Séance du 25 mars 1999







M. le président. « Art. 12. - I. - L'intitulé de la section 2 du chapitre V du titre Ier de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 précitée est ainsi rédigé : "Du schéma de services collectifs culturels".
« II. - L'article 16 de la même loi est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est remplacé par sept alinéas ainsi rédigés :
« Le schéma de services collectifs culturels définit les objectifs de l'Etat pour favoriser et développer la création ainsi que l'accès de tous aux biens, aux services et aux pratiques culturels sur l'ensemble du territoire.
« Il identifie des territoires d'intervention prioritaire, afin de mieux répartir les moyens publics.
« Il encourage le développement de pôles artistiques et culturels à vocation nationale et internationale. Il prévoit, le cas échéant, les transferts de fonds patrimoniaux correspondants.
« Il définit, pour les organismes culturels qui bénéficient de subventions de l'Etat, des objectifs de diffusion de leurs activités ainsi que de soutien à la création.
« Il renforce la politique d'intégration par la reconnaissance de toutes les formes d'expression artistique et de pratiques culturelles.
« Il définit les actions à mettre en oeuvre pour assurer la promotion et la diffusion de la langue française, la sauvegarde et la transmission des cultures et langues régionales et minoritaires.
« Il s'appuie sur l'usage des technologies de l'information et de la communication pour développer l'accès aux oeuvres et aux pratiques culturelles. » ;
« 2° Le troisième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« La conférence régionale d'aménagement et de développement du territoire organise la concertation dans le domaine culturel afin de contribuer au renforcement et à la coordination des politiques culturelles menées par l'Etat et les collectivités territoriales dans la région.
« Les contrats passés entre l'Etat, les collectivités territoriales intéressées et les organismes culturels qui bénéficient de subventions de l'Etat tiennent compte des objectifs assignés à ces organismes par le schéma de services collectifs culturels. »
Sur l'article, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Nous avons tout à l'heure adopté un amendement n° 331 qui avait été présenté par la commission spéciale et qui avait recueilli un avis de sagesse positive de la part de Mme la ministre. Nous avons ainsi institué un schéma directeur d'équipements et de services sportifs.
Je voudrais, à l'occasion de l'examen de cet article 12, revenir sur la problématique du sport au regard de la politique d'aménagement du territoire.
Depuis le dépôt de ce projet de loi, de nombreuses associations sportives - principalement le Comité national olympique et sportif français, mais aussi bien d'autres associations de base - et des élus locaux demandaient la création d'un schéma de services collectifs sportifs. Ils ont donc obtenu satisfaction.
Le sport contribue fortement à la structuration et à la valorisation des territoires, car il constitue souvent un élément déterminant dans les choix d'implantation des entreprises.
De multiples exemples montrent de quelle manière les équipements sportifs créent une nouvelle dynamique du développement local, contribuant à reconstruire une identité urbaine par leur capacité à rassembler des populations.
Chacun a, bien sûr, à l'esprit le cas du Stade de France, qui continue de drainer les investissements privés à Saint-Denis et bien au-delà.
Plus généralement, et plus modestement, il est nécessaire de favoriser le développement des pratiques sportives dans le cadre d'une politique d'aménagement du territoire ayant pour objectif la valorisation des sites existants et l'implantation de nouvelles infrastructures sportives.
Le sport étant appelé, il faut l'espérer, à prendre une part croissante dans le temps consacré aux loisirs, il est tout à fait justifié de compléter ce projet de loi d'un schéma spécifique définissant les engagements de l'Etat, en concertation avec les acteurs locaux.
Je sais, madame la ministre, que vous y réfléchissez d'ores et déjà, en partenariat avec Mme la ministre de la jeunesse et des sports.
Nous serions heureux que, d'ici à la fin de cette discussion, vous puissiez nous faire connaître l'état de votre propre réflexion sur ce sujet puisque le Parlement semble maintenant tout à fait disposé à suivre une telle démarche.
Il est hautement souhaitable, en tout cas, que la commission mixte paritaire qui se réunira sur ce texte retienne cette disposition.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. C'est toujours notre logique constante de cohérence, de partenariat et de prise en compte de la dimension européenne qui sous-tend le schéma de services collectifs culturels.
Aucune répartition des compétences entre les différentes collectivités territoriales n'est formalisée en matière culturelle. C'est pourquoi la concertation à l'échelle régionale est indispensable : c'est le rôle de la conférence régionale d'aménagement du territoire. Les contrats de plan Etat-région, là aussi, seront un vecteur essentiel des objectifs du schéma de services collectifs culturels.
La concertation est indispensable mais non suffisante. Une véritable coordination des politiques culturelles territoriales à l'échelle nationale doit intervenir pour offrir une vision globale et donner la cohérence indispensable à toute politique culturelle.
C'est le rôle du schéma de services collectifs culturels, dont les objectifs ne se limitent pas à un rééquilibrage, d'autant que ce rééquilibrage ne peut se faire en opposant schématiquement zones urbaines et zones rurales.
En effet, nombre de zones urbaines périphériques - c'est-à-dire, en fait, nombre de nos banlieues - doivent figurer au titre des zones prioritaires pour de nouvelles installations, tout comme certaines zones rurales. De forts déséquilibres existent également au sein de la région d'Ile-de-France.
Pourtant, dans ces quartiers, ce n'est pas le désert culturel : de nouvelles pratiques artistiques et culturelles se développent, qui ont besoin d'être reconnues et soutenues.
Or il me semble que celles-ci ne sont pas, aux yeux de la commission spéciale, assez « nobles » ou assez « académiques » pour être reconnues. Pour preuve : la commission souhaite supprimer l'alinéa de l'article 12 qui précise que le schéma de services collectifs culturels « renforce la politique d'intégration par la reconnaissance de toutes les formes d'expression artistique et de pratiques culturelles ».
Pour nous, socialistes, les équipements culturels sont des éléments structurants non pas tant des territoires que de la cohésion sociale. Le but est d'aboutir non à une offre culturelle émiettée sur l'ensemble du territoire, sans coordination, mais à des équipements fonctionnant en réseaux et autour de projets fédérant leur environnement pour une démocratisation accrue de la culture. En ce sens, les pratiques culturelles amateurs sont un élément important, qu'il convient de conforter.
Il s'agit aussi de favoriser le rayonnement et les projets des structures existantes en permettant à celles-ci d'étendre leur aire de diffusion et donc de toucher un public plus large. En effet, certaines capitales régionales bénéficient d'équipements culturels importants mais insuffisamment mis en valeur, et elles ne parviennent pas à maximiser leur potentiel.
La coopération intercommunale peut être un réel moyen d'optimisation des équipements territoriaux. En effet, lorsque le projet de loi relatif au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale sera adopté, les groupements intercommunaux verront renforcée leur faculté d'assurer une compétence culturelle à travers, par exemple, des contrats d'agglomération ou de pays.
Par ailleurs, le schéma de services culturels se doit de prendre en compte la dimension sportive, qui participe activement au renforcement de la cohésion sociale. On connaît le rôle essentiel des petits clubs sportifs dans nos communes. Dans cette perspective, l'article additionnel visant à insérer le sport dans la politique d'aménagement du territoire est une bonne chose.
Enfin, puisque le schéma de services collectifs culturels doit dessiner des perspectives dans la durée, cette exigence implique nécessairement une évaluation périodique de la politique culturelle au regard de l'aménagement du territoire, notamment en termes de fréquentation, afin d'autoriser les réactualisations nécessaires.
M. le président. La parole est à M. Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Je souhaite tout d'abord dire ma satisfaction devant l'instauration d'un schéma de services culturels telle qu'elle est prévue dans ce projet de loi.
Je crois profondément, en effet, que l'audace culturelle peut accompagner l'audace économique, voire lui servir de moteur.
Mais je souhaite surtout évoquer en cet instant l'un des alinéas de cet article 12.
Votre texte initial, madame la ministre, prévoyait que le schéma des services collectifs culturels « assure la valorisation des cultures et langues régionales ». Bien ! Mat ! dirait-on en breton.
Cet alinéa a fait l'objet, à l'Assemblée nationale, d'un débat intéressant, qui a donné lieu à une nouvelle rédaction. Désormais, le schéma « définit les actions à mettre en oeuvre pour assurer la promotion et la diffusion de la langue française, la sauvegarde et la transmission des cultures et langues régionales et minoritaires ». Très bien ! Mat tré !
Nous arrivons aujourd'hui à une troisième étape : la commission spéciale propose la suppression de cet alinéa. Là, déception ! Je dois avouer que la justification de la proposition de notre commission spéciale m'échappe !
Le texte appelle à la promotion et à la diffusion de la langue française. Chacun ne peut qu'acquiescer, et le Parlement, comme il l'a d'ailleurs toujours fait, doit s'associer à cette approbation.
Le texte appelle également à la sauvegarde et la transmission des cultures et langues régionales et minoritaires.
J'ai lu votre argumentaire, monsieur le rapporteur ; il ne me paraît pas juste, et je ne le comprends pas.
Aujourd'hui, tout le monde s'accorde à dire qu'on ne fait courir aucun risque à l'identité de notre République en reconnaissant la réalité des langues et cultures régionales, qui constituent une véritable richesse. La volonté politique de reconnaître enfin ces langues régionales et minoritaires existe dorénavant au plus haut niveau de l'Etat, et elle fait l'objet d'un large consensus.
Le Premier ministre a d'ailleurs exprimé la détermination du Gouvernement à signer et à faire ratifier la charte européenne des langues régionales et minoritaires.
Sur le plan juridique, dans l'optique de la ratification de cette charte par la France, de nombreux obstacles ont été levés, notamment à partir des suggestions figurant dans le rapport de M. Guy Carcassonne.
Je rappelle que dix-huit Etats ont déjà signé cette charte.
Dans le droit-fil de ce consensus politique, des avancées intellectuelles tangibles et une volonté partagée de parvenir à la signature de la charte se sont fait jour. L'article 12 constitue l'une des premières traductions concrètes de cette nouvelle volonté politique.
Je souhaite, dès lors, que l'on puisse revenir à la rédaction du texte issue des travaux de l'Assemblée nationale, considérant que l'inscription de la promotion de la langue française et du développement des langues régionales et minoritaires doivent figurer au nombre des principes qui guideront l'action de l'Etat dans le domaine des orientations culturelles.
Nous ne saurions donc suivre la commission spéciale si elle maintient sa volonté de supprimer cet alinéa.
Nous serons très heureux, madame la ministre, de connaître votre position sur ce point.
M. le président. Sur l'article 12, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 44, MM. Larcher, Belot et Revet, au nom de la commission spéciale, proposent de rédiger ainsi l'article 12 :
« I. - L'intitulé de la section 2 du chapitre V du titre Ier de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 précitée est ainsi rédigé : "Du schéma directeur d'équipements et de services culturels".
« II. - L'article 16 de la même loi est ainsi modifié :
« 1° Au début du premier alinéa, les mots : "Le schéma des équipements culturels" sont remplacés par les mots : "Le schéma directeur d'équipements et de services culturels" ;
« 2° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Il identifie des territoires d'intervention prioritaire afin de mieux répartir les moyens publics.
« Il encourage le développement de pôles artistiques et culturels à vocation nationale et internationale.
« 3° Le dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« La conférence régionale d'aménagement et de développement du territoire organise la concertation dans le domaine culturel afin de contribuer au renforcement et à la coordination des politiques culturelles menées par l'Etat et les collectivités territoriales dans la région.
« Les contrats passés entre l'Etat, les collectivités territoriales intéressées et les organismes culturels qui bénéficient de subventions de l'Etat tiennent compte des objectifs assignés à ces organismes par le schéma directeur d'équipements et de services culturels. »
Cet amendement est assorti de cinq sous-amendements.
Le sous-amendement n° 256 rectifié, présenté par Mme Bardou, M. de Cossé-Brissac, Mme Heinis, M. Raffarin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, vise à compléter l'intitulé du texte proposé par le I de l'amendement n° 44 pour la section 2 du chapitre V du titre Ier de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 par les mots : « et sportifs ».
Le sous-amendement n° 257 rectifié, déposé par Mme Bardou, M. de Cossé-Brissac, Mme Heinis, M. Raffarin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, tend à compléter in fine le 1° du II de l'amendement n° 44 par les mots : « et sportifs ».
Le sous-amendement n° 255 rectifié, présenté par Mme Bardou, MM. Jean Boyer, Cleach, Ambroise Dupont, Emin, Emorine, Grillot, Mme Heinis, MM. Nachbar, Pépin, Raffarin, Poirieux et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, a pour objet :
A. - Après le premier alinéa du texte présenté par le 2° du II de l'amendement n° 44 pour compléter l'article 16 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Il veille à permettre le développement de la pratique des disciplines artistiques et culturelles sur l'ensemble du territoire. »
B. - En conséquence, dans le troisième alinéa 2° du II de cet amendement, de remplacer les mots : « deux alinéas » par les mots : « trois alinéas ».
Le sous-amendement n° 258 rectifié, déposé par Mme Bardou, M. de Cossé-Brissac, Mme Heinis, M. Raffarin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, vise, après les mots : « dans le domaine culturel », à rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte présenté par le 3° du II de l'amendement n° 44 pour remplacer le dernier alinéa de l'article 16 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 : « et sportifs afin de contribuer au renforcement et à la coordination des politiques menées par l'Etat et les collectivités territoriales dans la région ».
Le sous-amendement n° 259 rectifié, présenté par Mme Bardou, M. de Cossé-Brissac, Mme Heinis, M. Raffarin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, tend, dans le second alinéa du texte présenté par le 3° du II de l'amendement n° 44 pour remplacer le dernier alinéa de l'article 16 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, après les mots : « organismes culturels », à insérer les mots : « et sportifs ».
Par amendement n° 282 rectifié, M. Le Cam, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la première phrase du troisième alinéa du texte présenté par le 1° du paragraphe II de l'article 12 pour remplacer le premier alinéa de l'article 16 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, après les mots : « à vocation », d'insérer les mots : « locale, régionale ».
Par amendement n° 153, M. Vasselle propose, à la fin du huitième alinéa du paragraphe II de l'article 12, de supprimer les mots : « et minoritaires ».
La parole est à M. Larcher, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 44.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Par cet amendement, la commission propose une nouvelle rédaction de l'article 12.
Globalement, la commission souscrit aux objectifs généraux qui sont définis par cet article, même si, ici ou là, il pourrait y avoir matière à débat. Bien évidemment, nous sommes tous pour la création artistique, pour la diffusion de la culture et pour la reconnaissance de toutes les formes d'expression artistique. A cet égard, nous n'avons aucune interrogation, au point que, tout à l'heure, nous émettrons un avis très favorable sur un amendement relatif au développement des pratiques dans ces domaines. Cela est tout à fait essentiel.
La commission a estimé qu'en définissant les objectifs des schémas de services collectifs culturels comme ceux de toute politique culturelle, on pourrait perdre de vue l'aménagement du territoire, qui est la raison d'être de la présente loi. En effet, la politique culturelle n'est pas, en soi, une politique d'aménagement du territoire.
Quarante ans après la création du ministère de la culture, le déséquilibre entre Paris et la province en témoigne encore. Alors que les territoires situés hors de la région d'Ile-de-France regroupent 81 % de la population française, ils ne bénéficient toujours que d'un peu plus de 40 % du budget global du ministère de la culture.
C'est pourquoi la commission vous suggérera de recentrer les modifications proposées par cet article sur l'objectif d'aménagement du territoire.
L'amendement n° 44 ne retient, en effet, de l'article 12, que les précisions selon lesquelles ces schémas identifient des territoires d'intervention prioritaire et encouragent le développement de pôles artistiques et culturels à vocation nationale et internationale, ainsi que les dispositions relatives à la coordination des politiques culturelles des collectivités territoriales et de l'Etat.
Ces modifications du projet de loi complètent utilement le schéma des équipements culturels, tel qu'il était prévu par la loi Pasqua. Dans cette perspective, mes chers collègues, ce schéma définit des dispositions propres à coordonner l'ensemble des mesures proposées.
Je souhaite revenir sur la question des langues régionales et minoritaires, qui a été soulevée par M. Trémel.
Je ferait tout d'abord remarquer à celui-ci qu'il ferait bien d'interroger le préfet d'un département breton qui vien de déférer au tribunal administratif la décision du conseil régional de Bretagne de contribuer au financement des écoles dites « Diwan ».
M. Pierre-Yvon Trémel. Tout à fait !
M. Gérard Larcher, rapporteur. En ce qui concerne la diffusion des langues régionales - à laquelle nous sommes favorables, car celles-ci représentent un apport à la communauté nationale - il serait bon que le Gouvernement adresse à ses préfets un certain nombre de directives qui éviteraient, par exemple, que le président du conseil régional de Bretagne ne soit déféré au tribunal administratif pour avoir soutenu les écoles qui favorisent le maintien et la diffusion de la langue bretonne.
A ce propos, monsieur Trémel, il serait peut-être utile que vous interrogiez Mme le ministre, afin de savoir comment, concrètement, pourra être assurée au quotidien la diffusion de cette langue. Je crois que je m'inscris pleinement dans l'actualité, si toutefois la lecture de Ouest-France, que je pratique chaque matin, étant Normand d'origine,...
M. Pierre-Yvon Trémel. C'est bien !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... m'a bien renseigné.
Par ailleurs, je ne souhaite pas que l'on nous fasse un quelconque procès d'intention s'agissant des langues régionales, à propos desquelles je m'attendais à être interpellé.
Je rappelle que, aux termes de la Constitution, la langue française est la langue de la République. Cette langue française est aussi un facteur d'intégration et d'unité. Par conséquent, s'il nous faut accueillir les langues minoritaires, il convient aussi parfois d'être prudents et, là, c'est le rapporteur pour avis du budget de la ville qui s'exprime. Nous savons bien, en effet, qu'à vouloir enseigner un certain nombre de langues à la fois, on empêche parfois l'intégration, ne serait-ce que parce que les jeunes, monsieur Lassourd, doivent déjà prendre du temps pour ne pas arriver, lors de la journée d'appel et de préparation à la défense, en ignorant tout de la lecture ou de l'écriture, ce que vous décriviez si bien hier soir.
Je souhaite rappeler que certains textes généraux - rassurez-vous, je ne ferai pas référence à des textes qui remontent à la IIIe République - reprennent des préoccupations concernant la langue française.
Ainsi, une loi du 4 août 1994 a prévu que la langue de l'enseignement est la langue française, sauf exception justifiée par les nécessités de l'enseignement des langues et cultures régionales. Or, si ma mémoire est bonne, la loi du 4 août 1994 avait été présentée par le gouvernement de M. Balladur.
Je pourrais également citer des dispositions adoptées le 11 juillet 1975 ou des mesures prévues dans la loi de 1984, dite « loi Savary », ou encore des dispositions prises en 1989.
Cela signifie que, pour l'ensemble des membres de cette assemblée, naturellement, la langue française est la langue de l'unité de la République. Toutefois - et j'ai équilibré ma démonstration en prenant l'exemple de deux textes émanant d'un gouvernement soutenu par ce côté-ci de l'hémicycle (M. le rapporteur désigne la gauche de l'hémicycle) et de deux textes provenant d'un gouvernement soutenu par ce côté-là (M. le rapporteur désigne la droite de l'hémicycle) - la préoccupation de l'enseignement et de la diffusion des langues régionales est, me semble-t-il, également partagée.
M. Emmanuel Hamel. Non !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Sur ces sujets, il n'y aurait donc pas de faux procès. Je le dis d'autant plus volontiers que je vois notre collègue Emmanuel Hamel s'inquiéter.
Naturellement, je suis attaché à ce que la langue française soit la langue de l'unité de la République et que cela figure dans la Constitution. N'oublions pas que nous avons été un certain nombre à vouloir le mentionner dans notre Constitution et que nous avons eu parfois le sentiment d'être un peu abandonnés lors de l'examen d'un texte préalable à une révision constitutionnelle.
C'est la raison pour laquelle nous pouvons, me semble-t-il, sans nous faire de faux procès, conjuguer cette diversité. Il n'est pas besoin de le préciser dans le présent projet de loi d'orientation. L'ensemble des textes que je vous ai cités vous apportent plus de garantie à cet égard qu'une disposition figurant dans un projet de loi d'orientation.
M. Emmanuel Hamel. Très bien ! La langue maternelle est enseignée à la maison !
M. le président. La parole est à Mme Bardou, pour défendre les sous-amendements n°s 256 rectifié et 257 rectifié.
Mme Janine Bardou. Compte tenu de l'adoption de l'amendement n° 331, je retire ces deux sous-amendements, monsieur le président.
M. le président. Les sous-amendements n°s 256 rectifié et 257 rectifié sont retirés.
La parole est à Mme Bardou, pour défendre le sous-amendement n° 255 rectifié.
Mme Janine Bardou. Dans une perspective d'aménagement du territoire, la politique culturelle n'est pas limitée au seul accès à la culture ; il faut également favoriser sa pratique. Tel est le sens du présent sous-amendement.
En effet, en matière d'aménagement du territoire, l'accès à la culture et le développement de la pratique d'activités artistiques et culturelles forment les deux pôles indissociables d'une politique culturelle équilibrée.
Le rôle de l'Etat est d'encourager la pratique de toutes les disciplines sur l'ensemble du territoire pour tous nos concitoyens.
Des actions menées dans un certain nombre de départements, notamment celui de la Lozère, montrent à quel point une telle politique participe au maintien des activités et de l'habitat dans le monde rural et les espaces qui ont besoin d'être revitalisés. C'est un élément indispensable du maintien de la population.
M. le président. Madame Bardou, les sous-amendements n°s 258 rectifié et 259 rectifié sont-ils également satisfaits par l'adoption de l'amendement n° 331 ?
Mme Janine Bardou. Ils le sont, monsieur le président, et je les retire.
M. le président. Les sous-amendements n°s 258 rectifié et 259 rectifié sont retirés.
La parole est à M. Le Cam, pour défendre l'amendement n° 282 rectifié.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement a pour objet de mieux équilibrer les efforts en matière d'infrastructures et de services culturels en direction des pôles artistiques et culturels, sans pour autant nuire à l'épanouissement du reste du territoire.
Il existe, en effet, une multitude d'initiatives locales qu'il convient de ne pas oublier, il importe même de les encourager et de les soutenir.
Ainsi l'Etat pourrait-il s'associer davantage aux démarches engagées par les communes et les départements pour promouvoir et mieux faire connaître leurs traditions, leurs pratiques culturelles, les atouts de leur patrimoine ou pour accueillir et organiser des spectacles d'autres origines, d'autres cultures, en soutenant les actions menées par les associations locales.
En tout état de cause, l'accès à la culture ne doit pas être réservé à une élite parisienne, alors que le reste de la population habitant dans des zones moins fréquentées n'aurait droit qu'à une culture bas de gamme ou un art au rabais.
C'est pourquoi nous proposons un amendement qui tend à faire en sorte que le schéma des services culturels ne doit pas privilégier, dans ses objectifs, les pôles dont la réputation n'est plus à faire, ni délaisser, par ailleurs, les populations qui n'ont pas un accès direct aux « lumières » de la ville.
Notre pays ne manque pas d'atouts en ce domaine ; encore faut-il qu'il se donne les moyens de les valoriser.
C'est pourquoi nous vous invitons à adopter notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour présenter l'amendement n° 153.
M. Alain Vasselle. J'approuve les dispositions de l'article 12 relatives aux actions à mettre en oeuvre afin d'assurer la promotion et la diffusion de la langue française. C'est le moins que nous puissions faire sur le plan culturel dans le cadre d'une politique d'aménagement du territoire. L'absence de telles mesures aurait suscité, n'en doutons pas, un certain nombre d'interrogations.
J'approuve également l'objectif de sauvegarde et de transmission des langues et cultures régionales. Mais il me semble que nous devons en rester là. Consacrons l'ensemble de notre énergie et de nos moyens à assurer la pérennité de la langue française et le maintien d'un certain nombre de cultures régionales.
S'agissant des langues minoritaires, celles-ci n'ont pas leur place, me semble-t-il, dans le présent texte ; elles n'ont pas de raison d'être. Même si la charte signée par dix-huit pays, à laquelle notre collègue a fait allusion, peut être une référence, ce n'est pas forcément pour nous la priorité des priorités.
Notre priorité, c'est bien la langue française et les langues régionales. C'est la raison pour laquelle la sagesse me donne à penser que la rédaction proposée par M. le rapporteur est la bonne. C'est ce qui m'a conduit à présenter cet amendement n° 153, qui tend à supprimer les mots : « et minoritaires ».
Si l'amendement n° 44 de la commission est adopté, mon amendement n'aura plus d'objet, mais je serai satisfait.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 255 rectifié, ainsi que sur les amendements n°s 282 rectifié et 153 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 255 rectifié. En effet, le principe du développement de la pratique est un apport, car celle-ci concerne les citoyens.
La commission avait émis un avis favorable sur l'amendement n° 282 rectifié, mais je tiens à attirer l'attention de M. Le Cam sur le fait que, s'il ne le transforme pas en sous-amendement, il deviendra sans objet en cas d'adoption de l'amendement n° 44.
Cet amendement n° 282 rectifié tend à compléter le texte, afin de préciser que les pôles artistiques doivent être à vocation non seulement nationale et internationale, mais également locale et régionale.
Monsieur Vasselle, en ce qui concerne l'amendement n° 153, votre préoccupation me paraît être satisfaite. Un débat sur les langues régionales s'est déjà engagé à la suite de l'intervention de l'un de nos collègues. C'est pourquoi, compte tenu de la rédaction proposée par la commission, je souhaite que vous retiriez votre amendement.
M. Alain Vasselle. Je le retire bien volontiers.
M. le président. L'amendement n° 153 est retiré.
Monsieur Le Cam, souhaitez-vous transformer votre amendement en sous-amendement, ainsi que le suggère M. le rapporteur ?
M. Gérard Le Cam. J'adhère à la suggestion de M. le rapporteur et je transforme donc mon amendement en un sous-amendement.
M. le président. Je suis donc saisi, par M. Le Cam, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d'un sous-amendement n° 282 rectifié bis tendant, dans le troisième alinéa du 2° du paragraphe II de l'amendement n° 44, après les mots : « à vocation », à insérer les mots : « locale, régionale ».
Quel est donc l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 44, ainsi que sur les sous-amendements n°s 255 rectifié et 282 rectifié bis ?
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je me réjouis de l'intérêt du Sénat pour ce schéma de services en matière culturelle. En effet, le texte initial de la loi du 4 février 1995 était relativement succinct : il résultait d'un amendement de séance qui avait défini grossièrement ce schéma, sans préciser vraiment son champ d'application.
La nouvelle rédaction proposée par la commission me paraît néanmoins en retrait sur deux points eu égard au texte qui est issu des travaux de l'Assemblée nationale.
D'abord, j'ai noté la suppression de l'alinéa relatif aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, au motif de sa trop faible portée juridique. Mais je constate que la commission n'a pas jugé bon de retirer l'alinéa rédigé de manière à peu près semblable dans le schéma des services d'enseignement supérieur et de recherche. L'enjeu à court, moyen et long termes est tout aussi important, quelle qu'en soit la portée prescriptive. Réaffirmer la place que prennent désormais ces nouvelles technologies dans une stratégie, que ce soit en matière d'enseignement supérieur ou de diffusion culturelle, n'aurait pas été inutile.
Surtout, et ce sera peut-être l'essentiel, j'ai noté les suppressions des alinéas concernant les objectifs de diffusion pour les organismes culturels subventionnés et la promotion du patrimoine culturel et linguistique français dans sa grande diversité. Je regrette ces suppressions. Il me semble que le premier thème, notamment, la diffusion sur l'ensemble du territoire national, assurée en particulier par les organismes culturels qui bénéficient de subventions publiques, était un des moyens par lesquels nous pouvions répondre aux préoccupations de M. Le Cam.
En effet, j'ai bien noté que, malgré les efforts qui ont été menés depuis plusieurs années en faveur des régions - aujourd'hui, environ 56 % des équipements sont localisés en province - le rééquilibrage, qui va se poursuivre, reste tout à fait insuffisant puisqu'il se fait, pour l'essentiel, entre l'Ile-de-France et les grandes capitales régionales, avec un impact relativement faible sur les villes moyennes. Cependant, je ne crois pas qu'il soit possible d'implanter des équipements d'importance nationale dans la plupart des villes moyennes. En revanche, on peut avoir des spectacles et des pratiques culturelles liés aux efforts de diffusion en provenance des grandes scènes ou des théâtres subventionnés ; à l'heure actuelle, le nombre de ces opérations est peut-être encore insuffisant.
Je regrette aussi la suppression de l'alinéa qui concernait la défense de la langue. En l'occurrence, il n'est pas question d'affaiblir le français. D'ailleurs, l'alinéa réaffirmait la place de la langue nationale dans une stratégie de cohésion nationale et d'aménagement équilibré du territoire.
Il me paraissait évident que la reconnaissance des langues faisait partie d'une stratégie de reconnaissance des dimensions territoriales, qui sont fortes, et que cela justifiait ainsi leur inscription dans des schémas qui sont non seulement des schémas d'équipement, vous l'aurez noté, mais aussi des schémas permettant de reconnaître les formations, les services, les efforts de diffusion et les efforts d'usage des langues régionales.
M. Pierre-Yvon Trémel. Très bien !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. On pourrait discuter abondamment des langues minoritaires. En effet, il s'agit de langues qui sont pratiquées par des minorités nationales qui n'ont pas comme langue maternelle le français mais qui l'ont appris en fréquentant l'école de la République. Il s'agit de langues qui ont des statuts extrêmement variés, qui, pour certaines d'entre elles, sont parlées depuis fort longtemps sur le territoire national, je pense, par exemple, au yiddish ou aux langues parlées par les communautés tziganes, notamment le rom. il est évident que tous ces points devraient être précisés au moment de la ratification par la France de la Charte des langues et cultures régionales et minoritaires. Cela fera l'objet d'un débat devant les assemblées parlementaires, puisque M. le Premier ministre a annoncé cet événement.
Vous l'aurez compris, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, dans la mesure où il est très attaché à sa rédaction initiale, notamment en raison de la suppression des alinéas concernant les nouvelles technologies de l'information et la diffusion culturelle.
Je partage le souhait de M. Le Cam d'une diffusion plus approfondie sur le territoire. Si la formulation qu'il a présentée peut y aider, je n'y vois pas d'inconvénient. J'émets donc un avis favorable sur le sous-amendement n° 282 rectifié bis.
Enfin, le Gouvernement émet un avis favorable sur le sous-amendement n° 255 rectifié.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Nous avons parlé de technologies. Je rappelle que, dans le schéma directeur, la technologie est un moyen, et non une fin ou un objectif. Nous y reviendrons lors de l'examen de l'article 15. Je ne doute pas que Mme le ministre sera alors très attentive au fait que l'ensemble du territoire, à un terme pas trop éloigné, soit couvert par l'ensemble de ces technologies, pour que, comme moyen, la diffusion et les pratiques culturelles soient généralisées sur le territoire, sans discrimination.
Par ailleurs, s'agissant de la diffusion, il me paraît bon de donner la lecture de l'alinéa tel qu'il résulterait de l'adoption de notre amendement n° 44 : « Les contrats passés entre l'Etat, les collectivités territoriales intéressées et les organismes culturels qui bénéficient de subventions de l'Etat tiennent compte des objectifs assignés à ces organismes par le schéma directeur d'équipements et de services culturels. », notamment la diffusion. Les préoccupations que nous partageons sont donc prises en compte.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 255 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 282 rectifié bis, accepté par la commission et par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'article 12 est donc ainsi rédigé.

Article 13

M. le président. L'article 13 a été supprimé par l'Assemblée nationale.

Article 14