Séance du 20 décembre 1999







M. le président. Par amendement n° 28, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 21 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le b decies de l'article 279 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« b decies) Les abonnements relatifs aux livraisons d'électricité, de gaz combustible et d'énergie calorifique, distribués par réseaux publics. »
« II. - La perte de recettes résultant de l'abaissement du taux de TVA sur les abonnements aux réseaux de chaleur, est compensée à due concurrence du taux du prélèvement libératoire prévu au 2 de l'article 200 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Cet amendement du groupe communiste républicain et citoyen est dans la même ligne que l'amendement n° 27, qui a été défendu précédemment par ma collègue Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il s'agit en l'espèce, en reprenant un amendement que nous avions déposé sur la première partie de la loi de finances pour 2000 et lors de la discussion des articles non rattachés, de mettre un terme à la différence de traitement qui existe entre les contrats d'abonnement au réseau électricité-gaz, d'une part, et les réseaux de chaleur et de chauffage urbain, d'autre part.
La mise en place de ces réseaux de chaleur a permis à notre pays de bénéficier d'une rationalisation de la gestion de sa consommation énergétique et de réaliser de substantielles économies pour notre balance commerciale.
Le recours à l'alimentation de ces réseaux par la voie de l'usage de la géothermie - énergie produite sur le territoire national - a également généré un volume d'économies non négligeable, notamment lorsque le prix du fioul était au plus haut, dans le courant des années quatre-vingt.
Il est donc particulièrement regrettable que persiste dans notre législation un dispositif d'imposition différente de la même « prestation ».
Ainsi, le consommateur qui est raccordé au chauffage urbain acquitte la TVA au taux majoré alors que l'abonné au gaz et à l'électricité est au contraire soumis à une TVA à taux réduit.
Or, nous ne pouvons oublier que les habitants des communes où se sont développés ces réseaux de chaleur sont souvent des ménages modestes vivant dans des grands ensembles, dans des villes nouvelles, dans des quartiers qui sont au coeur de la politique de la ville d'aujourd'hui.
Nombre de contraintes de gestion ont d'ailleurs amené les opérateurs en chauffage urbain à majorer la part relative de l'abonnement dans le montant de la facture adresée aux abonnés.
Une réduction du taux de la taxe sur la valeur ajoutée affectée aux abonnements aurait donc un impact immédiat sur ces factures, dès lors que les gestionnaires procéderaient à l'imputation intégrale de cette réduction.
Dans les situations que j'ai évoquées, les réductions qui seraient appliquées immédiatement seraient de l'ordre de 7,5 %.
On observera que cette mesure aurait un impact pour les ensembles locatifs ou les copropriétés raccordés à ces réseaux de chauffage urbain et serait donc susceptible de réduire une part des impayés de loyer ou de charges.
J'ajoute, monsieur le ministre, que, si la directive européenne ne prévoit pas explicitement les réseaux de chauffage urbain, elle vise en revanche les abonnements au gaz et à l'électricité. Or c'est la même chose. C'est à désespérer de la commission européenne !
Monsieur le ministre, si pour une fois vous anticipiez, je suis sûr que Bruxelles ne vous démentirait pas. C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, qui a déjà soutenu, sur le fond, des propositions de cette nature, partage le souci des auteurs de cet amendement de favoriser l'essor des réseaux de chaleur pour des raisons tant sociales qu'environnementales.
Cela étant dit, dans l'immédiat, le droit communautaire ne permet pas cette application du taux réduit. Il convient cependant d'encourager le Gouvernement à faire évoluer la législation communautaire sur ce point. Mais c'est sa responsabilité, et tant que le résultat n'est pas acquis, une telle mesure ne peut, de notre point de vue, être votée.
Par ailleurs, le gage de cet amendement n'est vraiment pas acceptable.
Pour toutes ces raisons, la commission ne peut pas être favorable à cet amendement.
M. Michel Caldaguès. Ce n'est pas glorieux pour le pouvoir législatif !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. M. Loridant a raison de revenir perpétuellement à la charge sur cette question du régime de TVA applicable aux réseaux de chaleur. Il souligne à juste titre qu'il existe un écart entre la TVA au taux réduit de 5,5 %, qui s'applique aux abonnements au gaz et à l'électricité - cela a été voté par le Parlement - et le taux de 20,6 % qui reste applicable aux abonnements résultant de réseaux de chaleur.
Je ne vais pas vous donner la même réponse fataliste que le rapporteur général, monsieur Loridant !
L'an dernier, le Gouvernement a écrit à la Commission européenne pour lui demander d'intéger la fourniture d'énergie calorifique dans la fameuse liste des biens ou services éligibles au taux réduit. J'ai eu une réponse négative le 7 octobre 1998.
Mais je rappelle qu'en matière de travaux d'entretien des logements, nous avons obtenu une modification des règles européennes. Nous allons donc continuer à essayer de persuader la Commission européenne. Si nous le faison avec le soutien du Parlement, ce sera évidemment plus facile.
Dans l'intervalle, force est de constater que cet amendement n'est pas eurocompatible. Tout en ayant entendu votre appel, je vous demande de bien vouloir le retirer, sinon je serai dans l'obligation de demander son rejet.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 28.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le ministre, je vous avoue très franchement que vos explications ne me convainquent pas : je ne peux pas penser que les fonctionnaires et les politiques qui animent la Commission soient à ce point fermés, pour s'en tenir à la lettre des textes et non à leur esprit.
Je préfère donc maintenir cet amendement d'autant que j'ai un espoir secret !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Dites-le-nous !
M. Paul Loridant. A partir du 1er juillet prochain, la France va présider aux destinées de l'Europe pendant six mois. Monsieur le ministre, j'ai l'espoir que le Gouvernement mettra à profit cette présidence pour faire bouger l'Europe sur bien des points, et en tout cas sur celui-là.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.).
M. le président. Par amendement n° 7, MM. Gaillard, Ambroise Dupont, Del Picchia, Cazalet et Lanier proposent d'insérer, après l'article 21 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du 1° de l'article 1382 du code général des impôts, après les mots : "non productifs de revenus" est inséré le mot : "locatifs".
« II. - Les dispositions du paragraphe I s'appliquent aux impositions établies à compter de 1999.
« III. - La perte de recettes éventuelle pour les collectivités locales résultant du I ci-dessus est compensée par une majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.
« IV. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du II ci-dessus sont compensées par un relèvement à due concurrence des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Il s'agit de lever une ambiguïté sur le sens de l'exemption de taxes foncières prévue par l'article 1382 du code général des impôts pour certains immeubles publics. Cette exemption porte sur les immeubles non productifs de revenus.
Par notre amendement, nous proposons d'insérer le mot « locatifs » pour bien monter qu'il s'agit d'exonérer les immeubles non productifs des revenus de l'immeuble lui même et non pas les immeubles dans lesquels peut s'exercer une activité qui engendre des revenus. Ainsi resteraient exemptés les immeubles hébergeant, par exemple, des syndicats d'électricité, des eaux, instruments de coopération communale. Ces immeubles par eux-mêmes ne créent pas de revenus, mais l'activité de ces services publics est, elle, créatrice de revenus. L'ambiguité de l'article 1382 serait donc levée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il est tout à fait favorable, monsieur le président.
Il convient de préciser, comme le suggère M. Yann Gaillard, que les immeubles qui ne sont pas exonérés sont ceux qui sont loués à des tiers et qui, de ce fait, n'abritent pas de service public et sont producteurs de revenus locatifs. Il faut en effet éviter que les locaux appartenant à une commune, par exemple, loués ou utilisés par un syndicat mixte ne se voient assujettis à la taxe foncière sur les propriétés bâties, ce qui manifestement heurte le bon sens et est contraire à l'esprit de la loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Mine de rien - si je puis dire - M. Gaillard propose un grand bouleversement. En effet, actuellement, sont exonérées en permanence de taxe foncière sur les propriétés bâties les propriétés publiques qui obéissent à une double condition : la première, c'est d'être affectées à un service public ou d'utilité générale ; la seconde, d'être non productives de revenus.
Par l'amendement n° 7, il propose de ne garder que la seconde condition, c'est-à-dire le fait que ces immeubles ne produisent pas de revenus. Il y a là un bouleversement plus important qu'il n'apparaît à première vue et qui mérite d'être évalué de façon très soigneuse. Je suis d'autant plus libre pour intervenir sur ce point que l'Etat est probablement le principal contribuable foncier public.
Par ailleurs, telle qu'elle est rédigée, cette proposition aurait un effet rétroactif, ce qui aurait pour conséquence de créer de très nombreux contentieux. Il faut donc, me semble-t-il, retravailler le sujet.
Je vous recommande donc, monsieur le sénateur, de retirer votre amendement ; si tel n'était pas le cas, j'en demanderais le rejet.
M. le président. Monsieur Gaillard, l'amendement est-il maintenu ?
M. Yann Gaillard. Cet amendement pourrait effectivement être amélioré. Il n'est en effet absolument pas dans mon intention de supprimer la première condition d'exonération, à savoir que les immeubles doivent abriter des activités publiques.
Si l'amendement était modifié en ce sens, peut-être le Gouvernement pourrait-il l'accepter.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je suis prêt à travailler sur le sujet avec M. Gaillard mais, pour l'instant, cet amendement n'est pas acceptable.
M. le président. Monsieur Gaillard, maintenez-vous l'amendement ?
M. Yann Gaillard. Non, je le retire en attendant de travailler de nouveau sur le sujet.
M. le président. L'amendement n° 7 est retiré.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 18, M. Plancade et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 21 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 1385 du code général des impôts, il est insére un nouvel article ainsi rédigé :
« Art. ... - Les locaux acquis ou aménagés avec une aide de l'Etat à la création d'hébergements d'urgence destinés aux personnes défavorisées mentionnées à l'article 1er de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant une durée de quinze ans. L'exonération de quinze ans est applicable à compter de l'année qui suit celle de l'achèvement des travaux d'aménagements, ou à défaut de travaux d'aménagements, celle de l'acquisition des locaux.
« Les obligations déclaratives à la charge des personnes et organismes entrant dans le champ d'application du présent article sont fixées par décret. »
« II. - Les dispositions du I s'appliquent aux locaux acquis sans travaux d'aménagement à compter du 1er janvier 1999 et aux locaux faisant l'objet de travaux d'aménagement achevés à compter du 1er janvier 1999.
« III. - Dans les conditions prévues par la loi de finances, l'Etat compense chaque année la perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales ou leurs groupements dotés d'une fiscalité propre de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties mentionnée au I de cet article.
« La compensation est égale au produit obtenu en multipliant la perte de base résultant chaque année et pour chaque collectivité de l'exonération par le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties appliqué ladite année dans la collectivité ou le groupement.
« IV. - La perte financière subie par l'Etat du fait des dispositions du III est compensée par un relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 22, MM. de Montesquiou et Pelletier proposent d'insérer, après l'article 21 sexies , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 1385 du code général des impôts, il est inséré un nouvel article ainsi rédigé :
« Art. ... - Les locaux acquis ou aménagés avec une aide de l'Etat à la création d'hébergements d'urgence destinés aux personnes défavorisées mentionnées à l'article 1er de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant une durée de quinze ans. L'exonération de quinze ans est applicable à compter de l'année qui suit celle de l'achèvement des travaux d'aménagements, ou à défaut de travaux d'aménagements, celle de l'acquisition des locaux.
« Les obligations déclaratives à la charge des personnes et organismes entrant dans le champ d'application du présent article sont fixées par décret. »
« II. - Les dispositions du I s'appliquent aux locaux acquis sans travaux d'aménagement à compter du 1er janvier 1999 et aux locaux faisant l'objet de travaux d'aménagement achevés à compter du 1er janvier 1999.
« III. - Dans les conditions prévues par la loi de finances, l'Etat compense chaque année la perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales ou leurs groupements dotés d'une fiscalité propre de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties mentionnée à l'article 1383 A du code général des impôts.
« La compensation est égale au produit obtenu en multipliant la perte de base résultant chaque année et pour chaque collectivité de l'exonération par le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties, appliqué ladite année dans la collectivité ou le groupement.
« IV. - La perte de recettes subie par l'Etat du fait des dispositions du III est compensée par un relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Plancade, pour défendre l'amendement n° 18.
M. Jean-Pierre Plancade. Cet amendement vise à étendre l'exonération de longue durée de taxe foncière sur les propriétés bâties aux centres d'hébergement d'urgence acquis ou aménagés.
En effet, parmi les dispositions de lutte contre l'exclusion, figure l'exonération de longue durée de la taxe foncière accordée aux résidences sociales et aux logements sociaux. Or, les centres d'hébergement d'urgence, premier maillon de la chaîne, eux, ne bénéficient pas de cette mesure alors qu'ils constituent la fraction la plus sociale en matière de logement.
En cette période d'hiver, l'hébergement d'urgence doit, nous semble-t-il, être une priorité. Même si on peut estimer que, pour la présente saison, l'accueil est globalement assuré, on sait que, chaque année, tout est à recommencer parce que les propriétaires qui mettent des locaux à disposition des associations reprennent leurs biens.
En outre, une partie des locaux, inadaptés pour une utilisation permanente, doivent fermer en été alors que les besoins tendent à devenir permanents. L'hébergement d'urgence s'adressant à des personnes particulièrement démunies, notre société doit répondre à ce besoin dignement.
Si, dans sa sagesse, notre assemblée vote cette exonération, elle ne réglera pas tout, mais, d'une part, elle complétera le dispositif de lutte contre l'exclusion et, d'autre part, elle mettra fin à une injustice qui, au bout du compte, touche les plus démunis.
M. le président. La parole est à M. de Montesquiou, pour défendre l'amendement n° 22.
M. Aymeri de Montesquiou. L'exonération que nous proposons revient à compléter l'ensemble des mesures prises précédemment. Je n'ajouterai rien d'autres aux arguments de notre collègue Plancade.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 18 et 22 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission émet, bien entendu, le même avis sur ces deux amendements similaires. Ceux-ci visent à exonérer les logements d'urgence de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant quinze ans, reprenant ainsi les dispositions existantes en matière de logement social, pour les constructions neuves ou en acquisition amélioration, à usage locatif, affectées à l'habitation principale et financées à concurrence de 50 % au moins au moyen de prêts aidés par l'Etat. Les résidences sociales et les logements foyers bénéficient déjà d'une mesure de même nature.
La commission s'en remet à la sagesse du Sénat, mais elle souhaiterait, naturellement, connaître l'avis du Gouvernement sur le sujet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. L'intention exprimée aussi bien par M. Plancade que par M. de Montesquiou est généreuse et particulièrement d'actualité en ce mois de décembre, mais elle s'exprime en des termes trop flous pour qu'elle puisse être concrétisée.
En effet, vous souhaitez, l'un et l'autre, instituer une exonération pour des logements qui sont appelés centres d'hébergement d'urgence, mais qui, et je suis surpris que M. le rapporteur général n'ais pas souligné ce point, n'ont pas d'existence juridique. Ils sont définis ni par la loi ni par décret, seulement par une circulaire du ministère de l'équipement, des transports et du logement. Il paraît donc difficile d'appliquer une telle disposition à des bâtiments qui sont ainsi mal définis.
En outre, si l'acquisition correspond à une notion juridique, l'aménagement ne renvoie à aucune définition légale et peut donner lieu à de multiples interprétations.
Je comprends tout à fait l'intention qui vous inspire. Mais je crois qu'il faut en rester aux dispositions inscrites dans la loi relative à la lutte contre les exclusions ; je pense notamment à un certain nombre de mesures d'exonération de taxes foncières sur les propriétés bâties en faveur des logements destinés aux personnes défavorisées, qui vont tout à fait dans la direction que vous souhaitez. Aller au-delà, dans des conditions juridiques qui, malheureusement, sont quelque peu incertaines, me paraît difficile à accepter.
Aussi, je vous demanderai de bien vouloir retirer vos amendements. Sinon j'en demanderai le rejet.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le ministre, je suis à mon tour quelque peu surpris de l'argument que vous avez utilisé. J'ai en effet ici une circulaire n° 95-64 du 3 août 1995 relative au logement d'urgence émise par le ministre du logement.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Oui, mais c'est une circulaire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette circulaire définit ce qu'il faut entendre par hébergement d'urgence et logements temporaires de personnes défavorisées. Il ne serait pas difficile de reprendre ces dispositions et d'en faire un décret. Cela pourrait se faire sinon en quelques minutes du moins en quelques jours ; c'est extrêmement simple.
Au demeurant, l'Etat sait quels sont les hébergements d'urgence et les logements temporaires de personnes défavorisées puisqu'il leur verse des subventions.
Je répète que l'avis de la commission est un simple avis de sagesse. J'ai fait état de cette circulaire pour éclairer les débats du Sénat sur le sujet ; même si on peut faire mieux qu'une circulaire, celle-ci existe néanmoins.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 18.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Evidemment, je voterai les amendements de MM. Plancade et de Montesquiou. Mais auparavant, je voudrais, monsieur le ministre, vous faire part de mon étonnement.
En effet, la commune dont je suis maire a réaménagé un corps de ferme pour y construire trois logements d'hébergement d'urgence en vue d'abriter des familles particulièrement défavorisées. A cet effet, elle bénéficie de subventions du ministère du logement et le préfet fait pression afin d'accélérer la mise à disposition et la construction de ces locaux.
Les pouvoirs publics ne peuvent aujourd'hui se prévaloir du caractère particulier de ces logements pour leur dénier une existence juridique ou fiscale.
Je regrette donc, monsieur le ministre, que vous n'entendiez pas notre appel. En effet, il est regrettable que vous n'accompagniez pas le travail des élus locaux proches du terrain qui se sont souciés de ces problèmes d'autant que ces centres d'hébergement ne se situent pas, en général, dans des communes, des régions ou des quartiers de villes au profil social élevé.
Je saisis cette occasion pour soulever un deuxième problème qui ne fait pas l'objet de l'amendement mais qui concerne le fonds de compensation de la TVA pour les collectivités qui ont aménagé de tels logements.
Je vous signale, monsieur le ministre, - c'est le cas de ma commune - que, lorsqu'une collectivité finance, certes avec des subventions du ministère du logement de telles installations à destination de l'hébergement d'urgence, elle ne bénéficie pas du fonds de compensation de la TVA l'année n + 2, au motif qu'elle a construit pour le compte de tiers.
Monsieur le ministre, je vous invite donc à ouvrir un nouveau chantier : est-il normal qu'une commune populaire qui construit des logements de centres d'hébergement d'urgence soit brimée dans la mesure où la TVA acquittée pour ces aménagements n'est pas compensée ?
Monsieur le ministre, je vous promets de déposer l'année prochaine l'amendement que je n'ai pas défendu cette année.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les amendements n°s 18 et 22 portent sur la question de l'exonération, au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties, des locaux destinés à permettre des hébergements d'urgence de personnes mal logées.
Nous partageons l'essentiel des arguments avancés par leurs auteurs, MM. Plancade et de Montesquiou.
Cela fait déjà plusieurs années que le groupe communiste républicain et citoyen demande que la loi fiscale évolue en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties.
Le Sénat, dans sa grande sagesse, a adopté, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1999 comme lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2000, un amendement émanant de notre groupe et portant sur l'exonération d'office de cette taxe foncière des titulaires du revenu minimum d'insertion ou de l'allocation spécifique de solidarité, ces deux prestations étant des minima sociaux.
Cette demande, notamment dans un contexte où les recettes budgétaires de l'Etat sont en sensible amélioration - ce dont nous nous félicitons - garde d'ailleurs toute sa pertinence.
En effet, il sera sans doute difficile aux RMIstes ou aux chômeurs en fin de droits propriétaires de leur logement - cela arrive, car les accidents de la vie n'épargnent malheureusement personne - de comprendre qu'ils n'ont pas à s'acquitter cette année des dettes fiscales relatives à ces taxes foncières et qu'ils devront, l'an prochain, réintroduire la procédure gracieuse qu'ils ont déjà pu suivre, au simple motif que la législation n'aurait pas été adaptée comme nous le préconisions.
De plus, alors même que va disparaître le système de financement de l'accession à la propriété par la voie du prêt à taux zéro, nous demandons, monsieur le ministre, que soient appliqués de nouveaux principes en matière d'exonération temporaire de ces logements.
En tout cas, je confirme que nous voterons ces deux amendements.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Je comprends bien à la fois l'objectif des auteurs de l'amendement - j'en fais d'ailleurs partie puisque mon groupe l'a signé - et les problèmes qu'il peut poser au regard des compensations versées par l'Etat, problèmes qui justifient sans doute la réponse du Gouvernement, même si cela n'était pas totalement explicite.
Je dois dire que, en ce qui concerne les compensations, le problème se pose moins lorsqu'il s'agit de demandes de la majorité de l'Assemblée nationale, puisque, là, on met sans problème des « paquets » supplémentaires de taxe d'habitation ; mais passons !
Cela étant, monsieur le président, je vais sous-amender les amendements n°s 18 et 22 (exclamations), puisque c'est à peu près le même texte, en insérant dans le deuxième alinéa du paragraphe I, après les mots : « sont exonérés », les mots : « sur délibération des assemblées locales prise avant le 30 juin de l'année précédente ». Cela veut dire que les collectivités locales prendront leurs responsabilités et que, par conséquent, il n'y aura plus de compensation, mais qu'il y aura exonération.
M. le président. Monsieur Charasse, vous ne pouvez pas sous-amender un amendement dont vous êtes collectivement signataire. Seul M. Plancade peut le rectifier.
Monsieur Plancade, acceptez-vous de rectifier l'amendement n° 18 comme le suggère M. Charasse ?
M. Jean-Pierre Plancade. Je reconnais toute la bonne volonté dont est capable de faire preuve mon ami Michel Charasse mais je ne peux le suivre parce que l'amendement tel que je l'ai proposé reprend le dispositif des exonérations précédentes, auxquelles j'ai fait allusion tout à l'heure, sur les logements sociaux et les résidences sociales. C'est le même principe !
Je ne peux que maintenir cet amendement dans sa rédaction actuelle, que notre éminent collègue Philippe Marini a d'ailleurs brillamment analysée.
J'étais, il y a quelques semaines encore, vice-président aux affaires sociales du conseil général de la Haute-Garonne, et je peux dire que ces associations qui s'occupent de centres d'hébergement ou d'accueils d'urgence sont largement subventionnées. Personne ne s'interroge sur la légalité de cette situation et, tout à coup, aujourd'hui, on nous dit : Attention, cela pose un problème !
Je comprends les difficultés que cela peut soulever pour le Gouvernement, en particulier pour le ministre en charge du budget, mais elles ne suffisent pas à ébranler la conviction du parlementaire que je suis. C'est pourquoi je maintiens cet amendement, et je le maintiens en l'état.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je ne voudrais surtout pas me mêler à ce débat passionnant entre membres très honorables de la Haute Assemblée. Je veux simplement dire à MM. Loridant et de Montesquiou, à Mme Beaudeau et à M. Charasse que le Gouvernement ne soulève pas là une objection de fond. Moi, je suis tout à fait partisan, sur le fond, de faire ce que vous proposez. En l'occurrence, c'est une question de principe de procédure budgétaire, de prérogatives fiscales.
Il ne paraît pas admissible que l'application de dispositions fiscales puisse relever de circulaires administratives. Si la catégorie des centres d'urgence était définie soit par la loi - et l'amendement pourrait le faire - soit par décret, il n'y aurait pas de difficulté. Mais se référer, comme l'a dit très honnêtement M. le rapporteur général, à une circulaire du ministère des transports, c'est subordonner le pouvoir fiscal de la Haute Assemblée à des décisions de caractère administratif, et cela n'est pas possible.
Je suis prêt à travailler sur cette question mais on ne peut décider des exonérations fiscales que sur des êtres fiscaux qui sont définis soit par la loi, soit par décret. Cela me paraît tout à fait conforme à nos institutions.
Si je demande le rejet de ces deux amendements, ce n'est pas parce que le Gouvernement a le coeur sec mais parce qu'il est attaché à ce que le droit fiscal ne porte que sur des catégories juridiques qui sont définies soit par la loi, soit par décret.
M. Michel Charasse. Il s'agit d'un million de francs : c'est quand même scandaleux d'entendre des choses pareilles ! C'est sordide !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat et qui est repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 21 sexies, et l'amendement n° 22 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 8, MM. Lassourd, Del Picchia, Cazalet et Lanier proposent d'insérer, après l'article 21 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le quatrième alinéa de l'article 1599 G du code général des impôts, le taux "5 %" est remplacé par le taux : "10 %". »
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Chaque conseil général peut, chaque année, modifier les tarifs de la vignette pour les véhicules dont la puissance fiscale est inférieure à 4 CV.
Pour ceux dont la puissance fiscale est inférieure à 4 CV, la loi prévoit la possibilité de modifier les coefficients multiplicateurs de la vignette dans la limite de 5 %.
Par cet amendement, je propose de faire passer cette marge de souplesse de 5 % à 10 %.
En effet, certains départements se sont lancés dans une démarche de diminution des tarifs de la vignette, et il me semble tout à fait intéressant que certains conseils généraux puissent moduler cette diminution de vignette en privilégiant les propriétaires de véhicules de très faible puissance fiscale, dont on peut penser qu'ils ont de faibles revenus.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est favorable à cet amendement.
La commission suit une logique décentralisatrice et souhaite une autonomie fiscale approfondie ou élargie des collectivités territoriales. Qu'il y ait une certaine concurrence fiscale entre les départements ne la choque absolument pas. C'est d'ailleurs en vertu de ce principe que nous avions, il y a quelque temps, soutenu le département de la Marne dans la politique fiscale tout à fait innovante qu'il avait lancée sous l'égide de son excellent président, notre collègue Albert Vecten.
Dès lors, que l'on veuille élargir la marge de manoeuvre des conseils généraux en matière de vignette automobile ne nous choque absolument pas. Cette initiative est de nature à responsabiliser les gestionnaires locaux.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. L'amendement défendu par M. Lassourd vise à porter de 5 % à 10 % la limite dans laquelle les conseils généraux peuvent modifier les coefficients multiplicateurs des tarifs de la vignette pour les véhicules d'une puissance fiscale supérieures à 4 CV.
J'avoue que je suis très réticent sur cet amendement : non que je veuille brider le pouvoir fiscal des conseils généraux, mais une telle disposition pourait induire des effets pervers. Certains départements pourraient en effet appliquer à des véhicules d'une puissance comprise entre 8 et 9 CV un tarif de vignette plus élevé que celui qui s'appliquerait aux véhicules de 10 et 11 CV.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est absurde !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je crois que la limite de 5 % est une bonne marge de modulation. C'est pourquoi je demande le rejet de cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Monsieur le ministre, si les conseils généraux pouvaient bénéficier de cette souplesse supplémentaire, ils veilleraient évidemment à ce que soit respectée la logique de la progression graduelle et à faire en sorte que les propriétaires d'un véhicule de 8 ou 9 CV payent moins que ceux qui possèdent un véhicule de 10 ou 11 CV.
Il ne faut tout de même pas croire que les élus sont capables d'autant d'incohérence ! Eux aussi sont responsables, monsieur le ministre !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En fait, c'est un amendement girondin ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 21 sexies .

Article 21 septies