M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant l'économie, les finances et l'industrie : I. - Industrie (et Poste).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. François Trucy, en remplacement de M. Bernard Barbier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous aurons tous une pensée amicale pour notre collègue Bernard Barbier, momentanément empêché, et que je m'efforcerai de remplacer le mieux possible.
Le budget de l'industrie, de la poste et des télécommunications est l'un des budgets qui augmentent le plus dans le projet de loi de finances pour 1998. En effet, avec 16,37 milliards de francs, il progresse de 3,38 % par rapport au budget voté pour 1997 à structure constante.
Trois remarques s'imposent d'emblée.
En premier lieu, il convient de remarquer que le périmètre budgétaire du fascicule « Industrie » est modifié pour la troisième fois en cinq ans, puisqu'il inclut cette année les crédits consacrés à La Poste et aux télécommunications.
Inversement, plusieurs chapitres budgétaires sont rattachés au budget de la recherche : il s'agit des crédits relatifs à l'espace, pour un montant de 8,6 milliards de francs, et des crédits du Bureau de recherches géologiques et minières, le BRGM, pour un montant de 334,5 millions de francs.
J'appelle votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur le fait que ces fluctuations de périmètre, dont vous n'êtes nullement responsable, qui s'ajoutent aux fréquentes modifications de nomenclature budgétaire, rendent extrêmement difficile la comparaison des budgets d'une année sur l'autre. Mais cela, nous le savions.
En deuxième lieu, à ces fluctuations de périmètre et de nomenclature budgétaires, viennent se greffer en cours d'année de nombreux mouvements qui affectent considérablement le montant des crédits réellement disponibles. Ainsi, avec les reports, transferts et ouvertures de crédits qui interviennent en cours d'exécution, le montant des crédits nets du budget de l'industrie, c'est-à-dire les crédits effectivement disponibles, s'est élevé à 31,8 milliards de francs en 1996, alors que nous avions approuvé une enveloppe budgétaire de 16,97 milliards de francs.
Certes, une certaine souplesse de gestion des crédits doit être laissée à la disposition des ministères, mais quand on constate que le montant des crédits disponibles atteint le double du montant des crédits votés en loi de finances initiale, on peut se demander si le rôle du Parlement n'est pas un peu « factice ». Cette observation me conduira à proposer tout à l'heure, au nom de la commission des finances, deux amendements de réduction des crédits.
Enfin, il importe d'observer que la croissance des crédits résulte pour l'essentiel - 80 % - de l'inscription au budget pour 1998 de crédits qui ne figuraient pas dans le fascicule budgétaire auparavant : il s'agit des crédits du fonds d'industrialisation des bassins miniers - le FIBM - désormais inscrits dans le budget de l'industrie pour 146 millions de francs et, d'autre part, des crédits destinés aux investissements recherche du Commissariat à l'énergie atomique, le CEA, pour 275 millions de francs.
Le FIBM, comme le CEA, bénéficiait auparavant d'une dotation en cours d'année prélevée sur les recettes de privatisation inscrites à un compte d'affectation spécial, ce qui rendait éminemment aléatoire le versement effectif de ces crédits. Il convient donc, monsieur le secrétaire d'Etat, de se féliciter de la « rebudgétisation » de leurs crédits souhaitée par notre commission des finances à plusieurs reprises.
Au total, la comparaison des budgets pour 1997 et pour 1998, hors crédits « rebudgétisés », fait apparaître un taux effectif de progression des crédits de l'industrie de 0,7 %.
Bien que limitée, cette progression marque une rupture par rapport à l'effort de maîtrise des dépenses publiques mis en oeuvre par le précédent gouvernement depuis 1994 et qui s'était traduit, dans le budget de l'industrie, par une constante réduction des crédits. En particulier, les subventions d'investissement progressent cette année de plus de 11 % - 1,5 % en réalité si l'on exclut les crédits du FIBM, le Fonds d'industrialisation du bassin minier - alors qu'elles régressaient depuis 1995. De même, les crédits d'intervention publique du titre IV ne diminuent que de 1,6 % alors qu'ils avaient diminué de 21 % dans le budget précédent. En revanche, les moyens des services continuent à augmenter.
L'analyse détaillée de ces crédits figure dans le rapport écrit de votre rapporteur spécial. Aussi, je vais limiter mon propos à un certain nombre d'observations et vous poserai, monsieur le secrétaire d'Etat, quelques questions.
S'agissant des crédits énergétiques tout d'abord, la subvention budgétaire à Charbonnages de France est encore réduite de 20 millions de francs cette année. Il faut rappeler que cette subvention est passée de près de 7 milliards de francs en 1991 à moins de 3 milliards de francs aujourd'hui - soit une baisse très significative -, alors que les besoins de l'entreprise n'ont pas été réduits dans les mêmes proportions, bien au contraire.
Comme l'année dernière, le Gouvernement promet, en contrepartie, le versement d'une dotation en capital de 2,4 milliards de francs, qui n'a au demeurant toujours pas été versée cette année. Je rappelle, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'endettement de cette entreprise, qui reviendra à la charge de l'Etat dans quelques années, s'élève déjà à près de 30 milliards de francs et que la charge financière de cette dette représente plus de 40 % du chiffre d'affaires de Charbonnages de France. Si l'on continue à faire des économies pour le budget de l'Etat, il faut bien avoir tous conscience que l'on crée ipso facto une charge importante et inéluctable pour les années futures. Cela reste, pour notre commission des finances, une véritable préoccupation.
Si cette débudgétisation permet une économie de 2,5 milliards de francs sur ce budget, les dépenses correspondantes n'en restent pas moins indispensables.
Le même problème se pose pour l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, dont la subvention d'investissement diminue de 9,5 % alors que son endettement excède 300 millions de francs. A ce sujet, pouvez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d'Etat, si des mesures vont être prises pour améliorer la gestion de cette agence qui est en déficit mais qui a aussi la charge de gérer d'importants excédents au titre du produit de taxes parafiscales ? Quelle solution pourrait-on adopter pour remédier à cette situation ?
J'en viens maintenant aux crédits de politique industrielle.
Parmi les crédits affectés à la recherche industrielle et à l'innovation, les subventions d'investissement destinées à l'Agence nationale de valorisation de la recherche, l'ANVAR, diminuent de 2,8 %, ce qui est de saine gestion compte tenu du montant important des crédits non consommés chaque année.
En revanche, les crédits des grands programmes progressent légèrement, ce qui constitue un choix opportun compte tenu de l'importance de l'innovation pour la santé de notre industrie.
Les dotations affectées au développement des autoroutes de l'information, auparavant gérées par la direction de la poste et des télécommunications, ont été fusionnées avec les crédits du développement de la recherche industrielle et de l'innovation gérés par le ministère de l'industrie. Il convient toutefois de remarquer que des annulations importantes de crédits interviennent chaque année sur les chapitres budgétaires correspondants, en autorisations de programme comme en crédits de paiement, ce qui n'est pas conforme à l'autorisation accordée par le Parlement et relativise la priorité donnée par le ministère aux actions concernées.
Plusieurs chapitres voient leurs dotations progresser de façon notable : il s'agit, en premier lieu, des crédits destinés aux restructurations industrielles, qui permettent le financement d'aides à la restructuration d'entreprises en difficulté implantées dans des bassins fortement touchés par des suppressions d'emplois. Ces crédits transitent soit par le Comité interministériel pour les restructurations industrielles, le CIRI, et ses structures locales, soit par les directions régionales de l'industrie et de la recherche, les DRIRE. Compte tenu du faible taux de consommation de ses crédits par le CIRI depuis plusieurs années, on peut cependant se demander si le ministère n'aurait pas pu, comme l'année dernière, faire l'économie de ces hausses de crédits en se contentant des reports -élevés - de crédits qui sont effectués chaque année. Qu'en pensez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat ?
Il s'agit, en second lieu, des aides à la construction navale, qui, avec 800 millions de francs en crédits de paiement, concentrent 16 % des subventions d'investissement du ministère de l'industrie. Le chapitre sur lequel sont imputés ces crédits est l'un des seuls à ne pas faire l'objet d'annulations chaque année, c'est vrai. En 1996, il a au contraire bénéficié de 416 millions de francs supplémentaires en cours d'exécution.
Je me permets cependant d'observer que les orientations de l'OCDE figurant dans l'accord du 17 juillet 1994 approuvé par l'Union européenne appellent la disparition des aides directes à la construction navale. Aussi, compte tenu des risques qui pèsent sur l'avenir de la politique française en faveur des chantiers navals, la commission des finances déplore-t-elle la suppression de l'encouragement fiscal en faveur de la souscription de quirats de navires qui a permis la construction de six navires au moins dans les chantiers navals français. Elle souhaiterait, par ailleurs, savoir quelles mesures le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre en faveur de la construction navale, dans l'hypothèse d'un démantèlement des aides directes nationales.
Enfin, les crédits de la poste et des télécommunications sont quasiment constants : 70 % des crédits de cet agrégat - soit 1,85 milliard de francs - sont consacrés à l'aide au portage de la presse, conformément au contrat de plan conclu entre l'Etat et La Poste. La réduction de ces aides de 50 millions de francs permet de financer l'accroissement des moyens de l'enseignement supérieur des postes et télécommunications - 443 millions de francs - et de l'ART, l'Autorité de régulation des télécommunications - 81,7 millions de francs - créée le 1er janvier dernier.
En revanche, les crédits de l'Agence nationale des fréquences diminuent légèrement pour tenir compte d'annulations de crédits de 15 millions de francs intervenues au cours de la gestion de l'année 1997.
Sur ce sujet, l'année qui s'écoule fait apparaître trois motifs de satisfaction et un motif d'inquiétude. Il y a lieu tout d'abord de se réjouir de l'ouverture du capital de France Télécom à laquelle a procédé le Gouvernement en octobre dernier, qui a connu un grand succès auprès des salariés de l'entreprise, de la population tout entière, et a rapporté 42 milliards de francs à l'Etat. Ne faudrait-il pas aller plus loin dans l'ouverture de ce capital, compte tenu du nombre d'organismes dont la structure financière doit être recapitalisée par l'Etat, dont les Charbonnages de France et l'ADEME, précédemment citée ?
L'Etat a réglé ses arriérés de paiement à France Télécom. C'est bien. Observons toutefois que l'entreprise a consenti un abandon de créance de 800 millions de francs à l'Etat, ce qui est moins connu, sur une somme totale de 2,5 milliards de francs. Si je puis dire : le consommateur paye ici pour le contribuable ! que ne soupçonnerait-on pas si une telle ristourne était pratiquée par une société privée ?
Il y a lieu de se réjouir, enfin, de la prise en compte des observations émises par la France dans la négociation de la directive européenne sur la libéralisation des services postaux. Le monopole de La Poste sera ainsi maintenu sur un certain nombre de services réservés pour compenser les charges de service public qui pèsent sur l'établissement public.
Néanmoins, et c'est mon premier sujet d'inquiétude, comme l'a bien montré l'excellent rapport de notre collègue M. Gérard Larcher sur La Poste, l'opérateur public continue de supporter sur ses propres deniers le coût d'un certain nombre de contraintes de service public dont il serait opportun que l'Etat le dédommage.
Il convient de se demander à cet égard si l'amputation de 50 millions de francs de l'aide au transport de la presse versée par l'Etat est compatible avec les charges supportées par La Poste à ce titre.
Cela étant, et sauf à déshabiller Pierre pour habiller Paul, je ne vois aucune raison acceptable pour permettre à La Poste de vendre de l'assurance, en particulier en utilisant contre le secteur privé de cette profession des avantages de concurrence qui sont bel et bien financés par les contribuables du secteur public.
En outre, à La Poste, il y aura une accélération des départs à la retraite dans les prochaines années, ce qui accroîtra très sensiblement les charges de retraite de l'entreprise sur la période 1996-2001. Contrairement à France Télécom, dont la soulte versée l'année dernière à l'Etat l'a déchargée du coût des retraites, La Poste assume l'intégralité du financement des siennes !
Avant de conclure, je dirai quelques mots sur la situation du secteur public industriel et énergétique.
Après la mise sur le marché de France Télécom, l'Etat sera en mesure de remplir ses engagements à l'égard de Thomson SA, avec le versement, d'ici à la fin de l'année, de 11 milliards de francs permettant de réduire l'endettement de Thomson multimédia qui s'élève, nous le savons, à 15,5 milliards de francs. La Commission européenne a autorisé cette recapitalisation à la condition que l'entreprise s'engage à modifier sensiblement son plan de restructuration et trouve des partenaires industriels qui lui permettent d'être « viable à long terme ». Notre commission souhaiterait savoir comment le Gouvernement interprète cette dernière condition et quelles sont ses intentions quant à l'ouverture du capital de Thomson multimédia, actuellement détenue à 100 % par Thomson SA.
Notre commission souhaiterait également savoir quelles sont les intentions de l'Etat à l'égard de Framatome, depuis que tout rapprochement est exclu non seulement avec Alcatel-Alsthom mais aussi avec Siemens.
Dans le domaine énergétique, nos opérateurs publics se trouvent aussi confrontés à de nouvelles perspectives. L'ouverture du marché européen de l'énergie représente un vrai défi pour EDF et pour GDF.
Il est essentiel cependant, qu'après avoir stabilisé ses relations financières avec les deux opérateurs, l'Etat ne multiplie par les prélèvements fiscaux pesant sur eux.
S'agissant de la directive sur le marché intérieur du gaz qui reste en cours de discussion, la commission des finances reste vigilante sur la prise en compte par les autorités européennes des spécificités du marché français du gaz. Il importe en effet que l'ouverture du marché soit progressive et compatible avec les engagements à long terme de GDF.
En conclusion, il me semble essentiel d'insister sur l'importance de l'environnement fiscal et social pour le secteur industriel. En effet, en dépit de ses performances à l'exportation, l'industrie française continue à accuser des faiblesses face à la concurrence étrangère, ce qui rend l'Hexagone moins attractif que nous le souhaiterions pour les investisseurs étrangers. Or, ni l'augmentation du taux de l'impôt sur les sociétés, ni la suppression de la provision pour fluctuation des cours, ni la diminution de l'horaire hebdomadaire légal de travail ne sont de nature à rendre l'industrie française plus compétitive par rapport à nos concurrents économiques, bien au contraire.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous indique, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, que la commission des finances a décidé de donner un avis favorable au budget de l'industrie pour 1998, sous réserve de l'adoption des deux amendements de réduction des crédits qu'elle vous proposera afin de faire contribuer le budget de l'industrie à l'effort de maîtrise des dépenses de l'Etat. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est M. Grignon, rapporteur pour avis.
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour l'industrie. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec ses 16,3 milliards de francs, le projet de budget de l'industrie peut paraître à première vue très modeste. Toutefois, je me permets d'attirer votre attention sur le fait qu'il n'est pas un budget de simple consommation mais bien plus un budget d'invitation.
L'important a donc été pour la commission des affaires économiques d'apprécier l'efficacité de ce budget, c'est-à-dire sa capacité à démultiplier la création de richesses par les entreprises industrielles, plutôt que de le juger en valeur absolue, laquelle, soit dit en passant, est tout à fait importante, puisqu'elle augmente à périmètre constant de 3,38 %.
Avant de faire quelques commentaires sur les actions que ce projet de budget permettra, je voudrais rappeler l'importance de l'industrie dans notre économie.
En effet, l'industrie, en incluant le secteur du bâtiment et des travaux publics et les services qu'elle induit, représente 50 % du PIB. Pour produire ces 50 % du PIB, elle fait travailler 6,3 millions de personnes, sur un effectif total, pour le secteur marchand non agricole, de 13,4 millions de salariés. En outre, l'industrie est à l'origine de 63 % de l'effort de recherche et de développement, et représente enfin 75 % des échanges commerciaux avec l'étranger.
Bien que le nombre des emplois industriels diminue depuis 1989, il me semble malgré tout fondamental de veiller à la préservation de notre outil, car il est évident que les activités de vente, de transport, de comptabilité, d'assurances ou de services en général ne peuvent exister de façon satisfaisante que si elle sont engendrées par notre production industrielle. Il y va de notre indépendance nationale.
Si vous le permettez, monsieur le secrétaire d'Etat, j'évoquerai un point d'actualité en rapport direct avec le thème de l'industrie. En effet, le Fonds monétaire international compte aider massivement la Corée du Sud. Je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour que soient imposées à la construction navale coréenne des conditions normales de concurrence, identiques à celles qui sont pratiquées dans les pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques. (M. le secrétaire d'Etat opine.)
J'en reviens à mon rapport. Si l'on met en regard les 16,7 milliards de francs du projet du budget et les 4 000 milliards de francs de PIB correspondants, on comprend l'importance des actions retenues dans l'optique d'une stratégie économique globale dont les deux maîtres mots sont innovation et exportation.
S'agissant du projet de budget de l'industrie, l'innovation, qui permet le développement de l'offre plus vite et mieux est au coeur du débat.
A cet égard, le précédent gouvernement avait formulé dix-sept orientations qui, je le crois, sont toujours d'actualité.
Interrogé sur ces orientations par la commission des affaires économiques et du Plan, vous nous avez, monsieur le secrétaire d'Etat, apporté certains éléments de réponse.
Vous nous avez rassurés en apportant un certain nombre de confirmations.
L'innovation sera facilitée par des mesures tendant à assurer une concurrence plus loyale entre le secteur public et le secteur privé.
L'ANVAR ne devrait plus se substituer aux organismes de capital-risque, ni disperser ses actions mais, au contraire, se concentrer sur les entreprises de moins de 2 000 personnes.
Le système de l'interlocuteur unique, facteur déterminant de simplification administrative pour les PMI, devrait être généralisé.
La protection de l'innovation sera moins coûteuse et les brevets, licences, acquis technologiques et marques seront mieux protégés, le futur protocole européen de Madrid devant faciliter l'établissement d'une zone de garantie européenne.
Vous nous avez rassurés, enfin, en confirmant que le Gouvernement entendait renforcer les fonds propres des PMI, en mettant l'accent sur l'adaptation de la fiscalité quant à la transmission des entreprises de ce secteur.
En revanche, monsieur le secrétaire d'Etat, vous n'avez pas véritablement apporté de réponses satisfaisantes sur plusieurs orientations.
Vous n'avez pas vraiment confirmé les mesures tendant à faire bénéficier les PMI des résultats de grands programmes technologiques. L'objectif était de permettre à plus de 1 000 PMI françaises d'accéder à l'utilisation de technologies développées dans le cadre des programmes EUREKA.
Vous n'avez pas précisé comment on pourrait inviter les laboratoires à déposer plus de brevets.
Vous n'avez pas non plus été très explicite sur le devenir des initiatives ayant pour objet la mobilisation de 500 millions de francs pour investir en fonds propres dans les PMI innovantes.
Vous n'avez pas indiqué comment procéder à l'assainissement du fonds de la recherche et de la technologie, le FRT. Ce fonds devait voir ses moyens reconcentrés au bénéfice des entreprises.
Sur le plan de la normalisation, enfin, nous ne voyons pas de mesures concrètes pour assurer une meilleure présence dans les instances européennes. L'imposition de nos normes à l'échelle européenne est pourtant fondamentale pour le développement de notre outil industriel.
Tous ces éléments conduisent la commission à formuler une appréciation mesurée sur les orientations du Gouvernement en matière de politique industrielle et à s'en remettre à la sagesse de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Besson, rapporteur pour avis.
M. Jean Besson, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour l'énergie. Monsieur le président, monsieur le secréraire d'Etat, mes chers collègues, notre politique énergétique s'inscrit dans un contexte mondial dominé à la fois par des aléas géopolitiques et par des préoccupations environnementales.
A cet égard, je me félicite que l'Europe et la France défendent des positions avancées à la conférence qui se déroule à l'heure actuelle à Kyoto, en vue d'obtenir une réduction des émissions de gaz à effet de serre qui contribuent à un inquiétant réchauffement de notre planète.
S'agissant des dossiers européens, j'aimerais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous précisiez quand le Gouvernement compte inscrire à l'ordre du jour du Parlement le projet de loi de transposition de la directive sur le marché intérieur de l'électricité.
J'aimerais, par ailleurs, que vous nous indiquiez comment se présente le Conseil énergie du 8 décembre prochain, qui examinera la proposition de directive sur le marché intérieur du gaz naturel.
La commission des affaires économiques et du Plan, qui a récemment adopté une proposition de résolution sur ce point, souhaite que le Gouvernement continue de défendre fermement ses positions concernant l'organisation de la distribution de gaz, qui doit relever du principe de subsidiarité, et le degré d'ouverture du marché gazier qui, en l'état du texte, s'avérerait beaucoup trop brutal pour notre pays.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de nous informer de l'évolution de cet important dossier.
Pouvez-vous, également, nous exposer l'état d'avancement des négociations concernant la proposition de directive relative à la taxation des produits énergétiques dont l'adoption poserait de sérieuses difficultés à notre pays ?
A l'échelle hexagonale, la politique énergétique doit tendre à garantir la sécurité d'approvisionnement à long terme, et, pour ce faire, répondre à trois préoccupations : offrir une énergie très compétitive ; affirmer les missions de service public ; garantir la sûreté des installations et des processus de traitement des déchets nucléaires.
Dans ce contexte, je me félicite, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous ayez récemment réaffirmé l'engagement nucléaire de la France et concrétisé la poursuite de notre programme électronucléaire par une série de mesures.
Cependant, de façon à rester durablement un atout pour la France, le secteur nucléaire doit gérer la question de l'aval du cycle. Cela a amené le Gouvernement à recadrer partiellement certaines orientations en ce domaine.
C'est ainsi que vous avez, monsieur le secrétaire d'Etat, souhaité que soit rééquilibrée la recherche en faveur du stockage en surface et sub-surface. Pouvez-vous nous indiquer avec précision quels seront les moyens budgétaires consacrés, en 1998 et les années suivantes, aux trois voies de recherche prévues par la loi du 30 décembre 1991 ?
Pouvez-vous, par ailleurs, nous donner des informations sur les modalités de la fermeture de Superphénix, que le Gouvernement est en train d'arrêter ?
Vous souhaitez faire de la politique de maîtrise de l'énergie une nouvelle priorité et encourager la production d'énergies renouvelables, ce dont je me félicite. Notre potentiel dans ce domaine est encore considérable ; il doit cependant être valorisé dans des conditions économiques acceptables.
Comment envisagez-vous l'évolution de l'industrie française du raffinage ? Comme l'an dernier, la commission des affaires économiques a manifesté son souhait que le Gouvernement ait le courage politique de réduire l'écart de taxe intérieure sur les produits pétroliers entre le gazole et les autres carburants, des solutions devant être trouvées pour que la compétitivité du secteur des transports routiers et de l'industrie automobile n'en souffrent pas.
Elle a, par ailleurs, souhaité que le Gouvernement s'engage à provisionner le fonds créé au titre de la loi de finances pour 1997 et destiné à maintenir des petites stations-service en milieu rural.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. Jean Besson, rapporteur pour avis. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous expliquer pourquoi ce fonds n'a toujours pas été doté ?
Pouvez-vous également nous indiquer les solutions que le Gouvernement entend apporter au problème des affaissements miniers, qui touchent gravement nombre de communes minières ?
Enfin, je souhaite attirer votre attention sur l'urgence qu'il y aurait à inscrire à l'ordre du jour du Parlement le projet de loi étendant et adaptant le code minier aux départements d'outre-mer, texte qui est très attendu par les professionnels concernés.
Eu égard au caractère prospectif et volontariste de ce budget, j'ai proposé à la commission des affaires économiques de donner un avis favorable à son adoption.
Cependant, arguant notamment de la fermeture de Superphénix, la majorité de la commission ne m'a pas suivi et a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits destinés à l'énergie dans le projet de loi de finances pour 1998. (Applaudissement sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Hérisson, rapporteur pour avis.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour les technologies de l'information et la poste. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits proposés en 1998 pour la poste et les télécommunications s'élèvent à 2,64 milliards de francs, soit une très légère baisse, de 0,2 %, par rapport à 1997. L'essentiel du problème ne se situe donc pas là.
Pour les télécommunications, le projet de budget vise à consolider les moyens alloués aux organismes issus de la réforme de ce secteur, qui sera marqué, comme tout le monde le sait, le 1er janvier prochain, par l'ouverture totale à la concurrence en Europe.
La mutation de France Télécom est aujourd'hui achevée. Je ne souhaite pas fustiger le comportement des opposants d'hier au changement de statut, qui sont aujourd'hui d'ailleurs, pour la plupart, les défenseurs de l'ouverture du capital. Au contraire, je me réjouis de l'aboutissement naturel, avec seulement un semestre de retard, de la réforme de M. Fillon, qui a conduit à la mise sur le marché d'une partie du capital de l'entreprise.
La forte souscription des salariés à l'offre publique de vente est un succès considérable et reconnu par tous. Le nombre des souscripteurs internes s'est élevé à 128 000 personnes : plus de deux actifs sur trois ont acheté des actions de leur entreprise, témoignant ainsi de leur adhésion à son avenir. En cinq ans, France Télécom sera ainsi passée de 75 % de grévistes à 70 % de salariés actionnaires ! Cela méritait d'être souligné. (Protestations sur les travées socialistes.)
M. Henri Weber. Ce n'est pas contradictoire !
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Je souhaite d'ailleurs associer à ce succès les salariés de l'ancienne direction des postes et télécommunications ayant pris leur retraite avant 1991, qui doivent très justement se voir attribuer les mêmes conditions favorables d'acquisition des actions que celles qui sont accordées aux autres salariés de l'entreprise, comme cela est prévu à l'article 31 du projet de loi de finances rectificative pour 1997.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'aurai deux critiques à formuler en matière de télécommunications.
La première concerne la nouvelle réglementation des droits de passage sur le domaine public des collectivités locales, qui ne satisfait ni les élus ni les entreprises concernées. La concertation doit donc être approfondie sur ce point et la réglementation révisée, si cela s'avère nécessaire. Je crois que, en effet, les collectivités locales, dans leur ensemble, au travers de leurs associations, et plus particulièrement de l'Association des maires de France, se sont manifestées à plusieurs reprises. Je suis sûr, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous serez attentif à remettre sur le métier ce travail qui est pour le moins inachevé.
Ma deuxième critique est essentielle ; elle porte, cela ne vous étonnera pas, monsieur le secrétaire d'Etat, sur le régime de paiement de la taxe professionnelle de France Télécom, qui est manifestement inadapté au moment de l'arrivée de la concurrence.
La loi de 1990, qui a assujetti La Poste et France Télécom à la taxe professionnelle, a prévu que le produit de cette imposition - soit plus de 5 milliards de francs pour France Télécom - serait affecté à l'Etat. Cette anomalie budgétaire est aggravée par la perspective de l'ouverture à la concurrence des télécommunications, puisqu'il y aura, dès 1998, une véritable distorsion de concurrence en la défaveur de France Télécom, qui ne disposera pas, dans ses négociations d'implantation locale, de l'atout de la recette fiscale locale que pourront faire valoir les concurrents auprès des décideurs locaux.
La commission des finances, de l'économie générale et du Plan et la commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale se sont toutes deux ralliées, lors de la discussion du budget de l'industrie, à la position que j'avais à plusieurs reprises exprimée, au nom de la commission des affaires économiques du Sénat, à savoir qu'il importe véritablement de restituer aux collectivités locales la taxe professionnelle versée par France Télécom. Un amendement allant dans ce sens, déposé par le député socialiste Jean-Pierre Balligand, a d'ailleurs été adopté dans un premier temps par l'Assemblée nationale, puis rejeté lors d'une deuxième délibération. Le problème a été soulevé ici même, le 25 novembre dernier, lors de la discussion d'un amendement de mes collègues Jean-Paul Delevoye et Philippe Marini.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement ne peut plus faire l'économie de cette réforme, que la commission des affaires économiques réclame depuis plusieurs années. Les élus attendent une réponse rapide sur ce point. Ils insistent lourdement pour que soit réparée cette injustice, d'autant plus que la loi de 1990, qui a assujetti France Télécom à la taxe professionnelle, s'adressait à une entreprise publique qui a aujourd'hui changé de statut. Il ne reste plus aucune raison pour que cette entreprise de droit privé bénéficie ou - et c'est bien le cas aujourd'hui - subisse une distorsion de concurrence dès lors qu'elle semble devoir entrer dans le droit commun.
En ce qui concerne La Poste, le remarquable rapport de notre collègue M. Gérard Larcher a récemment identifié les menaces lourdes qui pèsent sur son avenir.
Les charges de retraites de l'opérateur sont bien l'une des principales difficultés que nous allons connaître et le choc de la concurrence constitue un véritable problème.
Qu'il s'agisse des diverses pratiques déloyales ou de la libéralisation partielle programmée au niveau européen par la directive postale en cours d'adoption, pour ces différents motifs, La Poste est menacée par la remise en cause de ses services financiers.
En outre, elle est pénalisée par les charges d'intérêt général qu'elle assume, sans que lui soit toujours garantie par l'Etat une juste contrepartie financière : rôle de guichet bancaire pour les plus démunis, participation à l'aménagement du territoire et au fonctionnement des 2 000 bureaux de poste qui ont une activité quotidienne inférieure à une heure.
Enfin, La Poste finance une partie du coût du transport de la presse.
Le projet de loi de finances prévoit de réduire de 1,9 milliard à 1,850 milliard de francs le montant du soutien de l'Etat. Il s'agit d'une décision unilatérale, qui n'a pas fait la part à la concertation. Il est nécessaire que nous puissions reprendre les discussions.
Devant l'ampleur des problèmes qui restent en suspens - versement à l'Etat de la taxe professionnelle de France Télécom, problème des droits de passage sur le domaine public, baisse unilatérale de l'aide au transport postal de la presse sans redéfinition des modalités de cette politique - la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable sur les crédits de la poste et des télécommunications. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je ne voudrais pas laisser passer la discussion des crédits de l'industrie sans obtenir du Gouvernement des éclaircissements sur quatre sujets qui méritent, à mon sens, une réflexion approfondie de sa part.
Le premier de ces sujets, c'est la politique fiscale du Gouvernement à l'égard du secteur industriel. Après avoir accru le taux de l'impôt sur les sociétés de plus de 15 % et pratiquement doublé le taux de l'impôt frappant les plus-values à long terme résultant de la cession d'actifs, puisqu'on est passé de 20,9 % à 41,6 %, le Gouvernement met fin, dans le présent projet de loi de finances, à la déductibilité de la provision pour fluctuation des cours des matières premières.
Cette suppression est contestée par la quasi-totalité de l'industrie française, car ladite provision permettait d'atténuer, dans le résultat des entreprises de première transformation des matières premières, l'impact de la variation des cours de ces consommations intermédiaires induit par le mode de valorisation des stocks de base selon la méthode dite « premier entré, premier sorti », c'est-à-dire ou FIFO, first in first out.
La suppression de cette provision a deux conséquences qui sont apparues inadmissibles à la commission des finances de la Haute Assemblée.
En premier lieu, les entreprises devront rapporter à leur résultat imposable les provisions déjà constituées ; c'est donner à la mesure un effet rétroactif que tous les Parlements ont toujours condamné, quelle que soit leur configuration politique. Cela représente une charge très lourde pour un certain nombre d'entreprises, en dépit de la franchise de 60 millions de francs instituée par l'Assemblée nationale. La commission des finances du Sénat a amendé le texte du Gouvernement en prévoyant un lissage de cette réintégration, non pas sur trois ans, comme cela était initialement prévu, mais sur six ans.
Le coût de la mesure, malgré la franchise et malgré le lissage, demeure très élevé pour les entreprises dont les provisions pour fluctuation de cours pouvaient atteindre jusqu'à 85 % des fonds propres. Parlant sous le contrôle de M. Maurice Schumann, je pourrais dire que c'est le cas des industriels lainiers du Nord.
En second lieu, l'absence d'un dispositif permettant d'atténuer le coût de l'enrichissement sans cause place les entreprises françaises dans une position extrêmement défavorable par rapport à leurs concurrentes.
En effet, dans les pays concurrents de la France, les stocks sont comptabilisés selon la méthode dite « dernier entré, premier sorti », ou LIFO, c'est-à-dire last in first out , qui permet de neutraliser la quasi-totalité des variations de prix affectant les stocks de base indispensables à la poursuite de l'exploitation.
Il y a là, bien sûr, une différence qui met les industriels français en situation de faiblesse dans la compétition mondiale.
En conséquence, monsieur le secrétaire d'Etat, j'attire votre attention sur la nécessité de trouver dans les meilleurs délais un dispositif de substitution à la prévision pour la fluctuation des cours. Il y va de la survie d'un très grand nombre d'entreprises des secteurs de la transformation du bois, du papier, des métaux non ferreux, des métaux précieux, du textile - un secteur au sort duquel, je pense, vous n'êtes pas insensible - et du pétrole.
Mon deuxième sujet de préoccupation concerne l'environnement social dans lequel les entreprises industrielles devront évoluer à partir de l'an 2000.
En effet, si elle n'est pas compensée pour les salaires proches du SMIC, le fait d'abaisser la durée hebdomadaire de travail à trente-cinq heures provoquera une dégradation immédiate de la productivité des entreprises de 11,4 %.
Au passage, je rappelle que l'application des trente-cinq heures hebdomadaire ne vous permettrait pas, toutes choses égales par ailleurs, de tenir votre hypothèse de croissance initiale de 3 %.
D'ailleurs, je n'ai pas voulu vous interrompre cet après-midi, mais je profite de l'occasion qui m'est donnée maintenant pour indiquer que, en raison des événements d'Asie et des dispositions qui sont prises à l'égard des entreprises françaises, l'OCDE considère aujourd'hui que les 3 % ne pourront pas être atteints et que notre taux de croissance se situera plutôt à 2,7 %.
Je laisse aux instituts de prévision la responsabilité de leurs estimations...
M. Henri Weber. Ce ne serait pas la première fois qu'ils se tromperaient !
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. ... mais c'est bien cette pente qui ressort des travaux de l'OCDE.
Il en résultera des destructions massives d'emplois. Or les études montrent que le coût horaire du travail en France est déjà l'un des plus élevés des pays de l'OCDE. (Protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Pierre Lefebvre. C'est faux !
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Les industriels sont tous formels. Ils ne souhaitent pas d'aide spécifique à l'investissement. Ils veulent simplement que l'environnement social et fiscal soit suffisamment stable et prévisible, qu'il n'entame pas leur compétitivité, de manière qu'ils puissent investir et innover.
Au mois d'octobre, nous avions constaté, pour nous en réjouir, une relance de l'investissement. Aujourd'hui, en raison de l'attentisme de certains industriels, cette relance marque le pas. En conséquence, les investissements n'augmentent pas. Cela nous inquiète parce que la croissance française s'appuyait dans une large mesure sur une augmentation de l'investissement en France, à côté, bien sûr, de la relance de la consommation.
Pour se convaincre de la réalité de cette évolution, il suffit d'examiner le niveau des importations : nous n'importons pas parce que nous ne modernisons pas notre outil de production, ce qui risque, à terme, de nous handicaper.
Mais je reprends le fil de mon propos.
Avez-vous évalué, monsieur le secrétaire d'Etat, l'impact du passage aux trente-cinq heures sur le secteur industriel ?
L'industrie automobile constitue un troisième motif d'inquiétude. En effet, la suppression de la prime à la reprise des véhicules anciens a entraîné une chute des immatriculations automobiles de 23,4 % sur les dix premiers mois de l'année.
M. Raymond Courrière. Mais qui en est responsable ?
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Les ventes d'automobiles s'établissent à leur plus bas niveau depuis plus de vingt-cinq ans.
Avec des coûts de production plus élevés que ceux de leurs concurrents européens, les constructeurs français sont inquiets.
Ils font valoir, par ailleurs, que le passage aux trente-cinq heures induirait pour eux une hausse de prix de revient de 5 %, qui entraînerait une chute de leurs ventes de 20 % dès la première année et de 10 % l'année suivante.
Que comptez-vous faire, monsieur le secrétaire d'Etat, pour maintenir la compétitivité de l'industrie automobile française ? Un cri d'alarme a été récemment lancé à ce sujet et vous y avez fait fort justement écho.
Je ne terminerai pas ce court examen du secteur industriel français sans évoquer l'industrie textile. Le contraire vous surprendrait !
Les 5 000 entreprises de ce secteur sont touchées de plein fouet par quatre décisions du Gouvernement : à celles que j'ai déjà évoquées et qui touchent l'ensemble de l'industrie - l'augmentation de la fiscalité pesant sur les entreprises, la suppression de la provision pour fluctuation des cours et la réduction de la durée hebdomadaire du travail - s'ajoute, en l'espèce, le plan textile.
Celui-ci a eu, il faut le reconnaître, des conséquences positives. Avant qu'il ne soit conçu, on prévoyait pour le premier semestre de 1996 une accélération de la décroissance des effectifs, celle-ci devant prendre un rythme annuel de 9 % à 10 %.
Or les responsables d'entreprise et les organisations syndicales sont d'accord pour considérer que, en définitive, depuis le 1er juin 1996, les effectifs globaux des entreprises bénéficiant du plan textile sont restés stables, avec un fort mouvement d'embauche de jeunes : 3 000 jeunes ont été embauchés entre le 1er juin 1996 et le 31 mars 1997. Ces chiffres, qui ne sont pas contestés, montrent bien que le plan textile a eu des effets bénéfiques.
Par conséquent, il nous faut tout faire pour le maintenir ou, éventuellement, y substituer un autre plan. Je sais que vous y réfléchissez, monsieur le secrétaire d'Etat, et peut-être nous donnerez-vous quelques indications à ce sujet.
J'ajoute que nos entreprises textiles ont pour concurrentes des entreprises qui ont été favorisées par les dévaluations compétitives des monnaies britannique et italienne.
Les entreprises françaises se sentent pénalisées dans la mesure où elles se sont engagées à limiter à 25 000 le nombre des suppressions d'emplois, alors que 60 000 étaient prévues en l'absence de toute aide, et à engager 7 000 jeunes.
Pouvez-vous nous donner l'assurance, monsieur le secrétaire d'Etat, que ces entreprises n'auront pas, de surcroît, à rembourser les aides obtenues en vertu du plan textile et qu'elles verront leurs charges sociales allégées en échange de la réduction du temps de travail ?
Je vous rappelle que le commissaire européen chargé de ces questions nous a indiqué, lorsqu'il a été entendu par la commission des finances, qu'était demandé aux industriels belges qui avaient bénéficié d'un plan identique le remboursement des avantages perçus. Cela ne peut pas ne pas « interpeller » les industriels français, qui se demandent s'ils seront, eux aussi, contraints à un tel remboursement.
S'ajoutant aux dispositions fiscales que j'ai rappelées à l'instant, ce remboursement viendrait encore aggraver la situation de leurs entreprises et les paralyserait dans leur intention de moderniser leur outil de production.
Or, compte tenu de ce qu'est la compétition actuelle, il est indispensable de ne pas laisser s'affaisser le potentiel industriel français dans le domaine du textile. Il convient, au contraire, d'apporter un soutien à nos entreprises de ce secteur pour qu'elles puissent moderniser leurs équipements et être ainsi en mesure d'affronter la concurrence internationale.
Telles sont, monsieur le secrétaire d'Etat, les questions que je souhaitais vous poser et auxquelles je serais heureux que vous puissiez répondre. Je sais que vous portez intérêt à ces problèmes et que vous saurez formuler des propositions qui ne manqueront pas de rassurer le monde industriel, en particulier celui du textile. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
- Groupe du Rassemblement pour la République, 20 minutes ;
- Groupe socialiste, 27 minutes ;
- Groupe de l'Union centriste, 15 minutes ;
- Groupe des Républicains et Indépendants, 17 minutes ;
- Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 9 minutes ;
- Groupe communiste républicain et citoyen, 12 minutes.
La parole est à M. Weber.
M. Henri Weber. Monsieur le secrétaire d'Etat, le projet de budget de l'industrie que vous nous présentez aujourd'hui marque une rupture avec les budgets précédents, non seulement parce que, à périmètre constant, il se présente en hausse de 4,5 %, alors que les budgets de vos prédécesseurs s'affichaient à la baisse, mais aussi parce qu'il traduit la volonté de rompre avec la tendance au désengagement économique de l'Etat, perceptible ces dernières années, de renouer avec une conception plus volontariste de son action, bref de réinventer une politique industrielle moderne.
En effet, je le sais bien, il ne s'agit pas pour vous de ressusciter la « politique industrielle de grand-papa », avec son interventionnisme de détail, son fétichisme des « champions nationaux », son goût immodéré pour le meccano industriel.
La politique industrielle que vous préconisez, et qui se lit dans votre budget, se préoccupe surtout d'améliorer l'environnement des entreprises, de créer un contexte favorable à leur création, leur essor, leur redéploiement. Les trente-sept mesures de simplification administrative présentées ce matin même en conseil des ministres par Mme Marylise Lebranchu illustrent bien cet état d'esprit.
Cette préoccupation se manifeste plus fondamentalement dans les quatre grandes parties de votre budget : renforcement de l'effort d'innovation et de recherche industrielles, soutien accru aux PMI, meilleur accompagnement des reconversions et des restructurations, action soutenue en faveur des économies d'énergie et des énergies renouvelables.
Les moyens affectés à l'effort d'innovation et de recherche industrielles augmentent de 16,5 % en autorisations de programme par rapport à 1997, notamment à travers les dotations de l'ANVAR. Ces ressources supplémentaires permettront d'amplifier l'appel à proposition lancé dans le cadre de l'opération « technologies-clés » et de stimuler la recherche et l'innovation, en particulier dans les industries numériques, les bio-technologies et le multimédia.
C'est dans ces filières que se trouvent, chacun le sait, non seulement la base de la puissance industrielle de demain pour notre pays, mais encore les grands gisements d'emplois qualifiés. Que ceux qui en douteraient méditent l'exemple des Etats-Unis, où les deux tiers des nouveaux emplois qualifiés ont été créés dans les secteurs de haute technologie.
Les crédits consacrés au soutien des PMI augmentent de 2,2 % en autorisations de programme. Ces moyens nouveaux favoriseront l'accès des PMI aux nouveaux réseaux de communication, et notamment à Internet auquel 20 % seulement d'entre elles sont reliées.
Ils permettront aussi de mieux financer les contrats de plan Etat-région, et notamment la procédure Atout de diffusion des techniques. Ils permettront, enfin, de renforcer l'investissement immatériel des PMI, celui qui leur fait sans doute le plus cruellement défaut, à travers les aides pour le recrutement des cadres et les fonds régionaux d'aide au conseil, qui constituent des missions prioritaires des directions régionales et interdépartementales de la santé et de la solidarité, les DRIRE.
Combien de dépôts de bilan auraient pu être évités, combien d'emplois auraient pu être sauvés ou créés si les chefs des petites ou moyennes entreprises avaient été mieux et plus continûment conseillés et soutenus !
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Henri Weber. En effet, 2,2 % d'augmentation de crédits en faveur de l'investissement matériel et immatériel des PMI, c'est bien, mais il faudra sans doute amplifier cet effort si l'on veut doter notre pays d'un tissu de PMI aussi dense et efficace que celui de nos concurrents, et en particulier de l'Allemagne. Il faudra aussi y stimuler le partenariat entre entreprises, la cotraitance, les réseaux de firmes. Sur ce terrain de la coopération interentreprises, nous sommes en retard par rapport aux pays les plus développés.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Henri Weber. Votre politique d'accompagnement des reconversions et des restructurations industrielles me paraît également positive, puisque les crédits doublent presque en autorisations de programme et augmentent de 45 % en crédits de paiement. On peut s'inquiéter quelque peu, toutefois, de la baisse d'activité du comité interministériel de restructuration industrielle, le CIRI.
Puisque nous en sommes au douloureux chapitre des restructurations, permettez à l'élu de Haute-Normandie que je suis, monsieur le secrétaire d'Etat, de dire un mot de la construction navale en France, des ateliers et chantiers du Havre et de Manche-Industrie Marine de Dieppe en particulier.
La construction navale est une industrie de haute technologie, une industrie d'avenir qui génère des emplois qualifiés bien au-delà des régions littorales, puisque les entreprises sous-traitantes qui travaillent pour elle sont réparties dans soixante-dix départements français. Je citerai en exemple, au hasard, l'entreprise Gantois de Saint-Dié, monsieur le secrétaire d'Etat. Cette industrie subit une crise aggravée, dans une large mesure, par la concurrence déloyale que lui font les pays d'Extrême-Orient. La chute récente du won coréen et du yen japonais risque de lui porter le coup de grâce.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il vous arrive d'évoquer la mission de solidarité industrielle de la nation à l'égard des secteurs et des entreprises exposés brutalement à la guerre économique mondiale. Notre construction navale est de ceux-là. Nous vous demandons de veiller, lors du Conseil des ministres prévu pour le 7 mai prochain, à ce que l'Union européenne ne démantèle pas, pour des raisons idéologiques ultra-libérales, le seul mécanisme de protection existant en Europe : l'aide à la commande, l'aide aux contrats.
Nous vous demandons également de faire en sorte que les dotations que le FMI s'apprête à consentir à la Corée ne servent pas à renflouer les chantiers navals coréens et impliquent, en contrepartie, une limitation volontaire de leurs capacités de production.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Très bien ! Il y a effectivement une crainte !
M. Henri Weber. Enfin, un effort appréciable est consenti en faveur des économies d'énergie et des énergies renouvelables, puisque les moyens mis à la disposition de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, augmentent de 12,8 %. A quelques kilomètres de Dieppe, ville chère à mon coeur, se trouvent les centrales nucléaires de Paluel et de Penly, et je connais bien, monsieur le secrétaire d'Etat, l'excellence de notre industrie nucléaire. Des inquiétudes se font pourtant parfois jour dans la population et la fiabilité de notre parc nucléaire ne doit pas nous dispenser de travailler encore à son amélioration.
On pourrait souhaiter, à cet égard, que soit clarifiée la tutelle de l'ADEME, actuellement répartie entre trois ministères : celui de la recherche, celui de l'environnement et le vôtre.
L'ouverture limitée du marché de l'électricité, avec la possibilité de produire pour des nouveaux opérateurs et l'opportunité de contracter avec le producteur de leur choix pour les clients éligibles, permet de concilier les exigences européennes et le respect des missions de service public d'EDF.
Quant au problème du gaz, que vous aurez prochainement à régler, il est plus complexe. Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, de souhaiter que l'ouverture du marché du gaz ne mette pas en péril l'aptitude de GDF à répondre aux missions de service public qui sont les siennes. La préservation des contrats take or pay, le seuil d'éligibilité des clients ou le développement de la cogénération sont des enjeux de tout premier ordre et touchent directement l'indépendance énergétique de la France. Je ne doute pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous saurez défendre celle-ci avec efficacité.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la politique industrielle moderne que vous appelez de vos voeux vise à accroître la créativité et la compétitivité de nos entreprises industrielles ainsi que l'attractivité de notre territoire pour les investisseurs étrangers.
Mais, contrairement à certains libéraux, vous ne croyez pas que cette compétitivité et cette attractivité dépendent principalement du coût de la main-d'oeuvre dans notre pays, coût qui se situe au demeurant dans la moyenne de nos concurrents de l'OCDE et, en tout cas, 20 % en dessous du principal d'entre eux, l'Allemagne.
Le coût relativement élevé de notre main-d'oeuvre et l'épaisseur imposante de notre droit du travail, signes de notre haut niveau de civilisation et de développement, n'ont pas empêché Toyota de décider de s'implanter à Valenciennes plutôt qu'en Pologne ou en Irlande où les salaires et les droits sociaux sont pourtant autrement plus faibles. Même la perspective des trente-cinq heures sans baisse des salaires au 1er janvier de l'an 2000 n'a pas réussi à dissuader le grand groupe automobile japonais. Et il n'est pas seul dans son cas, mes chers collègues, puisque notre pays se classe au troisième rang dans le monde, après les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, pour les investissements étrangers et que l'année 1997 promet, à cet égard, d'être l'année de tous les records !
Les filiales des groupes internationaux représentent 23 % de notre PIB et 33 % de nos exportations : nous sommes plébiscités par le capitalisme étranger et par l'épargne étrangère, en même temps que nous sommes dénigrés par certains chefs d'entreprise nationaux, qui agitent chaque matin sans vergogne la menace de la délocalisation. (Très bien ! sur les travées socialistes.)
C'est que, à côté du coût du travail et des droits des salariés, entrent aussi en ligne de compte bien d'autres facteurs autrement déterminants, à savoir le niveau de culture et de qualification de la main-d'oeuvre, l'état des infrastructures, le niveau de la recherche, l'aptitude de la population au changement et la qualité des rapports sociaux.
C'est sur tous ces paramètres, et quelques autres, que doit agir un gouvernement soucieux de mettre en oeuvre une politique industrielle moderne. C'est ce que vous faites à votre poste, monsieur le secrétaire d'Etat, comme le font vos collègues Claude Allègre, Dominique Strauss-Kahn, Marylise Lebranchu, Martine Aubry et tant d'autres à leur poste. C'est pourquoi nous voterons le budget que vous nous proposez, car c'est un bon budget. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jacques Legendre. C'est le XV de france : 50 à 12 !
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le secrétaire d'Etat, je me réjouis de l'augmentation des crédits de l'ANVAR, ainsi que du soutien à la création et au développement d'entreprises.
Certes, tout n'est pas encore parfait.
Les fonds communs de placement-innovation, qui avaient été lancés par M. d'Aubert dans la loi de finances pour 1997, avec les décrets d'application de février 1997, sont encore, à mon sens, trop difficiles d'accès pour les investisseurs. En effet, les modalités fixées par le pouvoir réglementaire sont draconiennes. Il conviendra de les assouplir, en particulier en ce qui concerne les seuils de durée.
Le délai de vingt-quatre mois pour investir 60 % des crédits levés dans les sociétés définies comme innovantes par l'ANVAR est difficile à tenir. Cela conduit à limiter le volume des crédits levés, ce qui augmente le taux des frais de gestion des fonds et fait hésiter beaucoup d'opérateurs. Il faudra revoir ce système si l'on veut qu'il se développe. Il faut aussi améliorer les conditions de création des entreprises pour qu'il y ait plus de créateurs.
A cet égard d'ailleurs, deux propositions de loi ont été déposées sur le bureau du Sénat. La première vise à permettre la création d'entreprises par les fonctionnaires, ce qui est actuellement contesté par la Cour des comptes. La seconde tend à créer des entreprises à partenariat évolutif, afin de faciliter les accords entre les apporteurs de matière grise et les apporteurs de capitaux. Je me réjouis de voir que les bons de souscription aux créations d'entreprises, les stock options, soient rétablis.
Il importe aussi de contribuer à l'accueil en France de sociétés étrangères de capital-risque. Il en résultera une saine émulation car il faut bien reconnaître que la dynamique des sociétés de capital-risque implantées en Californie ou en Grande-Bretagne n'a rien à voir avec celle des sociétés de capital-risque existant en France. J'y vois un appui possible puisqu'il est désormais acquis que les sociétés américaines de capital-risque qui n'investissent plus en Asie peuvent par conséquent offrir à l'Europe des programmes beaucoup plus importants. Il importe donc de drainer une partie de ce capital vers la France.
Un colloque international sur le capital-risque vient de se tenir à la fin de la semaine dernière à Sophia-Antipolis, ce pôle qui concentre désormais plus de 1 000 entreprises créées à côté de grandes multinationales, notamment dans le domaine clef des nouvelles technologies. Je vois dans le grand succès qu'il a rencontré un encouragement à définir une véritable stratégie en la matière sur l'ensemble de la ligne de capitalisation : ANVAR et FCPI, capital-risque, capital-investissement puis le nouveau marché, ce NASDAQ européen grâce à Euro NM.
Je voudrais maintenant vous faire part de ma grande inquiétude à propos de la partie recherche en télécommunications de votre budget.
Globalement, par rapport à la situation que nous connaissions voilà quelques années, il manque 2 milliards de francs. Une note en date du 19 novembre, qui vient d'être publiée par l'ensemble des industriels des industries électroniques et de la communication, indique : « L'industrie équipementière française a très largement bénéficié dans le passé du soutien financier de la direction générale des télécommunications dans les décennies soixante-dix et quatre-vingt : plusieurs milliards de francs par an avec un montant significatif pour la recherche ».
Voilà deux ans, les crédits pour la recherche de France Télécom s'élevaient à 4 milliards de francs ; l'année dernière, ils étaient de 4,5 milliards de francs. Compte tenu des nouvelles dispositions, il est certain que le centre national d'études des télécommunications, le CNET, qui, initialement, assumait des fonctions de recherche amont et générales recouvrant l'ensemble des domaines essentiels en matière de télécommunications se recentrera sur la recherche nécessaire à France Télécom.
Les professionnels, tout comme moi, s'interrogent sur ce « trou » de 2 milliards de francs. Je sais, monsieur le secrétaire d'Etat, que, au titre de la recherche en télécommunication, 250 millions de francs sont inscrits dans votre budget et 80 millions de francs le sont dans le budget de l'éducation nationale, mais cela ne suffit pas.
Je sais aussi qu'il était envisagé de faire financer tant par France Télécom que par les nouveaux opérateurs une partie soit du chiffre d'affaires soit des investissements d'un réseau national de recherche en télécommunications, le RNRT du rapport Lombard.
Lors de l'audition à laquelle a procédé aujourd'hui même la commission supérieure du service public des postes et télécommunications dont je fais partie et qui se préoccupe, à ma demande d'ailleurs, de la nécessité de faire financer la recherche en télécommunications, les intéressés ne nous ont pas dit qu'ils ne paieraient rien mais qu'ils paieraient éventuellement surtout si des conventions étaient signées en fonction de leurs intérêts propres. Cette attitude compréhensible, compte tenu de la rédaction des cahiers des charges, ne correspond pas à ce qu'avait prévu le législateur lorsqu'il avait introduit cette disposition. Un problème se pose donc.
Pour le moment, nous vivons encore sur un certain acquis. Nos chercheurs veulent rester en France, mais certains voudront parfois quitter le CNET ; le CNRS est disposé à accueillir certains d'entre eux. L'une des raisons pour lesquelles j'ai approuvé le budget de l'éducation nationale tient au fait qu'il comportait des créations de postes et que M. Allègre a indiqué qu'il prélèverait sur ceux-ci une part notable de postes fléchés pour accueillir les chercheurs du CNET.
Néanmoins, la situation n'est pas à la hauteur de nos espérances. Nous savons en effet que les télécommunications et l'ensemble des industries qui y sont liées représentent 50 % du produit intérieur brut des pays les plus avancés et que, dans ce domaine, nos amis américains montrent certaines tendances hégémoniques. J'en veux pour preuve, par exemple, les difficultés que nous avons rencontrées pour le projet Skybridge, piloté par Alcatel, lors du débat qui a eu lieu à Berne sur l'affectation des fréquences.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Nous avons gagné !
M. Pierre Laffitte. Certes, mais avec nos amis américains il ne faut jamais être trop sûr d'une victoire, car ils pilotent tout de même très nettement l'Union internationale des télécommunications.
M. Henri Weber. Très juste !
M. Pierre Laffitte. Nous avons donc gagné, pour le moment...
J'évoquerai maintenant le problème de l'utilisation du spectre de fréquences, notamment pour la boucle de radios locales, le MMDS, ou le hertzien terrestre. Là aussi, il faudrait avoir très bientôt une politique plus claire d'affectation des fréquences.
Gouverner, c'est prévoir. Aussi, il faudra - et c'est sur ce point que je terminerai ma brève intervention - étudier des formules permettant de coordonner un peu mieux les diverses instances de régulation afin qu'elles s'adaptent à l'évolution des techniques.
Nous avons maintenant une agence de régulation des télécommunications - nous ne pouvions pas en avoir auparavant puisqu'il y avait un monopole. Nous avons aussi le CSA, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, et l'agence nationale des fréquences. Cela n'est-il pas trop ? Ne faudrait-il pas réfléchir à une formule du type FCC américaine ? En effet, avec la convergence des télécommunications, de l'informatique et de l'audiovisuel, il s'agit des mêmes services, interactifs dans un cas, peu interactifs dans l'autre, mais qui deviennent plus ou moins voisins. Il s'agit aussi des mêmes fréquences et des mêmes industriels. Or ces derniers vont avoir en face d'eux plusieurs instances de régulation sans aucune structure de coordination. Ce n'est pas bon car, en général, cela fait perdre beaucoup de temps. Et je ne parle pas de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL, de la CSSPPT et d'autres organismes. Il est sans doute nécessaire de conduire une réflexion sur ce point.
Cette réflexion avait d'ailleurs été évoquée par la mission sénatoriale sur l'avenir des télécommunications en France et en Europe, que j'ai présidée voilà dix ans, et dont le rapporteur était M. Jean-Marie Rausch. Dans ses conclusions, la mission considérait qu'il convenait de réfléchir sur une FCC française, voire sur une structuration européenne. Par ailleurs, elle précisait qu'il serait sans doute utile de transformer France Télécom en société nationale ; c'est désormais chose faite. Nous ne pouvons attendre encore dix ans avant d'avoir une structuration correcte des organismes régulateurs ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le périmètre des compétences du ministre de l'économie et des finances a connu une sensible évolution dans le cadre de l'arrêté fixant la composition du Gouvernement. Il s'est étendu aux domaines de l'industrie, des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, ainsi que de la poste, des télécommunications et de l'espace.
Ce champ de compétences, qui présente un caractère transversal assez prononcé, a d'ailleurs, de notre point de vue, une cohérence proche de celle des attributions respectives de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité et de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement. Nous nous félicitons de ces choix.
Pour autant, les masses financières en jeu sont d'importance tout à fait variable. Je souhaite donc, dans le temps qui m'est imparti, aborder tout d'abord les crédits de l'industrie, qui s'élèvent à quelque 16,4 milliards de francs, et singulièrement ceux de la poste, des télécommunications et de l'espace, qui en constituent une partie importante.
S'agissant des crédits de l'industrie, la nomenclature budgétaire a connu une certaine évolution. En effet, une partie des crédits des directions régionales a été recentrée sur le budget de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Aussi, les crédits ministériels se trouvent-ils quelque peu recentrés sur certaines activités précises.
En ce qui concerne les dépenses du titre III, outre les traditionnelles dépenses de fonctionnement du ministère proprement dit, nous observons, en particulier, une évolution sur les subventions de fonctionnement des écoles des mines, dont la progression est loin d'être négligeable et qui atteint d'ailleurs près du tiers des crédits de 1997. Je me félicite notamment - excusez mon patriotisme local, monsieur le secrétaire d'Etat - que l'Ecole supérieure des techniques industrielles et des mines de Douai bénéficie d'un effort important de la part de l'Etat en la matière, avec un quasi-doublement de sa dotation. Cette orientation des dépenses ministérielles vers le développement des outils de formation de nouveaux ingénieurs ne peut que nous convenir.
Nous constatons d'ailleurs que cet effort se double, dans le cadre de la recherche-développement, d'un certain nombre de majorations des crédits du titre IV, heureusement sanctuarisés dans la fièvre comptable de la commission des finances, ce qui laisse à penser que, dans les domaines de la recherche et de l'innovation, il existe une volonté politique de réintervention de l'Etat, qui ne peut que nous agréer.
S'agissant des dépenses du titre IV, j'observe, non sans intérêt, les éléments d'une évolution plus contrastée des crédits, qui doit être examinée et interprétée. Ainsi, nous pensons que le montant des majorations de crédits dévolus à l'Agence nationale de valorisation de la recherche est encore insuffisant quand on connaît le rôle moteur que l'Etat doit et peut jouer en termes de mobilisation de la matière grise dans notre pays.
Nous pensons, en particulier, que l'intervention publique dans la mobilisation du secteur privé dans le domaine de la recherche-développement ne peut se cantonner, comme c'est trop souvent le cas aujourd'hui, à la dépense fiscale que constitue le crédit d'impôt recherche défini à l'article 244 quater B du code général des impôts. Il est, de notre point de vue, nécessaire de mobiliser les capacités financières respectives de l'Etat, des établissements publics d'enseignement ou à caractère industriel et commercial et des entreprises privées autour de projets à haute valeur ajoutée, susceptibles de porter le germe d'une nouvelle croissance économique et d'un développement durable.
Dans la conjoncture actuelle, il existe, par exemple, des besoins forts en matière énergétique, en matière de transport et de gestion des flux de transport, ou encore en matière de télécommunications - nous parlerons, pour résumer, des flux de transport d'informations - qui imposent que le budget de l'Etat soit plus opérant en ces domaines.
S'agissant des questions de normes de qualité, vous me permettrez, monsieur le secrétaire d'Etat, de ne pas apprécier positivement la réduction de la dotation de l'Association française de normalisation, l'AFNOR, cet établissement si cher à Boris Vian, dont le rôle est pourtant déterminant dans l'adaptation des normes de sécurité de nombreux produits industriels.
Sur un plan un peu plus local et personnel, je me permets de regretter que l'ensemble des dépenses du titre IV concernant le secteur des houillères connaisse une réduction des crédits, ajustés la plupart du temps à l'évolution de la situation du secteur.
Qu'il s'agisse, en effet, de la subvention accordée à Charbonnages de France ou des prestations assurées dans le cadre du statut minier, nous ne pouvons que marquer notre souci de voir mieux pris en compte les problèmes posés par la poursuite de l'exploitation charbonnière sur les sites demeurant en activité et l'intégration de la dimension houillère dans la démarche de politique industrielle que doit avoir notre pays.
Je ne peux, en la matière, et vous le comprendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, que ressentir une certaine émotion à l'annonce, en cette veille de la Sainte-Barbe, fête des mineurs, de la fermeture du puits Simon dans le bassin houiller lorrain.
Sous certaines conditions, la poursuite de l'exploitation charbonnière peut conserver une relative importance dans le contexte de notre politique énergétique.
J'ai indiqué que les crédits d'investissement du budget augmentaient assez sensiblement en matière de financement des activités de recherche et que nous nous félicitions de cette situation.
En ce qui concerne les crédits de reconversion, je me fais ici le porte-parole des élus du bassin minier du Nord - Pas-de-Calais pour me féliciter également de l'accroissement, même s'ils sont encore loin de répondre aux besoins, des crédits de reconversion des zones minières. Nous souhaitons, par ailleurs, que leur affectation fasse l'objet de la concertation la plus large, et ce dans l'intérêt bien compris des populations de ce bassin, dont la reconversion est loin d'être achevée.
A cet égard, je me permets également de souligner qu'il est nécessaire de connaître de manière plus précise encore l'ensemble des concours publics qui sont dévolus à ces zones de reconversion, quelle que soit leur nature - dépenses publiques ou dépenses fiscales - et leur ordonnateur - les collectivités locales, l'Etat, ou encore la Communauté européenne.
La gravité de la situation sociale et économique des régions concernées nécessite incontestablement une transparence plus grande encore des flux financiers visant à y remédier.
L'importance des besoins de formation et d'emploi ainsi que la nécessité d'inverser la dégradation de la situation démographique de cette région de notre pays ne peuvent, selon moi, s'accommoder d'une opacité sur les circuits de financement mobilisés.
Toujours à propos de ce domaine, je veux vous faire part, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'inquiétude des communes en ce qui concerne les concessions minières que le code minier leur imposerait et dont les conséquences sont trop imprévisibles et pleines de danger pour elles.
Je veux aborder aussi, brièvement, la situation difficile de l'industrie ferroviaire, qui souffre fortement de la baisse importante des commandes de la SNCF, baisse qui n'est pas compensée par la clientèle privée. Si la situation n'évoluait pas dans un sens plus favorable, cela ne serait pas sans conséquences graves pour l'emploi et pour cette industrie elle-même.
Je porterai désormais mon attention sur les crédits de la poste, des télécommunications et de l'espace.
Les crédits de ce département ministériel sont aujourd'hui marqués par deux priorités : d'une part, l'ensemble des dépenses afférentes aux modifications législatives propres au secteur des télécommunications et, d'autre part, la poursuite de l'effort de développement de notre industrie spatiale.
Je ne vous cacherai pas que nous apprécions de manière différenciée ces deux priorités.
Ainsi, nous nous félicitons de la poursuite du programme Ariane et du développement des activités du Centre national d'études spatiales, même si ces crédits sont ajourd'hui concentrés sous la compétence de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
S'agissant de la poste et des télécommunications, les données sont différentes.
On observe, en particulier, l'inscription dans les crédits du ministère de l'ensemble des dépenses de l'autorité de régulation et de l'agence nationale des fréquences.
On constate également une progression des crédits dévolus au financement de l'enseignement supérieur des télécommunications, dans la droite ligne de la « loiFillon » sur le statut de France Télécom.
Evidemment, la question principale qui nous est posée est aujourd'hui celle de l'ouverture du capital de France Télécom qui a rompu, de manière pour le moins discutable, avec cent ans de maîtrise publique exclusive sur le secteur de la poste et des télécommunications.
L'opération d'ouverture du capital s'est traduite, dans les faits, par un phénomène déjà constaté dans d'autres cas, celui de l'aller-retour.
On dit, en effet, que plus de 1 million de souscripteurs de titres France Télécom ont, dans les quinze jours qui ont suivi l'inscription du titre à la cote officielle de la Bourse de Paris, revendu les titres qu'ils avaient acquis.
Ce phénomène, bien connu et observé dans l'ensemble des opérations de privatisation qui ont été menées depuis 1993, laisse planer des menaces non négligeables sur le devenir de France Télécom.
Nous craignons, en effet, que ne se constitue rapidement un pôle d'actionnaires privés disposant d'un réel pouvoir d'inflexion des orientations de l'entreprise à travers la maîtrise d'une part significative du capital, et que cette situation ne finisse par dégrader le caractère public des missions de France Télécom.
Dans les faits, cette évolution semble d'ailleurs déjà se concrétiser, au travers de la forfaitisation des communications, par exemple.
Les données relatives à La Poste sont assez proches.
Nous sommes particulièrement attentifs aux enjeux de la négociation des nouvelles directives européennes sur les services postaux. Nous estimons que la France devrait affirmer, au cours de ces négociations, la spécificité et l'efficacité reconnue de son service public postal.
Nous avons en effet l'impression que l'on risque, dans le cas contraire, de nous imposer, en matière de service public postal, la même logique destructrice du service universel que celle qui a été appliquée aux télécommunications et qui fait d'un service public indispensable aux populations un enjeu de la concurrence et un instrument de marché.
Il est donc indispensable, selon nous, d'affirmer cete « qualité France » du service public postal, « qualité France » qu'une amélioration de la situation sociale de l'exploitant public - il emploie, à notre sens, trop de personnels précaires dont l'intégration doit être envisagée - permettrait d'ailleurs de renforcer.
Telles sont, monsieur le secrétaire d'Etat, les observations dont je tenais à vous faire part à l'occasion de l'examen de ces crédits.
M. le président. La parole est à M. Schumann.
M. Maurice Schumann. Mes chers collègues, l'excellente synthèse en quatre points dont nous sommes redevables à M. Christian Poncelet, président de la commission des finances, me permettra d'être très bref.
Je ne veux insister quelque peu que sur un point.
Il est évident, comme l'a dit M. le président de la commission des finances, que la principale des industries de main-d'oeuvre, l'industrie textile, souffre non pas seulement des atteintes portées à l'ensemble du secteur industriel ou des inquiétudes qui travaillent ce dernier, mais aussi des conséquences de l'annulation du plan dit Borotra, lequel avait, le 12 avril 1996, bénéficié de l'assentiment d'une majorité élargie dans les deux chambres du Parlement.
Ce que l'on n'a pas assez dit, peut-être, en dehors de cet hémicycle, c'est que la Commission des Communautés européennes, si elle est responsable de l'annulation du plan dit Borotra, l'avait été d'abord, je le dis en pesant mes termes, de la nécessité dans laquelle nous nous étions trouvés d'élaborer et d'adopter un plan de cette nature.
M. Gérard Braun. Tout à fait !
M. Maurice Schumann. J'apporte ici un témoignage.
Président du groupe de défense des industries textiles, fondé et toujours animé par M. Christian Poncelet, je me suis rendu deux fois à Bruxelles, où, comme ancien ministre des affaires étrangères, j'ai conservé des amitiés. J'ai exposé une situation qui paraissait évidente, à savoir que l'hémorragie de l'emploi se prolongerait dans l'industrie textile tant que des mesures ne seraient pas prises pour compenser les effets des dévaluations compétitives.
A mon grand regret, la Commission de Bruxelles, malgré les adjurations d'un certain nombre de hauts fonctionnaires, est demeurée sourde à nos appels. Pire encore, elle a nié obstinément les effets des dévaluations compétitives.
Dans ces conditions, il était absolument inévitable que nous nous trouvions, à un moment donné, dans l'obligation impérieuse de prendre une mesure, j'allais dire de salut in extremis, en tout cas de légitime défense, dont on oublie un peu trop qu'elle répondait à une éventualité annoncée, prévue, par la lettre même du traité de Rome.
M. Poncelet a eu parfaitement raison de rappeler que les effets du plan ont été positifs.
J'ai souvent entendu, ici même encore voilà deux jours, de la part de certain ministre que je ne nommerai pas, l'assertion suivante : « Mais enfin, le nombre des emplois créés grâce au plan d'allégement des charges sociales pesant sur les bas salaires a été très faible ! » C'est oublier qu'il y avait une hémorragie qui nous privait chaque mois de 1 000 emplois - je dis bien 1 000 emplois par mois. Il était prévisible qu'à l'expiration d'une année la chute des effectifs, qui, déjà, avait gravement affecté l'industrie textile, porterait sur plus de 10 000 salariés, probablement autour de 12 000.
L'arrêt de cette hémorragie a donc constitué en elle-même une justification éclatante, à laquelle s'ajoute d'ailleurs le fait, qui a été évoqué tout à l'heure, que 3 000 jeunes de moins de vingt-six ans ont pu être embauchés.
Au demeurant, on calculait, dans les derniers temps, que les économies qui étaient explicables par l'arrêt de l'hémorragie portaient sur des sommes correspondant aux indemnités de chômage qu'il aurait fallu verser non pas égales mais supérieures au coût d'application du plan lui-même.
Alors, je me tourne vers le Gouvernement et je lui dis très simplement ceci : vous ne pouvez pas ajouter aux inquiétudes que l'industrie textile partage avec d'autres une pénalité comme celle que représente l'annulation pure et simple du plan textile.
Votre devoir - je suis sûr que vous l'avez senti - est de compenser les effets qui ont été denoncés par le président Poncelet et que je dénonce à mon tour.
Je sais, nous savons, que des travaux préparatoires, des négociations, des colloques, vont permettre d'entreprendre cette tâche indispensable.
En conclusion, je dirai très simplement ceci : au cas où l'on n'aboutirait pas, dans un avenir rapproché, à la compensation intégrale des effets nocifs et destructeurs de l'abandon du plan, on risquerait - et je pèse mes mots - de voir un tiers des salariés de l'industrie textile allonger, dans les deux ou trois années qui viennent, le cortège déjà beaucoup trop long des demandeurs d'emploi.
Je vous connais assez, monsieur le secrétaire d'Etat, pour être sûr que ce risque, vous vous appliquerez à le conjurer et que, en tout état de cause, vous ne voudrez pas en prendre la responsabilité. D'avance, je vous en remercie. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Souplet.
M. Michel Souplet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, bien que je sois le seul intervenant de mon groupe, compte tenu de l'heure et du fait que tout a été dit, et bien dit, par les rapporteurs et par les orateurs qui m'ont précédé à cette tribune, je n'utiliserai que quelques minutes pour évoquer un seul problème, celui de la concurrence déloyale.
La loi de 1990 modifiant le statut de La Poste permet à celle-ci de distribuer des produits d'assurance dommage et non plus seulement des produits d'assurance vie et décès. Les sociétés d'assurances et les mutuelles se sentent menacées par cette possibilité qui est offerte à La Poste, possibilité qui serait dommageable pour nombre d'entre elles dans la mesure où les contraintes qui s'imposent aux assureurs et à cette entreprise publique sont très différentes.
Le monde de l'assurance est inquiet à la veille du renouvellement du contrat de plan entre l'Etat et La Poste. (Exclamations sur les travées socialistes.) En effet, rien ne justifie l'entrée sur le marché de ce nouveau concurrent.
M. Gérard Delfau. Si, la loi !
M. Michel Souplet. Le marché est bien pourvu et les besoins d'assurance sont satisfaits.
M. Raymond Courrière. C'est le libéralisme !
M. Michel Souplet. Faut-il introduire des entreprises publiques sur des marchés dont elles étaient jusqu'ici absentes ? Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, comment expliquer, alors que l'Etat a engagé la privatisation des dernières entreprises publiques en difficulté de ce secteur, que l'on fasse entrer sur le marché de l'assurance une autre entreprise publique ?
De même, si La Poste constate un manque à gagner dans sa mission de service public, ne sera-t-il pas de la responsabilité du Gouvernement d'assurer l'équilibre économique de La Poste par la dépense publique ?
Les conséquences économiques seront importantes, car l'on estime que chaque point de marché pris par La Poste aux autres entreprises correspondra directement à la suppression d'au moins mille emplois pour celles-ci.
Par ailleurs, alors qu'un décret en Conseil d'Etat fait obligation à La Poste de tenir une comptabilité analytique, celle-ci y déroge, de telle sorte qu'il est impossible de savoir si des transferts sont opérés de l'activité de service public vers les activités concurrentielles.
M. Gérard Delfau. Cela s'appelle de la péréquation !
M. Michel Souplet. Les acteurs du monde de l'assurance ne contestent pas l'entrée sur le marché de nouveaux concurrents, mais à condition que celle-ci se fasse dans les mêmes conditions pour tout le monde. Dans la mesure où elle bénéficie d'une position dominante liée à ses activités de service public, La Poste ne respecte pas les règles de concurrence. (Exclamations sur les travées socialistes.) De plus, en maintenant des agences sur l'ensemble du territoire, elle peut être très présente sur le terrain, avec les moyens qu'on lui connaît et dont ne peuvent disposer les sociétés d'assurance.
Voilà, exposé de façon brève, le problème que je souhaitais vous soumettre. Je sais que des discussions avec les professionnels de l'assurance et les mutuelles, le président de La Poste et le Gouvernement sont entamées. Les assureurs souhaitent le statu quo dans cette affaire tant que des garanties ne seront pas données en matière de concurrence.
Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, connaître la position du Gouvernement et je vous remercie par avance de la réponse que vous voudrez bien m'apporter. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Revol.
M. Henri Revol. Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne reviendrai pas sur les commentaires généraux concernant l'évolution et la structure de votre budget. Nos rapporteurs les ont excellemment développés dans leurs interventions et dans leurs rapports écrits.
Je ferai, en premier lieu, une remarque sur l'innovation, dont on sait combien elle doit être prioritaire pour notre pays et combien elle est pour nos entreprises un défi stratégique majeur.
Il faut, à cet égard, mettre à l'actif du Gouvernement précédent le lancement d'un plan ambitieux dans ce domaine, fondé sur un diagnostic pertinent et des moyens adaptés. Notre rapporteur pour avis l'a rappelé.
Vous avez vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, confirmé certaines orientations. Je souhaite vous soumettre deux réflexions.
Là où les ingénieurs américains envisagent de créer leur entreprise ou de participer à la création d'une entreprise, les diplômés de nos écoles d'ingénieurs sont trop attirés par l'Etat, la grande entreprise, quand ils ne sont pas de plus en plus attirés par l'étranger. Que pouvons-nous faire concrètement, dans nos formations, pour développer l'initiative, apprendre les métiers d'entrepreneur ?
La propriété industrielle permet de valoriser et de défendre l'innovation. La stagnation du nombre de brevets déposés par les entreprises françaises est un signe inquiétant pour notre capacité d'innovation. Par ailleurs, le système de propriété industrielle national et européen apparaît complexe, coûteux et d'une efficacité discutable. Que comptez-vous faire pour réformer ce système et l'adapter au mieux aux besoins des entreprises ?
Je souhaite, ensuite, vous interroger sur quatre dossiers.
Le premier concerne une entreprise implantée dans mon département de la Côte-d'Or, à savoir Thomson-CSF.
L'annonce de la suppression de 316 postes dans les trois unités de la société Thomson Passive Components, filiale de Thomson-CSF, a soulevé l'inquiétude des salariés et des élus de la Côte-d'Or.
Faut-il rappeler que cette branche du groupe Thomson représente dans notre département 1 200 emplois ? Il serait souhaitable qu'une stratégie insustrielle à moyen et à long terme soit clairement affichée par les dirigeants de Thomson, afin que la pérennité des sites et des emplois de la Côte-d'Or soit assurée. L'activité multimédia pourrait être ainsi confortée par l'implantation des deux projets de plate-forme logistique européenne sur lesquels le groupe Thomson réfléchit actuellement.
Je souhaite que vous puissiez m'éclairer sur la position de l'Etat - qui devrait rester le premier actionnaire de cette entreprise - sur ce dossier.
Le second dossier concerne les recherches liées à l'application de la loi de 1991 sur les déchets radioactifs.
La décision du Gouvernement d'abandonner le surgénérateur Superphénix suscite, comme vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, l'hostilité de la majorité des sénateurs.
J'ai eu l'occasion de dire à plusieurs reprises, au nom de mes collègues Républicains et Indépendants, et au nom de la majorité sénatoriale, lors de la création de la commission d'enquête sur la politique énergétique de la France, combien cette décision apparaissait contraire aux intérêts de notre pays. L'abandon de Superphénix menace notre leadership sur la technologie des réacteurs à neutrons rapides, alors que d'autres pays tels que le Japon, la Russie, la Chine, poursuivent ou commençent leurs expérimentations,
Cette décision nous est apparue trop idéologique et destinée à satisfaire symboliquement les équilibres de votre majorité plurielle et les revendications des Verts, au détriment de considérations d'intérêt général.
L'une d'elles est la nécessité absolue de poursuivre les recherches concernant la gestion des déchets radioactifss, notamment l'axe premier de la loi de 1991 relatif à la transmutation des actinides, sur lequel la centrale de Creys-Malville avait engagé des programmes.
Nous considérons que le dialogue démocratique n'a pa eu lieu sur ce dossier, et que M. le Premier ministre n'a pas appliqué sa méthode de gouvernement. Nous craignons que certains courants antinucléaires au sein de la majorité actuelle ne fassent pression pour ôter à la France ses atouts technologiques. Sont-ils d'aillleurs logiques avec eux-mêmes ? Le grand enjeu environnemental mondial actuel est, en effet, la lutte contre l'effet de serre et, sur ce plan-là, grâce au programme électronucléaire, la France est l'un des pays les mieux placés. En taux de rejet de CO2 par tête d'habitant, nous occupons la deuxième place en Europe, et nous rejetons trois fois moins que les Etats-Unis.
Si les pays de l'OCDE avaient adopté une politique énergétique analogue à celle qu'a décidée la France après le premier choc pétrolier, on aurait enregistré des diminutions très importantes d'émissions de CO2.
Permettez-moi une petite digression au sujet de la menace du réchauffement de la planète. Vous l'avez peut-être remarqué, avec le brusque refroidissement qui s'est abattu sur la France, les informations sur le sommet de Kyoto ont pratiquement disparu de nos médias depuis quarante-huit heures ! Et puis, on peut se demander, avec M. Quilès - mais il vrai que cette interrogation s'adresse à votre collègue des transports - comment un léger refroidissement en France a pu mettre en défaut la technologie des transports aériens. Il est bon de s'intéresser au réchauffement de la planète, mais n'oublions pas les refroidissements ! (Sourires.) Mais je ferme la parenthèse.
J'ai été rassuré par la récente prise de position gouvernementale mettant fin aux polémiques sur la priorité qui aurait pu être donnée au stockage en surface des déchets, au détriment des deux autres voies que la loi de 1991 entend explorer. Le Gouvernement s'en tient à la loi, qui s'impose à tous. Cela nous agrée.
Mais je voudrais être complètement rassuré sur l'avenir et être sûr que cette ligne sera bien tenue jusqu'à 2006, date prévue pour la décision du Parlement.
Nous devrions connaître - tout récemment - vous-même ou M. le Premier ministre l'avez indiqué - les modalités de la fermeture de Superphénix dans les jours qui viennent. Nous espérons que le Gouvernement suivra la voie de la sagesse, le rapport de ses experts... et les avis des sénateurs. La seule solution équilibrée et de bon sens, à nos yeux, serait de consommer les deux charges de combustible actuellement en place ou en réserve, déjà payées, afin de poursuivre les recherches liées à la transmutation, et de s'arrêter ensuite.
Si ce n'est pas cette solution qui devait être retenue, nous nous attacherions à suivre de très près les enjeux de la reconversion sur place et les opérations de démantèlement. Considéreriez-vous possible de rapatrier les recherches dans Phénix, dont on connaît l'usure ? J'insiste sur la nécessité de donner en 1998 aux recherches sur la transmutation les crédits nécessaires ; ils s'élevaient en 1997, pour mémoire, à 400 millions de francs. Pouvons-nous compter sur votre vigilance sur ce point ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Oui !
M. Henri Revol. Globalement, je reconnais, et mon groupe avec moi, que vos récents développements sur la politique énergétique française sont de nature à lever quelques hypothèques, même si le constat de la dépendance de la France à l'égard du nécléaire reste un peu abrupt. Nous n'avons pas le même diagnostic que vous sur la filière des surgénérateurs, même si nous reconnaissons que, technologiquement, les surgénérateurs qui pourront être utiles au parc dans quelques dizaines d'années ne seront probablement pas les héritiers directs de Superphénix. Vous dites cependant que le Gouvernement doit se donner tous les moyens de laisser les choix énergétiques ouverts à l'horizon 2010. Fermer Superphénix est en contradiction avec cette assertion.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Et Phénix ?
M. Henri Revol Nous demandons depuis longtemps un débat au Parlement sur la politique énergétique. Si mes informations sont exactes, il aura lieu à l'Assemblée nationale. Pouvons-nous espérer qu'il aura également lieu au Sénat ?
Le troisième dossier que je souhaite aborder concerne le CEA. Je vous ferai la même remarque qu'à votre collègue en charge de la recherche sur la nécessité de procéder à des rebudgétisations, qui sont indispensables pour le financement du CEA. Je sais qu'elles commencent à être engagées et je m'en réjouis, considérant que la voie suivie ces dernières années était dommageable.
Il faudra poursuivre, car le CEA a dû s'endetter à hauteur de 285 millions de francs, et il devra, en 1998, de nouveau mobiliser 525 millions de francs auprès de CEA-Industrie.
Or la situation est particulièrement critique, dès cette année, car les réserves de CEA-Industrie ne suffisent pas à assurer les besoins de financement exceptionnel. Le CEA ne peut plus obtenir de CEA-Industrie des ressources exceptionnelles qu'en procédant à des cessions d'actifs, qui ne sont pas décidées.
Je dirai enfin un mot du textile et de la remise en cause du plan d'aides mis en place par le précédent gouvernement.
Nous avons tous ici, sur ces travées, reçu des courriers de responsables d'entreprises manifestant leur inquiétude. Il nous a semblé apparu de mauvaise méthode de déstabiliser ces entreprises par des annonces de suppression d'aide, avant d'avoir mis au point des mesures de substitution. Quant à l'attitude de l'Etat français vis-à-vis de la Commission européenne, je trouve que le gouvernement socialiste fait du zèle, mais à l'envers. Les dévaluations compétitives de certains de nos partenaires européens, qui ont fortement handicapé nos entreprises, ne sont-elles pas condamnables ? Tous les éléments de l'environnement concurrentiel méritent d'être versés au dossier.
Le gouvernement précédent était sur la voie de l'extinction du contentieux avec la Commission, grâce à l'extension des réductions de charges à l'ensemble des branches. Le fait que les aides puissent être poursuivies pour les plus petites entreprises, sur trois ans, comme Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité l'a récemment précisé, montre qu'un arrangement était possible. Pouvez-vous confirmer devant le Sénat, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous mettez tout en oeuvre pour éviter le remboursement des aides reçues ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous continuerons à exercer notre vigilance sur tous les dossiers industriels et énergétiques.
Le groupe des Républicains et Indépendants suivra les recommandations de la commission des finances sur ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Christian Poncelet président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'exercice que je tente à cette tribune est délicat. Je dois parler du budget de la poste, alors qu'au sens strict du terme il se monte seulement à 2 643 millions de francs. En comparant ce montant à celui du chiffre d'affaires de l'entreprise publique, représentant 84 milliards de francs en 1996, on voit déjà les limites de l'exercice.
Pourtant, arrêtons-nous un instant sur ces crédits publics.
Je remarque d'abord des moyens humains insuffisants pour la direction des postes et télécommunications, au point qu'il y a désormais un risque d'effacement de la puissance publique dans un secteur livré à une concurrence exacerbée, même pour une grande partie des activités de La Poste.
Je constate ensuite une aide à la presse qui continue à laisser l'essentiel de la charge à La Poste : il faudra plusieurs années pour remonter la pente.
Je note, enfin, une subvention d'équilibre à la très remarquable Ecole nationale supérieure des postes et télécommunications, dont le montant est lié, comme autrefois, au nombre d'élèves accueillis ; sachons toutefois que les conditions de recrutement de l'établissement ont changé avec la modification du statut de France Télécom.
Au total, voilà un budget qui devrait ravir la majorité du Sénat, puisqu'il est stable par rapport à celui de l'an passé.
A vrai dire, il s'agit d'un budget de transition, avant l'échéance cruciale qui attend la poste avec la signature du contrat de Plan en 1998. C'est alors que les choix seront faits.
D'ici là, il n'y aurait donc rien à dire ? Bien au contraire : c'est le moment de poser quelques questions.
La poste est, selon les termes mêmes de la loi de 1990, un « opérateur public autonome ». A ce titre, elle concourt à un ensemble de missions du service public, résumées par les concepts d'aménagement du territoire et de cohésion sociale. A ce titre aussi, elle est placée sous l'autorité politique du Gouvernement, qui définit la stratégie qu'elle doit suivre en tant qu'« opérateur public », tout en respectant son « autonomie » de gestion, puisque nous ne sommes plus au temps du « budget annexe ». Equilibre subtil, qui ne me paraît pas avoir été respecté, ces dernières années, et auquel il faut revenir d'urgence.
Permettez-moi une remarque préalable : il y a plusieurs lectures possibles de la situation de La Poste aujourd'hui.
L'une met l'accent sur le redressement attendu de ses comptes en fin d'exercice, sur le désendettement mené à marches forcées, sur les 1 000 milliards de francs d'encours de ses services financiers, sur le succès commercial de quelques-unes de ses filiales, dont Chronopost est le fleuron.
L'autre dénonce les blocages et le climat social dégradé, pointe l'incapacité générale à dialoguer avec les élus locaux, signale l'âpreté de la concurrence et le risque d'une remise en cause de la directive communautaire, tout en faisant l'addition des charges indues supportées par l'entreprise publique. Cette lecture-là peut être résumée par le titre du rapport de notre collègue M. Larcher : « Sauver La Poste ». Je partage l'inquiétude du diagnostic et beaucoup de ses analyses, mais je diverge fondamentalement sur son objectif : une privatisation à terme, de l'entreprise publique.
Ce que je voudrais montrer, maintenant, c'est qu'il faut sortir au plus vite du double langage et du décalage qui ont caractérisé, depuis 1993, les déclarations gouvernementales, si on les rapporte aux pratiques de la poste. Je plaide, en somme, pour un sursaut du politique face à un opérateur public malade d'une certaine irresponsabilité des pouvoirs publics.
Voici le constat que je fais à partir de mon observation quotidienne et d'innombrables entretiens avec les postiers et avec mes collègues maires et parlementaires.
La dérive par rapport à l'esprit de la loi de 1990 n'a pas cessé de s'accentuer ces dernières années. A l'abri de la rhétorique gouvernementale sur les fonctions de service public de La Poste, une partie de sa haute direction a poursuivi méthodiquement une tentative de réorientation fondamentale. C'est ainsi que l'on constate une filialisation de plus en plus poussée ; une priorité accordée aux services financiers sur les autres prestations, notamment le courrier ; un « assèchement » de la présence en milieu rural et un faible effort d'implantation dans les quartiers urbains sensibles ; la précarisation des personnels et, plus généralement, une gestion sociale inspirée par la méthode anglo-saxonne, avec, d'une part, un encadrement recruté à l'extérieur et bien rémunéré et, d'autre part, une pression énorme sur les salariés de la fonction publique, autrement dit sur le gros de la troupe, au point que les dépressions nerveuses y sont monnaie courante.
Trois faits, entre autres, illustrent ces dysfonctionnements.
Premier exemple, la mise en place d'un centre de tri à Ozoir-la-Ferrière, où était délibérément bafoué le code du travail. Il nous a fallu adresser une lettre, monsieur le secrétaire d'Etat, en juillet dernier, pour que La Poste consente à faire cesser cette situation choquante.
Deuxième exemple, la campagne de transformation des agences postales en agences communales. D'un côté, le gouvernement Balladur annonce à grands fracas, en 1993, un « gel des fermetures en milieu rural », antienne reprise par le gouvernement Juppé. De l'autre, La Poste met en place une campagne de transfert du fonctionnement des agences postales aux communes les plus petites et les plus pauvres.
Certes, La Poste s'engage, par écrit, à rembourser « franc pour franc » le salaire de l'employé, devenu communal, chargé de gérer l'agence pour le compte de l'entreprise publique, mais la convention ne vaut que pour trois ans, parfois moins. Une fois ce délai passé, l'accord sera révisable sur l'initiative de La Poste. De plus, la rémunération est calculée à partir de l'activité postale moyenne, mais selon un barème opaque pour la municipalité, d'où l'impression d'un jeu de dupes.
J'en viens à mon troisième et dernier exemple : le gouvernement Juppé s'est posé en défenseur du livret A, principal produit d'appel des services financiers de La Poste et des caisses d'épargne, mais, dans le même temps, sous la pression du lobby bancaire, il a créé le livret-jeunes, qui, offrant un taux attractif, entre en forte concurrence avec le livret A.
Comme toutes les banques ont accès à ce nouveau produit, la décision a provoqué, en 1996, une formidable hémorragie des encours financiers de l'épargne populaire de La Poste. Par voie de conséquence, elle a conduit l'entreprise publique à la tentative de désengagement décrite plus haut. Il suffirait que l'actuel gouvernement cède - mais il ne le fera pas - à la demande réitérée de l'Association française des banques et baisse substantiellement le taux de rémunération du livret A pour que toute l'activité postale en milieu rural, réduite au seul courrier, ou presque, cesse d'être rentable.
Comme on le voit par l'analyse de ces trois exemples, je n'exonère pas la haute hiérarchie de ses responsabilités, mais j'impute la charge la plus lourde aux politiques : la pratique du double langage chez les gouvernements précédents a autorisé implicitement les dirigeants de l'entreprise à trouver d'autres solutions pour rétablir des comptes qui viraient au rouge et pour tenter d'assurer un avenir à La Poste. Mais quelle poste ?
Invoquant le déséquilibre de son bilan financier et l'abri de ces gains nécessaires de productivité, la haute direction de La Poste a pu avancer ce qui semble être sa vraie stratégie : aller vers une privatisation rampante, à la façon de France Télécom.
L'outil choisi est la « mise en branches » et la séparation des « métiers », venant consacrer l'autonomisation en cours des filiales. A terme, il y aurait un holding qui coifferait mal des entités ayant vocation à devenir plus indépendantes : réseau, services financiers, courrier, colis.
L'étape intermédiaire serait la constitution d'une branche « Réseau grand public », qui concentrerait entre ses mains l'essentiel des décisions et des recettes.
Viendrait ensuite le constat que certaines branches ou directions - courrier et réseau des bureaux, notamment - ne sont décidément pas rentables en elles-mêmes et que La Poste doit s'en séparer ou en faire assumer le coût intégral par le contribuable.
Ainsi, on abandonnerait un montage qui a fait ses preuves : faire payer la péréquation du courrier - coût du timbre - l'implantation géographique maximale - zones rurales - et la fonction de cohésion sociale - quartiers urbains sensibles - par les activités les plus rentables, à savoir des services financiers et des bureaux de poste en milieu urbain ou commercial. Et l'on procéderait à un transfert de charges massif au budget de l'Etat, avant qu'en quelques lois de finances on abandonne purement et simplement ce financement jugé insupportable par le contribuable !
Ce scénario de privatisation rampante est politiquement inacceptable. Il est, de surcroît, une hérésie économique, ce que je ne puis démontrer ici, faute de temps.
C'est bien à un choix stratégique qu'il va falloir procéder. Les postiers et les élus locaux attendent beaucoup de vous, monsieur le secrétaire d'Etat : un pari raisonné sur la générosité et la réactivité d'une entreprise publique à la fois performante et assumant ses missions d'intérêt général. Encore faut-il dégager à cette fin les moyens nécessaires. C'est tout l'enjeu de la négociation en cours. Vous pouvez compter sur l'appui du Parlement. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Le Grand.
M. Jean-François Le Grand. Monsieur le secrétaire d'Etat, les rapporteurs ont excellemment formulé l'essentiel des observations que soulève nécessairement votre projet de budget. C'est la raison pour laquelle je n'y reviendrai pas et résumerai mon propos.
Cela dit, je souhaiterais vous poser trois questions précises : la première a trait à Creys-Malville ; la deuxième concerne l'ambiguïté du Gouvernement en matière de politique nucléaire ; la troisième porte sur la construction navale.
S'agissant tout d'abord de Creys-Malville, je supprimerai tous les attendus et ne reviendrai pas sur tout ce qui a été dit tout à l'heure, d'ailleurs excellemment, par notre collègue Henri Revol. J'en viendrai directement à la formulation de l'observation et de la question.
Chacun a bien senti que cette décision était avant tout d'ordre politique et destinée à satisfaire les exigences d'une majorité plurielle... Mais l'urgence du signe politique ne l'a-t-elle pas emporté sur le bon sens, la sagesse, la sécurité, toutes ces vertus ayant par ailleurs en commun la nécessité du respect du facteur temps ?
Prenons comme hypothèse que le surgénérateur, qui à l'origine avait été conçu pour pouvoir faire face à une éventuelle surenchère des producteurs d'uranium, n'est plus nécessaire : la réponse, quelle qu'elle soit, doit procéder d'un vrai débat politique. C'est la raison pour laquelle je me réjouis tout particulièrement de la décision du Sénat de créer une commission d'enquête sur la politique énergétique de notre pays.
Toujours dans le cadre de l'hypothèse de départ, si, au terme de cette réflexion, il apparaissait qu'il faille arrêter Superphénix, alors il serait sans doute utile de brûler le premier, puis le deuxième coeur nucléaire. On aurait alors le temps de mettre au point les procédures administratives de fermeture et de régler les problèmes de stockage.
Dans votre décision politique hâtive, que faites-vous de ces procédures ? Que faites-vous des cinq mille tonnes de sodium ? Où les stockez-vous ? Sur le site, ou à Soulaisnes, dans l'Aube, au risque d'ailleurs de saturer ce site de stockage aux deux tiers de sa capacité ? Quid alors du reste des capacités de ce site ? Avez-vous procédé aux déclarations d'utilité publique qui s'imposent ?
Votre décision est contraire à la sagesse et à la nécessaire sécurité et même, d'une certaine manière, elle est antidémocratique. Vous avez délivré un signe, satisfait un symbole ; c'est l'exemple même de la décision politique qui vient polluer le débat scientifique, exacerber de vieilles peurs, inquiéter les populations et les travailleurs du nucléaire...
La réalité rattrapera sans doute ce gouvernement, monsieur le secrétaire d'Etat. On ne peut tricher ni avec la science, ni avec la sécurité encore moins avec l'opinion publique !
M. Henri Weber. Mais il y a la santé !
M. Raymond Courrière. Oui, la santé !
M. Jean-François Le Grand. Autrement dit, on peut tromper tout le monde un peu de temps, un peu de monde tout le temps, mais, mes chers collègues, jamais tout le monde tout le temps !
M. Gérard Delfau. Oh là là !
M. François Trucy, rapporteur spécial. Très bien !
M. Jean-François Le Grand. Le deuxième point concerne l'ambiguïté du Gouvernement en matière de politique nucléaire.
Je vous avais interrogé, monsieur le secrétaire d'Etat, le 13 octobre dernier sur La Hague, sur la désinformation orchestrée par Greenpeace et sur la question de savoir quelle était la vraie position du Gouvernement. A l'époque, vous m'avez répondu clairement que c'était celle qui était exprimée par M. le Premier ministre et par vous-même ; j'en avais été satisfait.
Que penser alors de l'attitude de Mme Voynet lors de sa visite à l'usine de Flamanville, à laquelle vous participiez voilà quelques jours ?
Ni les élus locaux ni les élus nationaux n'ont été conviés à la réunion de travail à l'exception d'un conseiller régional écologiste. Le président de la commission d'information lui-même, le député Claude Gatignol, a dû rester à la porte de la salle de réunion ! Est-ce là une attitude normale dans un pays démocratique, surtout lorsqu'on se veut le champion de la transparence ?
C'est là une attitude inadmissible et qui, je puis vous l'assurer, a choqué. Je crois savoir que cela n'a pas été de votre fait, et je vous en donne acte, mais je suis dans l'obligation de vous exprimer notre indignation.
Dans la mesure où Mme le ministre de l'environnement continuerait de donner l'impression de vouloir mener une politique partisane, de privilégier ses amis avant l'intérêt général, peut-être pourriez-vous lui susurrer à l'oreille ce que disait voilà quelques années M. Chevènement : Quand on est ministre - et je traduis - on se tait ou on démissionne.
Le dernier point que je voudrais aborder concerne, monsieur le secrétaire d'Etat, la construction navale.
La France est un pays de tradition maritime, mais a le tort de l'ignorer trop souvent. C'est là un sujet dont mon collègue Josselin de Rohan, président du groupe du RPR, aurait d'ailleurs aimé traiter devant vous. Je le fais en son nom.
Est-ce l'effet d'une indifférence nationale ? Toujours est-il que le Gouvernement a décidé de mettre fin au régime d'exonération fiscale de la marine marchande, appelé quirats.
L'argument principal utilisé par votre collègue M. Sautter dans cette enceinte, il y a quelques jours, était : « Ça coûte 5 millions de francs par emploi ! ».
Pourquoi a-t-il omis dans son décompte les emplois consolidés dans la construction navale, qui étaient tout bonnement comptés pour zéro ?
Il y a de quoi être inquiet puisque les 2 milliards de francs de commandes que le système des quirats a généré pour les chantiers navals français ont permis de consolider 4 700 emplois dans les chantiers eux-mêmes et dans les industries connexes - et, pour ne citer que les Chantiers de Lorient et Leroux Naval, il y a encore une dizaine de dossiers en attente, déposés avant le 15 septembre - tandis que les arsenaux sont confrontés aux difficultés que l'on sait.
Certes M. Strauss-Kahn a déclaré, le 27 septembre dernier, dans Ouest-France : « S'il faut aider la navale, faisons-le directement. » Dont acte !
Oui..., mais le 1er octobre la Commission de Bruxelles a présenté une proposition de règlement du Conseil prévoyant l'abolition des aides au contrat après le 31 décembre 2000.
Monsieur le secrétaire d'Etat, saurez-vous tenir tête à cette Europe qui veut aligner la construction navale sur les normes de l'OCDE ? Un tel alignement au prochain Conseil, prévu le 7 mai, serait choquant quand on sait, par ailleurs, que l'Assemblée nationale a tout récemment émis un avis négatif sur cette résolution.
Ce serait d'autant plus choquant qu'on apprend aussi cette semaine que le FMI, dont la France est partie prenante, va aider la Corée du Sud, pays en partie responsable du déséquilibre des marchés maritimes mondiaux, pays qui a financé l'expansion colossale de sa construction navale sans égard pour les réalités du marché et grâce à des créances douteuses.
M. Henri Weber. C'est vrai !
M. Jean-François Le Grand. En Europe, chaque fois qu'un Gouvernement vient secourir ses chantiers navals, la Commission tente de faire réduire ses capacités. Pouvez-vous nous donner l'assurance, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il en sera de même en Corée du Sud et qu'on ne s'en tiendra pas seulement, comme d'habitude, à des considérations purement financières, mais que les considérations industrielles seront aussi prises en compte ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, l'emploi, c'est aussi dans mon département - et plus particulièrement dans la région de Cherbourg, où les Constructions mécaniques de Normandie sont le premier employeur privé - ma principale préoccupation. Les Constructions mécaniques de Normandie pourraient embaucher à condition qu'elles aient accès au protocole franco-indonésien. Je ne vois pas ce qu'il y aurait d'illégitime dans cette demande, surtout quand je tourne les yeux vers nos voisins européens.
Pourquoi nombre d'Etats européens utilisent-ils ce type d'aide et pas nous ? Pourquoi l'inscription des navires de recherche indonésiens sur le protocole français traînet-elle indéfiniment en longueur ? Cherche-t-on à tout faire passer en aide directe ? Ce serait, monsieur le secrétaire d'Etat, une politique plutôt maladroite et sûrement contraire à l'emploi.
Nous comptons donc sur vous, monsieur le secrétaire d'Etat, pour que les navires ne soient pas exclus des protocoles financiers d'aide au développement. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais intervenir rapidement sur deux sujets qui concernent votre projet budget.
Auparavant, je regretterai l'organisation gouvernementale, qui réduit le secteur industriel à un secrétariat d'Etat. Je ne crois pas que vous soyez gagnant à être placé sous la tutelle de Bercy ! Pour défendre les entreprises, pour défendre l'industrie, mieux vaut avoir une dialectique avec le ministère de l'économie et des finances plutôt qu'une tutelle. Mais c'est une conviction personnelle ! (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Je souhaite naturellement, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'évolution de votre travail puisse vous conduire à la promotion qui vous permettra de défendre avec plus de force la cause industrielle.
M. Henri Weber. L'avenir le dira !
M. Jean-Pierre Raffarin. Le premier sujet sur lequel je souhaite intervenir est relatif à la déception que suscitent les crédits du secrétariat d'Etat à l'industrie consacrés au développement du véhicule électrique.
Vraiment, peut-on dans ce pays alerter la population au point de mettre en place en quelques heures une procédure de circulation alternée dans la capitale, montrer combien la pollution aujourd'hui est un problème préoccupant, et laisser la recherche et la mobilisation en faveur du véhicule électrique à un degré fort modeste ?
Un sénateur du RPR. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin. Il se trouve que j'ai eu l'occasion, avec quelques collègues, d'assister à Osaka au grand symposium du véhicule électrique. Nous avons eu une conférence de M. Toyoda, président de Toyota. Il nous a expliqué combien le véhicule thermique était polluant, combien il fallait se méfier de ces véhicules thermiques, qui, vraiment, risquaient de porter atteinte aux équilibres naturels fondamentaux de nos pays. Si M. Toyoda dit cela, n'est-ce pas parce qu'il a déjà dans ses cartons les véhicules de l'avenir ? Réfléchissons à cela !
Or, aujourd'hui, où sont les meilleures batteries ? Sans doute à la SAFT. Où sont les meilleurs moteurs ? Ils sont partout, mais il y en a notamment chez Leroy-Sommer, en Poitou-Charentes. Où sont les meilleurs carrossiers ? Chez Heuliez, en Poitou-Charentes ? (Sourires.) Mais on en trouve aussi ailleurs.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Dans les Vosges !
M. Jean-Pierre Raffarin. Dans les Vosges et ailleurs !
Alors qu'il existe vraiment une capacité française en ce domaine, peu d'efforts sont accomplis en faveur du véhicule électrique.
Je sais qu'une mission de réflexion a été confiée par M. Allègre, à un éminent spécialiste. Mais le département de l'industrie devrait vraiment s'investir à un autre degré sur cette question et, d'abord, sur la recherche fondamentale, pour que nous puissions dépasser le stade que nous avons déjà atteint.
Les nouvelles batteries permettent déjà une autonomie de 200 kilomètres. Il faut, grâce à la recherche, aller plus loin avec nos industriels.
Pour cela, il faut investir dans la recherche et établir un vrai programme national de recherche sur les batteries.
M. Gérard Delfau. Il fallait y penser plus tôt !
M. Jean-Pierre Raffarin. Nous y avons pensé puisque le programme VEDELIC a été créé. Je vous ferai parvenir une documentation, mon cher collègue !
Il faut aller au-delà, notamment pour essayer d'organiser une mise en marché plus satisfaisante.
Il faut également mobiliser le concours de tous. EDF fait des efforts, mais peut-être cette société peut-elle en faire plus. Les collectivités territoriales font des efforts, mais peut-être peuvent-elles en faire plus. L'Etat, avec sa politique fiscale, peut lui aussi faire mieux.
Bref, il est nécessaire de réunir une table ronde pour engager une véritable mobilisation et favoriser une meilleure mise sur le marché du véhicule électrique.
Cette mobilisation va dans l'intérêt de l'industrie automobile française et de l'ensemble de notre économie. Le véhicule électrique, c'est un secteur dans lequel notre pays peut être en avance, c'est un sujet qui peut rassembler tous les élus, c'est un thème sur lequel peut s'engager une mobilisation nationale forte, valorisante pour la recherche française, mais aussi pour l'industrie, et bénéfique pour l'environnement et l'emploi.
Quand je vois nos amis écologistes,...
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Ce sont nos amis !
M. Jean-Pierre Raffarin. Certes, mais, vous le savez bien, il y en a de tous bords. C'est d'ailleurs un avantage dans les régions, et ce n'est pas inutile en cette saison !
Aujourd'hui, les écologistes se mobilisent sur le GPL et sur des énergies de substitution, qui offrent des avantages, qui constituent des progrès, mais qui ne sont pas au niveau de pollution zéro. Or le véhicule électrique, lui, atteint ce niveau de pollution zéro.
Certes, je le sais, derrière, il y a l'industrie nucléaire ! Mais justement, étant donné les choix que nous avons faits et les options qui ont été prises, il faut affirmer le véhicule électrique non seulement comme un progrès pour la qualité de la vie, mais aussi comme un progrès pour l'industrie et pour l'emploi.
Je vous invite donc, monsieur le secrétaire d'Etat, à prendre en considération cette orientation dans votre activité ministérielle au cours de l'année 1998.
Le deuxième sujet que je souhaite aborder concerne l'allégement des charges sociales sur les bas salaires.
Au-delà des polémiques, souvent médiocres, qui ont été développées à propos du plan Borotra - il ne s'agit pas d'accuser tel ou tel dans ce dossier - il faut regarder la réalité.
Contrairement à ce que j'ai souvent entendu, je considère, je le dis avec conviction, que l'allégement des charges sociales sur les bas salaires, pour les industries du textile comme pour un grand nombre d'industries, est une mesure très importante, qu'il convient de soutenir.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. J'en suis d'accord !
MM. Christian Poncelet, président de la commission des finances et Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin. J'ai souvent entendu dire que l'allégement des charges sociales sur les bas salaires n'était pas une bonne mesure économiquement parlant. Selon moi, c'est une bonne mesure, qui a eu de bons résultats.
Par conséquent, ne faisons pas en sorte que cette mesure soit, à l'avenir, liée à de nouvelles contraintes pour les entreprises. Ces entreprises sont en effet fragilisées...
M. le président. Monsieur Raffarin, je vous prie de conclure.
M. Jean-Pierre Raffarin. Les entreprises sont fragilisées, disais-je, du fait de la situation économique, parce que, pour leurs concurrents, le SMIC est à 840 francs et la durée hebdomadaire du travail de quarante-huit heures !
Sur ce sujet, il faut rassembler les énergies pour affirmer que, pour une politique de l'emploi, l'allégement des charges sociales sur les bas salaires reste une priorité. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Courrière.
M. Raymond Courrière. Monsieur le secrétaire d'Etat, la haute vallée de l'Aude compte environ 42 000 habitants, soit 14 % de la population du département pour 30 % de la superficie de celui-ci.
Sa population a diminué de 2 % entre les recensements de 1982 et de 1990, alors que, dans le même temps, celle du département augmentait de 6 %. De plus, elle est extrêmement vieillissante, puisque 33 % des habitants ont plus de soixante ans.
De 1982 à 1990, la population active a diminué de 10 %, et le taux de chômage a été multiplié par quatre entre 1975 et 1990. Le nombre des demandeurs d'emploi est ainsi passé, au cours de cette période, de 628 à 2 492.
Les 13 500 actifs sont employés pour 54 % d'entre eux dans le tertiaire, pour 21 % dans l'industrie, pour 17 % dans l'agriculture et pour 8 % dans le bâtiment.
L'agriculture a perdu 28 % de ses emplois entre les deux recensements, mais c'est surtout la tradition industrielle de la haute vallée de l'Aude qui est en train de disparaître. En effet, ce secteur a perdu 31 % de ses emplois, ce qui représente environ 1 000 emplois sur la période considérée, et 7 % de ses entreprises.
Ce phénomène s'est encore accentué avec les problèmes rencontrés dans le domaine de la chaussure par les entreprises Myrys et Chausseria, ainsi que par l'entreprise Formica. Ce sont environ 150 emplois qui ont encore été perdus.
Ce rythme d'un millier d'emplois industriels perdus entre chaque recensement avait malheureusement déjà été constaté dans le passé. Il suffit de rappeler que l'industrie chapelière représentait encore, à la fin des années soixante-dix, 1 200 emplois, contre seulement une trentaine aujourd'hui.
Bien sûr, il s'agit d'un petit territoire, mais, au fil des ans, il a vu son tissu industriel disparaître, ce qui, proportionnellement, a le même impact que les grandes mutations industrielles qui ont pu être constatées ailleurs.
Il faut en outre souligner que les emplois offerts sur le territoire de la haute vallée de l'Aude sont moins durables et beaucoup plus agricoles qu'à l'échelon départemental. Moins de 50 % des offres d'emplois de cette zone concernent des emplois durables, alors que ce chiffre atteint 70 % pour le bassin carcassonnais, 27 % des emplois proposés n'étant qu'occasionnels.
Ce déclin des activités industrielles traditionnelles n'est que très partiellement compensé par le développement des industries « de niche », telles que l'isolation, la chimie ou la communication.
Les communes de Limoux et de Quillan ainsi que le canton de Chalabre ont été les plus durement touchés.
Le secteur artisanal a également perdu en quatre ans environ quatre-vingts établissements, soit 8 % des entreprises, alors qu'il constitue l'activité la mieux répartie sur l'ensemble du territoire.
La baisse de l'activité agricole, notamment viticole, est elle aussi importante et seul le secteur tertiaire du commerce et des services a fortement augmenté, les emplois du secteur non-marchands progressant de 21 % et les services marchands de 14 %.
Cette situation critique a été encore accentuée ces derniers jours par les problèmes rencontrés par l'entreprise Myrys. Cela m'a conduit à solliciter du Gouvernement la possibilité de considérer la haute vallée de l'Aude comme certaines régions de France qui ont bénéficié de traitements particuliers en raison de la nécessité de procéder à une reconversion industrielle ou à des réductions d'activités découlant de la loi de programmation militaire.
Cette solidarité nationale me paraît totalement justifiée par le nombre d'emplois perdus au cours de ces trente dernières années par rapport à une population qui était, à l'époque, de l'ordre de 50 000 habitants.
L'incidence de la perte de ces milliers d'emplois est forte en termes tant d'activités que de produit fiscal ou de prise en charge sociale pour un département comme l'Aude, qui figure sur la liste de vingt-trois départements défavorisés.
Une aide particulière devrait donc être apportée par l'Etat sur l'ensemble des dossiers de cette zone, comme cela avait été le cas lorsque ce département avait été touché par la crise du bassin industriel de Salsigne.
Un programme d'action élaboré en commun entre l'Etat et le département a été approuvé par l'ensemble des élus et des acteurs économiques de la zone. A défaut de la mise en place de la procédure particulière d'aide que je sollicite, l'Etat devrait mettre en oeuvre ce programme et le considérer comme prioritaire, ce qui devrait se traduire par un soutien exceptionnel.
Un contrat particulier, selon une forme à déterminer, pourrait être ainsi conclu entre l'Etat, le département et la région pour éviter que la situation économique et celle de l'emploi continuent de se détériorer.
C'est l'attente de tous les habitants de la haute vallée de l'Aude, c'est le rôle normal de l'Etat de faire jouer la solidarité nationale pour les territoires en difficulté. (Applaudissements sur les travées socialistes. - M. Jean-Jacques Robert applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, mes premiers mots s'adresseront naturellement aux rapporteurs et aux différents orateurs des groupes qui ont présenté et commenté le projet de budget qui vous est proposé. Je les remercie sincèrement de leur contribution éclairante, même si elle fut parfois un peu polémique. J'apporterai la réponse la plus précise possible à leurs interventions, mais le temps qui m'est imparti et l'heure tardive m'obligeront à répondre à un certain nombre de questions, notamment aux problèmes locaux, par écrit. Je le ferai sérieusement, avec conscience et le plus vite possible.
Ce budget est au service d'une politique claire et déterminée, dédiée à l'efficacité et à la compétitivité de nos entreprises.
Pour s'en tenir aux finalités, et pour synthétiser, je dirai que l'action du Gouvernement dans le domaine dont j'ai la responsabilité vise à promouvoir et à accompagner la modernisation et l'adaptation de nos entreprises industrielles, à conforter l'efficacité de nos services publics et à garantir une énergie sûre et compétitive.
Ces trois points, je voudrais les développer devant vous en répondant à vos questions.
Je considère que notre première responsabilité collective est de permettre à nos entreprises de s'adapter dans les meilleures conditions aux formidables mutations de cette fin de siècle.
Je rappellerai brièvement les mutations qui me paraissent les plus décisives.
Il s'agit tout d'abord de la mondialisation des marchés et de la concurrence, et de l'établissement d'un vaste marché mondial qui élargit extraordinairement le champ d'action des entreprises en termes de débouchés comme en termes de concurrence.
Il s'agit ensuite du passage à l'euro et de l'achèvement du Marché unique européen, qui est un impératif absolu pour la France.
Il s'agit encore de la révolution des nouvelles technologies de l'information et de la communication.
A la fin de ce siècle, l'industrie des technologies de l'information sera devenue la première industrie dans le monde. Les services de communication que sont la télévision, les télécommunications et les services en ligne pourraient devenir, d'ici à quelques années, les premiers postes de consommation des ménages des pays développés, donc des Français. Tous les secteurs de l'économie et de la société sont concernés ; les systèmes de production comme les types de consommation et, à terme, les modes de vie seront directement impliqués.
Enfin, c'est la quatrième mutation, nous devons manifester une préoccupation croissante pour l'environnement.
Nos concitoyens accordent désormais à cette question une très grande importance, qu'il s'agisse des pollutions industrielles, de la gestion des déchets ou de la propreté des moyens de transport. C'est désormais une donnée essentielle pour notre industrie et nos entreprises.
Ces mutations lourdes sont souvent présentées ou vécues comme des menaces pour nos entreprises. Elles seraient synonymes de concurrence accrue, de perte de parts de marché, de destruction d'emplois.
Il est vrai que tout changement profond peut entraîner ce type de conséquences, mais je considère - c'est ce point de vue que j'aimerais voir prévaloir - qu'elles constituent avant tout des opportunités, points d'appui forts pour le développement industriel de notre pays, car elles ouvrent, à mon avis, des perspectives positives que nous devons non pas craindre, mais saisir pour assurer l'avenir.
Dans cette nouvelle économie mondiale, où les distances sont abolies par des réseaux de télécommunications dont les débits sont désormais gigantesques - on parle de « très hauts débits » - disposer d'infrastructures de qualité, accéder aux technologies les plus récentes et à une main-d'oeuvre hautement qualifiée - je partage totalement sur ce point, l'opinion de M. Henri Weber - deviennent des enjeux de toute première importance pour les entreprises. Certains économistes y voient l'origine d'un mouvement de « relocalisation » des entreprises constaté depuis quelques années.
M. Henri Weber. Exactement !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. J'y vois, pour ma part, une conjonction de facteurs favorables pour le développement industriel de notre pays, qui dispose de nombreux atouts dans ce domaine.
Mais ces atouts ne constituent de puissants moteurs de développement que s'ils peuvent s'appuyer sur un tissu local d'entreprises et de partenaires publics ou privés de formation, de recherche et de conseil. C'est pourquoi mon action visera notamment à développer la mobilisation des acteurs locaux, notamment des régions. C'est en effet au plus près des réalités industrielles que peuvent se concevoir et se décider les actions de la collectivité en faveur de réseaux régionaux d'entreprises performantes et solidaires, en associant services de l'Etat, des collectivités locales, des organismes consulaires, des associations et des agences travaillant en appui aux entreprises.
C'est à ce point de mon propos que je souhaite répondre aux préoccupations que vient d'exprimer à l'instant M. Courrière concernant la haute vallée de l'Aude et la situation due à la défaillance de l'entreprise Myris.
Cette zone, qui bénéficie de divers appuis publics - primes d'aménagement du territoire, crédits du FEDER, c'est-à-dire crédits européens, zone de classement en revitalisation rurale et en zone de montagne - a fait par ailleurs l'objet, en 1992, sous le gouvernement de Pierre Bérégovoy, de la mise en place du plan « Aude 2000 » doté de 60 millions de francs de crédits, qui a eu, pour objectif entre autres, de soutenir l'investissement dans les PMI et les PME de cette région.
Des discussions sont en cours avec les acteurs locaux pour définir la prolongation de cette action. Nous aurons certainement l'occasion d'en reparler, comme nous aurons, je l'espère, l'occasion de parler à nouveau des efforts que nous menons en faveur de l'entreprise Myrys afin de lui trouver un véritable repreneur industriel et non pas, comme cela a été, hélas ! le cas lors d'une première tentative, un repreneur souhaitant réaliser une opération facile au plan financier, mais peu profitable pour l'emploi.
M. Raymond Courrière. Merci !
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Jean-François Le Grand. Eh bien, vous en avez, de la chance !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Pour que nos entreprises industrielles puissent tirer le bénéfice maximal de ces opportunités, le rôle de l'Etat reste indispensable.
Nos entreprises seront d'autant plus aptes à tirer parti des mutations en cours que l'Etat saura tenir toute sa place en appui à leurs stratégies de développement. Ce rôle, pour ce qui concerne mon ministère, passe notamment par le soutien public apporté à la recherche industrielle, à l'innovation et à la diffusion des techniques, à la formation, à la modernisation et à la création d'entreprises.
J'ai été interrogé, par MM. Weber et Trucy en particulier, sur la situation de la construction navale.
Le dispositif des quirats était éminemment critiquable. Je tiens à dire - cela va vous surprendre, mais c'est la réalité - que le nombre d'emplois de marins directement créés ou maintenus grâce à ce dispositif n'a pas dépassé 350, pour un effort budgétaire de l'Etat supérieur à 2 milliards de francs !
M. Gérard Delfau. Tout à fait !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Son faible rendement justifie sa suppression et son remplacement par un autre système, qui était déjà connu dans notre pays, celui de l'aide à la commande. Je peux assurer à ceux qui s'inquiètent de la pérennité de ce système que je l'ai défendu au conseil « industrie », voilà quelques jours, à Bruxelles, et que la France compte le défendre au mois de mai, lors du prochain conseil « industrie.
Le système d'aide à la commande, conforme au droit communautaire et aux orientations qui ont été récemment rappelées par le commissaire Bangemann, nous permet de favoriser, là où c'est nécessaire, la modernisation des chantiers navals, la construction des navires, et de soutenir véritablement l'emploi dans les zones économiques dédiées à la construction navale.
En ce qui concerne le navire de recherche que l'Indonésie pourrait commander aux Constructions mécaniques de Normandie, je suis l'évolution de la situation avec beaucoup d'attention. Le Gouvernement français est favorable à l'inscription de ce navire au protocole franco-indonésien. Il n'en sera donc aucunement exclu.
Il appartient au Gouvernement d'examiner les conditions dans lesquelles d'autres soutiens, par le biais de protocoles, peuvent être accordés à la construction navale lorsque cela est nécessaire, que ce soit aux Chantiers de l'Atlantique ou aux autres chantiers. Nous y veillerons.
M. Jean-François Le Grand. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je souhaite m'attarder quelques instants sur les différents aspects de l'aide de l'Etat aux entreprises et, en premier lieu, sur l'action qu'il entend mener en faveur des PMI, qui constitue notre priorité.
S'agissant du soutien à la recherche industrielle, dans un domaine où l'implication de l'Etat est particulièrement essentielle en raison de la perspective à long terme des actions à entreprendre, trois orientations seront privilégiées.
Premièrement, il s'agit de mettre les technologies de l'information et de la communication au coeur de l'effort de recherche industrielle.
Chacun sait ce qu'il faut penser de la montée en puissance de la société de l'information et de la communication. C'est une priorité nationale qui a été affirmée par M. Lionel Jospin, notre Premier ministre, dès cet été, dans son discours d'Hourtin.
L'effort consenti en 1998, de plus de 1,5 milliard de francs, portera sur toute la chaîne, depuis l'amont - les composants - jusqu'à l'aval - les nouveaux services, tels qu'Internet, le multimédia et le commerce électronique.
Deuxièmement, il faut rééquilibrer l'effort de recherche en faveur des PMI.
Celles-ci doivent être en mesure de bénéficier plus directement de l'aide publique dans ce domaine. Notre outil industriel ne peut que sortir renforcé d'une meilleure association des PMI aux grands programmes de recherche. C'est pour moi une priorité, et je veux rassurer à cet égard M. Grignon. Sur ce point, il a raison.
Troisièmement, nous devons développer les coopérations, comme le souhaite encore M. Grignon, entre PMI et grandes entreprises.
Ne cherchons pas à mettre en opposition les deux catégories d'entreprises ; au contraire, cherchons à les rapprocher et à trouver des synergies entre elles.
Nous développerons les coopérations en multipliant les partenariats européens sur des programmes identifiés. Ils existent. La France est d'ailleurs souvent plus active que certains de ses partenaires dans ce domaine, je pense notamment à l'Allemagne.
Nous développerons encore les coopérations en coordonnant les actions des différents acteurs au sein d'un même secteur économique : c'est le sens que nous donnons, dans le secteur des télécommunications, à la mise en place très prochaine du réseau national de recherche en télécommunications, le RNRT, préconisée dans le rapport Lombard et dont la nécessité a été réaffirmée par M. Michel Delebarre, dans son rapport sur l'avenir de France Télécom.
Que M. Laffitte se rassure : la recherche en télécommunication ne sera pas sacrifiée, bien au contraire !
Il a évoqué avec pertinence l'un des problèmes posés par ce que l'on appelle aujourd'hui la convergence et qui résulte de l'imbrication de plus en plus grande du domaine de l'audiovisuel et de celui des télécommunications. Il s'agit de la répartition des responsabilités entre le conseil supérieur de l'audiovisuel, le CSA, et l'autorité de régulation des télécommunications, l'ART, en matière de fréquences.
A la lumière de quelques dossiers d'actualité, comme les expérimentations de la technologie MMDS, la diffusion de télévision sur support hertzien en micro-ondes, à laquelle je crois beaucoup, ou le dossier des bandes locales radio à haut débit, on voit la distinction traditionnelle de statut entre les bandes radioélectriques, entre radiodiffusion et télécommunications, revêtir un caractère de plus en plus artificiel.
Cette évolution qui s'accélère mérite en effet réflexion. L'utilisation optimale du spectre des fréquences conduira nécessairement à une meilleure définition réciproque des rôles des instances de régulation et de l'agence nationale des fréquences.
Nous voulons par ailleurs soutenir l'innovation et la diffusion des techniques. Il s'agit d'un volet essentiel de l'action publique en faveur des PMI.
Nous entendons soutenir l'innovation pour favoriser la création par les PMI de nouveaux produits et services, puis leur succès commercial. Nous appuierons la diffusion des techniques pour accélérer l'appropriation, par le tissu industriel, particulièrement par les plus petites entreprises, des innovations technologiques.
Nous disposons dans ce domaine, vous l'avez souligné à plusieurs reprises, d'outils performants que je souhaite conforter.
MM. Weber et Grignon ont évoqué l'ANVAR, qui a apporté un soutien à quelque 1 800 entreprises l'an dernier, pour un total de crédits de 1,3 milliard de francs. Le réseau de diffusion technologique animé par l'ANVAR couvre vingt et une régions depuis septembre dernier, avec l'entrée de l'Alsace dans ce réseau. Les procédures ATOUT, auxquelles M. Weber attache à juste titre une grande importance, permettent à de nombreuses PMI de réaliser un saut technologique significatif.
Sur l'ensemble de ces questions, le rapport que Dominique Strauss-Kahn, Claude Allègre et moi-même avons demandé à Henri Guillaume nous fournira des éléments d'évaluation et des orientations utiles pour l'avenir. J'espère avoir l'occasion d'en débattre à nouveau avec le Sénat ou avec l'une de ses commissions.
Enfin, il est essentiel de favoriser tout particulièrement l'appropriation rapide des nouveaux outils de l'information et de la communication par les PMI, pas seulement pour qu'elles créent des sites, pas seulement pour qu'elles se fassent connaître sur le Web, mais surtout pour consacrer cet outil avancé de communication comme un outil de veille technologique et commerciale et, à très court terme, comme vecteur de la véritable révolution à laquelle nos entreprises sont appelées et qui s'appelle « la révolution du commerce électronique ». C'est à ce titre que je propose de dégager une ligne budgétaire nouvelle de 50 millions de francs en 1998 pour un programme spécifique réservé aux PMI.
Mais M. Laffitte a raison ; dans ce domaine également, l'administration doit montrer l'exemple.
La plupart des administrations ont d'ores et déjà créé des sites Web et enrichissent chaque jour leur contenu. Dès le 1er janvier 1998, plusieurs dizaines de formulaires et imprimés, accompagnés des notices et explications, seront disponibles instantanément sur le site Internet du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, et plus particulièrement sur celui du secrétariat d'Etat à l'industrie - vous voyez comme les synergies, à cet égard, peuvent être utiles, monsieur le sénateur.
Des actions sont engagées pour rendre la plupart de ces formulaires téléchargeables avant la fin de l'année 1998. En outre, les programmes de mise en réseau des différentes administrations publiques seront accélérés dans le cadre de la mise en oeuvre du programme d'action gouvernemental pour la société de l'information qui sera annoncé et précisé par M. le Premier ministre prochainement.
Troisième axe de notre politique d'aide en faveur de nos entreprises : le soutien à l'investissement et à la formation.
Je souhaite conforter cet aspect très important de la capacité de développement des entreprises, qui ne se résume pas à la maîtrise des technologies.
Au-delà de ce qu'on appelle traditionnellement l'aide, qui reste essentielle dans bien des cas, à l'investissement matériel, je pense, en particulier pour les PMI - à ce sujet j'approuve ce qu'a dit M. Weber - à l'accès au conseil externe, au renforcement de l'encadrement spécialisé, aux technologies dites « molles », comme le design, le marketing, la gestion de production... Les procédures gérées par les directions régionales de l'industrie et de la recherche, les DRIR, dont je salue au passage l'engagement actif au service des entreprises, seront confortées dans ce domaine.
Lorsque j'évoque le design, monsieur Poncelet, je pense naturellement aussi au secteur textile - habillement, cuirs et peaux, et chaussures.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Nous allons voir cela !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Dans le même esprit, le système de formation supérieure technique doit être mobilisé au service des PMI. Les partenariats entre les écoles dépendant du ministère de l'industrie et les écoles dépendant du réseau des chambres de commerce et d'industrie, d'une part, les entreprises, d'autre part, seront développés. Les moyens des écoles sont renforcés à cet effet, notamment, comme l'a noté pour s'en féliciter M. Trucy dans son rapport.
M. Grignon, quant à lui, a insisté à très juste titre sur l'importance de la normalisation.
La participation française à la normalisation à l'échelon tant régional et européen qu'international correspond à notre place relative dans le concert des nations, comme le souligne le Conseil économique et social, auquel j'ai rendu hommage tout à l'heure.
Ainsi, l'AFNOR détient la deuxième place en termes d'animation stratégique au sein du comité européen de normalisation, le CEN, et elle se situe à un niveau comparable à celui de son homologue britannique ISO. N'ayons pas de complexe à cet égard !
Le secrétariat d'Etat à l'industrie soutient la participation française à ces travaux, tant par la subvention annuelle versée à l'AFNOR - 114 millions de francs en 1998 - que par l'appel à proposition encourageant les actions collectives pour l'appropriation des normes et de la qualité. Je réponds ainsi à une question de M. Lefèbvre.
J'en viens au soutien à la création d'entreprises.
Le dynamisme d'une économie se mesure aussi à sa propension à voir éclore et se développer de nouvelles entreprises, notamment dans les secteurs d'avenir liés aux nouvelles technologies.
C'est un axe majeur de la politique du Gouvernement.
Trois leviers principaux sont mis en oeuvre.
Il s'agit d'abord d'incitations fiscales.
Le projet de loi de finances pour 1998 comprend plusieurs mesures importantes en faveur des créateurs d'entreprises, comme la création de bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises ou la franchise d'imposition sur les plus-values en cas de réinvestissement dans une entreprise nouvelle.
En disant cela, je réponds à M. Poncelet, qui a évoqué la politique fiscale à l'égard du secteur industriel.
En effet, monsieur Poncelet, cette politique est assez différente de celle du Gouvernement précédent, qui, en dix-huit mois, vous en conviendrez et vous l'avez sans doute critiqué, avait surimposé l'ensemble de l'économie française de plus de 120 milliards de francs de charges fiscales et sociales nouvelles.
M. Gérard Delfau. Eh oui !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Ce n'est pas notre cas et, si nous avons, pour satisfaire un certain nombre de critères objectifs de bonne gestion qui nous permettront d'entrer à l'heure et la tête haute dans le processus de la monnaie unique, si nous avons, dis-je, alourdi provisoirement, l'impôt sur les sociétés,...
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. De plus de 15 % !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... c'est pour armer l'ensemble de l'économie française afin qu'elle soit capable d'entrer dans de bonnes conditions de concurrence et de compétitivité au sein dans monnaie unique.
En effet, monsieur Poncelet, les mesures que nous avons prises ne sont pas telles que vous les avez décrites : elles ne relèvent pas, contrairement à ce que vous avez laissé entendre, de « l'horreur économique », pour reprendre le titre d'un ouvrage à la mode.
En ce qui concerne la provision pour fluctuation des cours, à la suite d'une intervention de M. le rapporteur général de l'Assemblée nationale et d'un rapprochement que j'ai opéré avec mon collègue du budget, un plafond de 60 millions de francs a été fixé pour l'exercice clos à compter du 31 décembre 1997, ce qui exonère la plupart des entreprises du bois et du textile, auxquelles, monsieur Poncelet, vous avez fait allusion tout à l'heure.
Nous avons, en outre, toujours lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, affecté cette provision, en franchise d'impôt, à un compte de réserve spéciale.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'Etat, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, avec l'autorisation de M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'Etat, que je sache, la provision est bien supprimée, et cette suppression va sans aucun doute handicaper les entreprises.
Vous avez, certes, prévu une franchise de 60 millions de francs, mais il n'en demeure pas moins que, pour l'ensemble des entreprises, ce dispositif, qui était extrêmement intéressant, a été supprimé.
Cette disposition a, de surcroît, un caractère rétroactif puisque vous avez demandé aux entreprises de vous rembourser sur trois ans les provisions constatées à l'ouverture de l'exercice 1997 au-delà de la franchise. C'est la raison pour laquelle nous proposons de « lisser » sur six ans la réintégration de ces provisions dans le résultat des entreprises. Peut-être allez-vous donner un avis favorable sur cette proposition.
Par ailleurs, c'est vrai, le gouvernement précédent avait augmenté de 10 % l'impôt sur les sociétés, et cela avait été critiqué au sein même de la majorité sénatoriale. Mais vous, ce n'est pas de 10 %, c'est de 15 % que vous augmentez l'impôt sur les sociétés !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat, Mais nous, c'est provisoire (Rires sur les travées du RPR et de l'Union centriste), alors que toutes les entreprises, par exemple celles qui procèdent à la consolidation, vous indiqueront qu'elles n'avaient aucune raison de penser que l'augmentation votée du temps de M. Juppé était provisoire, dans la mesure où, précisément, elle ne pouvait pas faire l'objet d'une procédure de consolidation d'impôt différée.
Il existe une très grande différence entre la mesure annoncée comme provisoire par M. Juppé, et qui en réalité ne l'était pas, parce que les procédures comptables ne la désignaient pas comme telle, et la mesure que nous avons proposée et qui est expressément présentée comme provisoire : c'est ainsi que le Parlement l'a votée.
M. Christian Demuynck. Elle ne sera pas provisoire !
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'Etat, La Fontaine m'a appris qu'en toute chose il fallait considérer la fin. Alors, je verrai bien, au terme du provisoire, s'il s'agit vraiment de provisoire ! (Très bien ! sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
Pour l'instant, la disposition est votée, elle s'applique et elle pénalise.
Par ailleurs, en ce qui concerne l'imposition des plus-values sur cession d'actifs, il ne faut pas oublier que certaines entreprises réalisent des actifs pour investir.
Jusqu'à présent, ces plus-values étaient frappées d'un taux de 20,9 %. Or vous portez ce pourcentage à 41,6 %.
De la même manière, alors que l'effort d'harmonisation fiscale au niveau européen tendait à ramener le taux de l'impôt sur les sociétés à 33,33 %, vous le portez à 41 %.
Alors, ne nous dites pas que vous n'avez pas pénalisé les entreprises ! D'ailleurs, vous n'allez pas tarder à vous apercevoir que vous les pénalisez gravement. Voilà quelque temps, on se réjouissait de constater une progression sensible des investissements ; or aujourd'hui, l'investissement commence à « piquer du nez ». Et les perspectives n'apparaissent pas meilleures à la lecture des prévisions actuelles de croissance : les 3 % envisagés ne seront pas atteints en 1998. Il est donc clair que les mesures que vous prenez tendent à casser la croissance, alors que celle-ci repartait. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je rappelle que les conséquences de la mesure concernant la provision pour fluctuation des cours sont limitées dans la mesure où est prévu le transfert en franchise d'impôt à un compte de réserve spécial. Sont concernées les provisions pour fluctuation des cours existants à l'ouverture du premier exercice clos à compter du 31 décembre 1997, et ce dans la limite de 60 millions de francs.
Ainsi, le dispositif va permettre d'exonérer 98 % à 99 % des entreprises, faisant porter sur une toute petite minorité d'entre elles le poids de cette mesure nouvelle.
J'en reviens aux incitations à la création d'entreprise.
J'ai déjà parlé des incitations fiscales et des mesures importantes en faveur des créateurs d'entreprise.
J'évoquerai maintenant la politique d'essaimage qui consiste à favoriser la création d'entreprises innovantes résultant de l'initiative de centres de recherche et de grandes entreprises, en les faisant profiter d'un environnement favorable.
S'agissant du capital-risque, la France présente un grand retard. Elle est même terriblement faible si on la compare à la Grande-Bretagne, à l'Allemagne et à d'autres pays développés.
Comme Dominique Strauss-Kahn l'a annoncé, 750 millions de francs, provenant du produit de l'ouverture du capital de France Télécom, vont permettre de créer un fonds pour le capital-risque et de constituer des fonds d'amorçage au profit de très petites entreprises. Je pense en particulier aux PMI innovantes évoquées par M. Laffitte. Ce montant très significatif devrait par ailleurs être de nature à rassurer M. Grignon, qui s'est inquiété à juste titre de la faiblesse du capital-risque dans notre pays.
M. Trucy a évoqué la question de Thomson-multimédia. Je veux lui indiquer que la priorité pour cette entreprise est de rétablir ses comptes. Si elle a connu, au titre du premier semestre de cette année, des comptes largement déficitaires, ses dirigeants se sont engagés à rétablir l'équilibre au second semestre. Ils ont pris un certain nombre de dispositions de nature à leur permettre de tenir cet engagement. Nous verrons, à la fin de cette année, lors de la publication des comptes du second semestre et des comptes annuels, si le redressement a pu être opéré, ce que je souhaite vivement, car la situation du premier semestre était plutôt inquiétante.
Monsieur Poncelet, vous avez évoqué la question de l'automobile ainsi que celle du textile, un secteur qu'a également évoqué M. Maurice Schumann, dans des termes qui ne pouvaient que susciter de ma part la plus grande attention et le plus profond respect.
Je souhaiterais que nous puissions parvenir, fuyant toute polémique, à une sorte de consensus national sur ce qu'il convient de faire en faveur du textile, ainsi que je l'ai expliqué avec Mme Martine Aubry, voilà deux jours, aux dirigeants des fédérations textiles, au lieu de nous adresser réciproquement d'incessantes critiques et de nous reporter constamment au passé.
En toute objectivité, je pense que le système mis au point par M. Borotra n'était ni conforme aux règles européennes - j'ai ici la lettre de M. Van Miert du 31 mai 1996 qui le confirme - ni suffisant pour dégager une dynamique dans ce secteur.
Au demeurant, l'industrie textile ne demande pas à être perpétuellement aidée et, de ce fait, sans cesse placée sous les feux de la rampe, d'autant que beaucoup des entreprises de ce secteur sont tout à fait capables de conquérir, par leur propre compétitivité, de nombreux marchés nationaux ou internationaux.
Je souhaiterais donc que nous puissions nous retrouver sur quelques idées simples.
Il faut continuer à aider le textile, mais au même titre que d'autres secteurs, sans mettre en oeuvre des mécanismes spécifiques. Pour ce faire, les charges sociales affectant les bas salaires, qui correspondent souvent à de faibles qualifications, pourraient être allégées. En l'occurrence, il s'agit de poursuivre l'allégement des charges sociales jusqu'à 1,3 fois le SMIC.
Il convient également de réaliser un effort de formation très important, notamment en direction des jeunes de ce secteur, ce qui contribuera en même temps à sa modernisation.

Il faut aussi mettre en oeuvre une incitation au design , à la créativité et à l'innovation par des crédits budgétaires ou par un autre système, fiscal celui-là, de crédit d'impôt, qui pourrait être décidé au cours des prochaines semaines ou des prochains mois.
Nous voulons en outre faire en sorte que les entreprises du textile qui baissent le temps de travail en maintenant leurs effectifs - et non pas, dans ce secteur-là, en les augmentant - puissent bénéficier des systèmes incitatifs annoncés par le Premier ministre le 10 octobre dernier à la suite de la conférence sur l'emploi, les salaires, l'aménagement et la réduction du temps de travail.
Ne l'oublions pas, il s'agit de l'avenir d'une industrie qui représente environ 330 000 emplois, si l'on regroupe le textile, l'habillement, les cuirs et peaux et la chaussure, ce qui en fait une des premières industries françaises, présente dans toutes les régions,...
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Et qui exporte !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... et qui exporte, en effet. Cette industrie mérite donc que nous nous mobilisions tous sur un certain nombre de mesures.
C'est la piste de réflexion que Mme Aubry et moi-même avons proposée à un groupe de travail qui se réunit dès cette semaine et qui doit nous apporter ses conclusions au cours des toutes prochaines semaines, si possible avant la fin de cette année.
Ainsi, le plan Borotra, qui devait d'ailleurs s'achever de toute façon au 31 décembre prochain, sera relayé par des dispositions à mon avis plus dynamiques. Mais laissons là toute appréciation critique du passé...
M. Jean-Pierre Raffarin. Absolument !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... pour nous concentrer sur le futur.
Indiscutablement, il faut faire quelque chose pour ce secteur. Nous y veillons, comme pour d'autres secteurs industriels.
Hélas ! nous ne pouvions pas, pour des raisons budgétaires qui s'étaient d'ailleurs déjà dressées sur la route du gouvernement de M. Juppé, étendre le système Borotra à l'ensemble du secteur industriel français. Le coût budgétaire était de l'ordre de 30 milliards à 40 milliards de francs. Un tel coût n'était pas supportable sous le gouvernement de M. Juppé ; il ne l'est pas davantage sous celui de M. Jospin.
Nous devons prendre des dispositions non sectorielles, ouvertes à l'ensemble des secteurs, mobilisatrices, en particulier sur les bas salaires et les basses qualifications.
Rassemblant ainsi nos énergies, nous démontrerons à Bruxelles que nous sommes de bonne foi en appliquant des dispositions non sectorielles. Mais nous devons en même temps négocier avec Bruxelles pour faire en sorte que le poids du remboursement déjà imposé aux entreprises belges - certaines ont reçu les commandements de rembourser - ne soit, ni en trésorerie ni en comptabilité, insupportable pour nos entreprises.
J'ai suggéré à M. Van Miert et à la DG 4 un système tout à fait acceptable par nos entreprises. Je compte, au cours des prochaines semaines, achever de le peaufiner et de le négocier. Je pense que nous arriverons à une solution satisfaisante.
Je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, d'aider plutôt ce secteur, comme les autres, par l'adoption d'une disposition positive que de polémiquer sans fin. Nous avons mieux à faire ! Je vous remercie de partager au fond, j'en suis sûr, cet état d'esprit avec le Gouvernement.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Si les politiques de soutien aux entreprises que je viens d'évoquer constituent le coeur de l'action de l'Etat en matière industrielle, les services publics industriels forment un second levier de l'action publique au service de nos entreprises.
Nous avons besoin de services publics industriels forts et performants. Je pense à l'électricité, au gaz, aux télécommunications, aux services postaux, qui contribuent très directement à la compétitivité de nos entreprises, par la qualité et le coût de leurs prestations. Gardons en effet à l'esprit que ces services représentent à eux seuls près de 5 % des consommations intermédiaires des entreprises industrielles et de services.
Par ailleurs, nous en sommes, je crois, tous conscients, ces services publics jouent un rôle de premier plan pour la cohésion sociale de notre pays. Ils doivent être préservés.
C'est pour ces raisons que l'action de l'Etat doit viser à conforter nos opérateurs publics et à garantir l'exercice de leurs missions de service public.
Conforter nos opérateurs publics, cela passe tout d'abord par une gestion maîtrisée des évolutions réglementaires en cours. L'ouverture à la concurrence ne doit pas conduire à un recul du service public et, là où elles se justifient, des périodes de transition suffisantes doivent être ménagées pour préparer les adaptations nécessaires.
Dans le secteur des télécommunications, le processus est achevé.
Monsieur Trucy, le Gouvernement ne juge pas nécessaire d'ouvrir davantage le capital de France Télécom.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. France Télécom est prête à affronter, dans ces conditions, ses principaux concurrents. Cependant, sans revenir sur les règles du jeu, il faudra sans doute revoir le contenu du service public et peut-être l'équilibre de la régulation du secteur afin que le Parlement et le Gouvernement puissent mieux exercer leurs responsabilités respectives.
Je tiens, à ce propos, à souligner l'importance et la qualité remarquable du travail accompli par la commission supérieure du service public des postes et télécommunications, dont je salue les membres éminents qui sont présents dans cet hémicycle ce soir, MM. Hérisson et Delfau.
Pour l'électricité, une concertation doit être menée préalablement à la transposition de la directive, qui doit à la fois permettre aux consommateurs dits « éligibles » de s'approvisionner auprès du producteur de leur choix et garantir le maintien des missions de service public, comme l'a excellement indiqué M. Besson tout à l'heure.
Quant au gaz, la négociation reste ouverte. Si le Gouvernement accepte, dans leur principe, les orientations de la commission, je confirme ici, en réponse notamment aux interrogations de MM. Trucy, Besson et Weber, qu'il ne laissera pas remettre en cause la sécurité à venir de nos approvisionnements assurée par les contrats dits Take or pay, que j'ai vigoureusement défendus au cours de plusieurs séances au conseil « Industrie » à Bruxelles.
Par ailleurs, monsieur Besson, s'agissant de votre très opportune question sur la distribution, les principes de subsidiarité et de service public doivent prévaloir de façon à ne pas bouleverser une organisation qui, en France, à fait ses preuves.
Dans le domaine postal, enfin, la directive en cours d'adoption garantit une période de transition satisfaisante de cinq ans que nous devons mettre à profit avec La Poste pour la préparer à la nouvelle échéance de 2003. Tel est l'objet principal du contrat d'objectifs de progrès portant contrat de plan que nous sommes en train de préparer avec l'exploitant. Ce contrat nous permettra de conforter le développement de l'entreprise.
La Poste, en dépit des milliards de francs de charges non compensées que certains évoquent régulièrement, équilibrera ses comptes en 1977, et ce sans aucune hausse de tarifs, ce qui est remarquable.
M. Gérard Delfau. C'est vrai !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. La Poste est parvenue à réduire son endettement net de moitié en quatre ans, soit 15 milliards de francs, son stock de dettes restant de 16 milliards de francs environ, ce qui est également remarquable.
Le courrier acheminé par La Poste augmentera de plus de 1 % cette année, ce qui traduit un net redressement par rapport aux années passées. C'est aussi un bon résultat.
Dès lors, restons bien sûr vigilants, préparons l'avenir avec détermination, mais ne nous trompons pas de diagnostic.
L'autre volet, essentiel à mes yeux, du développement de nos opérateurs de service public est l'international. C'est fondamental dans le contexte de concurrence croissante sur les marchés nationaux, d'internationalisation des marchés et des besoins des clients.
Je me félicite des succès récents d'EDF en Chine et des initiatives de France Télécom, en Europe notamment. Je pense, en particulier, à l'Italie et à l'Allemagne avec l'accord conclu avec Emel et Deutsche Telecom. J'attends également de La Poste des avancées significatives dans le domaine de l'accès à l'international.
A propos de France Télécom et de La Poste, j'indique notamment à M. Hérisson que je serai attentif, dans le cadre de la réflexion que le Gouvernement a décidé d'engager dès l'an prochain sur la fiscalité locale, à la question de l'affectation des taxes locales payées par les deux opérateurs. Pour France Télécom en particulier, je suis sensible à la nécessité d'éviter les effets non souhaités de distorsion de concurrence avec ses concurrents.
Au sujet des modalités d'application de la nouvelle réglementation du droit de passage des opérateurs de télécommunications sur le domaine public routier, je me permettrai de vous répondre par écrit, car je n'ai pas le temps de le faire oralement comme j'en avais l'intention.
Il faut garantir l'exercice des missions de service public afin de garantir la cohésion sociale de notre pays.
Nos opérateurs de service public y contribuent activement, d'abord comme moyens de lutte contre l'exclusion. Tel est le sens de mon action, que je dois rappeler au Sénat, qui est aussi le représentant des collectivités territoriales, en faveur d'une présence postale renforcée dans les quartiers sensibles et dans les zones dites en voie de désertification,...
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... dont M. Delfau a souligné l'importance. C'est également le sens de l'engagement fort que je viens de rappeler à Bruxelles au nom de la France - j'ai d'ailleurs été soutenu par quelques autres Etats membres de l'Union - en faveur de l'enrichissement du service universel des télécommunications et de mon souci de concevoir des tarifs publics accessibles aux plus modestes. J'indique, au passage, qu'Internet doit, à mon avis, être inclus dans le contenu du service universel tel que l'Europe le définit.
M. Pierre Laffitte. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Les opérateurs de service public contribuent également à la cohésion sociale de notre pays en tant que participants à l'aménagement du territoire, par la péréquation tarifaire, facteur fondamental d'unité territoriale, et par une présence de proximité en tout point du territoire. Je rappelle les décisions que nous avons prises en ce sens. MM. Trucy, Hérisson et Delfau, ainsi que M. Larcher, dans son récent rapport sur La Poste, ont souligné l'importance d'avoir une vision globale d'un service public présent, actif, dynamique et renouvelé. Rappelons que le coût est in fine supporté soit par le contribuable, soit par les clients de La Poste avec tous les risques que cela représente à terme pour sa compétitivité.
Nous avons donc un devoir national d'imaginer collectivement de nouvelles formes de présence postale dans les zones à très faible activité et des schémas originaux de financement et de valorisation du réseau des bureaux de poste et des agences postales.
Les élus locaux ont, bien entendu, un rôle de premier plan à tenir dans cette réflexion, monsieur Delfau, qui devra être approfondie dans les prochains mois.
Je reprends volontiers à mon compte votre proposition sur la réactivation nécessaire des structures de concertation locales. De même, je crois également qu'il faut engager un dialogue social plus nourri, plus vrai et plus serein au sein de La Poste. Nous aurons l'occasion d'y revenir lorsque sera élaboré, dans les prochaines semaines, le contrat d'objectifs et de progrès.
Je voudrais conclure mon propos sur les importantes questions de politique énergétique arbordées tout à l'heure, fort excellemment, par M. Jean Besson.
Pour résumer cette politique en quelques mots, je dirai que, tenant compte du contexte dans lequel nous sommes amenés à évoluer au cours des prochaines années, elle doit être transparente, équilibrée et soucieuse de la qualité de l'environnement.
Cette politique doit d'abord être transparente. Elle repose sur le choix nucléaire confirmé par le Gouvernement et je rassure sur ce point M. Le Grand, mais également bien d'autres sénateurs. (Applaudissements sur les travées du RDSE et de l'Union centriste.) Ce choix nous permet aujourd'hui de disposer d'une électricité abondante et bon marché, produite, comme l'a fort justement souligné M. Weber, avec un minimum de nuisances pour l'atmosphère.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Bravo Messmer !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Bravo la France ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Messmer, c'est la France !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Ce choix nous permet aussi de dégager, grâce à nos exportations de courant, un excédent commercial de l'ordre de 15 milliards de francs par an. Ainsi, l'arrêt de Superphénix n'est pas l'arrêt du nucléaire.
Monsieur Revel, ce n'est que le constat, d'une part, du caractère trop coûteux de cet équipement pour produire de l'électricité et, d'autre part, de l'absence de nécessité de développer aujourd'hui la filière des surgénérateurs qui a conduit à l'arrêt de celui-ci. Ce programme a, en effet, été conçu à une époque où l'on pouvait craindre des tensions sur marché du combustible. Ce pronostic ne s'est pas révélé juste. J'ajoute que l'arrêt de Superphénix n'est en aucune façon lié à des questions de sûreté. Les modalités de cet arrêt seront fixées dans les tout prochains jours.
S'agissant des questions relatives à l'aval du cycle, notamment pour les déchets à très longue durée de vie, j'ai souhaité que la transparence la plus grande soit observée, tant sur l'activité même des installations de la COGEMA que sur les procédures de décisions relatives à la mise en oeuvre des laboratoires souterrains.
J'ai également demandé, comme M. Besson l'a rappelé, que les recherches concernant les alternatives au stockage en couche géologique profonde, notamment le stockage en surface ou sub-surface, bénéficient de moyens suffisants pour que, lors des choix définitifs, qui n'interviendront pas l'avant 2006, comme le prévoit la loi de décembre 1991, la collectivité nationale dispose de tous les éléments techniques et scientifiques pour se déterminer sur les trois voies de recherche prescrites par la loi Bataille. A ce titre, j'ai demandé que les crédits consacrés par le CEA au troisième axe de recherche augmentent de 15 % en 1998.
La transparence, c'est également l'attachement que je réaffirme à l'indépendance scrupuleuse de l'autorité de sûreté et de son appui technique, l'Institut de protection et de sûreté nucléaire. Enfin, nous souhaitons conduire une politique équilibrée sur le plan énergétique. L'équilibre que nous souhaitons doit permettre la meilleure valorisation possible des ressources énergétiques de toute nature. Il s'agit non pas de prôner le « tout nucléaire » ni le « tout électrique », mais d'utiliser, dans les meilleures conditions technico-économiques, les différentes formes d'énergie.
Dans la production d'électricité, le gaz peut paraître compétitif lorsqu'il est utilisé dans les procédés performants de cogénération. De même, l'énergie éolienne affirme progressivement sa compétitivité.
La voiture électrique est un bon moyen de transport urbain à condition que les progrès technologiques, grâce notamment au programme de recherche et développement pour l'innovation et la technologie, le PREDIT, et aux efforts des constructeurs, nous permettent de doubler son autonomie, qui n'est actuellement que de quatre-vingts kilomètres.
M. Jean-Pierre Raffarin. On en est déjà à deux cents !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Grâce à l'énergie éolienne et aux autres énergies renouvelables, nous avons une politique écologique et énergétique parfaitement équilibrée. L'originalité de la démarche française repose sur un pôle nucléaire fort mais aussi sur une diversification des sources d'énergie que les nouvelles technologies et les progrès de la science nous permettent de développer. Tel est le sens, par exemple, du contrat EOLE 2005 qu'EDF vient d'annoncer.
Il s'agit, enfin, d'une politique soucieuse de la qualité de l'environnement. Alors que vient de s'ouvrir le sommet de Kyoto sur la lutte contre les effets de serre, il convient de souligner la situation exemplaire de la France. Notre pays affiche en effet l'un des niveaux d'émission de dioxyde de carbone par an par habitant les plus bas parmi les pays industrialisés. Ce taux est en effet, en France, de 1,7 tonne contre 5,2 tonnes aux Etats-Unis.
Cette bonne performance est due, je le répète, à la part importante prise par l'énergie nucléaire, aux énergies renouvelables, aux efforts de maîtrise réalisés depuis vingt ans et à un parc automobile économe en énergie.
Je réponds sur le rôle fondamental de l'ADEME - M. le rapporteur spécial l'a souligné - et sur la question relative au milliard de francs de trésorerie dont elle dispose aujourd'hui et qui, à mon avis, doit être utilisé de manière beaucoup plus active pour lui permettre de remplir ses missions.
Dans le domaine des transports, j'ai donné une impulsion forte pour accélérer le développement des filières alternatives : le véhicule électrique, pour lequel EDF amplifie son action, l'utilisation du GPL, dont je suis un promoteur, et du gaz naturel pour véhicules, qui devra équiper les flottes dites « captives » des administrations et des grandes entreprises publiques.
C'est ainsi que la RATP s'est engagée à commander, sur mon initiative et sur celle de mon collègue Jean-Claude Gayssot, deux cents véhicules roulant au gaz naturel pour le renouvellement de son parc.
S'agissant de la fiscalité des carburants, monsieur Besson, je comprends votre souci, mais je vous rappelle l'ampleur des enjeux liés à cette question et les risques importants de déstabilisation pour notre industrie automobile et le transport routier. Ne courons pas de tels risques pour une question de principe et prenons le temps d'avancer progressivement.
Depuis ma prise de fonction, j'ai porté une attention particulière au problème des affaissements miniers en recevant personnellement les victimes, en veillant à leur indemnisation, en débloquant des crédits très significatifs et en me rendant sur place. Pour les sinistres d'Auboué et de Moutiers en Lorraine, des réunions de concertation avec les parties concernées ont pu aboutir à la définition d'un mode d'indemnisation qui est actuellement mis en oeuvre et qui est satisfaisant pour la majorité des sinistrés.
M. Jean Besson, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Mais des questions non résolues demeurent s'agissant de la gestion de la fin de l'exploitation des mines. C'est pourquoi j'ai chargé le Conseil général des mines d'une mission de réflexion sur les structures à mettre en place pour gérer efficacement la période suivant l'exploitation.
Par ailleurs, et toujours en réponse à M. Besson, j'ajoute que je partage totalement son souhait d'un examen prochain par le Parlement d'un projet de loi relatif au code minier dans les départements d'outre-mer.
Pour les bassins miniers, monsieur Percheron, le maintien d'un soutien important de l'Etat au développement économique reste nécessaire. Il est donc prévu en 1998 pour le fonds d'industrialisation du bassin minier, le FIBM, rebudgétisé par mes soins, une enveloppe de 140 millions de francs en autorisations de programme et, dès 1997, 80 millions de francs s'ajouteront aux crédits déjà engagés et seront disponibles dans les régions avant la fin de l'année.
Enfin, j'ai demandé que soient examinées les conditions d'amélioration, souhaitée par nombre d'entre vous, de la gestion du FIBM, avec en particulier l'extension aux services à l'industrie, comme l'ont souhaité plusieurs élus du Nord de la France.
En conclusion, l'action que je conduis au nom du Gouvernement est entièrement centrée, comme M. Weber l'a souligné, sur l'amélioration de l'environnement de nos entreprises industrielles et sur l'accompagnement des adaptations qu'elles ont à conduire.
Cette politique, vous l'avez vu, a de nombreuses facettes, qui vont de la recherche industrielle à la politique énergétique et de l'aide au développement des PMI aux services publics industriels, mais elle n'a qu'un objectif : la compétitivité de nos entreprises pour la croissance et pour l'emploi.
Nous agissons pour une industrie performante, c'est-à-dire une industrie compétitive, conquérante et rentable, car il n'y a pas d'autre voie dans notre système économique pour le développement, l'investissement et l'emploi ; nous agissons pour une industrie réactive, c'est-à-dire capable d'occuper rapidement les segments les plus dynamiques et de s'adapter très vite aux évolutions techniques, commerciales et organisationnelles, une industrie contribuant à la qualité de l'environnement, une industrie enfin - et c'est, pour le Gouvernement, bien sûr, un aspect essentiel - qui contribue à la cohésion sociale de notre pays, principalement en participant de manière significative à la création d'emplois.
J'ai le plaisir de constater qu'une grande entreprise multinationale japonaise a décidé de s'installer sur notre sol. Elle choisira, comme elle a déterminé l'Etat dans lequel elle s'installe, la région dans laquelle elle s'implantera.
N'est-ce pas, au fond, un encouragement tout à fait remarquable que, avec éclat, une entreprise de cette taille, de cette technologie, de cette performance internationale, choisisse la France au moment où tant et tant de thuriféraires de l'économie ultra-libérale nous disent que ce que nous faisons sur l'aménagement du temps de travail, sur la liaison entre la croissance économique et industrielle et le social, sur l'équilibre et la cohésion sociale, sont autant d'obstacles au développement industriel ? Je crois que la réponse à cette question vient d'être apportée par Toyota !
En choisissant la France, celle-ci choisit la capacité d'être compétitive, d'être internationale et de gagner. Elle a donc fait le bon choix. Je m'en félicite et, avec moi je pense, l'ensemble de la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et C et concernant l'économie, les finances et l'industrie : I. - Industrie.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : moins 659 662 530 francs. »