C. L'ARTICULATION ENTRE LE FEI ET LES AUTRES DISPOSITIFS DE SOUTIEN À L'INVESTISSEMENT PUBLIC

Le FEI, d'un montant annuel de 110 millions d'euros, représente 5,4 % du total des aides à l'investissement public en outre-mer . Si le calcul reste approximatif en raison de l'utilisation de moyennes annuelles pour les fonds européens et le plan de relance, des données 2020 pour les dotations en provenance de la mission « relations avec les collectivités territoriales » 34 ( * ) et du non retranchement, au sein des crédits de l'action 1 du programme 123, des crédits destinés à des organismes privés, l'ordre de grandeur est tout de même cohérent et évocateur.

Si ce poids relatif par rapport aux autres sources de financement est limité, le fonds reste, pour les rapporteurs spéciaux, un outil complémentaire indispensable en ce qu'il joue un effet levier sur les autres financements tout en offrant une souplesse de gestion .

Poids du FEI dans le total des aides à l'investissement public
allouées aux territoires d'outre-mer

(en millions d'euros)

années

Origine des crédits

AE

CP

2022

action 1 P123

123,5

114,4

2022

action 2 P123 (CCT)

188,3

132,1

2022

action 6 P123

194

188,4

2020

DETR

30,4

2020

DPV

6,1

2020

DSID

8,5

2020

DSIL

19,3

moyenne 2021/2022

Plan de relance

750

2022

PIA

14

moyenne 2014/2020

FESI à destination des RUP

685,7

moyenne 2014/2021

FED à destination des PTOM

15,1

Total moyen par an

2 034,9

FEI 2022

110

Poids du FEI sur le total des aides à

l'investissement en %

5,41

Source : commission des finances du Sénat à partir des données budgétaires et de la DGCL (direction générale des collectivités locales).

Ainsi, l'ensemble des dispositifs d'aide à l'investissement en outre-mer représentent environ, en moyenne, 2 milliards d'euros en AE par an. Déduction faite du plan de relance qui n'a pas vocation à être pérenne, ce montant est ramené à 1,28 milliard par an ce qui porte le poids du FEI à 8,5 % du total des aides à l'investissement et à 18,8 % hors financements européens.

1. L'articulation avec les crédits budgétaires : un dévoiement du FEI pour financer les constructions scolaires de Mayotte

La double particularité du FEI réside dans la possibilité pour l'État de soutenir des projets portés par l'ensemble des collectivités territoriales ultramarines, quel que soit leur statut juridique et d'être un outil complémentaire aux autres dispositifs de soutien à l'investissement (nationaux et européens).

La circulaire ministérielle adressée chaque année aux représentants de l'État dans les territoires ultramarins précise, à cet égard, aux préfets et hauts commissaires que « doivent être privilégiées les opérations permettant un effet levier sur l'octroi d'autres financements (bancaires ou européens) ou qui ne pourraient être réalisées sans l'attribution de FEI ».

Les co-financements avec d'autres crédits de l'État doivent être limités.

Cependant, une exception doit être mise en exergue concernant la construction d'équipements scolaires à Mayotte . En effet, en 2017, sur proposition du préfet de Mayotte, le FEI a été mobilisé à hauteur de 10 millions d'euros, afin de contribuer au financement des constructions scolaires du premier degré, compte tenu de l'ampleur des besoins en complément des crédits de l'action 6 du programme 123.

En 2018, une mission interministérielle placée auprès du préfet a conclu à un besoin de 50 millions d'euros pour 2019 et 2020 et de 67,1 millions d'euros en 2021 et 2022. Les arbitrages interministériels, intervenus début mai 2018 n'ayant pu, en cours d'année, dégager les ressources budgétaires supplémentaires correspondantes, le ministère des outre-mer a décidé de mobiliser l'enveloppe du FEI sur cette priorité, à hauteur de 20 millions d'euros en 2019.

La même année, une nouvelle mission interministérielle a expertisé les besoins du territoire dans ce domaine faisant état d'un besoin non couvert par les ressources du programme 123, de 13,8 millions d'euros. Le ministère des outre-mer a donc sollicité, en loi de finances pour 2021, cette ressource nouvelle à mobiliser sur le FEI afin d'abonder les crédits de l'action 6 alloués à Mayotte. Au total, 43,8 millions d'euros ont été mobilisés pour le financement des constructions scolaires à partir du FEI en sus des crédits de l'action 6.

Cette pratique, si elle s'explique par les besoins importants de Mayotte en termes de constructions et rénovations scolaires, n'est cependant pas totalement orthodoxe dans la mesure où les investissements scolaires relèvent normalement du programme 123.

Elle complexifie par ailleurs le suivi des fonds alloués à ce domaine. Dans ce contexte, il conviendrait de regrouper tous les crédits alloués aux investissements scolaires de Mayotte dans la seule action 6 du programme 123 :

- soit en augmentant les crédits de cette action au sein de la mission outre-mer ;

- soit à périmètre constant c'est-à-dire en diminuant le FEI pour une hausse équivalente de l'action 6.

Au regard des besoins de Mayotte en termes de constructions scolaires mais également de tous les territoires d'outre-mer en termes d'investissements publics, les rapporteurs privilégient la première solution avec une hausse des crédits de l'action 6 à hauteur de 15 à 20 millions d'euros par an ce qui représenterait moins de 10 % de l'action 6, 2,3 % des crédits du programme 123 et 0,75 % des crédits de la mission outre-mer.

Si le FEI « scolaire » est une pratique depuis 2017, il n'en demeure pas moins en contradiction avec le principe de limitation des cofinancements entre le FEI et les autres crédits du budget de l'État. Il est également révélateur des besoins importants dans ce domaine, besoins auxquels il est nécessaire de répondre par une hausse des crédits de l'action 6 du programme 123 et non par redéploiement des crédits du FEI dont l'objectif n'est pas de financer ce type d'investissements.

Recommandation n° 1 : Pour financer les constructions et rénovations scolaires de Mayotte sans recourir au FEI de manière indue, augmenter les crédits alloués à l'action 6 du programme 123 à due concurrence.

2. L'articulation avec le plan de relance et le PIA

Le FEI, le plan de relance et le PIA se complètent dans la mesure où ils répondent à des objectifs, stratégies et temporalités différents :

- le FEI est un dispositif budgétaire pérenne qui vise à accompagner les collectivités ultramarines dans la réalisation d'infrastructures destinées à rattraper le retard en matière d'équipements structurants . Il se distingue des investissements plus lourds financièrement et réalisés en pluriannuel, qui sont inscrits dans les contrats de convergence et de transformation.

- le plan de relance est un dispositif de court terme, très dynamique. Il a pour objectif central de favoriser la reprise, notamment en dopant la commande publique et n'a donc pas vocation à se substituer aux dispositifs de droit commun.

- le PIA finance depuis 10 ans des investissements prometteurs et innovants sur l'ensemble du territoire et dans des secteurs stratégiques pour l'État (transition écologique, compétitivité des entreprises, enseignement supérieur et recherche, souveraineté industrielle, économie numérique...). En outre-mer, les objectifs de ce programme visent à soutenir une diversification et une modernisation des économies ultramarines en accompagnant l'innovation dans les secteurs à forte valeur ajoutée.


* 34 En raison de l'absence des données 2021.

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