Séance du 25 mai 1999







M. le président. « Art. 15 bis. - I. - Les articles L. 1er et L. 2 du code des postes et télécommunications sont ainsi rédigés :
« Art. L. 1er . - Le service universel postal concourt à la cohésion sociale et au développement équilibré du territoire. Il est assuré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité en recherchant la meilleure efficacité économique et sociale. Il garantit à tous les usagers, de manière permanente et sur l'ensemble du territoire national, des services postaux répondant à des normes de qualité déterminées. Ces services sont offerts à des prix abordables pour tous les utilisateurs.
« Il comprend des offres de services nationaux et transfrontières d'envois postaux d'un poids inférieur ou égal à 2 kilogrammes, de colis postaux jusqu'à 20 kilogrammes, d'envois recommandés et d'envois à valeur déclarée.
« Les services de levée et de distribution relevant du service universel postal sont assurés tous les jours ouvrables, sauf circonstances exceptionnelles.
« Art. L. 2 . - La Poste est le prestataire du service universel postal. Au titre des prestations relevant de ce service, elle est soumise à des obligations en matière de qualité des services, d'accessibilité à ces services, de traitement des réclamations des utilisateurs et, pour des prestations déterminées, de dédommagement, en cas de perte, de vol, de détérioration ou de non-respect des engagements de qualité du service. Elle est également soumise à des obligations comptables et d'information spécifiques.
« Les services nationaux et transfrontières d'envois de correspondance, que ce soit par courrier accéléré ou non, y compris le publipostage, d'un poids inférieur à 350 grammes et dont le prix est inférieur à cinq fois le tarif applicable à un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la catégorie normalisée la plus rapide, sont réservés à La Poste.
« Le service des envois recommandés dont l'utilisation est prescrite par un texte légal ou réglementaire est réservé à La Poste qui est soumise à ce titre à des obligations.
« Les dispositions d'application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'Etat après avis de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications. »
« II. - L'article L. 7 du même code est complété par les mots : "sans préjudice des dispositions de l'article L. 2".
« III. - Dans les articles L. 17, L. 20 et L. 28 du même code, la référence : "article L. 1er" est remplacée par la référence : "article L. 2".
« IV. - Au deuxième alinéa de l'article 2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, les mots : "le service public du courrier sous toutes ses formes, ainsi que celui du transport et de la distribution" sont remplacés par les mots : "le service public des envois postaux, qui comprend le service universel postal et, dans ce cadre, le service public du transport et de la distribution".
« V. - Dans le troisième alinéa de l'article 2 de la même loi, après le mot : "distributions", sont insérés les mots : "d'envois postaux,".
« VI. - 1. Après le deuxième alinéa de l'article 8 de la même loi, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le service universel postal ; ».
« 2. A la fin du deuxième alinéa du même article, le mot : "assurées" est remplacé par le mot : "assurés". »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 100, M. Le Cam, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° 27, MM. Gérard Larcher, Belot et Revet, au nom de la commission spéciale, proposent de rédiger comme suit l'article 15 bis :
« Une loi d'orientation postale interviendra dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi. »
La parole est à M. le Cam, pour défendre l'amendement n° 100.
M. Gérard Le Cam. Comme en première lecture, je demande, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, la suppression de l'article 15 bis .
Je n'insisterai pas davantage sur la précipitation avec laquelle le Gouvernement a procédé au rattachement de cette disposition à un projet de loi dont l'objet est tout différent.
Vous critiquiez à juste titre, monsieur le rapporteur, la précipitation avec laquelle le Gouvernement s'est saisi de cette question, alors qu'un débat d'envergure nationale est nécessaire. Je regrette que vous n'ayez pas eu la même attitude s'agissant de l'article 15 bis A, qui méritait également, me semble-t-il, une réflexion plus approfondie !
Cette méthode - loin d'être inédite, hélas ! - a pour effet l'adoption en catimini d'un texte qui concerne la vie quotidienne de tous les Français, l'avenir de La Poste et le sort de plus de 300 000 agents postaux, tenus à l'écart des décisions votées par le Parlement.
Il est nécessaire de rappeler que cet article entérine la fin du monopole de La Poste pour un certain nombre de services, conformément à la directive 97/67 du 15 décembre 1997.
Sans attendre la discussion prochaine d'un projet de loi visant à la transposition de la directive européenne, l'article 15 bis prépare, en vérité, la libéralisation progressive des services postaux à l'échéance de 2003 et désigne La Poste comme prestataire du « service universel » postal.
Cette dénomination suscite les plus expresses réserves de notre part s'il s'agit de procéder à un redécoupage des obligations de service public pour, à terme, n'en conserver que la version la plus réduite qui soit.
Aussi comprendrez-vous, madame la ministre, que nos réticences à voir adopter cet article ne sont aucunement le signe d'un refus du débat ni même de toute évolution de La Poste, à la condition, bien évidemment, que celle-ci facilite l'accès des citoyens à des services de proximité, dans le souci de la péréquation tarifaire et de la continuité des services.
J'observe que la commission spéciale appelle à une anticipation rapide de la libéralisation du marché postal, sans même s'interroger sur le bien-fondé de cette ouverture du point de vue tant économique et social que de l'aménagement du territoire. Or chacun sait qu'avec la libéralisation La Poste aurait demain les plus grandes difficultés à maintenir ses agences en milieu rural ou même dans les quartiers difficiles, dès lors que la fin de sa situation de monopole ne lui permettrait plus d'en assumer le financement.
Il y a là une contradiction fondamentale entre le discours tenu par M. le rapporteur et le soutien sans faille qu'il apporte à la déréglementation du secteur.
Pour conclure, dans l'attente d'un débat que nous aurons dans les prochains mois, notre groupe réitère sa demande de suppression de l'article 15 bis .
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 27 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 100.
M. Gérard Larcher, rapporteur. La transposition de la directive postale a été introduite par amendement à l'Assemblée nationale. Nous proposons de renvoyer ce débat à l'examen d'un projet de loi d'orientation postale, qui devrait intervenir dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi.
La méthode employée nous semble critiquable. Ainsi, M. Duron, évoquant à la page 106 de son rapport à l'Assemblée nationale, la suppression du volet économique institué par le Sénat, juge que l'adoption d'un texte instillé par un amendement dans un autre texte n'est pas une bonne façon de légiférer. Or si, en matière de développement économique, on pouvait parler de peloton de cavalerie, pour La Poste, nous sommes au moins en présence d'un escadron de cavalerie !
La Poste a vraiment besoin d'un grand texte !
Enfin, je vais remettre à M. Le Cam le rapport que la commission des affaires économiques et du Plan et le groupe d'études sur l'avenir de la poste et des télécommunication ont commis il y a quelques mois. Il constatera alors que La Poste a des préoccupations majeures de service public en même temps que des préoccupations d'adaptation aux nouveaux défis. Comme il suit les auditions auxquelles nous procédons avec beaucoup d'attention, il n'est pas sans savoir que cela « bouge de partout », et nous avons le souci de prendre en comtpe cette réalité-là.
La Poste constitue une chance de développement pour notre territoire, mais aussi pour nos entreprises. N'ayons pas d'elle une vision étriquée en la condamnant à garder, bon gré mal gré, 17 000 points postaux dont 3 000 n'ont qu'une heure et demie d'activité par jour ! Faisons de La Poste un outil de développement du territoire, afin de résister à ceux qui écrèment le marché !
C'est la raison pour laquelle nous avons besoin d'une vraie loi d'orientation postale.
Nous avons fait voilà peu le bilan de la transposition des directives en nous rendant à Bruxelles pour faire le point avec les deux commissaires - commissaires sortants, certes, mais les directions, et c'est au moins une certitude, demeurent, elles - et nous avons constaté que les pays qui transposent la directive élaborent toujours parallèlement un grand texte d'adaptation de leur réglementation et de leur outil postal à la réalité du service postal tel qu'il existe aujourd'hui.
Répondant à l'appel de M. Duron, nous souhaitons donc éviter les cavaliers, ou à tout le moins passer de la cavalerie à la cavalerie mécanisée pour La Poste. Voilà pourquoi nous souhaitons un grand texte pour La Poste dans les six mois qui viennent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 100 et 27 ?
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. J'ai déjà eu l'occasion de vous dire pourquoi et comment le Gouvernement entendait transposer la directive potale.
Vous l'aurez noté, il s'agit ici de faire figurer dans le projet de loi d'aménagement du territoire les seuls éléments de la transcription dans le droit français qui concernent l'aménagement du territoire dans la directive postale communautaire. Resteront à examiner les trois quarts des dispositions de la directive, notamment dans le domaine juridique et en ce qui concerne les statuts.
Je rappelle que M. Christian Pierret s'est explicitement engagé devant la représentation nationale à déposer dans les prochains mois un projet de loi qui donnera aux activités postales le cadre juridique complet que vous appelez de vos voeux.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements n°s 100 et 27.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 100, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 15 bis est ainsi rédigé.

Article 16