SEANCE DU 27 NOVEMBRE 2000


M. le président. Par amendement n° I-92, MM. Franchis, Hérisson et les membres du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - La première phrase du premier alinéa du II de l'article 158 bis du code général des impôts est complétée in fine par les mots : ", une fondation ou une association reconnue d'utilité publique".
« B. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du A ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis. Les lois de finances de 1999 et de 2000 ont ramené, pour les personnes morales, le taux de l'avoir fiscal attaché aux dividendes distribués par les sociétés françaises à 45 %, puis à 40 %, afin de favoriser les investissements productifs des entreprises au détriment de leurs placements financiers. L'article 7 du présent projet de loi de finances tend à accentuer cette baisse.
Il nous apparaît que cette baisse est fortement pénalisante pour les fondations et les associations reconnues d'utilité publique, pour la partie de leurs revenus tirée de leurs fonds propres, alors même que cela ne correspond évidemment pas à l'objectif recherché.
Il importe de souligner que les fondations sont, par nature, vouées à fonctionner grâce aux revenus dégagés année après année par le placement de leur dotation initiale.
Compte tenu des écarts de rendement à long terme entre les actions et les obligations, ce placement s'effectue largement sous forme d'actions. Dans certains cas, la dotation initiale des fondations provient d'ailleurs d'une dation en actions.
De même, des associations possèdent des SICAV mixtes.
Or toute la baisse du taux de l'avoir fiscal se traduit par une forte contraction des revenus des fondations et des associations reconnues d'utilité publique. A titre d'exemple, la baisse du taux de l'avoir fiscal de 50 % à 15 % réduirait de 8 % les ressources d'une fondation ou d'une association qui tirerait un tiers de ses ressources de placements à long terme en actions.
Il est évident que la baisse du taux de l'avoir fiscal n'a pas pour objet de pénaliser des associations reconnues d'utilité publique ou des fondations, telles que la Fondation de France, la Fondation Abbé-Pierre, la Fondation du Patrimoine, l'Institut Pasteur, les Orphelins d'Auteuil, etc.
Le présent article additionnel tend à accorder aux fondations et aux associations reconnues d'utilité publique le même taux d'avoir fiscal que celui qui s'applique aux personnes physiques.
Le coût de cet amendement serait relativement réduit pour les finances publiques. Il serait en tout cas bien modeste au regard des conséquences d'une telle mesure sur le fonctionnement des fondations et des associations, pour lesquelles les revenus de leurs placements sont indispensables.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est très favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Cet amendement vise en fait à faire échapper à la baisse de l'avoir fiscal visée à l'article 7 les fondations et les associations reconnues d'utilité publique.
Les fondations et les associations reconnues d'utilité publiques sont d'ores et déjà dans une situation doublement dérogatoire par rapport aux règles de l'avoir fiscal.
Tout d'abord, ces organismes peuvent utiliser l'avoir fiscal alors même qu'ils ne sont pas imposés sur les dividendes correspondants.
Ensuite, ils peuvent, tout comme les personnes physiques, obtenir la restitution de l'avoir fiscal qu'ils n'ont pas pu imputer sur leur impôt sur les sociétés,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est bien le moins !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. ... alors que cette possibilité de remboursement est en principe réservée aux seules personnes physiques.
Tout à l'heure, M. Chérioux a rappelé à bon droit que l'avoir fiscal remédiait à une situation bien particulière, celle de la double imposition. Or, dans le cas des fondations et des associations reconnues d'utilité publique, il n'y a pas double imposition.
Pour ces raisons, je demande à M. Franchis de bien vouloir retirer cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis non seulement surpris, mais encore peiné parce que, jusqu'ici, on a toujours fait bénéficier les fondations et les associations reconnues d'utilité publique du régime fiscal le plus favorable dès lors qu'il était susceptible de leur être appliqué.
Vous nous dites, madame le secrétaire d'Etat que ces organismes jouissent actuellement d'un régime qui tient compte de leur spécificité. Mais c'est bien le signe que, jusqu'à présent, le législateur a voulu leur appliquer cette « clause de la personne morale la plus favorisée ».
Pourquoi, soudainement, devrait-on rompre avec cette attitude permanente, s'agissant de la baisse du taux de l'avoir fiscal ? Non, décidément, je crois qu'il faut voter avec conviction l'amendement présenté par M. Franchis.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-92, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 7.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Paul Girod.)