M. le président. Par amendement n° 106, M. Estier, Mme Pourtaud, MM. Weber, Sérusclat et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 18 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, les mots : "chaque année" sont remplacés par les mots : "deux fois par an".
« II. - La deuxième phrase du premier alinéa de ce même article est ainsi rédigée :
« Ces rapports sont adressés au Président de la République, au Gouvernement et au Parlement, à l'ouverture de la session pour le premier et six mois après pour le second. »
« III. - Le début de la troisième phrase du premier alinéa est ainsi rédigé :
« Dans ces rapports,... (le reste sans changement) . »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Il s'agit, en fait, d'un amendement très simple. Nous proposons de renforcer le rôle du CSA et d'entourer ses travaux de plus de transparence. Les autorités administratives indépendantes ne doivent pas échapper aux impératifs démocratiques. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel est chargé d'une mission de contrôle, mais il devrait également avoir le souci d'informer, voire de former le téléspectateur.
Nous savons combien la télévision est, de fait, qu'on le veuille ou non, un des rouages essentiels de la démocratie moderne. Nous devons donc nous efforcer de permettre au téléspectateur de devenir un téléspectateur citoyen.
Par cet amendement, nous proposons de faire en sorte que le CSA rende plus souvent compte de ses travaux. Nous proposons qu'il remette deux rapports par an au lieu d'un, ce qui est le cas actuellement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.
La transparence des travaux du CSA nous paraît aussi un thème essentiel.
Cependant, le rapport annuel du CSA est d'ores et déjà un instrument extrêmement utile. Imposer à l'autorité administrative deux rapports par an lui créerait des contraintes sans présenter d'avantages très décisifs, d'autant que nous savons aujourd'hui qu'elle peut déjà manquer de moyens pour ses fonctions les plus fondamentales.
Voilà pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, sachant, par ailleurs, que l'actualité permet souvent que les travaux du CSA soient mis en avant-scène, y compris de nos travaux.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture. Le CSA établit déjà un rapport par an. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 106, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 43, M. Cluzel propose d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article 20-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Le libre accès aux grandes manifestations ou compétitions sportives retransmises par un service de communication audiovisuelle est garanti à l'ensemble de la population.
« Des décrets, pris après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, fixent la liste des manifestations ou des compétitions sportives dont les droits de retransmission ne peuvent être acquis, en exclusivité, par un service de télévision lorsque la retransmission ne peut être reçue que par un public autorisé à la recevoir. »
Par amendement n° 107, M. Estier, Mme Pourtaud, MM. Weber, Sérusclat et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article 20-1 de la loi n° 80-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - Le libre accès, par la télévision, aux manifestations sportives d'un très grand intérêt pour le public est garanti à l'ensemble de la population.
« Des décrets, pris après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, fixent la liste des manifestations sportives dont les droits de retransmission ne peuvent être acquis en exclusivité par une entreprise de communication audiovisuelle dont les programmes ne peuvent être reçus sans conditions particulières d'accès, ou par une partie substantielle du public. »
La parole est à M. Cluzel, pour défendre l'amendement n° 43.
M. Jean Cluzel. Cet amendement vise à renforcer le libre accès des téléspectateurs aux grandes compétitions sportives.
Je propose que le pouvoir réglementaire fixe la liste des grandes manifestations ; évidemment, cette liste pose problème, j'en suis parfaitement conscient.
Le CSA s'est déclaré, le 23 janvier dernier, très favorable à une telle initiative. Elle s'inspire - permettez-moi de le rappeler - à la fois de l'article 9 de la convention transfrontière du Conseil de l'Europe ratifiée par la France le 1er février 1995 et de l'article 18 de la convention conclue le 1er juin 1995 entre Canal Plus et le CSA.
Cet amendement vise à soumettre l'ensemble des diffuseurs qui ne peuvent être reçus sans conditions d'accès particulières au respect d'un dispositif calqué sur celui qui est applicable à Canal Plus et, en outre, déjà mis en place en Grande-Bretagne. Ce n'est donc pas une innovation européenne.
Ce principe de libre retransmission des événements de première importance devrait être également consacré à l'échelon communautaire, puisque le Parlement européen vient d'adopter un amendement sur la directive « télévision sans frontière », dont je vous fais l'économie de la lecture. Je vous demande de bien vouloir me croire sur parole !
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud, pour présenter l'amendement n° 107.
Mme Danièle Pourtaud. Mes arguments sont assez proches de ceux de M. Cluzel.
La retransmission des événements sportifs est aujourd'hui un enjeu commercial majeur pour les télévisions. Canal Plus a réussi à obtenir l'exclusivité de la retransmission des rencontres de football du championnat de première division française. Même si la chaîne a par ailleurs pris l'engagement de ne pas acheter de droits exclusifs pour un certain nombre d'événements dont les jeux Olympiques et la Coupe du monde de football, cette possibilité ouverte à des services de télévision cryptés ou locaux de bloquer les droits de retransmission est inquiétante. Le Parlement européen, comme vient de le rappeler M. Cluzel, s'est fait l'écho de cette inquiétude largement partagée par les Etats membres de l'Union européenne en adoptant à l'unanimité un amendement à la directive « télévision sans frontière » tendant à créer une liste européenne de manifestations accessibles à tous, en direct, sur les chaînes de télévision non codées.
Par cet amendement, nous proposons au Sénat de s'inscrire dans cette démarche, en assurant à tous un accès aux manifestations sportives d'importance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 43 et 107 ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Tout en étant favorable à l'esprit qui sous-tend ces deux amendements, la commission a émis un avis défavorable. M. Cluzel et Mme Pourtaud ont rappelé que ce dossier était débattu à l'échelon européen puisque, après une longue réflexion, la directive « télévision sans frontière » modifiée devrait prochainement être adoptée. Il est sans doute plus raisonnable de répondre à la question soulevée par ces amendements lors de la transposition de cette directive européenne dans notre droit interne. Il ne faudrait pas que nous soyons obligés, dans quelques mois, de modifier un texte adopté aujourd'hui. C'est uniquement pour cette raison pratique que la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture. Sur le principe, le Gouvernement est sensible aux besoins d'encadrer l'acquisition des droits exclusifs des manifestations sportives d'un très grand intérêt pour le public pour garantir le libre accès de la population à ces manifestations. Tel est d'ailleurs, comme vient de le souligner Mme Pourtaud, l'objet de l'amendement déposé par le Parlement européen dans le cadre de la réforme de la directive « télévision sans frontière », à laquelle la France s'est déclarée favorable.
Il me semble néanmoins opportun d'attendre l'adoption du texte européen avant de légiférer à l'échelon français pour éviter toute incompatibilité de notre droit national avec la future directive.
Je demanderai donc à M. Cluzel de bien vouloir accepter de retirer son amendement, en lui assurant que, si la nouvelle directive « télévision sans frontière » prévoit en juin prochain une telle disposition, nous la transposerons naturellement dans notre droit national.
Telles sont les précisions que je tenais à apporter.
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Je ne veux pas empêcher notre collègue et ami M. Jean Cluzel de retirer son amendement ; mais je voudrais confirmer tout ce qui vient d'être dit : la commission a été très sensible à l'intention et s'associe à l'objectif, parce qu'elle sait qu'il s'agit effectivement d'une demande de nos compatriotes.
Monsieur le ministre, j'ai relevé dans votre propos un point qui risquerait peut-être de passer inaperçu si je ne le rappelais pas : vous venez de nous dire que la directive « télévision sans frontière » pouvait être prête prochainement, et vous avez même cité la date du mois de juin prochain.
J'insiste sur ce point, car, si nous devions attendre autant que nous avons déjà attendu, l'initiative de M. Jean Cluzel et de nos collègues du groupe socialiste serait parfaitement justifiée !
M. Pierre Laffitte. Exactement !
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Nous pourrions en effet attendre encore pendant des mois et des mois, voire des années !
M. Christian Poncelet. Très bien !
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Si c'est au mois de juin prochain que la directive sera prête et que, par conséquent, nous serons saisis alors vraisemblablement d'un projet la transposant dans le droit français, à ce moment-là, la position de la commission est parfaitement justifiée. Je demande à M. le ministre de bien vouloir confirmer le bien-fondé de notre interprétation.
M. le président. Monsieur Cluzel, l'amendement n° 43 est-il maintenu ?
M. Jean Cluzel. Monsieur le président, sous trois gerbes de fleurs, mon amendement est « enterré » et, par conséquent, retiré !
M. le président. L'amendement n° 43 est retiré.
Madame Pourtaud, l'amendement n° 107 est-il maintenu ?
Mme Danièle Pourtaud. Je ne voudrais pas décevoir mes collègues, et je maintiens donc cet amendement, monsieur le président !
Personnellement, je préfère tenir plutôt que courir ; je ne comprends donc pas certains de mes collègues qui, tout en reconnaissant qu'il s'agit d'une excellente idée, estiment qu'il est urgent d'attendre pour l'appliquer.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 107.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je remercie M. Adrien Gouteyron d'avoir insisté sur l'intérêt que la commission a porté à ces deux amendements, et sur son approbation tacite, même si elle ne les a pas retenus pour des raisons stratégiques : à une échéance très prochaine, il y aura en effet la directive européenne « télévision sans frontière ».
Je veux cependant dire à M. le minsitre qu'un problème risque de se poser à l'échelle européenne. En effet, compte tenu de leur diversité, tous les pays ne portent pas un intérêt identique aux mêmes manifestations sportives, et n'ont pas le même classement des grandes manifestations sportives devant donner librement accès à tous. La fameuse règle de la subsidiarité pourrait donc éventuellement jouer en la matière.
Voilà l'appréciation complémentaire dont je souhaitais vous faire part ; cela dit, j'approuve totalement la position de la commission.
M. Jack Ralite. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Pour ma part, j'adhère à la position qu'a prise Mme Pourtaud : il est regrettable de retirer l'amendement étant donné les aléas qui ont entouré depuis quelques mois la discussion sur le contenu de la directive « télévision sans frontière ».
Je suis sensible aux propos de M. le ministre, mais précisément, un vote favorable du Sénat sur cette question lui donnerait une force supplémentaire dans des négociations au cours desquelles il va devoir affronter des partenaires qui ne sont pas faciles.
Alors qu'on réclame une interactivité, un nouveau rapport entre la nation et l'Europe, c'est une expérience à tenter. S'il faut modifier après, on verra ! Mais, au moins, affirmons nos préoccupations !
Le plus intelligent, ce serait de voter les amendements de Mme Pourtaud et de M. Cluzel, puisque tout le monde les approuve. Pourquoi attendre que des instances extérieures se prononcent ?
Je le répète : les discussions sur la directive ont été une partie de yo-yo au cours desquelles nous avons déjà perdu quelques plumes ! Aidons M. le ministre, et disons-lui : « Vous pensez cela, nous sommes derrière vous ! »
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 107, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 79, MM. Ralite et Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 20-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... . - Sont soumis aux dispositions du présent titre :
« I. - Les services de communication audiovisuelle mis à la disposition du public par des organismes établis sur le territoire français.
« Pour l'application du présent titre, un organisme est considéré comme établi sur le territoire français dans l'un des cas suivants :
« - il a son siège social en France et les décisions relatives à la programmation sont prises en France ;
« - il exerce sur le territoire français des activités de communication audiovisuelle stables et réelles, notamment caractérisées par l'ensemble des effectifs employés sur le territoire français. Dans le cas où ces mêmes activités se répartissent de façon comparable entre le territoire français et celui d'un Etat membre de l'Union européenne, le seul critère du siège social prévaut.
« II. - Les services de communication audiovisuelle mis à la disposition du public par des organismes établis hors du territoire français qui utilisent une fréquence hertzienne accordée par la France ou un réseau câblé situé en France ou une capacité satellitaire exploitée par un organisme établi en France ou une liaison montante vers un satellite située en France.
« III. - Les services de communication audiovisuelle diffusés par des organismes qui s'établissent hors de France pour se soustraire aux règles qui leur seraient applicables en France, où ils exercent principalement leurs activités et où ils génèrent l'essentiel de leurs ressources. »
La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Cet amendement vise à insérer dans le projet de loi un article nouveau renforçant le dispositif antidélocalisation.
Dans la première version du projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui, le Gouvernement prévoyait d'introduire de telles dispositions, qui, seules, peuvent garantir, au-delà des mots, le principe de l'exception culturelle à laquelle nous sommes, pour notre part, attachés.
Les questions nouvelles posées par l'apparition des nouvelles technologies appellent des réponses nouvelles.
Un vide juridique existe dès que les services sont émis depuis l'étranger ou que, établis en France, ils utilisent une liaison satellitaire montante hors de France.
Ainsi, la chaîne « Rendez-vous », qui dispose de studios à Issy-les-Moulineaux, utilise un faisceau montant sur Eutelsat qui passait par la Suède et qui passe désormais par la Hongrie.
Notre pays ne peut veiller au respect des règles qu'il énonce dès lors que les émissions sont émises depuis l'étranger.
L'amendement n° 79 vise donc à la mise en place d'un dispositif réellement dissuasif en matière de délocalisation, un dispositif qui permette de rendre crédibles les dispositions prises en matière de défense de notre outil audiovisuel et de notre production notamment.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Défavorable, monsieur le président !
Les critères de détermination de la compétence nationale seront fixés par la directive « télévision sans frontière », qui sera transposée.
La négociation est en cours d'achèvement, ce qui ne nous incite pas à aller plus avant pour l'instant.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture. Défavorable, monsieur le président, et ce pour les mêmes raisons.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 79.
M. Jack Ralite. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Il s'agit toujours de cette fameuse directive « télévision sans frontière ».
Nous avons eu des échanges de vues à plusieurs reprises dans cette enceinte, monsieur le ministre, et nous sommes parvenus au constat qu'il y avait entre nous une certaine convergence. Pourtant, à Bruxelles, cela s'est passé autrement, et l'histoire a même présenté des aspects comiques.
En effet, le Parlement a voté cette disposition à la majorité relative ; mais, la majorité absolue étant requise, il a manqué vingt-trois voix, dont vingt-deux françaises. Il s'agissait pour l'essentiel - je le relève au passage - de voix du Front national. Ce parti parle beaucoup de la nation, mais, quand il s'agit de la défendre, il n'est pas présent.
Quoi qu'il en soit, nous avons tout intérêt à indiquer notre position, car cela aide les ministres là-bas !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 79, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)


Article 5