SEANCE DU 9 NOVEMBRE 2000


M. le président. « Art. 14. - I. - Le code de commerce est ainsi modifié :
« 1° A l'article L. 225-129, le VII devient VIII et il est inséré un VII ainsi rédigé :
« VII. - Lors de toute décision d'augmentation du capital, l'assemblée générale extraordinaire doit se prononcer sur un projet de résolution tendant à réaliser une augmentation de capital effectuée dans les conditions prévues à l'article L. 443-5 du code du travail.
« Tous les trois ans, une assemblée générale extraordinaire est convoquée pour se prononcer sur un projet de résolution tendant à réaliser une augmentation de capital effectuée dans les conditions prévues à l'article L. 443-5 du code du travail, si au vu du rapport présenté à l'assemblée générale par le conseil d'administration ou le directoire en application de l'article L. 225-102, les actions détenues par le personnel de la société et des sociétés qui lui sont liées au sens de l'article L. 225-180 représentent moins de 3 % du capital. » ;
« 2° Le 7° de l'article L. 225-138 est ainsi rédigé :
« Les actions réservées aux adhérents aux plans d'épargne mentionnés aux articles L. 443-1 et L. 443-1-2 du code du travail et celles dont ils auraient bénéficié en application du dernier alinéa de l'article L. 443-7 du même code peuvent, par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 225-31, être émises alors même que le capital social n'aurait pas été intégralement libéré. » ;
« 3° Le deuxième alinéa de l'article L. 225-216 est ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent article ne s'appliquent ni aux opérations courantes des entreprises de crédit ni aux opérations effectuées en vue de l'acquisition par les salariés d'actions de la société, d'une de ses filiales ou d'une société comprise dans le champ d'un plan d'épargne de groupe prévu à l'article L. 444-3 du code du travail. » ;
« 4° Les articles L. 225-187 à L. 225-197 sont abrogés ;
« 5° Il est inséré un article L. 225-187-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-187-1 . - Les articles L. 225-192 à L. 225-194 et l'article L. 225-197 demeurent applicables dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° du sur l'épargne salariale jusqu'à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de cette publication. »
« II. - L'article L. 443-5 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Au deuxième alinéa, les mots : "Lorsque les titres sont cotés" sont remplacés par les mots : "Lorsque les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé" ;
« 1° bis La première phrase du troisième alinéa est remplacée par quatre phrases ainsi rédigées :
« Lorsque les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé, le prix de cession est déterminé conformément aux méthodes objectives retenues en matière d'évaluation d'actions en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la situation nette comptable, de la rentabilité et des perspectives d'activité de l'entreprise. Ces critères sont appréciés le cas échéant sur une base consolidée ou, à défaut, en tenant compte des éléments financiers issus de filiales significatives. A défaut, le prix de cession est déterminé en divisant le nombre de titres existants par le montant de l'actif net réévalué d'après le bilan le plus récent. Un décret fixe les conditions de calcul du prix de cession. » ;
« 2° Il est ajouté deux alinéas ainsi rédigés :
« L'assemblée générale qui décide l'augmentation de capital peut également prévoir l'attribution gratuite d'actions ou d'autres titres donnant accès au capital. L'avantage total résultant de cette attribution et, le cas échéant, de l'écart entre le prix de souscription et la moyenne des cours mentionnée au deuxième alinéa ne peut pas dépasser l'avantage dont auraient bénéficié les adhérents au plan d'épargne si cet écart avait été de 20 % ou de 30 % dans le cas d'un plan mentionné à l'article L. 443-1-2.
« L'avantage constitué par l'écart entre le prix de souscription et la moyenne des cours mentionnés au deuxième alinéa et le cas échéant par l'attribution gratuite d'actions ou de titres donnant accès au capital est exonéré d'impôt sur le revenu et de taxe sur les salaires et n'entre pas dans l'assiette des cotisations sociales définie à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. Cette disposition s'applique également en cas de contributions complémentaires de l'entreprise versées sous forme d'attribution de titre aux salariés dans les conditions prévues à l'article L. 443-7. »
« III. - L'article L. 443-7 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : "Les sommes versées annuellement par l'entreprise pour chaque salarié" sont remplacés par les mots : "La contribution annuelle accordée au salarié" ;
« 2° Dans la première phrase du deuxième alinéa, les mots : "ces sommes" sont remplacés par les mots : "cette contribution" ;
« 3° L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le versement de cette contribution peut être effectué soit en numéraire, soit en actions de l'entreprise, soit en titres donnant accès au capital de l'entreprise. »
Par amendement n° 33, M. Chérioux, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
A. - Avant le I de cet article, d'ajouter un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« I. - A. - 1° Après l'article L. 225-129 du code de commerce, il est inséré un article L. 225-129-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-129-1. - I. - A l'occasion de toute augmentation de capital par émission d'actions nouvelles d'une société cotée ayant distribué au moins deux dividendes au cours des trois derniers exercices, 5 % des actions nouvelles doivent être proposées à l'ensemble des salariés, sous réserve d'une durée minimum d'ancienneté dans l'entreprise qui ne peut excéder un an, à un prix de souscription préférentiel, inférieur de 20 % au prix d'émission. Ces actions sont incessibles pendant cinq ans à dater de leur souscription.
« Ce rabais peut cependant aller jusqu'à 50 % du prix d'émission si les actions ainsi souscrites sont incessibles pendant un délai de dix ans à compter de leur souscription.
« Ce rabais peut être compris entre 20 % et 50 % du prix d'émission si les actions ainsi souscrites sont incessibles pendant un délai allant de cinq à dix ans à compter de leur souscription, le rabais étant d'autant plus élevé que le délai est long.
« L'assemblée générale extraordinaire est seule compétente pour décider, sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire selon le cas, et après information préalable du comité d'entreprise, le montant de ce rabais.
« L'assemblée générale extraordinaire peut décider que la disposition prévue au premier alinéa vise également les salariés des sociétés dont 50 % au moins du capital est détenu, directement ou indirectement, par la société émettrice.
« II. - Les actions proposées sont réparties entre les salariés sur le fondement d'un accord collectif.
« Les actions doivent être souscrites dans un délai d'un mois à compter de la décision de l'assemblée générale autorisant l'augmentation du capital.
« Les actions souscrites dans les conditions prévues par le présent article sont obligatoirement nominatives. Les salariés peuvent souscrire à l'augmentation du capital soit individuellement, soit par l'intermédiaire d'un fonds commun de placement d'entreprise régi par le chapitre III de la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de créances. Un salarié ne peut souscrire que dans la limite d'une somme égale à la moitié du plafond annuel retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale.
« III. - Les dispositions prévues aux I et II peuvent s'appliquer aux sociétés non cotées sur décision de l'assemblée générale extraordinaire. Mais, dans ce cas, les actions ne peuvent être souscrites que par l'intermédiaire d'un fonds commun de placement d'entreprise.
« IV. - Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article. »
« 2° L'article 92 D du code général des impôts est complété par un 7° ainsi rédigé :
« A la cession des titres acquis dans les conditions prévues par l'article L. 225-129-1 du code de commerce. »
« 3° Après le deuxième alinéa de l'article L. 442-7 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces délais ne s'appliquent que si les droits constitués au profit des salariés sont utilisés pour souscrire à une augmentation de capital dans les conditions prévues à l'article L. 225-129-1 du code de commerce. »
« 4° L'article L. 443-6 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce délai ne s'applique pas si la liquidation des avoirs acquis dans le cadre du plan d'épargne d'entreprise permet au salarié de souscrire à une augmentation de capital dans les conditions prévues à l'article L. 225-129-1 du code de commerce. »
B. - En conséquence, avant le paragraphe I de l'article 14, d'ajouter un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Les pertes de recettes pour l'Etat et pour les organismes de sécurité sociale résultant du 1° et 2° du I A sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
C. - En conséquence, de supprimer le 1° du I de l'article 14.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Cet amendement particulièrement important est la reprise d'un texte qui a été voté par notre assemblée au mois de décembre dernier et qui s'inspirait directement d'une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale par M. Balladur et les présidents des trois groupes politiques de l'opposition nationale.
Il vise à ouvrir une voie nouvelle pour permettre aux salariés d'acquérir des actions de leur entreprise. Il devrait en outre permettre de consolider l'actionnariat salarié dans les entreprises où il existe déjà.
Il tend en fait à proposer un autre dispositif que celui qui est prévu par le Gouvernement au présent article et qui paraît bien modeste puisqu'il se limite à l'institution d'un simple débat sur l'actionnariat salarié au sein des assemblées générales extraordinaires des sociétés.
Il prévoit de réserver aux salariés 5 % des actions nouvelles émises par les sociétés cotées à l'occasion de toute augmentation de capital. Ce dispositif n'est que facultatif pour les sociétés non cotées et relève alors d'une décision de l'assemblée extraordinaire.
Le mécanisme prévu est à la fois incitatif et souple.
Il est incitatif car le salarié bénéficie de conditions préférentielles harmonisées avec celles des dispositifs d'épargne salariale - la décote pouvant varier de 20 % à 50 % selon la durée de blocage des actions notamment -, mais aussi de possibilités spécifiques de financement de cette opération grâce à la possibilité exceptionnelle de déblocage anticipé des sommes issues de la réserve spéciale de participation ou placées sur un plan d'épargne d'entreprise.
Il est souple car il repose sur la négociation, un accord d'entreprise devant en effet fixer les modalités de l'opération. Il respecte donc les spécificités de chaque entreprise et de chaque salarié, ces derniers étant bien entendu libres de participer ou non à l'augmentation de capital.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Joseph Ostermann, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Favorable, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Le Gouvernement est opposé à cet amendement, parce qu'il souhaite développer l'actionnariat sous forme volontaire et non par la contrainte. Or les deux solutions proposées par M. le rapporteur pour avis lui apparaissent être une contrainte sur l'actionnariat qui ne correspond pas à l'esprit du texte tel que le Gouvernement l'a conçu.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis étonné de cette réaction du Gouvernement.
J'ai compris que vous étiez soucieux d'éviter toute contrainte mais, en l'occurrence - je tiens à le préciser - les salariés n'en subissent aucune !
C'est donc aux entreprises que vous voulez ménager une certaine souplesse d'action, et je comprends votre point de vue.
Mais il y a un risque de voir se réduire au fil du temps cet actionnariat salarié, dont une partie de celui-ci s'est développée au cours de ces dernières années, notamment grâce aux privatisations.
Cette proposition a pour objet de maintenir le pourcentage détenu par les actionnaires salariés dans le capital de l'entreprise. A l'évidence, si vous procédez à une augmentation de capital, vous diluez la part que les salariés détiennent dans l'entreprise, ce qui va à l'encontre du rôle que ces derniers peuvent jouer à l'intérieur de leur entreprise par le biais des actions qu'ils détiennent. C'est pour éviter une telle dilution que j'ai présenté cet amendement au nom de la commission des affaires sociales.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 103, M. Ostermann, au nom de la commission des finances, propose, au début du second alinéa du texte présenté par le 1° du I de l'article 14 pour le VII de l'article L. 225-129 du code de commerce, après les mots : « Tous les trois ans », d'insérer les mots : « au moins, et s'il n'existe aucune décision ou autorisation d'augmentation de capital réservée à ce personnel en cours de validité, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Joseph Ostermann, rapporteur. Monsieur le président, cet amendement n'a plus d'objet en raison de l'adoption de l'amendement n° 33.
M. le président. L'amendement n° 103 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 104, M. Ostermann, au nom de la commission des finances, propose, dans le texte présenté par le 2° du I de l'article 14 pour le 7° de l'article L. 225-138 du code de commerce, de supprimer les mots : « et celles dont ils auraient bénéficié en application du dernier alinéa de l'article L. 443-7 du même code. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Joseph Ostermann, rapporteur. Cet amendement n° 104 a pour objet de supprimer une disposition relative à l'abondement versé par l'entreprise sous forme de titres, mesure à laquelle la commission des finances n'est pas favorable et qu'elle demandera de supprimer lors de l'examen de l'amendement n° 110.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 104, il convient que je réponde d'abord sur l'amendement n° 110.
M. le président. J'appelle donc en discussion l'amendement n° 110 et l'amendement n° 165, qui est identique.
L'amendement n° 110 est présenté par M. Ostermann, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 165 est présenté par MM. Loridant, Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à supprimer le III de l'article 14.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 110.
M. Joseph Ostermann, rapporteur. L'Assemblée nationale a adopté une disposition qui vise à autoriser les entreprises à abonder les plans d'épargne d'entreprise non seulement en numéraire, mais également en actions de l'entreprise ou en titres donnant accès au capital de l'entreprise.
La commission des finances n'est pas favorable à cette disposition pour plusieurs raisons.
D'abord, cette disposition, telle qu'elle a été votée par l'Assemblée nationale, ne permet pas au salarié de choisir la forme sous laquelle il souhaite recevoir la contribution de l'entreprise.
Ensuite, elle peut se révéler incompatible avec le droit régissant les offres publiques d'achat. En effet, celui-ci précise qu'une entreprise cible ne peut pas se défendre par le biais de moyens tels que l'accroissement de l'auto-contrôle, qui fausserait le déroulement de l'OPA. Or, tel qu'il est rédigé, le III de l'article 14 ne pose aucune condition sur l'abondement de l'entreprise sous forme d'actions de cette dernière en cas d'OPA.
Votre commission vous propose donc un amendement de suppression du III de l'article 14.
M. le président. La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° 165.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, si vous le permettez, je défendrai également l'amendement n° 162.
M. le président. J'appelle donc en discussion l'amendement n° 162, présenté par MM. Loridant, Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et tendant à supprimer le II de l'article 14.
Veuillez poursuivre, monsieur Loridant.
M. Paul Loridant. Les paragraphes II et III de l'article 14, introduits après discussion à l'Assemblée nationale, posent un certain nombre de questions. Ils nous amènent en particulier à nous interroger sur leur insertion dans le texte final de ce projet de loi, dont l'essentiel est axé sur l'épargne salariale.
Ces dispositions vont, dans certaines entreprises - il suffit, pour s'en convaincre, de constater ce qu'en font les amendements de nos deux commissions - permettre de dissimuler et de diluer des opérations classiquement connues sous le nom de stock-options derrière l'appellation d'épargne salariale, alors qu'il s'agit, selon nous, de deux opérations fondamentalement différentes.
On nous rétorquera, bien entendu, que les sommes en jeu n'ont pas d'équivalent avec celles qui concernent les stock-options et que, d'une certaines manière, ces dispositions de l'article 14 introduisent des « stock-options du pauvre ». Il n'en reste pas moins que ces dispositions compliquent encore la lisibilité des dispositifs, offrant en particulier une forme assez surprenante de plus-value d'office aux participants ayant opté pour ce type d'alimentaiton de leur plan d'épargne. Or cela se fait au moment où le traitement fiscal des stock-options est encore susceptible de connaître des évolutions fondamentales avec la future loi sur les nouvelles régulations économiques. Je vous rappelle que, sur ce texte, la commission mixte paritaire ne s'est toujours pas réunie.
Favoriser la mise en oeuvre des dispositions visées aux II et III de l'article 14 crée une sorte de zone franche fiscale et sociale au premier seuil de mise en oeuvre de stock-options et vient avantageusement compléter, pour les plus gros détenteurs d'options, l'allégement résultant de la future loi sur les nouvelles régulations économiques.
C'est précisément parce que nous sommes circonspects sur ces deux paragraphes que je demande, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, leur suppression.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 162 et 165 ? M. Joseph Ostermann, rapporteur. L'amendement n° 165 est identique à celui de la commission des finances, même si notre approche n'est pas identique à la sienne.
La commission est défavorable à l'amendement n° 162, car le paragraphe II de l'article 14, qui permet de calculer le prix de cession des titres non cotés et élargit les possibilités d'actionnariat salarié, ne doit pas être supprimé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 104, 110, 165 et 162 ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Monsieur Loridant, vous avez regretté, hier, de ne pouvoir être présent dans la suite de la discussion. J'ai tenu malgré tout à vous répondre et vous pourrez trouver les propos que je vous ai adressés au Journal officiel.
J'ai bien compris votre souci. Comme l'avait fait Laurent Fabius avant moi, j'ai bien démontré qu'il ne s'agissait pas de stock-options. De même, en ce qui concerne le système de retraite, les arguments que nous avons développés devraient vous rassurer.
Aussi, monsieur le sénateur, la menace de stock-options étant inexistante, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 162.
Il est en revanche favorable aux amendements n°s 104, 110 et 165, parce qu'ils correspondent à l'esprit du texte initial.
Monsieur Loridant, vous avez donc également satisfaction sur ce plan-là.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 104, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 110 et 165, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 162, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 105,M. Ostermann, au nom de la commission des finances, propose, dans le texte présenté par le 2° du I de l'article 14 pour le 7° de l'article L. 225-138 du code de commerce, de remplacer la référence : « L. 225-31 » par la référence : « L. 225-131 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Joseph Ostermann, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel qui corrige une erreur de codification.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Il s'agit d'un amendement réellement rédactionnel ; le Gouvernement y est favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 105, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 106 rectifié, M. Ostermann, au nom de la commission des finances, propose, dans le texte présenté par le 5° du I de l'article 14 pour l'article L. 225-187-1 du code de commerce, de remplacer deux fois le mot : « publication » par le mot : « promulgation ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Joseph Ostermann, rapporteur. Il s'agit également d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Cet amendement n'est pas réellement de nature rédactionnelle. Le Gouvernement souhaite parler de « publication » et non de « promulgation ». Il est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 106 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté).
M. le président. Par amendement n° 107,M. Ostermann, au nom de la commission des finances, propose de rédiger ainsi l'avant-dernière phrase du texte présenté par le 1° bis du II de l'article 14 pour modifier l'article L. 443-5 du code du travail : « A défaut, le prix de cession est déterminé en divisant par le nombre de titres existants le montant de l'actif net réévalué d'après le bilan le plus récent. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Joseph Ostermann, rapporteur. Il s'agit encore d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 107, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 108,M. Ostermann, au nom de la commission des finances, propose :
I. - De supprimer la dernière phrase du texte présenté par le 1° bis du II de l'article 14 pour modifier l'article L. 443-5 du code du travail.
II. - En conséquence, dans le deuxième alinéa (1° bis ) du texte présenté par le II de cet article pour modifier l'article L. 443-5 du code du travail, de remplacer le chiffre : « quatre » par le chiffre « trois ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Joseph Ostermann, rapporteur. Le 1° bis de l'article 14 précise la méthode de calcul du prix de cession des titres qui ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé. La méthode proposée paraît très complète. En conséquence, la référence à un décret pour fixer les conditions de calcul du prix de cession semble inutile. C'est la raison pour laquelle la commission propose de supprimer cette référence au décret.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne partage pas l'avis de la commission. Il pense, monsieur le rapporteur, qu'un décret est utile pour préciser les modalités de calcul du prix de cession des actions des sociétés non cotées dans le cadre des augmentations de capital réservées aux salariés. Au lieu d'une complexification, le décret apportera une clarification nécessaire.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 108, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 109,M. Ostermann, au nom de la commission des finances, propose de supprimer la dernière phrase du second alinéa du texte présenté par le 2° du II de l'article 14 pour modifier l'article L. 443-5 du code du travail.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Joseph Ostermann, rapporteur. L'objet de cet amendement est identique à celui de l'amendement n° 110, que nous venons d'adopter.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 109, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'article 14.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'article 14, comme l'ensemble du titre VI, établit clairement l'objet du projet de loi qui nous est soumis : le développement de l'actionnariat salarié.
M. le ministre de l'économie et des finances ne s'en est d'ailleurs pas caché en annonçant, dès le printemps dernier, que ce projet devrait « encourager l'investissement des salariés en actions ».
A mon avis, il aurait été plus judicieux et plus lisible d'intituler l'ensemble de ce texte : « projet de loi pour la promotion de l'actionnariat salarié » au lieu de retenir la notion neutre d'« épargne salariale ».
Je veux rappeler ici notre opposition à toute extension de l'actionnariat salarié. Nous considérons qu'il s'agit d'un marché de dupes pour les travailleurs, et il est très significatif que le patronat se réjouisse autant de l'initiative du Gouvernement même si, comme d'habitude, il tente de faire de la surenchère, notamment pour faire ressembler encore plus les nouveaux dispositifs dits d'épargne salariale aux fonds de pension à l'anglo-saxonne, prétention à laquelle la majorité de notre assemblée ne manquera pas, encore une fois, de faire écho.
Les dispositifs créés ou étendus par ce projet de loi, au premier rang desquels les PPESV - plan partenarial d'épargne salariale volontaire -, même si leur portée demeure encore limitée, constituent, en fait, une nouvelle arme contre les salaires, contre la protection sociale et, en particulier, contre notre système de retraite par répartition.
Selon une enquête réalisée par le cabinet AlteDia et la Commission des opérations de bourse, 54 % des chefs d'entreprise considèrent que l'épargne salariale est un moyen de compenser les non-augmentations de salaires.
Comment pourrait-il en être autrement alors que les versements patronaux seront presque entièrement exempts de cotisations sociales, déductibles de l'impôt sur les sociétés et qu'ils permettront aux patrons de financer leur entreprise en faisant entièrement supporter le risque d'investissement par les salariés ? Pour 1 000 francs versés par l'entreprise, l'économie de prélèvement sera de 550 francs.
La présomption de non-substitution à la rémunération habituelle établie à l'Assemblée nationale relève plutôt du voeu pieux, au moins pour le moyen terme.
A ce jeu, les salariés ont tout à perdre : il s'opère à leurs dépens une substitution entre une rémunération immédiate et assurée et une rémunération différée et aléatoire car liée à l'évolution des marchés financiers et aux résultats de l'entreprise. Rien, en effet, ne garantit le rendement de 10 % des actions envisagé par le Gouvernement.
Rappelons qu'en moyenne, sur les quarante dernières années, les cours de la bourse n'ont augmenté que de 0,7 % par an, quatre fois moins que le taux du livret A...
Quant à détenir des actions de sa propre entreprise - notamment s'il s'agit de petites et moyennes -, c'est encore plus risqué ; cela peut se retourner directement contre les conditions de travail en entretenant une logique d'auto-exploitation.
En outre, si leur entreprise fait faillite, les salariés risquent de tout perdre : leur emploi et leur épargne.
Contrairement aux affirmations de M. le ministre des finances, on rejoint, sinon la définition exacte des fonds de pension, au moins leur logique. D'après un sondage d'IPSOS, 53 % des salariés prévoiraient d'utiliser ce nouveau produit d'épargne pour compléter leur retraite. La sortie fractionnée du PPESV et les PPESV glissants renforcent les similitudes avec les fonds de pension.
La menace pour le système de retraite par répartition, vous le savez bien, monsieur le secrétaire d'Etat, est réelle, les sommes versées aux PPESV n'étant en effet pas ou que peu soumises à cotisations sociales. Ce sera autant de recettes en moins pour la sécurité sociale.
Les dispositifs déjà existants, les PEE, l'intéressement et la participation coûtent déjà, pour un flux annuel de 45 milliards de francs, plus de 20 milliards de francs d'exonération de cotisations sociales patronales, sans parler des 5 milliards de francs d'exonérations fiscales.
Des projections réalisées par des économistes sur la base d'un versement de 10 000 francs par dix millions de salariés chiffrent le coût pour la sécurité sociale à 54 milliards de francs. Si elle est rétablie par l'Assemblée nationale, la contribution de 8,2 % sur la fraction du versement complémentaire de l'entreprise au-dessus de 15 000 francs n'aura que très peu d'incidence, en raison de son taux très modeste et parce que la plupart des versements se situeront en dessous de 15 000 francs.
L'amputation des ressources de la sécurité sociale doit être considérée comme une diminution de cette forme de salaire différé que constituent les cotisations sociales patronales. Nous pensons que le dispositif se retournera contre les salariés. En fait, il vise à drainer leur épargne, une part de leur retraite et de leur salaire vers la spirale des marchés financiers.
Les nouvelles possibilités d'intervention des salariés dans la gestion de leur entreprise sont un leurre, à mon avis ; d'ailleurs, ils n'y croient pas beaucoup.
Pour ce qui me concerne, vous le voyez, mes chers collègues, je n'ai pas changé d'avis. Ce que j'ai condamné dans la loi Thomas demeure inacceptable.
Par conséquent, je voterai contre cet article 14 et, je le dis d'emblée, contre ce projet de loi, notablement aggravé par la majorité sénatoriale.
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Madame Beaudeau, je pense que vos craintes ne sont pas fondées.
Il n'est nullement question de créer de nouvelles retraites par capitalisation. Vous semblez ne pas fonder d'espoir dans les syndicats pour défendre l'intérêt des salariés. Or, dans tout le processus que nous avons développé jusqu'à présent, nous avons souhaité que la négociation collective s'instaure, que la place des syndicats soit garantie. Le projet de loi remplace la négociation collective.
Vous estimez, en outre, que ces dispositions vont se retourner contre les salariés parce qu'elles vont drainer leur épargne vers les fonds capitalistiques.
Pour ma part, j'ai le sentiment que vous comme moi, madame le sénateur, nous défendons les intérêts des salariés. Or, l'intérêt bien compris des salariés, c'est de les faire bénéficier aujourd'hui d'un juste retour de la croissance et du développement des marges des entreprises. Par ce biais, sous une forme souple qu'il leur appartiendra de gérer, ils retireront un gain réel, ce qu'ils souhaitent, comme le montrent les sondages.
S'agissant des fonds de retraite, M. Fabius vous a parfaitement répondu hier en évoquant la troisième génération de l'UMTS et les cotisations.
Je recevais ce matin des représentants de la CGPME, la Confédération générale des petites et moyennes entreprises, qui, contrairement à vous, regrettent qu'une part du versement soit soumise à cotisation.
Je crois que nous avons trouvé le juste milieu : des cotisations au taux de 8,2 % assises sur une part non négligeable va abonder les fonds de retraite ; par ailleurs, le Gouvernement a décidé d'abonder ce fonds dans des conditions intéressantes qui ont déjà été évoquées.
Nous sommes parvenus à un texte équilibré, un texte novateur, qui ne va pas à l'encontre de l'intérêt bien compris des salariés. Au contraire, c'est un texte de modernisation qui s'inscrit dans un contexte de croissance et qui bénéficiera à tous.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14, modifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.

(L'article 14 est adopté.)

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