La parole est à M. Goulet.
M. Daniel Goulet. Monsieur le ministre, depuis le 16 juillet dernier, à maintes reprises, nous vous avons interpellé sur les problèmes dramatiques que poserait la remise en cause - j'utilise l'expression « remise en cause » à dessein - de l'autoroute A 28.
Toutes nos interventions sont restées, jusqu'à ce jour, sans réponse !
Il s'agit, vous le savez, des menaces qui pèsent encore, malgré les assurances que vous nous avez données ce soir, sur la réalisation du dernier tronçon Rouen-Alençon de l'axe Calais-Bayonne, qui resterait alors le « trou normand » du grand axe structurant autoroutier reliant les pays du Nord de l'Europe et la péninsule Ibérique, irriguant, par le fait même, toutes les régions du grand Ouest français.
M. Alain Lambert. Absolument !
M. Daniel Goulet. Pour les huit régions et les douze départements concernés, cette interruption du projet impliquerait la remise en cause brutale de tous les projets locaux et régionaux de développement qui en dépendent, car initiés par les collectivités territoriales.
M. Alain Lambert. Ce serait inacceptable !
M. Daniel Goulet. Ce serait la remise en cause du désenclavement tant attendu par les régions de Haute-Normandie, de Basse-Normandie, des Pays-de-Loire et du Centre.
M. Alain Lambert. C'est invraisemblable !
M. Daniel Goulet. Bref, sur le plan économique et social, vous devez bien imaginer que ce serait purement et simplement un désastre ! Je ne pense pas que l'on puisse s'en réjouir, monsieur le ministre !
Les raisons évoquées de ce mauvais « coup d'arrêt » porté à la réalisation de cette autoroute sont incohérentes et inexplicables, d'autant plus que les acquisitions de terrains sont en cours, que les premiers travaux d'approche sont commencés, que les travaux sur les tronçons Tours-Le Mans-Alençon ont débuté et avancent à un bon rythme.
Au nord de Rouen et jusqu'à la frontière belge, les différents maillons de l'axe sont pratiquement réalisés.
Nous entrons donc dans une phase nouvelle où le gâchis économique et politique...
M. Alain Lambert. C'est le mot !
M. Daniel Goulet. ... est programmé, l'emportant, en quelque sorte, sur les incohérences. C'est totalement inexplicable !
M. Alain Lambert. Et mon collègue est modéré, monsieur le ministre !
M. Daniel Goulet. Le concessionnaire, la société autoroutière Paris-Normandie - puisque c'est elle qui est en cause - est l'opérateur désigné... par l'Etat.
On annonce aujourd'hui que ce mandataire de l'Etat ne présenterait plus une surface financière suffisante pour mener à bien la mission qui lui a été confiée !
C'est aujourd'hui seulement que l'on découvre cette situation !
Que la société présente des difficultés, c'est vraisemblable, mais ce fait n'est ni du ressort ni de la responsabilité des élus locaux ou des représentants du monde professionnel et syndical, ni - encore moins ! - des populations concernées, au sein desquelles on sent bien monter le désarroi et la révolte.
C'est une affaire d'Etat, qui dépend, par conséquent, de sa propre et de la seule responsabilité juridique et financière de celui-ci.
Je n'ai pas dit de la responsabilité de tel ou tel gouvernement : ce serait trop facile pour le Gouvernement actuel de se défausser sur le précédent.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Et inversement !
M. Daniel Goulet. Un Etat responsable est celui qui assume la continuité de ses actes, les réussites comme les déconvenues ou les désagréments que l'on porte ordinairement au bilan de l'héritage.
C'est ainsi que, en ce qui concerne la réalisation intégrale de l'axe Calais-Bayonne, et donc de l'A 28, inscrite au schéma directeur national routier et autoroutier arrêté en mars 1987, toutes les procédures administratives, techniques et juridiques ont été confirmées chaque fois que nécessaire par les gouvernements qui se sont succédé.
Par conséquent, aujourd'hui, ce qui est en cause, c'est simplement, mais formellement, la parole de l'Etat, le respect des règles juridiques et des engagements pris.
C'est donc de cette parole - de la vôtre, de celle du ministre des finances, du Premier ministre, du Gouvernement - de ces engagements que nous attendons la confirmation.
Les problèmes financiers, les seuls qui agitent les cabinets ministériels, ont pratiquement les mêmes origines bien que de nature différente, que ceux du Crédit Lyonnais, d'Air France, du GAN ou de la SNCF, dossiers que vous connaissez parfaitement.
Nous savons que la dette de ce grand service public atteindra en l'an 2000 près de 400 milliards de francs. C'est simplement un rappel, pour fixer un ordre de grandeur au regard du dossier de l'A 28 que je viens d'évoquer.
Pour la SNCF, vous avez vous-même initié les montages particuliers de désendettement, bien que, sur les formules envisagées, vous ne soyez pas nécessairement en phase avec votre collègue de Bercy.
Je faisais cette allusion pour montrer que les problèmes financiers sur des sujets aussi importants ne sont pas insurmontables et que des solutions existent.
Je ne parlerai pas de la Société de l'autouroute Paris-Normandie, la SAPN, ni de la Société des autoroutes du nord et de l'est de la France, la SANEF, encore moins des solutions qui pourraient être envisagées. Mon ami M. Alain Lambert, dont on connaît la compétence sur le sujet, a très bien analysé la situation, et nous pouvons regretter que vous n'ayez pas donné de suite à ses propositions dans votre réponse à la tribune de notre assemblée.
Sans aucun doute des solutions existent pour régler le problème des financements. Elles ne dépendent en définitive que de la volonté politique du Gouvernement.
Les tergiversations qui excitent actuellement les experts comptables et financiers français n'auront eu en réalité pour résultat que de conduire, au 1er janvier 1998, les experts de Bruxelles à prendre le relais de nouvelles procédures selon un système résultant d'une directive européenne pour initier de nouveaux appels d'offres.
On sait que, dans ces conditions, un retard supplémentaire de plusieurs années, et sur lequel nous n'aurons aucune prise, serait inévitable.
Je regrette que vous n'ayez pas mis vos actes en conformité avec vos intentions.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Goulet.
M. Daniel Goulet. Vous avez dit, monsieur le ministre : « il faut voir auprès des experts », et vous ajoutiez : « en concertation avec les élus ».
Monsieur le ministre, 10 000 élus ont signé une pétition, des conseillers généraux, des conseillers régionaux, ainsi que soixante et un parlementaires, parmi lesquels le président de l'Assemblée nationale lui-même et plusieurs anciens ministres. Ils iront, dans les jours prochains, porter à Matignon une motion que nous avons initiée lors de notre dernière assemblée générale en faveur de l'axe Calais-Bayonne.
Quoi qu'il en soit, je suis pleinement satisfait qu'une commission d'enquête parlementaire portant sur la politique nationale des infrastructures routières et autoroutières puisse donner un éclairage objectif et des possibilités de contrôle sur les implications des choix et les pratiques financières.
Ainsi, monsieur le ministre, le législateur prendra ses responsabilités. Il reste que l'exécutif et vous, qui êtes plus particulièrement chargé des transports et de la politique des infrastructures autoroutières, puissiez en toute connaissance de cause, prendre les vôtres. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendant et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur Goulet, premièrement, je vous l'ai dit à la tribune : il n'y a pas de remise en cause.
M. Alain Lambert. Il n'y aura donc pas de retard ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Vous ne voulez pas m'entendre : quoi qu'il en soit, il n'y a pas de remise en cause.
Deuxièmement, à mon arrivée au ministère, j'ai constaté que la SAPN n'avait pas la capacité financière de réaliser ce projet.
M. Alain Lambert. Pourquoi ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Messieurs les sénateurs, d'un côté, vous dites qu'il ne faut pas laisser se créer des gouffres financiers et, de l'autre, quand je vous dis que je ne veux pas aggraver une situation financière, vous en êtes étonnés.
Je le redis : il n'y a pas de remise en cause du projet. Mais celui-ci ne peut pas être réalisé dans les conditions qui étaient prévues. Les élus eux-mêmes ne m'avaient d'ailleurs pas signalé les difficultés financières de la société d'autoroute en question !
M. Alain Lambert. C'est comme pour le GAN !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Troisièmement, dans la mesure où il n'y a pas de remise en cause du projet et où sa réalisation n'est pas possible dans les conditions qui s'imposeront aux concessions à partir de l'année 1998, il y aura la possibilité de lancer un appel d'offres pour la concession de cette partie de l'autoroute A 28, entre Rouen et Alençon. Si c'est réalisable, ce sera fait.
M. Daniel Goulet. Si l'on remet les compteurs à zéro, on en reprend pour trois ans !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Non, pas obligatoirement ! Il n'y a aucune obligation de retarder !
M. Alain Lambert. Dites-nous qu'il n'y aura pas de retard, ce sera plus simple, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. Le Grand.
M. Jean-François Le Grand. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, M. Jacques Oudin aurait souhaité s'exprimer lui-même, mais il a été obligé de s'absenter.
Depuis près de dix ans, la SNCF a aggravé ses déficits commerciaux et a accentué par là même, dans des proportions inquiétantes, son endettement qui, sans la réforme du 13 février 1997, aurait vraisemblablement atteint, en l'an 2000, près de 400 milliards de francs.
Désormais, le nouvel établissement public a la responsabilité des infrastructures, pour un montant de 134,2 milliards de francs, qui sont autant de désendettement pour la SNCF.
Les comptes de la SNCF pour 1997, allégés des charges financières et des amortissements liés aux actifs, ont été assainis pour atteindre aujourd'hui un déficit de 2 milliards de francs, contre 15,2 milliards de francs en 1996.
La réforme a donc donné à la SNCF tous les moyens d'entreprendre un redressement durable.
Cependant, monsieur le ministre, malgré cette importante réforme, de nombreuses incertitudes subsistent.
Je voudrais, pour ma part, en retenir deux.
En premier lieu, qu'en est-il de la traduction budgétaire du désendettement supplémentaire de 20 milliards de francs annoncé par le Gouvernement ?
Ce désendettement supplémentaire de la SNCF que vous avez annoncé pour consolider la réforme doit être réalisé par transfert au service annexe d'amortissement de la dette de la SNCF, instauré en 1991, dont la charge est assumée par l'Etat.
Pour vous, monsieur le ministre, le montant du service de la dette de l'entreprise se réduira ainsi d'environ 1,3 milliard de francs par an, l'Etat assumant la charge de la dette. Vous avez annoncé au Sénat que, sur ce 1,3 milliard de francs de réduction, 300 millions de francs seraient consacrés à la conquête du trafic par une amélioration de l'offre et de la qualité du service aux voyageurs et aux clients de fret. Les crédits restants seraient consacrés à l'acquisition de matériels nouveaux et à l'entretien.
Or l'article 10 du chapitre 45-43 du budget transports terrestres intitulé « contribution aux charges d'infrastructures ferroviaires et au désendettement », est doté de 16,262 milliards de francs qui se répartissent en 12 milliards de francs pour le Réseau ferré de France et 4 milliards de francs pour le service annexe d'amortissement de la dette.
Pour votre collègue de l'économie et des finances, ne figurent à ce chapitre pour 1998 ni le montant du désendettement, ni la réduction du service de la dette de l'entreprise. Seul engagement pris par Bercy : allonger la durée dans le temps de la prise en charge du service d'amortissement de la dette de la SNCF par l'Etat. Cela n'engage à rien, puisque aucune date butoir n'avait jamais été fixée pour cette prise en charge.
Au bout du compte, le désendettement supplémentaire annoncé de 20 millilards de francs est purement optique et il ne s'agit que d'un effet d'annonce.
En second lieu, monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des assurances quant à la poursuite du redressement du déficit financier de la SNCF, qui semble compromis ?
La SNCF a en effet procédé à 1 000 recrutements supplémentaires de personnel en statut et de 1 000 recrutements en emplois-jeunes, dont on ne sait s'ils seront mis sous statut dans cinq ans et dont le coût s'élève à 250 millions de francs, bien que l'Etat y participe à hauteur de 80 %.
Il faut également ajouter des entrées, qui restent à quantifier, en formation qualifiante, en contrats d'insertions type contrat emploi-solidarité et en contrat emploi-ville.
Cela représente, pour 1997, 8 000 embauches.
Bien entendu, l'embauche est toujours satisfaisante, mais compte tenu de l'endettement encore important de l'entreprise, et au vu de déficit commercial persistant, est-il raisonnable, monsieur le ministre, qu'une entreprise publique continue d'embaucher dans ces proportions, alors même que son avenir reste incertain ou n'est pas assuré ?
Enfin, monsieur le ministre, et pour conclure, le recentrage de l'activité de la SNCF, tel que défini par la loi de février dernier, passe par une diminution sensible du nombre de ses filiales dont certaines exercent une activité fort éloignée de l'exploitation ferroviaire. Pouvez-vous nous apporter des précisions à ce sujet ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, concernant plus particulièrement l'emploi, en dix ans, ce sont environ 75 000 emplois qui ont été supprimés à la SNCF. L'argument avancé était que seules ces suppressions permettraient de rétablir l'équilibre financier. Les emplois ont donc été supprimés ; mais l'équilibre financier n'a pas été rétabli pour autant puisque, l'an dernier, le déficit s'est élevé à 2 milliards de francs, comme vous l'avez souligné.
Selon vous, la réduction de 20 milliards de francs de la dette de la SNCF dans les conditions qui ont été évoquées serait un effet d'annonce ! Vos propos sont contradictoires, puisque, en même temps, vous dites qu'il y a création de 1 000 emplois à statut. Un effet d'annonce qui se traduit par de l'embauche, c'est un peu paradoxal !
Par ailleurs, monsieur Le Grand, vous avez parlé d'un déficit de 2 milliards de francs pour la SNCF l'an prochain. Comme je l'ai déjà dit et écrit, je considère que les entreprises publiques n'ont pas vocation, la SNCF pas plus qu'une autre, à être déficitaires.
Bien sûr, il faut dédommager l'entreprise publique pour les missions de service public qu'on lui confie. Mais, à partir de là, à celle-ci d'engager la bataille pour développer son activité et améliorer la qualité de ses services et équilibrer son budget.
C'est le sens de ma démarche et je souhaite pouvoir vous confirmer - nous aurons l'occasion d'en reparler - que le déficit actuel de la SNCF ne correspond plus à celui que vous mentionnez du fait, justement, de la réduction de la dette et que les 2 milliards de francs se réduiront, je l'espère, à 1 milliard de francs.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, on a beaucoup parlé des transports collectifs au cours de la discussion de ce budget, et même bien avant. En effet, il y a eu la fameuse journée avec son pic de pollution, qui a rendu encore plus évidente la nécessité de développer les transports collectifs.
La pollution et le bruit qu'entraîne la circulation sont intolérables. Cette circulation ne cesse de s'accroître. Des camions - qui, de plus en plus, sont des 40 tonnes venant de toute l'Europe - sillonnent nos routes et nos autoroutes.
Tout le monde ou presque convient que l'on ne peut laisser se développer anarchiquement cette circulation qui rend malade nos villes, aussi bien en région parisienne qu'en province.
Il faut développer le multimodal et, dans le Val-de-Marne, à Valenton, nous avons tenté une expérience qui est exemplaire.
Le train et le camion ont chacun leur place, comme vous l'avez dit, à juste titre, monsieur le ministre, et ils sont irremplaçables, cela n'empêche pas d'accélérer la recherche en matière de véhicules moins polluants.
J'ai donc beaucoup apprécié que M. Descours ait organisé la cinquième rencontre parlementaire sur les problèmes de la pollution. J'espère d'ailleurs qu'il va voter les crédits qui nous sont proposés. Sinon, je ne comprendrai pas.
Le problème de la pollution doit faire l'objet d'un débat sur les différentes énergies. Le professeur Charpak, dans un article publié dans Le Monde daté d'aujourd'hui, a apporté une contribution importante qui peut alimenter un débat national sur les énergies. Il évoque en particulier l'utilisation du gaz naturel pour alimenter les véhicules automobiles.
Cette expérimentation est d'ailleurs déjà en cours. En outre, une commission sur les problèmes de l'énergie commence à travailler sur ce thème.
Monsieur le ministre, ne pourrait-on pas organiser au Sénat un débat sur ce problème très précis, qui pourrait lancer un débat national ?
Habitante de Choisy-le-Roi, dans un département très urbanisé, le Val-de-Marne, je voudrais témoigner ici du fait que l'effort que vous avez entrepris pour le développement du transport collectif est suivi de très près par les riverains, les habitants de cette ville et du département qui n'en peuvent plus du bruit et de la pollution.
Dans certains quartiers, en particulier celui de l'avenue Villeneuve-Saint-Georges, à Choisy-le-Roi - je vous ai d'ailleurs saisi du problème et je suis persuadée que vous nous aiderez à le résoudre - du fait de l'aménagement anarchique d'entrepôts, on assiste à une noria de camions.
Je veux souligner, comme M. Lefebvre le fera dans son intervention, la contradiction que je ressens entre les réalisations que vous demandez, messieurs les sénateurs, et les diminution des crédits que vous allez voter.
Il faut quand même que vous sachiez que vous allez demander une diminution des crédits de fonctionnement de la SNCF et de la RATP ! Quand nous nous retrouverons sur le terrain, nous en reparlerons.
Pas plus tard qu'hier soir, j'étais avec un élu local du RPR, pour ne rien vous cacher (Exclamations amusées sur les travées du RPR), et nous discutions des emplois-jeunes, en présence de jeunes que nous avions invités. Cet élu local a reproché au maire communiste de Choisy-le-Roi de ne pas agir assez vite pour les emplois-jeunes. Je lui ai fait observer que les représentants de son parti au Sénat avaient voté une diminution des crédits destinés à ces emplois-jeunes !
Il va en être de même pour ce budget. Sur le terrain, vous réclamez des réalisations, mais vous vous apprêtez une nouvelle fois à voter ici des réductions de crédits !
Je crois très sincèrement que ce n'est pas une attitude très responsable. Je comprends bien qu'on ait des choses à dire lorsqu'on n'est pas dans la majorité gouvernementale. Nous sommes là pour les entendre et pour vous écouter. Mais encore faut-il que les actes aient une certaine logique ! Il en va de l'image du Sénat et du Parlement tout entier ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Par amendement n° II-62, M. Cazalet, au nom de la commission des finances, propose de réduire les crédits du titre IV de 631 816 825 francs.
La parole est à M. Cazalet, rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet de réduire les crédits d'intervention des transports terrestres de 1,44 %, comme la commission des finances l'a proposé sur l'ensemble des budgets non régaliens qui n'étaient pas en diminution.
Cette diminution, au demeurant très faible, pourrait être largement compensée par un programme de privatisation plus ambitieux, qui permettrait d'affecter les dotations en capital dont la SNCF, la RATP et RFF ont besoin à hauteur de plusieurs milliards de francs.
J'ajoute qu'en se recentrant sur ses missions régaliennes, notamment la sécurité dans les transports, l'Etat aurait probablement moins de déficits à combler dans les entreprises.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Comme je l'ai dit tout à l'heure, la suppression de 600 millions de francs sur le projet de budget des transports terrestres aboutirait à réduire de moitié l'effet du désendettement de la SNCF auquel l'Etat s'est engagé pour redresser la situation financière de cette entreprise. Elle contribuerait également à réduire de 4 millions de francs les crédits de la sécurité routière.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-62.
M. Pierre Lefebvre. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Ce ne sont pas moins de 631 millions de francs de dépenses nouvelles qui sont inscrites en réduction dans cet amendement n° II-62 s'agissant des dépenses du titre IV du budget des transports terrestres.
Vous me permettrez donc, mes chers collègues, d'accorder un peu d'attention à la situation que créerait cet amendement.
On ne peut en effet se contenter de la simple application mécanique d'une variable mathématique, comme vous nous avez proposé de le faire tout au long de cette discussion budgétaire, sans mesurer les effets de ce type de proposition.
Que comprennent les dépenses du titre IV des transports terrestres pour mériter d'être ainsi réduites ?
Lors de la discussion de la loi portant création de l'établissement public Réseau ferré de France, avant les événements politiques majeurs du printemps dernier, une longue controverse s'était déroulée au Sénat, saisi du projet de loi en première lecture, sur la question du développement des liaisons de transport ferroviaire régional, controverse à laquelle notre groupe avait pris une part toute particulière.
Mme Hélène Luc. C'est vrai !
M. Pierre Lefebvre. Or, à la lecture du bleu budgétaire des transports terrestres, on observe que la dotation de l'Etat au financement des transports terrestres est accrue en 1998 d'un peu plus de 55 millions de francs, qu'il conviendrait donc d'annuler à l'occasion de ce projet de loi de finances si, d'aventure, cet amendement n° II-62 était adopté.
Les contribuables et les usagers des régions qui expérimentent la régionalisation apprécieront certainement !
On peut aussi envisager de réduire la progression des crédits versés à la RATP et à la SNCF au titre de l'indemnité compensatrice.
La hausse des lignes budgétaires à ce titre atteint, dans le projet de budget, 270 millions de francs qu'il faut supprimer.
J'observe d'ailleurs que la réduction de crédits proposée dans l'amendement n° II-62, qui s'élève à 632 millions de francs environ, est supérieure au montant des mesures nouvelles du titre, qui est d'un peu plus de 490 millions de francs.
Très concrètement, cela offre donc comme opportunité, soit de ne pas réaliser les investissements nécessaires au développement des transports collectifs ferroviaires ou urbains, soit de majorer le prix des billets de transport des usagers, soit de mettre à contribution les budgets des collectivités locales pour équilibrer les comptes, soit encore in fine d'augmenter les impôts perçus par les collectivités locales pour tendre à cet objectif d'équilibre.
Toutes ces solutions, pour le moins discutables, démontrent à notre sens l'inanité de cet amendement n° II-62 - excusez-moi du terme, mais il me semble tout à fait approprié - et sa parfaite inapplicabilité.
Dans l'absolu, on pourrait aussi décider de supprimer des dessertes ou des trains, ce qui n'est pas, c'est le moins que l'on puisse dire, très cohérent avec le souci, assez largement partagé, de développer les transports collectifs.
Nous rejetterons donc sans la moindre hésitation cet amendement n° II-62, qui illustre une fois de plus le caractère purement idéologique des amendements de la commission des finances.
M. Marc Massion. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. Nous allons voter contre cet amendement, comme d'ailleurs contre tous ceux qui sont proposés par la commission des finances, car ils obéissent à la même logique.
En l'occurrence, cet amendement tend notamment à supprimer la contribution de l'Etat aux services régionaux de voyageurs, la contribution de l'Etat en matière sociale, la contribution aux charges d'infrastructures ferroviaires et au désendettement de la SNCF.
Je voudrais faire part à la Haute Assemblée d'une observation que j'ai faite dans ma région ; je trouve que les sénateurs qui votent ici ces annulations de crédits se montrent fort discrets à ce sujet une fois revenus dans leur département !
Mme Hélène Luc. C'est le moins que l'on puisse dire ! (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Marc Massion. Cela signifie que la démarche qui est suivie depuis le début de ce débat et qui consiste à réduire systématiquement les crédits d'un certain nombre de chapitres est, à l'évidence, une démarche irresponsable et politicienne ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. Alain Lambert. Pourquoi n'avez-vous rien dit, au mois de juillet, contre l'annulation de crédits ?
M. le président. Vous admettrez tout de même, monsieur Massion, que chacun d'entre nous a la libre disposition des propos qu'il peut tenir ou non dans son département ! (M. Jacques Machet applaudit.)
M. Alain Lambert. Merci, monsieur le président !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-62, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 46:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 311
Majorité absolue des suffrages 156
Pour l'adoption 214
Contre 97

Mme Hélène Luc. C'est dommage !
M. le président. Par amendement n° II-64, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose de réduire les crédits du titre IV de 1 581 159 francs.
La parole est à M. Cazalet, rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet de réduire les crédits du chapitre unique 44-42 du titre IV portant sur les subventions intéressant la gestion de la voirie nationale. Cette légère réduction ne devrait pas léser les organismes qui perçoivent ces subventions.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n ° II-64, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisation de programme : 7 311 176 000 francs ;