M. le président. « Art. 1er. _ Tout salarié lié par un contrat de travail de droit privé et relevant du régime d'assurance vieillesse de base mentionné au titre V du livre III du code de la sécurité sociale ou à l'article 1024 du code rural ainsi que des régimes de retraite complémentaire mentionnés au titre II du livre IX du code de la sécurité sociale peut adhérer à un plan d'épargne retraite répondant aux conditions fixées par la présente loi. »
Par amendement n° 1, M. Marini, au nom de la commission, propose de compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les salariés employés par une entreprise dans laquelle ne sont pas proposés de plans d'épargne retraite, dans le délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, peuvent demander leur adhésion à un plan d'épargne retraite existant. Si, postérieurement à cette adhésion, un plan d'épargne retraite est proposé dans leur entreprise, ils peuvent demander que les droits qu'ils ont acquis soient transférés intégralement et sans pénalité sur ce plan. Un décret fixe les conditions d'application du présent alinéa. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 64, présenté par le Gouvernement, et tendant à rédiger comme suit le début du texte proposé par l'amendement n° 1 :
« A défaut d'intervention d'un accord interprofessionnel national ou d'une décision unilatérale couvrant l'ensemble des salariés défini dans le champ de l'épargne retraite défini à l'alinéa précédent, les salariés... »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 1.
M. Philippe Marini, rapporteur. L'amendement n° 1 vise en quelque sorte à prévoir un filet de sécurité. La disposition présentée concerne en effet l'adhésion des salariés employés par une entreprise qui ne proposerait pas de plan d'épargne retraite.
La commission estime que, si une telle situation persiste plus d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, ces salariés doivent être en mesure de demander leur adhésion à un plan d'épargne existant.
Le Sénat avait déjà adopté en première lecture une disposition d'objet analogue, que l'Assemblée nationale a ensuite subordonnée à une double condition : l'échec préalable d'une négociation collective sur le plan national et un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi.
L'amendement n° 1 tend à maintenir la seconde condition posée par l'Assemblée nationale, mais à ramener le délai à un an. En effet, un tel délai est vraisemblablement suffisant pour s'organiser et pour mettre en place, le cas échéant, les dispositions conventionnelles qui seraient susceptibles de donner naissance à un fonds d'épargne retraite. M. le président. La parole est à M. le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 64 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1.
M. Jean Arthuis, ministre de l'économie et des finances. La commission a adopté l'amendement n° 1, dont le premier objet est de réintégrer à l'article 1er la possibilité, ouverte à l'article 6 dans le texte adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, pour un salarié qui ne bénéficie pas d'un plan dans son entreprise, d'adhérer à un plan déjà existant. La commission a en effet estimé que, s'agissant d'un problème d'adhésion et non pas de souscription, cette disposition avait plus sa place à l'article 1er qu'à l'article 6.
Je ne m'opposerai pas à ce transfert, tout en faisant remarquer que la position de l'Assemblée nationale n'était pas non plus sans fondement, puisque l'article 6 traite non seulement des questions de souscription mais également des conditions dans lesquelles l'adhésion est proposée aux salariés.
Le second objet de l'amendement n° 1 est d'élargir les possibilités d'adhésion individuelle à un plan déjà existant en cas d'absence de proposition de plan dans l'entreprise. Le délai d'attente avant l'intervention de cette possibilité serait réduit de deux ans à un an après la promulgation de la loi. De plus, cette possibilité ne serait plus conditionnée par l'absence d'accord interprofessionnel ou de décision unilatérale à portée nationale.
La question de l'adhésion individuelle à l'extérieur de l'entreprise est particulièrement délicate. Il faut en effet mettre en place un dispositif qui ne laisse personne sur le bord du chemin.
M. Philippe Marini, rapporteur. Tout à fait !
M. Jean Arthuis, ministre de l'économie et des finances. Mais il faut également laisser la plus grande place à la négociation collective. L'Assemblée nationale a voulu donner une prééminence nette à la négociation collective, et ce n'est qu'en cas d'échec de celle-ci à tous les niveaux - entreprise, branche ou échelon national interprofessionnel - que l'adhésion individuelle devenait possible.
La commission des finances souhaite donner une place un peu plus importante à l'adhésion individuelle en réduisant le délai d'attente de deux ans à un an. Elle ne souhaite pas, par ailleurs, subordonner cette faculté a l'absence de dispositif national mis en place par accord interprofessionnel ou, à défaut, par décision unilatérale d'un groupement d'employeurs.
Je comprends la préoccupation de la commission des finances. Cependant, le Gouvernement est très attaché à ce que la négociation collective soit privilégiée. Un temps suffisant, s'agissant d'une matière délicate, doit lui être laissé à tous les niveaux pour mettre en place le dispositif. Le Gouvernement souhaite donc que la faculté d'adhésion individuelle à un plan déjà existant à l'extérieur de l'entreprise ne soit ouverte qu'en dernier ressort, et que si les mécanismes collectifs font réellement défaut.
En outre, il sera plus aisé pour un salarié de se rattacher à un fonds d'épargne retraite mis en place à l'échelon national, plutôt que de chercher un plan d'entreprise déjà existant qui lui convienne et qui voudra bien l'accepter.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 1, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 64.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 64 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le président, la commission n'a pas été en mesure d'examiner ce sous-amendement ; mais, à titre personnel, je formule un avis favorable sur ce texte. Ce dernier, en effet, se situe bien dans la logique du dispositif qu'il convient de mettre en place : nous devons nous assurer que personne ne reste au bord du chemin et que le maximum a été fait pendant un délai raisonnable pour l'obtention d'un accord entre partenaires sociaux, au niveau approprié.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 64.
M. Marc Massion. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. Monsieur le président, cette explication de vote portera à la fois sur le sous-amendement n° 64 et sur l'amendement n° 1.
Le groupe socialiste ne votera par ces deux textes, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, ils ne règlent en rien les distorsions d'égalité qui sont contenues dans cet article et que nous avons déjà relevées en première lecture.
Par ailleurs, l'amendement n° 1 vise à prévoir un délai d'un an pour l'adhésion individuelle. Cela signifie que, si les négociations syndicales en vue de l'élaboration d'un plan dépassent ce délai, le recours à des adhésions individuelles sera alors possible, ce qui me paraît fâcheux. Au lieu de prévoir dans ce cas la possibilité d'un transfert possible, mieux aurait valu ne pas limiter dans le temps les négociations salariales et laisser ainsi les salariés librement discuter.
En outre, permettre, dans le cas où l'entreprise n'aurait pas de plan, que le salarié puisse adhérer à un plan d'une autre entreprise me paraît bien irréaliste.
Enfin, ne vaudrait-il pas mieux parler de transfert des actifs représentatifs des droits plutôt que de transfert des droits ?
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Si le dispositif proposé prévoit certes des négociations, il encadre néanmoins ces dernières dans le temps, de sorte que, le délai étant passé, la décision peut être prise unilatéralement par le chef d'entreprise.
Nous attirons l'attention de la Haute Assemblée sur le fait que cette disposition, si elle était adoptée, constituerait un précédent, et que certains chefs d'entreprise auraient alors objectivement intérêt à faire traîner les négociations : l'accord n'intervenant pas dans les temps, ils pourraient alors retrouver toute liberté dans la fixation des modalités d'adhésion à ce plan d'épargne retraite.
Des régimes différents pourraient ainsi coexister au sein de l'entreprise, privilégiant certaines catégories de salariés et entraînant un accroissement des disparités entre ces derniers. En effet, le schéma qui prévalait pour les stock-options peut tout à fait être reproduit.
Dans ces conditions, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre le sous-amendement n° 64 et l'amendement n° 1.
Mme Joëlle Dusseau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau. Je considère moi aussi tout à fait dommageable de ramener le délai des négociations à un an. Chacun sait, en effet, que ces dernières prennent du temps, et que le dispositif à mettre en place est compliqué et lourd de conséquences pour les salariés.
En outre, comme M. Loridant, je pense que certains chefs d'entreprise auront intérêt à faire traîner ces négociations et donc à dépasser le délai d'un an pour éviter un accord.
Je voterai donc contre le sous-amendement n° 64 et l'amendement n° 1.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 64, accepté par la commission.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 66, le Gouvernement propose de compléter in fine l'article 1er par une phrase ainsi rédigée :
« Les avocats salariés relevant de la caisse nationale des barreaux français mentionnée à l'article L. 723-1 du code de la sécurité sociale peuvent également adhérer à un plan d'épargne retraite. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Arthuis, ministre de l'économie et des finances. La loi du 31 décembre 1990 relative à la profession d'avocat a unifié un certain nombre de professions qui, jusque-là, s'exerçaient séparément ; c'est ainsi que des avocats peuvent être salariés de cabinets.
Certains avocats salariés, notamment les anciens conseils juridiques, relèvent du régime des retraites par répartition, y compris pour les retraites complémentaires, et peuvent donc bénéficier de l'accès aux plans d'épargne retraite.
D'autres avocats salariés ne sont pas soumis à ces régimes de retraite complémentaire, et, compte tenu de la rédaction actuelle de la proposition de loi, ne pourraient pas accéder à cette possibilité d'épargne retraite.
A l'Assemblée nationale, M. Jean-Pierre Philibert avait posé la question sous forme d'amendement ; faute d'expertise, je l'avais invité à retirer ce dernier, prenant l'engagement de proposer un texte au Sénat si la nécessité était confirmée.
Le résultat des derniers contacts pris justifie que cette faculté soit ouverte aux avocats qui exercent sous statut salarié et qui, du fait de la rédaction du texte, n'auraient pas accès à l'épargne retraite.
Tel est l'objet de l'amendement n° 66.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Je me réjouis de la sollicitude exprimée pour les situations dont il a été fait état. Bien sûr, à titre personnel - la commission n'a pu examiner cet amendement - j'émets un avis favorable sur ce texte en rappelant que, lors de la première lecture, nous avions exprimé un souci identique, si je ne m'abuse, pour les agriculteurs salariés : nous avions estimé que moyennant peut-être certains aménagements, ils étaient sans doute, eux aussi, compris dans le champ d'application de la loi.
M. Jean Arthuis ministre de l'économie et des finances. Ils le sont.
M. Philippe Marini, rapporteur. Les apaisements nécessaires sont donc apportés pour les secteurs dans lesquels la profession peut être exercée comme salarié ou comme non-salarié, ce qui est notamment le cas de la profession d'avocat.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 66, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2