Séance du 30 mars 2000







M. le président. « Art. 7. - Après l'article 113 du code de procédure pénale, il est inséré une sous-section 2 ainsi rédigée :
« Sous-section 2.
« Du témoin assisté.
« Art. 113-1 . - Non modifié.
« Art. 113-2 . - Toute personne nommément visée par une plainte ou mise en cause par la victime peut être entendue comme témoin assisté. Elle est obligatoirement entendue en cette qualité si elle en fait la demande.
« Toute personne mise en cause par un témoin ou contre laquelle il existe des indices rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions dont le juge d'instruction est saisi peut être entendue comme témoin assisté.
« Art. 113-3 . - Le témoin assisté bénéficie du droit d'être assisté par un avocat qui est avisé préalablement des auditions et a accès au dossier de la procédure, conformément aux dispositions des articles 114 et 114-1. Il peut également demander au juge d'instruction, selon les modalités prévues par l'article 82-1, à être confronté avec la ou les personnes qui le mettent en cause.
« Lors de sa première audition comme témoin assisté, la personne est informée de ses droits par le juge d'instruction.
« Art. 113-4 et 113-5 . - Non modifiés.
« Art. 113-6 . - A tout moment de la procédure, le témoin assisté peut, à l'occasion de son audition ou par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception, demander au juge d'instruction à être mis en examen ; la personne est alors considérée comme mise en examen et elle bénéficie de l'ensemble des droits de la défense dès sa demande ou l'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception.
« Les dispositions du premier alinéa de l'article 105 ne sont pas applicables au témoin assisté.
« Art. 113-7 . - Non modifié.
« Art. 113-8 . - S'il apparaît au cours de la procédure que des indices précis, graves ou concordants justifient la mise en examen du témoin assisté, le juge d'instruction ne peut procéder à cette mise en examen en faisant application des dispositions du quatrième alinéa de l'article 116 qu'après avoir informé la personne de son intention, le cas échéant par lettre recommandée, et l'avoir mise en mesure de faire connaître ses observations. Il peut également procéder à cette mise en examen en adressant à la personne, en même temps que l'avis de fin d'information prévu par l'article 175, une lettre recommandée précisant chacun des faits qui lui sont reprochés ainsi que leur qualification juridique, et l'informant de son droit de formuler des demandes d'actes ou des requêtes en annulation sur le fondement des articles 81, 82-1, 82-2, 156 et 173 pendant une durée de vingt jours. La personne est également informée que si elle demande à être à nouveau entendue par le juge celui-ci est tenu de procéder à son interrogatoire. »
Par amendement n° 180, le Gouvernement propose, au début de la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 113-2 du code de procédure pénale, d'ajouter les mots : « Lorsqu'elle comparaît devant le juge d'instruction, »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je souhaiterais que M. le rapporteur défende, d'abord, son amendement n° 18.
M. le président. Je suis effectivement saisi d'un amendement n° 18, présenté par M. Jolibois, au nom de la commission, et visant à compléter le premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 113-3 du code de procédure pénale, par une phrase ainsi rédigée : « Cet avocat est choisi par le témoin assisté ou désigné d'office par le bâtonnier si l'intéressé en fait la demande. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Avec cet amendement relativement simple, il s'agit pour le témoin assisté d'avoir un avocat - c'est le plus essentiel de ses droits - choisi par lui ou désigné d'office par le bâtonnier si l'intéressé en fait la demande.
Nous apportons ainsi un complément aux modalités de la désignation de l'avocat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. L'amendement n° 18 me donne de nouveau l'occasion de me féliciter du rôle constructif du Sénat sur les dispositions qui concernent la procédure de témoin assisté, dont l'utilisation est désormais facilitée, et sur celles qui concernent la mise en examen, qui est désormais mieux encadrée.
Sur ces deux sujets, ce sont les initiatives du Sénat en première lecture, reprises et complétées par les amendements de la commission des lois de l'Assemblée nationale et du Gouvernement, qui ont permis d'aller plus loin dans les réformes.
Je suis donc tout à fait favorable à cet amendement, qui apporte une précision utile aux dispositions relatives au témoin assisté, qui font désormais, je me plais à le souligner, l'objet d'un consensus.
Cet amendement présente un autre intérêt : il donne au Gouvernement l'occasion de préciser un point très important concernant les nouvelles dispositions sur le témoin assisté, ce qui est indispensable si l'on veut que ces mesures soient totalement cohérentes, totalement protectrices et totalement efficaces.
Dans sa rédaction adoptée par l'Assemblée nationale et acceptée par la commission des lois du Sénat, le texte du nouvel article 113-2 prévoit tout d'abord que toute personne nommément visée par une plainte ou mise en cause par la victime peut être entendue comme témoin assisté. Cet article du code de procédure pénale prévoit ensuite que cette personne bénéficie automatiquement de ce statut si elle en fait la demande, ce que ne faisait pas, je le rappelle, le texte initial du Gouvernement.
Certains praticiens ont soulevé la question du risque que présente l'octroi automatique du statut de témoin assisté à des personnes entendues sur commission rogatoire au cours d'une instruction. Cette obligation serait en effet susceptible de troubler le déroulement des investigations ou d'y faire obstacle.
A titre d'exemple, si, dans une affaire de hold-up, la victime reconnaît l'un des malfaiteurs lors d'un « retapissage » derrière une glace sans tain, ce dernier pourrait aussitôt demander à être entendu comme témoin assisté, ce qui obligerait les enquêteurs à mettre fin à la garde à vue et à le présenter immédiatement au juge d'instruction.
De même, si, dans une affaire de viol ouverte contre X, la victime reconnaît son agresseur dans la rue et alerte les policiers, ces derniers ne pourraient pas entendre celui-ci dans le cadre d'une garde à vue dès lors qu'il demanderait à être témoin assisté.
Ces conséquences ne sont évidemment pas celles qui ont été souhaitées par l'Assemblée nationale et le Sénat lorsqu'ils ont étendu le statut du témoin assisté.
Cette crainte des praticiens peut être discutée, mais c'est un domaine sensible, tant pour les libertés que pour l'efficacité des procédures, et je souhaite par conséquent qu'il ne subsiste aucune ambiguïté. Dès lors qu'une seule personne a soulevé un seul doute, je préfère demander au Sénat de clarifier les dispositions en cause. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement n° 180, qui tend à préciser que le droit pour une personne d'être entendue comme témoin assisté à sa demande ne peut, par définition, s'exercer que lorsque la personne comparaît devant le juge d'instruction.
Je demande au Sénat d'adopter également cet amendement, qui ne fait en définitive que préciser les intentions du législateur. Il nous semble indispensable pour concilier l'efficacité des procédures avec la protection des droits de la défense et éviter toute ambiguïté dans l'application des nouveaux textes.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Nous en revenons à l'amendement n° 180, que Mme le garde des sceaux a déjà défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement. En effet, si l'Assemblée nationale et le Gouvernement n'ont jamais pensé que le témoin assisté pouvait être entendu autrement que devant le juge d'instruction, eh bien ! la commission des lois n'a jamais pensé qu'il pouvait l'être ailleurs. Mais il est peut-être utile, effectivement, de le préciser dans la loi.
La commission, qui n'a pu se réunir, n'a pu émettre d'avis sur cet amendement, mais je suppose que ces mesures correspondent à ce que chacun d'entre nous a toujours pensé lorsque le statut de témoin assisté a été créé. Je peux aller jusqu'à dire - j'espère qu'aucun des commissaires ne m'en voudra - que ce qui allait un peu de soi va encore mieux en l'écrivant.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 180, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 19, M. Jolibois, au nom de la commission, propose, dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 7 pour l'article 113-6 du code de procédure pénale, de remplacer (deux fois) le mot : « accusé » par le mot : « avis ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. C'est un amendement d'ordre, la commission des lois préférant depuis toujours à l'expression « accusé de réception », celle d'« avis de réception ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 8 bis