II. DES MARGES D'AUTONOMIE RABOUGRIES PAR LA PRATIQUE

A. UN INTERVENTIONNISME CROISSANT DU POUVOIR LÉGISLATIF ET RÉGLEMENTAIRE LIMITANT LES MARGES DE MANoeUVRE DES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES

Le législateur et le pouvoir réglementaire, en précisant le contenu du règlement intérieur ou du projet d'établissement ont, ces dernières années, érodé l'autonomie des établissements scolaires.

Le rapport annuel des inspections générales de 2019 sur l'autonomie des établissements scolaires rappelle que les règlements intérieurs doivent reproduire l'échelle des sanctions prévues à l'article R. 511-13 du code de l'éducation, et en tire cette conséquence : « Un établissement ne peut pas fixer, dans le cadre de son autonomie, l'échelle des punitions et sanctions qu'il souhaiterait voir mises en place face aux manquements à leurs devoirs par les élèves ». De même, la circulaire 2002-098 du 25 avril 2002 relative à la politique de santé des élèves, précise que chaque établissement doit intégrer dans son projet les objectifs et les actions concernant la santé des élèves, adaptées à leur âge et maturité.

Le projet d'établissement doit également inclure un volet « sécurité routière », puisque l'article R. 321-46 du code de l'éducation prévoit que l'enseignement des règles générales de sécurité et une formation aux premiers secours « sont mis en oeuvre en application des programmes et dans les différentes activités organisées par l'établissement dans le cadre du projet d'établissement ».

Le plan de mobilisation pour les valeurs de la République, annoncé en janvier 2015, demande aux projets d'établissement d'inclure une participation active des élèves aux journées de commémoration. Enfin, la loi visant à combattre le harcèlement scolaire de 2022 impose aux projets d'établissement de fixer les lignes directrices et les procédures destinées à la prévention, à la détection et au traitement des faits de harcèlement.

Les récentes annonces du ministre de l'éducation nationale et du Président de la République sont symptomatiques de la multiplication des injonctions descendantes, qui font comme si l'autonomie des établissements scolaires n'existait pas depuis 30 ans. Tel est le cas de l'annonce dans la précipitation le dimanche 11 juin dernier, de l'obligation d'organiser dans l'ensemble des collèges une heure de sensibilisation au harcèlement et aux réseaux sociaux dès la semaine suivante - au risque d'une « infantilisation » des chefs d'établissement et des enseignants.

La mise en place du PACTE sur le plan de l'autonomie des établissements scolaires, dont les contours sont encore incertains à moins de deux mois de la rentrée et bien que présenté comme un nouveau levier de pilotage à disposition des chefs d'établissement, encadre fortement leur marge d'action : d'une part, il impose comme mission prioritaire le remplacement de courte durée - faisant ainsi écho à la promesse présidentielle du 22 mars dernier. D'autre part, dans le cadre de réunions académiques et départementales des DASEN, des recteurs ont demandé que certaines périodes de l'emploi du temps soient sanctuarisées, notamment le mercredi matin, afin d'accueillir des enseignants du premier degré chargés de cours de soutien aux élèves de sixième. C'est une contrainte supplémentaire pour le chef d'établissement et les équipes pédagogiques dans la constitution de l'emploi du temps des élèves et des enseignants.

Recommandation n° 1 : Mettre fin aux injonctions descendantes fixant de manière encadrée l'organisation des établissements ou l'utilisation d'heures relevant dans les textes de leurs marges d'autonomie.