B. DEPUIS 2015, UN MOUVEMENT DE SOCIALISATION DU FINANCEMENT DES ORGANISMES SANITAIRES EST À L'oeUVRE

1. Un financement des organismes sanitaires initialement réparti entre l'État et la sécurité sociale

Avant 2015, si la sécurité sociale était déjà financeuse publique unique de certains organismes et fonds, les situations de cofinancement État / sécurité sociale demeuraient toutefois fréquentes.

Le cofinancement répondait le plus souvent à une volonté de faire coïncider l'origine des fonds à la nature des missions des organismes. L'Oniam, qui dispose encore aujourd'hui d'un double financement État / sécurité sociale, constitue un exemple de cette logique :

· le financement des risques liés au fonctionnement des établissements de santé, notamment l'indemnisation au titre des maladies nosocomiales et des accidents médicaux, est porté par la sécurité sociale ;

· le financement des risques concernant la politique sanitaire, les vaccinations obligatoires ou l'exercice de la police sanitaire incombe à l'État, via le programme budgétaire 204.

Ainsi, en 2014, huit Offrob faisaient l'objet d'un cofinancement État / sécurité sociale. La part de la sécurité sociale dans les recettes variait, pour les organismes concernés, de 22 % à 91 %, tandis que celle de l'État, toujours inférieure, était comprise entre 6 % et 44 %.

Montant et part des subventions de l'État et de la sécurité sociale au bénéfice des Offrob co-financés en 2014, en millions d'euros et pourcentage des recettes totales

Offrob cofinancés
en 2014

Subvention sécurité sociale

Subvention État

Autres ressources

Recettes totales

Oniam

138 M€ (80 %)

22 M€ (13 %)

12 M€ (7 %)

172 M€

Eprus / SPF

22 M€ (56 %)

17 M€ (44 %)

0 M€ (0 %)

40 M€

Inpes / SPF

48 M€ (62 %)

23 M€ (29 %)

7 M€ (9 %)

78 M€

ABM

30 M€ (34 %)

14 M€ (16 %)

43 M€ (49 %)

87 M€

Atih

7 M€ (22 %)

3 M€ (11 %)

20 M€ (67 %)

30 M€

CNG

19 M€ (33 %)

4 M€ (6 %)

36 M€ (61 %)

58 M€

Asip Santé / ANS

45 M€ (91 %)

4 M€ (9 %)

0 M€ (0 %)

49 M€

HAS

39 M€ (71 %)

14 M€ (26 %)

1 M€ (3 %)

55 M€

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après l'annexe 8 du PLFSS pour 2015

Note : Une barre oblique dans le nom de l'organisme indique que celui-ci a changé de nom ou a été fusionné. Le cas échéant, le nom contemporain de l'organisme est indiqué après la barre oblique.

2. Le transfert de subventions auparavant portées par l'État à la sécurité sociale : une dynamique structurante depuis 2015
a) Les subventions accordées par l'État à sept organismes sanitaires ont été transférées à la sécurité sociale depuis 2015

Depuis 2015, le financement des organismes sanitaires a été marqué par de nombreux transferts de subvention de l'État à la sécurité sociale. Sept organismes ont ainsi connu une socialisation de leur financement : il s'agit de la HAS, du CNG, de l'Atih, de l'ABM, de l'EHESP, de l'ANSM et de l'Offrob recevant le plus de dotations, Santé publique France.

Ces transferts de subvention ont été opérés par vagues et constituent une dynamique structurante dans la compréhension des modalités de financement des organismes sanitaires en France :

· lors du vote de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, une première vague de transferts de subvention a été réalisée : la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) a repris à son compte la subvention pour charge de service public (SCSP) portée par le programme budgétaire 204 (Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins) au bénéfice de la HAS, du CNG et de l'Atih ;

· la loi de finances pour 2018 a transféré la part du financement de l'ABM et de l'EHESP, jusqu'alors portée par le programme 204, à l'assurance maladie ;

· la loi de finances pour 2020 a, juste avant la crise liée à l'épidémie de covid-19, fait machine arrière sur l'étatisation du financement de Santé publique France décidée en 2017. L'État s'est retiré du financement de l'agence, dont la sécurité sociale est devenue, par la Cnam, le financeur public unique. La loi de finances pour 2020 a également opéré un transfert à l'assurance maladie de la part de financement de l'ANSM jusqu'alors portée par le programme budgétaire 204.

b) Ces transferts ont été justifiées par le Gouvernement par une volonté de simplifier et de rendre plus cohérent le financement des Offrob

Ces transferts de subvention, en trois temps, ont été justifiés par le Gouvernement par une volonté de renforcer la cohérence du financement des Offrob et d'unifier un financement autrefois éclaté entre sécurité sociale et État pour l'ensemble des opérateurs concernés, à l'exception de l'ANSM.

L'unification du financement répond, en ce sens, à une volonté de simplifier la gestion et la procédure budgétaire des agences sanitaires. Le partage des crédits entre État et sécurité sociale aboutissait en effet, pour les agences, à devoir suivre à la fois les procédures législatives applicables aux projets de loi de finances, pour la part de leur financement assurée par l'État, et aux projets de lois de financement de la sécurité sociale, pour la subvention portée par la sécurité sociale. Ce double processus budgétaire était générateur d'inefficience, en mobilisant excessivement les équipes des directions financières des organismes concernés.

Ainsi, l'Agence de la biomédecine, dont la subvention de l'État à hauteur d'un tiers de ses recettes publiques a été transférée à la sécurité sociale, désormais financeuse publique unique, en 2018, a avancé dans sa contribution à la mission qu'avoir un financeur est beaucoup plus simple dès lors qu'un double financeur multiplie la bureaucratie et les échanges.

Le CNG, dont le financement était, avant 2015, marqué par une certaine complexité puisque réparti entre l'État, la branche maladie et les établissements de santé, défend également un financement public porté par un unique acteur, arguant que « l'hypothèse d'une pluralité de financeurs du CNG risquerait d'engendrer un manque d'efficience et de cohérence, de complexifier la gestion budgétaire et financière, ainsi que l'exercice de la tutelle ».

c) Pourtant, certains transferts ont résulté en une complexification du mode de financement

Toutefois, l'exemple de l'EHESP démontre que ce n'est pas toujours la volonté de simplification qui régit les transferts des dotations de l'État vers la sécurité sociale. En effet, l'école était financée jusqu'en 2017 au moyen de contributions des établissements de santé, de ressources propres et de subventions de l'État, portées tant par le ministère chargé de la santé que de celui chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, sans aucun financement des régimes obligatoires de base. Pourtant, en 2018, la charge de la part de subvention financée par le ministère de la santé a été transférée à l'assurance maladie, sans que ne soit transférée la subvention financée par le ministère de l'enseignement supérieur. Ce transfert a donc abouti à rajouter un financeur, et a contraint l'EHESP à devoir suivre à la fois le PLF et le PLFSS pour la détermination de ses ressources.

Compte tenu des obligations strictes auxquelles est astreint l'État en matière d'évolution du budget et de plafond d'emplois, la débudgétisation de certaines subventions peut être tentante. Si l'opération de débudgétisation est neutre sur le champ de l'ensemble des administrations publiques, elle permet toutefois de sortir les subventions du champ de la norme de dépenses pilotables de l'État.

Il peut être opportun de recontextualiser la période dans laquelle les transferts de subvention ont été décidés, marquée - notamment pour les quatre transferts décidés depuis 2018 - par le retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale (- 1,4 Md€ en 2018, - 1,7 Md€ en 2019 sur le champ des régimes obligatoires de base et du fonds de solidarité vieillesse), qui devaient même devenir excédentaires dans les années 2020. Cette bonne santé financière de la sécurité sociale a immédiatement suscité des réactions au sein de l'État, avec l'application de la doctrine dite « Charpy-Dubertret », tendant à mettre un terme au caractère systématique de la compensation des exonérations de cotisations sociales par l'État.

Depuis, la crise liée à l'épidémie de covid-19 et les mesures liées au Ségur de la santé ont finalement été à l'origine de déficits respectivement conjoncturel et structurel lourds.

d) Des transferts unilatéraux

Il est remarquable que les transferts de subvention se soient toujours opérés dans le sens d'une prise en charge accrue de la sécurité sociale. Aucun organisme cofinancé par l'État et la sécurité sociale en 2014 n'a connu un transfert pérenne à l'État de sa subvention portée par la sécurité sociale.

Si une tentative avait été effectuée en 2017, avec le transfert au programme 204 (Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins) de la part de financement de Santé publique France jusqu'alors assurée par l'assurance maladie, cette étatisation du financement de Santé publique France a fait long feu. Le nouveau mode de financement n'a tenu que trois ans, avant que ne s'opère un revirement en forme de socialisation intégrale des ressources publiques pérennes de Santé publique France, en loi de finances pour 2020.

Par conséquent, la simplification du financement des Offrob s'est avérée consister uniquement en une socialisation de leur financement.

e) La cohérence de certains transferts peut être remise en question

Certains transferts sont pleinement cohérents avec les missions des agences concernées. Il en va ainsi de l'ABM, dont les principales missions financées par subventions publiques (notamment l'allocation de greffons) sont en lien direct avec l'activité médicale clinique et poursuivent un objectif thérapeutique. Les activités de l'ABM sont donc cohérentes avec un financement public intégral par la sécurité sociale.

Ce n'est toutefois pas le cas de l'ensemble des agences concernées par les transferts de subvention.

(1) Le cas de l'EHESP

L'EHESP est un EPSCP ayant pour mission d'assurer la formation de fonctionnaires de la fonction publique hospitalière (FPH) et d'État (FPE), mais qui dispose également d'une importante offre de formations initiales en santé publique à destination d'étudiants non fonctionnaires. Parmi les grands établissements d'enseignement supérieur public, l'EHESP fait figure d'exception en n'étant pas financée à titre principal sur crédits budgétaires de l'État.

Le financement de l'école par la sécurité sociale plutôt que par une subvention conjointe des ministères chargés de l'enseignement supérieur et de la santé est une décision d'opportunité dont personne ne sait vraiment pourquoi elle a été prise, selon l'audition de l'EHESP conduite par la mission.

L'EHESP juge, dès lors, qu'il devrait revenir « à l'État [de financer] les formations initiales (fonctions publiques et formations diplômantes), les activités de recherche et internationales », et aux ressources propres de financer la formation continue et la recherche sous contrat.

(2) Le cas du CNG

Selon la contribution du CNG à la mission d'information, « certaines des missions assumées par le CNG, telles que l'organisation des concours nationaux administratifs et médicaux, pourraient justifier un financement par l'État », alors même que l'ensemble de ces missions est aujourd'hui financé par la sécurité sociale.

Le CNG note également la déconnexion entre les missions qui lui sont confiées et le coeur de métier de la Cnam.

(3) Le cas de Santé publique France

En loi de finances initiale pour 2017, le Gouvernement avait estimé qu'il revenait à l'État de financer la quasi-intégralité des ressources de Santé publique France, dont les missions relatives à la veille épidémiologique semblent se rattacher aux responsabilités de l'État en matière de sécurité sanitaire.

C'est sur ce fondement que le Sénat avait suivi sa commission des affaires sociales en s'opposant, en 2020, au transfert vers l'assurance maladie du financement de Santé publique France. Celle-ci avait estimé que les missions de préparation et de réponse aux urgences sanitaires de Santé publique France étaient consubstantielles aux responsabilités de l'État en matière de sécurité sanitaire, et craignait que « le désengagement financier de l'État n'affaiblisse le pilotage national de [sa] politique de veille sanitaire »7(*).

3. En conséquence, le recul de la place de l'État dans le financement des organismes sanitaires
a) L'État continue de soutenir diverses agences disposant de missions sanitaires mais non financées par la sécurité sociale, via divers programmes budgétaires

Cela ne veut toutefois pas dire que l'État se soit totalement désengagé du financement de l'ensemble des agences disposant de missions sanitaires à titre principal ou accessoire : l'État reste financeur de nombreuses agences non financées par la sécurité sociale.

Le soutien de l'État à ces agences est principalement porté par sept programmes budgétaires en loi de finances pour 2022.

Programmes budgétaires et financement d'organismes sanitaires

Programme budgétaire

Intitulé

Organismes financés

Montant associé (2022, en M€)

P 111

Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

Anses

8

P 113

Paysages, eau et biodiversité

Anses

< 1

P 172

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Inserm

678

P 181

Prévention des risques

ASN, Anses

73

P 190

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

IRSN, Anses

172

P 204

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

Anses, INCa, HCSP, CNS

64

P 206

Sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation

Anses

67

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après les documents budgétaires du PLF pour 2022

b) L'État n'est toutefois plus un financeur significatif des Offrob, à l'exception de l'Oniam

En conséquence de cette vague d'unification des financeurs consistant uniquement en des transferts des subventions de l'État à la sécurité sociale, la place de l'État dans le financement des organismes sanitaires s'est considérablement restreinte, après avoir connu des évolutions dynamiques depuis 2014.

En 2014, le soutien total de l'État aux quinze organismes formant aujourd'hui les Offrob atteignait 236 millions d'euros, principalement portés par les dotations à l'ANSM (119,7 millions d'euros) et aux organismes dont la fusion a donné Santé publique France (39,9 millions d'euros).

En 2015, notamment sous l'effet des transferts des subventions à l'Atih, au CNG et à la HAS (21,2 millions d'euros en 2014), ce montant a diminué pour atteindre 183 millions d'euros.

À la suite de l'étatisation du financement de Santé publique France, dont la subvention portée par l'État a augmenté de plus de 130 millions d'euros entre 2016 et 2017, ainsi que des nouvelles missions attribuées à l'Oniam, le soutien de l'État aux actuels Offrob s'est accru pour atteindre un pic à 364 millions d'euros en 2018, puis 363 millions d'euros en 2019. Ces deux effets cumulés ont largement compensé le transfert des dotations de l'État en faveur de l'ABM et de l'EHESP à la sécurité sociale, responsable d'une baisse de 21 millions d'euros du soutien de l'État aux actuels Offrob.

Le passage de Santé publique France et de l'ANSM à un financement intégral par la sécurité sociale, en 2020, a eu pour conséquence immédiate de diviser par près de six le soutien de l'État aux Offrob, passé de 363 millions d'euros en 2019 à 64 millions d'euros en 2020.

En 2022, seul l'Oniam bénéficie encore d'un financement étatique équivalant à plus de 5 % de ses recettes : la répartition historique du financement de l'organisme entre la sécurité sociale et l'État selon les missions du fonds est encore valable aujourd'hui. La part de l'État s'est même accrue dans le financement de l'office, du fait des nouvelles missions d'indemnisation des victimes de la Dépakine et des vaccinations obligatoires contre la covid-19, à sa charge.

Dans le cas des autres Offrob, l'État n'est plus financeur ou, à défaut, porte une subvention dont le montant n'est pas significatif par rapport aux recettes globales de l'organisme.

Au total, en 2022, l'État a versé 56 millions d'euros de subvention aux Offrob, dont 42 millions d'euros pour l'Oniam. Les 14 millions d'euros restants sont répartis entre cinq Offrob, de la manière suivante :

· une subvention de 8 millions d'euros du Fiva (2,5 % des recettes), au titre de la solidarité nationale à l'égard des victimes non professionnelles de l'amiante, portée par le programme budgétaire 183 (Protection maladie) ;

· une subvention de 2 millions d'euros à l'ANS (1 % des recettes), notamment au titre du financement du répertoire partagé des professionnels de santé, portée par le programme 204 ;

· une subvention de 2 millions d'euros à l'EHESP (4 % des recettes), correspondant notamment à une dotation du ministère de l'enseignement supérieur, des dotations de la DGAFP pour la classe « Prépa Talents » aux concours de la fonction publique, à une dotation du ministère de l'éducation nationale pour la formation statutaire des médecins de l'éducation nationale ;

· une subvention de 1 million d'euros à l'EFS (sur des recettes dépassant le milliard d'euros) ;

· une subvention à hauteur de 1 million d'euros sur les 4 milliards de budget de Santé publique France.

Une subvention de moins de 100 000 euros pour l'ANSM (< 1 % des recettes), prévue dans le budget initial 2022 de l'agence, n'a finalement pas été versée.

Ces subventions symboliques correspondent souvent à des actions très ciblées, sans qu'une véritable cohérence stratégique ne puisse émerger.

Évolution du soutien de l'État aux actuels Offrob depuis 2014,
décomposé par Offrob

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après les documents budgétaires des PLF et PLFSS de 2014 à 2023, et les rapports d'activité de l'ANSM et de l'EHESP depuis 2014

c) Par conséquent, le programme 204, qui portait principalement les dotations de l'État aux Offrob, semble avoir perdu sa raison d'être

La conséquence de la socialisation du financement des Offrob sur le budget de l'État est concentrée sur le programme 204, d'où ont été extraites les différentes parts de subvention aux Offrob autrefois portées par l'État.

Sous l'effet des transferts successifs mais aussi d'autres facteurs exogènes, ce programme a connu une trajectoire de crédits en forte décroissance depuis 2015 : les autorisations d'engagement du programme sont passées de 517 millions d'euros en 2015 à 213 millions d'euros en 2023, soit une diminution de 59 %.

La direction du budget, auditionnée, estime à 0,4 milliard d'euros en 2023 l'impact net sur le programme 204 du transfert de l'ensemble des Offrob.

Le programme 204 ne porte aujourd'hui une part significative des financements que dans le cas de trois organismes sanitaires : l'Oniam, l'Institut national du cancer (INCa, 40,8 millions d'euros en 2022 soit 35 % des recettes) et l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses, 22,6 millions d'euros en 2022, 15 % des recettes) - ces deux derniers étant hors du champ des Offrob.

Cela n'est pas sans poser la question du bien-fondé de ce programme budgétaire, qui apparaît aujourd'hui revêtir une portée principalement symbolique, de l'aveu même du Gouvernement lors des auditions conduites par la commission dans le cadre de l'examen du PLF pour 2022.

4. Le CNG, l'EHESP et la HAS ont également connu une révision de leurs modalités de financement dans le sens d'un renforcement de la place de l'assurance maladie dans leurs recettes

Le concours de l'assurance maladie pour financer certains Offrob n'a pas uniquement été sollicité pour se substituer à des subventions portées par l'État.

a) La fin de la contribution des établissements de santé au bénéfice de l'EHESP et du CNG

Le CNG et l'EHESP, dont les modalités de financement étaient jugées complexes et inadaptées, ont connu une révision de leur modèle de financement dans le sens d'une prise en charge accrue par l'assurance maladie.

Dans une même logique d'unification des financeurs que celle qui a présidé au transfert de subventions autrefois portées par l'État, les contributions des établissements de santé à l'EHESP et au CNG ont ainsi été supprimées et remplacées par des subventions complémentaires de l'assurance maladie à compter de 2020, du fait de dispositions inscrites en LFSS pour 2019. Ces contributions étaient justifiées par une volonté de créer un cercle vertueux entre financement par les établissements, représentation et poids des établissements dans la gouvernance de l'EHESP et du CNG, et donc dans les prises de décision régissant la formation et la carrière des cadres des établissements de santé.

Si, initialement, cette réforme des modalités de financement a été accueillie avec circonspection par l'EHESP, de crainte qu'elle ne distendît le lien avec les établissements de santé, l'école la juge désormais bienvenue. En effet, la clé de répartition retenue pour indexer la contribution des établissements de santé, le nombre de lits de chaque établissement, plongeait l'école dans un déficit de financement structurel du fait de sa trajectoire décroissante, imputable notamment au virage ambulatoire.

De plus, l'EHESP était confrontée à des difficultés dans le recouvrement des contributions des établissements, qui nécessitait deux ETPT et supposait l'émission de 2 390 titres de paiement : la réforme du financement a eu pour effet de sécuriser et de simplifier la perception de ses recettes par l'école.

b) La globalisation des ressources que la HAS tirait des industriels du médicament

La HAS a connu un transfert similaire : la ressource qu'elle tirait du prélèvement sur le chiffre d'affaires des entreprises du médicament et des dispositifs médicaux, ainsi que des droits de timbre sur son activité d'évaluation au bénéfice des produits de ces entreprises, a été globalisée dans les ressources de la sécurité sociale à compter de 2013. Ce mouvement s'est inscrit dans une volonté de rendre plus indépendantes des industriels les agences sanitaires, à l'instar de la transformation du modèle de financement de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) lorsqu'elle est devenue l'ANSM.

Pour la HAS, cet abandon de la contribution des entreprises du médicament s'est traduit par un net renforcement de la dotation de l'assurance maladie, passée de 21,2 M€ en 2012 à 34,5 M€ en 2014. Comptablement, l'opération devait être neutre pour la Haute Autorité : il s'agissait de faire transiter par les caisses de la Cnam les ressources autrefois attribuées directement à la HAS pour renforcer l'indépendance du financement de la Haute Autorité. Toutefois, la stratégie de prélèvement sur le fonds de roulement de la HAS a amené à une déconnexion croissante entre le montant de ces recettes et la compensation dans la subvention de la branche maladie.


* 7 Rapport n° 104 (2019-2020) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Catherine Deroche, MM. Bernard Bonne, Gérard Dériot, René-Paul Savary et Mme Élisabeth Doineau, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 6 novembre 2019.