SEANCE DU 18 AVRIL 2001


M. le président. « Art. 61 ter . - I. - Le livre VIII du code de commerce est ainsi modifié :
« 1° L'intitulé : "Titre unique" est remplacé par l'intitulé : "Titre 1er" ;
« 2° Le livre VIII est complété par un titre II intitulé : "Des commissaires aux comptes", comprenant les articles L. 820-1 à L. 820-7 ainsi rédigés :
« Art. L. 820-1 à L. 820-5 . - Non modifiés.
« Art. L. 820-6 . - Est puni d'un emprisonnement de six mois et d'une amende de 50 000 F le fait pour toute personne d'accepter, d'exercer ou de conserver les fonctions de commissaire aux comptes, nonobstant les incompatibilités légales, soit en son nom personnel, soit au titre d'associé dans une société de commissaires aux comptes.
« Art. L. 820-7 . - Est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 500 000 F le fait pour toute personne de donner ou confirmer soit en son nom personnel, soit au titre d'associé dans une société de commissaires aux comptes, des informations mensongères sur la situation de la personne morale ou de ne pas révéler au procureur de la République les faits délictueux dont il a eu connaissance. »
« II. - Les commissaires aux comptes et les personnes morales doivent se mettre en conformité avec les dispositions des articles visés au I dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi.
« III. - Non modifié . »
Par amendement n° 102, MM. Huchon, Deneux et les membres du groupe de l'Union centriste proposent de compléter in fine cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« Toutefois, les fédérations agréées en application de l'article L. 527-1 du code rural ainsi que les personnes qui exercent en leur sein et en leur nom les missions de commissariat aux comptes, en application de l'article 27 de la loi n° 84-148 du 1er mars 1984, ne sont pas visées par les articles L. 820-3 et L. 820-5, premier alinéa, du code de commerce ».
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Il semble nécessaire de préciser l'articulation de l'article 61 ter avec la loi n° 84-148 du 1er mars 1984 et le décret de 1985.
En effet, cette loi et son décret d'application ont reconnu la capacité des fédérations de coopératives agricoles agréées pour la révision par le ministre de l'agriculture à exercer les missions de commissariat aux comptes dans les coopératives agricoles et leurs unions.
L'article R. 524-10 du code rural énonce qu'en ce qui concerne les coopératives agricoles et leurs unions « le commissariat aux comptes peut être exercé par un commissaire aux comptes inscrit sur la liste prévue à l'article 219 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ou par une fédération de coopératives agricoles, agréée en application de l'article L. 527-1 du code rural ».
Ces fédérations agréées pour la révision sont sous la tutelle de l'association nationale de révision et constituent donc un ensemble de « certificateurs de comptes » distinct et indépendant de la compagnie des commissaires aux comptes et de ses membres.
L'article 61 ter du projet de loi unifie des dispositions sur le contrôle et la certification des comptes des entreprises, mais procède aussi simultanément à la protection d'un titre et d'un corps professionnels, ceux des commissaires aux comptes inscrits sur la liste prévue à l'article L. 225-219 du nouveau code de commerce.
Les fédérations agréées et les réviseurs agréés qui y officient ne peuvent pas légalement s'octroyer le titre de commissaire aux comptes, et d'ailleurs, ils ne le souhaitent pas.
De ce fait, par souci de clarification, il doit être précisé dans la loi que l'article L. 820-5 ne concerne pas les fédérations agréées. Il en est de même pour le code de déontologie prévu à l'article L. 820-3.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Yann Gaillard, rapporteur. La commission, là encore, aimerait connaître d'abord l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Cet amendement, qui tend à ce que deux dispositions contenues dans l'article 61 ter ne s'appliquent pas aux réviseurs agricoles qui contrôlent les comptes de coopératives, ne peut être accepté, et ce pour des raisons auxquelles ses auteurs se rangeront sûrement.
L'article 61 ter introduit dans le code de commerce un titre relatif aux commissaires aux comptes. Les articles contenus dans ce titre ne sont pas applicables aux réviseurs agricoles, qui ne sont pas, par définition, des commissaires aux comptes. Il est donc inutile de prévoir des dérogations spécifiques pour ces réviseurs.
De plus, l'amendement proposé exempte les réviseurs agricoles du délit d'usurpation du titre de commissaire aux comptes. C'est une dérogation qui ne se justifie pas : si les réviseurs ont le droit de contrôler les comptes de certaines personnes morales, ce que le Gouvernement n'entend pas remettre en cause dans cet article, on ne peut pas les autoriser à prendre le titre de commissaire aux comptes. En effet, l'utilisation d'un tel titre serait trompeuse dans la mesure où les réviseurs ne sont pas commissaires aux comptes, n'ont pas les mêmes obligations et n'offrent pas les mêmes garanties, notamment d'indépendance, que les commissaires aux comptes. L'amendement tend d'ailleurs également à les dispenser d'un code de déontologie, pour ces raisons.
Or l'objet même de l'article 61 ter est de renforcer les exigences à l'égard des commissaires aux comptes, car il est indispensable que ce titre soit réservé aux personnes qui offrent les garanties de diplôme, de compétence professionnelle et d'indépendance, ce que réclame d'ailleurs l'ensemble de la profession des commissaires aux comptes.
Ce sujet est au coeur d'une récente recommandation de la Commission européenne et des préoccupations de toutes les autorités de contrôle des marchés.
Le Gouvernement n'entend donc pas remettre en cause cette attribution des réviseurs agricoles. Mais il ne peut être favorable à un tel amendement, qui en ferait, en fait, des commissaires aux comptes avec les mêmes droits mais sans les mêmes devoirs.
Enfin, sur la forme, l'amendement mentionne l'article 27 de la loi du 1er mars 1984, qui a été abrogé et codifié dans le code de commerce. Mais ce n'est là que la forme ! C'est bien sur le fond que la disposition est tout de même, à mon avis, excessive.
M. le président. L'amendement n° 102 est-il maintenu, monsieur Hyest ?
M. Jean-Jacques Hyest. Il importait qu'il soit précisé que les réviseurs pourraient continuer leur activité, qu'ils n'étaient pas visés par les nouvelles dispositions.
Les explications qu'a données Mme le ministre, et qui figureront au Journal officiel , étant de nature à rassurer les réviseurs, je peux retirer l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 102 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 61 ter .

(L'article 61 ter est adopté.)

Article 62