Séance du 2 juin 1998







M. le président. La parole est à M. Gérard, auteur de la question n° 261, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Alain Gérard. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur le débat qui anime aujourd'hui le monde de la mer, et plus particulièrement sur les questions liées à l'enseignement maritime.
Je rappelle à M. le ministre qu'au moment où le pays tout entier réfléchit à la mise en place d'une politique d'aménagement du territoire équilibrée, où la concurrence internationale dans le secteur maritime ne cesse de se préciser, il est impératif d'élaborer une politique maritime ambitieuse pour notre pays.
Dans ce contexte, nul ne peut en effet rester indifférent au cri d'alarme lancé par les professionnels de la mer, qui s'inquiètent du désintérêt grandissant des jeunes pour ces professions. Depuis quelques années, en effet, l'image du métier de pêcheur s'est ternie. Je préconise d'en rechercher les causes, si l'on ne veut pas voir disparaître de notre économie un savoir-faire que nous envient nos voisins.
Concernant l'enseignement maritime proprement dit, M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement s'étant récemment exprimé sur le passage des écoles maritimes sous statut de la fonction publique, je lui demande quel sens il entend donner à ce rattachement et si de telles orientations annoncent une dépendance à un autre ministère.
Par conséquent, je lui demande s'il est en mesure d'apporter des réponses aux inquiétudes des professionnels de la mer et de préciser ses intentions concernant l'avenir de l'enseignement maritime.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement, qui, retenu ce matin par une réunion du comité de sécurité intérieure, m'a chargé de vous transmettre la réponse suivante.
La vocation maritime de la France étant toujours aussi forte, il est tout à fait normal - je dirai même excellent - qu'il y ait dans notre pays un vivier très important de jeunes attirés par les métiers de la mer.
Pour répondre à cette légitime aspiration autant qu'aux nécessités du développement économique, il est nécessaire de leur offrir un système de formation performant, répondant aux besoins et leur permettant de trouver un emploi dans le monde maritime.
La politique maritime de la France doit tenir compte de deux impératifs.
Il s'agit, tout d'abord, de respecter les conventions internationales adoptées sous l'égide de l'Organisation maritime internationale, qui définissent les normes de formation, garantissent la sécurité des personnes et des biens et la sauvegarde de l'environnement.
Il s'agit, aussi et bien évidemment, de satisfaire dans les meilleurs conditions les besoins économiques et ceux de la profession.
L'aptitude du marin français à naviguer à l'étranger et, réciproquement, du marin étranger à naviguer en France, tant à la pêche qu'au commerce, impose de respecter ces normes internationales, qui constituent le bien commun du monde maritime.
Le monde de la mer est unique et il a pour acteur principal un homme : le marin.
Le souhait du marin est de naviguer tantôt au commerce, tantôt à la pêche. C'est pourquoi les services des affaires maritimes, qui font partie intégrante du ministère de l'équipement, des transports et du logement, oeuvrent pour réformer les cursus de l'enseignement maritime secondaire et supérieur et pour l'adapter aux exigences d'aujourd'hui.
Nos écoles ont accueilli des jeunes de plus en plus nombreux. Dans les écoles maritimes et aquacoles, les EMA, ils sont passés de 1 200 en 1994 à 2 100 en 1998. Dans les écoles nationales de la marine marchande, les ENMM, la progression annuelle a été de 20 % depuis deux ans et sera de 25 % à la prochaine rentrée.
Le service public de l'enseignement maritime comporte aujourd'hui des personnels sous statut privé qui ont exprimé le désir d'obtenir un statut public.
Lors du dernier comité interministériel de la mer qui s'est tenu le 1er avril dernier, le Gouvernement a décidé d'intégrer l'enseignement maritime et aquacole dans l'enseignement public afin d'améliorer encore le fonctionnement de l'enseignement maritime et aquacole.
Le Premier ministre a confirmé le ministre de l'équipement comme interlocuteur unique pour la conduite des discussions interministérielles sur l'élaboration des statuts de rattachement de ces personnels.
Avec les autres ministères directement concernés, celui de l'agriculture et de la pêche et celui de l'éducation nationale, il pilote une mission destinée à définir les conditions précises et les modalités de l'intégration ainsi que la définition du ministère de rattachement.
Des propositions seront formulées à ce sujet dans les prochaines semaines. Nous les tiendrons à votre disposition.
M. Alain Gérard. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Gérard.
M. Alain Gérard. Ainsi que je l'avais indiqué lors de l'examen du projet de loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines, les professionnels de la mer sont inquiets et confrontés à de nouvelles difficultés, notamment celle d'assurer l'avenir de leur profession. En effet, les armements à la pêche artisanale et semi-industrielle recrutent mais, paradoxalement, ils ne trouvent pas de personnels qualifiés en nombre suffisant.
Aujourd'hui, chacun garde en mémoire le douloureux souvenir des graves incidents survenus à Rennes, en février 1994, jour sombre de notre histoire où fut lancé un véritable appel au secours par l'ensemble d'une profession.
Depuis ces années noires, l'image du métier de pêcheur n'a cessé de se ternir. Les professionnels de la mer quant à eux ne peuvent que constater le désintérêt grandissant des jeunes pour ces professions.
Pourtant, ce métier offre à nouveau de bons salaires et des perspectives d'emplois. Je pose donc la question : pourquoi cette désaffection ?
N'est-il pas de notre devoir d'en rechercher les causes et urgent de mettre en place une politique maritime ambitieuse pour notre pays, car nous refusons que décline une activité économique indispensable à l'équilibre de notre littoral, une activité traditionnelle qui fait partie intégrante de notre patrimoine culturel ?
J'ajoute que le système actuel de formation professionnelle de l'enseignement maritime, en cultivant sa spécifité, me semble mal adapté à la réalité. Il faudrait que les jeunes ayant reçu une formation technique ou paramaritime puissent bénéficier de passerelles vers l'extérieur.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous m'avez donné un certain nombre d'éléments de réponse, je vous en remercie et j'espère qu'ils seront de nature à apaiser les inquiétudes de la profession.

AVENIR DE LA POLITIQUE DES « PAYS »