M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons le débat consécutif à la déclaration du Gouvernement sur l'agriculture.
Dans la suite du débat, la parole est à M. Huchon.
M. Jean Huchon. L'heure étant tardive et mon temps de parole réduit, je vais abréger mes propos.
Monsieur le ministre, le ministère de l'agriculture, dont vous avez la charge, est un grand ministère. Mais ne devrait-on pas plus justement parler du ministère des agricultures ?
En effet, l'énorme panoplie des productions recouvre des spécialités très diversifiées, et il serait démagogique et mensonger de prétendre que l'ensemble des filières est en crise. Ce serait céder à la tentation actuelle de dire que tout va mal et que tout est désespéré.
Non ! certaines activités sont rentables. Ainsi, les productions végétales se sont adaptées à la nouvelle PAC avec succès et profit ; la situation est bonne. Il y a cependant un inconvénient, puisque l'on fait appel à une assistance financière européenne et nationale.
Ne vaudrait-il pas mieux que le marché assure une juste rémunération de l'exploitant et une réponse adaptée à la consommation ? Hélas ! monsieur le ministre, vous devez affronter les graves problèmes de la mondialisation et du déséquilibre international. Les producteurs européens sont mis en concurrence directe avec des pays qui n'ont pas les mêmes contraintes salariales, fiscales et sociales.
Cette situation vaut pour toutes les activités de production, qu'elles soient agricoles ou industrielles. Elle est pour l'instant sans solution ou tentative de solution mais il faudra bien que, dans un cadre qui, je crois, ne peut être qu'européen, soit mis fin à une situation qui ne peut que nous conduire vers une crise plus profonde et un chômage en croissance.
Les agriculteurs français attendent avec impatience une monnaie unique assez solidement installée qui règle définitivement les problèmes internes à l'Europe ; je pense notamment aux dévaluations fantaisistes pratiquées par nos voisins au cours de ces dernières années et qui nous ont fait tant de mal. L'Europe incomplète et compliquée que nous pratiquons doit évoluer le plus rapidement possible vers des structures communautaires dignes de ce nom.
Les agriculteurs en sont conscients, ils doivent beaucoup à l'Europe depuis trente ans. Mais nous sommes au milieu du gué et il nous faut avancer pour ne pas être emportés par le courant. Les agriculteurs, mais aussi l'ensemble de la population, souhaitent que des pas décisifs soient rapidement franchis pour que l'avenir de l'agriculture française puisse s'établir sur des bases solides.
Je n'entrerai pas dans les détails, mais je m'associe aux questions qui ont été posées cet après-midi par notre collègue Alain Pluchet. Nous nous en remettons à votre fermeté bien connue, monsieur le ministre, pour que l'agriculture soit défendue - je pense ici aux accords sur le PAC ainsi qu'au renouvellement de contrats avec les Etats-Unis et d'autres pays - et pour que tout soit remis en route.
Dans le court moment qui m'est imparti, je voudrais évoquer deux secteur de l'agriculture qui ont été éprouvés ces derniers mois. Il s'agit de la viande bovine et des fruits et légumes.
Vous avez, monsieur le ministre, fait le maximum, et nous vous en rendons hommage, pour que ce cataclysme qui s'est abattu sur les producteurs de viande ait les conséquences les moins graves possibles. Vous avez dû vous battre contre cette monstrueuse intoxication qui a jeté le discrédit sur un produit et l'opprobre sur les éleveurs. Certes, les autorités anglaises sont coupables, mais la France a, depuis des années, pris les précautions nécessaires. On peut donc être surpris par l'importance donnée à ce danger, alors que les dégâts sont incertains et le nombre des victimes est peu significatif à ce jour.
Ma situation d'ancien éleveur m'enlève toute impartialité. Je me permettrai donc de vous livrer quelques extraits du commentaire d'un journaliste de ma région, critique de télévision - c'est dire qu'il n'est pas spécialiste du problème - mais aussi humaniste : La Marche du siècle , écrit-il, nous a offert sur le dossier lancinant de la vache folle une émission-auberge espagnole : chacun y trouve ce qu'il y apporte. Un peu avant, j'avais eu la curiosité de me procurer sur cette question l'essentiel de la documentation britannique et française, ainsi que les rapports de la Communauté européenne. Celui qui, comme moi, aura consulté cette prose et écouté l'émission ne pourra qu'énoncer ce constat d'évidence : la vache folle représente la plus formidable mystification politico-médiatique de notre temps. » Le journaliste poursuit : « Mais nous portons tous, dans notre sang, une protéine vénéneuse qui met quarante ans à mûrir. Elle s'appelle la vieillesse... Et nous n'entendons pourtant résonner aucun tambour médiatique autour de la maladie d'Alzheimer ou de celle de Parkinson, autres maladies de dégénérescence autrement plus répandues. »
Plus loin, le journaliste conclut : « Aujourd'hui, les séquelles de la vache folle continuent de semer l'angoisse et le doute, qui débouchent sur l'effondrement du marché, la ruine de centaines de milliers de Français.
« Des chercheurs, nous dit-on, auraient déniché un indice à propos de la transmissibilité du prion de la bête à l'homme. La belle affaire ! Cette débauche d'alarmes, d'efforts et de moyens est dédiée à une "épidémie" qui a fait onze morts en trois ans à travers l'Europe... C'est dix fois moins qu'un dimanche d'autoroutes. »
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Jean Huchon. Monsieur le ministre, vous avez obtenu des compensations qui paraissaient, initialement, insuffisantes. Ce que vous nous avez annoncé ce matin nous remplit pourtant d'espoir. Il faut, en effet, espérer que l'enveloppe qui sera répartie d'une façon, je crois, tout à fait rationnelle, en décentralisant la décision, ramènera un peu de sérénité et d'objectivité. Il faut espérer, de même, que les consommateurs retrouveront facilement le chemin de la boucherie, sans suspicion et sans état d'âme.
La production de viande de qualité, élément fondamental et traditionnel de l'agriculture française, ne doit pas injustement sombrer sous le choc d'une tempête médiatique. Il faut que nos éleveurs puissent vivre honnêtement de leur travail. Ils ont eux-mêmes des efforts importants à fournir, sur le plan tant de la qualité que de la transparence de la filière, qui est un énorme problème.
L'origine du produit doit pouvoir être constatée par la ménagère, ce qui n'est pas courant dans l'actuel système de distribution. Des efforts sont déjà faits, mais il faut aller plus loin et faire en sorte que cette traçabilité ne soit pas fantaisiste.
Espérons, avec beaucoup de professionnels, que ce moment difficile pour les producteurs de viande sera l'occasion d'une remise en cause du système de production et de la mise en place rationnelle de la transparence réelle de la filière, dans le respect de toutes ses composantes, y compris les producteurs.
J'en viens maintenant à la production fruitière et légumière. Le Sénat y est sensible, et depuis longtemps. Il y a trois ans, la commission des affaires économiques et du Plan avait mis en place, à ce titre, une mission d'information chargée d'examiner l'ensemble du dossier.
Notre rapport, établi au terme de nombreuses auditions, a abouti à la rédaction de plusieurs dizaines de propositions.
M. le président. Mon cher collègue, il reste très peu de temps à votre groupe et il y a encore un orateur après vous !
M. Jean Huchon. L'esprit général de ces propositions visait à une organisation de la production fondée sur un contrôle des importations et de la distribution. Il est en effet extravagant d'acheter à l'étranger ce dont nous n'avons pas besoin. Il est bien évident que la pression sur les prix pratiquée par les opérateurs de la grande distribution constitue un obstacle majeur à la rentabilité de la production française.
Si les importateurs peuvent se permettre impunément, et avec profit, d'inonder le marché avec des fruits et des légumes produits par des entreprises pratiquant des salaires vingt à trente fois moins élevés que notre SMIC, c'en est fait de la production française, et même de la production européenne ! La récente sortie de l'organisation commune du marché « fruits et légumes » nous donne des espoirs. Cependant, la clause de sauvegarde en cas d'affaissement des cours n'est pas clairement exprimée, et ce vide nous inquiète.
Je ne peux ici détailler cette OCM. Elle a des côtés extrêmement positifs, vous les avez évoqués ce matin, monsieur le ministre. Je suis cependant un peu inquiet. Je voudrais vous entendre confirmer de vive voix l'existence de l'interface entre les certificats à l'importation et les clauses de sauvegarde spéciales. Y a-t-il un mode de calcul du seuil de déclenchement réaliste et efficace ?
Monsieur le ministre, je voudrais exprimer ma satisfaction sur deux points qui ont été longuement évoqués ce matin.
Tout d'abord, vous avez prorogé le dispositif concernant les préretraites. C'est très bien !
Ensuite, pour ce qui est du fonds de gestion de l'espace rural, dont les jeunes avaient apprécié l'utilisation l'année dernière, je rappelle que, prévu par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, il s'agit, pour l'heure, d'un symbole. Il faut considérer qu'il est encore en rodage. Même si certains prétendent que son utilisation n'est pas toujours opportune, il est d'origine trop récente pour en juger. Il devra donc à l'avenir être abondé sérieusement.
Hélas ! l'aide aux bâtiments d'élevage ne connaît pas, pour le moment, un sort aussi favorable. Monsieur le ministre, toute bonne nouvelle sera bien accueillie.
En conclusion, monsieur le ministre, l'agriculture française que vous avez en charge vit, comme l'économie française, une époque tourmentée. Le rôle qu'elle joue dans l'occupation de l'espace, l'aménagement du territoire et l'approvisionnement alimentaire des Français et des Européens mérite largement les soins nécessaires à sa survie.
Dans un cadre européen solide, respectant l'identité des nations mais unissant les possibilités de régions et de climats différents, nous rêvons d'une agriculture prospère dans toutes ses composantes. Avec vous, monsieur le ministre, nous voulons que ce rêve devienne une réalité. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR ainsi que sur certaines travées de RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Rigaudière.
M. Roger Rigaudière. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre débat sur l'agriculture intervient alors que le monde agricole en général et la filière bovine en particulier sont secoués, depuis le mois de mars, par une crise d'une ampleur et d'une gravité hors du commun, provoquée par l'épizootie d'encéphalopathie spongiforme bovine.
Outre un évident et angoissant problème de santé publique, la conséquence la plus spectaculaire de cette calamité a été une chute brutale du revenu des éleveurs, causée par un effondrement de la consommation, et donc des cours de la viande.
Pour autant, la baisse du revenu des éleveurs ne date pas de la crise dite de la vache folle, même si elle s'est accentuée à cette occasion. Il s'agit d'une évolution ancienne qui ne doit pas être masquée par l'augmentation régulière du revenu agricole dans son ensemble, soulignée chaque année par la commission des comptes de l'agriculture de la nation.
Par rapport aux autres productions agricoles, celle de la viande bovine souffre depuis longtemps d'un problème d'excédents structurels. Les causes en sont multiples, qu'il s'agisse de la baisse tendancielle de la consommation de boeuf, d'un accroissement de la production favorisé par la nouvelle PAC ou encore de la limitation des exportations par le GATT. Au total, la combinaison de ces différents facteurs a engendré un enchaînement classique fait d'une surproduction suivie d'une baisse des cours, elle-même suivie d'une baisse des revenus des producteurs.
De façon inévitable, la crise de l'ESB a brusquement amplifié ce déséquilibre structurel.
Dès la fin du mois de mars, un effondrement de la consommation de près de 40 % se répercutait brutalement sur le revenu des éleveurs, les prix à la production atteignant en juillet des niveaux historiquement bas.
On peut dresser un bilan positif des différentes mesures, tant européennes que nationales, qui ont été arrêtées pour faire face à la crise. Elles ont été énergiques, introduites sans retard et bien menées. Elles doivent être saluées.
Jointes en France à un dispositif exemplaire de protection tant de la santé publique que du consommateur, assez vite rassuré sur le contenu de son assiette, elles ont permis aux cours de se stabiliser, voire d'amorcer une légère remontée à partir du mois d'août, et la chute de la consommation a pu être enrayée.
Au total, les dégâts sur le revenu des producteurs ne sont pas négligeables, ils sont même importants, mais l'on a su, jusqu'à maintenant, éviter la catastrophe.
Cela étant, il subsistait jusqu'à ces derniers jours une ombre fâcheuse au tableau des mesures prises. Je songe, en disant cela, à la prise en considération insuffisante du problème des broutards, autrement dit des jeunes bovins ou animaux maigres. L'importance de ce marché est capitale pour l'agriculture de notre pays, qui dégage à elle seule 90 % des exportations de cette catégorie d'animaux au sein de l'Union européenne.
Décidée à la fin du mois d'août, à la demande de la France, l'extension de l'intervention aux animaux maigres mâles s'est effectuée dans des conditions restrictives et dans un contexte d'assez bonne tenue des marchés, ce qui l'a rendue presque inopérante.
Comme marque de l'insuffisance de ces mesures, on assiste aujourd'hui à une baisse des cours du « maigre », correspondant à l'arrivée massive d'animaux sur le marché.
La campagne de commercialisation s'annonce ainsi particulièrement délicate pour 300 000 à 400 000 d'entre eux. Aussi ne peut-on que se réjouir des mesures de revalorisation exceptionnelle que vous avez obtenues de haute lutte, mercredi dernier, au Conseil des ministres de l'agriculture, monsieur le ministre, dans un climat difficile caractérisé par l'hostilité de nos partenaires.
La France sera ainsi mieux armée pour apporter des réponses adaptées aux problèmes de ce marché.
Naturellement, il reste maintenant à définir avec les professionnels des modalités de répartition des aides qui soient les plus justes possible, ainsi qu'à poursuivre l'effort en faveur du marché du maigre sur une période suffisante. Mais, à ce sujet, monsieur le ministre, vous avez déjà ce matin rencontré les professionnels, ce dont nous vous remercions. Quoi qu'il en soit, l'obtention de la nouvelle enveloppe est un succès dont le mérite vous revient, monsieur le ministre, et pour lequel vous méritez nos félicitations.
Cependant, les fonds obtenus ne permettront pas, à eux seuls, de compenser le manque à gagner, qui est considérable.
Mais vous nous avez également apporté des apaisements sur ce point, ce matin.
Un abondement national aux versements européens serait donc nécessaire, comme cela a été fait lorsque les mesures d'ensemble ont été prises au début de la crise.
Il existe pourtant des motifs de satisfaction et d'espérance. Je suis le premier à le reconnaître et à m'en réjouir.
Toutefois, en dépit des perspectives raisonnablement optimistes, concernant les jeunes bovins notamment, de grandes incertitudes continuent à planer sur l'avenir de l'élevage français.
A cet égard, je ferai deux remarques.
Tout d'abord, la modification de l'OCM de la viande bovine, pour laquelle une réflexion a été lancée l'été dernier, montrera rapidement ses limites si elle ne s'accompagne pas d'une remise à plat simultanée de l'ensemble des OCM des différentes productions agricoles. En clair, on ne pourra faire beaucoup plus longtemps l'économie d'une réorientation en profondeur des aides et des soutiens à l'agriculture communautaire, sous peine de trahir la vocation d'efficacité d'un système fondé sur la solidarité.
Sans vouloir déclencher la moindre polémique, je pose tout de même la question : est-il vraiment normal, alors que les mécanismes de redistribution et de soutien de la PAC s'appliquent, qu'on puisse encore observer dans notre pays des variations sur les revenus des exploitants allant du simple au double, selon la nature de leur production dominante ?
Loin de moi l'idée de dresser les agriculteurs les uns contre les autres, je le redis. Mais, dans la mesure où nous prétendons avoir forgé pour notre agriculture un projet de développement commun avec des partenaires multiples - ce qui est une grande et belle idée - le premier des objectifs à atteindre n'est-il pas de permettre un essor harmonieux de cette agriculture, en faisant profiter en priorité ses secteurs les plus fragiles des correctifs de la solidarité communautaire ?
Si la PAC ne répond pas à cette nécessité, elle risque de perdre un peu de son âme et beaucoup de sa diversité, car certaines de ses composantes disparaîtront.
Par ailleurs, parallèlement à la réforme des OCM, il faut engager une réflexion sur la maîtrise de la production, qui est elle aussi inévitable.
Des propositions ont d'ailleurs été faites en ce sens, qu'elles concernent le poids des carcasses à l'intervention, la définition du veau de boucherie ou l'abattage des jeunes veaux. Même si ces dernières dispositions sont quelque peu controversées, elles sont nécessaires.
Quant à ma seconde remarque, que je conçois comme un prolongement naturel de la première, elle concerne le lien fondamental qui, selon moi, unit la vigueur économique du grand bassin allaitant français et l'aménagement du territoire dans le Massif central, lesquels coïncident largement.
Dans une zone menacée par la désertification comme l'est le Massif central, l'aménagement du territoire doit s'appuyer sur un cercle vertueux à trois éléments : de bonnes voies de communication ; une présence humaine suffisante et correctement répartie ; et, enfin et surtout, une vitalité économique entretenue dans le respect de la vocation dominante de l'espace.
Dans la plupart des vingt départements du grand bassin allaitant, cette vocation dominante, c'est le troupeau bovin. Et celui-ci est en excellente adéquation avec l'objectif de répartition harmonieuse de la population, car il s'appuie sur une forme extensive d'élevage.
S'il vient à péricliter, c'est tout l'aménagement du territoire au coeur géographique de notre pays qui sera menacé. Dans chaque petite commune où l'élevage bovin est pratiqué, on verra les exploitants ruinés mettre la clef sous la porte, les commerçants et les artisans fermer leur boutique, et les services publics abandonner un village privé peu à peu de toute vie.
L'étape suivante verra la population jeune céder au mirage des grandes agglomérations, les voies de communication perdre leur utilité et cesser d'être entretenues et améliorées... et la sinistre boucle de la désertification sera alors bouclée !
Au-delà du strict problème de l'économie et des revenus, c'est aussi cette angoissante perspective qu'ont voulu dénoncer les manifestants participant à l'opération « Massif central mort », à la fin du mois dernier.
Avec quatre millions de têtes de bétail, la France détient 40 % du troupeau allaitant de l'Union européenne, la plus large fraction se trouvant dans le Massif central.
Voulons-nous vraiment nous priver de cette richesse et, en même temps mettre en péril cette politique d'aménagement du territoire dont nous proclamons pourtant l'ardente nécessité afin de bien vivre demain ?
Le maintien du troupeau allaitant, c'est indéniable, a un rôle à jouer dans un aménagement du territoire réussi.
Je salue donc comme un signe très encourageant adressé aux professionnels de l'élevage extensif l'abondement par un complément substantiel, annoncé mercredi dernier, de la prime à l'extensification quand la densité du troupeau est inférieure à une UGB - une unité de gros bétail - par hectare.
Enfin, monsieur le ministre, et dans le même ordre d'idée, je me félicite du mémorandum sur l'agriculture et la forêt de montagne que vous venez d'adresser à la Commission européenne.
Tous les élus qui sont, comme moi, attachés à la prise en compte concrète des spécificités de la montagne en attendent beaucoup. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Piras, à qui je souhaite la bienvenue pour sa première intervention à la tribune du Sénat.
M. Bernard Piras. Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous livre, en préambule, quelques observations.
Je dois reconnaître l'utilité de ce débat d'orientation sur l'agriculture, mais je regrette sa brièveté au regard de la situation dramatique dans laquelle se trouvent de nombreux exploitants agricoles.
Je salue la manoeuvre visant à restreindre la durée du débat budgétaire sur l'agriculture. Et pour cause !... Il mériterait force discussions.
Je souhaite enfin que le ministre de l'agriculture que vous êtes, monsieur Vasseur - ou votre éventuel sucesseur - organise un véritable débat sur la loi d'orientation agricole, en y associant pleinement le Parlement. Cette loi d'orientation, qui doit tracer les lignes fortes de la politique agricole pour les quinze années à venir, comme vous l'avez formalisé ce matin, doit être l'occasion d'un débat sérieux, approfondi. Ce débat ne peut pas être bâclé.
Ces observations étant présentées en préambule, j'aborderai le secteur des fruits et légumes et le domaine de l'enseignement agricole.
La part du secteur fruits et légumes dans notre agriculture est loin d'être négligeable. En 1995, elle représentait 40 milliards de francs de livraisons, plaçant ce secteur au second rang des produits végétaux, derrière le vin, mais devant les céréales.
Actuellement, en France, 60 000 exploitations produisent des fruits, soit 7,5 % des exploitations agricoles, et 75 000 exploitations produisent des légumes, soit 9 % des exploitations agricoles.
Ces secteurs sont directement liés à d'autres activités telles que l'emballage et les produits phytosanitaires. C'est donc toute une partie de notre économie qui est concernée.
Les problèmes que je vais évoquer concernent donc environ une exploitation sur six en France.
S'il est difficile de généraliser dans la mesure où il est commercialisé vingt sortes de fruits et quarante de légumes, chacune de ces productions ayant ses propres difficultés, il n'est pas outrancier d'affirmer aujourd'hui que l'ensemble de ce secteur connaît actuellement d'énormes difficultés.
La saison 1996 a été dans l'ensemble très mauvaise pour les producteurs de fruits et légumes, qui ont enregistré d'importantes baisses de revenus et qui se retrouvent, pour la plupart, dans des situations financières catastrophiques, beaucoup d'exploitations fruitières étant en dépôt de bilan.
Les situations extrêmes, les producteurs de pêches et de nectarines, d'abricots, de noix, de tomates, de raisins de table les subissent.
Nombreux sont les départements concernés, donc nombreux sont les sénateurs sensibilisés aux situations dramatiques que vivent les exploitants agricoles producteurs de fruits et légumes. Notre collègue Claude Haut, du Vaucluse, avec les producteurs de raisins de table, notre collègue Jean Besson et moi-même dans la Drôme, premier département producteur de pêches et de nectarines, un des premiers départements producteurs d'abricots, connaissent bien le problème.
Si je cite ces deux départements, monsieur le ministre, c'est que, d'une part, je connais bien la situation des exploitations agricoles de ces départements, et, d'autre part, votre prochaine visite dans le sud de la Drôme, aux frontières du Vaucluse - le 12 novembre, je crois - risque d'être mouvementée si les négociations en cours n'ont pas abouti ou, pour parler plus crûment, « si vous arrivez les mains vides ».
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Laissez-moi rire !
M. Bernard Piras. Cette année, les cours des pêches, des nectarines et des abricots se sont effondrés. Ce phénomène s'est accompagné d'une très importante mévente. Les prix de vente ne couvrent pas les coûts de production, ce qui entraîne une perte sèche estimée entre 15 000 francs et 20 000 francs l'hectare.
En 1996, dans le département de la Drôme, 28 % des pêches et 43 % des nectarines sont partis au retrait.
Le retrait a été instauré pour répondre à des difficultés conjoncturelles et non pour constituer un débouché, comme c'est le cas depuis plusieurs années ! Certes, la nouvelle organisation commune des marchés, qui a été adoptée en juillet dernier, prévoit des améliorations.
Voici un autre chiffre pour la Drôme : la moyenne quinquennale du quintal d'abricots sur le cours d'expédition de Valence était de 729,4 francs ; en 1995, elle était de 925 francs ; en 1996, elle n'était que de 456 francs.
A l'échelon national, à la fin du mois de juillet, les cours à l'expédition de la pêche était à moins de 4 francs le kilogramme, alors qu'ils étaient à plus de 6 francs le kilogramme l'année précédente. Pour l'abricot, les chiffres sont encore plus « éloquents », puisque l'on est passé de 8,5 francs à 3,30 francs le kilogramme cette année.
Pour les producteurs, la perte par kilogramme est donc de 1, 93 francs pour les pêches et de 1,78 franc pour l'abricot. Cette chute des cours ne s'est pas accompagnée d'une baisse des charges. En conséquence, bien des exploitations productrices de fruits et légumes sont déficitaires et doivent faire face à d'importantes difficultés budgétaires. Les causes de cette situation sont bien connues des pouvoirs publics puisque, mise à part l'année 1995, ce secteur enchaîne les mauvaises années.
Des réponses doivent être apportées, des réponses immédiates ayant pour seule ambition d'éviter la disparition de nombreuses exploitations ne pouvant faire face à leurs dettes.
Ces mesures d'urgence sont d'ailleurs vivement et avec pugnacité demandées par les organisations agricoles. Il s'agit, tout d'abord, de la prise en charge d'intérêts et d'aménagement du capital, comme pour les producteurs de viande, le traitement doit être équivalent, le prêt de consolidation doit avoir les caractéristiques suivantes : un taux de 2,5 % et une durée de dix ans.
Il s'agit, ensuite, pour compenser les pertes du revenu, de mettre en place des mesures spécifiques d'aides aux producteurs de fruits et légumes en dégageant des enveloppes budgétaires significatives à l'échelon départemental et en assouplissant les critères d'attribution.
Il s'agit, enfin, de mettre en place un plan de paiement échelonné auprès de la MSA. L'échelonnement doit se faire sur une durée longue ; différer le paiement de dix-huit mois ne réglera pas le problème.
Pour ce qui est de l'avenir, il est indispensable de remédier à l'inorganisation de ces secteurs, notamment de l'offre, laquelle est source d'une grande instabilité.
Il faut organiser la production par la mise en place de cadastres fruitiers au niveau non seulement français, mais également européen par la mise en place de certificats de qualité et par la constitution de puissantes organisations de producteurs qui pourront ainsi imposer un prix minimum.
C'est là une profonde remise en cause de la situation actuelle, qui demandera beaucoup de courage et qui nécessitera des moyens incitateurs.
La réforme de l'organisation commune des marchés peut jouer un rôle important, l'un de ses principaux objectifs étant le renforcement du rôle des organisations de producteurs en tant qu'opérateurs commerciaux.
En ce qui concerne l'enseignement agricole, le projet de loi de finances pour 1997 ne répond pas à la demande sociale. Il marque un net coup d'arrêt de la progression du budget et de la valorisation de l'enseignement agricole public. L'instauration d'une norme de progression des effectifs de 2 % a pour conséquence d'empêcher 3 000 jeunes d'accéder à l'enseignement public agricole, qui maintient le sous-encadrement, devenu structurel : tout d'abord, 20 % des enseignants ne sont pas titulaires ; ensuite, les heures supplémentaires et les vacations représentent 25 % des enseignements, enfin, il manque environ 1 000 emplois de personnels ATOSS, de surveillants et de documentalistes.
Cependant, au-delà de ces aspects budgétaires, qui sont importants, c'est l'orientation donnée aux formations dispensées dans l'enseignement agricole qui paraît inquiétante.
Du fait du recentrage vers les formations liées à la production et à la transformation, les formations qui répondaient à la nécessaire diversification du milieu économique rural et agricole sont abandonnées progressivement : il en va ainsi, notamment, du tourisme en milieu rural, des auxiliaires sociales en milieu rural...
J'affirme que les préoccupations du secteur des fruits et légumes et de l'enseignement agricole concernent l'ensemble de notre agriculture.
La logique productiviste, la logique de filière conduisent à des situations telles que celle de la « vache folle ».
Ces logiques ont pour résultat que 80 % de la production française sont assurés par 20 % de la population active agricole installée sur 20 % de la surface agricole utile.
Demain, 150 000 agriculteurs, et non plus 800 000, fourniront-ils la production actuelle ? Devra-t-on se réjouir que la logique du plan Mansholt, élaboré dans le début des années soixante-dix, soit respectée ?
Nous assistons à la dénaturation de certains produits, à la surproduction d'autres, ce qui entraîne des destructions massives et la disparition de nombreux agriculteurs, laquelle accentue une désertification rurale déjà bien avancée.
Il serait sans aucun doute grand temps de repenser le métier d'agriculteur et le rôle que doit jouer notre agriculture dans notre société dite « moderne ».
Il est désolant, à ce titre, de constater que, avant d'être un agriculteur, on est avant tout un arboriculteur, un céréaliculteur ou un producteur d'oeufs ! Autant de branches spécialisées, autant de segmentations, d'éparpillement du milieu et d'appauvrissement de l'identité professionnelle.
Pourtant, le métier d'agriculteur est au centre de trois enjeux qui sont difficilement compatibles, mais qui doivent pourtant l'être : la production d'abord, la gestion du patrimoine ensuite et l'aménagement du territoire enfin. Il est indispensable de tenir compte de ces trois priorités.
L'objectif de la production a été jusqu'à maintenant privilégié par rapport aux deux autres. Mais il paraît de plus en plus évident que l'agriculture de demain doit produire autre chose que des produits consommables et donc matériels, et répondre non seulement à un meilleur aménagement du territoire, mais également à une meilleure gestion du patrimoine.
Pour ce qui est de l'aménagement du territoire, dans le secteur agricole, de nouveaux métiers sont à inventer, qu'ils aient un lien avec la santé, la culture, la gastronomie, le tourisme, la pédagogie ou la formation des enfants.
Dans ces secteurs, le comportement des consommateurs a déjà changé : ils sont de plus en plus demandeurs. De telles activités peuvent, en outre, bénéficier ou répondre à d'autres évolutions de notre société : une urbanisation extrême, la réduction du temps du travail, la semaine scolaire de quatre jours, l'allongement de la vie.
Si, pour l'aménagement du territoire, de nouvelles pistes doivent être approfondies, pour ce qui est de la gestion du patrimoine, ce sont des comportements qui doivent être modifiés. L'eau, la terre, les végétaux, les paysages doivent être pensés non plus comme un capital à exploiter, mais comme un patrimoine à transmettre. Les agriculteurs pourraient devenir les garants de cette richesse. Ils deviendraient ainsi « les producteurs d'un environnement de qualité ».
Tout ce qui vient d'être dit fait la difficulté, mais aussi l'intérêt du métier d'agriculteur. Le pari de l'agriculture future sera de mettre en place un système qui respectera ces trois enjeux. Les pouvoirs publics se doivent de favoriser une telle mutation. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Amoudry.
M. Jean-Paul Amoudry. Monsieur le ministre, je tiens, en avant-propos, à saluer et à rendre hommage à votre action courageuse et efficace à la tête d'un département ministériel confronté à d'âpres difficultés, qui plus est dans un contexte financier et budgétaire particulièrement défavorable.
Je souhaite intervenir plus particulièrement sur le volet montagne de la politique agricole en référence à la situation spécifique du département dont j'ai l'honneur d'être l'élu : la Haute-Savoie.
Avant de vous présenter les souhaits exprimés par les responsables locaux, élus et professionnels, de cette région de montagne, permettez-moi d'en rappeler succintement les caractéristiques et de faire le diagnostic de la situation actuelle.
Le département de Haute-Savoie est classé à 80 % en zone de montagne ; un tiers des communes sont en effet situées en zone de montagne difficile, haute montagne et montagne 1.
Une politique départementale de modulation de l'indemnité spéciale de montagne, l'ISM, est conduite avec l'enveloppe financière résultant des critères nationaux, dans le cadre d'un plafonnement départemental à 40 unités de gros bétail au lieu de 50, et afin de supprimer la haute montagne.
Il faut le dire, l'action de l'Etat à l'égard de l'agriculture de montagne est perçue comme un certain désengagement. Je citerai notamment la suppression des crédits à l'élevage, aux services techniques en montagne, la suppression de la détaxation de l'essence pour les matériels de fauche et de transport, la diminution des crédits aux améliorations pastorales et, enfin, la remise en cause de l'aide à la construction des bâtiments d'élevage.
Cette situation pénalisante est aggravée par le fait que la réforme de la politique agricole commune n'a pas réduit les inégalités de revenus comme cela était escompté. Dans notre département de Haute-Savoie, le phénomène est encore accentué par l'absence quasi totale de financement par les fonds communautaires au titre de l'objectif 5 b.
Pour remédier à cette situation générale défavorable, il paraît souhaitable d'agir dans quatre directions.
La première concerne l'indemnité compensatrice handicaps naturels, l'ICHN.
A cet effet, il serait d'abord souhaitable de déplafonner le taux unitaire de cette indemnité. En effet, le plafond empêche de verser la totalité de la prime complémentaire vache allaitante. Les producteurs de haute montagne ne perçoivent que 95 francs au lieu de 240 francs par bovin.
Il conviendrait ensuite de spécialiser l'indemnité spéciale de montagne en vue de compenser exclusivement les handicaps physiques et de ne pas chercher à lui faire jouer un rôle économique.
Il serait souhaitable, enfin, de supprimer les vingt-cinq premières UGB, de préférence au déplafonnement du nombre d'animaux primés.
La deuxième direction concerne l'investissement.
L'agriculture de Haute-Savoie entend continuer à assumer prioritairement une fonction de production fondée sur des produits de qualité différenciée, en même temps qu'un rôle d'entretien de l'espace. Cette production exige des investissements individuels et collectifs nécessaires à la mise aux normes des ateliers fermiers et coopératifs de transformation du lait et à la conduite des procédures de certification des produits.
Pour atteindre de tels objectifs, il paraîtrait hautement souhaitable que soient notamment assurés, d'abord le maintien de la ligne et l'actualisation de l'aide à la construction et à la modernisation des bâtiments d'élevage, ensuite la revalorisation de l'aide à l'acquisition de matériel de montagne spécifique, notamment la chaîne de récolte des fourrages.
La troisième direction concerne l'entretien du territoire.
Il serait souhaitable d'encourager l'entretien des espaces très pentus identifiés comme « espaces à enjeu paysager » dans les procédures locales de gestion de l'espace, de maintenir à cette fin les ressources du fonds de gestion de l'espace rural et d'accorder un soutien plus fort aux races animales locales, les races Abondance et Tarentaise notamment.
La quatrième et dernière direction concerne les mesures significatives nécessaires au maintien d'un minimum de services sur les territoires ruraux. Je pense notamment à l'aide à la collecte du lait, à la prise en charge des surcoûts montagne des services de conseil à l'élevage, à l'exonération des coopératives d'approvisionnement et de service de la taxe professionnelle et de la CSSS sur la part de chiffre d'affaires réalisée en montagne difficile, haute montagne et montagne 1.
Pour terminer, monsieur le ministre, permettez-moi, d'appeler votre attention sur trois sujets d'actualité qui inspirent localement de vives inquiétudes et préoccupations.
En ce qui concerne les produits, pourriez-vous nous indiquer les perspectives et les échéances de publication du décret sur la provenance et l'indication « montagne » ?
Sur le plan sanitaire, n'est-il pas urgent d'envisager des restrictions, voire l'interdiction temporaire de l'importation d'animaux en provenance de Suisse, comme semblent l'avoir fait les autres pays voisins de la Confédération, pour se prémunir contre le risque de propagation de l'ESB ?
Enfin, en matière de quotas laitiers, ne serait-il pas possible d'autoriser la profession à mettre en oeuvre un plan permanent de rachat des références laitières libérées, plan qui serait financé par une cotisation professionnelle de 0,8 centime par kilo de lait ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun. Monsieur le ministre, en préambule à mon court propos, je tiens à vous féliciter et à vous remercier de votre action efficace et courageuse au service de notre agriculture et de nos agriculteurs.
Dans un premier volet, je voudrais évoquer le problème de la fragilité de l'activité laitière.
L'agriculture du département des Vosges a en effet pour caractéristique de dépendre principalement de cette activité, au niveau tant de la production, avec près de 2 300 producteurs, que du secteur agroalimentaire, avec 1 800 emplois environ.
Aujourd'hui, les professionnels se heurtent aux déséquilibres constatés sur les marchés des produits laitiers, entraînant la baisse des prix du lait.
Dans ce domaine, la puissance de la grande distribution est telle que le secteur de la transformation ne peut que répercuter ses baisses de marges sur des producteurs déjà touchés par la crise bovine.
Il est dès lors nécessaire d'agir pour prendre en compte cette situation et, à cet égard, trois actions majeures sont à mener prioritairement.
Premièrement, il faut favoriser de nouveaux débouchés, tels que la transformation du lait en poudre pour l'alimentation animale, qui répondrait à un réel besoin dans ce secteur depuis l'interdiction des farines animales directement liée à la crise de la vache folle.
A l'heure actuelle, les aliments donnés aux veaux sont bien souvent d'origine végétale - soja, maïs... - la plupart du temps importés, et contiennent de moins en moins de lait à proprement parler.
La deuxième priorité résulte d'un constat.
La gestion de l'espace dans un massif vosgien est en grande partie assurée par les exploitations laitières. Le maintien d'un espace ouvert et entretenu de façon durable implique de pouvoir pérenniser la collecte du lait produit sur l'ensemble du massif.
Or il se pose actuellement des problèmes au niveau du ramassage et de l'organisation des circuits de collecte dans plusieurs zones. Les entreprises qui effectuent la collecte en montagne étant soumises aux mêmes règles de concurrence que toute autre entreprise laitière, de nombreux aménagements doivent être effectués afin de pérenniser les circuits dans des conditions économiquement acceptables.
Une aide est actuellement sollicitée du fonds national d'aide au développement du territoire pour ce projet concernant le portage du lait, pouvant aller jusqu'à dix kilomètres, et l'aménagement des accès aux exploitations.
Inutile de préciser à quel point ces mesures sont attendues, chacun connaissant le rôle des producteurs dans l'équilibre écologique et économique de la montagne. Comment, par exemple, envisager l'avenir du tourisme estival et hivernal si les parcelles ne sont plus entretenues ? Comment encourager les jeunes agriculteurs à s'installer si les exploitations ne sont plus viables ?
Vous avez annoncé, monsieur le ministre, la présentation, avant la fin de l'année, d'un mémorandum, à la Commission européenne, comprenant cinq thèmes et permettant d'afficher clairement la spécificité montagne à travers la création d'un objectif montagne.
Parmi ces cinq thèmes, vous proposez de rendre éligibles au cofinancement communautaire de nouvelles actions en faveur de la montagne. Le ramassage du lait ne peut vraiment pas être ignoré.
Je souhaite aborder maintenant le problème de l'indemnité spéciale de montagne.
L'ISM est l'aide compensatoire la plus importante en faveur de l'agriculture de montagne. Elle représente à peu près les trois quarts des indemnités compensatoires versées pour l'ensemble des zones défavorisées en France.
Le taux de cofinancement est actuellement de 25 % par le FEOGA-Orientation sur le plan européen.
Pour autant, la reconnaissance de la montagne sur le plan communautaire doit être renforcée et, dans cette optique, il est nécessaire que la Commission améliore sa participation au financement de l'ISM.
Enfin, et ce sera le dernier volet de mon intervention, votre mémorandum aborde un autre grand thème, et il est d'importance dans les Vosges, celui de la forêt et de la filière bois.
Monsieur le ministre, vous dites qu'il faut créer une politique forestière de la montagne en Europe, et je ne peux que souscrire à cette démarche.
Pour ma part, j'estime qu'une des préoccupations essentielles en matière sylvicole demeure, pour un département comme le nôtre, l'enrésinement général en épicéas. Ce problème est très important dans les Vosges, et principalement en zone de montagne, où l'enrésinement « anarchique » en épicéas menace complètement l'espace rural.
M. Christian Poncelet. Très bien !
M. Gérard Braun. Certains villages sont encerclés par des boisements, souvent en petites parcelles et en fond de vallée. En outre, vous le savez, monsieur le ministre, l'épicéa entraîne une acidification des sols telle qu'elle interdit quasiment toute utilisation ultérieure des terrains. Là où pousse l'épicéa, il n'y a plus ni faune, ni flore.
Bien sûr, je ne suis pas opposé au boisement, monsieur le ministre, mais il est nécessaire de définir des priorités et de poser des limites.
Il est urgent de favoriser un boisement « en essences nobles », que ce soient des feuillus - hêtres, chênes, étables, sycomores, etc. - ou des conifères - sapins, mélèzes, douglas... Pour cela, il faudrait envisager de supprimer toute aide au boisement et au reboisement en épicéas, mais, en contrepartie, augmenter les aides pour les autres essences.
Enfin, pour renforcer la lutte contre les boisements anarchiques, il serait utile d'envisager de créer, dans les plans d'occupation des sols des communes, des zones non boisables, comme il existe des zones non constructibles, qui permettraient aux élus d'effectuer un travail préventif efficace et opposable juridiquement au tiers, car la réglementation actuelle des boisements est totalement inadaptée aux problèmes que nous rencontrons.
Monsieur le ministre, les quelques points que je viens de soulever vont certainement, du moins je l'espère, dans le sens de vos préoccupations.
A ce titre, je me réjouis d'apprendre que vous avez demandé que l'on étudie, à titre expérimental, la mise en oeuvre d'une indemnité compensatoire pour inciter à l'exploitation des bois en zone de montagne, dans le cadre d'une véritable politique forestière de montagne. Nous sommes, en effet, tous conscients que la priorité est de permettre la mobilisation des bois venant de forêts qui sont actuellement laissées à l'écart des circuits économiques classiques, et souvent sous-exploitées.
Nous savons que nous pouvons compter sur votre soutien, monsieur le ministre, dans les actions nécessaires et même vitales à mener pour aider notre forêt et la filière bois en général, pour prendre en considération les quelques suggestions qui viennent de vous être présentées. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Raoult.
M. Paul Raoult. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chacun reconnaît que, malgré une baisse continue de la population active agricole depuis un siècle et demi, l'agriculture française conserve une place déterminante dans notre économie.
Si l'on intègre à nos calculs le poids des industries amont et aval liées à notre agriculture, on se rend compte que l'économie agricole joue un rôle décisif dans notre vitalité économique. De plus, l'agriculture associée à la sylviculture a en charge l'entretien de 80 % de notre espace national.
Or on constate qu'en trois décennies les relations entre l'agriculture et la société ont profondément changé. Le temps de l'ordre immuable et éternel des campagnes est définitivement révolu : paysages, populations, activités se sont profondément transformés et continuent de le faire sans que l'on sache où l'on va, sinon dans le mur !
Les agricultures sont très diversifiées, certaines dynamiques, d'autres en difficulté, d'autres encore en voie de totale disparition. Ces contrastes sociaux et territoriaux sont devenus intolérables et mettent en danger la cohésion sociale et territoriale du monde rural. Il y a là un vaste débat de société sur lequel j'espère, monsieur le ministre, pouvoir revenir à l'occasion de l'examen de votre projet de loi d'orientation.
L'année 1996 a été l'année de profondes turbulences : crise de l'élevage, problèmes dans le secteur des fruits et légumes... C'est donc une crise de l'identité française qui affecte notre pays à travers cette crise agricole. Cela explique le désarroi de nombreux exploitants agricoles. Ils sont confrontés aux poussées perçues comme inexorables du libéralisme économique mondial du tout marché. Ils doivent adopter de nouveaux modes de production de plus en plus productivistes qui créent des problèmes très dommageables à l'environnement.
Le monde rural évolue et se recompose parfois d'une manière insidieuse ou sournoise dans la difficulté et l'incertitude. Aussi nous faut-il aujourd'hui répondre aux interrogations de la profession agricole.
La politique d'installation demeure le souci constant des responsables professionnels : c'est la priorité majeure, vous le dites et vous le répétez souvent.
Il faut permettre aux jeunes de développer et de maintenir des exploitations qui feront la force de notre économie agricole et assureront l'occupation harmonieuse du territoire. Or, malgré votre nouvelle loi, on constate aujourd'hui que les terres libérées participent pour 60 % à l'agrandissement d'exploitations existantes.
Aujourd'hui, nous sommes régulièrement interpellés pour que l'on veille à une meilleure maîtrise d'attribution des droits à produire et des primes qui favorisent les plus riches au détriment des plus jeunes.
Il faut mettre fin à ces dérives en modifiant la loi. Les crédits inscrits restent insuffisants pour couvrir les besoins dans ce domaine : baisse des crédits de bonification à la modernisation, baisse des aides en faveur des OGAF et du soutien à l'agriculture de groupe, baisse des crédits en faveur du démarrage des CUMA et des GAEC, qui sont pourtant des pièces maîtresses de la politique d'installation.
Il me semble que, dans ce domaine, il y a loin des paroles aux actes.
Un autre point, également préoccupant, a trait à la mise aux normes des bâtiments d'élevage, qui concerne aussi nos jeunes éleveurs, et à la nécessaire reconquête de la qualité de l'eau. Les crédits affectés à cette fin sont notoirement insuffisants, ce qui remet en cause les engagements que vous aviez pris antérieurement. La lutte contre la pollution doit demeurer une priorité clairement affichée. Il faut donc assurer une cohérence avec la loi sur l'eau, les exigences du public et la protection de l'environnement.
Les besoins dans ce domaine sont importants, puisque l'INRA estime à 16 milliards de francs le coût des travaux nécessaires. Un effort considérable doit donc être entrepris.
La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire avait permis la mise en place du fonds de gestion de l'espace rural, par lequel on reconnaissait enfin le rôle joué par l'agriculteur en matière d'entretien de l'espace, mais les crédits ont aujourd'hui disparu, alors que des actions pertinentes doivent pourtant être encouragées. De même, les crédits destinés à financer la mise en oeuvre des mesures agri-environnementales subissent une très forte baisse. La politique innovante engagée en vue d'assurer un aménagement rural respectueux de l'environnement est aujourd'hui malmenée, alors qu'elle offre une opportunité de développement durable, grâce à des méthodes de production nouvelles adaptées à la sauvegarde des territoires présentant un grand intérêt naturel.
Tant chez les éleveurs que chez les producteurs de lait, les inquiétudes montent face aux conséquences de la crise de la vache folle. Les agriculteurs réclament la mise en place de dispositifs de maîtrise de la filière bovine afin d'éviter des faillites.
L'élimination des veaux de moins de vingt jours qui est en cours est considérée comme une mesure aveugle qui, mal appliquée, risque d'entraîner, à terme, des perturbations du marché. En outre, elle est mal acceptée par l'éleveur, fortement attaché à son cheptel. Cela reste donc un outil conjoncturel qui ne permettra pas de régler le problème de fond : éviter la surproduction, les stocks coûteux, la chute des cours et des revenus.
Il faut aujourd'hui encourager l'extensification là où c'est possible, là où l'on ne peut faire que de l'élevage pour la production de viande ou de lait avec des méthodes traditionnelles pour mieux maîtriser la production.
La prime à l'herbe, en augmentation pour 1997, reste donc insuffisamment incitatrice par rapport à la prime au maïs, notamment. Elle doit jouer un rôle décisif dans les régions d'élevage.
Il faut encourager l'élevage d'animaux moins lourds en faisant diminuer le poids des carcasses de taurillons.
Une autre inquiétude de la profession est liée à l'attitude récente des Etats-Unis, qui semblent remettre en cause les accords signés. Il faut, sur le plan international, rester ferme et attendre l'ouverture des négociations prévues pour 1999.
Il faut empêcher le démantèlement de notre politique agricole et rejeter avec force l'ultralibéralisme souhaité par les Etats-Unis, dont la logique est totalement inadaptée à l'agriculture.
Aux inquiétudes de la profession s'ajoutent les inquiétudes de l'opinion publique, laquelle réclame une meilleure information sur la qualité et l'origine des produits depuis l'affaire de la vache folle. Il faut retrouver la confiance du consommateur par une meilleure information claire et transparente.
Il faut développer et soutenir les politiques de label et de produits fermiers de qualité.
Par ailleurs, la population rurale souhaite très vivement un soutien aux activités économiques liées à l'espace rural : développement des PME et PMI, activités de loisirs et de tourisme.
Ce que certains appellent les « néoruraux » sont très sensibles et soucieux de leur environnement et du paysage. La disparition des dotations au fonds de gestion de l'espace rural et la baisse des crédits en faveur des mesures agri-environnementales vont à l'encontre de cette nouvelle dimension de la vie de nos campagnes.
Le renforcement du lien et du dialogue ville-campagne est nécessaire à la cohésion sociale et territoriale de notre pays. Encore faut-il s'en donner les moyens financiers si l'on veut faire vivre nos campagnes correctement.
Aussi, monsieur le ministre, face à des problèmes agricoles d'une extrême gravité, on ne peut se contenter de mesures conjoncturelles ; il faut des réformes de fond, qui assurent une plus grande maîtrise des productions. Ce qui a été fait pour la politique des quotas laitiers, il faut se donner les moyens de le faire pour la viande.
Il faut aussi réfléchir sur le mode actuel de répartition des primes, qui conduit à des inégalités inacceptables. Un rééquilibrage est souhaitable entre les différentes filières - céréales, élevage-viande, élevage-lait - en matière de prime à la vache allaitante, de prime au maïs et de prime à l'herbe. Les aides publiques sont, pour les grandes cultures, trois fois plus importantes que pour les fruits et deux fois plus élevées que pour les productions bovines.
Dans le contexte actuel, une refonte de la répartition des primes est nécessaire.
En fait, monsieur le ministre, des contraintes budgétaires vous sont imposées pour répondre à la volonté du Gouvernement de réduire les déficits publics, mais cela ne peut se faire au détriment des agriculteurs, sous peine d'accélérer la désorganisation et la crise du monde rural.
Il faut refonder l'agriculture pour obtenir l'adhésion à la fois des agriculteurs et des citoyens de notre pays.
Pour cela, il nous faut méditer cette pensée de M. Edgard Pisani : « La priorité n'est plus dans le développement de la production, dans l'intensification, mais dans un territoire et une société qui doivent impérieusement vivre autant que produire. » (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Vasseur ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vais m'efforcer, dans le temps le plus bref possible, de répondre à vos questions. Mais vous avouerez qu'il est bien difficile, même à cette heure tardive, de faire court sans escamoter le débat auquel vous m'avez invité. Je vais donc essayer de répondre le plus complètement possible, et vous me pardonnerez si, d'aventure, j'omets de répondre à telle ou telle question. Je ne manquerai pas, bien entendu, de vous apporter les réponses que vous attendez dans un cadre autre que celui de ce débat.
J'aborderai tout d'abord les questions relatives aux marchés, en commençant bien entendu par la crise du secteur bovin.
Comme l'ont relevé MM. du Luart, Emorine, Huchon, Barraux, Rigaudière et Pluchet, nous sommes confrontés à une crise d'une gravité exceptionnelle et jusqu'à présent inégalée.
Le président du groupe d'études sur l'élevage, M. du Luart, a brossé un panorama très complet de cette crise et des décisions qu'elle a conduit à prendre.
Vos propos, monsieur le sénateur, constituent une synthèse tout à fait remarquable des événements qui sont survenus depuis le mois de mars dernier et retracent de façon extrêmement précise l'action des pouvoirs publics au cours de ces sept derniers mois.
Je dois rappeler, et je n'insisterai jamais assez sur ce point, que deux objectifs majeurs ont en permanence guidé l'action du Gouvernement : protéger la santé du consommateur ; soutenir le revenu des éleveurs.
Sur le premier point, je considère que nous avons pris, MM. François d'Aubert, Hervé Gaymard et moi, les mesures nécessaires dans le cadre d'une concertation interministérielle permanente. Nous devons rester d'une vigilance extrême. L'ensemble des moyens humains et financiers disponibles sont et resteront mobilisés afin que soit détectée toute fraude ou même, parce que je ne préjuge pas la bonne ou la mauvaise foi de telle ou telle personne prise en infraction, tout manquement aux réglementations établies, même si l'intention frauduleuse n'est pas avérée.
Nous continuerons sur cette voie, en sollicitant constamment l'avis d'experts incontestés pour arrêter éventuellement les mesures nouvelles que pourraient nécessiter les derniers développements scientifiques connus. Depuis le début, nous sommes partis du principe qu'un risque existait et que nous devions le réduire au minimum. Nous avons pris toutes les dispositions nécessaires à cette fin.
Il nous reste, parce que nous sommes en avance en ce domaine à veiller à l'harmonisation des différentes législations en Europe. J'estime que les consommateurs des autres pays européens ont droit à être entourés des mêmes précautions que les consommateurs français.
M. Deneux a évoqué la sécurité alimentaire. Je partage son souhait de voir le projet de loi dont j'ai parlé ce matin concourir à lever les derniers doutes qui pourraient subsister chez nos concitoyens.
En attendant, six arrêtés ont été pris le 10 septembre dernier afin d'imposer les contraintes que nous avons adoptées en matière d'interdiction de certains abats et de règles de composition des farines de viande destinées à l'alimentation animale aux échanges avec nos partenaires de l'Union européenne comme avec les pays tiers.
Je dois dire que cela ne fait pas forcément plaisir à tout le monde et, de temps en temps, nous avons l'impression qu'on nous fait la réponse du berger à la bergère.
Je passe du coq à l'âne, et ne voyez dans ce que je vais dire aucune relation avec les propos que je viens de tenir : j'ai appris aujourd'hui, que les Allemands avaient décidé d'interdire sur leur territoire l'importation de ce qu'on appelle les abats spécifiés. Je les en félicite ! Toutefois il se trouve que ces abats sont interdits à la consommation en France, comme à l'exportation. Nous n'avons donc pas attendu que les Allemands interviennent pour empêcher l'envoi de ces abats spécifiés en Allemagne.
Je pense rassurer M. Amoudry en lui disant qu'a été publié au Journal officiel, le 1er novembre dernier, un avis aux importateurs visant à imposer des conditions très strictes à l'importation de bovins en provenance de Suisse, afin d'exiger les mêmes garanties sanitaires que celles qui sont requises du cheptel français.
Je le répète, si la France a su réagir rapidement en matière de protection des consommateurs, elle a parallèlement su réagir, également très rapidement, pour soutenir ses éleveurs et leur verser, dans des délais très courts, les différentes aides décidées par le conseil des ministres de l'agriculture européens et pour mettre en place des mesures nationales exceptionnelles.
M. Barraux a évoqué des problèmes spécifiques concernant les éleveurs non spécialisés. Soyez sûr, monsieur le sénateur, que nous sommes parfaitement alertés de la situation et que nous ferons notre possible pour traiter le cas des éleveurs les plus en difficulté. Les modalités de répartition que j'ai énoncées ce matin montrent bien que nous laissons une certaine souplesse aux départements pour leur permettre d'apprécier s'il convient d'aider telle ou telle catégorie d'éleveurs en difficulté.
Cela étant dit, je ne voudrais pas que l'on considère cettre crise comme purement conjoncturelle. Elle est plus profonde et plus grave. Nous sommes depuis un certain temps dans une situation structurellement difficile, qui a été évidemment aggravée et mise en lumière par la crise de l'ESB, laquelle n'a fait que rendre plus urgentes la maîtrise de la production et la relance de la consommation.
Au niveau communautaire, nous venons d'arrêter une première série de mesures concernant la maîtrise de la production. Ces mesures doivent d'ailleurs se traduire également par une relance de la consommation, grâce aux garanties que nous offrons à nos concitoyens.
Ces premières mesures portent sur un relèvement sensible de la surprime à l'extensification. Cela permettra, monsieur Rigaudière, à vos éleveurs qui pratiquent déjà un élevage naturellement extensif de voir leur travail mieux récompensé. Cela incitera aussi des éleveurs qui pratiquent aujourd'hui un élevage plus intensif à se tourner, s'ils le peuvent, car tout le monde ne le peut pas nécessairement, vers cette forme d'élevage qui, notamment dans votre région, constitue une belle perspective d'avenir, pour peu que nous soyons en mesure d'y aider.
Les modalités d'attribution de la prime aux bovins mâles sont également revues. Elles devraient permettre, par la suppression du deuxième versement, un abaissement du poids de carcasse, qui a été évoqué par M. Signé.
Cet abaissement du poids de carcasse pourra concerner les veaux de boucherie pour lesquels, outre la prime à la « transformation » intéressant les animaux les plus jeunes, a été instaurée une prime aux animaux abattus à un poids moyen inférieur de 15 % aux pratiques actuelles.
J'entends bien que cette mesure a pu poser quelques problèmes. Mais permettez-moi de vous livrer cette petite information : la France n'est pas seule autour de la table du Conseil des ministres européens de l'agriculture ; il y a quatorze autres partenaires. Lorsque la France revient de cette table de négociation en ayant obtenu satisfaction, on peut tout de même admettre que d'autres pays y trouvent également un peu leur compte.
Cependant, comme l'a fort justement signalé M. de Menou, dans cette affaire, il faut rester prudent afin d'éviter les distorsions de concurrence.
Je donne un mandat précis de négociation à ceux qui représentent la France au comité de gestion « viande bovine », qui doit fixer le niveau de la prime et les modalités de sa mise en oeuvre ; j'estime que nous devrions aboutir à des niveaux de prime différents selon les poids maximaux retenus, afin de corriger, totalement ou en partie, les distorsions de concurrence que M. de Menou a évoquées.
M. Jacques de Menou. Absolument !
M. Philippe Vasseur ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Quoi qu'il en soit, les mesures structurelles dont je viens de faire état ne constitue qu'un premier pas. Nous devons aussi prendre, et le plus rapidement possible, des mesures concernant l'identification, la traçabilité des viandes, de manière à rendre confiance aux consommateurs, aspect du problème sur lequel MM. Barraux et Huchon, notamment, ont insisté.
La Commission nous a proposé deux textes sur ces sujets. Ils sont intéressants, mais ils restent, à mon avis, trop prudents : l'étiquetage informatif des viandes doit être obligatoire, et non, comme nous le propose aujourd'hui la Commission, facultatif.
Il reste que, comme plusieurs d'entre vous l'ont rappelé, en particulier MM. Poncelet et Barraux, la qualité des contrôles effectués en France doit être soulignée, car le nombre extrêmement faible des accidents sanitaires montre qu'il s'agit d'un point tout à fait positif. Je persiste à penser, parfois avec une grande colère, que la mise en avant systématique des faiblesses de nos contrôles est absolument anormale.
M. Christian Poncelet. Très bien !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Il y a vraiment, dans la tête d'un certain nombre de nos concitoyens, le prion de « l'anti-France », et je ne parviens pas à comprendre une telle attitude. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
Nous devons, au contraire, saluer la qualité des contrôles et montrer que nos éleveurs n'ont rien à se reprocher !
M. Roland du Luart. Très bien !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. C'est à ce prix que le marché retrouvera durablement un niveau permettant le maintien d'un élevage traditionnel, qui constitue dans certaines zones l'unique système de production offert aux agriculteurs et qui est par là même l'outil de base de l'occupation du territoire.
S'agissant de l'élevage bovin, je ne voudrais pas occulter les difficultés que rencontrent les producteurs de lait et que MM. Poncelet, Leyzour et Braun, notamment, ont évoqués, souhaitant connaître les perspectives d'évolution de ce secteur dans les prochaines années. Ils ont, par exemple, soulevé le problème de la rediscussion du régime des quotas laitiers.
Comme vous le savez, le revenu du producteur de lait est le résultat, pour une part, de la vente du lait, bien sûr, mais aussi, pour une autre part, de la valorisation de ce qu'on appelle improprement les sous-produits viande - je préfère parler des coproduits - qu'il s'agisse du veau ou des vaches de réforme. Ces deux sources de revenu connaissent aujourd'hui, il faut le reconnaître, des évolutions défavorables.
Le marché laitier traverse depuis plusieurs mois de graves difficultés. La faiblesse du marché est en partie liée au dépassement de la campagne 1995-1996 et à l'évolution de la collecte au cours des premiers mois de la campagne actuelle.
Toutefois, les tensions sur les prix du lait sont aussi largement dues à une gestion timorée, pour ne pas dire plus, des restitutions à l'exportation par la Commission.
Nous nous employons sans relâche et sans faiblesse à améliorer le dispositif de régulation.
S'agissant de la gestion présente des quotas, monsieur Amoudry, je vous rappelle que nous avons récemment revu, en janvier dernier, avec la parution d'un nouveau décret, le système de redistribution des quantités libérées. Cette redistribution est désormais opérée à l'échelon départemental. Je n'ai plus un litre de réserve au niveau national : tout reste au niveau des départements ! Conformément au voeu de l'ensemble de la profession et des territoires concernés, c'est maintenant au sein de la commission d'orientation agricole que s'effectuent les redistributions.
J'ajoute que, à la demande des professionnels, nous avons reconduit cette année une nouvelle campagne d'aide à la cessation laitière. Je pense que, grâce à ce dispositif, les professionnels de la Haute-Savoie trouveront les moyens de conduire le plan d'adaptation de leur production laitière ; en tout cas, je le souhaite.
Pour ce qui est de l'avenir des quotas laitiers et de la profession, la discussion est ouverte. Je recevrai prochainement les différentes familles professionnelles - producteurs et transformateurs - dans le cadre de l'interprofession, de manière que nous puissions envisager les perspectives vers lequelles nous devons nous engager. Ce n'est pas si simple, d'autant qu'il faut agir sans précipitation tout en sachant que le temps presse.
S'agissant de la composante viande du revenu des éleveurs laitiers, dont j'ai déjà parlé, la décision relative à la transformation des jeunes veaux, même si elle suscite quelques remous, a au moins permis de relever d'ores et déjà sensiblement le prix de ces animaux. Or nous étions parvenus à des niveaux de prix tout à fait intolérables pour les éleveurs.
J'en viens à une autre crise - j'allais dire à « l'autre crise » -, celle des fruits et légumes, qu'ont évoquée notamment MM. Huchon, Soucaret, Vigouroux, Piras, Pluchet et Vidal.
Je l'ai dit tout à l'heure, nous avons beaucoup progressé dans la réforme de l'organisation commune de marché. Mais il faut tirer les enseignements de la crise de cet été pour passer à la vitesse supérieure. Cet été, nous avons pu constater que la loi qui a réformé l'ordonnance de 1986 avait montré ses limites, au moins en ce qui concerne les produits périssables, comme l'a relevé M. Deneux. Il faudra que, sur le plan législatif, nous en tirions les leçons, dès que l'occasion se présentera.
Pour l'heure, le bilan de cette crise, je vous le confirme, va être très rapidement établi. Mais le problème est complexe.
Vous savez, si jamais je devais me laisser impressionner par quelques manifestations, je n'aurais plus qu'à quitter mon poste sans délai ! (Sourires.)
A mes yeux, pour négocier et se faire entendre, mieux vaut ne pas donner le sentiment que l'on cherche à exercer des pressions. Il faudra peut-être, un jour, dans ce pays, en revenir à des manières plus démocratiques pour se parler. (M. le ministre se tourne vers les travées socialistes.)
Je fais de mon mieux ce que je crois être mon devoir mais, je vous le dis sincèrement, lorqu'on crie trop fort, j'ai du mal à entendre : il vaut mieux me parler en argumentant, en apportant une démonstration, chiffres à l'appui.
Il n'y a pas très longtemps, en pleine crise de la viande bovine, je me suis trouvé en Haute-Loire - M. Rigaudière s'en souvient - alors qu'étaient réunis les représentants des dix-sept départements du Massif central. Après avoir hésité, ils ont choisi de m'emmener dans une exploitation qui n'était pas la plus misérable, qui n'était probablement pas la plus à plaindre et ils m'ont dit : « Nous allons vous faire confiance et vous expliquer ici, sur le terrain, comment les choses se passent, sans rien vous cacher et sans chercher à vous donner des chiffres qui outrepasseraient les pertes réelles. »
Je peux vous dire que j'ai beaucoup appris, ce jour-là. Je peux même vous l'avouer, la décision de prendre à notre charge les intérêts et de reporter l'annuité pour 1996 m'est venue de la discussion qui s'est instaurée ce jour-là. Je préfère ce type de dialogue. Je pense que je n'aurais rien appris si l'on s'était contenté de proférer les slogans habituels.
Je le dis aux éleveurs du Massif central : ils m'ont appris beaucoup ce jour-là et ils peuvent être assurés que les éleveurs leur doivent une bonne partie des mesures que nous avons mises en place.
M. Henri Belcour. Très bien !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Nous avons donc déjà commencé à dresser le bilan de la crise qu'a connue le secteur des fruits et légumes cet été. Nous nous efforcerons de trouver des solutions pour les producteurs les plus touchés par cette crise.
Je n'ai jamais nié que les producteurs de fruits avaient beaucoup souffert et que nous devions apporter des compensations. Cependant, cette crise, qui est tout à fait réelle, n'est pas inattendue, et elle n'est pas exceptionnelle.
Cela doit tout de même nous amener à réfléchir. La solution ne peut consister, tous les ans, à se réunir pour déterminer le montant du chèque. Cette solution ne vaut qu'à titre exceptionnel, devant une baisse conjoncturelle forte. C'est alors que la solidarité doit s'exercer. Mais quand le problème se répète régulièrement, il est clair que des mesures structurelles s'imposent.
Il est indispensable de renforcer les organisations de producteurs et de mettre en place les moyens financiers appropriés pour inciter à une commercialisation maîtrisée et mieux adaptée aux besoins du marché. Cela commence par là !
M. Gérard César. Tout à fait !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Je suis d'accord, bien entendu, pour apporter des solutions conjoncturelles et pour compenser les pertes qu'ont subies les producteurs de fruits, mais, comme pour la viande bovine, cela ne servirait à rien de ne traiter que les effets sans avoir le courage de s'attaquer aux causes.
M. Jean Delaneau. Très bien !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. La création d'un fonds opérationnel cofinancé par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, le FEOGA, nous permettra d'avancer en ce sens.
La réforme de l'Organisation commune des marchés, c'est aussi la reconnaissance interprofessionnelle à l'échelon communautaire et l'affirmation d'une politique plus ambitieuse.
Parallèlement à ces mesures d'organisation du marché, nous attendons beaucoup de la reconduction des programmes d'arrachage et de l'institution de ces fameux certificats d'importation obligatoires permettant l'application des clauses de sauvegarde prévues par les accords de Marrakech et évoquées par MM. Pluchet, Signé et Huchon.
Je signale à ce propos à M. Huchon que la clause de sauvegarde peut être invoquée pour les produits sensibles lorsque le prix d'importation descend au-dessous d'un seuil lié au prix d'entrée communautaire et que les volumes importés sont excessifs. De tels mécanismes devraient nous permettre de limiter des excès dommageables pour l'économie de toute une filière.
Vous savez d'ailleurs que la France avait fait de ces mesures, qu'il s'agisse des certificats d'importation ou des clauses de sauvegarde, le préalable à toute réforme de l'Organisation commune des marchés. Nous avons obtenu satisfaction, ce dont je me félicite, mais nous n'avons pas pour autant, je le reconnais, tout résolu.
Outre le problème concernant le secteur des fruits et légumes, M. Vigouroux a évoqué l'horticulture, le même office technique intervenant dans le secteur des fruits et légumes et dans celui de l'horticulture.
Vous savez, monsieur Vigouroux, que les professionnels de l'horticulture eux-mêmes n'ont pas souhaité poursuivre dans la voie d'une interprofession, ce que, pour ma part, je regrette profondément.
La liquidation du CNIH, que je déplore, devra être budgétairement absorbée sur 1996 et 1997. Que voulez-vous ? Je suis bien obligé de constater cette carence. Toutefois, ce n'est pas parce qu'il n'y aura pas d'interprofession qu'il n'y aura plus de débat. Nous poursuivrons le dialogue en parallèle avec l'ensemble des familles représentatives de la filière jusqu'à ce que l'ensemble des professionnels trouvent un nouveau moyen de concertation.
Il est parfois facile de protester ou de réclamer. Mais je pense que lorsqu'on fait appel au ciel pour qu'il vous aide, on commence par s'aider soi-même. J'invite l'ensemble des professions, et particulièrement celle de l'horticulture, à s'organiser afin d'être fortes et de pouvoir effectivement mener de véritables politiques.
Monsieur Vigouroux, estimez-vous normal que des professionnels ne puissent pas se mettre d'accord entre eux pour bâtir leur avenir et se tournent vers nous pour nous demander de faire leur travail à leur place ? Ce n'est pas, je le pense, une bonne façon de travailler.
Je suis, pour ma part, tout disposé à m'asseoir autour d'une table avec l'ensemble des professionnels, afin de créer un outil commun, indispensable à la profession. Vous serez le bienvenu, monsieur Vigouroux, si vous souhaitez participer à cet effort collectif.
S'agissant du blé dur, qui a été notamment évoqué par M. Courteau, le régime communautaire actuel consiste à soutenir le revenu des producteurs dans les régions traditionnelles de production, en leur octroyant un supplément spécifique à l'hectare sur la base de droits individuels en sus du versement compensatoire normal aux cérérales.
Mon propos n'est peut-être pas limpide pour les non-spécialistes, mais ceux qui ont l'habitude de traiter des problèmes du blé dur savent très bien de quoi je parle.
Ces dispositions, outre la lourdeur qu'implique la gestion des droits individuels, gênent considérablement l'accès des nouveaux producteurs, notamment des jeunes, à cette culture. En réalité, le système est complètement figé.
La Commission européenne a transmis au Conseil une proposition de modification réglementaire établie sur le principe d'une superficie maximale garantie pour chacun des cinq pays producteurs traditionnels. Ce projet doit être amélioré, notamment en ce qui concerne les surfaces retenues, tant pour leur niveau que pour leur gestion.
Toutefois, compte tenu de l'avancement de la campagne en cours, il ne serait pas correct à l'égard des producteurs de changer de système aussi tardivement, alors que les semis ont déjà commencé. C'est pourquoi j'ai demandé, et obtenu, que ces dispositions ne soient applicables qu'à partir de 1997.
Venons-en maintenant à la viticulture. Ah ! la viticulture ! Des secteurs comme celui-là, j'en redemande ! (Sourires.) Ce secteur est en effet exemplaire. Certes, des difficultés existent encore pour les producteurs de certains vins blancs. Mais nous constatons que certains d'entre eux, notamment dans l'Ouest, s'inspirent de politiques qui ont réussi par ailleurs pour mettre en place celle qui convient et, là, nous sommes tout à fait disposés à les soutenir.
Il faut reconnaître que, au cours des dix dernières années, un effort sans précédent a été accompli par les professionnels, au plan tant de la qualité que de la maîtrise des productions. Cette persévérance et cette volonté commencent à porter leurs fruits.
Je rencontre souvent les responsables des régions viticoles. Monsieur César, je vais très bientôt me rendre dans votre région et j'espère que vous m'accueillerez un verre à la main. (Sourires.)
M. Gérard César. Avec beaucoup de plaisir !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. J'ai un avantage sur nombre d'entre vous. Je suis originaire de la seule région de France qui ne produit pas de vin, mais aussi - et je revendique ce titre devant les Bretons - du département français où la consommation de vin est la plus importante. En effet, n'étant attachés à aucun terroir, nous avons envie de goûter tous les vins. C'est pourquoi j'aborde ces problèmes dans un esprit oecuménique. (Sourires.)
Il n'en demeure pas moins que, lorsque je rencontre les représentants de cette filière, nous parlons de plus en plus de politique structurelle et de moins en moins de conjoncture difficile. Je vous assure que, pour un responsable gouvernemental, cette façon d'aborder les problèmes rend plus confiant en l'avenir.
Je souhaiterais pouvoir aborder l'ensemble des problèmes de la crise bovine, des fruits et légumes et du lait à partir de ces problèmes structurels. Je ne prétends pas que ce qui se fait dans le secteur viticole peut se faire dans tous les secteurs, mais permettez-moi de souligner l'effort qui a été accompli et de rappeler aussi que, de temps en temps, lorsque le besoin s'en fait sentir, nous savons donner un coup de pouce conjoncturel.
Ainsi, au titre des mesures de gestion de marché, nous avions à certains moments obtenu les distillations que nombre de producteurs réclamaient. Nous avions ainsi obtenu 800 000 hectolitres, mais seul le quart a été effectivement distillé. Il ne faut pas se tromper de revendication. Si un combat semble inutile, mieux vaut axer son effort sur ce qui est prioritaire. A force de tout demander, on ne finit par obtenir que ce qui est secondaire. Bref, c'est le passé.
J'ai accédé à la demande des professionnels qui souhaitaient promouvoir l'approvisionnement d'un certain nombre de débouchés autres que le vin, notamment les jus de raisin et les moûts concentrés et rectifiés. Le dialogue que j'ai engagé avec les professionnels a été très constructif. C'est une bonne mesure.
Par ailleurs, j'ai obtenu de Bruxelles que la distillation obligatoire soit régionalisée et non plus effectuée sous la forme d'un quota par pays, afin de mieux prendre en compte la réalité économique propre à chaque région viticole.
Au plan structurel, trois dispositions essentielles ont été adoptées. Il a tout d'abord été mis fin à la politique d'arrachage à « guichets ouverts », qui était mauvaise. Elle est remplacée par un système plus limitatif. Par ailleurs, les décisions d'arracher relèvent des professionnels de chaque région concernée.
Parallèlement, j'ai obtenu un contingent de 2 584 hectares de plantations nouvelles pour les deux années à venir, ce qui n'est tout de même pas rien.
J'ai accepté que soient mises en oeuvre les plantations anticipées dans le secteur des vins de table et des vins de pays, afin que, là aussi, nous puissions accélérer la restructuration du vignoble.
Enfin, s'agissant de la réforme de l'OCM dans le secteur vitivinicole, nous ne sommes pas encore au bout de nos peines. J'occupe mes fonctions actuelles depuis dix-huit mois, et depuis cette date j'entends parler de cette réforme. Nous en sommes à la quatrième présidence et je crois que nous n'aboutirons ni sous la présidence irlandaise ni sous la présidence néerlandaise. Peut-être aurons-nous plus de chance avec la présidence luxembourgeoise, ce qui nous reporte au deuxième semestre de l'année 1997.
En tout cas, même si cette réforme doit nécessiter des délais importants, j'insisterai pour que soit rétablie très rapidement, avant même l'adoption d'une nouvelle OCM, une politique structurelle cohérente, notamment en matière d'aide à la restructuration.
S'agissant de l'oléiculture, qui est une fort belle production, je rappelle que la France est un pays fortement consommateur d'huile d'olive puisque nous en consommons en moyenne 40 000 tonnes par an.
MM. Bernard Piras et Aubert Garcia. Soixante mille tonnes !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. J'ai dit en moyenne : la consommation varie d'une année sur l'autre. Mais on peut effectivement penser, compte tenu de la progression constante, que nous tendons vers une consommation annuelle stabilisée de l'ordre de 60 000 tonnes. Or - je cite ce chiffre de mémoire - nous ne produisons que 2 500 tonnes d'huile d'olive par an. Vous voyez qu'il y a une marge !
Sur le sujet plus particulier de l'oléiculture soulevé par M. Aubert Garcia, inspiré par M. Marcel Vidal, notre action doit se placer à deux niveaux.
A l'échelon communautaire, il est clair que la réforme de l'OCM doit laisser à la France un espace de liberté dans l'évolution de ce secteur, tant en termes de production qu'en termes de qualité. Je m'en suis d'ailleurs entretenu lundi dernier avec ma collègue espagnole, l'Espagne étant le premier pays producteur. En effet, je rejoins tout à fait vos propos, monsieur le sénateur, ce que nous faisons est d'une autre nature que ce qui se fait ailleurs.
Au plan national, nous avons déjà lancé dans le passé des réformes ou des plans de relance de la production de l'huile d'olive. L'évolution vers une reconnaissance de la spécificité des produits de l'olivier, qu'il s'agisse des olives de table ou de l'huile d'olive, s'est traduite par une politique favorisant la mise en place d'appellations d'origine contrôlée. Nous devons effectivement développer une politique de qualité préservant un espace de développement pour nos producteurs d'huile d'olive.
J'en viens à la forêt, au sujet de laquelle sont intervenus avec une grande détermination MM. Christian Poncelet et Gérard Braun. La forêt et la filière bois constituent, je le confirme, un atout formidable pour notre pays et nous devons donc nous donner les moyens d'une politique ambitieuse à cet égard.
M. Gérard Braun. Absolument !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Le Sénat s'était beaucoup ému l'année dernière, à juste titre, j'en conviens, de l'augmentation des frais de garderie des forêts communales. Lorsqu'on me parle gentiment, j'écoute toujours. (Sourires.)
Nous avons alors, je crois, trouvé une solution raisonnable. Pour 1997, nous allons augmenter le versement compensateur de 170 millions de francs, ce qui permettra à l'ONF d'assurer la gestion des forêts communales dans les meilleures conditions possible sans augmentation des frais de garderie des collectivités. Comme vous pouvez le constater, j'ai bien compris et retenu ce que vous m'aviez expliqué l'année dernière.
M. Gérard Braun. Très bien !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Le Fonds forestier national est un autre instrument essentiel de la politique forestière. Certains professionnels qui acquittent la taxe forestière alimentant ce fonds demandent avec insistance la baisse de celle-ci. Je comprends tout à fait cette revendication mais au moment où nous redressons la situation financière du Fonds forestier national, une baisse des recettes n'est pas envisageable sans une diminution corrélative des dépenses. Le minimum raisonnable est déjà fait pour soutenir des actions qui bénéficient à l'ensemble de la filière. Certes, cette position n'est pas irréversible, mais elle m'est imposée par des considérations budgétaires et financières qui dominent l'année 1997.
De nombreux élus sont également intervenus en faveur du conservatoire de la forêt méditerranéenne. Je fais le maximum pour préserver les moyens de ce conservatoire. J'ai demandé qu'il soit procédé à des redéploiements en 1996 afin de maintenir un niveau raisonnable. La dotation qui est prévue en 1997 sera supérieure aux crédits dont nous disposons effectivement cette année ; je fais allusion non pas aux crédits qui sont inscrits, mais aux dépenses réelles. En 1996, nous aurons dépensé 50 millions de francs ; 62 millions de francs sont inscrits pour l'année 1997.
Bien entendu, j'ai conscience que cela ne suffira pas à rattraper totalement la diminution considérable des crédits qui a eu lieu entre 1994 et 1995. Toutefois, je le répète, nous aurons à discuter d'une politique globale ambitieuse pour la forêt dans le cadre de la loi d'orientation.
A ce sujet, M. Poncelet a évoqué le plan d'épargne forestière, qui est préparé par le ministère de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation, et qui a été récemment annoncé par le Premier ministre. Je confirme que ce plan sera au coeur de nos propositions en ce qui concerne le volet forestier de la loi.
Quant à l'environnement, il n'est pas question, rassurez-vous, de céder aux pressions d'organisations qui voudraient contrôler et certifier la forêt à notre place.
De même, le gel de la mise en oeuvre de la directive « Natura 2000 » montre bien que, en matière d'environnement, il faut éviter les excès. (Marques d'approbation sur les travées du RPR.)
Nos forestiers sont prêts, comme ils l'ont toujours été, à prendre en compte les contraintes d'environnement. Mais encore faut-il que celles-ci soient justifiées et raisonnables.
J'en viens maintenant à la politique de qualité, qui est au coeur de mes priorités et qui correspond aux attentes des consommateurs. C'est aussi, d'ailleurs, une façon de développer une agriculture présente sur l'ensemble du territoire et qui assure, par une meilleure valorisation des produits, un juste revenu aux producteurs.
Des opportunités très importantes existent pour développer les signes officiels de qualité, notamment, cela a été dit, dans la viande ou les fruits et légumes, où ces signes officiels n'interviennent que pour 1 % de la production, alors que la demande est très forte sur l'origine et les caractéristiques des produits.
Nous devons aussi réfléchir, dans le cadre de la loi d'orientation, à une simplification du dispositif, aujourd'hui trop peu lisible pour le consommateur, d'autant que l'arrivée des protections juridiques européennes est venue compliquer un peu plus le paysage.
Il ne faut pas mélanger les genres : à la France de définir une politique de qualité et de la promouvoir auprès des consommateurs ; à l'Europe d'étendre, lorsque c'est nécessaire, la protection de certaines dénominations. Mais ce n'est pas à Bruxelles de décider ce qui mérite un label ou comment on fabrique un fromage sous appellation d'origine contrôlée !
De ce point de vue, il faut être clair et net ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Deneux est intervenu, à juste titre, sur l'importance de l'industrie agroalimentaire et la transformation des produits. J'en suis le premier convaincu. Le rôle du ministère est, précisément, de soutenir cette industrie et de lui fournir les moyens de son développement.
L'un des instruments de son développement est la prime d'orientation agricole, la POA, évoquée par M. Deneux, et qui constitue souvent, c'est vrai, une aide décisive pour les PME, notamment parce qu'elle permet, en outre, de faire appel au FEOGA.
Je me réjouis que le débat budgétaire qui a déjà eu lieu à l'Assemblée nationale ait permis d'augmenter de 20 millions de francs la dotation prévue pour 1997.
Cette revalorisation permettra, d'abord, de disposer d'une POA « déconcentrée », destinée aux PME, qui ira au-delà des dotations prévues dans les contrats de plan Etat-régions. M. César a énoncé sa préférence pour une orientation privilégiée vers les PME. Le projet de budget que je vous présenterai va tout à fait dans ce sens.
Elle permettra, ensuite, de maintenir la POA nationale, destinée aux grandes entreprises, à un niveau raisonnable, qui nous permette de ne pas perdre les crédits du FEOGA prévus pour la France.
Elle permettra, enfin, de disposer d'une enveloppe importante pour faire face aux restructurations de certains secteurs ; je pense, en particulier, aux entreprises de la filière viande qu'il faudra sans doute aider à passer un cap difficile après la crise de l'ESB.
Un autre volet fait l'objet de bien des débats, le FGER, au sujet duquel se sont prononcés MM. Aubert, Garcia, Signé et Huchon. Il est vrai que, dans un premier temps, nous n'avions pas affecté de dotation au FGER. Je ne reviendrai ni sur les causes de cette absence de dotation ni sur la façon dont nous avions abordé les problèmes, car cela m'entraînerait trop loin. Toutefois, vous avez pu constater que, là encore, dans le cadre de la discussion budgétaire, une ligne a été prévue et un crédit y a été inscrit, crédit qui se cumulera avec des reports de 1996 sur 1997.
Le troisième sujet budgétaire qui pose problème concerne le programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole. Sur ce point, ma réponse ne sera pas de même nature que pour les deux sujets précédents.
Comme l'ont souligné MM. de Menou, Poncelet, Arzel et Raoult, notamment, il s'agit d'un dossier très important.
De nombreuses voix se sont élevées pour souligner des difficultés, au risque de donner l'impression que le programme ne fonctionne pas ou prend du retard.
Sans nier les difficultés, permettez-moi de faire un point rapide.
C'est en octobre 1993 que le programme a été décidé par les ministères de l'agriculture et de l'environnement.
Il avait été prévu que le financement paritaire de l'Etat et des collectivités serait inscrit dans les contrats de plan Etat-régions.
Globalement, les crédits d'Etat prévus pour les cinq années des contrats atteignent 555 millions de francs, soit une annuité moyenne de 111 millions de francs.
Que s'est-il passé ?
En 1994, 42 millions de francs ont été délégués, soit plus du tiers d'une annuité moyenne.
En 1995, les crédits ont atteint 90 millions de francs, c'est-à-dire 80 % d'une annuité moyenne.
En 1996, les crédits se sont élevés à 120 millions de francs, soit plus que l'annuité moyenne, entamant donc le « rattrapage ».
Pour 1997, 210 millions de francs sont inscrits dans le projet de budget pour cette action, c'est-à-dire près de deux fois l'annuité moyenne.
Il s'agit là des crédits d'autorisations de programme ; les crédits de paiement suivent sans aucun retard.
Par conséquent, la difficulté provient, c'est exact, de ce décalage, mais elle est aussi la conséquence d'une mauvaise évaluation initiale des besoins. En effet, d'abord, on avait largement sous-estimé le coût moyen des travaux de mise en conformité qui devraient être réalisés. Ensuite, et surtout, on avait largement minimisé la volonté des éleveurs - et c'est tout à leur honneur ! - d'améliorer leur environnement : ils sont près de 90 % à avoir répondu présents et il faut désormais en tenir compte.
S'agissant des préoccupations exprimées par M. de Menou, je suis persuadé que l'agriculture et l'environnement ne sont pas deux notions qui s'opposent.
M. Jacques de Menou. C'est vrai !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. La déformation de l'information, qui laisse à penser que l'agriculture d'aujourd'hui est à l'origine de multiples pollutions, fait fi du rôle fondamental que jouent les agriculteurs dans la préservation du milieu naturel et dans l'entretien des paysages.
La protection de l'environnement ne doit pas être un frein au développement de l'agriculture ; elle doit en intégrer les contraintes et, à ce titre, je partage vos vues, monsieur de Menou, sur la nécessité d'utiliser et de développer toutes les solutions de traitement des effluents existant afin de permettre le développement des activités agricoles, tout en respectant les impératifs liés à la protection de l'environnement.
M. Jacques de Menou. Je vous remercie !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Pour en revenir au programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole et conclure sur ce point, ce sont 210 millions de francs qui sont inscrits dans le projet de loi de finances pour 1997.
Vous me dites que c'est insuffisant, qu'il faut faire plus ! Je m'engage, d'ici au 5 décembre - à cette date, en effet, nous nous retrouverons pour examiner le projet de budget - à réfléchir pour essayer de trouver une solution qui puisse satisfaire, même si ce n'est que partiellement, la Haute Assemblée. J'espère y parvenir.
Par ailleurs, comme l'ont souligné MM. Braun et Amoudry, le rôle de l'agriculture en zone de montagne est fondamental.
Aussi l'agriculture de montagne fait-elle l'objet d'une attention particulière du ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation, qui aime beaucoup la montagne, monsieur Rigaudière, vous devez le savoir ; M. Amoudry peut également en être tout à fait convaincu.
Cette politique forte en faveur de la montagne se traduit, d'abord, par le versement d'indemnités compensatoires. Je serai bref sur ce point afin de simplifier, mais je me tiens à votre disposition pour vous fournir les détails que vous souhaiteriez obtenir.
Elle se traduit, ensuite, par des aides plus importantes pour l'installation des jeunes agriculteurs ou encore pour la modernisation des exploitations, avec des subventions spécifiques pour les bâtiments d'élevage en zone de montagne.
J'avais annoncé, au Puy, que 50 millions de francs supplémentaires seraient dévolus à la montagne cette année. Ils figureront bel et bien dans le projet de loi de finances rectificative de 1996. L'engagement est tenu.
Par ailleurs, les éleveurs de montagne sont également les principaux bénéficiaires de la prime à l'herbe. Le montant de cette prime, qui peut être considéré aujourd'hui comme insuffisant, n'est pas nécessairement voué à rester ce qu'il est. Je vous apporte cette précision parce que nous en avons parlé, à la fois lors de la réforme de l'OCM viande bovine et à propos du mémorandum pour l'agriculture et la forêt de montagne.
La France a bien cadré, en effet, la politique de la montagne qu'elle souhaite mettre en oeuvre. J'ai présenté le mois dernier, lors du conseil des ministres de l'agriculture de l'Union européenne - là encore, l'engagement a été tenu - le mémorandum pour l'agriculture et la forêt de montagne, qui a été accueilli d'une manière encourageante, me semble-t-il, par un certain nombre de nos partenaires.
Je ne détaillerai pas les mesures qu'il contient ; je rappellerai simplement trois points essentiels.
Le premier point tient au renforcement des outils structurels : la revalorisation, que nous demandons, de l'indemnité spéciale montagne, l'ISM ; une incitation à la mise en oeuvre des mesures agri-environnementales, en faisant en sorte que le taux de remboursement au titre du FEOGA-garantie des budgets consacrés aux programmes régionaux agri-environnementaux en zone de montagne passe de 50 % à 75 % ; enfin, une identification « montagne » pour un certain nombre d'actions.
Le deuxième point concerne l'instauration d'une politique de qualité « montagne », assortie de moyens de promotion et de développement des produits agricoles et alimentaires.
Enfin, le troisième point a trait à la mise en place d'une véritable politique communautaire de la forêt et de la filière bois en montagne.
Nous pourrons en reparler si vous le souhaitez, et je vous apporterai alors tous les éléments. Je suis tout à fait prêt à m'entretenir avec ceux d'entre vous que la politique de la montagne intéresse tout particulièrement.
Je passe maintenant - rassurez-vous, je ne serai plus très long - à la politique de l'installation.
Les efforts qui ont été évoqués par MM. Poncelet, Emorine et Leyzour sont indéniables. On peut estimer qu'ils pourraient être supérieurs, certes, mais je constate que, aujourd'hui, il ne s'agit pas d'un problème d'enveloppe financière. Cela me conduit à affirmer qu'une politique ne peut pas se résumer au nombre de zéros que l'on inscrit sur un chèque. La politique, c'est quelque chose de beaucoup plus large, et nous devons accomplir des efforts, afin de favoriser les candidatures et les vocations.
Demain, je vais visiter - et je vous invite tous à le faire - trois lycées agricoles de France pour rencontrer les élèves et leur dire que s'installer c'est un beau métier. Je constate, en effet - j'y reviendrai dans quelques instants - que les jeunes qui sortent des établissements d'enseignement agricole sont loin, très loin, d'être majoritaires à s'installer. Il convient peut-être, là aussi, de prendre des mesures à cet effet. Au départ, commençons déjà par former le nombre d'agriculteurs dont nous avons besoin.
Cependant, je tiens à dire que toutes les mesures d'incitation à l'installation prévues dans la charte d'installation sont maintenant opérationnelles. M. Arzel a déclaré que, quand les choses vont bien, il faut le dire. Eh bien ! disons-le ! En matière d'installation, les choses vont bien : une nouvelle dynamique a été initiée.
Quand je parle d'installation, on me dit que les jeunes doivent avoir des perspectives. Je rétorque alors tout de suite que je ne saurai jamais répondre ce que sera l'agriculture ou le revenu d'un agriculteur dans trente ans ! Voilà vingt ans, j'aurais été incapable de dire ce que je serais devenu dans la vie. Si l'on m'avait dit que, le 6 novembre 1996, je parlerais à la tribune du Sénat, je ne l'aurais jamais cru ! (Sourires.) Il faut donc que les jeunes, en agriculture comme dans d'autres domaines, admettent que l'avenir n'est jamais inscrit nulle part et que ce sont eux qui le bâtiront.
J'insisterai cependant sur un point important : pour s'installer comme agriculteur, il faut certes en avoir envie. A côté de cela, peut-être faut-il aussi dire aux jeunes que ce n'est pas le dernier des métiers et que l'on peut encore gagner sa vie en l'exerçant ! En effet, il ne faut pas regretter de ne pas trouver de candidats à l'installation quand, la veille, on a déclaré que l'on ne parvenait pas à gagner sa vie dans ce secteur. Il y a une contradiction. Par conséquent, il faut dire à la fois ce qui va mal et ce qui va bien.
J'en viens au problème du revenu agricole. A cet égard, nous allons cette année, comme tous les ans, entendre commenter les chiffres ; ces derniers commencent d'ailleurs déjà à sortir. Certaines personnes ont d'ailleurs de la chance : elles sont mieux informées que moi, et je ne sais pas d'où elles tiennent les chiffres qu'elles produisent !
Nous disposons certes de quelques indications, mais elles ont déjà varié par rapport au mois dernier. Comme les revenus agricoles ne seront rendus publics que dans un mois, ils peuvent encore changer. Alors, soyons quand même prudents !
Toutefois, comme M. Rigaudière l'a dit, il faut d'ores et déjà s'intéresser au revenu des éleveurs. Certaines évolutions pourront être favorables. Cependant, je ne pense pas - je le dis tout de suite - que nous atteindrons cette année un niveau de progression équivalent à celui qui a été enregistré l'année dernière. Il sera plus vraisemblablement sensiblement inférieur. L'évolution globale ne sera pas négative, mais, si elle est positive, elle devrait rester, d'après ce que je sais, relativement modérée.
De toute façon, il faut dire et répéter avec acharnement que, quand on sort un chiffre, il ne s'agit que d'une moyenne et que cette dernière, d'une part, correspond à un rattrapage de pertes de revenus subies au cours des années, voire des décennies antérieures, et que, d'autre part, elle recouvre de très fortes disparités, selon les secteurs, les régions, les types d'exploitations. Il faut donc prendre ces chiffres avec beaucoup de précautions. Quels qu'ils soient, nombre d'exploitations sont aujourd'hui dans une situation difficile, et je suis de votre avis à cet égard, monsieur Leyzour.
Je ne voudrais pas que, au moment où sortiront ces chiffres, des commmentateurs, se fondant sur une moyenne statistique, avancent que les efforts déployés par les uns et les autres pour appuyer notre agriculture n'étaient pas aussi légitimes que ce que nous pensions. Je suis, pour ma part, convaincu du contraire : il fallait se mobiliser, et il le faut d'ailleurs encore, car nous n'avons pas encore résolu toutes les crises.
Nous devons aussi savoir de quoi est composé ce revenu et constater que les primes, notamment celles qui résultent de la politique agricole commune, y occupent une place de plus en plus importante. Cela doit nous conduire à des réflexions pour l'avenir.
J'en arrive à un point peut-être un peu plus technique, qui pourrait vous paraître quelque peu anecdotique à côté de mon propos précédent. Mais tel n'est pas, à mon avis, le cas.
M. César a évoqué le rapprochement entre les DDAF et les DDE. Je ne suis pas favorable à une solution qui irait jusqu'à leur regroupement, et ce même dans les départements les plus ruraux. Je crois, monsieur le sénateur, que cela traduit tout à fait vos préoccupations. (M. César fait un signe d'assentiment.) Cela ne m'étonne d'ailleurs pas, car vous connaissez fort bien la réalité rurale. Il est important que nous nous fassions entendre sur le terrain pour éviter que certaines constructions, qui paraissent quelquefois séduisantes dans des bureaux républicains peuplés de gens fort intelligents, ne soient en décalage avec les attentes sur le terrain.
M. Gérard César. Je suis tout à fait d'accord ! Merci !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. J'en viens aux préretraites, sujet traité par beaucoup d'entre vous, en particulier par MM. Huchon, César, Emorine et Arzel : le dispositif communautaire de préretraite en faveur de l'installation vient à échéance en octobre 1997. J'avais donc envisagé, pour des raisons qui ont été évoqués - notamment parce que tous les départs en préretraite ne favorisent pas l'installation et que le fait de mettre à la retraite des agriculteurs alors qu'il n'existe pas nécessairement autant de jeunes prêts à s'installer ne constitue peut-être pas la meilleure politique pour freiner la réduction du nombre d'exploitations - j'avais envisagé, dis-je, que, pour l'année 1997, le même critère d'âge que celui du régime général pouvait être retenu, c'est-à-dire, sauf pour les éleveurs spécialisés de bovins allaitants et pour les agriculteurs en difficulté, l'âge non pas de cinquante-cinq ans, mais de cinquante-sept ans.
Cependant, là encore, j'écoute ce que l'on me dit : j'ai cru comprendre que cette mesure n'était pas opportune. Le dispositif de préretraites sera donc maintenu sans changement jusqu'au mois d'octobre 1997.
Des préretraites, je passe aux retraites : sur ce sujet, il y a, c'est vrai, un problème ancien - ce n'est pas aujourd'hui, en 1996, qu'il faut le découvrir ! - que M. de Menou et d'autres ont évoqué. Nous aurons d'ailleurs à en parler encore dans les mois ou les années qui viennent. Par conséquent, n'en faisons pas un objet de division entre nous. La responsabilité est collective, car les différentes majorités qui se sont succédé n'ont pas entièrement résolu le problème. Depuis deux ou trois ans, nous avons engagé un effort considérable pour augmenter les pensions de 2 millions de retraités agricoles, et ce sans majoration des charges sociales des agriculteurs.
Cet effort sera poursuivi : conformément aux engagements pris à l'occasion de la conférence annuelle agricole de février, le projet de loi de finances pour 1997 prévoit de nouvelles avancées pour les petites retraites agricoles. Je n'entrerai pas dans le détail ; sachez que je tiens ces informations à votre disposition. Nous aurons d'ailleurs l'occasion de reparler de ce point lors de la discussion du projet de loi d'orientation.
Des efforts significatifs seront faits dès 1997. Certes, ils ne régleront pas tout, et il faudra aller au-delà, car nous sommes obligés malheureusement d'agir de façon progressive. Le projet de loi d'orientation peut d'ailleurs être l'occasion de réfléchir, au-delà de 1998, puisque nous engageons une revalorisation pour 1997 et 1998, aux efforts nouveaux en faveur des plus petites retraites. En effet, des engagements ont été pris à l'égard des retraités de l'agriculture.
M. Jacques de Menou. Très bien !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Ces engagements, il nous faudra les tenir !
M. Pastor a évoqué le BAPSA et les problèmes de solidarité s'exerçant à travers son financement. Contrairement à ce qu'il a dit s'agissant de l'absence de solidarité, les cotisations des agriculteurs n'ont pas augmenté, et l'existence d'une subvention d'équilibre budgétaire plus importante en 1997 qu'en 1996 est bien la traduction de la solidarité nationale.
M. Emorine a abordé des sujets relevant du projet de loi d'orientation. Il a évoqué la suppression de la part communale et la taxe sur le foncier non bâti. Je dis tout de suite que la gestion des finances publiques rend actuellement cette suppression extrêmement aléatoire.
M. Emorine a également parlé des droits à produire, de leur gestion et de leur attachement à un territoire donné. C'est là une préoccupation tout à fait fondée, car il importe, bien entendu, d'éviter la délocalisation des productions et de veiller à ce que ces droits se trouvent attachés à un territoire, sauf si cette règle d'attachement à un territoire risque de conduire à une sous-utilisation sur le plan national. Il serait en effet stupide de perdre des droits à produire. Il faut donc savoir assouplir la règle, et c'est ce que nous faisons, par exemple, dans le domaine de la production ovine.
M. Emorine a évoqué le développement des sociétés. Je partage son point de vue. Il convient d'encourager le développement des sociétés, tout en reconnaissant qu'il présente aussi quelques inconvénients. Il ne faudrait pas - tel n'est pas le cas actuellement, mais on ne sait jamais ! - que le recours aux formules sociétaires soit motivé plus par des préoccupations d'optimisation fiscale ou sociale ou par l'accumulation de droits à produire que par la volonté réelle de constituer une société.
C'est là un sujet important, voire un tabou. Mais il faut avoir aussi le courage de poser tous les problèmes. Il faudra aborder ce point dans le cadre du projet de loi d'orientation, sans pour autant remettre en cause une dynamique en faveur des sociétés.
M. Leyzour a fait valoir, dans le cadre du projet de loi d'orientation, la notion de loi d'adaptation du milieu rural aux réalités d'aujourd'hui. Je suis tout à fait d'accord avec son analyse, ce qui le surprendra peut-être !
J'en viens au problème de l'enseignement agricole, sur lequel je voudrais intervenir sans passion. Je ne suis pas d'accord avec MM. Vecten et Carle, qui me reprochent la politique de limitation des effectifs. Je réitère mon appel à la prudence : méfions-nous d'une politique qui pourrait nous conduire à des dérapages incontrôlés. Gardons-nous notamment du danger de voir ces enseignements détachés du ministère de l'agriculture. L'intérêt collectif est en cause : l'intérêt des élèves et de la profession, l'intérêt global de notre pays commandent que cet enseignement de filières - il s'agit en effet d'un enseignement de filières, sinon, pourquoi serait-il rattaché à ce ministère ? - reste du domaine du ministère de l'agriculture.
M. Gérard Braun. Très bien !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Mais pour que cet enseignement de filières justifie son appartenance au ministère de l'agriculture, il faut qu'il reste au coeur des métiers de l'agriculture et de la filière agro-alimentaire ; il importe aussi qu'il trouve sa place au sein du budget du ministère.
Vous m'objectez l'insuffisance des moyens en faveur de l'enseignement. Faites-moi confiance, mesdames, messieurs les sénateurs : si vous me donniez deux fois plus de crédits que ceux dont je dispose dans mon budget, je saurais les utiliser ! (Sourires.)
Je suis un membre du Gouvernement responsable, et je dois donc participer à l'effort collectif de maîtrise des dépenses publiques, objectif auquel j'adhère. Certes, mesdames, messieurs les sénateurs, je pourrais très bien me lamenter devant vous en disant que le montant des crédits de mon ministère est insuffisant, et que je ne peux pas faire plus. Néanmoins, ma responsabilité est d'opérer des choix et de déterminer des priorités.
Ces priorités m'amènent à vous dire deux choses.
Indépendamment des problèmes de fond, sur lesquels je vais revenir, croyez-vous raisonnablement que vous pouvez obtenir pour mon ministère, dans le cadre du budget pour 1997, une rallonge que je pourrais, par exemple, consacrer à l'enseignement agricole ? La réponse est négative, car, sinon, nous échapperions à l'exercice de maîtrise des dépenses publiques que j'évoquais à l'instant.
L'enseignement agricole figure déjà au rang de mes priorités puisque, alors que les effectifs globaux de mon ministère diminuent, quatre-vingts postes d'enseignants seront créés l'année prochaine.
Cela étant, s'il faut consacrer davantage d'argent, quelle politique dois-je supprimer ? Dois-je prendre sur le FGER ? Dois-je diminuer les crédits d'intervention des offices ? Mais alors, il ne faudra plus venir me demander de gérer une crise en cours d'année ! Faut-il que je réduise les crédits consacrés à la recherche ? Faut-il que je diffère la concrétisation de la promesse que nous avons faite concernant les petites retraites? Tel est le problème aujourd'hui !
Il est vraiment facile de dire qu'il faut davantage d'argent. Certes, il en faut plus, mais le salarié que je suis depuis des années a appris à vivre avec l'argent qu'il gagnait à la fin de chaque mois ! Et je suis contraint de faire de même aujourd'hui.
Indépendamment de ces problèmes budgétaires pour l'année 1997, je voudrais vous inviter à vous pencher sur un autre dossier. Pendant des années et des années, l'enseignement agricole a connu des effectifs constants. Entre 1985 et 1992, nous avions, bon an mal an, 130 000 élèves. Depuis 1992, c'est une véritable explosion. Les effectifs ont en effet augmenté de 30 % en l'espace de quatre ou cinq ans, passant, après une période de stabilité, de 130 000 à 170 000 élèves. Tant mieux, me direz-vous, et il faut que cela continue. Je n'en suis pas si sûr.
La croissance des effectifs n'a pas concerné la filière de production, alors que nous ne parvenons pas à satisfaire tous les besoins constatés dans cette filière. Bien sûr, les formations qui ont vu croître leurs effectifs sont parfaitement utiles et légitimes. Il s'agit, notamment, des formations d'aménagement et d'environnement. Cependant, alors que leurs effectifs ont quadruplé, passant de 5 000 à 20 000 élèves, les débouchés correspondants ne sont pas certains. Les effectifs ont également augmenté dans les formations de services aux personnes. Ils ont plus que doublé, passant de 13 000 à 28 000 élèves.
Encore une fois, ces formations sont très utiles, mais je crains que l'on ne me fasse valoir un jour qu'elles ne relèvent pas de la vocation exclusive du ministère de l'agriculture et qu'elles peuvent donc être dispensées dans d'autres établissements.
Le problème social est bien réel, car nous retrouvons, frappant à la porte de l'enseignement agricole, des élèves venus tenter chez nous une deuxième chance, comme l'ont dit MM. Vecten et Carle. Reconnaissez que, dans ce cas-là, nous sortons totalement de notre rôle. Si jamais l'enseignement agricole devait être la session de rattrapage des échecs scolaires connus dans d'autres systèmes, alors il n'incomberait plus au ministre de l'agriculture, ministre des filières agro-alimentaires, et, à ce titre, chargé de former des élèves pour ces filières, de répondre à de telles attentes.
Si nous devons accueillir des élèves sans aucune limitation, en inscrivant tous ceux qui se présentent, je le dis très clairement ; nous devons changer de politique, car il n'est plus de la vocation du ministre de l'agriculture d'être le ministre de l'enseignement rural. Ministre de l'enseignement agricole, oui ! ministre de l'enseignement rural, non ! C'est dans un cadre beaucoup plus large, celui de l'éducation nationale, qu'il faut oeuvrer pour le maintien des écoles dans les villages et faire en sorte qu'il y ait au moins un collège par canton.
Soyons donc très attentifs, la politique dans laquelle on veut nous entraîner, qui consiste à supprimer toute barrière et à laisser entrer dans l'enseignement agricole tous les élèves qui se présentent, nous conduirait, à brève échéance, et même à très brève échéance, à détacher l'enseignement agricole du ministère de l'agriculture. Je sais que ce n'est pas ce que vous voulez, ni ce que veulent ceux qui crient le plus fort. En revanche, ceux qui crient le moins fort s'accommoderaient peut-être davantage de ce scénario catastrophe. Méfions-nous, dans les arguments que nous développons, car nous risquons, demain, de subir un véritable effet boomerang. Et nous pourrons alors nous écrier : « Qu'avons-nous fait ? Nous n'avons pas voulu cela. »
Je le dis très clairement, et un autre à ma place serait sans doute conduit à dire de même, l'avenir de l'enseignement agricole est inscrit dans le cadre des filières, de manière à permettre aux jeunes qui sortent de ces établissements de continuer à trouver un emploi. Cet avenir passe par un contrat entre l'Etat et les établissements - contrat région par région, établissement par établissement - qui portera non pas seulement sur l'évolution des effectifs, mais également sur les filières de formation, sur les objectifs que l'on veut se fixer.
Je le dis avec un peu de passion, parce que je crains, malheureusement, d'être comme Cassandre, dont la prophétie est prise à la légère quand le temps est à la fête, mais qui finit par voir se réaliser les désastres annoncés.
L'équarrissage, nombre d'entre vous l'ont souligné, est un dossier extrêmement difficile. Je pense avoir pris les décisions qu'il était indispensable de prendre dans une période un peu mouvementée.
Je remercie très chaleureusement ceux qui, dans cette épreuve, m'ont apporté leur soutien, comme je remercie très chaleureusement ceux qui m'ont permis d'éviter la multiplication, dans cent départements français, de situations de crise. Qu'ils soient assurés que je n'ai pas la mémoire courte et que je saurai me souvenir du soutien qu'ils m'ont apporté.
Pour le reste, c'est à la mi-décembre, je crois, que le texte doit venir en discussion au Sénat. Il s'agirait d'un service public national financé par des ressources propres dont vous aurez à discuter, non pas à l'occasion de la discussion de ce projet de loi, mais dans le cadre du collectif budgétaire de 1996. Nous réfléchissons à la meilleure solution possible pour ne pas pénaliser la filière de l'élevage, la filière de production de viande française.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je parle depuis maintenant une heure et quart. J'ai le sentiment d'avoir été fort long, mais vous avez posé tellement de questions, soulevé tellement de points passionnants et pertinents sur l'agriculture française... Cela ne me surprend pas, du reste, car je sais que siègent au Sénat des spécialistes de ces matières qui comptent parmi les meilleurs.
M. Gérard César. Les meilleurs spécialistes, n'ayons pas peur des mots !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Monsieur César, je ne vous visais pas personnellement. (Sourires.)
M. Gérard César. Je parlais, bien sûr, pour tous mes collègues !
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Chacun sait que vous êtes tous excellents, mais supportez qu'il puisse y avoir quelques ex æquo. (Sourires.)
Vous aurez l'occasion de reparler de ces problèmes, soit avec moi, soit avec mon successeur, peu importe - encore que je ne désespère pas de me succéder à moi-même - à l'occasion de l'examen du projet de loi d'orientation agricole.
Sur ce point, monsieur Piras, je ne peux pas vous laisser prétendre qu'il s'agit d'un débat hâtif pour une loi d'orientation. Vous ne le pensez pas sérieusement. Un débat hâtif ?
M. Bernard Piras. Monsieur le ministre, je ne vous ai pas accusé ; j'ai simplement souhaité que le débat soit profond, qu'il soit long et qu'il ne soit pas bâclé.
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Monsieur Piras, le débat est profond ; il est long et il ne sera pas bâclé. (Sourires.)
C'est au mois de mars qu'a été lancée l'idée de ce projet de loi d'orientation agricole. Depuis, j'ai réuni des groupes de travail comprenant des représentants de tous les secteurs, des agriculteurs, des industriels, des consommateurs et même de la grande distribution. C'est dire ! J'ai même à plusieurs reprises dit aux parlementaires que s'ils souhaitaient organiser dans leurs circonscriptions des réunions et me faire « remonter » des souhaits concernant le projet de loi d'orientation agricole, j'étais à leur disposition. D'ailleurs, c'est ce que vous avez fait aujourd'hui, puisque vous avez indiqué un certain nombre de pistes que nous pouvions suivre.
Il nous reste cinq ou six mois d'ici au grand débat que nous aurons, dans cet hémicycle, sur le projet de loi d'orientation agricole. Aussi, monsieur Piras, ne venez pas me dire, dans cinq ou six mois, que le débat est un peu précipité. Nous aurons eu un an pour débattre.
C'est ce que nous avons déjà fait au printemps quand je suis venu vous présenter le rapport sur le statut des conjoints et des aides familiaux. C'est ce que nous avons fait aujourd'hui, et de façon fort constructive. Nous avons débattu, nous avons pu exposer nos points de vue, tantôt convergents, tantôt divergents, mais l'exercice de la démocratie le veut ainsi.
Je pense en tout cas vous avoir écoutés et, surtout, entendus et je tiendrai compte de toutes vos suggestions, non seulement dans le débat budgétaire qui nous réunira le mois prochain, mais plus encore dans la préparation de ce qui devra être une grande loi pour l'avenir de notre agriculture. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Le débat est clos.
Acte est donné de la déclaration du Gouvernement, qui sera imprimée sous le numéro 64 et distribuée.

7