 4

M. le président. « Art. 4. - I. - Le 5° de l'article 131-13 du code pénal est complété par les mots :", hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit".

« II. - L'article 132-11 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les cas où la loi prévoit que la récidive d'une contravention de la cinquième classe constitue un délit, la récidive est constituée si les faits sont commis dans le délai de trois ans à compter de l'expiration ou de la prescription de la précédente peine. »

« III. - Il est inséré, après l'article 132-16-1 du même code, un article 132-16-2 ainsi rédigé :

« Art. 132-16-2. - Les délits d'homicide involontaire ou d'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur prévus par les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction.

« Les délits prévus par les articles L. 221-2, L. 234-1, L. 235-1 et L. 413-1 du code de la route sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction. Ils sont également assimilés aux délits mentionnés à l'alinéa précédent lorsqu'ils constituent le second terme de la récidive. »

« IV. - Dans le I de l'article L. 221-2 du code de la route, les mots : "au sens de l'article 132-11 du code pénal" sont remplacés par les mots : "au sens du deuxième alinéa de l'article 132-11 du code pénal".

« V. - Au premier alinéa de l'article L. 413-1 du même code, les mots : "dans le délai d'un an à compter de la date à laquelle cette condamnation est devenue définitive" sont remplacés par les mots : "en état de récidive dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article 132-11 du code pénal". »

L'amendement n° 4, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :

« VI. _ L'avant-dernier alinéa (5°) de l'article 769 du code de procédure pénale est complété par les mots : " ; ce délai est porté à quatre ans lorsqu'il s'agit d'une contravention dont la récidive constitue un délit." »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Le 5° de l'article 769 du code de procédure pénale rend obligatoire l'effacement à l'expiration d'un délai de trois ans des contraventions qui font l'objet d'un enregistrement au casier judiciaire national.

S'agissant des contraventions de la cinquième classe qui, en récidive, constituent un délit, il convient de porter ce délai à quatre ans.

En effet, le II de l'article 4 du projet de loi porte, dans cette hypothèse, le délai de récidive à trois ans. Si la nouvelle infraction est commise près de trois ans après la première condamnation, le risque existe qu'au moment du jugement de ces nouveaux faits la première condamnation ait été effacée du casier judiciaire.

Or, pour retenir l'état de récidive légal, il est en pratique nécessaire que la première condamnation figure toujours au bulletin numéro 1 du casier judiciaire du prévenu.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, contre l'amendement.

M. Jacques Mahéas. Cet amendement participe de l'objectif visé par l'article 4 qui tend à renforcer la sévérité des règles applicables en matière de récidive. Il a pour objet de modifier l'article 769 du code de procédure pénale pour prévoir que les condamnations portant sur les contraventions de la cinquième classe, dont la récidive constitue un délit, sont retirées du bulletin numéro 1 du casier judiciaire après un délai de quatre ans, contre trois ans actuellement.

Rappelons que l'article 4 porte à trois ans le délai d'appréciation de la récidive. Selon M. le rapporteur, si la nouvelle infraction est commise près de trois ans après la première condamnation, il existerait un risque qu'au moment du jugement de ces nouveaux faits la première condamnation ait été effacée du casier judiciaire. Notre rapporteur estime donc qu'il est nécessaire d'augmenter la durée d'inscription de ces condamnations.

On le voit, la commission s'inscrit toujours dans la même philosophie, c'est-à-dire dans une logique extrêmement répressive tendant au renforcement de la sévérité des peines existantes. A l'évidence, nous ne cherchons pas à minimiser le pouvoir de dissuasion, mais nous savons tous que les peines prononcées par les tribunaux sont très largement inférieures aux plafonds du droit en vigueur.

Je comprends bien qu'il s'agit ici de récidive. Mais trois ans me paraissent suffisants.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Section 2

Dispositions relatives aux peines complémentaires

Art. 4
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Art. 6

Article 5

M. le président. « Art. 5. - I. - Le 1° de l'article 131-6 du code pénal est complété par les mots : "cette limitation n'est toutefois pas possible en cas de délit pour lequel la suspension du permis de conduire, encourue à titre de peine complémentaire, ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle".

« II. - Le 1° de l'article 131-14 du même code est complété par les mots : "; cette limitation n'est toutefois pas possible en cas de contravention pour laquelle la suspension du permis de conduire, encourue à titre de peine complémentaire, ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle".

« III. - Le 1° de l'article 131-16 du même code est complété par les mots : "sauf si le règlement exclut expressément cette limitation".

« III bis. - Avant le dernier alinéa de l'article 131-22 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la personne a été condamnée pour un délit prévu par le code de la route ou sur le fondement des articles 221-6-1, 222-19-1, 222-20-1 et 434-10, elle accomplit de préférence la peine de travail d'intérêt général dans un des établissements spécialisés dans l'accueil des blessés de la route. »

« IV. - L'article 132-28 du même code est complété par les mots : "; le fractionnement de la peine de suspension de permis de conduire n'est toutefois pas possible en cas de délits ou de contraventions pour lesquels la loi ou le règlement prévoit que cette peine ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle".

« V. - Le 3° de l'article 221-8 du même code est complété par les mots : "; dans les cas prévus par l'article 221-6-1, la suspension ne peut pas être assortie du sursis, même partiellement, et ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; dans les cas prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa de l'article 221-6-1, la durée de cette suspension est de dix ans au plus".

« VI. - Le 3° de l'article 222-44 du même code est complété par les mots : "; dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, la suspension ne peut pas être assortie du sursis, même partiellement, et ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; dans les cas prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa des articles 222-19-1 et 222-20-1, la durée de cette suspension est de dix ans au plus".

« VII. - Le 3° de l'article 223-18 du même code est complété par les mots : "; si le délit a été commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, la suspension ne peut pas être assortie du sursis, même partiellement, et ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle".

« VIII. - A l'article 434-45 du même code, les mots : "cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle" sont remplacés par les mots : "cette suspension ne pouvant pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle".

« IX. - Le troisième alinéa de l'article 708 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La suspension ou le fractionnement de la peine de suspension de permis de conduire n'est toutefois pas possible en cas de délits ou de contraventions pour lesquels la loi ou le règlement prévoit que cette peine ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle.

« X. - Au 1° du II des articles L. 224-16 et L. 234-8, au 1° du I de l'article L. 234-2 et au deuxième alinéa de l'article L. 413-1 du code de la route, les mots : "cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle" sont remplacés par les mots : "cette suspension ne pouvant pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle". »

« XI. - Au 1° du II des articles L. 235-1 et L. 235-3 du même code, les mots : "cette suspension peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle" sont remplacés par les mots : "cette suspension ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle".

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, sur l'article.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je souhaite adresser deux prières à M. le garde des sceaux : d'abord, d'avoir la gentillesse de ne pas abuser de son avantage qui lui permet de prendre la parole autant qu'il le veut et en dernier lieu ; ensuite, de ne pas forcer son talent et de bien vouloir ne pas être polémique.

On constate aujourd'hui une baisse de la violence routière. Chacun s'en félicite, croyez-le bien. Nous ne demandons qu'une chose : que cette tendance se confirme.

Des hausses et des baisses ont déjà été observées ; nous en examinerons les causes. Mais vous avez indiqué tout à l'heure que j'avais dit qu'il ne fallait rien faire. Ce n'est pas exact - permettez-moi de le rappeler - , puisque j'ai demandé que la vitesse maximale des voitures soit limitée et que les constructeurs français soient obligés de les équiper toutes, et pas seulement les plus puissantes, de limitateurs de vitesse.

Vous avez par ailleurs évoqué les associations, monsieur le garde des sceaux. Il y a longtemps que nous les connaissons !

Je me souviens d'ailleurs que M. Méhaignerie, qui occupait alors votre place, nous avait présenté un texte contre la violence routière. C'était juste avant Pâques et, à la différence de ce soir, les représentants des associations remplissaient les tribunes. Le débat ayant finalement été retardé, il n'avait plus d'intérêt parce qu'il ne pouvait plus en être rendu compte dans les médias avant Pâques ; il a donc été renvoyé.

Je n'ai aucun mépris pour les associations de victimes. J'ai plaidé pendant de longues années pour de nombreuses victimes devant nombre de tribunaux, mais ce ne sont pas elles qui font la loi. Les victimes ont droit à réparation, elles ont le même droit que nous tous de tout faire pour qu'il y ait le moins possible de tués et de blessés sur les routes, mais pas plus.

Vous ajoutez : qu'avez-vous fait ? Il y a eu le délit de grande vitesse, qui a donné des résultats. Il y a eu aussi une plus grande sévérité des tribunaux face aux violences routières en application des lois existantes. C'est d'ailleurs pourquoi je vous ai demandé de nous indiquer le pourcentage d'affaires où la peine maximale a été prononcée.

Enfin, il y a la peur du gendarme. A ce propos, ce projet de loi instaure le contrôle automatique de la vitesse. C'est une très bonne chose. En Suisse, il est impossible de dépasser la vitesse autorisée sur une autoroute sans être verbalisé. Ce n'est pas le cas en France où, quand vous roulez à 130 km/h, vous êtes doublé par tout le monde !

L'article 5 met gravement en cause la souplesse nécessaire aux tribunaux. Nous avons demandé pendant des années que les préfets aient, comme les tribunaux, la possibilité d'accorder un permis blanc. Or, vous voulez quasiment le supprimer, dans tous les cas, y compris pour les tribunaux, à partir de trois mois d'incapacité totale de travail. Cela revient à instaurer la double peine : non seulement il y aura condamnation pénale, mais il y aura en plus perte de l'emploi.

C'est extrêmement grave. Un conducteur peut en effet avoir provoqué par maladresse, imprudence ou inattention un accident occasionnant plus de trois mois d'incapacité de travail. Il peut néanmoins mériter une indulgence que le préfet n'a jamais pu lui accorder.

Chacun se battait donc pour que le tribunal statue avant le préfet, de manière que le tribunal accorde cette indulgence dont le préfet n'avait pas de droit de faire usage.

A une certaine époque, la commission des lois du Sénat avait demandé et fait voter un amendement reconnaissant au préfet la possibilité de délivrer un permis blanc. Malheureusement, on en arrive aujourd'hui à l'opposé : il n'y en aura plus du tout dans la plupart des cas et on verra même le règlement en décider.

L'article 5 prévoit une kyrielle de dispositions prévoyant que, là où il était possible d'accorder un permis blanc pour usage professionnel, cela ne le sera plus. C'est un recul du droit, c'est un recul de la justice parce qu'il n'est de justice qu'humaine.

Il faut prendre en considération les faits qui amèneraient le préfet, s'il le pouvait, et en tout cas le tribunal, à accorder un permis blanc au chauffeur qui a eu le malheur de provoquer un accident, occasionnant trois mois d'arrêt de travail, alors qu'il ne boit pas et qu'il est habituellement un bon chauffeur.

Je voterai contre cet article 5.

M. le président. Je mets aux voix l'article 5.

Mme Nicole Borvo. Le groupe CRC s'abstient.

M. Jacques Mahéas. Le groupe socialiste également.

(L'article 5 est adopté.)

Art. 5
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Art. 6 bis

Article 6

M. le président. « Art. 6. - I. - L'article 131-16 du code pénal est complété par un 6° ainsi rédigé :

« 6° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de trois ans au plus. »

« II. - L'article 131-21 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la chose confisquée est un véhicule qui n'a pas été saisi au cours de la procédure, le condamné doit, sur l'injonction qui lui en est faite par le ministère public, remettre ce véhicule au service ou à l'organisme chargé de sa destruction ou de son aliénation. »

« III. - Il est inséré, après l'article 131-35 du même code, un article 131-35-1 ainsi rédigé :

« Art. 131-35-1. - Lorsqu'elle est encourue à titre de peine complémentaire, l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière est exécutée aux frais du condamné, dans un délai de six mois à compter de la date à laquelle la condamnation est définitive.

« L'accomplissement du stage donne lieu à la remise au condamné d'une attestation que celui-ci adresse au procureur de la République. »

« IV. - L'article 132-45 du même code est complété par un 15° ainsi rédigé :

« 15° En cas d'infraction commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »

« V. - L'article 221-8 du même code est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :

« 7° Dans les cas prévus par l'article 221-6-1, l'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 8° Dans les cas prévus par l'article 221-6-1, l'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;

« 9° Dans les cas prévus par l'article 221-6-1, l'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire ;

« 10° Dans les cas prévus par l'article 221-6-1, la confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire.

« Toute condamnation pour les délits prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa de l'article 221-6-1 donne lieu de plein droit à l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant dix ans au plus. En cas de récidive, la durée de l'interdiction est portée de plein droit à dix ans et le tribunal peut, par décision spécialement motivée, prévoir que cette interdiction est définitive. »

« VI. - L'article 222-44 du même code est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« 8° Dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, l'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 9° Dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, l'obligation d'accomplir, à leurs frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;

« 10° Dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, l'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire.

« Toute condamnation pour les délits prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa de l'article 222-19-1 donne lieu de plein droit à l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant dix ans au plus. »

« VII. - L'article 223-18 du même code est complété par un 5° et un 6° ainsi rédigés :

« 5° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, l'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 6° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, l'obligation d'accomplir, à leurs frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »

« VIII. - Au premier alinéa de l'article 434-41 du même code, après les mots : "d'annulation du permis de conduire", sont insérés les mots : ", d'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, d'obligation d'accomplir un stage".

« IX. - Le 2° de l'article 41-1 du code de procédure pénale est complété par les mots : "en cas d'infraction commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, cette mesure peut consister dans l'accomplissement, par l'auteur des faits, à ses frais, d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;".

« X. - Le II de l'article L. 221-2 du code de la route est complété par les 4° à 6° ainsi rédigés :

« 4° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 5° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;

« 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »

« XI. - Le IV de l'article L. 223-5 du même code est complété par les 4° à 6° ainsi rédigés :

« 4° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 5° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;

« 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »

« XII. - Le II de l'article L. 224-16 du même code est complété par les 4° à 6° ainsi rédigés :

« 4° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 5° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;

« 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »

« XIII. - L'article L. 231-2 du même code est complété par les 4° à 6° ainsi rédigés :

« 4° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 5° L'obligation d'accomplir, à leurs frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;

« 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »

« XIV. - Le I de l'article L. 234-2 et le II de l'article L. 234-8 du même code sont complétés par un 5° et un 6° ainsi rédigés :

« 5° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 6° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »

« XV. - Le II de l'article L. 235-1 du même code est complété par un 5° et un 6° ainsi rédigés :

« 5° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 6° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »

« XVI. - Le II de l'article L. 235-3 du même code est complété par un 5° et un 6° ainsi rédigés :

« 5° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 6° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »

« XVII. - Le deuxième alinéa de l'article L. 413-1 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il encourt également la peine d'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, pour une durée de cinq ans au plus, la peine d'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ainsi que la peine de confiscation du véhicule dont il s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »

« XVIII. - A l'article L. 224-14 du même code, après les mots : "du présent code," sont insérés les mots : "ou pour les délits prévus par les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 du code pénal".

« XIX. - L'article L. 224-15 du même code est abrogé. »

L'amendement n° 5, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« I. _ Compléter le texte proposé par le I de cet article pour compléter l'article 131-16 du code pénal par un alinéa ainsi rédigé :

« 7° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »

« II. _ En conséquence, après les mots : "complété par", rédiger comme suit la fin du premier alinéa du paragraphe I de cet article : "deux alinéas ainsi rédigés :". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. L'article 6 tend à créer deux peines complémentaires, à savoir les stages de formation à la sécurité routière et l'interdiction de conduire certains véhicules. Il vise également à étendre le champ d'application de la peine de confiscation du véhicule.

Ces dispositions sont tout à fait logiques et très saines, comme l'était d'ailleurs la suppression du permis blanc.

En ce qui concerne l'amendement n° 5, lorsque le Gouvernement décide de créer une contravention, il peut prévoir que cette contravention emportera également une ou plusieurs peines complémentaires. Mais il doit s'en tenir à la liste limitative des peines complémentaires que le législateur a créées à l'article 131-16 du code pénal.

L'article 6 crée une nouvelle peine complémentaire dite « stage de sensibilisation à la sécurité routière » pour certains délits au code de la route. Pour permettre au juge de police de pouvoir prononcer également cette peine complémentaire, il est opportun que celle-ci figure dans la liste de l'article 131-16 du code pénal.

Le Gouvernement pourra ainsi fixer par décret en Conseil d'Etat la liste des contraventions du code de la route des quatre premières classes et de la cinquième classe pour lesquelles cette peine complémentaire sera encourue.

Cet amendement a donc pour objet de clarifier la situation.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui vise à réparer une omission dans le texte, et il en remercie M. le rapporteur.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 73, présenté par M. Mahéas, est ainsi libellé :

« I. _ Compléter le texte proposé par le I de cet article pour compléter l'article 131-16 du code pénal par un alinéa ainsi rédigé :

« 7° L'exécution d'un travail d'intérêt général selon les modalités prévues aux articles 131-22 à 131-24 et à l'article 20-5 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante. »

« II. _ En conséquence, remplacer les mots : "un 6° ainsi rédigé" par les mots : "deux alinéas ainsi rédigés :". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Cet amendement a des visées pragmatiques. Il tend à favoriser le recours à une sanction alternative, le travail d'intérêt général, dont nous avons déjà abondamment parlé. J'ai notamment interrogé M. le ministre, qui a reconnu que le travail d'intérêt général avait perdu effectivement de son actualité et n'était plus appliqué depuis quelques années.

Il est bien évident que ce type de sanction présente un intérêt pédagogique puisqu'il permet de placer l'automobiliste défaillant dans des structures ayant un lien avec la circulation routière ou dans des hôpitaux.

Bien entendu, le présent amendement ne va pas dans le sens du vent, qui porte la majorité à vouloir toujours punir. Cependant, il est intéressant de noter qu'un rapport sur les modalités d'exécution des courtes peines, les alternatives à l'incarcération et la préparation des détenus à la sortie de prison, remis tout récemment à M. le garde des sceaux par M. Jean-Luc Warsmann, député UMP des Ardennes, propose un plan de relance et de diversification des travaux d'intérêt général.

Au cours des cinq dernières années, le nombre de TIG a baissé d'un quart. Il serait opportun d'inverser la tendance et d'engager de nouveau une réflexion sur l'utilité et la nature des TIG.

Lors de la mise en place des TIG, dans la ville dont je suis le maire, une cinquantaine d'employés communaux ont été formés à cet effet. Ainsi, pendant de nombreuses années, ceux qui effectuaient les TIG n'étaient pas seulement ceux qui avaient commis telle ou telle infraction. Cela se passait plutôt bien ; mais, depuis un an, nous n'en avons plus aucun. La seule lettre que j'ai reçue de la préfecture - personne n'assurait la liaison entre la préfecture et les municipalités - m'informait que, désormais, mon interlocuteur s'appellait M. Dupont. Or, six mois environ après avoir reçu cette lettre, je ne connais toujours pas ce M. Dupont.

Monsieur le garde des sceaux, il importe de réactiver ces TIG. Cette sanction me paraît préférable aux peines de prison, que vous distribuez allègrement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir la possibilité d'étendre les peines de travail d'intérêt général aux contraventions. Or les propositions de travail d'intérêt général sont trop insuffisantes pour que cette peine, qui est d'ailleurs très utile, puisque nous la proposons, soit prononcée en dehors de la matière délictuelle. Il paraît donc irréaliste de la prévoir en matière contraventionnelle.

En outre, le règlement peut déjà prévoir le travail d'intérêt général pour les contraventions de la cinquième classe. Ce dispositif paraît suffisant dans l'état actuel des choses.

C'est la raison pour laquelle la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux, Je suis défavorable à cet amendement, car il tend à inverser les choses en termes de gradation de peines.

Monsieur Mahéas, vous proposez de remplacer des contraventions, dont les niveaux de peines sont assez modestes, par le travail d'intérêt général. Or, je le rappelle, le non-respect de ce dispositif peut entraîner l'incarcération.

En revanche, sur le fond, je vous rejoins tout à fait : l'évolution de ces cinq dernières années doit nécessairement être corrigée. Grâce à des mesures d'organisation et à une mobilisation des préfectures, de meilleures relations doivent se développer avec les collectivités locales afin que les TIG soient beaucoup plus utilisés que ce n'est le cas actuellement. Mais je ne suis pas favorable au remplacement par des TIG des contraventions de ce niveau-là.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. Il s'agissait d'un amendement d'appel, monsieur le garde des sceaux. En réalité, j'entends bien vos arguments.

Je souhaitais de votre part un engagement fort pour relancer les TIG. Les contraventions m'ont donné l'opportunité d'aborder cette question, de la relance des TIG qui constitue une nécessité absolue. Comme vous vous êtes engagé à cet égard, monsieur le garde des sceaux, je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 73 est retiré.

L'amendement n° 106, présenté par M. Goulet, est ainsi libellé :

« I. - Compléter l'avant-dernier alinéa (10°) du V de cet article, l'avant-dernier alinéa (10°) du VI de cet article et le deuxième alinéa (5°) du VII de cet article par une phrase ainsi rédigée :

« Le tribunal peut également interdire la conduite de véhicules non équipés d'un enregistreur de vitesse.

« II. - Compléter le VIII de cet article par les mots : "l'interdiction de conduire des véhicules non équipés d'un enregistreur de vitesse". »

« III. - Compléter les X, XI, XII, XIII, XIV, XV et XVI de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° L'interdiction de conduire des véhicules non équipés d'un enregistreur de vitesse. »

« IV. - Compléter le deuxième alinéa du XVII de cet article par les mots : ", la peine d'interdiction de conduire des véhicules non équipés d'un enregistreur de vitesse". »

La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Je devrais enfin pouvoir séduire M. le rapporteur, même si les amendements précédents étaient aussi des amendements d'appel.

Le présent amendement me paraît répondre à un réalisme qui s'inscrit parfaitement dans l'arsenal mis à la disposition des magistrats pour sanctionner la délinquance routière et prévenir la récidive, arsenal qui doit être renforcé.

En réalité, il a pour objet d'élargir l'éventail des peines complémentaires en permettant au juge d'imposer au délinquant routier qui serait condamné pour un certain nombre de fautes l'installation, sur son véhicule, d'un dispositif enregistrant en continu les données de circulation, en particulier la vitesse.

La mise à l'épreuve du délinquant routier peut être limitée dans le temps ou rendue définitive par le magistrat. Il s'agit donc d'une mesure de souplesse.

La lutte contre les excès de vitesse s'inscrit logiquement dans la volonté affichée par le Gouvernement à cet égard. C'est la première cause - on ne le répétera jamais assez - des accidents de la circulation et c'est surtout un facteur aggravant de leurs conséquences corporelles.

Le conseil interministériel du 12 décembre 2002 a ainsi pris un certain nombre de décisions : possibilité de contrôler la vitesse des véhicules sur autoroute au moyen de tickets de péage ; équipement de nouveaux véhicules de l'Etat avec des limitateurs-régulateurs de vitesse adaptables et des dispositifs d'enregistrement des données de l'accident ; enfin, poursuite des démarches entreprises au niveau communautaire pour favoriser la prise en compte de la limitation de vitesse sur l'ensemble des véhicules à la construction.

Il s'agit davantage de brandir une menace de contrôle que d'accroître la répression. Cela ferait perdre aux délinquants le bénéfice du régime de responsabilité pour entrer dans celui de la contrainte.

Si l'intérêt pédagogique de cette mesure est évident, celle-ci revêt également un aspect symbolique très fort, car les conducteurs condamnés auront non plus une voiture comme les autres, mais un véhicule repérable en cas d'accident, puisque doté d'une plaque d'immatriculation plus facile à reconnaître par la police et la gendarmerie. Ce dispositif doit équiper la nouvelle flotte des véhicules de l'Etat. L'effet de masse lié à son emploi pour des peines complémentaires ne peut donc qu'en faire baisser le coût.

Enfin, la faisabilité de cette mesure a été testée puisque l'enregistreur de données existe déjà et a fait l'objet de multiples expériences - à l'étranger, en Suisse et au Canada - notamment au sein de certaines flottes d'entreprises.

Par conséquent, le dispositif que je propose par cet amendement permettra d'adresser un signal très fort à ceux qui n'auraient pas été « distingués » autrement, si je puis dire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. Monsieur Goulet, je comprends très bien les arguments que vous développez : vous cherchez à être pratique ! Votre amendement vise à permettre à certains juges d'interdire à des conducteurs condamnés de conduire des véhicules qui ne seraient pas munis d'enregistreurs. Or il est satisfait par le projet de loi. Celui-ci prévoit en effet la création d'une peine d'interdiction de conduire certains véhicules. Cela permettra au juge d'interdire la conduite de véhicules qui ne sont pas équipés d'un enregistreur.

Il est donc inutile de charger la barque, si je puis me permettre cette expression, dans la mesure où, je le répète, l'amendement est satisfait par le texte du projet de loi.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement partage l'analyse de M. le rapporteur. J'ajouterai un élément : les véhicules de tourisme équipés d'enregistreurs n'existent quasiment pas sur le marché à l'heure actuelle, en tout cas à des coûts raisonnables. Cette disposition risque donc de ne pas être appliquée.

Par ailleurs, je confirme l'analyse juridique de M. le rapporteur : le projet de loi, dans sa rédaction actuelle, permettra, lorsque ce type de matériel sera davantage diffusé, de prévoir, dans un décret, la liste des véhicules pouvant être interdits ou, au contraire, imposés par le tribunal.

M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Goulet ?

M. Daniel Goulet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 106 est retiré.

L'amendement n° 6, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« I. _ Compléter le texte proposé par le VII de cet article pour compléter l'article 223-18 du code pénal par deux alinéas ainsi rédigés :

« 7° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, l'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire ;

« 8° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, la confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »

« II. _ En conséquence, rédiger comme suit le premier alinéa du VII de cet article :

« VII. _ L'article 223-18 du même code est complété par quatre alinéas ainsi rédigés : ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Le projet de loi tend à compléter et à harmoniser les peines complémentaires qui sont encourues pour les infractions routières les plus graves. Pour le délit de mise en danger d'autrui, les peines d'immobilisation et de confiscation du véhicule n'ont pas été prévues. Le présent amendement tend à permettre au juge de prononcer ces peines en cas de mise en danger d'autrui.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 7, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après le paragraphe IX de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :

« IX bis. _ Le quatrième alinéa (3°) du II de l'article L. 221-2 du code de la route est supprimé. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. La loi pour la sécurité intérieure a prévu la possibilité de prononcer la confiscation du véhicule en cas de conduite en récidive sans être titulaire du permis de conduire.

Toutefois, la rédaction retenue n'est pas la même que celle qui est envisagée dans le présent projet de loi. L'amendement tend donc à supprimer la rédaction issue de la loi pour la sécurité intérieure, étant entendu que le paragraphe X du présent article reprend cette peine dans une autre rédaction.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 114, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Supprimer le paragraphe XVIII de cet article. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Le même article du code de la route est modifié dans deux articles du projet de loi, les articles 6 et 9 bis, sans que les modifications proposées soient parfaitement coordonnées.

Il paraît préférable à la commission de modifier une seule fois cet article. Le présent amendement tend donc à supprimer le paragraphe XVIII de l'article 6.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 114.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Art. 6
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Art. additionnel après l'art. 6 bis

Article 6 bis

M. le président. « Art. 6 bis. - Il est inséré, après l'article 223-20 du code pénal, un article 223-21 ainsi rédigé :

« Art. 223-21. - Les personnes physiques coupables de l'infraction prévue par l'article 223-12 encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire ; dans le cas prévu par l'article 221-6-1, la suspension ne peut pas être assortie du sursis, même partiellement, et elle ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;

« 2° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant cinq ans au plus ;

« 3° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 4° L'obligation d'accomplir, à leurs frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;

« 5° L'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire ;

« 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »

Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L'amendement n° 8 est présenté par M. Lanier, au nom de la commission.

L'amendement n° 36 est présenté par Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 74 est présenté par MM. Mahéas, Badinter et Lagauche, Mme Printz, M. Todeschini, Mme M. André, MM. Courrière, Debarge, Dreyfus-Schmidt, Frécon, Frimat, C. Gautier, Peyronnet, Sueur, Sutour et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 107, présenté par M. Goulet, est ainsi libellé :

« Compléter in fine le texte proposé par cet article pour l'article 223-21 du code pénal par un alinéa ainsi rédigé :

« 7° La peine d'interdiction de conduire des véhicules non équipés d'un enregistreur de vitesse. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 8.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec la suppression de l'article 2 bis.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 36.

Mme Nicole Borvo. Cet amendement est identique à celui que vient de présenter M. le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour présenter l'amendement n° 74.

M. Jacques Mahéas. C'est également un amendement de coordination.

M. le président. La parole est à M. Daniel Goulet, pour présenter l'amendement n° 107.

M. Daniel Goulet. Cet amendement n'a plus d'objet, car j'ai obtenu les réponses que je souhaitais. Par conséquent, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 107 est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques n°s 8, 36 et 74.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l'article 6 bis est supprimé.

Article additionnel après l'article 6 bis

Art. 6 bis
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Art. 7

M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après l'article 6 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Après le quatrième alinéa (3°) du I de l'article 23 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 3° bis Lorsqu'elle est prononcée à titre de peine complémentaire, l'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé ; »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. La loi pour la sécurité intérieure énumère les peines et mesures qui doivent être inscrites dans le fichier des personnes recherchées pour permettre aux forces de l'ordre d'effectuer leurs vérifications. Or le présent projet de loi crée une nouvelle peine d'interdiction de conduire certains véhicules. Il convient que cette peine soit inscrite au fichier des personnes recherchées, but de l'amendement n° 9.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6 bis .

Section 3

Dispositions relatives à la procédure

de l'amende forfaitaire

Art. additionnel après l'art. 6 bis
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Art. additionnel après l'art. 7

Article 7

M. le président. « Art. 7. - I. - Au premier alinéa de l'article L. 121-3 du code de la route, après les mots : "sur les vitesses maximales autorisées", sont insérés les mots : ", sur le respect des distances de sécurité entre les véhicules, sur l'usage de voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules".

« I bis. - Après la première phrase du premier alinéa de l'article 529-2 du code de procédure pénale, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Dans les cas prévus par l'article 529-10, cette requête doit être accompagnée de l'un des documents exigés par cet article. »

« II. - A l'article 529-8 du même code, les mots : "cet avis" sont remplacés par les mots : "l'avis de contravention".

« III. - Il est inséré, après l'article 529-9 du même code, trois articles 529-10 à 529-12 ainsi rédigés :

« Art. 529-10. - Lorsque l'avis d'amende forfaitaire concernant une des contraventions mentionnées à l'article L. 121-3 du code de la route a été adressé au titulaire du certificat d'immatriculation ou aux personnes visées aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 121-2 de ce code, la requête en exonération prévue par l'article 529-2 ou la réclamation prévue par l'article 530 n'est recevable que si elle est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et si elle est accompagnée :

« 1° Soit de l'un des documents suivants :

« a) Le récépissé du dépôt de plainte pour vol ou destruction du véhicule, ou une copie de la déclaration de destruction de véhicule établie conformément aux dispositions du code de la route ;

« b) Une lettre signée de l'auteur de la requête ou de la réclamation précisant l'identité, l'adresse, ainsi que la référence du permis de conduire de la personne qui était présumée conduire le véhicule lorsque la contravention a été constatée ;

« 2° Soit d'un document démontrant qu'il a été acquitté une consignation préalable d'un montant égal à celui de l'amende forfaitaire dans le cas prévu par le premier alinéa de l'article 529-2, ou à celui de l'amende forfaitaire majorée dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article 530 ; cette consignation n'est pas assimilable au paiement de l'amende forfaitaire et ne donne pas lieu au retrait des points du permis de conduire prévu par le troisième alinéa de l'article L. 223-1 du code de la route.

« L'officier du ministère public vérifie si les conditions de recevabilité de la requête ou de la réclamation prévues par le présent article sont remplies.

« Art. 529-11. - L'avis de contravention prévu par les articles 529-1 et 529-8 est envoyé à la suite de la constatation d'une contravention au code de la route réalisée grâce à un appareil homologué de contrôle automatique. En cas de réclamation portée devant le tribunal de police, le procès-verbal ou le rapport de l'officier ou de l'agent de police judiciaire faisant état du résultat de ce contrôle est alors dressé.

« Art. 529-12. - Les informations collectées et enregistrées lors de la constatation d'une contravention au code de la route réalisée au moyen d'un appareil homologué de contrôle automatique sont conservées jusqu'au paiement de l'amende forfaitaire ou de l'amende forfaitaire majorée ou, en cas de contestation, jusqu'à l'épuisement des voies de recours. »

« IV. - L'article 530 du même code est ainsi modifié :

« 1° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« S'il s'agit d'une contravention au code de la route, la réclamation n'est toutefois plus recevable à l'issue d'un délai de trois mois à compter de l'envoi de la lettre recommandée contenant l'avis d'amende forfaitaire majorée expédiée à l'adresse figurant sur le certificat d'immatriculation du véhicule, sauf si le contrevenant justifie qu'il a, avant l'expiration de ce délai, déclaré son changement d'adresse au service d'immatriculation des véhicules. » ;

« 2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« La réclamation doit être accompagnée de l'avis correspondant à l'amende considérée ainsi que, dans le cas prévu par l'article 529-10, de l'un des documents exigés par cet article, à défaut de quoi elle n'a pas pour effet d'annuler le titre exécutoire. »

« V. - L'article 530-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les cas prévus par l'article 529-10, en cas de classement sans suite ou de relaxe, s'il a été procédé à la consignation prévue par cet article, le montant de la consignation est reversé, à sa demande, à la personne à qui avait été adressé l'avis de paiement de l'amende forfaitaire ou ayant fait l'objet des poursuites. En cas de condamnation, l'amende prononcée ne peut être inférieure au montant prévu à l'alinéa précédent augmenté d'une somme de 10 %. »

« VI. - Au troisième alinéa de l'article L. 322-1 du code de la route, les mots : "dans les conditions prévues par l'article 530 du code de procédure pénale" sont remplacés par les mots : "selon les modalités et dans les délais prévus par les articles 529-10 et 530 du code de procédure pénale à peine d'irrecevabilité".

« VII. - Au premier alinéa de l'article L. 322-1 du même code, les mots : "demander au procureur de la République de" sont supprimés et cet alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il en informe alors le procureur de la République. »

L'amendement n° 10, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Avant le paragraphe I de cet article, ajouter un paragraphe additionnel ainsi rédigé :

« I A. _ Au premier alinéa de l'article L. 121-2 du code de la route, après les mots : "des véhicules", sont insérés les mots : "ou sur l'acquittement des péages". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. L'article 7 tend notamment à étendre le principe de la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule à de nouvelles infractions concernant le respect des distances de sécurité et l'usage des voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules.

Le présent amendement vise à prévoir également cette responsabilité pécuniaire en cas de contravention aux règles sur les péages. Une telle évolution permettra de développer les systèmes de télépéage et de supprimer les barrières aux péages, contribuant à une fluidité beaucoup plus grande de la circulation, comme c'était, je crois, votre but, monsieur le ministre. Quant aux contrevenants qui n'auront pas payé, ils feront simplement l'objet d'une photographie de leur plaque d'immatriculation.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

M. Robert Bret. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 11, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans le cinquième alinéa (2°) du texte proposé par le III de cet article pour insérer un article 529-10 dans le code de procédure pénale, remplacer les mots : "troisième alinéa" par les mots : "quatrième alinéa". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier rapporteur. Il s'agit de corriger une erreur de décompte d'alinéas.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du texte proposé par le III de cet article pour insérer un article 529-11 dans le code de procédure pénale, remplacer les mots : "est envoyé" par les mots : "peut être envoyé". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Avec la mise en oeuvre des nouveaux systèmes de contrôle automatisé, la démultiplication du nombre des faits constatés exige de procéder en deux temps pour alléger la charge de travail des services chargés de constater les contraventions au code de la route.

Dans un premier temps, les informations enregistrées lors de la constation de la contravention doivent servir à établir la carte-lettre d'amende forfaitaire en format informatisé qui est adressée au titulaire du certificat d'immatriculation, c'est-à-dire au propriétaire du véhicule.

Dans un second temps, il doit être procédé à l'édition du procès-verbal de contravention chaque fois que le propriétaire du véhicule formule une requête en exonération.

La rédaction de l'article donne l'impression que l'avis de contravention est toujours adressé à la suite de la constation d'une contravention par un appareil homologué. Or, parfois, la contravention est constatée par d'autres moyens, et il convient d'employer une terminologie moins exclusive que celle qui est employée à l'heure actuelle.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 13, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« I. _ Supprimer le texte proposé par le III de cet article pour insérer un article 529-12 dans le code de procédure pénale.

« II. _ En conséquence, après les mots : "du même code,", rédiger comme suit la fin du premier alinéa du III de cet article : "deux articles 529-10 et 529-11 ainsi rédigés :". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. L'Assemblée nationale a souhaité prévoir un délai de conservation des informations collectées par des appareils homologués de contrôle automatique.

Elle a prévu l'effacement lors du paiement de l'amende forfaitaire majorée ou à l'épuisement des voies de recours.

Ces délais sont insuffisants. En effet, lorsque l'amende est payée ou que la condamnation devient définitive, les points sont retirés du permis de conduire. La décision de retrait de points est une décision administrative qui peut faire l'objet d'un recours devant les juridictions administratives. Il faut donc que les informations relevées par les appareils soient conservées tant que l'affaire est susceptible d'être évoquée devant les juridictions administratives.

Un amendement que nous examinerons ultérieurement prévoit un dispositif alternatif.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans le texte proposé par le 1° du IV de cet article pour compléter le deuxième alinéa de l'article 530 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "à compter de l'envoi de la lettre recommandée contenant l'avis d'amende forfaitaire majorée expédiée" par les mots : "lorsque l'avis d'amende forfaitaire majorée est envoyé par lettre recommandée". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Lucien Lanier, rapporteur. Cet amendement concerne les lettres recommandées.

L'objet des précisions ajoutées par le projet de loi à l'article 530 du code de procédure pénale est d'instituer une présomption de domiciliation à l'adresse déclarée sur le certificat d'immatriculation des véhicules, afin d'éviter que les contrevenants qui ont changé d'adresse sans en informer le fichier des cartes grises - dans le délai d'un mois imposé par l'article R. 322-7 du code de la route - ne puissent ainsi indéfiniment contester les contraventions ayant fait l'objet d'un avis d'amende forfaitaire majorée envoyé à leur ancienne adresse. Cela se pratique vraiment très couramment.

Pour cela, est institué un délai de contestation de trois mois, à compter de l'envoi de l'avis d'amende forfaitaire majorée à l'adresse déclarée.

Afin que le point de départ de ce délai soit certain, et que ce délai de trois mois puisse courir, il convient que l'avis soit adressé par lettre recommandée, ce que prévoit effectivement le texte.

Toutefois, il n'est pas souhaitable que tous les avis d'amende forfaitaire majorée - y compris en matière de stationnement - soient adressés de cette manière, comme cela semble pourtant résulter du texte proposé, car cela entraînerait un surcoût très important pour les services du recouvrement des amendes.

En 2001, le Trésor public a pris en charge environ neuf millions de titres exécutoires d'amende forfaitaire majorée : adressés par lettres simples, ces envois ont ainsi coûté 4,14 millions d'euros, et ils auraient entraîné une dépense d'environ 25,38 millions d'euros s'ils avaient dû être adressés par lettres recommandées. Je vous laisse faire la différence !

Le présent amendement, en permettant d'éviter le recours à des lettres recommandées pour les contraventions aux règles de stationnement, qui représentent environ 70 % des amendes forfaitaires, permettra ainsi d'économiser 14,8 millions d'euros.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. M. le rapporteur estime que la rédaction proposée peut donner l'impression que l'avis d'amende forfaitaire majorée est systématiquement adressé par lettre recommandée. Il considère que cette procédure n'a vocation à être utilisée que pour les contraventions les plus sérieuses, faute de quoi son coût serait prohibitif. Il serait d'ailleurs intéressant de connaître la différence entre le coût et le gain, mais la précision ne nous a pas été fournie.

M. le rapporteur propose donc de préciser clairement que la réclamation n'est plus recevable à l'issue d'un délai de trois mois lorsque l'avis d'amende est adressé par lettre recommandée et non à compter de l'envoi de la lettre recommandée.

Sans vouloir méconnaître le souci de simplification et d'économie qui anime la commission, limiter la portée de cette disposition aux amendes les plus sérieuses pose un problème d'égalité. Comment déterminer, en effet, ce que sont les amendes « les plus sérieuses » ? Il y aura alors deux poids, deux mesures entre les contrevenants, avec toujours une limite difficile à fixer. De surcroît, monsieur Lanier, le problème des contentieux a été réglé à l'Assemblée nationale.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 48, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Après le V de cet article, insérer deux paragraphes ainsi rédigés :

« ... _ Il est inséré, après l'article 530-2 du même code, un article 530-2-1 ainsi rédigé :

« Art. 530-2-1. _ Lorsque les avis de contravention ou d'amende forfaitaire majorée sont adressés à une personne résidant à l'étranger, les délais prévus par les articles 529-1, 529-2, 529-8, 529-9 et 530 sont augmentés d'un mois.

« Les dispositions des articles 529-10 et 530 du présent code et des articles L. 121-2 et L. 121-3 du code de la route relatives aux titulaires du certificat d'immatriculation du véhicule sont applicables aux personnes dont l'identité figure sur les documents équivalents délivrés par des autorités étrangères. »

« ... _ L'article 706-72 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour le jugement des contraventions mentionnées au premier alinéa, et notamment des contraventions au code de la route, la compétence territoriale des juridictions de proximité est celle des tribunaux de police, y compris des tribunaux d'instance ayant compétence exclusive en matière pénale en application des dispositions de l'article L. 623-2 du code de l'organisation judiciaire. »

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. L'amendement n° 48 a deux objets : d'une part, assurer le traitement de la situation des conducteurs étrangers qui commettent des infractions et, d'autre part, permettre le traitement du contentieux des contraventions au code de la route par le juge de proximité, y compris à Paris.

Pour ce qui est du premier point, il est nécessaire de prolonger d'un mois les délais, permettant ainsi de retrouver les titulaires de certificats d'immatriculation étrangers. Cette mesure est très importante, compte tenu de la nature de la circulation sur nos routes et sur nos autoroutes et de la fluidité de plus en plus grande des échanges entre les citoyens d'Europe.

Pour le second point, il s'agit de traiter la difficulté particulière qui tient au fait que Paris compte plusieurs tribunaux d'instance, mais un seul tribunal de police, alors que c'est habituellement l'inverse.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. M. le garde des sceaux vient d'exposer très clairement cet amendement.

Premièrement, il prévoit que le principe de la responsabilité pécuniaire du titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule s'applique aux étrangers, en prenant en compte, bien sûr, les documents équivalents délivrés par les autorités étrangères.

Deuxièmement, l'amendement tend à résoudre la difficulté que présente le jugement des auteurs des contraventions par les juridictions de proximité. En principe, en effet, la compétence géographique des juridictions de proximité est celle des tribunaux d'instance. Or, à Paris, un système spécifique prévaut, puisqu'il y a un tribunal d'instance à compétence civile par arrondissement, mais un seul tribunal de police pour Paris tout entier. Le Gouvernement veut prévoir la même règle pour les juridictions de proximité.

La commission est donc très favorable à cet amendement parfaitement cohérent.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, contre l'amendement.

M. Jacques Mahéas. Je suis opposé à cet amendement, et ce pour une multitude de raisons !

Les juridictions de proximité ne sont même pas encore en place, et l'on ne cesse d'ajouter à leurs compétences. Or, je le rappelle, ces juridictions travaillent à temps extrêmement partiel et, compte tenu de l'importance de ce contentieux, elles ne pourront jamais faire face. Cette proposition est complètement irréaliste et insusceptible de réduire les délais.

Par ailleurs, le juge de proximité a plutôt une mission de dialogue avec la population. Il s'assimile plus à un juge de paix qu'à une autorité administrative chargée de recouvrer des amendes pour des contraventions, fussent-elles commises par des étrangers.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 48.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 15 rectifié, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après le paragraphe V de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :

« V bis. _ Il est inséré, après l'article L. 130-7 du code de la route, un article L. 130-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 130-8. _ Lorsqu'elles sont effectuées par des appareils de contrôle automatique ayant fait l'objet d'une homologation, les constatations relatives à la vitesse des véhicules, aux distances de sécurité entre véhicules, au franchissement par les véhicules d'une signalisation imposant leur arrêt, au non-paiement des péages ou à la présence de véhicules sur certaines voies et chaussées, font foi jusqu'à preuve du contraire.

« Lorsque ces constatations font l'objet d'un traitement automatisé d'informations nominatives mis en oeuvre conformément aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, la durée maximale de conservation de ces informations ne peut excéder dix ans, sans préjudice de la possibilité pour le conducteur du véhicule ayant fait l'objet du contrôle de demander au procureur de la République territorialement compétent d'ordonner l'effacement des informations le concernant lorsqu'il a récupéré le nombre de points ayant été retirés de son permis de conduire ou lorsque la procédure le concernant a donné lieu à une décision définitive de relaxe. »

« Le sous-amendement n° 49, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Compléter le texte proposé par l'amendement n° 15 rectifié pour l'article L. 130-8 du code de la route par l'alinéa suivant :

« Pour l'application des dispositions relatives à l'amende forfaitaire, le lieu du traitement automatisé des informations nominatives concernant les constatations effectuées par les appareils de contrôle automatisé est considéré comme le lieu de constatation de l'infraction. »

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 15 rectifié.

M. Lucien Lanier, rapporteur. L'objet de cet amendement est double.

Il s'agit, premièrement, de préciser la force probante des constatations effectuées par des appareils de contrôle automatisé, dont il est indiqué qu'elles font foi jusqu'à preuve contraire, à la condition qu'il s'agisse d'appareils homologués, car c'est cette homologation qui permet d'assurer la fiabilité de leur fonctionnement.

Il s'agit, deuxièmement, de préciser la durée de conservation des informations relatives à des constatations lorsqu'elles font l'objet d'un traitement informatique. Cette conservation ne pourra excéder dix ans, délai maximum prévu par l'article L. 223-5, dernier alinéa, du code de la route pour la gestion du permis à points, mais l'effacement des données pourra être ordonné plus tôt par le procureur de la République, à la demande des intéressés, en cas de relaxe ou après réaffectation au permis de conduire des points ayant été retirés.

Cette disposition rend ainsi inutile l'article 529-12 du code de procédure pénale adopté par l'Assemblée nationale, qui prévoyait des délais de conservation trop courts pour permettre l'application des dispositions relatives au permis à points en cas de contentieux devant les tribunaux administratifs et qui doit être supprimé par coordination.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, pour défendre le sous-amendement n° 49 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 15 rectifié.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Ce sous-amendement vise à compléter le texte proposé par la commission des lois afin de préciser que le lieu du traitement automatisé est considéré comme le lieu de constatation de la contravention, ce qui permettra à l'officier du ministère public près le tribunal de police dans le ressort duquel se trouve le centre de traitement d'être compétent pour superviser l'envoi des avis d'amende forfaitaire et d'amende forfaitaire majorée, centraliser les réclamations et éditer les titres exécutoires. Sous cette réserve, le Gouvernement est favorable à l'amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 49 ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. Nous n'avons a priori pas d'objections contre ces dispositions, mais nous devons formuler des réserves importantes.

Tout d'abord, cet amendement vise à préciser que, lorsque les constatations relatives à certaines infractions du code de la route - vitesse des véhicules, distances entre véhicules, franchissement par les véhicules d'une signalisation imposant leur arrêt et présence de véhicules sur certaines voies et chaussées - sont réalisées par des appareils de contrôle automatiques ayant fait l'objet d'une homologation, ces constatations font foi jusqu'à preuve contraire.

Il s'agit d'une clarification qui permet d'éviter les risques de contentieux liés à l'usage de cette nouvelle technologie. Encore faut-il que nous ayons l'assurance que le matériel utilisé fonctionne correctement, en particulier celui qui mesure la distance de sécurité entre les véhicules. Quand on voit, sur les autoroutes et les boulevards périphériques, ces files de camions à la suite les uns des autres, on peut en effet s'interroger sur la distance de sécurité !

Nous souhaiterions que M. le ministre nous donne également l'assurance qu'il n'existe pas de problème d'homologation et de compatibilité, car l'extension du champ d'application de la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule n'est qu'un élément de la mise en place de la chaîne de contrôle et de sanction automatisée.

Par ailleurs, le Gouvernement prévoit d'installer plus de mille appareils de contrôle en trois ans, mais seule la première phase de ce déploiement est financée, me semble-t-il. Nous en reparlerons, d'ailleurs.

Avons-nous l'assurance, au regard des restrictions budgétaires qui ont affecté de nombreux ministères, notamment celui de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, que l'extension de ce dispositif ne sera pas altérée à l'avenir ? Il semble qu'elle sera financée au moyen du produit des amendes perçues.

Attention donc à un retournement du comportement des automobilistes, auxquels on annonce la mise en place d'un dispositif de contrôle plus sévère et plus efficace, mais, en fin de compte, inadapté sur le terrain. Cela donnerait à la loi un caractère d'effet d'annonce sans conséquences et risquerait d'aboutir à un relâchement du respect des règles de sécurité routière, faisant passer les nombreuses déclarations des membres du Gouvernement sur sa volonté de mettre fin à l'impunité sur les routes pour de simples incantations.

Sur le second point, cet amendement tend à une nouvelle rédaction du texte adopté par l'Assemblée nationale, avec le soutien du groupe socialiste, prévoyant un délai de conservation des informations collectées et enregistrées lors de la constatation d'une contravention au code de la route réalisée au moyen d'un appareil homologué de contrôle automatique : conservation jusqu'au paiement de l'amende forfaitaire ou de l'amende forfaitaire majorée ou, en cas de contestation, jusqu'a l'épuisement des voies de recours.

Il convient, en effet, de prévoir un effacement des informations collectées lors des contrôles automatisés. C'est un principe posé par la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés dont la mise à jour, pour tenir compte d'une directive européenne, est en cours de réalisation et suit la procédure de la navette. Elle prévoit que les données à caractère personnel ne peuvent être conservées au-delà de la durée nécessaire aux finalités pour lesquelles elles sont collectées et traitées, ce qui est le cas en la circonstance. Le rapporteur et le Gouvernement estiment que ce délai est trop court. C'est la raison pour laquelle ils proposent un effacement après une durée maximale de dix ans, délai identique à celui que prévoit le projet de loi pour la conservation des informations relatives au permis à points.

Notons que ce dispositif est encadré, puisqu'il respecte le droit de rectification dont bénéficie toute personne physique sur les données à caractère personnel la concernant. Ainsi, il prévoit la possibilité pour le conducteur du véhicule ayant fait l'objet du contrôle de demander au procureur de la République territorialement compétent d'ordonner l'effacement des informations le concernant lorsqu'il a récupéré le nombre de points ayant été retirés de son permis de conduire, ou lorsque la procédure le concernant a donné lieu à une décision définitive de relaxe.

Afin de s'assurer de l'effacement effectif des données et de permettre une information complète de l'automobiliste, il conviendrait d'envisager, lorsque l'intéressé en fait la demande, que le procureur de la République justifie, sans frais pour le demandeur, qu'il a procédé aux opérations d'effacement. Il s'agit de reprendre une règle définie par la loi de 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés de 1978.

Par conséquent, monsieur le garde des sceaux, vous le voyez, nous n'émettons pas d'objections a priori, mais nous soulevons un certain nombre d'interrogations assez poussées.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 49.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15 rectifié, modifié.

M. Jacques Mahéas. Compte tenu de l'absence de réponse de M. le garde des sceaux, le groupe socialiste ne prend pas part au vote !

M. Robert Bret. Le groupe CRC s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'article 7.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais faire quelques remarques, dans la perspective de la navette parlementaire, sur certains points qui n'ont pas fait l'objet d'amendement.

Toujours dans cette perspective, M. le garde des sceaux me permettra de lui rappeler - en m'excusant de le faire seulement maintenant - que je n'ai jamais dit que le simple délit de fuite n'était pas puni. J'ai dit, au contraire, qu'il est puni de manière différente selon la gravité des conséquences. C'est parfaitement exact, c'est même ce que vous aviez vous-même répondu à M. Joly.

Cela étant dit, dans cet article, les amendes forfaitaires, comme les ordonnances pénales, sont tout de même traitées d'une manière tout à fait particulière, fixées au départ sans que le prétendu contrevenant ait le droit de s'expliquer. Elles vous arrivent sans crier gare ! Or elles méritent, normalement, qu'on puisse y faire opposition. C'est le cas, par exemple, pour les ordonnances pénales, même si les juges, sachant qu'ils seront inondés de demandes s'ils y font droit, refusent généralement de diminuer l'amende en quoi que ce soit.

En ce qui concerne les amendes forfaitaires, il est dit à l'article 529-10 du code de procédure pénale : « Lorsque l'avis d'amende forfaitaire concernant une des contraventions mentionnées à l'article L. 121-3 du code de la route a été adressé au titulaire du certificat d'immatriculation ou aux personnes visées aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 121-2 de ce code, la requête en exonération prévue par l'article 529-2 ou la réclamation prévue par l'article 530 n'est recevable que si elle est adressée par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception et si elle est accompagnée (...) » de telle ou telle pièce.

Or, la moindre des choses, c'est que celui qui reçoit l'avis d'amende forfaitaire soit avisé par la même lettre que sa réclamation ne sera recevable que si elle est adressée par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception et accompagnée de telle ou telle pièce.

Elle devra être accompagnée notamment d'une consignation ; c'est dire que l'amende forfaitaire, même contestée, doit être payée. Elle sera remboursée si la contestation est reconnue fondée. Mais, s'il y a une contestation, il n'y a aucune raison de consigner le montant d'une amende virtuelle.

Enfin, il est ensuite indiqué que l'officier du ministère public, soit le commissaire de police, apprécie si les conditions de recevabilité de la requête ou de la réclamation prévue par le présent article sont remplies.

C'est tout de même un comble ! L'amende est forfaitaire, on n'a pas demandé son avis à l'intéressé, on ne lui précise pas qu'il doit répondre par lettre recommandée pour que sa réclamation soit recevable, accompagnée de telle ou telle pièce, on lui demande de consigner la somme et l'on s'en remet au commissaire de police pour la recevabilité et non à un juge ! Avouez que tout cela n'est pas normal. La moindre des choses serait que le commissaire de police n'apprécie que sous réserve de recours devant le tribunal de police.

A ce propos, si vous trouvez qu'un seul tribunal de police à Paris n'est pas suffisant, installez-en dans tous les arrondissements. Mais ne vous en remettez pas au juge de proximité sous ce prétexte, parce que, sur le reste du territoire, les tribunaux de police sont en nombre suffisant !

Je tenais à ce que tout cela figure au procès-verbal, afin que l'Assemblée nationale puisse en tenir compte en deuxième lecture.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je voudrais corriger un point inexact. L'amendement du Gouvernement sur Paris ne tendait pas à prévoir que les juges de proximité se substitueraient à Paris à l'unique tribunal de police ! Il s'agissait de prendre en compte le particularisme parisien qui veut qu'il n'y ait qu'un seul tribunal de police et plusieurs tribunaux d'instance. Mais la compétence des juges de proximité vaut pour l'ensemble du territoire national en cette matière.

En ce qui concerne la consignation - et je croyais l'avoir indiqué dans la discussion générale -, c'est l'esprit même du texte. Nous voulons faire en sorte d'appliquer la réglementation, en particulier la réglementation sur les limitations de vitesse, grâce, notamment, à des systèmes numérisés de constatation dont les éléments seront transmis à une chaîne automatisée à caractère judiciaire. Le dispositif ne peut fonctionner, compte tenu de l'aspect quantitatif de la matière - et vous le savez bien, vous qui êtes avocat -, que s'il existe un système automatique de traitement de l'amende, assorti, bien sûr, de la possibilité de recours, à condition que celui-ci ne soit pas utilisé.

C'est la raison pour laquelle nous prévoyons la consignation. Il s'agit en l'occurrence de sommes qui ne sont pas considérables. En outre, après la consignation, il y a une discussion, et le juge du tribunal tranchera sur le fond. Tel est l'esprit du texte. C'est un élément très important.

Si nous voulons que, dans notre pays, les règles sur lesquelles nous sommes tous d'accord soient enfin appliquées, il nous faut disposer de systèmes suffisamment automatisés pour que nos tribunaux ne soient pas embouteillés par des quantités invraisemblables d'affaires identiques, dépourvues de toute espèce d'intérêt sur le plan juridique et mobilisant des magistrats qui, franchement, monsieur le sénateur, ont autre chose à faire que de l'abattage sur la sécurité routière, traitant pendant des heures le même type de dossier. C'est de cela dont il s'agit.

Sans ce traitement automatique assorti d'une véritable sincérité, nous ne parviendrons pas à contrôler effectivement ne serait-ce que les limitations de vitesse.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et prévenir l'intéressé qu'il doit contester par lettre recommandée ?

M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.

M. Robert Bret. Le groupe CRC s'abstient.

(L'article 7 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 7

Art. 7
Dossier législatif : projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière
Art. 7 bis (début)

M. le président. L'amendement n° 37, présenté par Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Après le quatrième alinéa de l'article L. 236-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le comité contribue également à la promotion de la sécurité routière, au titre des risques professionnels, comme au titre de la sécurité des salariés. A cette fin, il organise régulièrement des réunions d'information et de formation. Il peut également proposer toute mesure susceptible d'y contribuer, notamment d'un point de vue préventif. Si l'employeur s'y refuse, il doit motiver sa décision. »

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Plus que de répression, ce dont nous avons vraiment besoin, en matière de sécurité routière, c'est de formation.

Dans un contexte où chaque année plusieurs milliers de personnes décèdent ou sont blessées sur les routes de France, s'affligeant ainsi mutuellement la plus extrême des sanctions, on peut en effet douter de l'effet réellement dissuasif de la sanction.

Beaucoup d'entre nous ont souligné depuis le début de nos débats les lacunes de la prévention et singulièrement de la formation. De nombreux amendements ont été déposés en ce sens, afin de parfaire l'éducation, en amont, au niveau de l'école, des futurs conducteurs.

Il convient également de développer une formation continue, en aval du permis de conduire, qui permette à chacun d'évaluer ses capacités de conduite et de se remettre à niveau.

On le sait, depuis plusieurs années, l'idée selon laquelle le lieu de travail serait un endroit particulièrement propice à cette formation fait son chemin.

Cette option se justifie à plus d'un titre. D'abord, bien évidemment, elle concerne ceux dont le travail est en contact étroit et constant avec la route. Je pense à l'ensemble des transporteurs routiers, mais également aux commerciaux qui parcourent chaque année plusieurs milliers de kilomètres ou à d'autre professions qui impliquent des déplacements fréquents, tels que les médecins, les infirmières, les postiers, etc.

L'idée de faire participer les entreprises à la formation des conducteurs et de les impliquer dans la prévention des accidents de la route apparaît également justifiée de façon beaucoup plus générale, dans la mesure où la très grande majorité des accidents de la route se produit lors des trajets domicile-travail. Ces accidents sont d'ailleurs considérés comme des accidents du travail.

Avec le présent amendement, les sénateurs communistes vous proposent de traduire en actes cette réflexion, en introduisant dans le code du travail l'obligation d'information et de formation des salariés à la sécurité routière.

Les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou C.H.S.C.T., obligatoirement constitués dans les entreprises de plus de cinquante salariés, nous sont apparus, de ce point de vue, particulièrement bien placés. La mission générale de protection et de sécurité des salariés qui est la leur ainsi que leur contribution à la prévention des risques les mettent dans le droit-fil des attentes en matière de sécurité routière.

Cette possibilité ne constitue évidemment qu'une première étape qui devra, après une période d'évaluation, être généralisée à l'ensemble des PME-PMI, selon des modalités qui restent à définir.

Pour l'instant, il nous semble que le Parlement ferait un grand pas en faveur de la prévention en adoptant le présent amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. Cet amendement me semble inutile. En effet, l'article L. 236-2 du code du travail prévoit précisément que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission de veiller à la sécurité des salariés et de procéder à l'analyse des risques professionnels.

C'est la raison pour laquelle, au sein des entreprises dans lesquelles la conduite automobile tient une place importante dans le travail ou dans les trajets des salariés, le CHSCT me paraît tout à fait habilité à intervenir sur cette question.

La commission a donc donné un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Evidemment, les actions de formation en entreprises qui traitent de la sécurité routière sont utiles, et il est intéressant que vous le souligniez. Simplement, les modalités qui sont proposées par cet amendement paraissent inadaptées. Nous pensons que le CHSCT n'est pas le lieu approprié pour dispenser cette formation.

En revanche, dans le droit-fil des délibérations du comité interministériel de la sécurité routière, le ministère du travail s'est emparé de cette question et a déjà saisi les partenaires sociaux pour négocier, notamment dans les branches professionnelles, le contenu et les modalités des actions de formation adéquates en faveur de la sécurité routière. Un bilan des négociations sera réalisé et le ministère en charge du travail prendra les mesures nécessaires pour prolonger au bon niveau les initiatives qui auront été prises dans les branches professionnelles.

Telle est en tout cas la réponse du Gouvernement qui devrait, me semble-t-il, vous donner satisfaction et vous permettre, monsieur Bret, de retirer votre amendement. Dans le cas contraire, le Gouvernement serait contraint, compte tenu de la démarche qui est engagée, d'émettre un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Bret, l'amendement est-il maintenu ?

M. Robert Bret. Je préfère la réponse du ministre à celle du rapporteur. En effet, si les CHSCT dans les entreprises avaient cette vocation, on le saurait. Or ce n'est pas le cas. Il reste donc à trouver la bonne réponse.

Monsieur le ministre, vous proposez une piste de réflexion.

M. Gilles de Robien, ministre. avec un engagement !

M. Robert Bret. Avec un engagement de votre part ! Sur cette base, je suis prêt, en accord avec mon groupe, à retirer l'amendement.

M. le président. L'amendement n° 37 est retiré.

L'amendement n° 109, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« I. _ Par dérogation aux dispositions de l'article L. 2334-24 du code général des collectivités territoriales, le produit des amendes perçu par la voie de systèmes automatiques de contrôle sanction sera versé, de 2004 à 2006, au profit du budget général de l'Etat. A l'issue de cette période, les règles définitives de répartition de ces sommes supplémentaires seront redéfinies.

« II. _ Les investissements et les coûts induits par l'installation des appareils de contrôle automatique seront pris en charge par l'Etat. »

Le sous-amendement n° 115, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Supprimer la seconde phrase du I du texte proposé par l'amendement n° 109. »

La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 109.

M. Gilles de Robien, ministre. Cet article additionnel prévoit que l'Etat aura la charge de l'investissement et de l'entretien des mille prochains nouveaux appareils de contrôle automatique. Afin de faire face à cette dépense, il est prévu, pendant une période transitoire de trois ans, d'affecter au budget général de l'Etat le produit des amendes lié à ces appareils. A l'issue de cette période, les règles de partage seront réexaminées.

Vous savez, mesdames, messieurs les sénateurs, que la mise en place de systèmes de contrôle automatisé sur les lieux les plus accidentogènes est vraiment l'un des éléments clés de la politique de prévention mais aussi de répression qu'il est proposé de mettre en place par ce projet de loi, comme M. le garde des sceaux l'a abondamment souligné.

Cela permettra d'accélérer le temps de traitement des contraventions. Cela libérera des policiers et des gendarmes de tâches administratives et leur permettra de se consacrer à des opérations de prévention sur la voie publique. L'installation de radars nécessite bien entendu un investissement considérable, de l'ordre de 100 millions d'euros pour 450 appareils prévus en 2004.

La conception de ce système a d'ailleurs été réalisée par une équipe interministérielle. C'est un système expérimental puisqu'aucun autre pays n'a atteint ce degré d'automatisation. Je me suis rendu la semaine dernière en Grande-Bretagne avec le délégué interministériel à la sécurité routière. Nous avons pu vérifier que ce pays avait obtenu des résultats bien meilleurs que les nôtres - 3 500 morts par an au lieu de 8 000 morts par an - malgré un système moins automatique et non numérisé de relevé des infractions. Nous serons donc nettement en avance avec le système que nous mettons en place.

Pour installer rapidement ces mille appareils, il est proposé que le produit des amendes automatisées serve spécifiquement au financement du déploiement de ce système. Ensuite, le produit des amendes sera à nouveau réparti entre le budget général et les collectivités locales.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 115 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 109.

M. Lucien Lanier, rapporteur. M. le ministre vient de préciser l'intérêt de l'achat de mille appareils automatisés. Cet achat ne sera possible qu'à condition d'en avoir les moyens. Pour ce faire, il faudra, pendant trois ans, que le produit des amendes puisse être perçu par l'Etat, étant entendu que ce dernier prendra en charge le financement de l'intégralité de ces appareils de contrôle automatisé et leur installation dans les endroits les moins sûrs, les plus accidentogènes.

Par conséquent, il devra les installer aussi bien sur les routes départementales, sur les routes communales - et même davantage sur les routes communales, puisque c'est sur ces dernières que se produisent le plus grand nombre d'accidents -, que sur les routes nationales.

En conséquence, la commission recommande tout particulièrement cette proposition.

Toutefois, le sous-amendement n° 115 vise à supprimer la seconde phrase du paragraphe I selon laquelle, à l'issue de la période de trois ans, les règles définitives de répartition des sommes supplémentaires seront redéfinies. Cette précision ne nous paraît pas claire.

La commission des lois propose qu'à l'issue de la période de trois ans pendant laquelle les amendes seront intégralement versées à l'Etat, on revienne obligatoirement à la répartition actuelle du produit des amendes entre l'Etat et les collectivités.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 115.

M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, vous avez affirmé tout à l'heure que votre ministère ne rencontre pas de difficultés budgétaires...

M. Gilles de Robien, ministre. Non !

M. Jacques Mahéas. ... et que vous alliez disposer de beaucoup plus de crédits au titre de la sécurité routière.

M. Gilles de Robien, ministre. Pas beaucoup plus, mais plus ! Vous, vous avez évoqué une réduction !

M. Jacques Mahéas. Or vous mettez le financement des appareils de contrôle automatique sur le dos des collectivités territoriales...

M. Gilles de Robien, ministre. Comment ça, « sur le dos » ?

M. Jacques Mahéas. Je vais vous l'expliquer, monsieur le ministre ! J'ai étudié les chiffres : le produit des amendes forfaitaires payées spontanément, qui est attribué aux collectivités territoriales, est estimé à 368 millions d'euros pour 2003, contre 244 millions d'euros en 2002 en raison de l'amnistie qui est intervenue cette année-là ; or vous nous dites que 450 appareils coûtent 100 millions d'euros. Il suffit de regarder les chiffres ! Votre objectif n'est quand même pas d'instaurer sur les routes l'automatisation de la collecte d'un nouvel impôt ! Le produit des contraventions est déjà très significatif dans notre pays, puisqu'il représentera 368 millions d'euros cette année.

Chaque amende forfaitaire rapporte quinze euros à la collectivité territoriale concernée ; en revanche, le ministère des finances considère que le produit des amendes majorées ne doit pas être alloué aux collectivités territoriales. Certes, ce n'est pas votre faute, monsieur le ministre : Bercy jouit d'une véritable autonomie d'action dans ce domaine et n'obtempère même pas aux injonctions de la Cour des comptes, qui a estimé qu'il s'agissait d'une anomalie.

L'entrée en vigueur du nouveau dispositif amènera une augmentation considérable du nombre des amendes forfaitaires pour que le montant de 368 millions d'euros puisse être atteint. Ce sera tout bénéfice pour l'Etat, comme vous l'avez dit, puisque cela engendrera des économies très importantes en termes de moyens humains pour la gendarmerie et la police.

M. Gilles de Robien, ministre. Je n'ai pas dit cela !

M. Jacques Mahéas. Il est vrai que ces gendarmes et ces policiers pourront être affectés à d'autres tâches, mais, compte tenu des sommes considérables en jeu, j'estime qu'il serait normal que l'Etat laisse aux collectivités territoriales le soin d'employer le produit des amendes. Elles sont mieux placées que lui pour mener les actions de sécurité, d'autant que les lois de décentralisation vont confier aux départements la responsabilité de la gestion d'une grande partie du réseau routier.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. Je ne puis accepter que l'on me fasse dire des choses que je n'ai pas dites.

Je n'ai jamais prétendu que nous disposions de trop de crédits pour la sécurité routière. J'ai simplement répondu à votre interpellation, monsieur Mahéas, aux termes de laquelle ces crédits étaient en diminution, en affirmant que le budget connaîtrait au contraire une progression de quelque 15 % en 2003. En outre, aucune réduction des crédits de la sécurité routière n'est envisagée pour 2004.

Néanmoins, des besoins financiers existent pour assurer la mise en oeuvre de nouvelles initiatives qui permettront de dégager des ressources supplémentaires. Les collectivités territoriales n'en pâtiront en aucun cas : il s'agit bien de ressources supplémentaires et de l'autofinancement d'un nouveau dispositif extrêmement onéreux que nous expérimentons dans le tunnel du Mont-Blanc. On peut penser que sa généralisation entraînera une baisse des coûts, mais l'investissement supplémentaire lié à ce système automatique demeure lourd, et c'est pourquoi nous souhaitons que l'on puisse aboutir à un autofinancement. C'est simple, et il n'y a là rien de bien redoutable pour les collectivités territoriales.

Enfin, monsieur Mahéas, je n'ai pas dit que nous allions réaliser des économies en matière de personnels de police et de gendarmerie. J'ai indiqué que la mise en place d'un système automatique permettra de redéployer des effectifs, et donc d'améliorer la sécurité sur la voie publique. Il me semble que tout cela est d'une grande logique !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 115.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 109, modifié.

M. Jacques Mahéas. Le groupe socialiste vote contre.

M. Robert Bret. Le groupe CRC s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.

Art. additionnel après l'art. 7
Dossier législatif : projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière
Art. 7 bis (interruption de la discussion)

Article 7 bis

M. le président. « Art. 7 bis. - Le Gouvernement présente au Parlement, chaque année, un rapport sur les conditions d'utilisation du produit des amendes engendrées par les infractions au code de la route. Ce rapport précise en particulier la répartition entre l'Etat et les collectivités locales ainsi que les conditions effectives d'affectation de ce produit à des actions de sécurité routière. »

L'amendement n° 95, présenté par M. Goulet, est ainsi libellé :

« Compléter in fine cet article par une phrase ainsi rédigée :

« Il est soumis pour avis au Conseil national de la sécurité routière. »

La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Je souhaite adresser une question à M. le rapporteur et à M. le ministre : leur paraît-il utile que le rapport visé à l'article 7 bis soit soumis pour avis au Conseil national de sécurité routière, le CNSR ? Sinon, j'aimerais qu'ils me démontrent qu'une telle proposition est inopportune.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.

En effet, prévoir la transmission pour avis au Conseil national de la sécurité routière serait une erreur, dans la mesure où ce dernier n'a pas vocation à émettre des avis sur des problèmes précis.

Une telle mesure serait d'ailleurs d'une utilité très limitée et retarderait très certainement la publication du rapport. En outre, rien n'interdit au Conseil national de la sécurité routière de s'intéresser à l'affectation du produit des amendes si elle peut avoir un effet sur la sécurité routière.

Par conséquent, ne modifions pas la nature des missions du Conseil national de la sécurité routière. J'ai l'honneur de siéger au sein de cet organe ; je sais qu'il a bien rempli son rôle jusqu'à présent et qu'il fonctionne encore mieux aujourd'hui que par le passé. Laissons-le travailler sans chercher à étendre le champ de ses responsabilités.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Je rappelle pour ma part que le CNSR est un organe de proposition. Il est tout à fait concevable de prévoir que le rapport visé lui soit adressé ; en revanche, lui demander d'émettre un avis formel ne me paraît pas correspondre à sa vocation.

M. le président. Monsieur Goulet, l'amendement est-il maintenu ?

M. Daniel Goulet. Les propos de M. le rapporteur et de M. le ministre répondent tout à fait à mon interrogation. Par conséquent, je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 95 est retiré.

Je mets aux voix l'article 7 bis.

(L'article 7 bis est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Art. 7 bis (début)
Dossier législatif : projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière
Art. additionnels avant l'art. 8 ou après l'art. 9 bis ou après l'art. 19

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DÉPÔT DE QUESTIONS ORALES AVEC DÉBAT

M. le président. J'informe le Sénat que j'ai été saisi des questions orales avec débat suivantes :

I. - M. Gérard Larcher appelle l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur la réorganisation en cours de certains services publics relevant de la responsabilité de l'Etat.

L'action de proximité de nos principaux services publics est un enjeu essentiel pour l'aménagemeent du territoire de notre pays.

Or, dans le cadre de la relance actuelle de la décentralisation, de la réforme de l'Etat mais aussi de l'ouverture à la concurrence impulsée par Bruxelles dans plusieurs secteurs, les structures de beaucoup de ces services publics vont devoir s'adapter. C'est une nécessité. Cette adaptation ne saurait toutefois se traduire ni par une remise en cause de la qualité des prestations d'intérêt général rendues à nos concitoyens dans les zones défavorisées, ni par un dépérissement de certains territoires.

Il convient, pour ce faire, de trouver le juste équilibre entre la nécessaire mutation des organismes chargés de services publics et l'indispendable respect d'un maillage pertinent du territoire.

La remise à plat de la carte d'accès aux services publics se doit, en conséquence, d'être engagée en concertation avec les élus locaux afin de déterminer les moyens de maintenir l'attractivité des territoires, notamment ruraux.

Cette démarche nécessite la définition de critères en termes d'accessibilité et de « péréquation » pour l'ensemble de l'offre de services sur un territoire donné : écoles, agences postales, services déconcentrés de l'Etat, hôpitaux, succursales de la Banque de France, SNCF...

C'est pourquoi il demande à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire de nous présenter les objectifs et la méthode du Gouvernement pour réussir pleinement cette nécessaire réforme (n° 15).

II. - M. Gérard César appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur le projet de réforme de la politique agricole commune (PAC), publié en janvier 2003. La commission des affaires économiques du Sénat a récemment exprimé sa position sur ce projet, en adoptant le rapport de la mission d'information sur la réforme de la PAC. Il n'apparaît pas urgent de procéder aujourd'hui à une réforme d'envergure, dès lors que la PAC dispose d'un cadre fixé jusqu'en 2006, voire jusqu'en 2013, compte tenu de l'accord de Bruxelles d'octobre 2002. Le découplage total des aides, proposition centrale du projet de réforme, comporte des risques importants : distorsions de concurrence, déstabilisation des marchés, polarisation des productions sur le territoire, voire réduction globale de l'activité agricole. La baisse des prix européens des céréales et du lait en vue de les rapprocher des prix mondiaux relève, quant à elle, d'une dangereuse illusion. L'absence de propositions tendant à relancer les productions oléoprotéagineuses et à corriger la faiblesse de certaines organisations communes de marché est également regrettable. Il serait, en revanche, opportun de profiter du rendez-vous à mi-parcours pour prolonger les quotas laitiers au-delà de 2008, simplifier le système d'aides directes au secteur bovin et renforcer le deuxième pilier. Il conviendrait également de préciser la notion de découplage partiel, autour de laquelle un consensus semble vouloir se dessiner... Aussi, il souhaiterait connaître l'appréciation du Gouvernement sur la position exprimée dans ce rapport et ses intentions concernant le déroulement ultérieur des négociations (n° 16).

Conformément aux articles 79, 80 du règlement, ces questions orales avec débat ont été communiquées au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.

12

TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 262, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

13

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. Philippe Marini une proposition de loi tendant à ce que le silence de l'administration à une demande d'un citoyen vaille acceptation.

La proposition de loi sera imprimée sous le n° 264, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'aministration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

J'ai reçu de M. Philippe Marini une proposition de loi tendant à simplifier l'exercice du droit de vote par procuration.

La proposition de loi sera imprimée sous le n° 265, distibuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

14

RENVOI POUR AVIS

M. le président. J'informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale habilitant le Gouvernement à simplifier le droit (n° 262, 2002-2003), dont la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale est saisie au fond est renvoyé pour avis à leur demande et sur décision de la conférence des présidents, à la commission des affaires économiques et du Plan, à la commission des affaires sociales et à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.

15

DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président. J'ai reçu un rapport déposé par M. Henri Revol, premier vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur l'impact éventuel de la consommation des drogues sur la santé mentale de leurs consommateurs : compte rendu de l'audition du 13 février 2003, établi par M. Christian Cabal, député, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Le rapport sera imprimé sous le n° 263 et distribué.

16

DÉPOTS RATTACHÉS POUR ORDRE

AU PROCÈS-VERBAL

DE LA SÉANCE DU 10 AVRIL 2003

DÉPÔT DE PROJETS DE LOI

M. le président. M. le président du Sénat a reçu le 11 avril 2003 de M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention d'établissement entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République gabonaise.

Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 256, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

M. le président du Sénat a reçu le 11 avril 2003 de M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'adhésion à la convention sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques.

Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 257, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

M. le président du Sénat a reçu le 11 avril 2003 de M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Espagne relatif à l'exploitation, à l'entretien, à la sécurité et, le cas échéant, à l'évolution du tunnel routier du Somport (ensemble un échange de lettres).

Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 258, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

M. le président du Sénat a reçu le 11 avril 2003 de M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification du traité entre la République française et le Royaume d'Espagne relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et douanière.

Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 259, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

M. le président du Sénat a reçu le 11 avril 2003 de M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant transposition de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau.

Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 260, distribué et renvoyé à la commission des affaires économiques et du Plan, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

M. le président du Sénat a reçu le 16 avril 2003 de Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Robert Bret, François Autain, Jean-Yves Autexier, Mme Marie-France Beaufils, M. Pierre Biarnès, Mmes Danielle Bidard-Reydet, Nicole Borvo, M. Yves Coquelle, Mmes Annie David, Michelle Demessine, Evelyne Didier, MM. Guy Fischer, Thierry Foucaud, Gérard Le Cam, Paul Loridant, Mmes Hélène Luc, Josiane Mathon, MM. Roland Muzeau, Jack Ralite, Ivan Renar, Mme Odette Terrade et M. Paul Vergès une proposition de résolution tendant à créer une commission d'enquête sur la gestion depuis 1998 de la société Gemplus-SA et sur l'avenir de la maîtrise et du développement en France des technologies de la cryptographie et des cartes à puce après la prise de contrôle de cette entreprise par des fonds d'investissement américains soupçonnés d'être étroitement liés à la CIA et à la NSA.

Cette proposition de résolution sera imprimée sous le n° 261, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation et, pour avis, à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale en application de l'article 11, alinéa 1, du règlement.

TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION

DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président du Sénat a reçu le 11 avril 2003 de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Projet de décision du Conseil de l'Union européenne relative à l'admission de la République tchèque, de la République d'Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque à l'Union européenne.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2253 et distribué.

M. le président du Sénat a reçu le 11 avril 2003 de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion, entre la Communauté européenne et la Roumanie, d'un accord concernant les produits de la pêche sous la forme d'un protocole additionnel à l'accord européen établissant une association entre les communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la Roumanie, d'autre part.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2254 et distribué.

M. le président du Sénat a reçu le 14 avril 2003 de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

Avant-projet de budget rectificatif n° 2 au budget 2003 - Etat des recettes et des dépenses par section - Section VII - Comité des régions.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2224 (Annexe 2) et distribué.

M. le président du Sénat a reçu le 16 avril 2003 de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1260/1999 portant dispositions générales sur les fonds structurels.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2255 et distribué.

M. le président du Sénat a reçu le 16 avril 2003 de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement en application de l'article 88-4 de la Constitution :

Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil concernant la révision des perspectives financières.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2256 et distribué.

M. le président du Sénat a reçu le 16 avril 2003 de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information au sujet des émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et modifiant la directive 2001/34/CE.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2257 et distribué.

M. le président du Sénat a reçu le 18 avril 2003 de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

Projet de position commune du Conseil 2003/.../PESC relative à la Birmanie/au Myanmar.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2258 et distribué.

17

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, mercredi 30 avril 2003, à quinze heures et, éventuellement, le soir :

Suite de la discussion du projet de loi (n° 223, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, renforçant la lutte contre la violence routière.

Rapport (n° 251, 2002-2003) de M. Lucien Lanier, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.

Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.

Délais limites pour les inscriptions de parole

et pour le dépôt des amendements

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, habilitant le Gouvernement à simplifier le droit (n° 262, 2002-2003).

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 5 mai 2003, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 5 mai 2003, à dix-sept heures.

Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction (n° 245, 2002-2003).

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 6 mai 2003, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 6 mai 2003, à dix-sept heures.

Personne ne demande la parole ?...

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 30 avril 2003, à zéro heure cinquante.)

Le Directeur

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD

ERRATA

Au compte rendu intégral de la séance du 27 mars 2003

INITIATIVE ÉCONOMIQUE

Page 2213, 1re colonne, dernier alinéa, 1re ligne :

Au lieu de : « versées au premier alinéa »,

Lire : « versées en application du premier alinéa ».

Page 2249, 1re colonne, 6e alinéa, 2e phrase :

Au lieu de : « à l'exception »,

Lire : « à l'exclusion ».

Au compte rendu intégral de la séance du 1er avril 2003

AIR FRANCE

Page 2299, 1re colonne, avant-dernier alinéa, 7e ligne :

Au lieu de : « ne peut s'appliquer »,

Lire : « peut ne s'appliquer ».

Au compte rendu intégral de la séance du 10 avril 2003

en ce qui concerne les tétières

Au lieu de : « Sénat - Séance du 11 avril 2003 »,

Lire : « Sénat - Séance du 10 avril 2003 ».

NOMINATION DE RAPPORTEURS

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES ET DU PLAN

MM. Gérard César et Alain Fouché ont été nommés rapporteurs pour avis du projet de loi n° 262 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA DÉFENSE

ET DES FORCES ARMÉES

M. Jean-Guy Branger a été nommé rapporteur du projet de loi n° 257 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'adhésion à la convention sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques.

M. Philippe François a été nommé rapporteur du projet de loi n° 258 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume d'Espagne relatif à l'exploitation, à l'entretien, à la sécurité et, le cas échéant, à l'évolution du tunnel routier du Somport.

M. Philippe François a été nommé rapporteur du projet de loi n° 259 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification du traité entre la République française et le royaume d'Espagne relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et douanière.

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

M. Gérard Dériot a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 262 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale habilitant le Gouvernement à simplifier le droit dont la commission des lois est saisie au fond.

COMMISSION DES FINANCES

M. Gérard Braun a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 262 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, habilitant le Gouvernement à simplifier le droit dont la commission des lois est saisie au fond.

COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE

LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU RÉGLEMENT

ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE

M. Bernard Saugey a été nommé rapporteur du projet de loi n° 262 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION

DES POLITIQUES DE SANTÉ

NOMINATION DU BUREAU DÉFINITIF

Au cours de sa séance du jeudi 10 avril 2003, l'office parlementaire d'évaluation des politiques de santé a procédé à l'élection de son bureau définitif qui est ainsi constitué :

Membres de droit : M. Jean-Michel Dubernard, président ; M. Nicolas About, premier vice-président ; MM. Bruno Gilles, rapporteur pour l'Assemblée nationale et Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'assurance maladie.

Membres désignés : M. Gilbert Barbier, Mme Jacqueline Fraysse, MM. Jean-Marie Le Guen, Jean-François Picheral, vice-présidents ; MM. Jean Bardet et André Vantomme, secrétaires.

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT

établi par le Sénat dans sa séance

du mardi 29 avril 2003

à la suite des conclusions

de la conférence des présidents

Mercredi 30 avril 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et, éventuellement, le soir :

Suite du projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière (n° 223, 2002-2003).

Mardi 6 mai 2003 :

A 9 h 30 :

1° Dix-huit questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :

- n° 135 de M. Claude Biwer à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation (Situation des artisans du bâtiment) ;

- n° 137 de Mme Brigitte Luypaert à Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées (Prise en charge des personnes handicapées âgées) ;

- n° 157 de M. Thierry Foucaud à M. le ministre délégué au commerce extérieur (Négociations de l'accord général sur le commerce et les services) ;

- n° 203 de M. Jacques Oudin à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire (Levée du secret professionnel liant les commissaires aux comptes) ;

- n° 210 de M. Fernand Demilly à M. le garde des sceaux, ministre de la justice (Fichier national des empreintes génétiques) ;

- n° 214 de M. Jean-Pierre Masseret à Mme la ministre déléguée à l'industrie (Fermeture des Houillères du bassin lorrain) ;

- n° 221 de M. Ivan Renar à Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies (Situation inquiétante de la recherche en France) ;

- n° 222 de M. Jean-Pierre Godefroy à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Situation des conseillers territoriaux des activités physiques et sportives) ;

- n° 224 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Reconnaissance de la profession d'aide-soignant) ;

- n° 225 de M. Bernard Fournier à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Désenclavement du département de la Loire) ;

- n° 226 de M. Jean-François Le Grand à Mme la ministre déléguée à l'industrie (Conditions de réalisation d'un réseau à haut débit de fibres optiques) ;

- n° 229 de M. Jean-Yves Autexier à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Risques de déstabilisation des entreprises françaises des secteurs stratégiques) ;

- n° 231 de M. Bernard Piras à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Droits de reprographie des oeuvres reproduites dans les écoles du premier degré) ;

- n° 232 de M. Gilbert Barbier à M. le ministre de la culture et de la communication (Réglementation applicable aux entrepreneurs de spectacles) ;

- n° 236 de M. Ernest Cartigny à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer (Conditions d'immatriculation des aéronefs) ;

- n° 237 de M. Jean-Paul Emorine à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales (Mise en place des réseaux de surveillance des risques zoosanitaires) ;

- n° 238 de M. Georges Mouly à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Besoins de places dans le service d'éducation spéciale et de soins à domicile de la Corrèze) ;

- n° 243 de M. Adrien Gouteyron à M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées (Situation des établissements d'hébergement pour les personnes âgées dépendantes).

A 16 heures, et le soir :

2° Nomination d'un membre de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques en remplacement de M. Jean-Paul Alduy.

Ordre du jour prioritaire

3° Sous réserve de sa transmission, projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de simplification et de codification du droit (AN, n° 710).

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 5 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 5 mai 2003.)

Mercredi 7 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et, éventuellement, le soir :

1° Eventuellement, suite du projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de simplification et de codification du droit ;

2° Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction (n° 245, 2002-2003).

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 6 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 6 mai 2003.)

Mardi 13 mai 2003 :

A 9 h 30, à 16 heures, et le soir :

Ordre du jour prioritaire

1° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif au mécénat, aux associations et aux fondations (n° 234, 2002-2003) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 12 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 12 mai 2003) ;

2° Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages (n° 204, 2002-2003).

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 12 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 12 mai 2003.)

Mercredi 14 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :

- sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi organisant la consultation des électeurs de Corse sur la modification du statut particulier de la collectivité territoriale de Corse.

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 13 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 13 mai 2003.)

Jeudi 15 mai 2003 :

A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi organisant la consultation des électeurs de Corse sur la modification du statut particulier de la collectivité territoriale de Corse ;

A 15 heures et le soir :

2° Questions d'actualité au Gouvernement.

(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance, avant 11 heures) ;

3° Communication de M. Bernard Stasi, médiateur de la République, sur son rapport annuel, en application de la loi n° 2000-23 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Ordre du jour prioritaire

4° Suite de l'ordre du jour du matin.

Mardi 20 mai 2003 :

Ordre du jour réservé

A 9 h 30 :

1° Question orale avec débat n° 16 de M. Gérard César à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur la réforme de la politique agricole commune ;

(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents à fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 19 mai 2003.)

A 16 heures et, éventuellement, le soir :

2° Question orale avec débat n° 15 de M. Gérard Larcher à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur l'avenir des services publics ;

(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents à fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 19 mai 2003.)

3° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de MM. Jean-Claude Carle et Jean-Pierre Schosteck relative à l'application des peines concernant les mineurs (n° 228, 2002-2003).

(La conférence des présidents a décidé de fixer au lundi 19 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)

Mercredi 21 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :

1° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux privilèges et immunités de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge en France (n° 203, 2002-2003) ;

(La conférence des présidents a décidé de fixer au mardi 20 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte) ;

2° Sous réserve de sa transmission, proposition de loi relative à la représentation au sein du conseil d'administration et des instances représentatives des fonctionnaires, des agents sous contrat et des ouvriers de l'Etat mis à la disposition de l'entreprise nationale DCN en application de l'article 78 de la loi de finances rectificative pour 2001 (AN, n° 735).

(La conférence des présidents a décidé de fixer au mardi 20 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte) ;

3° Projet de loi de programme pour l'outre-mer (n° 214, 2002-2003).

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 20 mai 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 20 mai 2003.)

Jeudi 22 mai 2003 :

A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi de programme pour l'outre-mer ;

A 15 heures et le soir :

2° Questions d'actualité au Gouvernement ;

(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;

Ordre du jour prioritaire

3° Suite de l'ordre du jour du matin.

Lundi 26 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 16 heures et le soir :

Sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 26 mai 2003, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 23 mai 2003.)

Mardi 27 mai 2003 :

A 9 h 30 :

1° Questions orales ;

A 16 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Suite du projet de loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.

Mercredi 28 mai 2003 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et, éventuellement, le soir :

Suite du projet de loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.

Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON

QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)

Percement du couloir ferroviaire Val de Durance - Montgenèvre

244. - 11 avril 2003. - M. Jean-François Picheral attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la programmation à venir du percement du couloir ferroviaire Val de Durance - Montgenèvre. Son prédécesseur avait pris position en faveur de ce percement et avait insisté sur les avantages de cette option. Il avait par ailleurs annoncé que ce chantier, dont le coût correspondrait au dixième du coût annoncé pour le projet Lyon-Turin, pourrait être achevé dès 2010. Cependant, l'hypothèse d'un retard de l'avancement des travaux du tunnel de Montgenèvre serait susceptible d'entraîner des conséquences graves dans la région du sud-est de la France, et notamment provoquerait un engorgement routier sans précédent. Les schémas multimodaux des services collectifs des transports, adoptés au comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, avaient en effet prévu le quadruplement du « volume de congestion » sur les axes rhodanien et languedocien à l'horizon 2020. La mise en service préalable de l'axe des transports alternatifs apparaissait donc comme une condition nécessaire à la mise en oeuvre des chantiers envisagés. A cette fin, la commission intergouvernementale (CIG) pour l'amélioration des liaisons franco-italiennes dans les Alpes du Sud avait constitué plusieurs groupes de travail, chargés notamment d'examiner les perspectives de développement du transport ferroviaire. Le 25 mars 2002, cette commission avait adopté le mandat du groupe de travail, dont la mission première était d'examiner l'intérêt et la faisabilité technique, juridique, financière et environnementale d'un projet de liaison ferroviaire entre le Val de Durance en France et le Val de Suse en Italie, franchissant la crête des Alpes sous le Montgenèvre. Or, selon certaines informations, depuis cette date, aucune avancée sur ce dossier n'a eu lieu. Il ne peut donc que s'étonner d'un tel constat, et s'inquiéter pour les conséquences sur le trafic des retards pris par la commission. C'est pourquoi, il lui demande de lui indiquer quelles ont été les activités du groupe de travail mandaté par la CIG sur ce dossier depuis le 25 mars 2002.

Reprise par les communes de personnels d'associations

gérant des services publics

245. - 11 avril 2003. - Mme Valérie Létard attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur les différents problèmes qui se posent aux communes qui souhaitent reprendre en régie les activités précédemment confiées par elles à des associations, en particulier en ce qui concerne notamment le devenir des personnels contractuels et la reprise de leur ancienneté. Or plusieurs chambres régionales des comptes ont jugé récemment que la pratique assez largement répandue pour des collectivités territoriales de faire participer des associations à des activités de service public pouvait constituer une gestion de fait. Pour se conformer au droit, de nombreuses collectivités réfléchissent donc à la possibilité de réintégrer en leur sein des activités déléguées à des associations. Dans de nombreux cas, et c'est notamment la situation de l'association Val Enfance de Valenciennes, la reprise de l'ancienneté des agents de ces associations constitue une réelle difficulté. C'est pourquoi elle lui demande, compte tenu du bilan des premières applications de l'article 9 de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001, de lui indiquer quelles mesures pourraient être envisagées, notamment au regard du droit européen, pour régler les difficultés rencontrées par les communes pour la reprise de personnels contractuels employés par des associations gérant des services publics administratifs et de lui préciser selon quel calendrier ces mesures pourraient intervenir.

Situation des établissements d'hébergement

pour personnes âgées dépendantes

246. - 16 avril 2003. - M. Roland Courteau attire l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur la mise en oeuvre de la réforme de la tarification dans les établissements d'hébergement pour les personnes âgées dépendantes (EHPAD). Cette réforme implique, pour ces établissements, la signature d'une convention tripartite (établissement, conseil général, Etat), et porte sur une tarification ternaire : un tarif d'hébergement financé par la personne âgée et éventuellement par l'aide sociale, un tarif dépendance financé par l'APA (allocation personnalisée d'autonomie) avec une participation du bénéficiaire, et enfin un tarif soins, financé par l'assurance maladie. Il lui indique qu'un plan pluriannuel d'amélioration de la qualité en maison de retraite avait été adopté, qui devait se traduire par cinq tranches annuelles d'un montant de 183 millions d'euros, soit 930 millions sur cinq ans. Si, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, la date butoir de signature de ces conventions a été repoussée du 31 décembre 2003 au 31 décembre 2005, en revanche, l'assurance a été donnée que les 6 000 conventions tripartites restant à signer pourraient l'être à raison de 2 000 environ par an, dont 1 800 pour l'année 2003. Or, selon les informations dont il dispose, il semblerait que les enveloppes budgétaires pour 2003 aient été réduites à zéro et que, par voie de conséquence, les services déconcentrés de l'Etat refusent de signer de nouvelles conventions, voire de les instruire, retardant ainsi la mise en oeuvre de dispositions visant pourtant à garantir des prestations de qualité et à médicaliser les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes, notamment ceux qui ne disposent pas de cures médicales et fonctionnent avec du personnel libéral rémunéré à l'acte. Il lui précise que dans l'Aude, où sur les 58 établissements existants 50 accueillent des personnes âgées dépendantes et sont concernés par la réforme, tout retard apporté dans la mise en oeuvre de celle-ci rendra plus critique encore la situation, d'autant que progressivement les infirmières libérales, confrontées à des problèmes de quotas, refusent d'intervenir dans les établissements non médicalisés où elles allaient jusque-là. Face à un tel contexte, qualifié de grave et concernant un domaine particulièrement sensible, il lui demande s'il entend réviser sa position et faire en sorte que les engagements de l'Etat soient respectés dès 2003.

Mise en service du caisson hyperbare

du centre hospitalier Louis-Pasteur (CHLP)

de Cherbourg-Octeville

247. - 23 avril 2003. - M. Jean-Pierre Godefroy souhaite attirer l'attention de Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées sur l'installation du caisson hyperbare attribué au centre hospitalier Louis-Pasteur (CHLP) de Cherbourg-Octeville. Le maintien dans le Nord-Cotentin d'un tel équipement, jugé indispensable par tous, avait en effet été acquis après la fermeture du centre hospitalier des Armées René Le Bas. L'engagement ministériel correspondant s'était caractérisé par la possibilité d'inclure le surcoût du bâtiment accueillant ce caisson dans le programme de restructuration de l'établissement à hauteur de 440 000 euros ; engagement avait été également pris par votre prédécesseur d'en accompagner le fonctionnement. Ainsi, par décision du 18 mars 2003, l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH) de Basse-Normandie a accordé une autorisation de fonctionnement au CHLP. Néanmoins, cette décision d'autorisation précise que « l'exploitation de cet équipement est subordonnée à l'attribution d'une enveloppe ministérielle spécifique, en sus de la dotation régionalisée limitative des dépenses hospitalières ». L'établissement avait envisagé de mettre en service ce caisson hyperbare avant la fin de l'année 2003 ; or cela demande un rerutement anticipé et une formation spécialisée pour le personnel médical, infirmier et technique nécessaire à son fonctionnement. C'est pourquoi, il est indispensable que le centre hospitalier puisse avoir un financement assuré au moins 6 à 9 mois avant la mise en fonctionnement, c'est-à-dire sans délai. Les dépenses nécessaires à l'installation du caisson puis à sa pérennisation ont été évaluées respectivement pour un montant de 281 000 euros (dépenses non reconductibles) et 811 400 euros (dépenses reconductibles) par le conseil d'administration de l'hôpital ; présentées à l'ARH de Basse-Normandie, elles n'ont fait à ce jour l'objet d'aucune observation. C'est pourquoi, il lui demande de bien vouloir attribuer rapidement les moyens nécessaires au fonctionnement de cet équipement indispensable.

Négociations d'accords bilatéraux

entre l'Union européenne et la Suisse

248. - 24 avril 2003. - M. Jean-Paul Amoudry appelle l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur les négociations qui seraient en cours entre l'Union européenne et la Suisse, en vue de la conclusion d'accords bilatéraux, visant à compléter et prolonger ceux conclus le 11 décembre 1998. Il lui indique que les élus locaux et parlementaires français des départements frontaliers n'ont, à ce jour, été informés ni par les services de l'Etat ni par ceux de l'Union européenne du contenu de ces négociations, ni même de leur existence, alors que leurs homologues suisses y sont, semble-t-il, étroitement associés. Il souligne que les conséquences des précédents accords bilatéraux, entrés en vigueur le 1er juin 2002, apparaissent d'ores et déjà particulièrement inquiétantes pour certains départements frontaliers, notamment l'Ain et la Haute-Savoie, conformément aux craintes exprimées par des parlementaires français lors de l'examen du projet de loi autorisant leur ratification. On constate ainsi une augmentation significative des coûts du logement, qui atteignent un niveau difficilement supportable pour les salariés français, une pénurie de personnel dans certaines professions de l'artisanat et des services, ainsi qu'une saturation croissante des réseaux de transport routier. Il apparaît donc indispensable aux élus et responsables économiques des départements touchés par ces effets négatifs de s'efforcer de les corriger, notamment à l'occasion des négociations en cours. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître les initiatives que le gouvernement français entend engager en concertation avec l'Union européenne pour que les responsables locaux puissent être enfin consultés et entendus avant la conclusion des négociations de ces nouveaux accords bilatéraux.

TVA applicable à la tapisserie d'Aubusson

249. - 28 avril 2003. - M. Michel Moreigne souhaite attirer l'attention de M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire sur le taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) appliqué à la tapisserie d'Aubusson. Jusqu'à présent, les lissiers pouvaient bénéficier du taux réduit de 5,5 % pour la vente de cette production artistique séculaire. Une interprétation du code général des impôts combinant l'article 98 A II. 4 annexe III et l'article 278 septies entraînerait l'application du taux normal de TVA (19,6 %). Or la tapisserie, oeuvre d'art résultant bien du travail d'un lissier (artisan ou en société) et d'un cartonnier, paraît ressortir de l'article 98 A II. 4 de l'annexe III du code précité. Cela concerne tant les tapisseries contemporaines que les interprétations de tapisseries anciennes réalisées sur la base d'un carton ou d'une maquette. Il lui demande de préciser l'interprétation du code général des impôts sur ce point.

Appellation « Chablis »

250. - 28 avril 2003. - M. Serge Franchis attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur le préjudice d'image et sur le déficit des ventes que la mise en marché de « faux chablis » fait subir à l'appellation « chablis ». En volume mondial, le « faux chablis » produit chaque année, bien qu'en réduction très importante par rapport aux évaluations pratiquées en 1989, représente encore l'équivalent de 7 à 8 fois la production totale du vignoble chablisien en Bourgogne. Les Etats-Unis sont les principaux producteurs de « faux chablis », qu'ils exportent essentiellement au Canada. En conséquence, le chablis français pénètre peu le marché de l'Amérique du Nord (3,55 % des exportations aux Etats-Unis et 2,28 % au Canada). L'Argentine reste le deuxième producteur de « faux chablis » avec une consommation réservée au marché intérieur. Le chablis argentin, comme le chablis américain, est considéré comme un vin d'entrée de gamme et se vend à un prix inférieur à 4 $ argentins (1,1 euro). Sur ces marchés, les professionnels ont à manifester leur réaction par voie de campagne de communication et par une démarche commerciale auprès des principaux distributeurs de chablis français. L'accompagnement de l'Institut national des appellations d'origine (INAO), dans une action juridique pour la reconnaissance des indications géographiques paraît également souhaitable. Il lui demande si son ministère s'est saisi de ce problème complexe pour faire jouer la carte de la différenciation, notamment sur le marché américain entre le vrai et le faux chablis.

Situation des forces de sécurité

dans les Yvelines

251. - 28 avril 2003. - M. Gérard Larcher attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les projets de construction ou de rénovation des hôtels de police dans le département des Yvelines pour les années 2003 à 2005. En effet, il est question de procéder à des plans d'ajustement en effectifs pour les districts et circonscriptions qui souffrent d'un manque chronique de policiers et les élus concernés sont en attente d'informations sur le sujet. Par ailleurs, il souhaiterait connaître le niveau de coordination police nationale et gendarmerie, notamment en zone périurbaine.

Couverture du risque attentat en Corse

252. - 29 avril 2003. - M. Paul Natali attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le problème de la couverture du risque attentat en Corse. Le récent plasticage de la perception de Borgo, bâtiment déjà visé en octobre 2001, ainsi que les différents attentats perpétrés à différents endroits de l'île, posent à nouveau avec acuité la question de la couverture de ce risque. A la fin des années quatre-vingt, afin d'y faire face, les compagnies d'assurances s'étaient regroupées sous la forme d'un « pool des risques aggravés » et ce système s'était révélé satisfaisant. Malheureusement, il a été supprimé il y a plus de deux ans, et le précédent gouvernement a échoué à trouver avec les assureurs une solution qui ne pénalise pas les victimes de ces attentats. Or ce déficit de couverture entrave considérablement l'activité des entreprises et hypothèque sérieusement le développement économique et social de la Corse. C'est pourquoi il souhaiterait savoir si le Gouvernement entend traiter ce dossier, notamment en examinant avec la profession de l'assurance les solutions qui pourraient être envisagées.

Difficultés dans le secteur de l'enseignement

253. - 29 avril 2003. - M. Claude Domeizel attire l'attention de M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche sur les mouvements de protestations à l'égard du service public qui se multiplient, qu'ils viennent des parents ou du personnel (enseignant ou non) et les motifs ne manquent pas : suppression des aides-éducateurs et des surveillants, suppression de 5 000 postes de contractuels, transfert de personnel par le biais de la décentralisation, insuffisance d'enseignants pour la prochaine rentrée scolaire... Comme bon nombre de ses collègues parlementaires, il est interrogé sur le bon fonctionnement de l'école. Dans son département, le mécontentement s'amplifie tant dans l'enseignement élémentaire et préélémentaire que dans les collèges. L'élaboration de la carte scolaire du primaire est laborieuse par manque de création de postes. Dans les collèges, les dotations horaires sont en diminution pour un nombre d'élèves identique ou supérieur. Pour exemple, le collège Jean-Giono à Manosque, classé en ZEP, qui voit, pour une structure équivalente et un effectif quasi inchangé, sa dotation horaire 2003/2004 fortement diminuée, la dotation de la SEGPA restant en deçà des exigences minimum officielles. Le temps d'enseignement de la totalité des matières s'en trouve réduit. De plus, l'obligation d'intégrer des heures d'enseignement général, non compensées par ailleurs. En résumé, cet établissement, mais il n'est malheureusement pas un cas isolé, comptabilise un déficit d'une quarantaine d'heures pour assurer un enseignement normal. En conséquence, il aimerait savoir dans quelles conditions ces enseignants vont travailler et si M. le ministre n'appréhende pas, outre les conséquences sur les élèves, de créer un découragement parmi le personnel qui risque de « déserter » les collèges situés dans les secteurs difficiles. On peut craindre que, dans le cadre d'une rigueur budgétaire appliquée à l'éducation nationale, une simple opération comptable porte atteinte à la qualité de ce service public à une période où plus que jamais, la jeunesse a besoin, par le biais de l'école, de références pour se construire. Il souhaiterait avoir une réponse rassurante pour les élèves, les enseignants et les parents.

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL

de la séance

du mardi 29 avril 2003

SCRUTIN (n° 150)

sur l'amendement n° 2 présenté par M. Lucien Lanier au nom de la commission des lois, sur l'amendement n° 35 présenté par Mme Nicole Borvo et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen et sur l'amendement n° 72 présenté par M. Jacques Mahéas et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée tendant à supprimer l'article 2 bis du projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière.

Nombre de votants :291Nombre de suffrages exprimés :289Pour :282Contre :7Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :

Pour : 22.

N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Fischer, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :

Pour : 1. _ M. Philippe Arnaud.

Contre : 1. _ Mme Gisèle Gautier.

Abstentions : 2. _ MM. Jean-Paul Amoudry et Pierre Fauchon.

N'ont pas pris part au vote : 23.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :

Pour : 17.

GROUPE SOCIALISTE (83) :

Pour : 83.

GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :

Pour : 159.

Contre : 5. _ MM. Nicolas About, Laurent Béteille, Paul Blanc, André Lardeux et Jean-Pierre Vial.

N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :

Contre : 1. _ Mme Sylvie Desmarescaux.

N'ont pas pris part au vote : 4.

Ont voté pour

Jean-Paul Alduy

Nicolas Alfonsi

Michèle André

Pierre André

Bernard Angels

Philippe Arnaud

Henri d'Attilio

Bertrand Auban

François Autain

Jean-Yves Autexier

Robert Badinter

Gérard Bailly

José Balarello

Gilbert Barbier

Bernard Barraux

Jacques Baudot

Jean-Michel Baylet

Marie-Claude Beaudeau

Marie-France Beaufils

Michel Bécot

Jean-Pierre Bel

Jacques Bellanger

Claude Belot

Maryse Bergé-Lavigne

Daniel Bernardet

Roger Besse

Jean Besson

Pierre Biarnès

Danielle Bidard-Reydet

Joël Billard

Jean Bizet

Jacques Blanc

Marie-Christine Blandin

Nicole Borvo

Didier Boulaud

Joël Bourdin

Brigitte Bout

André Boyer

Yolande Boyer

Jean-Guy Branger

Gérard Braun

Dominique Braye

Robert Bret

Paulette Brisepierre

Louis de Broissia

Claire-Lise Campion

Jean-Pierre Cantegrit

Jean-Claude Carle

Jean-Louis Carrère

Ernest Cartigny

Auguste Cazalet

Bernard Cazeau

Charles Ceccaldi-Raynaud

Monique Cerisier-ben Guiga

Gérard César

Gilbert Chabroux

Michel Charasse

Jacques Chaumont

Jean Chérioux

Marcel-Pierre Cleach

Jean Clouet

Christian Cointat

Yvon Collin

Gérard Collomb

Yves Coquelle

Gérard Cornu

Raymond Courrière

Roland Courteau

Jean-Patrick Courtois

Yves Dauge

Annie David

Marcel Debarge

Robert Del Picchia

Gérard Delfau

Jean-Pierre Demerliat

Michelle Demessine

Fernand Demilly

Christian Demuynck

Gérard Dériot

Rodolphe Désiré

Evelyne Didier

Eric Doligé

Claude Domeizel

Jacques Dominati

Michel Doublet

Michel Dreyfus-Schmidt

Paul Dubrule

Alain Dufaut

André Dulait

Ambroise Dupont

Hubert Durand-Chastel

Josette Durrieu

Bernard Dussaut

Louis Duvernois

Daniel Eckenspieller

Jean-Paul Emin

Jean-Paul Emorine

Michel Esneu

Claude Estier

Jean-Claude Etienne

Jean Faure

André Ferrand

Hilaire Flandre

Gaston Flosse

François Fortassin

Thierry Foucaud

Alain Fouché

Jean-Pierre Fourcade

Bernard Fournier

Serge Franchis

Philippe François

Jean François-Poncet

Jean-Claude Frécon

Yves Fréville

Bernard Frimat

Yann Gaillard

René Garrec

Jean-Claude Gaudin

Philippe de Gaulle

Charles Gautier

Patrice Gélard

André Geoffroy

Alain Gérard

François Gerbaud

Charles Ginésy

Francis Giraud

Paul Girod

Jean-Pierre Godefroy

Daniel Goulet

Alain Gournac

Adrien Gouteyron

Francis Grignon

Louis Grillot

Georges Gruillot

Charles Guené

Jean-Noël Guérini

Michel Guerry

Hubert Haenel

Claude Haut

Françoise Henneron

Pierre Hérisson

Odette Herviaux

Daniel Hoeffel

Jean-François Humbert

Jean-Jacques Hyest

Pierre Jarlier

Bernard Joly

Alain Journet

Jean-Marc Juilhard

Roger Karoutchi

Yves Krattinger

Christian de La Malène

André Labarrère

Philippe Labeyrie

Jean-Philippe Lachenaud

Pierre Laffitte

Serge Lagauche

Roger Lagorsse

Lucien Lanier

Jacques Larché

Gérard Larcher

Dominique Larifla

Patrick Lassourd

Robert Laufoaulu

René-Georges Laurin

Gérard Le Cam

Jean-René Lecerf

Dominique Leclerc

Jacques Legendre

Jean-François Le Grand

André Lejeune

Serge Lepeltier

Louis Le Pensec

Philippe Leroy

Marcel Lesbros

Claude Lise

Gérard Longuet

Paul Loridant

Jean-Louis Lorrain

Simon Loueckhote

Roland du Luart

Hélène Luc

Brigitte Luypaert

Philippe Madrelle

Jacques Mahéas

Jean-Yves Mano

François Marc

Max Marest

Philippe Marini

Pierre Martin

Jean-Pierre Masseret

Marc Massion

Jean Louis Masson

Serge Mathieu

Josiane Mathon

Pierre Mauroy

Louis Mermaz

Lucette Michaux-Chevry

Gérard Miquel

Jean-Luc Miraux

René Monory

Aymeri de Montesquiou

Michel Moreigne

Dominique Mortemousque

Georges Mouly

Bernard Murat

Roland Muzeau

Philippe Nachbar

Paul Natali

Nelly Olin

Joseph Ostermann

Georges Othily

Jacques Oudin

Monique Papon

Jean-Marc Pastor

Michel Pelchat

Jacques Pelletier

Guy Penne

Jean Pépin

Daniel Percheron

Jacques Peyrat

Jean-Claude Peyronnet

Jean-François Picheral

Xavier Pintat

Bernard Piras

Jean-Pierre Plancade

Bernard Plasait

Jean-Marie Poirier

Ladislas Poniatowski

André Pourny

Danièle Pourtaud

Gisèle Printz

Jean Puech

Henri de Raincourt

Jack Ralite

Daniel Raoul

Paul Raoult

Daniel Reiner

Ivan Renar

Victor Reux

Charles Revet

Henri Revol

Henri de Richemont

Philippe Richert

Roger Rinchet

Yves Rispat

Josselin de Rohan

Roger Romani

Gérard Roujas

André Rouvière

Janine Rozier

Michèle San Vicente

Bernard Saugey

Claude Saunier

Jean-Pierre Schosteck

Michel Sergent

Bruno Sido

René-Pierre Signé

Louis Souvet

Jean-Pierre Sueur

Simon Sutour

Odette Terrade

Michel Teston

Michel Thiollière

Jean-Marc Todeschini

Henri Torre

René Trégouët

Pierre-Yvon Tremel

André Trillard

François Trucy

Maurice Ulrich

Jacques Valade

André Vallet

André Vantomme

Alain Vasselle

Paul Vergès

André Vezinhet

Marcel Vidal

Xavier de Villepin

Serge Vinçon

Jean-Paul Virapoullé

Henri Weber

Ont voté contre

Nicolas About

Laurent Béteille

Paul Blanc

Sylvie Desmarescaux

Gisèle Gautier

André Lardeux

Jean-Pierre Vial

Abstentions

Jean-Paul Amoudry, Pierre Fauchon.

N'ont pas pris part au vote

Philippe Adnot

Jean Arthuis

Denis Badré

Claude Biwer

Maurice Blin

Annick Bocandé

Didier Borotra

Jean Boyer

Philippe Darniche

Marcel Deneux

Yves Detraigne

Jean-Léonce Dupont

Françoise Férat

Christian Gaudin

Jacqueline Gourault

Emmanuel Hamel

Marcel Henry

Joseph Kergueris

Valérie Létard

Michel Mercier

Louis Moinard

Philippe Nogrix

Anne-Marie Payet

Bernard Seillier

Daniel Soulage

Alex Türk

Jean-Marie Vanlerenberghe

François Zocchetto

N'ont pas pris part au vote

Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Fischer, qui présidait la séance.

Les nombres annoncés en séance avaient été de :

Nombre de votants : 294Nombre de suffrages exprimés :292Majorité absolue des suffrages exprimés :147Pour :285Contre : 7Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.