Séance du 11 décembre 1999







M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-1, M. Lesbros, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 66, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 71 de la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 portant loi de finances pour 1960 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« IV. - Par dérogation aux paragraphes précédents, sont recevables les demandes d'attribution, de révision et de réversion de pension d'invalidité ou d'ayant cause et les demandes de retraite du combattant déposées en 2000 au titre du code des pensions militaires d'invalidité et victimes de guerre. »
« II. - L'article 170 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« VI. - Par dérogation aux paragraphes précédents, sont recevables les demandes d'attribution, de révision et de réversion de pension d'invalidité ou d'ayant cause et les demandes de retraite du combattant déposées en 2000 au titre du code des pensions militaires d'invalidité et victimes de guerre. »
« III. - La valeur du point d'indice "cristallisé" applicable à la pension d'invalidité et à la retraite du combattant est réévaluée de 20 % en Algérie, au Maroc, en Tunisie, au Cambodge, au Laos et au Vietnam. »
Par amendement n° II-72, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 66, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La valeur du point d'indice "cristallisé" applicable à la pension d'invalidité et à la retraite du combattant est réévaluée de 20 % en Algérie, en Tunisie, au Maroc, au Cambodge, au Laos et au Viêtnam.
« II. - Les droits perçus en application des articles 575 A et 575 B du code général des impôts sont relevés à due concurrence des pertes et des recettes résultant du I ci-dessus. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° II-1.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis. Cet amendement concerne le problème de la cristallisation des pensions militaires d'invalidité et des retraites du combattant, dont on a parlé toute la matinée. Tout le monde s'accorde en effet à reconnaître qu'il convient de régler ce problème.
Je ne souhaite pas que l'on invoque brutalement l'article 40 à l'encontre de cet amendement, qui prévoit, je le rappelle, les dispositions suivantes : « La valeur du point d'indice "cristallisé" applicable à la pension d'invalidité et à la retraite du combattant est réévaluée de 20 % en Algérie, au Maroc, en Tunisie, au Cambodge, au Laos et au Viêtnam. »
Il s'agit uniquement d'« amorcer la pompe » et de faire en sort que vous fassiez mieux l'année prochaine, monsieur le secrétaire d'Etat comme vous le ferez chaque année.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° II-72.
M. Guy Fischer. A la lecture de cet amendement, vous aurez compris que, comme pour le précédent, il s'agit d'un amendement d'appel.
Nous avons déjà eu la réponse de M. le secrétaire d'Etat, elle ne nous surprendra donc pas.
Nous souhaitons, nous aussi, qu'au cours des prochains exercices budgétaires des réponses puissent être apportées à cet égard, tout en sachant que le ministère de la défense est également concerné.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Sans aucune brutalité, je vais indiquer les raisons pour lesquelles, comme je l'ai dit, j'invoque l'article 40.
Tout d'abord, sur le fond, chacun s'accorde, ici et dans le monde combattant, à dire combien il serait utile que la France examine cette question sous l'angle de ses responsabilités morales, de son devoir moral. Chacun soucrit à cette idée.
Mon devoir est donc maintenant de faire des propositions qui soient compatibles avec les réalités budgétaires.
L'approche en termes de pouvoir d'achat me paraît mériter l'attention, car la réparation s'exprime aussi en ces termes. Toutefois, comme je vous l'ai indiqué tout à l'heure à la tribune, il faut essayer de conduire une politique globale. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas annoncé à votre Haute Assemblée, comme j'en avais exprimé l'intention à un moment donné, la levée de la mesure de forclusion concernant la retraite du combattant, qui est en vigueur depuis 1995.
A la suite de discussions très légitimes au sein du Gouvernement, il est apparu qu'il fallait plutôt avoir une approche globale de ce dossier.
Par conséquent, ne disposant pas aujourd'hui des moyens budgétaires me permettant de répondre, même partiellement, aux demandes de MM. Lesbros et Fischer, monsieur le président, j'invoque également l'article 40 de la Constitution sur ces deux amendements.
M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial. Je souhaitais entendre les explications du Gouvernement. C'est chose faite !
L'article 40 est applicable, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, les amendements n°s II-1 et II-72 ne sont pas recevables.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° II-60, est présenté par Mme Printz, MM. Hesling, Estier, Chabroux, Courrière et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Le second, n° II-84, est déposé par MM. Hoeffel, Richert, Grignon et les membres du groupe de l'Union centriste.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 66, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'Etat s'engage à indemniser les Alsaciens-Mosellans incorporés de force dans les organisations para-militaires du régime nazi.
« II. - La taxe sur les tabacs est augmentée à due concurrence. »
La parole est à Mme Printz, pour défendre l'amendement n° II-60.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement concerne l'indemnisation des Alsaciens et des Mosellans incorporés de force dans les organisations paramilitaires du régime nazi.
M. le secrétaire d'Etat nous a fait savoir qu'il ne serait pas possible d'obtenir une indemnisation, ce que je regrette vivement. Je sais bien que cette décision n'est pas de son fait puisque les crédits font défaut. Mais j'aimerais bien que cette question soit réexaminée l'année prochaine.
J'attends donc que M. le secrétaire d'Etat me donne des explications complémentaires.
M. le président. La parole est à M. Herment, pour défendre l'amendement n° II-84.
M. Rémi Herment. Il s'agit de la même demande, monsieur le président.
Mes collègues signataires de cet amendement préconisaient, pour leur part, l'instauration d'une taxe sur les tabacs pour régler le problème de l'article 40 invoqué par M. le secrétaire d'Etat. (Sourires.)
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Je comprends bien le sentiment qui anime les élus d'Alsace et de Moselle s'agissant de cette question qui les concerne très directement. Mais, actuellement, je ne dispose pas des moyens budgétaires nécessaires.
Il me reste à faire preuve de beaucoup de pugnacité dans les semaines ou les mois à venir pour savoir comment il est possible, malgré tout, d'engager la procédure d'indemnisation des personnes incorporées de force dans le Reichsarbeitsdienst et le Kriegshilfsdienst, notamment de ces jeunes femmes qui ont été contraintes de porter un uniforme, parfois la croix gammée, et donc de connaître les difficultés que l'on peut imaginer et dont la presse se fait l'écho encore aujourd'hui. Ainsi, Madame Printz, le dernier numéro de Marie-Claire, celui du mois de décembre, consacre plusieurs pages à la situation de ces femmes pendant cette période.
Je regrette vivement de ne pouvoir vous donner satisfaction. Je vous exonère de toute responsabilité au regard du Journal officiel s'agissant de cette question. Chacun a fait le maximum, et tous les élus, tous les parlementaires, tous les groupes se sont engagés sur cette question. Pour moi, je le répète, c'est un échec. Ou bien je baisse les bras ou bien j'essaie encore d'avancer : je vais m'efforcer encore d'avancer.
Toutefois, n'ayant pas les moyens budgétaires d'engager la mise en oeuvre d'une bonne réponse, j'invoque l'article 40 sur ces deux amendements.
M. le président. L'article 40 de la Constitution est-il applicable, monsieur le rapporteur spécial ?
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial. Il l'est, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, les amendements n°s II-60 et II-84 ne sont pas recevables.
Par amendement n° II-69, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 66, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le quatrième alinéa du I de l'article 2 de la loi n° 96-126 du 21 février 1996 portant création d'un fonds paritaire d'intervention en faveur de l'emploi, après les mots : "postérieurement au 1er janvier 1999" sont ajoutés les mots : "et avant le 1er janvier 2000". »
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Au-delà des sensibilités politiques qui s'expriment dans cet hémicycle, je souhaite que cet amendement soit adopté, car il conditionne l'application de la disposition que vous avez acceptée l'an dernier et qui permet d'accorder le bénéfice de l'ARPE aux anciens combattants qui se sont vu refuser l'application de cette mesure en 1999.
Je vous demande, sans engagement idéologique ou politique, tout simplement sous l'angle pratique, de nous permettre de donner satisfaction à un certain nombre de demandes. Aussi, je souhaite que cet amendement soit adopté à l'unanimité par le Sénat.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial. Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne reviendrai pas sur les critiques que j'ai formulées l'année dernière à l'encontre de vos services, qui avaient sans doute quelque peu confondu vitesse et précipitation, ce qui explique que nous soyons dans une telle situation cette année.
Cela étant dit, je ne peux qu'émettre un avis favorable sur cet amendement, car on ne peut faire autrement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-69, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 66.

Article 66 bis