Séance du 13 décembre 1999







M. le président. « Art. 58. _ I. _ A. _ L'article 44 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Au I :
« a) A la première phrase du premier alinéa, les mots : "créées à compter du 1er octobre 1988 jusqu'au 31 décembre 1994" sont supprimés et, après les mots : "des bénéfices réalisés", sont insérés les mots : ", à l'exclusion des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif,";
« b) Au deuxième alinéa, les mots : "A compter du 1er janvier 1995 :" sont supprimés et les 1 et 2 deviennent respectivement les deuxième et troisième alinéas ;
« c) Au troisième alinéa, les mots : "jusqu'au 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "à compter du 1er janvier 1995 jusqu'au 31 décembre 2004";
« d) Au quatrième alinéa, les mots : "les dispositions du 1" sont remplacés par les mots : "Ces dispositions";
« e) Après la première phrase du premier alinéa, il est inséré deux phrases ainsi rédigées :
« Dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A, le bénéfice des dispositions du présent article est également accordé aux contribuables visés au 5° du I de l'article 35. Le contribuable exerçant une activité de location d'immeubles n'est exonéré qu'à raison des bénéfices provenant des seuls immeubles situés dans une zone de revitalisation rurale.
« Dans le dernier alinéa, après les mots : "de gestion ou de location d'immeubles", sont insérés les mots : "sauf dans les cas prévus au premier alinéa". »
« 2° Le II est ainsi rédigé :
« II. _ Le capital des sociétés nouvellement créées ne doit pas être détenu, directement ou indirectement, pour plus de 50 % par d'autres sociétés.
« Pour l'application du premier alinéa, le capital d'une société nouvellement créée est détenu indirectement par d'autres sociétés lorsque l'une au moins des conditions suivantes est remplie :
« _ un associé exerce en droit ou en fait une fonction de direction ou d'encadrement dans une autre entreprise, lorsque l'activité de celle-ci est similaire à celle de l'entreprise nouvellement créée ou lui est complémentaire ;
« _ un associé détient avec les membres de son foyer fiscal 25 % au moins des droits sociaux dans une autre entreprise dont l'activité est similaire à celle de l'entreprise nouvellement créée ou lui est complémentaire. » ;
« 3° A la fin du III, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L'existence d'un contrat, quelle qu'en soit la dénomination, ayant pour objet d'organiser un partenariat, caractérise l'extension d'une activité préexistante lorsque l'entreprise nouvellement créée bénéficie de l'assistance de ce partenaire, notamment en matière d'utilisation d'une enseigne, d'un nom commercial, d'une marque ou d'un savoir-faire, de conditions d'approvisionnement, de modalités de gestion administrative, contentieuse, commerciale ou technique, dans des conditions telles que cette entreprise est placée dans une situation de dépendance. » ;
« 4° Il est inséré un IV ainsi rédigé :
« IV. _ Pour les entreprises créées à compter du 1er janvier 2000, le bénéfice exonéré ne peut en aucun cas excéder 225 000 euros par période de trente-six mois. »
« B. _ Au douzième alinéa (e) du I de l'article 125-0 A du code général des impôts et au c du 3 de l'article 92 B decies du même code, les mots : "au deuxième alinéa du 2 du I de l'article 44 sexies " sont remplacés par les mots : "au quatrième alinéa du I de l'article 44 sexies ".
« II. _ L'article 39 quinquies D du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "avant le 1er janvier 2005";
« 2° Le dernier alinéa est supprimé. »
Par amendement n° II-45, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose, après les mots : « sont supprimés », de supprimer la fin du a) du 1° du A du I de cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit, dans cet article 58, du régime fiscal des entreprises nouvelles.
Le Gouvernement propose, au premier alinéa de cet article, de ne pas inclure, dans les bénéfices susceptibles d'être exonérés d'impôts, les plus-values réalisées par une entreprise à l'occasion de la réévaluation libre de ses éléments d'actifs, et donc de valider expressément la doctrine actuelle de l'administration, récemment infirmée par la cour administrative d'appel de Nantes dans un arrêt du 2 octobre 1998.
Mes chers collègues, nous ne saurions accepter de telles méthodes. Lorsque l'administration est condamnée, elle doit respecter la règle du jeu et ne pas demander au Parlement de valider des comportements qui ont été, à juste titre, censurés par les cours compétentes !
M. Jean Chérioux. Exactement ! La loi est pour tout le monde !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est donc pour des raisons de principe, parce que nous demandons à l'administration fiscale de respecter le droit, que nous ne saurions, encore une fois, accepter de valider cette doctrine administrative.
Par conséquent, le présent amendement vise à ce que ne soient pas distingués, au sein des profits d'une entreprise, les bénéfices réalisés et ceux qui sont simplement constatés, ces deux catégories devant demeurer exonérées. Il s'agit, je le répète, d'un amendement de principe, qui témoigne de notre souci de lutter contre le recours à la méthode un peu trop facile des validations administratives.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est radicalement opposé à cet amendement, dont l'adoption reviendrait à avaliser par la loi des opérations ayant l'évasion fiscale pour unique objet.
La précision apportée dans la loi vise à dissiper une ambiguïté née d'une décision de la cour administrative d'appel de Nantes, qui a considéré que les plus-values pouvaient bénéficier du régime d'exonération dès lors que, en l'absence d'éléments particuliers figurant dans les travaux et les débats parlementaires, l'expression « bénéfices réalisés » utilisée à l'article 44 sexies ne traduisait pas une intention claire du législateur de taxer ces profits. Or l'application du régime d'exonération à des bénéfices résultant d'un simple jeu d'écriture comptable n'aurait aucune légitimité et serait sans rapport avec les objectifs visés dans l'optique de ce dispositif.
Dans ces conditions, si la commission ne retire pas son amendement, le Gouvernement émettra un avis défavorable sur celui-ci.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-45, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-46, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
I. A la fin du c) du 1° du A du I de l'article 58, de remplacer la date : « 31 décembre 2004 » par la date : « 31 décembre 2006 ».
II. En conséquence, à la fin du 1° du II de l'article 58, de remplacer la date : « 1er janvier 2005 » par la date « 1er janvier 2007 ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avec cet amendement, il s'agit toujours du régime fiscal des entreprises nouvelles, au sens de l'aménagement du territoire. Notre amendement a pour objet de proroger ce régime issu de l'article 44 sexies du code général des impôts, ainsi que le régime d'amortissement exceptionnel des immeubles construits par des petites et moyennes entreprises dans certaines zones du territoire.
Le régime en question devrait à notre avis s'appliquer non pas jusqu'au 31 décembre 2004, comme le propose le Gouvernement, mais jusqu'au 31 décembre 2006, c'est-à-dire jusqu'au terme des nouveaux contrats de plan Etats-régions en cours de négociation, ce dernier mot devant parfois être mis entre guillemets.
Il serait logique, s'agissant d'aménagement du territoire, de « caler » la mesure sur la durée de validité de ces contrats de plan, ainsi que sur la programmation européenne des fonds structurels.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne peut accepter cet amendement.
Le texte adopté en première lecture par l'Assemblée nationale prévoit une prorogation, pour cinq ans, du régime d'exonération des entreprises nouvelles et de l'amortissement dérogatoire des immeubles commerciaux construits dans les ZRR, les zones de rénovation rurale, et les ZRU, les zones de redynamisation urbaine.
Ce délai nous paraît satisfaisant. S'agissant d'aménagement du territoire, je note d'ailleurs que, comme vous venez de le dire, monsieur le rapporteur général, c'est celui qui avait été retenu par le Sénat lors de la discussion en 1995 de la loi « Pasqua ».
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-46, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-47 rectifié, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De rédiger comme suit le dernier alinéa e du 1° du A du I de l'article 58 :
« e) Le cinquième alinéa est ainsi modifié :
« 1. Les mots : "aux entreprises qui exercent une activité bancaire, financière, d'assurances, ou de location d'immeubles ni" sont supprimés ;
« 2. Il est complété par une phrase ainsi rédigée : "Les contribuables exerçant une activité de location d'immeubles ne sont exonérés qu'à hauteur des bénéfices provenant des seuls immeubles situés dans une des zones visées au premier alinéa.". »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du A ci-dessus, de compléter in fine l'article 58 par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'extension du champ d'application de l'article 44 sexies du code général des impôts est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, nous souhaitons, par cet amendement, étendre le régime fiscal des entreprises nouvelles à toutes les entreprises, quelle que soit leur branche d'activité, c'est-à-dire, en particulier, à celles qui exercent une activité bancaire, financière, d'assurances ou de location d'immeubles.
Nous pensons qu'il n'y a aucune raison d'exclure du champ du dispositif ces entreprises, qui sont aussi créatrices d'emplois et de richesses que d'autres et qui peuvent être tout aussi fragiles au cours de leurs premières années d'existence.
Au demeurant, je rappellerai que, à lire la version initiale du projet de loi de finances, c'était bien cette logique qu'avait suivi l'ancien ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, l'article 10 prévoyant d'étendre, par ailleurs, le régime des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise aux activités que j'ai citées.
Il faut souligner que seules les entreprises créées dans certaines zones d'aménagement du territoire sont éligibles, ce qui conduit à penser que le coût de l'extension que nous souhaitons devrait être tout à fait acceptable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le régime d'exonération prévu à l'article 44 sexies est destiné à renforcer les fonds propres d'entreprises nouvelles indépendantes qui doivent recourir à l'emprunt et supporter des charges importantes au cours de leurs premières années d'existence.
Dans ces conditions, l'exclusion des activités bancaires, financières et d'assurances du champ du dispositif de l'article 44 sexies du code général des impôts se justifie par le fait que ces activités sont généralement exercées dans des conditions telles qu'une aide de l'Etat ne se justifie pas.
Ces secteurs d'activité sont en effet moins exposés que d'autres aux difficultés économiques...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ah bon !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. ... et sont, par ailleurs, peu créateurs d'emplois.
En outre, le respect de la condition d'implantation exclusive en zone d'aménagement du territoire soulèverait d'importantes difficultés pour les entreprises relevant de ces secteurs d'activité. En effet, la réalité de leur implantation reste, en pratique, difficile à établir pour le contribuable et délicate à vérifier pour l'administration.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette disposition ne coûterait pas cher !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. En tout état de cause, le Gouvernement demande le rejet de cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-47 rectifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je remarque que, dès qu'il s'agit d'alléger la contribution des entreprises au financement de la charge publique, la majorité de la commission des finances du Sénat sait toujours faire preuve de beaucoup d'imagination. Il en est ainsi avec l'amendement n° II-47 rectifié, comme avec l'amendement n° II-45, que nous avons examiné précédemment.
Pour notre part, nous avons approuvé les orientations ayant guidé la rédaction de l'article 58 du projet de loi, qui tend, dans sa version actuelle, à rééquilibrer le dispositif d'exonération temporaire de l'impôt sur les sociétés défini à l'article 44 sexies .
L'application de ce dispositif représente, faut-il le rappeler, un certain coût, qui s'élèverait aujourd'hui, selon les estimations tirées du document d'évaluation des voies et moyens, à un milliard de francs.
On notera aussi que la mise en oeuvre de ce dispositif a engendré un important contentieux fiscal, dont les dispositions de l'actuel article 58 permettraient d'ailleurs de limiter l'ampleur, voire d'amener la disparition.
Il est également indispensable de s'interroger sur la portée et l'efficacité réelles du dispositif en termes de développement économique et de création d'emplois. Nous étions très sceptiques lors de l'instauration du dispositif, et nous le demeurons.
En effet, nous pensons que la meilleure incitation au développement économique des parties du territoire dites défavorisées réside non pas dans l'accumulation de facilités fiscales ou d'allégements de cotisations sociales, mais dans une meilleure allocation des ressources du crédit aux entreprises en faveur des véritables « entreprises nouvelles ».
Ces observations expliquent que nous ne voterons pas cet amendement de la commission des finances, pas plus que nous n'avions voté les deux précédents.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais rappeler à M. le secrétaire d'Etat que la disposition prévue par notre amendement vise à apporter une simplification, qui devrait amener une réduction du contentieux.
En effet, il suffit aujourd'hui qu'une entreprise exerce à titre accessoire une activité de nature immobilière ou financière pour que puissent lui être opposées les dispositions actuelles du code général des impôts et que, bien que créant réellement des emplois dans une zone aidée au sens de l'aménagement du territoire, elle se voit privée de l'exonération d'impôt sur les bénéfices, ce qui suscite un contentieux nourri.
Alors, que veut-on ? Veut-on oui ou non que le système des ZRU et des ZRR soit efficace ? Un emploi n'en vaut-il pas un autre ?
Vous avez dit, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il n'y avait sans doute guère d'entreprises de ces secteurs d'activité qui soient localisées spécifiquement dans les zones en question. Par conséquent, puisqu'il y en a si peu, et puisque la simplification proposée aurait pour effet de réduire les difficultés d'application des textes préexistants, vous ne risquez pas grand-chose à accepter la suggestion que nous formulons.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-47 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 58, modifié.

(L'article 58 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 58