SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2001


M. le président. « Art. 4. - L'article 20 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail est ainsi rédigé :
« Art. 20 . - Les entreprises, visées au II de l'article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale, qui procèdent à l'embauche d'un premier salarié postérieurement au 1er janvier 2002 ouvrent droit, au titre de cette embauche et des embauches supplémentaires, à l'allégement prévu au même article appliqué conformément aux dispositions de cet article et des textes pris pour son application et selon les modalités et conditions particulières définies ci-dessous.
« La condition de première embauche est remplie lorsque les entreprises ont exercé leur activité sans le concours de personnel salarié, sinon avec au plus un salarié en contrat d'apprentissage, de qualification, d'adaptation ou d'orientation durant les douze mois précédant l'embauche. La condition relative au personnel salarié s'apprécie dans le cadre de l'ensemble de ses activités exercées pendant la période de référence par l'employeur, de quelque nature et sous quelque forme que ce soit.
« I. - Le bénéfice de l'allégement est ouvert au titre de la première embauche lorsque la durée du travail du salarié concerné, au plus égale à trente-cinq heures hebdomadaires ou à 1 600 heures sur l'année, est mentionnée dans son contrat de travail. Ce contrat de travail doit être à durée indéterminée ou conclu pour une durée d'au moins douze mois.
« Cet allégement est majoré d'un montant fixé par décret et calculé en fonction du niveau du salaire minimum de croissance ou, le cas échéant, celui de la garantie mensuelle de rémunération définie à l'article 32. Ce décret fixe également la durée de la majoration.
« II. - A compter de la deuxième embauche, le bénéfice de l'allégement est ouvert lorsque la durée collective du travail, au plus égale à trente-cinq heures hebdomadaires ou à 1 600 heures sur l'année, est fixée soit par un accord collectif conclu dans les conditions définies au II de l'article 19, soit en vertu des dispositions du VIII du même article ou, à défaut, est mentionnée dans le contrat de travail du ou des salariés concernés. Dans ce dernier cas, le maintien de l'allégement est subordonné au respect, au plus tard à l'expiration d'une période d'un an à compter de la deuxième embauche, des conditions définies aux II à VIII de l'article 19.
« III. - Dans les cas visés au I et au II, la déclaration prévue au XI de l'article 19 est envoyée dans les trente jours suivant la date d'effet du contrat de travail afférent à l'embauche du premier salarié. L'allégement prend effet le premier jour du mois qui suit la réception par les organismes de recouvrement des cotisations sociales de la déclaration de l'employeur.
« IV. - La majoration visée au I est applicable aux premières embauches réalisées entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2003. »
L'amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 4 :
« I. - L'embauche, dans les conditions ci-après, d'un premier salarié ouvre droit à l'exonération des cotisations qui sont à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales pour l'emploi de ce salarié, afférentes à une fraction de la rémunération égale au salaire minimum de croissance, par heure rémunérée dans la limite de la durée légale ou conventionnelle du travail.
« Bénéficient de cette exonération les personnes non salariées inscrites auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations d'allocations familiales ou assujetties au régime de protection sociale des professions agricoles et qui ont exercé leur activité sans le concours de personnel salarié, sinon avec au plus un salarié en contrat d'apprentissage ou de qualification ou en contrat d'adaptation ou d'orientation durant les douze mois précédant l'embauche ainsi que, dans les mêmes conditions, les gérants de société à responsabilité limitée qui ne possèdent pas plus de la moitié du capital social et ne bénéficient pas de cette exonération à un autre titre. Bénéficient également de cette exonération les mutuelles régies par le code de la mutualité, les coopératives d'utilisation de matériel agricole régies par le titre II du livre V du code rural, les groupements d'employeurs visés à l'article L. 127-1 du code du travail dont les adhérents sont exclusivement agriculteurs ou artisans et les associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ou les dispositions de la loi du 19 avril 1908 applicables dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle agréées à cette fin par l'autorité administrative compétente.
« Cet agrément est donné aux associations :
« 1° Qui exercent une activité sociale, éducative, culturelle, sportive ou philanthropique, non concurrente d'une entreprise commerciale ;
« 2° Qui sont administrées à titre bénévole par les personnes n'ayant elles-mêmes ou par personnes interposées aucun intérêt direct dans les résultats de l'association ;
« 3° Qui utilisent l'intégralité d'éventuels excédents de recettes aux actions entrant dans l'objet de l'association ;
« 4° Qui sont administrées par des personnes dont aucune n'a administré une autre association ayant employé un ou plusieurs salariés, au sens du deuxième alinéa de l'article 6-1 de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social dans les douze mois précédant la date de l'embauche.
« Bénéficient également de cette exonération les associations agréées pour les services aux personnes dans les conditions prévues à l'article L. 129-1 du code du travail.
« Les associations et les mutuelles doivent avoir exercé leur activité sans le concours de personnel salarié, sinon des salariés en contrat emploi-solidarité ou au plus un salarié en contrat d'apprentissage ou de qualification ou en contrat d'adaptation ou d'orientation durant les douze mois précédant l'embauche. Les coopératives d'utilisation de matériel agricole et les groupements d'employeurs doivent avoir exercé leur activité sans le concours de personnel salarié, sinon au plus un salarié en contrat d'apprentissage ou de qualification ou en contrat d'adaptation ou d'orientation durant les douze mois précédant l'embauche.
« II. - Les dispositions du présent article sont applicables aux embauches réalisées à compter du 1er janvier 2001.
« III. - La perte de recettes est compensée, à due concurrence, par la majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. L'article 4 intègre dans sa rédaction actuelle le dispositif spécifique d'exonération des cotisations en faveur de l'embauche du premier salarié, créé en 1989, dans le cadre des allégements liés aux 35 heures.
La commission propose que ce dispositif soit rendu pérenne et ne soit pas lié aux 35 heures, avec toutes les conséquences financières qui en résultent.
Nous considérons que cette mesure incitative, à caractère social, liée à l'emploi et à l'activité économique a porté ses fruits et doit donc être pérennisée, sans toutefois être financée par la sécurité sociale. C'est, bien entendu, le budget de l'Etat qui doit assumer cette charge.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, qui supprime l'accès simplifié à l'allégement « 35 heures » pour les entreprises qui procèdent à l'embauche d'un premier salarié après le 1er janvier 2002, ainsi que la majoration qui s'y attache.
En effet, cet amendement tend à remplacer ce dispositif par une exonération qui est la réplique exacte de l'exonération pour l'embauche du premier salarié mise en place en 1989, qui arrive à son terme le 31 décembre 2001 et que le Gouvernement n'a pas souhaité proroger en raison du très fort effet d'aubaine qu'elle représente.
Selon une enquête récente menée par le ministère auprès des entreprises utilisatrices, l'embauche aurait lieu de toute façon dans 83 % des cas, soit au même moment, soit plus tard.
Cet effet d'aubaine avait d'ailleurs déjà été mis en lumière par une étude identique menée auprès des entreprises utilisatrices en 1998. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la majoration afférente à la première embauche, créée par l'Assemblée nationale, est temporaire : elle a pour effet de conserver le maintien de l'avantage financier qui résultait de cette exonération pour les entreprises qui réduisent leur temps de travail entre 2002 et 2003.
En outre, le dispositif de l'article 4 s'inscrit dans le cadre des actions de simplification en faveur des entreprises, en facilitant le passage aux 35 heures pour celles qui procéderont à leur première embauche à compter de 2002.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3 rectifié.
M. Guy Fischer. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement réécrit totalement l'article 4, qui a trait aux allégements de cotisations sociales patronales en faveur de l'embauche d'un premier salarié, dispositif que le Gouvernement a entendu modifier afin de le recentrer, en quelque sorte.
Cela est évidemment très mal perçu par nos collègues de droite, qui vivent cette disposition comme un recul, une remise en cause de l'actuel dispositif spécifique des exonérations pour une première embauche, le lien établi avec les allégements consentis au titre de la RTT étant, pour eux, tout simplement inconcevable.
Les modifications proposées par la commission sont substantielles. Elles visent principalement à supprimer les nouvelles conditions à remplir pour bénéficier de ce dispositif - à savoir l'incitation à réduire la durée collective du travail - et à assurer la pérennité de ces allégements.
Une fois de plus, vous faites preuve, messieurs de la majorité...
M. Jean Chérioux. Et les dames ?
M. Michel Charasse. Mesdames, messieurs...
M. Guy Fischer. Vous avez raison ! Je prie les sénatrices de la majorité de m'excuser !
Les hommes et les femmes de la majorité sénatoriale, donc, font une fois encore la preuve de leur volonté toujours plus grande d'accentuer les dispositifs d'exonérations de charges pour les employeurs, sans se soucier le moins du monde de leurs incidences sur le développement de l'emploi stable.
Les sénateurs communistes voteront, par conséquent, contre cet amendement.
M. Gilbert Chabroux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. L'amendement présenté par M. Alain Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, vise à revenir, en l'élargissant encore, au dispositif d'exonération pour l'embauche du premier salarié institué par la loi du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social.
L'application de ce dispositif avait fait apparaître un puissant effet d'aubaine pour un certain nombre d'entreprises utilisatrices. M. Vasselle, sans doute sensible à cet effet d'aubaine, souhaite l'exonération toujours plus large des cotisations patronales, mais sans contrepartie.
Il nous semble, au contraire, nécessaire de lier ce dispositif d'exonération à l'application de la RTT. Nous voterons donc contre cet amendement.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Pour ma part, je soutiendrai l'amendement de la commission.
Je suis en effet un peu étonné de voir que l'on discute de l'application de la RTT pour des entreprises qui n'ont pas d'employé, puisqu'il s'agit de l'embauche du premier salarié. Pour qu'on pousse la logique de la RTT jusqu'au problème de l'embauche du premier salarié, il faut vraiment que le mythe ait une consistance extraordinaire !
L'effet d'aubaine, en vérité, a été le fait d'entreprises ayant de nombreux salariés, notamment des entreprises étrangères installées sur notre territoire. J'en connais un certain nombre d'exemples dans la commune que j'administre.
Refuser la pérennisation du système qui a été mis en place en 1989 pour l'embauche du premier salarié - alors que le recul conjoncturel qui se profile va nécessairement affecter l'emploi dans les mois qui viennent et cela au nom de l'aménagement de la durée du travail, c'est vraiment pousser le dogmatisme un peu loin. C'est pourquoi je me rallie à l'amendement de la commission. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé.

Article additionnel après l'article 3 bis (suite)