M. le président. Par amendement n° 67 rectifié, MM. Balarello, Franchis et Vasselle proposent d'insérer, après l'article 31, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 421-1 du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« - réaliser, exclusivement dans les zones franches urbaines définies au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, avec l'accord du maire de la commune d'implantation, sur des immeubles bâtis appartenant à des personnes privées, des prestations de services destinées à aménager, améliorer, réhabiliter, remettre en état ou gérer ces immeubles en vue d'accroître l'offre de logements sociaux. En cas de gestion, l'office public est tenu de faire ouvrir à son nom un compte bancaire ou postal exclusivement affecté à la réception des sommes versées par les locataires et occupants des logements privés gérés par celui-ci. Le coût de la garantie de paiement des loyers que l'office public peut être autorisé à souscrire s'imputera sur ces sommes. »
« II. - L'article L. 422-2 dudit code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« - réaliser, exclusivement dans les zones franches urbaines définies au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, avec l'accord du maire de la commune d'implantation, sur des immeubles bâtis appartenant à des personnes privées, des prestations de services destinées à aménager, améliorer, réhabiliter, remettre en état ou gérer ces immeubles en vue d'accroître l'offre de logements sociaux. En cas de gestion, la société anonyme d'habitations à loyer modéré est tenue de faire ouvrir à son nom un compte bancaire ou postal exclusivement affecté à la réception des sommes versées par les locataires et occupants des logements privés gérés par celui-ci ; le coût de la garantie de paiement des loyers que la société peut être autorisée à souscrire s'imputera sur ces sommes. »
« III. - L'article L. 422-3-2 dudit code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces sociétés peuvent réaliser, exclusivement dans les zones franches urbaines définies au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, avec l'accord du maire de la commune d'implantation, sur des immeubles bâtis appartenant à des personnes privées, des prestations de services destinées à aménager, améliorer, réhabiliter, remettre en état ou gérer ces immeubles, en vue d'accroître l'offre de logements sociaux. En cas de gestion, la société est tenue de faire ouvrir à son nom un compte bancaire ou postal exclusivement affecté à la réception des sommes versées par les locataires et occupants des logements privés gérés par celui-ci. Le coût de la garantie de paiement des loyers que la société peut être autorisée à souscrire s'imputera sur ces sommes. »
La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello. Cet amendement a pour objet d'ouvrir aux organismes d'HLM intervenant sur le secteur locatif la possibilité de prendre en mandat de gestion le parc privé vacant, qui est souvent délabré et impossible à relouer.
Je tiens à préciser que cet amendement ne vise que les logements situés dans les zones franches urbaines.
Les organismes d'HLM auront la possibilité d'effectuer les travaux éventuellement nécessaires et d'y loger les personnes satisfaisant aux conditions de plafond de ressources. L'accord du maire est prévu pour qu'une telle intervention ne puisse pas constituer une concurrence par rapport à des intervenants privés traditionnels.
En effet, tous les gestionnaires d'organismes d'HLM savent qu'il existe un patrimoine privé locatif important que les propriétaires ne peuvent ou, parfois, ne souhaitent pas gérer, tout en ne voulant pas s'en dessaisir. La crainte des impayés et les difficultés de gestion sont les causes principales d'une telle attitude.
Il convient donc de rechercher un dispositif répondant à deux objectifs principaux : d'une part, assurer le maintien de la fonction sociale de ce parc privé et, d'autre part, garantir la sécurisation du propriétaire.
Tel est l'objet de notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement a pour objet d'autoriser les organismes d'HLM à aménager et à gérer des logements pour le compte de propriétaires privés.
J'avais, en commission, fait valoir les risques de distorsion de concurrence que pouvait entraîner une telle disposition, ce qui a amené les auteurs de l'amendement à revenir sur sa rédaction initiale et à en limiter la portée aux zones franches urbaines.
Il convient, en matière de gestion immobilière, de mettre les administrateurs de biens directement en concurrence avec les organismes d'HLM, qui ne sont pas assujettis aux mêmes contraintes fiscales. Il est vrai que le jeu de la concurrence pourrait se trouver faussé. Mais il est non moins vrai que, dans les zones franches urbaines, souvent très dégradées, les administrateurs de biens ne semblent intervenir que très peu pour gérer des logements à caractère social de fait. C'est pourquoi cet amendement mérite réflexion. Nous souhaitons entendre le Gouvernement à son sujet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Le Gouvernement n'est guère favorable à l'amendement que vous avez présenté, monsieur Balarello, et je souhaiterais que vous puissiez le retirer.
Vous avez pour avoir présidé pendant de nombreuses années l'office d'HLM de la ville de Nice, une très grande connaissance de ces problèmes, et vous serez sans doute sensible à l'argumentation que nous avons développée dans le cadre précis du pacte de relance pour la ville.
Dans le projet de loi, sont plutôt prévues, monsieur Balarello, des dispositions tendant à attirer des investisseurs privés.
Les quartiers difficiles sont d'ores et déjà complètement tenus par les organismes d'HLM, et le Gouvernement ne souhaite pas aller plus loin.
Nous voulons au contraire que, en s'appuyant sur toute une série de dispositifs existants - loi Malraux, loi Quilès, loi Méhaignerie - il soit possible d'aider le privé à améliorer la situation de ces copropriétés largement dégradées.
A Marseille - peut-être est-ce aussi le cas à Nice -, le conseil municipal a même décidé d'intervenir dans de grandes copropriétés privées pour y endiguer le délabrement, qui dépasse tout ce qu'on peut imaginer.
Je suis au regret de dire à M. Balarello que notre logique est différente de la sienne : nous voulons attirer le privé et nous ne voulons pas donner plus d'avantages aux organismes d'HLM.
M. André Vezinhet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. La question qui est évoquée est, à mes yeux, d'une importance tout à fait capitale.
Vous avez parlé, monsieur le ministre, de copropriétés dégradées. Cela se juxtapose à l'abandon du parc privé par ses propriétaires, pour des raisons qui sont, après tout, assez évidentes. La valeur vénale du bâtiment s'effondre et ce sont des marchands de biens qui se portent acquéreurs.
Il me paraît nécessaire d'alerter le Gouvernement sur la nécessité de contrôler les agissements de ces marchands de biens après l'acquisition, car nous avons souvent affaire à des marchands de sommeil...
M. Gérard Larcher, rapporteur. Tout à fait !
M. Eric Raoult, ministre délégué. C'est vrai !
M. André Vezinhet. ... qui vendent des tranches de huit heures de sommeil.
Aussi, tout en comprenant bien vos intentions, monsieur le ministre, je ne sais pas comment on peut remobiliser ce secteur privé afin qu'il intervienne à la fois pour un traitement du bâti, qui est souvent très dégradé, et pour un traitement social du problème. En revanche, il faudrait aider les organismes d'HLM, qui ont le plus grand intérêt à voir la politique de peuplement complètement révisée dans ces copropriétés dégradées car, à partir de ce moment-là, ils vont avoir à leur porte un habitat convenable.
Après tout, je peux le dire très tranquillement, nous savons bien que c'est à partir de ces copropriétés dégradées que se forgent la philosophie et la pratique politique de certains, que nous combattons et que, je le sais, vous combattez aussi.
La question est d'importance. Il faut à tout prix que la puissance publique ou parapublique, si l'on peut désigner ainsi les organismes d'HLM, puisse intervenir et apporter les corrections nécessaires sur le plan social comme sur le plan de l'urbanisme. Et encore, le problème restera considérable.
Je me souviens avoir dû procéder, pour pouvoir intervenir sur une tour de deux cent soixante-seize logements dans le quartier de La Paillade, à l'acquisition de 50% des parts pour devenir copropriétaire principal et imposer ainsi ma loi dans un immeuble qui avait généré les plus extrêmes dérives en matière sociale.
C'est la raison pour laquelle l'amendement de M. Balarello revêt une importance capitale. Il est limité aux zones franches mais, hélas ! le problème est en train de déborder largement sur une série de zones qui relèvent plutôt de la redynamisation urbaine.
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Je partage assez l'analyse globale de MM. Balarello et Vezinhet. Cela étant, il ne sera pas si facile de convaincre des offices d'HLM municipaux ou des OPAC départementaux d'aller récupérer des copropriétés dans l'état de délabrement où elles se trouvent actuellement.
Pardonnez-moi de prendre de nouveau cet exemple, mais nous avons à Marseille une copropriété si dégradée que, voilà quelques jours, comme j'avais fait procéder à un nettoyage complet aux alentours et au pied des immeubles, il se trouve que l'on a enlevé vingt tonnes d'ordures ménagères ! C'est incroyable, les gens les jettent directement par leurs fenêtres. Eh bien croyez-moi, aucun organisme d'HLM ne se chargerait de les faire ramasser. C'est la raison pour laquelle j'ai incité le conseil municipal à voter des financements afin d'améliorer la situation. C'est une première réponse, et j'espère vous convaincre, messieurs Vezinhet et Balarello, de choisir l'occasion de la discussion du buget du logement pour aborder ce problème au fond avec M. le ministre du logement plutôt que dans le cadre de ce débat sur notre pacte de relance pour la ville.
Par ailleurs, pour ce qui est de ces marchands de sommeil auxquels vous venez de faire allusion et qui existent bel et bien, je vous dirai que le problème relève d'une autre logique, que nous avons évoquée hier à propos de la Corse, celle du respect de l'ordre républicain. Il est intolérable et inacceptable que certains se livrent à ce genre d'activités au coeur de nos banlieues en difficulté. Des décisions doivent être prises ; elles relèvent de la compétence des préfets, sous l'autorité du ministre de l'intérieur, parce que nous ne pouvons pas, nous, résoudre ce problème-là.
Certes, je comprends le bien-fondé et de vos remarques et de l'amendement, mais j'insiste auprès de M. Balarello pour qu'il accepte de le retirer, car, encore une fois, nous n'avons pas les moyens de régler cette question. Je souhaiterais plutôt, je le dis franchement, comme je le pense, qu'il s'adresse à M. Périssol.
M. Serge Franchis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis. Monsieur le ministre, quelle était notre intention ? Il s'agissait de donner aux organismes d'HLM la faculté d'intervenir, à la demande des maires, lorsque l'initiative privée fait défaut ou se révèle inopérante. J'ai vu fréquemment des opérations difficiles conduites par les organismes d'HLM parce que les promoteurs privés n'acceptaient pas de s'y intéresser.
C'est donc pour éviter de laisser les collectivités locales démunies devant certaines situations que nous pensions que, dans les zones franches urbaines, et exclusivement dans ces zones, les organismes d'HLM pouvaient intervenir.
M. José Balarello. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello. Je comprends la préoccupation de MM. les ministres. Aussi, et je m'exprime ici sous le contrôle de M. Franchis, cosignataire de cet amendement, dans la mesure où M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration s'engage à demander à M. le ministre délégué au logement de prévoir un débat sur ce sujet à l'occasion de la discussion d'un prochain texte, j'accepte de retirer cet amendement. (M. le ministre acquiesce.)
M. André Vezinhet. Voilà comment on exécute un amendement intéressant !
M. le président. L'amendement n° 67 rectifié est retiré.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Ce débat a été utile, d'autant que M. Balarello, en retirant son amendement, pense le présenter de nouveau lors de l'examen d'un futur texte proposé par un autre ministre ! (Sourires.)
Si le rôle et la place des offices et des sociétés d'HLM sont importants, notamment dans la gestion de copropriétés aujourd'hui dégradées mais que l'on souhaiterait remettre en état, c'est aussi parce qu'ils ont la « trousse à outils » du savoir-faire dont nous ne pourrons pas nous priver à l'avenir.
Je souhaiterais que, au-delà de cet amendement, nous considérions que nous sommes non pas dans une situation de concurrence mais dans la mise en oeuvre d'un savoir-faire. La plupart des organismes d'HLM doivent, me semble-t-il, mettre ce savoir-faire au service, notamment, de la lutte contre les copropriétés dégradées. Aussi, je souhaiterais que les principes sur lesquels nous nous retrouvons les uns et les autres ne disparaissent pas des préoccupations immédiates. Je suis certain que ceux de nos collègues qui suivent plus particulièrement le dossier du logement y seront attentifs.
M. le président. Par amendement n° 90, MM. Ostermann, Eckenspieller et Grignon proposent d'insérer, après l'article 31, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le quatrième alinéa de l'article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation, le mot : "informent" est remplacé par les mots : "doivent informer". »
La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller. Cet amendement tend à réaffirmer le caractère obligatoire de l'information des communes par les organismes d'HLM. Dans les faits, cette information n'est pas toujours assurée dans l'esprit voulu par le législateur. Or elle est primordiale si l'on veut assurer une bonne concertation entre les différents partenaires impliqués dans la procédure d'attribution des logements sociaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Monsieur Eckenspieller, le verbe « informer » à l'indicatif présent a une valeur...
M. François Giacobbi. Supérieure !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... supérieure, en effet, et la densité d'académiciens qui siègent à la Haute Assemblée me permet de dire que vous avez d'ores et déjà satisfaction sans qu'il soit nécessaire d'introduire la modification proposée. Par conséquent, je vous suggère de retirer cet amendement.
M. le président. Monsieur Eckenspieller, maintenez-vous votre amendement ?
M. Daniel Eckenspieller. Notre langue est riche, belle et subtile. Je m'incline donc devant l'argumentation de M. le rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 90 est retiré, sans même que le Gouvernement ait eu à s'exprimer !
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Le Gouvernement en a le souffle coupé ! (Sourires.)
M. le président. Par amendement n° 68, M. Balarello propose d'insérer, après l'article 32, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article L. 441-1-2 du code de la construction et de l'habitation, un article L. 441-1-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 441-1-3. - Afin d'assurer le maintien ou le rétablissement de la diversité de la composition sociale au sein d'une zone urbaine sensible définie au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ou entre les quartiers d'une commune ou entre les communes d'une agglomération, les commissions d'attribution visées à l'article L. 441-1-1 peuvent prendre leurs décisions en veillant à assurer dans le parc locatif social une répartition équilibrée et harmonieuse de la population entre les Français et les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne, d'une part, et les ressortissants des autres Etats, d'autre part.
« Les décisions prises par les commissions d'attribution ne peuvent être passibles des sanctions prévues aux articles L. 225-2 et L. 432-7 du code pénal. »
La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello. Cet amendement est important, même s'il pose problème.
En matière de logement, les organismes gestionnaires d'habitations à loyer modéré, qui gèrent d'importants ensembles immobiliers, ont un rôle et une responsabilité dans la composition sociale, qui doit être équilibrée, de ces ensembles et des communes.
La concentration de personnes ou de familles en situation difficile à l'intérieur des villes est l'une des principales causes des difficultés d'intégration de la population immigrée et elle est perçue par un certain nombre de citoyens comme un motif d'insécurité.
Un des moyens essentiels de l'intégration des familles immigrées réside dans leur installation parmi des familles françaises, et non dans des regroupements composés exclusivement d'étrangers.
Or, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire ici, les poursuites exercées à l'encontre de M. Pascal, président de la SCIC et ancien président d'Amnesty International, et la condamnation dont il a fait l'objet - il s'agit d'un jugement du tribunal de grande instance de Paris du 25 mars 1991 - prouvent que, malgré les incitations de la loi du 31 mai 1990, visant à la mise en oeuvre du droit au logement, et de la loi d'orientation pour la ville du 13 juillet 1991, et en dépit de l'opinion de tous les gestionnaires de logements sociaux, deux dispositions du code pénal peuvent sanctionner sévèrement des décisions tendant à une répartition équilibrée de l'occupation du patrimoine social français.
Je vous invite, mes chers collègues, à lire le jugement du tribunal de grande instance de Paris.
Il n'est pas normal que les responsables et les agents des organismes d'HLM et, demain, si notre texte est adopté, de la conférence communale ou intercommunale du logement ou des commissions d'aménagement commercial, risquent d'être traduits en correctionnelle, et des élus d'être déclarés inéligibles - c'est la sanction possible - pour la seule raison qu'ils ont eu le souci d'intégrer les étrangers à la communauté française.
Il est donc proposé dans ce texte d'introduire un nouvel article dans le code de la construction et de l'habitation afin de donner la possibilité aux organismes d'HLM d'attribuer les logements de manière équilibrée et harmonieuse entre les familles françaises ou originaires de l'Union européenne, d'une part, et les ressortissants des autres pays, d'autre part.
Il est proposé, en outre, de modifier deux articles du code pénal afin d'éviter l'interprétation litigieuse de décisions prises pour répondre aux préoccupations du législateur.
Ce dispositif permettra de faciliter l'intégration des étrangers, de renforcer la cohésion sociale ainsi que d'éviter la formation de ghettos.
Un dispositif analogue avait été adopté par la Haute Assemblée, au cours de sa séance du 2 juillet 1991, lors de la discussion de la loi d'orientation pour la ville, avant d'être rejeté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Sur cet amendement, la commission spéciale a longuement débattu.
Nous comprenons le souci d'équilibre de M. Balarello et nous sommes comme lui préoccupés par la condamnation, qu'il a déjà évoquée lors de la discussion générale, du président d'un organisme important pour le logement social.
Néanmoins, dans sa rédaction actuelle, l'amendement n° 68 - plus particulièrement son second alinéa - soulève un problème de fond, car le principe d'égalité des citoyens devant la loi pénale s'oppose à tout traitement préférentiel en faveur d'une catégorie d'entre eux. Ce second alinéa ne peut donc recevoir l'assentiment de la commission spéciale.
Cependant, l'objectif de mixité sociale, qui est clairement inscrit dans l'article 1er - nous en avons déjà examiné les conséquences dans le cadre du programme local de l'habitat, le PHL, et nous le retrouverons lorsque nous aborderons la conférence communale, ou intercommunale, du logement - a une incidence sur les commissions d'attribution.
Aussi je souhaiterais, au nom de la commission spéciale, proposer à M. Balarello une autre rédaction de l'amendement n° 68.
Après les mots : « en veillant à assurer dans le parc locatif social une répartition équilibrée et harmonieuse de la population », la fin du premier alinéa serait remplacée par les mots : « conformément à l'objectif de mixité sociale visé à l'article 1er de la loi relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville ».
Cette rédaction, qui reste fidèle à la préoccupation exprimée par M. Balarello, donnerait aux commissions d'attribution la possibilité - je rappelle que le verbe employé est : « peuvent » - d'être des intervenants au quotidien et de terrain en vue de favoriser la mixité sociale.
On éviterait ainsi les distinctions de nationalité, qui, à nos yeux, posent un problème de fond et de constitutionnalité.
M. François Giacobbi. Et de morale !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Par ailleurs, dans la décennie à venir, le problème de la nationalité perdra de son acuité, car la mixité sociale permettra d'éviter que ceux qui sont en situation de réussite et ceux qui sont en situation d'exclusion ne vivent dans deux mondes séparés, état de fait que recouvre un mot d'origine néerlandaise, « l'apartheid ».
Le mot Boers, dont la signification ne se limite pas à une constitution ayant fort heureusement disparu, rappelle deux mondes qui s'ignorent et se tournent le dos. Tout l'objet de la mixité sociale est précisément de créer les conditions pour redonner vie à cette valeur essentielle de notre République qu'est l'intégration.
Pour favoriser l'intégration, il faut, nous l'avons dit, maîtriser l'immigration, lutter contre l'immigration clandestine, combattre les « marchands de sommeil ».
C'est parce que les commissions d'attribution auront les capacités de gérer jour après jour la mixité sociale qu'elles donneront un véritable contenu à l'objectif que nous nous sommes fixé.
Avec les PLH, la conférence communale du logement et l'article 1er du présent projet de loi, nous affichons une véritable volonté d'harmonisation qui exclut les critères qui ne seront plus ceux de demain.
Avec la modification de l'amendement n° 68 que je viens de proposer, je vous invite, mes chers collègues, à participer en adoptant une attitude de sagesse positive à la réflexion qui a été celle de la commission spéciale.
M. François Giacobbi. Très bien !
M. le président. Acceptez-vous, monsieur Balarello, la proposition de rectification qui vous est présentée par la commission spéciale ?
M. José Balarello. Pour en avoir longuement débattu en commission spéciale, j'accepte la rédaction qui nous est proposée par M. le rapporteur.
M. le président. Vous la faites vôtre ?
M. José Balarello. Je la fais mienne en effet, monsieur le président, en souhaitant que nos travaux parlementaires puissent éventuellement servir - cela arrive, monsieur le président, vous le savez comme moi pour être avocat - de guide d'interprétation dans les prétoires ; les présidents ou les administrateurs d'office d'HLM ou, demain, les administrateurs des commissions mises en place - même la commission d'équipement commercial - par ce texte de loi devraient pouvoir s'en prévaloir devant les tribunaux.
M. le président. Les tribunaux apprécieront.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 68 rectifié, déposé par M. Balarello et tendant à insérer, après l'article 31, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré après l'article L. 441-1-2 du code de la construction et de l'habitation un article L. 441-1-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 441-1-3. - Afin d'assurer le maintien ou le rétablissement de la diversité de la composition sociale au sein d'une zone urbaine sensible définie au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ou entre les quartiers d'une commune ou entre les communes d'une agglomération, les commissions d'attribution visées à l'article L. 441-1-1 peuvent prendre leurs décisions en veillant à assurer dans le parc locatif social une répartition équilibrée et harmonieuse de la population conformément à l'objectif de mixité sociale visé à l'article 1er de la loi n° du relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
« Les décisions prises par les commissions d'attribution ne peuvent être passibles des sanctions prévues aux articles L. 225-2 et L. 432-7 du code pénal. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, malgré les efforts méritoires de M. le rapporteur pour clarifier sans déclencher d'hostilité la rédaction de l'amendement n° 68, je crains que ce dernier, même ainsi modifié, ne soit très mal interprété.
Je considère en outre, là encore, que le problème de fond qui est soulevé doit être traité avec le ministre du logement. M. Périssol étudie en effet actuellement un projet visant à modifier et à améliorer les conditions générales d'attribution des logements HLM. Il faut donc éviter d'ouvrir le champ à toute autre interprétation.
J'ai des liens personnels d'amitié avec M. Balarello : nous sommes tous deux élus d'une région où, parce que l'extrémisme a beaucoup progressé, on nous observe à tout moment, comme si nous étions prêts, ici ou là, par telle ou telle décision, à favoriser tel ou tel excès.
La préférence nationale, monsieur Balarello, nous en avons entendu parler de multiples fois. Vous savez qu'elle est anticonstitutionnelle, et cela suffirait déjà à l'« évacuer », mais vous savez bien aussi qu'elle ne correspond ni à vos sentiments, ni à ceux de M. le rapporteur, ni à ceux de tous les membres de la Haute Assemblée. Nous ne voulons pas, par le biais d'un amendement sur la mixité, et même si vous êtes animé des meilleurs sentiments, ouvrir la porte à une quelconque critique et laisser croire que le Sénat veut s'engager d'une manière ou d'une autre dans cette voie ; en tout cas, le Gouvernement ne le veut pas.
Je risque peut-être de vous décevoir mais je vous demande instamment d'être prudent dans un domaine aussi sensible. Lors des récentes élections des représentants des locataires au sein des organismes d'HLM, le Front national, vous le savez bien, a recueilli un pourcentage de voix jamais égalé. Dès lors, n'allons pas, d'une manière ou d'une autre, même de bonne foi et avec de bons sentiments - que je ne nie pas - nous mettre en situation périlleuse.
Aussi, je vous demande instamment, monsieur Balarello, de retirer votre amendement. Vous aurez tout le temps d'étudier avec M. Périssol ces dispositions de fond ; n'ouvrons pas maintenant la porte à la moindre critique qui salirait l'image démocratique et républicaine de la Haute Assemblée.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il appartiendra à M. Balarello de répondre à la demande du Gouvernement. Pour ma part, je tiens à préciser que, par la rédaction qu'elle a retenue, la commission spéciale n'entendait pas aborder le problème soulevé sous l'angle que vient de présenter M. le ministre. Notre proposition s'inscrit uniquement dans le cadre de l'objectif fixé à l'article 1er du projet de loi.
La commission spéciale s'est déterminée non pas sous l'influence de tels ou tels termes agités par des formations qu'au sein de cette assemblée tout le monde combat, mais bien parce qu'elle est attachée à l'objectif de mixité sociale. Si nous ne tenons qu'à une seule expression, c'est bien à celle-là !
Quant à la préférence nationale, elle perdra tout sens dans les dix ans qui viennent. Il s'agit d'un débat pour officine jouant sur les peurs et ne prenant pas le pari de l'avenir.
Je tenais à préciser la position de la commission spéciale avant que M. Balarello ne se prononce. La sérénité s'impose pour aborder un problème social qui touche notre pays comme d'autres et auquel nous tentons d'apporter des réponses équilibrées.
M. le président. Monsieur Balarello, l'amendement n° 68 rectifié est-il maintenu ?
M. José Balarello. Je veux d'abord rappeler à la Haute Assemblée que cet amendement avait été adopté complet, c'est-à-dire sans la rectification suggérée par la commission, lors de l'examen de la loi d'orientation pour la ville. Pour quelle raison, messieurs les ministres ?
Je rappelle le contexte. M. Pascal, président de la société centrale immobilière de la Caisse des dépôts et consignations, la SCIC, et ancien président d'Amnesty International, avait été condamné - j'ai le jugement ici - à 8 000 francs d'amende pour discrimination raciale par le tribunal de grande instance de Paris, au motif que l'une de ses employées avait par écrit indiqué à une personne que la SCIC ne pouvait lui accorder un logement. C'est aussi simple que cela ! Il a de plus été condamné à 50 000 francs de dommages et intérêts qu'il a payés personnellement.
Or, M. Pascal ne peut pas être taxé de racisme ! Je rappelle tout de même qu'il est l'ancien président d'Amnesty International. Qui d'ailleurs était à l'époque « monté au créneau » et avait témoigné en faveur de M. Pascal ? Harlem Désir lui-même ! M. Quilliot dans la presse et M. Edmond Maire étaient également intervenus, arguant qu'il ne fallait pas se cacher derrière certains tabous mais bel et bien légiférer en la matière.
Messieurs les ministres, vous me demandez de retirer l'amendement n° 68 rectifié. Je vais le faire, pour éviter toute erreur d'interprétation, mais je suis heureux d'avoir eu l'occasion de m'exprimer. En effet, comme je le disais, nos travaux pourront servir le jour où un administrateur d'un office d'HLM ou d'une des commissions que met en place ce texte de loi sera traîné devant le juge d'instruction. A ce moment-là, je le prédis, nous serons obligés de légiférer à chaud !
M. le président. L'amendement n° 68 rectifié est retiré.
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Je souhaite remercier M. Balarello et redire encore une fois très clairement à son adresse comme à celle de M. le rapporteur qu'en aucune façon je n'ai le sentiment qu'ils ont voulu entrer dans un système autre que celui de la mixité sociale que nous appelons de nos voeux.
Je crois que, dans le contexte actuel, il vaut mieux traiter l'affaire au fond, sans ouvrir la porte à la moindre critique. Je remercie donc vivement M. Balarello. (MM. Chérioux et Masson applaudissent.)
M. le président. Par amendement n° 91, MM. Ostermann, Eckenspieller et Grignon proposent, après l'article 31, d'insérer un article ainsi rédigé :
« Dans la seconde phrase du quatrième alinéa de l'article L. 441-2 du code de la construction et de l'habitation, les mots : "lui communique" sont remplacés par les mots : "doit lui communiquer". »
La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller. La brillante démonstration de M. le rapporteur lors de la discussion de l'amendement n° 90 s'appliquant également à celui-ci, cet amendement est retiré. Je ne dis pas : « doit être retiré » afin de clore l'intéressant débat grammatical auquel ont donné lieu les amendements initiés par M. Ostermann.
M. le président. L'amendement n° 91 est retiré.

M. le président. Mes chers collègues, le Sénat va interrompre ses travaux ; il les reprendra à quinze heures.6