Séance du 20 décembre 1999







M. le président. « Art. 1er. - Les dispositions du I de l'article 1er de la loi de finances rectificative pour 1998 (n° 98-1267 du 30 décembre 1998) sont applicables du 1er janvier 1999 au 31 décembre 1999. »
Sur l'article, la parole est à M. Souplet.
M. Michel Souplet. Monsieur le président, je vous remercie de me donner la parole au moment de la discussion de l'article 1er de la loi de finances rectificative pour 1999. C'est pour moi l'occasion de rappeler devant la Haute Assemblée l'attachement que le Sénat porte à la recherche de débouchés non alimentaires des productions de masse de l'agriculture.
Depuis quinze ans, un groupe de travail spécifique a étudié les possibilités multiples d'utilisation non food de volumes de plus en plus importants de produits.
Voulant faire le point précis de la situation à la fin de 1999, notre groupe s'est réuni la semaine dernière et il a entendu deux exposés complémentaires de responsables très compétents.
Le premier émanait de M. Roy, directeur de l'agriculture et des bioénergies à l'ADEME - Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie -, qui a évoqué de nombreuses niches de bonne valorisation du produit brut mais dont les volumes sont restreints : les lubrifiants, les tensio-actifs, les solvants, le bois-énergie, les textiles, notamment.
Le second était de M. Cuypers, président de l'Agence pour le développement des carburants agricoles, qui a rappelé les progrès considérables faits par les biocarburants - éthanol et diester - qui permettent aujourd'hui la transformation de 350 000 à 400 000 hectares de productions liées à la jachère.
Rappelons, enfin, les conclusions du rapport de M. Desmarescaux favorables à cette évolution de diversification des ressources et à leurs utilisations. Aujourd'hui, environ 600 000 hectares sont transformés, et ces surfaces pourraient être doublées d'ici à dix ans.
Pour ce faire, il faut une volonté politique claire. Le volume de bioadditif peut augmenter de façon progressive pour des raisons de qualité de l'air et de réduction des pollutions, de lutte contre l'effet de serre.
Aujourd'hui, le Gouvernement reconduit ce que l'on appelle la défiscalisation pour l'année 1999, ce que nous approuvons. Nous avions d'ailleurs pensé déposer un amendement visant à la pérennisation de cette mesure ; nous y avons renoncé, souhaitant pouvoir débattre avec le Gouvernement en dehors de l'examen du projet de loi de finances.
Les obstacles techniques au développement des biocarburants, qui furent un frein énorme par le passé, n'existent plus. Que l'on ne nous dise pas, aujourd'hui, qu'il faut encore attendre des expériences, des rapports nouveaux, etc. Voilà quinze ans qu'on fait des rapports, voilà quinze ans que l'on sait que l'avenir est aux biocarburants.
Il faut que, demain, industriels et organisations professionnels agricoles spécialisées puissent être sécurisés et contractualiser des volumes utilisables. Il faut donc des textes communautaires, voire internationaux, pour lutter contre le CO2 et la pollution au sens large.
D'une manière générale, monsieur le ministre, il faut sortir de la situation dérogatoire, ambiguë dans laquelle se situent les biocarburants. Leur existence s'inscrit comme en négatif : on parle de non-food ; les biocarburants n'ont pas de fiscalité propre comme les autres carburants mais existent fiscalement grâce à une détaxation de la TIPP, la taxe intérieure sur les produits pétroliers ; ils sont liés à la jachère. Il faut construire un discours fait de « plus » et non de « moins », un discours offensif, réaliste et redonnant espoir aux producteurs et aux transformateurs.
Le temps est venu de faire une étude complète et définitive présentant le compte d'exploitation des biocarburants : un bilan des coûts et des avantages qui montrera que, pour les collectivités, les avantages sont bien supérieurs aux coûts. Ce bilan pourrait mettre en avant, par exemple, les avantages considérables retirés par l'industrie pétrolière des biocarburants - gain en indice d'octane, pouvoir lubrifiant - mais aussi son rôle dans la lutte contre l'effet de serre. Ce bilan prouverait, monsieur le ministre, que les biocarburants sont soumis à plus de taxes que le gaz naturel, par exemple, ou le GPL.
Qu'entendez-vous faire, monsieur le ministre, pour développer la filière, encourager la construction de deux usines complémentaires de carburants créant de la richesse et de l'emploi ? Qu'attendez-vous pour mettre en place une fiscalité propre aux biocarburants à la place d'une fiscalité dérogatoire et remise en question chaque année ?
Enfin, oserai-je, monsieur le ministre, vous demander quand sortiront les décrets d'application de la loi sur l'air ? Ils devraient déjà être publiés depuis plusieurs mois. Pourquoi voter des lois et les rendre inefficaces par la non-parution des décrets d'application ?
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Souplet, le Gouvernement partage tout à fait vos préoccupations de voir se développer les carburants propres. L'article 1er a, précisément, pour but de prolonger la détaxation des biocarburants. Je suis tout à fait prêt, au nom du Gouvernement, à continuer à réfléchir sur cette question, dont, à l'évidence, monsieur le sénateur, vous êtes un très grand spécialiste.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article additionnel après l'article 1er