Séance du 13 juin 2000






SUR LES VENTES DE TABAC

M. le président. La parole est à M. Carle, auteur de la question n° 812, adressée à Mme la secrétaire d'Etat au budget.
M. Jean-Claude Carle. Madame la secrétaire d'Etat, je souhaite attirer votre attention sur la demande exprimée par la profession des débitants de tabac de voir augmenter la commission perçue sur les ventes de tabac, ce qu'on appelle communément le « taux de remise ». Celle-ci est inchangée depuis vingt-trois ans et se monte à 8 % net du prix de vente public.
La baisse du taux normal de TVA pourrait être l'occasion de procéder à cette augmentation. Or le Gouvernement a décidé que la baisse du taux normal de TVA serait compensée à due concurrence par la hausse des droits de consommation perçus sur les ventes de tabac. Le Parlement en a débattu dans le cadre du collectif budgétaire, et l'on peut regretter qu'il n'ait pas souhaité amender cette disposition, il est vrai qu'un amendement en ce sens serait sans doute tombé sous le coup de l'article 40.
Ce projet suscite l'incompréhension de la profession : elle espérait - et elle l'espère encore fortement - que la baisse du taux normal de TVA serait enfin l'occasion de revaloriser leur commission.
Mon département, la Haute-Savoie, au cours des deux dernières années, a vu la fermeture de quinze débits de tabac, pour seulement neuf créations.
Est-il nécessaire, madame la secrétaire d'Etat, de souligner le rôle joué par les buralistes dans le maintien du lien social, notamment en zone rurale, et de rappeler les différentes missions de service public qu'ils remplissent ?
La profession est confrontée à de nombreux problèmes : insécurité, distorsion en matière de taxe professionnelle. De fait, elle attend un signal fort de l'Etat.
Cette mesure, en ne modifiant pas le prix de vente au consommateur du paquet de cigarettes, ne remettrait pas en cause la politique de prévention justement menée jusqu'à présent.
Aussi souhaiterais-je savoir si le Gouvernement est disposé à prendre en compte les attentes des débitants de tabac, soit en profitant de la dernière lecture du collectif budgétaire, soit en mettant en place une augmentation du taux de remise sur les ventes de tabac, compte tenu, qui plus est, des excellentes rentrées fiscales du moment.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, je voudrais tout d'abord faire le point sur la situation des débitants de tabac qui, vous l'avez dit, bénéficient d'un taux de remise, lequel n'a certes pas été relevé, de 8 % du prix de vente public.
Leur rémunération doit être appréciée en fonction de l'évolution de leur chiffre d'affaires. Or, avec l'augmentation des prix du tabac, le montant de la remise nette a augmenté de 5 % l'an dernier, ce qui représente une croissance de 240 millions de francs. Si l'on se réfère aux neuf dernières années, la rémunération globale pour la vente des cigarettes a augmenté de 84 %.
Cela étant, le Gouvernement reste très attentif aux demandes de la profession.
En ce qui concerne la taxe professionnelle, nous y travaillons avec les représentants des débitants et nous attendons des propositions du groupe de travail qui a été constitué.
Pour ce qui est de la sécurité, le Gouvernement n'entend pas rester inactif et il a déjà apporté des réponses puisque, désormais, les débits de tabac sont intégrés dans les contrats locaux de sécurité. En outre, nous avons généralisé à tous les départements les possibilités de paiement par carte bancaire pour les valeurs fiscales, ce qui limite les manipulations d'argent liquide, donc les risques d'agression. Enfin, l'Etat subventionne les travaux de modernisation et de sécurité des bureaux de tabac. Il y a investi respectivement 84 millions de francs et 54 millions de francs l'an dernier.
S'agissant du réseau rural, nombre de bureaux de tabac, comme vous l'avez indiqué en prenant l'exemple de votre département, ne trouvent pas de repreneur du fait de la baisse du chiffre d'affaires de leur commerce, et le Gouvernement est également très préoccupé par ce phénomène.
Une série de mesures ont été prises pour favoriser le maintien des débits dans les communes situées en zone de revitalisation. Ainsi, il n'est plus nécessaire d'apporter 25 % de la valeur du fonds de commerce pour se porter candidat à la reprise d'un débit. Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2000, les petits débitants sont exonérés de la redevance jusqu'à 300 000 francs de chiffre d'affaires, contre 250 000 francs auparavant.
Enfin, vous vous interrogez, monsieur le sénateur, sur l'opportunité de faire bénéficier la profession de la baisse de la TVA. Pour des impératifs de santé publique évidents, nous n'avons pas proposé de diminuer le prix des cigarettes. Il est préférable d'en faire bénéficier le budget de l'Etat et les comptes sociaux. L'Assemblée nationale et le Sénat se sont prononcés clairement à ce sujet lors des débats sur le collectif budgétaire.
De manière générale, notre démarche est la suivante : plutôt que de prendre des mesures générales qui s'appliqueraient indistinctement à tous les débitants, quel que soit leur chiffre d'affaires, nous entendons privilégier les mesures ciblées sur les petits débits. C'est dans cette direction que nous travaillons avec les représentants de la profession. Notre objectif est d'avoir mis en place ce dispositif dans les tout prochains mois pour aider au maintien de ce service de proximité, qui est apprécié de nos concitoyens.
M. Jean-Claude Carle. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle. Je remercie Mme la secrétaire d'Etat de sa réponse.
J'ai pris acte des arguments qu'elle a développés pour justifier la mise en place de mesures spécifiques, notamment pour les petits débitants de tabac en zone rurale, de préférence à la répercussion de la baisse de TVA. Il est vrai que ces petits débitants sont des acteurs essentiels de cet aménagement rural qui revient souvent dans les discours, mais insuffisamment dans les actes.
Je souhaite, bien entendu, que ces mesures soient prises en concertation avec la profession.
M. le président. L'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)