Séance du 30 novembre 1999







M. le président. Je suis saisi de trois amendements présentés par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-197 tend à insérer, après l'article 19 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa de l'article 1390 du code général des impôts est ainsi rédigé : "Les titulaires de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-2 ou à l'article L. 815-3 du code de la sécurité sociale, les contribuables âgés de plus de soixante ans, ainsi que les veuves et veufs, dont le montant des revenus de l'année précédente n'excède pas la limite prévue à l'article 1417 ; les contribuables atteints d'une infirmité ou d'une invalidité les empêchant de subvenir, par leur travail, aux nécessités de l'existence lorsque le montant de leurs revenus de l'année précédente n'excède pas la limite prévue à l'article 1417 ; les bénéficiaires du revenu minimum prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion, les bénéficiaires de l'allocation solidarité spécifique mentionnée à l'article L. 351-10 du code du travail sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties dont ils sont passibles à raison de leur habitation principale".
« II. - L'article 1391 du code général des impôts est abrogé. »
« III. - Pour compenser les pertes de recettes résultant des I et II ci-dessus, les taux applicables aux deux dernières tranches du tarif fixé à l'article 885 U du code général des impôts sont relevés à due concurrence. »
L'amendement n° I-198 vise à insérer, après l'article 19 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 1390 du code général des impôts, après les mots : "code de la sécurité sociale" sont insérés les mots : ", les bénéficiaires du revenu minimum prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion, les bénéficiaires de l'allocation solidarité spécifique mentionnée à l'article L. 351-10 du code du travail". »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par un relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-199 a pour objet d'insérer, après l'article 19 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 1390 du code général des impôts, après les mots : "code de la sécurité sociale" sont insérés les mots : "les bénéficiaires du revenu minimum prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion ».
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par un relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Foucaud, pour défendre les trois amendements.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement tend à exonérer de la taxe foncière sur les propriétés bâties les contribuables âgés de plus de soixante ans, les veuves et veufs ne dépassant pas un certain plafond de ressources, les contribuables atteints d'une infirmité ou d'une invalidité, les RMIstes, les bénéficiaires de l'allocation solidarité spécifique.
L'ensemble de ces contribuables bénéficient d'une exonération de taxe d'habitation mais ne sont aucunement aidés pour le paiement de leurs impôts locaux, attachés à leur résidence principale quand ils sont propriétaires.
La propriété n'est pas toujours synonyme d'aisance.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Ah ! C'est vrai ce que vous dites !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous l'avons toujours dit !
M. Thierry Foucaud. De plus en plus de propriétaires, vous le savez, sont surendettés. Ils le doivent souvent à l'achat d'un bien immobilier suivi d'un changement brusque et imprévu, tel le chômage ou un divorce.
La seule exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties concerne les bénéficiaires du minimum vieillesse.
Il est temps d'adapter notre législation fiscale aux évolutions de notre société. Même si la mesure en elle-même témoigne d'un grand souci de solidarité et d'humanité, il ne suffit pas d'annuler les dettes fiscales des personnes surendettées.
Il faut s'inspirer de l'exemple de la taxe d'habitation pour régler le problème en amont et exonérer de la taxe foncière sur les propriétés bâties toutes les personnes qui ont des revenus modestes.
Les amendements suivants ne sont que des déclinaisons du premier. Ils pourraient être des étapes successives de la mise en place des exonérations que nous vous proposons de consentir aux personnes en difficulté.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-197, I-198 et I-199 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission considère qu'il n'y a aucune raison de ne pas transposer à la taxe foncière sur les propriétés bâties le régime d'exonération établi en matière de taxe d'habitation.
Dans la mesure où nous avions voté l'an dernier un amendement de ce type, il convient de renouveler ce vote. Je propose de le faire en faveur de l'amendement n° I-198. Par conséquent, je suggère à notre collègue de bien vouloir retirer les amendements n°s I-197, I-198 et I-199.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-197, I-198 et I-199 ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. L'amendement n° I-197 pose une question importante sur laquelle le Gouvernement a eu l'occasion de s'exprimer très récemment à l'Assemblée nationale.
Les services fiscaux examinent toujours la situation des personnes en difficulté avec une ouverture d'esprit qui mérite d'être saluée. Les dégrèvements fiscaux accordés aux redevables de la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui représente une lourde charge pour les redevables les plus modestes, ont excédé 100 millions de francs en 1998.
Comme je l'ai déjà dit, le Gouvernement a accepté, sur proposition de l'Assemblée nationale, de rédiger un rapport sur les modalités de réforme de la taxe d'habitation.
De plus, j'ai indiqué la semaine dernière au cours de la discussion à l'Assemblée nationale que le problème que vous évoquez, monsieur le sénateur, serait inclus dans cette réflexion qui devrait conduire à des premières mesures dès l'automne 2000.
D'ores et déjà, je rappelle que le Premier ministre a décidé que les personnes les plus défavorisées, celles qui sont en situation de surendettement, bénéficieraient de mesures de grande ampleur en ce qui concerne l'abandon de dettes fiscales et sociales.
En outre, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, l'Assemblée nationale a adopté, sur proposition du Gouvernement, le maintien de l'avantage dont bénéficient les RMIstes en matière de taxe d'habitation, c'est-à-dire le dégrèvement total de leur cotisation en cas de retour à l'emploi.
Par ailleurs, j'ai rappelé tout à l'heure que le Gouvernement avait accepté l'allégement du poids de la taxe d'habitation qui pèse sur les plus modestes des redevables, ce qui représente une somme de 500 millions de francs.
Compte tenu de ces précisions, des engagements forts et datés pris par le Gouvernement - j'ai parlé de l'automne de l'an 2000 - je pense que les auteurs des amendements pourraient aisément les retirer.
M. le président. Monsieur Foucaud, maintenez-vous vos amendements ?
M. Thierry Foucaud. Je retire les amendements n°s I-197 et I-199, mais je maintiens l'amendement n° I-198.
M. le président. Les amendements n°s I-197 et I-199 sont retirés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-198, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 19 bis .
Par amendement n° I-196, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 19 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du paragraphe V de l'article 1417 du code général des impôts, après les mots : "montant net", insérer les mots : "après application éventuelle des règles de quotient défini à l'article 163 O-A".
« II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet amendement porte sur la question pour le moins spécifique de l'application du système du quotient en matière d'imposition du revenu au regard de la législation propre à la taxe d'habitation.
Un simple rappel de l'état des lieux s'impose.
En matière d'imposition des revenus différés des particuliers, la loi de finances pour 1993 a mis un terme au système de l'étalement, réservant celui-ci à certains revenus exceptionnels spécifiques comme les primes de départ à la retraite qui demeurent, sous option du contribuable, soumis au régime de l'article 163 A.
Si le système du quotient a permis de préserver pour l'essentiel les droits des contribuables au titre de l'impôt sur le revenu, il se trouve qu'il est venu se télescoper, en quelque sorte, avec le dispositif d'allégement de la taxe d'habitation mis en place à partir de 1997 et faisant désormais référence au revenu imposable et non plus à la cotisation fiscale.
Il se trouve en effet que le revenu fiscal de référence des contribuables de l'impôt sur le revenu, utilisé pour déterminer éventuellement le montant maximal de leur cotisaton de taxe d'habitation, se trouve, l'année de déclaration et de perception de revenus exceptionnels, parfois augmenté dans des proportions importantes, subissant, dès lors, les effets de seuil les plus redoutables.
On a ainsi pu voir des contribuables exonérés de la taxe d'habitation se retrouver, dès leurs droits à perception des revenus différés rétablis, en situation de devoir acquitter une taxe d'habitation sans plafonnement, alors même que leur situation financière n'a pas, pour autant, été sensiblement améliorée.
Je passe sur le fait que, dans certains cas, le relèvement du revenu fiscal de référence peut aussi avoir une conséquence sur le montant de prestations sociales servies, telle une aide personnelle au logement.
Vous conviendrez que le prix est élevé pour avoir obtenu, après parfois plusieurs années d'attente, ce que l'on était en droit d'obtenir...
Notre amendement vise donc tout simplement à permettre que le revenu fiscal de référence des personnes ayant perçu des revenus différés ou exceptionnels ne fasse pas l'objet d'une majoration excessive. Par ailleurs, leur cotisation de taxe d'habitation tiendrait compte de cette situation, ce qui aurait d'ailleurs été le cas si ces revenus avaient été perçus en temps normal.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le sujet concerne les modalités de calcul du revenu pris en compte pour l'application des dégrèvements de taxe d'habitation.
Nos collègues proposent d'intégrer les revenus exceptionnels dans le revenu de référence suivant les modalités de l'article 163 OA consistant à diviser par quatre le revenu exceptionnel et à multiplier par quatre l'impôt dû au titre dudit revenu.
Vous aurez compris, mes chers collègues, que ce mécanisme est complexe et nécessite les éclaircissements du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. L'objet du revenu fiscal de référence est d'appréhender les facultés contributives réelles de chaque contribuable, notamment pour définir le domaine des dégrèvements et exonérations d'impôts locaux pratiqués en faveur des contribuables les plus modestes.
C'est à cette fin que certains revenus exonérés d'impôt ou certaines charges admises en déduction du revenu global sont réintégrés dans le revenu imposable pour déterminer le revenu fiscal de référence.
Je comprends tout à fait la logique de l'amendement, qui consiste à tenir compte du mécanisme du quotient pour le calcul du revenu de référence. Toutefois, ce mécanisme a un objet spécifique à l'impôt sur le revenu, puisqu'il vise à réduire la progressivité de celui-ci en présence de revenus exceptionnels ou différés.
La démarche préconisée par MM. Foucaud et Loridant est tout à fait logique et cohérente. Elle posera probablement à nos services des problèmes de gestion, mais ceux-ci pourront sans doute être surmontés grâce à la proverbiale bonne volonté desdits services.
Je m'en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée, et je lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-196 rectifié.
Quel est, dans ces conditions, l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission s'en remet également à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-196 rectifié, pour lequel la commission et le Gouvernement s'en remettent à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 19 bis.

Article 20