TRAVAUX EN COMMISSION

Audition de M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie,
des finances et de la relance
(Mercredi 17 novembre 2021)

Mme Sophie Primas , présidente . - Monsieur le ministre, comme chaque année, notre commission est saisie pour avis des crédits de la mission « Économie » du projet de loi de finances (PLF) pour 2022. Et, pour la deuxième année consécutive, elle est aussi saisie des crédits de la mission « Plan de relance ». Il s'agit du dernier PLF du quinquennat, un exercice budgétaire toujours particulier, qui tient à la fois du bilan parce qu'il résulte des précédents PLF - notamment en matière de dette -, et de la promesse. Des promesses oserais-je dire, car le Gouvernement n'en est naturellement pas avare en cette période électorale.

Avant de rentrer dans le vif du sujet, monsieur le ministre, je souhaiterais faire une digression, et vous remercier de bien vouloir consacrer du temps à cette chambre qui vous voit si peu. Il est vrai que dans votre dernier livre, Un éternel soleil , on peut lire que vous considérez que nous, sénateurs, sommes trop nombreux à vous contrôler, à vous interroger, et que notre pouvoir parlementaire devrait être limité en matière budgétaire à de simples observations et à une approbation sans droit d'amendement. Vous proposez même de mettre fin au « principe de double examen des lois par l'Assemblée nationale et le Sénat ».

Vous comprendrez que cette attaque du bicamérisme, bien que médiatique, soit fraîchement accueillie dans cette assemblée. Il est vrai que rester entre vous au sein d'une majorité qui vous est acquise serait sans doute plus confortable que de devoir débattre devant une assemblée libre de son point de vue. Ici, nous représentons tous les territoires de France et les sénateurs, étant au plus près du terrain, apportent au débat législatif un point de vue indépendant, un regard ancré dans le quotidien des Français, une vision alimentée par des années d'expérience en tant qu'élus locaux. Nous avons la faiblesse de penser que cet apport améliore la qualité des textes issus du Parlement, et ce, quelle que soit la configuration entre majorité présidentielle et majorité sénatoriale.

Vous le savez, monsieur le ministre, sous notre République, le Parlement ce sont deux chambres, une navette, des débats. Lors des premiers mois de la crise de la covid, nous avons encore prouvé que nous savons être constructifs, que nous savons débattre dans des délais très courts, et trouver des solutions transpartisanes et concrètes. Tout cela prend du temps, mais c'est utile, notamment au bon fonctionnement de ce qu'on appelle « la démocratie ».

Sur de nombreux points, comme la crise des gilets jaunes, la crise du logement ou les conséquences du confinement, cette assemblée a su anticiper la réaction de nos compatriotes. À nous ignorer, à ne pas écouter vos contradicteurs, à juger nos propos inutiles, vous pensez gagner du temps, mais vous en perdez. Vous croyez gagner en rapidité, mais vous perdez en efficacité. C'est dire, monsieur le ministre, si je vous remercie de votre présence et de l'immense effort que vous faites donc aujourd'hui.

Cette audition sera certainement l'occasion de dresser un bilan de la politique économique menée lors du quinquennat écoulé. À ce titre, et au regard de votre longévité à Bercy qu'il faut dire impressionnante, quel regard rétrospectif portez-vous sur ces cinq années ?

Je vais peut-être vous surprendre, monsieur le ministre, mais s'agissant du plan de relance, je voudrais commencer par un satisfecit . Il faut en effet se féliciter des investissements prévus par le plan France Relance à hauteur de 100 milliards d'euros, soit 4 % du PIB, presque le niveau moyen des plans de relance de la zone euro, situé à 5,5 %. Il faut aussi se féliciter du déploiement de ce plan, presque aussi rapide qu'en Allemagne. Enfin, il faut se féliciter d'une croissance économique estimée à 6,75 % pour 2021, presque similaire à celle du Royaume-Uni. En somme, ce plan de relance est presque un succès !

Cependant, ce succès n'est pas complet. Le comité de suivi et d'évaluation des mesures de soutien aux entreprises, présidé par Benoît Coeuré, a jugé que l'effet à court terme de ce plan était sans doute positif pour relancer le moteur. La reprise et même certaines tensions inflationnistes le confirment. En revanche, s'il est trop tôt pour juger, le comité Coeuré se montre beaucoup plus circonspect sur l'effet à moyen terme du plan de relance, quant à sa capacité à transformer en profondeur notre modèle économique. Un seul exemple : en matière de rénovation thermique des bâtiments, le plan a essentiellement financé des rénovations monogestes, dont nous savons qu'elles ne sont pas les plus efficientes en gain d'énergie. Ainsi, la qualité des investissements et leur contribution aux transitions numérique et écologique restent sans doute à ajuster. Vous l'assumez d'ailleurs pour partie, en affirmant qu'il fallait d'abord se soucier de relancer le moteur. Cependant, certains estiment que le moteur tourne, mais à vide, et que l'on ne voit plus très bien dans quelle direction il nous propulse. Il est vrai que si ce plan laisse filer la dette sans résultat probant à moyen terme, et qu'il compromet notre capacité à mener dans les prochaines années des investissements efficients, dans les infrastructures par exemple, alors nous aurons perdu sur les deux tableaux. Vous nous expliquerez sans doute en quoi cette analyse manque de justesse.

Vous avez commencé le quinquennat en tant que chantre de la « start-up nation », et vous le finissez en promoteur de la réindustrialisation. Ce gouvernement a mis à l'arrêt la centrale nucléaire de Fessenheim, et voilà que vous annoncez la construction de nouveaux réacteurs EPR. Vos premières mesures ont consisté en une réforme avantageuse de la fiscalité du capital, et vous terminez en distribuant des chèques pour le pouvoir d'achat face à la hausse des prix de l'énergie. C'est sans doute l'effet du « en même temps » et des circonstances, mais je serais heureuse que vous nous expliquiez le fil conducteur de ces mesures, qui pourraient paraître contradictoires.

Votre réponse nous importe, monsieur le ministre, car nous avons le sentiment que nous prenons du retard par rapport à nos voisins allemands, dans le redressement de nos comptes publics, comme dans celui du commerce extérieur, pour lequel les progrès sont très réduits, et ce phénomène ne cesse de nous préoccuper. En juillet, le déficit commercial français s'est de nouveau creusé, pour atteindre presque 7 milliards d'euros sur un mois, et près de 68 milliards d'euros sur l'année. Ces résultats confirment que le déficit commercial français de l'année 2021 représentera vraisemblablement un triste record. À titre de comparaison, l'Allemagne a dégagé un excédent commercial de presque 18 milliards d'euros en juillet 2021, soit un excédent de près de 216 milliards d'euros sur les douze derniers mois. Nous en ferions des choses, avec 216 milliards d'euros !

Cette situation a des conséquences économiques, des conséquences pour l'emploi, notamment industriel, mais également pour notre autonomie. La crise économique liée à la pandémie a souligné nos vulnérabilités quant aux produits critiques, et l'autonomie stratégique est devenue une priorité partagée. La France abordera-t-elle 2022, monsieur le ministre, avec une économie plus autonome stratégiquement qu'en 2017 ?

M. Serge Babary , rapporteur pour avis de la mission « Économie » . - Monsieur le ministre, le 30 août dernier, le Gouvernement a reconnu l'importance de soutenir la filière de l'événementiel et a déclaré qu'un plan d'action spécifique serait élaboré. Début octobre, il a évoqué que les consultations se poursuivaient pour définir les mesures de soutien. Or, fin novembre, rien n'est encore acté. Certains dispositifs pourraient néanmoins avoir besoin d'un vote du Parlement pour trouver leur plein effet dès le 1 er janvier 2022. Aujourd'hui, alors que le PLF est examiné par le Sénat, les acteurs de l'événementiel restent dans l'incertitude. Il est pourtant indispensable que cette filière puisse bénéficier d'un plan de relance dès maintenant, sachant que le début de l'année 2022 est déjà impacté par la fragilité des entreprises clientes, l'absence programmée de clientèle internationale, et la reprise de l'épidémie en Europe. Il y a donc urgence à annoncer rapidement les mesures qui inciteront les entreprises à réutiliser ces outils à fort effet de levier que sont les salons, congrès, foires et événements d'entreprise.

Ma seconde question porte sur le développement du commerce de centre-ville et à sa redynamisation. Il y a un an, le financement d'une centaine de foncières était annoncé, pour racheter environ 6 000 locaux vacants, les rénover et les louer à un tarif abordable. Parallèlement, un fonds de 60 millions d'euros était créé pour prendre en charge les déficits naissant naturellement de ce type de schémas. Or, d'après les informations transmises, cette enveloppe pourrait être épuisée bien avant que son objectif ne soit atteint. Envisagez-vous d'abonder à nouveau cette enveloppe ou avez-vous choisi de réviser l'ambition à la baisse ?

Mme Sophie Primas , présidente . - Monsieur le ministre, je vous propose de nous adresser votre propos liminaire, et de répondre ensuite à ces premières questions.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance . - Madame la présidente, je voudrais d'abord répondre à votre interpellation, même si nous ne sommes pas ici en commission des lois. Je voudrais dire très clairement que je ne fais aucun effort en venant au Sénat. J'y viens depuis que je suis élu à l'Assemblée nationale, soit depuis près de quinze ans, j'y viens avec plaisir, et c'est toujours un honneur d'être entendu par les sénateurs. J'ai d'ailleurs toujours considéré que les sénateurs et leur avis étaient utiles, et que vous aviez une compréhension très fine des attentes des Français. Le Sénat est à ce titre un bon sismographe de la société française et je l'apprécie comme ministre, et comme élu de l'Assemblée. Cependant, je confirme avoir la conviction profonde, depuis plusieurs années, qu'il faut rééquilibrer le partage des responsabilités entre Sénat et Assemblée nationale, et revoir notre procédure législative. Ce n'est pas notre propos d'aujourd'hui, mais comme je n'ai pas l'habitude de mettre mes convictions dans les poches, je ne voudrais pas qu'on lise comme une insulte ce qui relève simplement de la conviction profonde. Et je n'ai pas sur ce sujet la prétention de l'originalité, puisque le général de Gaulle lui-même affirmait qu'il était temps de rénover le Sénat ; c'est une absolue nécessité. Je ne fais donc que m'inscrire dans les pas de celui qui a toujours guidé mes convictions politiques.

M. Fabien Gay . - Vous êtes à nouveau de droite ?

M. Bruno Le Maire, ministre . - Je veux bien que l'on ouvre un débat politique sur le sujet, mais je rappelle que le général de Gaulle lui-même disait qu'il n'était ni de droite ni de gauche, et qu'il refusait cette distinction. J'ai l'habitude, en tant que responsable politique, de défendre des convictions. Je le fais devant vous, librement et à visage découvert, comme je le fais dans mes ouvrages, et comme je le fais publiquement. Ce n'est un mystère pour personne que je défends depuis des années l'idée qu'il faut interroger notre fonctionnement législatif, qu'il faut aller vers plus de simplicité et de rapidité dans l'examen de la loi, qu'il faut associer davantage les Français à la fabrique de la loi et rééquilibrer le partage des responsabilités entre l'Assemblée nationale et le Sénat. Je pense qu'un responsable politique a la liberté de défendre ses convictions, comme vous avez la liberté de vous y opposer.

Mme Sophie Primas , présidente . - Absolument !

M. Bruno Le Maire, ministre . - Je reviens à notre sujet du jour, qui est celui de la situation économique du pays. Après plus de quatre années passées au ministère de l'économie et des finances, j'ai parfaitement conscience que la situation reste difficile pour beaucoup de Français, que des millions d'entre eux continuent de s'interroger sur la manière dont ils vont finir le mois, que pour beaucoup et malgré tous les efforts qui ont été faits, le travail ne paye pas suffisamment, et que de très nombreux Français estiment encore que la différence entre travailler ou ne pas travailler reste trop ténue dans notre pays. Par conséquent, le travail qui nous attend est encore plus important que celui que nous avons déjà réalisé. Je le dis avec beaucoup d'humilité, parce que je me déplace suffisamment souvent en France et j'entends suffisamment les Français pour savoir que la tâche qui reste devant nous est immense. Notre capacité à nous en saisir dépendra de la manière dont nous défendrons une valeur fondamentale, celle du travail. Et si j'avais un seul fil rouge à retenir de ces cinq années passées au ministère de l'économie et des finances, ce serait celui du travail. En effet, la valorisation, la dignité et la meilleure rémunération du travail ont composé le fil rouge économique de ce quinquennat.

Et je constate que cette politique donne des résultats. Même si pour beaucoup de Français, je le répète, la vie reste difficile, les résultats économiques de la France forcent le respect de nos partenaires étrangers. Notre croissance atteindra au moins 6,25 % en 2021, ce qui représente l'un des meilleurs résultats de la zone euro, et tire la croissance de l'Union européenne. L'investissement est à la hausse, la consommation est dynamique et surtout, puisque c'est sur cela que nous devons être jugés : la situation de l'emploi est meilleure après la crise qu'avant. Chacun le reconnaîtra, en mars, avril et mai 2020, ce que nous redoutions n'était pas la hausse des prix, mais une vague de faillites et une flambée du chômage. Nous les avons évitées, et nous avons défendu nos entreprises, protégé nos salariés et créé 1 million d'emplois sur la durée du quinquennat.

Comment avons-nous obtenu ces bons résultats ? J'évoquerai trois raisons. La première, que je tiens à rappeler, réside dans la politique structurelle que nous menons avec le Président de la République depuis 2017. Cette politique a consisté à valoriser le travail, à simplifier la vie des entreprises, à améliorer leur compétitivité et à baisser la pression fiscale qui s'exerce sur les Français. Je rappelle que nous avons baissé les impôts de 52 milliards d'euros, à parts égales entre les ménages et les entreprises, que nous avons tenu tous nos engagements vis-à-vis des entreprises en matière de baisse d'impôts, et que nous avons même été au-delà de ces engagements. Dans cette même salle, j'avais promis que nous ramènerions l'impôt sur les sociétés de 33,3 à 25 % pour toutes les entreprises. Ce sera fait dès 2022. Et nous avons fait mieux encore, puisque le taux d'impôt réduit à 15 % pour les petites et moyennes entreprises (PME) a été rendu accessible à un nombre plus important de PME, grâce à une augmentation du plafond de chiffre d'affaires, qui est passé de 7,65 millions d'euros à 10 millions d'euros. Et nous avons fait mieux encore, puisque nous avons baissé les impôts de production de 10 milliards d'euros pour soutenir les relocalisations industrielles. Cette baisse d'impôts a aussi permis de mieux valoriser le travail et de permettre aux Français de garder davantage le fruit de leur travail. Le dernier rapport remis par l'Institut des politiques publiques (IPP) établit que sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, les Français ont perdu en moyenne 15 euros de revenus par an, qu'ils ont gagné en moyenne 75 euros de revenus par an sous le quinquennat de François Hollande, et 396 euros de plus en moyenne sous le quinquennat d'Emmanuel Macron. Nous aurons l'occasion, j'en suis certain, de discuter des conséquences plus détaillées de ce rapport, mais il établit une chose et le dit de manière très objective : les gagnants du quinquennat d'Emmanuel Macron, ce sont les Françaises et les Français qui travaillent. C'était la promesse initiale de cette majorité et du Président de la République : faire en sorte que ceux qui travaillent vivent mieux de leur travail. Cette promesse a été tenue.

La deuxième raison expliquant ces bons résultats économiques est la manière dont nous avons soutenu les entreprises et les salariés pendant la crise, notamment grâce à l'activité partielle. Ce soutien a été massif et sans précédent dans l'histoire de France. Certes, il nous a menés à une dette publique de 115 % du PIB. Mais là aussi, j'en reviens au rapport de l'IPP, qui établit de manière très claire et convaincante que si nous n'avions pas apporté ce soutien, le coût de l'augmentation du chômage et de l'augmentation des faillites aurait provoqué une hausse de la dette publique de dix points supplémentaires. Nous n'en serions donc pas à 115 %, mais très exactement et selon les chiffrages de l'IPP, à 126 % de dette publique. La conclusion est simple, et je la défends avec l'ensemble du Gouvernement depuis 2020 : protéger est moins coûteux que réparer. C'est moins coûteux socialement et économiquement, mais aussi pour les finances publiques.

La troisième raison de ces perspectives économiques positives est l'efficacité de la relance de 100 milliards d'euros ; dont 70 milliards seront engagés d'ici la fin de l'année 2021.

Quels sont les risques devant nous ? D'abord, j'en reviens au mot « humilité ». En effet, ayons l'humilité de reconnaître que personne n'avait prévu les risques qui sont devant nous, ni les économistes, ni les scientifiques, ni les responsables politiques. Si vous trouvez une publication scientifique, économique ou politique, datant du milieu de l'année 2020 et prédisant qu'au regard de cette pandémie, le risque majeur serait représenté par les pénuries de main-d'oeuvre et de matières premières, et l'inflation, je serais curieux de la lire ! Cela conduit à beaucoup de prudence quant aux prévisions à venir, en matière économique comme en matière politique.

Le premier risque, ce sont effectivement les pénuries, de main d'oeuvre, de matières premières et de semi-conducteurs. Sur ces trois chantiers majeurs, nous agissons et continuerons d'agir. Tout d'abord, la meilleure façon de remédier au problème de main-d'oeuvre est de rendre certains secteurs plus attractifs pour l'embauche, et je sais qu'ils y sont prêts. Je salue notamment les efforts menés dans l'hôtellerie et la restauration, qui se sont remis en question en profondeur, pour essayer de rendre leur métier plus attractif et d'attirer des jeunes qui s'en détournent. C'est une affaire de rémunération, mais aussi une affaire de perspective de carrière et d'organisation du temps de travail. Il est facile de dire que les jeunes ne veulent plus travailler, mais je pense que c'est faux, et qu'au contraire ils sont engagés, dynamiques, volontaristes, et veulent réussir leur vie, mais sans nécessairement sacrifier tous leurs week-ends et leurs soirées. Nos amis restaurateurs en ont conscience et font évoluer les temps de travail pour permettre aux jeunes de s'engager. De notre côté, nous avons prévu la défiscalisation des pourboires en plus de celle des heures supplémentaires, ce qui contribuera à rendre le métier plus attractif. Si je tire une conclusion de cette question de l'attractivité des métiers, c'est que la réponse ne peut être que collective. Ainsi, plutôt que de se réfugier dans des slogans un peu faciles, de pointer du doigt les uns ou les autres, il est plus efficace de se rassembler, de considérer les difficultés et d'apporter des réponses communes. Quand le Gouvernement, le Parlement et les filières choisissent une même politique et la mettent en oeuvre rapidement, c'est en général efficace.

L'autre volet de la réponse, ce sont les décisions prises sur l'assurance chômage. Elles sont critiquées, mais nous estimons qu'à partir du moment où il y a des pénuries d'emplois et que l'activité redémarre aussi fort, il est légitime de mettre en vigueur la réforme de l'assurance chômage, et d'appliquer les règles telles qu'elles sont définies. Quand vous refusez deux offres d'emploi raisonnables, au bout d'un certain temps, on vous retire votre allocation, et cela me paraît juste.

Enfin, la réponse sur la main-d'oeuvre passe aussi par une politique extrêmement offensive que nous conduisons en matière de formation et de qualification. En effet, certains métiers connaissent des pénuries parce qu'on les a délaissés et, dans certaines filières, il faut à nouveau former des jeunes à certaines qualifications. Dans le cas de la filière nucléaire par exemple, à force de dire qu'on allait fermer tous les réacteurs nucléaires, les jeunes se sont détournés de la soudure ou de la chaudronnerie dans ce domaine. Il nous appartient aussi de revitaliser ces filières, pour qu'elles attirent à nouveau des compétences et des qualifications.

J'en viens aux semi-conducteurs, qui représentent un sujet absolument stratégique pour la France et l'Union européenne, et constituent un combat que je livre au quotidien. Ce combat est difficile, va demander des investissements très lourds et un partage des responsabilités entre États européens. Nous avons la chance de compter sur notre territoire l'entreprise STMicroelectronics, installée à Grenoble, qui est d'une qualité exceptionnelle. Cependant, il nous faut rapidement augmenter nos capacités de production. Des investissements sont donc nécessaires, mais il faut aussi faire venir des acteurs étrangers et je suis en négociation avec un certain nombre d'entre eux pour les inciter à investir en France. D'autres investissements seront faits en Allemagne, et il est important de conserver un équilibre entre nos deux pays, pour qu'un seul État ne concentre pas l'intégralité des capacités de production de semi-conducteurs en Europe. En matière d'innovation sur les semi-conducteurs, la France a une carte à jouer, notamment avec le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), et il faut réfléchir à des investissements substantiels dans la recherche sur les semi-conducteurs aux gravures les plus fines - deux à cinq nanomètres. C'est un combat, qu'à la demande du Président de la République j'ai commencé à livrer, c'est un combat de longue haleine, difficile, dans lequel la compétition entre les pays est ardue. Mais nous le livrerons, pour que la France reste l'un des grands producteurs de semi-conducteurs dans le monde.

Le deuxième risque occupe légitimement médias et débat public, et il s'agit de l'inflation. Selon les chiffres de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), l'inflation est aujourd'hui à 2,6 % en glissement annuel et, selon nous, elle sera transitoire. Toutefois, je veux être très clair vis-à-vis des Français : il ne s'agira pas d'une transition de quelques semaines, mais de plusieurs mois. Je n'envisage donc pas de baisse des prix avant la fin de l'année 2022, notamment parce que cette inflation est principalement tirée par les prix de l'énergie. Et l'augmentation des prix de l'énergie a certes une composante conjoncturelle - une conjoncture vouée à durer - mais elle a aussi une composante structurelle. Cette analyse représente d'ailleurs l'un des rares points de divergence entre notre partenaire allemand et nous. La part conjoncturelle de l'augmentation des prix de l'énergie est liée à la forte demande et à la reprise économique plus forte que prévu partout dans le monde. D'autre part, dès lors que les investissements dans les énergies fossiles baissent et que la tarification CO 2 des énergies fossiles augmente, on observe une augmentation du prix de l'énergie qui est bien structurelle.

La transition prendra donc des mois et, à ce titre, nécessite une réaction politique. Ne rien faire serait en effet irresponsable et nous avons décidé, avec le Premier ministre et le Président de la République, de protéger les Français contre la première composante de l'augmentation des prix : les prix de l'énergie. Nous avons mis en place un « bouclier énergie », qui va permettre de geler les prix du gaz et de plafonner l'augmentation des prix de l'électricité à 4 % au lieu de plus de 15 % si l'on n'intervenait pas. Pour des millions de Français, cela représentera un immense changement. Protéger les Français contre l'augmentation des prix de l'énergie est un enjeu absolument majeur.

La réponse à plus long terme, c'est le combat que je livre au sein de l'Union européenne pour modifier le marché européen de l'énergie. Aujourd'hui, le prix de l'électricité dépend en partie du prix du gaz. Il est compliqué d'expliquer aux Français qu'il faut investir dans l'énergie décarbonée, et notamment dans l'énergie nucléaire qui représente 70 % de notre mix énergétique actuel, mais que dans le même temps ils doivent payer pour l'énergie fossile parce que les prix de l'électricité dépendent des prix du gaz. Je veux obtenir une décorrélation entre les prix de l'électricité tels qu'ils sont produits en France et les prix du gaz qui, je le rappelle, dépendent en grande partie de la fourniture de gaz venu de Russie. Il s'agit d'autonomiser le prix de l'électricité, de façon à ce que les Français puissent recueillir les fruits de notre investissement dans le nucléaire et l'énergie décarbonée. C'est un combat aussi difficile que celui que j'ai livré sur la taxation des géants du digital.

Je rappelle également que nous avons mis en place une indemnité inflation qui va toucher plus de 38 millions de Français et permettre de protéger les plus fragiles. Voilà les réponses que nous voulons apporter sur cette question de l'inflation et de l'augmentation des prix de l'énergie, qui préoccupe beaucoup les Français.

Enfin, le troisième risque qui pèse sur la croissance, après les pénuries et l'inflation, est la reprise épidémique. Je voudrais rappeler qu'il est vital que nous respections les gestes barrières, que les Français qui ne sont pas encore vaccinés aillent se faire vacciner, et que ceux qui sont éligibles à la troisième dose la reçoivent. Je ne voudrais pas avoir à revivre ce que nous avons dû imposer aux Français par nécessité de sécurité sanitaire : la fermeture des commerces et le confinement, qui créent de la difficulté sociale et beaucoup d'inquiétudes économiques, et représenteraient pour tous les commerçants, entrepreneurs et salariés, une difficulté supplémentaire dont nous n'avons pas besoin.

Je terminerai par les défis de long terme, et j'en vois trois se dessiner pour la France. Le premier est celui des finances publiques, qu'il faudra rétablir au lendemain de la crise. En effet, nous avons pu lever de l'argent de façon massive afin de protéger notre économie et cela s'est avéré efficace. Il est donc de ma responsabilité, en tant que ministre des finances, de faire en sorte que si demain une nouvelle crise économique ou sanitaire devait frapper, nous aurions les réserves financières nécessaires pour y faire face, pour à nouveau mettre en place de l'activité partielle et des prêts garantis par l'État, et à nouveau protéger notre économie. Pour ce seul principe de responsabilité, il est indispensable de rétablir progressivement, mais fermement, les finances publiques de la France. Nous le faisons en décidant que toutes les recettes fiscales supplémentaires seront consacrées à la réduction des déficits publics, en ramenant le déficit à 5 % du PIB pour 2022 et la dette publique à 113,5 %. Ensuite, je crois à une méthode reposant à la fois sur un calendrier clair - nous devons repasser sous les 3 % de déficit public en 2027 - et sur des instruments clairs - croissance, pluriannualité de la dépense et réformes de structure, assurance chômage et réforme des retraites en tête.

Le deuxième grand défi a été rappelé par madame la présidente et je partage entièrement son avis sur le sujet. Il s'agit de garantir l'indépendance économique de la France et de restaurer notre balance commerciale, les deux étant liés. Si nous voulons réindustrialiser le pays comme nous avons commencé à le faire, et reconquérir des filières industrielles, il faut investir. Nous le faisons avec le plan France 2030, dans l'hydrogène, dans les batteries électriques, dans les semi-conducteurs, dans l'intelligence artificielle, dans le calcul quantique. Tout cela doit permettre de rétablir une balance commerciale positive, ce qui ne s'est pas produit depuis le début des années 2000. C'est l'un des enjeux des prochaines années. De plus, si nous poursuivons cette politique de compétitivité, de redressement de l'industrie, de création de nouvelles filières industrielles, de formation et de qualification, nous pourrons d'ici dix ans retrouver le plein emploi que nous n'avons pas connu depuis un demi-siècle. Oui, la France est embourbée dans le chômage de masse depuis un demi-siècle... Et cela fait un demi-siècle que l'on nous explique qu'il n'y a rien à faire contre cela. Je pense pourtant que le plein emploi est à portée de main si nous poursuivons notre politique. Et la restauration de notre commerce extérieur l'est aussi. Avant les années 2000, notre balance commerciale était positive, mais tous les discours sur la désindustrialisation, l'industrie sans usine - la « fabless industry » - ont causé un tort considérable et inacceptable à l'économie française. Nous devons emprunter la voie de la relocalisation industrielle, qui rétablira notre balance commerciale extérieure.

Enfin, le troisième grand défi est celui du climat et du risque de grandes divergences entre les États du Sud et les États du Nord, entre les pays en développement et les pays développés. Tous ces sujets sont étroitement liés. Si nous ne réglons pas le problème climatique et si nous n'apportons pas un soutien aux pays en développement, ce que nous connaissons en matière migratoire à la frontière entre Biélorussie et Pologne, nous le connaîtrons au centuple aux frontières maritimes entre l'Afrique et l'Union européenne.

Le changement climatique et les difficultés économiques touchent en priorité les pays en développement. Ce serait irresponsable de détourner le regard des pays en développement et de les laisser à leur sort. La politique que nous menons contre le réchauffement climatique et pour le soutien au développement des pays les plus fragiles est aussi dans l'intérêt national et européen.

Je réponds maintenant à Serge Babary. Nous sommes sortis du « quoi qu'il en coûte » et il n'y a pas de raison d'y revenir dans les circonstances actuelles. En revanche, pour un petit nombre de secteurs qui doivent se projeter, la situation reste difficile. En effet, pour les traiteurs ou les secteurs de l'événementiel et de l'organisation de mariages ou de fêtes, envisager quoi que ce soit à 2 ou 3 mois est bien plus difficile du fait de la persistance des difficultés sanitaires. Nous apporterons très rapidement, avec le Premier ministre, des réponses aux demandes légitimes de ce secteur.

S'agissant des foncières commerciales, nous avons engagé 13 millions d'euros sur les 60 millions d'euros prévus. Il n'est donc nul besoin, pour le moment, de réabonder l'enveloppe. Quelque 53 foncières sont opérationnelles et 6 000 commerces ont déjà été rénovés. Nous ferons un point précis sur cette politique le 1 er décembre lors des Assises du commerce, auxquelles j'attache une importance vitale. En effet, je vois trop de communes moyennes en proie à des difficultés considérables d'animation de leur centre-ville ou de maintien de commerces ouverts. Il faut les aider. Avoir un commerce de bouche, une librairie ou une droguerie ouverte en centre-ville est absolument vital pour des dizaines de milliers de communes.

M. Jean-Claude Tissot . - Monsieur le ministre, s'agissant de la nécessaire relocalisation de l'industrie et de la production dans notre pays, vous avez présenté, le 12 octobre dernier, dans le plan d'investissement France 2030, dix objectifs sectoriels. Cette planification pour la décennie à venir paraît justifiée pour faire en sorte que notre pays retrouve une force de production. N'oublions pas les secteurs d'activité non pris en compte dans ce plan, tels que l'industrie textile ou la fabrication de chaussures. La relocalisation de la production de baskets dans notre pays est ainsi rendue impossible dans son ensemble du fait de la perte de savoir-faire. Quelles sont les intentions de votre ministère et du Gouvernement pour accompagner la relocalisation de ces productions et ces savoir-faire spécifiques ?

Vous répétez régulièrement votre attachement à la valeur travail. Il serait nécessaire de la relier à la formation régulière des salariés, afin retrouver des savoir-faire. Certains pays comme le Danemark ont instauré une semaine de formation régulière par an avec l'objectif de se former tout au long de la vie. Sur cet aspect, quel bilan dressez-vous de ce quinquennat et quels sont vos objectifs précis pour l'année à venir ?

M. Fabien Gay . - Monsieur le ministre, en votre présence je suis comme un enfant qui voit le Père Noël, puisque c'est une fois par an. En revanche, vous ne nous amenez pas de jolis cadeaux au pied du sapin !

Il me semble qu'on ne souffre pas de trop de parlementarisme ni de trop de débat démocratique dans notre pays, mais plutôt de trop de verticalité. Par exemple, dans la crise que nous traversons, le choix de l'exécutif de vouloir gérer seul et de se passer du Parlement constitue l'un des problèmes. L'urgence n'est pas de réduire le nombre de parlementaires, mais de redonner sa place à l'ensemble du Parlement.

L'année dernière, vous appeliez à la modération des dividendes et je vous avais interpellé sur ce sujet. Quelque 28,6 milliards d'euros de dividendes étaient versés pour l'année 2019, contre 51 milliards pour l'année 2020. Votre appel à la modération des dividendes de ces entreprises qui ont touché le plan de relance ou le chômage partiel a-t-il été entendu ?

Concernant le plan France Relance, j'ai du mal à voir la cohérence et les secteurs stratégiques sur lesquels il se concentre. On a l'impression d'un coup par coup et on peine à maintenir nos fleurons industriels. À cet égard, que pensez-vous de la vente d'une partie d'Engie, Equans, à Bouygues ?

Par ailleurs, vous ne pouvez pas dire que l'Institut des politiques publiques annonce, dans son récent rapport, que tout va bien. Certes, le pouvoir d'achat des ménages augmente de 1,6 % en moyenne. Néanmoins, il baisse de 0,5 % pour les 5 % des ménages qui gagnent moins de 972 euros par mois, tandis que les 1 % les plus privilégiés voient un accroissement de leur pouvoir d'achat de 2,8 %, et les 0,1 % les plus riches une hausse de 4,1 %. Les gens ne veulent pas de chèques énergie ou de chèques repas, mais l'augmentation des salaires. Vous avez appelé le patronat à augmenter les salaires mais il vous a répondu qu'il n'en était pas question. Que comptez-vous faire sur cette question d'augmentation des salaires, notamment des salaires les plus faibles ?

M. Jean-Pierre Moga . - S'agissant des prêts garantis par l'État, vous avez récemment affirmé qu'il n'y aura pas de report supplémentaire de remboursement. Néanmoins, des exceptions, notamment pour les PME ou les TPE sont-elles prévues en cas de difficultés ?

Ma seconde question porte sur la soutenabilité des moyens déployés par l'État au travers des prêts garantis. Il s'agit d'éviter un cercle vicieux entre faillites des entreprises et impact sur les finances publiques. Quel taux de faillite anticipez-vous et quelle est votre évaluation de la soutenabilité à long terme de ces politiques de soutien aux entreprises ? Quelle articulation est selon vous nécessaire entre le niveau national et européen ?

M. Bernard Buis . - Taux de chômage historiquement faible, taux de croissance qui pourrait tutoyer les 6,5 %, consommation des ménages qui a bondi de 5 %, contribuant pour 2,5 % à la croissance du PIB entre juillet et septembre, ces bons résultats économiques de la France ne seraient-il pas mis en difficulté suite à des problèmes d'approvisionnement et de main-d'oeuvre, voire par la hausse de la dette publique et de l'inflation ?

M. Michel Bonnus . - Jusqu'à quand la flat tax restera-t-elle en vigueur ?

L'hôtellerie et le commerce en général sortent de plusieurs années très compliquées entre les « gilets jaunes » et les confinements successifs. Ces secteurs ont donc besoin de passerelles via les formations.

S'agissant de la défiscalisation des pourboires, cela fait trente ans que j'exerce ce métier et je n'ai jamais vu quelqu'un déclarer un pourboire. Il faut intéresser nos agents au résultat pour créer une synergie dans nos entreprises.

M. Patrick Chaize . - Vous avez évoqué, monsieur le ministre, l'état de la dette en invoquant surtout l'effet covid. Il me semble néanmoins que l'augmentation de la dette n'est pas exclusivement due au covid-19. Je pense aux 90 milliards d'euros d'accroissement de la dette qui ne sont pas liés au covid-19. Pouvez-vous nous le confirmer ?

S'agissant de La Poste, le Gouvernement souhaite confier à l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) le contrôle du coût net du service universel postal, comme le proposait une mission d'information du Sénat. Je regrette que le Gouvernement ait suivi une proposition du Sénat - comme quoi le Sénat a une certaine utilité - sans que ce dernier y ait été associé.

Il semble aussi que l'Arcep ait modifié sa méthode de calcul sur la mission « Cohésion des territoires », présentant un déséquilibre assez profond par rapport aux années précédentes. Je voudrais que vous nous rassuriez sur le fait que la compensation effective des missions de service public de La Poste est pérenne et totale pour les années à venir.

Mme Sylviane Noël . - Les entreprises fournisseurs des équipementiers et constructeurs automobiles subissent une très forte baisse de leur activité pour la seconde année consécutive, de l'ordre de 50 voire 75 %. Cette situation se traduit par la constitution de stocks de pièces non livrées aux clients et qui pèsent lourd sur la trésorerie des entreprises, d'autant plus que ces pièces ont été fabriquées avec des matières premières payées au prix fort.

En outre, la hausse des coûts de l'énergie a un impact fort, tout comme les nouvelles taxes instaurées par les fournisseurs de matières premières, sans que ces hausses soient réglementées. In fine , on observe une rapide dégradation de la trésorerie de ces constructeurs. Cela se traduit par un recours massif à l'activité partielle, notamment dans le cadre de l'activité partielle de longue durée (APLD). Face à cette situation critique, la filière automobile réclame des assouplissements liés au recours et au remboursement des prêts garantis par l'État (PGE), une exonération des charges temporaires et une prolongation de l'APLD au-delà des deux ans prévus et un doublement du volume de l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique (Arenh) pour modérer cette hausse des prix de l'énergie.

Compenser l'augmentation des coûts énergétiques pour l'ensemble de la chaîne industrielle est donc une priorité. Envisagez-vous d'élargir l'avance de compensation des coûts indirects du carbone de 150 millions d'euros destinés pour le moment aux entreprises électro-intensives, sachant que les entreprises de décolletage, très consommatrices d'électricité, ne rentrent pas dans cette catégorie ? Je souhaite avoir votre avis sur l'ensemble de ces mesures.

M. Yves Bouloux . - Les fonderies d'aluminium d'Ingrandes, dans la Vienne, cherchent un repreneur. Pour sauver cette entreprise et ses 350 salariés, il faut trouver 25 millions d'euros et des discussions sont en cours entre l'État, Renault et la région Nouvelle-Aquitaine. L'État prendra-t-il sa part ? Si oui, à quelle hauteur ?

M. Daniel Gremillet . - Sur quoi les négociations européennes sur la réforme du marché de l'électricité ont-elles achoppé ? Quand et comment le Gouvernement entend-il les faire aboutir ?

Je considère que les grandes oubliées du bouclier tarifaire sont les entreprises. Je considère comme très optimistes les perspectives tablant sur une inflation de 2,6 % pour 2022. Toutes les entreprises qui sont en train de travailler sur les budgets 2022 émettent des perspectives beaucoup moins encourageantes. Quels seront les moyens mis à disposition des entreprises pour les aider à passer ce cap difficile ?

Le Président de la République a annoncé la construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Comment seront-ils financés : par une nouvelle régulation du nucléaire, par une garantie de l'État ou par une gestion des actifs ?

M. Rémi Cardon . - Je m'inquiète de la suppression de 1 500 postes équivalents temps plein dans votre ministère, et notamment sur la qualité des services rendus à la population.

J'espère que vous ne resterez pas dans vos convictions de 2016, date à laquelle vous aviez proposé la suppression de 500 000 postes de fonctionnaires. Étant donné que vous remettez en cause l'utilité du Sénat, qu'en est-il de celle de la Cour des comptes, qui rapporte qu'en 2018, les temps d'attente sont jusqu'à trois heures dans certains centres de finances publiques ? Comment comptez-vous répondre aux attentes de nos concitoyens éloignés des services publics qui ne maîtrisent pas forcément l'usage du numérique et qui sont pris dans des « galères » administratives ?

M. Pierre Cuypers . - Je l'ai dit tout à l'heure en questions au Gouvernement, mais vous n'y étiez pas : s'agissant de l'énergie, en particulier du gaz, j'ai eu l'impression que vous laissiez de côté la possibilité d'intervenir sur le prix du gaz, sur sa disponibilité et sur les conséquences d'un manque de gaz pour la fabrication de l'ensemble de nos fertilisants agricoles.

Quelles mesures allez-vous prendre pour, d'ici quelques semaines, faire en sorte que l'azote soit accessible et que le gaz soit disponible ?

Mme Sophie Primas , présidente . - Pensez-vous que nous assisterons, à la fin de l'année, à une baisse ou à une stabilisation des prix ?

S'agissant de la croissance de 6,25 % que vous envisagez pour 2022, nous avons connu une décroissance de 8 % l'année dernière ; ce me semble donc relever du phénomène de rééquilibrage.

Pourriez-vous nous expliquer l'articulation exacte des plans d'investissements français entre les programmes d'investissements d'avenir, France 2030, France Relance et le plan de relance européen ? On se trouve parfois perdu dans le labyrinthe des investissements. Où en sommes-nous du décaissement du plan de relance européen ?

M. Bruno Le Maire, ministre. - Je vois que mes propositions de réforme du Sénat rencontrent un succès d'estime. Je tiens seulement à préciser que je n'ai jamais nié l'utilité du Sénat, mais que je propose une rénovation en profondeur de notre procédure législative et du fonctionnement des deux chambres. C'est tout le contraire que de reléguer le rôle de ces chambres que j'estime précieux et, notamment pour le contrôle exercé, très important.

S'agissant de la dernière question posée par la présidente sur le rééquilibrage de la croissance, oui, la France a connu une récession très forte en 2020. Simplement, la vigueur de la reprise surprend tout le monde, y compris les observateurs étrangers. Il serait dommage de dévaloriser les résultats de l'économie française et des salariés français. Dans le meilleur des scénarios du FMI et de la Commission européenne, la France retrouvait son niveau d'activité économique pré-crise dans le courant du premier trimestre 2022. Nous l'avons retrouvé début novembre 2021. C'est un exploit de l'économie française, des salariés, des entrepreneurs et des investisseurs. Et je pense très sincèrement que cela tient beaucoup aux transformations de fond menées au début du quinquennat.

Aujourd'hui, un investisseur qui cherche à investir en Europe ne se tourne plus systématiquement vers l'Allemagne, mais, grâce à la baisse des impôts de production, n'hésite plus à se tourner vers la France. Cela participe de la vigueur de la reprise que nous connaissons aujourd'hui.

Concernant l'architecture des plans d'investissement, la relance avait un seul objectif : la relance de l'économie. Il s'agit d'un investissement de 1 pour 1. On dépense pour que l'économie redémarre, sans que cela ne rapporte plus que ce qui est dépensé. C'est le cas de MaPrimeRénov', du soutien à l'emploi des jeunes, des primes pour l'embauche des jeunes apprentis ou des primes à la conversion pour les véhicules.

Le plan d'investissement est très différent. On estime que c'est un rapport de 1,5 pour 1. C'est-à-dire que les 30 milliards d'euros doivent remporter au moins 45 milliards d'euros de richesses supplémentaires. C'est le cas du Programme d'investissements d'avenir (PIA) ou du plan France 2030. Cela n'a rien à voir avec l'argent européen ou avec la relance européenne : c'est bien un investissement national qui vise à accroître les capacités de production et la productivité de notre économie.

Avec le Président de la République, nous ne nous résignons pas à une croissance faible et carbonée pour la France ; nous voulons une croissance forte et décarbonée. J'ai la conviction qu'en investissant 9 milliards d'euros dans l'hydrogène, on crée des milliers d'emplois dans notre pays, comme ce sera le cas à Belfort et en Normandie. Dans le même temps, les sites de Dunkerque et de Fos-sur-Mer, c'est-à-dire les deux grandes aciéries de Mittal, sont décarbonés.

Il n'en reste pas moins que réorganiser l'investissement en France et clarifier le pilotage de l'investissement notre pays est une vraie question à laquelle nous répondrons d'ici la fin de l'année 2021.

S'agissant de l'inflation, je le redis, celle que nous connaissons aujourd'hui est, selon nous, une inflation transitoire qui se compte en mois beaucoup plus qu'en semaines et qui devrait perdurer jusqu'à la fin de l'année 2022. Les prix de l'énergie devraient donc rester élevés jusqu'à cette période. Cela appelle des politiques publiques - nous les avons mises en place avec le Premier ministre -, une très grande vigilance ainsi qu'une réflexion sur des mesures complémentaires. Si, l'augmentation du prix de la tonne de blé est très élevée, c'est notamment du fait de la flambée des engrais azotés suite à l'augmentation du prix des énergies fossiles.

Aussi, concernant l'inflation, le chiffre de 2,6 % que j'indiqué est un glissement annuel moyen sur l'ensemble des prix et, effectivement, les prix de l'énergie sont en augmentation plus forte.

Les entreprises agricoles ou industrielles, dont les coûts de production sont très dépendants des prix de l'énergie, en particulier les électro-intensifs, connaissent des difficultés particulières. Ainsi, le vrai problème de l'inflation, aujourd'hui, est le prix de l'énergie. C'est le problème le plus important auquel nous nous sommes attaqués avec le Premier ministre.

Concernant les relocalisations, qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur ce que nous entendons par relocalisation industrielle. Nous n'allons pas rapatrier sur le territoire français les productions de base, parce que nous ne serions pas compétitifs et que nous investirions de l'argent à perte. Toutefois, dans certains secteurs comme le petit électroménager ou le textile, il peut y avoir de la valeur ajoutée liée à une marque, un savoir-faire et un design français. Sur des niches sectorielles comme le textile technique, respirant ou de sport, la France est très forte et crée de la valeur ajoutée soit par la technicité du produit, soit par le visa. En revanche, je ne crois pas à l'idée de relocaliser en France toute la production textile.

Nous avons beaucoup investi depuis le début du quinquennat dans la formation régulière : 15 milliards d'euros dans le cadre du plan d'investissement dans les compétences (PIC). C'est probablement l'un des sujets les plus importants pour réussir l'objectif du plein emploi dans les années qui viennent et nous devons encore nous améliorer.

Merci, Fabien Gay, de m'avoir traité de Père Noël à quelques semaines de Noël, cela va me rendre populaire auprès de mes quatre garçons. S'agissant des dividendes, je rappelle qu'aucune entreprise ayant bénéficié d'aides de l'État n'en a versé. Ils sont élevés car ils récompensent le risque pris par les actionnaires, y compris des millions de Français qui ont un plan d'épargne en actions (PEA) ou une assurance-vie libellée en unités de compte et qui investissent dans les PME ou dans les entreprises françaises. On ne peut pas appeler les Français à participer au financement de l'économie sans qu'ils en aient le juste retour.

Les secteurs stratégiques ne sont pas uniquement les secteurs de demain, mais aussi les secteurs d'aujourd'hui qu'il faut accompagner dans leur mutation. Il y a les biotechs, l'hydrogène, les batteries électriques, le nucléaire, les lanceurs spatiaux, mais il y a aussi l'automobile et l'aéronautique. Ces derniers nécessitent des investissements considérables parce qu'ils sont confrontés à des mutations très rapides, comme il en arrive une fois dans le siècle.

Pour ce qui concerne l'aéronautique, tout le monde m'expliquait il y a un an que c'était fichu et qu'il n'y aurait pas de redressement avant 2026 ou 2027. Aujourd'hui, Airbus vient d'enregistrer la commande la plus importante des 15 dernières années. Dans le reste du monde, le transport aérien et les commandes aéronautiques redémarrent fort. On a bien fait d'investir dans l'aéronautique et l'argent des Français a été bien placé en dépensant des milliards d'euros sur l'activité partielle dans ce secteur. Nous n'avons pas perdu nos ingénieurs, nos ouvriers qualifiés et nos techniciens de maintenance et Airbus peut livrer ses avions.

On avait beaucoup critiqué la décision de Guillaume Faury d'ouvrir une ligne de production de l'A321 Neo à Toulouse en pleine épidémie. Aujourd'hui, les commandes sont là et nous sommes bien contents d'avoir ouvert cette nouvelle ligne de production en France, parce que sinon, c'était tout pour les Allemands et rien pour les Français.

S'agissant du pouvoir d'achat, je conteste le chiffre de - 0,5 % avancé par l'Institut des politiques publiques pour la simple et bonne raison que n'y sont comptabilisés ni l'indemnité inflation que nous venons de mettre en place, ni la revalorisation des prestations sociales actée en 2018, ni d'autres éléments comme le remboursement à 100 % des soins dentaires et des soins optiques. Cette étude se discute.

M. Fabien Gay . - Vous ne contestez pas que cela a bénéficié aux salaires les plus élevés ?

M. Bruno Le Maire, ministre . - Non, je conteste la partie qui concerne les salaires les plus faibles.

Je rappelle à cet égard que nous sommes le seul pays développé dans lequel le salaire minimum a une revalorisation automatique indexée sur les prix, ce qui est une excellente chose et qui doit être maintenue.

Toutes les politiques que nous avons mises en place - prime d'activité, abaissement des cotisations patronales, défiscalisation des heures supplémentaires ou des pourboires - permettent à un salarié au niveau du SMIC de toucher non pas 1 270, mais 1 492 euros net par mois, c'est-à-dire presque 1 500 euros.

Sur les PGE, l'évaluation de la Banque de France estime à moins de 3 % les entreprises menacées de ne pas pouvoir rembourser leurs prêts garantis par l'État. C'est pour cette raison que je ne suis pas favorable à une mesure transversale repoussant à nouveau la date de début de remboursement du PGE.

Je l'ai fait une fois : le remboursement devait avoir lieu au printemps 2021 et j'ai considéré que la reprise n'était pas là, que la situation restait compliquée et qu'il fallait donc reporter d'un an l'échéance. J'ai également considéré qu'il pouvait être bon de donner la possibilité aux entreprises nécessitant davantage de trésorerie de souscrire un nouveau PGE, en étendant la durée de souscription jusqu'à l'été 2022. Une mesure transversale pour toutes les entreprises ne serait pas la bonne solution : ce serait repousser le problème un peu plus loin en accumulant les intérêts.

Je prends l'engagement qu'il n'y a pas une entreprise confrontée à une difficulté de remboursement du PGE qui ne sera pas accompagnée par les dispositifs mis en place au niveau départemental pour examiner la situation des entreprises et leur apporter des solutions en termes de trésorerie.

Je partage ce que Michel Bonnus a dit sur l'intéressement et la participation et voudrais rappeler à toutes les entreprises françaises, notamment les PME, que nous avons supprimé la taxe à 20 % sur l'intéressement et nous avons simplifié les dispositifs d'intéressement : les plus petites entreprises peuvent les conclure sur une seule année. Maintenant que nous sortons de la crise et que la croissance est au rendez-vous, je voudrais vraiment que chaque petite entreprise profite de ces dispositifs pour mettre en place des accords d'intéressement. Quant à la flat tax , je vous confirme que je suis favorable à la stabilité fiscale ; il n'est donc pas question de toucher aux dispositifs fiscaux que nous avons mis en place. Enfin, sur la non-déclaration des pourboires, je vais faire comme si je n'avais rien entendu.

S'agissant du contrôle du coût net du service universel postal par l'Arcep, c'est la preuve que le Sénat fait de bonnes propositions. Cette proposition du Sénat été reprise et adoptée par le Gouvernement qui la mettra en oeuvre avec le Sénat, La Poste et l'Arcep. Quant à la compensation du service universel postal, elle s'élèvera à 500 millions d'euros environ par an suivant des indicateurs de qualité qui seront ensuite à atteindre par la Poste.

La situation des équipementiers automobiles est vitale et extraordinairement difficile. La transformation technologique de l'industrie automobile va beaucoup plus vite que prévu. Nous basculons vers l'électrique à un rythme beaucoup plus soutenu que prévu, ce qui pose évidemment des difficultés majeures à un certain nombre de sous-traitants, notamment dans le secteur des fonderies. Je rappelle qu'il y a quatre fois moins d'aluminium ou de fonte dans un moteur électrique que dans un moteur thermique.

À cela s'ajoute l'augmentation des coûts de l'énergie et des intrants, notamment l'aluminium, ce qui met un certain nombre d'entreprises en grande difficulté. Nous proposerons dans les prochaines semaines, avec le Président de la République et le Premier ministre, un nouveau plan automobile visant à accompagner notamment les équipementiers et les sous-traitants automobiles.

Pour ce qui concerne la fonderie de la Vienne, j'attends les offres de reprise d'ici le 10 janvier. L'État a répondu présent en soutenant l'entreprise via un prêt de fonctionnement et a financé des audits pour repositionner l'entreprise sur des marchés plus porteurs. Toutes les fonderies font d'ailleurs l'objet d'un accompagnement particulier parce que la bascule est tellement rapide qu'il faut envisager des restructurations et des accompagnements pour chacune d'entre elles.

Pourquoi la réforme d'EDF a-t-elle été un échec ? Tout simplement parce que j'ai préféré mettre un terme aux discussions quand j'ai vu que la seule proposition qui retenait l'accord de la commission aboutissait à un démantèlement d'EDF.

S'agissant des suppressions d'emplois dans mon ministère, je considère ce dernier comme exemplaire sur les gains d'efficacité ou la digitalisation - on l'a vu par exemple avec la retenue à la source. Ma politique n'est pas de supprimer des emplois pour supprimer des emplois, mais de se rapprocher le plus possible des Français. Une des politiques que j'ai le plus portée depuis plusieurs mois est la déconcentration des services de l'État : la direction générale des finances publiques est ainsi en train d'ouvrir des antennes dans de nombreuses villes. Je considère que déconcentrer des services de Paris vers des villes moyennes ou petites est un des dispositifs les plus efficaces et les plus attendus par nos compatriotes.

Mme Sophie Primas , présidente . - Je vous remercie, monsieur le ministre, pour cette audition et vos réponses, même s'il en manque quelques-unes, notamment sur la dette.

Examen en commission
(Mardi 23 novembre 2021)

Réunie le mardi 23 novembre 2021, la commission a examiné le rapport d'information sur les crédits relatifs au commerce et à l'artisanat de la mission « Économie » du projet de loi de finances pour 2022.

Mme Dominique Estrosi Sassone , présidente . - La présidente Sophie Primas m'a chargée de vous présenter ses excuses et de conduire notre réunion, au cours de laquelle nous examinerons trois avis budgétaires. Nous commencerons par l'examen des crédits relatifs au commerce et à l'artisanat retracés par la mission « Économie ».

M. Serge Babary , rapporteur pour avis sur les crédits relatifs au commerce et à l'artisanat . - Comme je vous l'annonçais l'an dernier, la mission « Économie » ne contient quasiment plus aucun crédit directement affecté au commerce et à l'artisanat en tant que tels. Il s'agit d'un choix regrettable du Gouvernement, qui a supprimé il y a quelques années l'action dédiée à ces secteurs au sein de la mission, pour la fondre dans l'action concernant l'industrie et les services, avant de supprimer le fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce ( Fisac).

Désormais, le commerce et l'artisanat ne sont plus concernés que par des crédits très épars, logés dans différents programmes de différentes missions, ce qui complexifie encore le suivi de la politique gouvernementale, et traduit l'absence de vision claire quant à la politique à conduire.

J'ai choisi d'axer mon analyse sur les performances de l'initiative « France Num », dont les crédits sont rattachés à la mission « Économie » et que le Gouvernement place au coeur de sa politique de numérisation des petites et moyennes entreprises (PME), ainsi que sur le soutien aux métiers d'art et le suivi des foncières de redynamisation commerciale.

Tout d'abord, en ce qui concerne France Num, la politique conduite me semble insuffisante, et l'étude de sa trajectoire budgétaire manifeste le caractère exceptionnel du surcroît de crédit dont elle a bénéficié en 2021.

Je voudrais également rappeler que France Num est à l'origine une plateforme qui met en relation commerçants et artisans souhaitant avoir accès à la numérisation avec des professionnels du numérique capables de les aider. La crise sanitaire ayant permis au Gouvernement de comprendre combien il était urgent d'accélérer la transition numérique des très petites entreprises (TPE) - ce sur quoi le Sénat ne cessait d'alerter -, France Num a été dotée de nouveaux crédits significatifs tout au long de l'année 2020, puis dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2021. L'objectif de ces nouveaux crédits était de financer environ 30 000 diagnostics de numérisation qui devaient être conduits par le réseau consulaire, ainsi que des formations au numérique mises en oeuvre par des organismes tiers, et enfin une partie du chèque numérique de 500 euros, versé aux TPE en ayant fait la demande.

Après un an, quels sont les résultats de cette politique ? Dans son rôle de mise en relation, la plateforme France Num reste trop peu connue des commerçants et artisans, notamment en raison d'une communication encore trop axée sur des supports qui ne sont fréquentés que par les acteurs déjà familiers du sujet. Des efforts ont été entrepris cette année, des épisodes télévisés ayant été diffusés sur BFM Business et RMC Story, et il faut les saluer, d'autant qu'ils répondent à nos recommandations de l'an dernier. Pour autant, France Num continue de bénéficier d'une très faible notoriété, ce qui ne changera pas tant que la majeure partie de sa communication grand public continuera de reposer sur des canaux aussi confidentiels.

Dès lors, il n'est pas très surprenant que la mise en relation entre TPE-PME d'un côté et professionnels du numérique de l'autre ne remporte qu'un succès très limité. Ainsi, le formulaire « contacter le conseiller » n'a reçu que 4 000 vues uniques entre le 1 er janvier et le 30 octobre 2021, pour 3 500 professionnels inscrits sur la plateforme. Il faudrait donc que France Num lance une vaste campagne de communication sur les principales chaînes de télévision et de radio à des heures de grande écoute, ainsi que dans la presse quotidienne régionale.

En outre, malgré notre mise en garde de l'an dernier, la qualité des professionnels présents sur la plateforme n'est pas contrôlée, ce qui ne participe pas à créer un climat de confiance favorable pour les commerçants et artisans qui font, en se lançant, un véritable investissement en temps et argent.

Les formations-actions ont quant à elles manqué leur cible, en raison notamment d'un site internet dysfonctionnel et d'un très faible maillage territorial des formations. Pourtant, 30 opérateurs ont été sélectionnés pour dispenser ces formations, avec l'ambition de toucher plus de 70 000 entreprises, France Num finançant chaque formation à hauteur de 300 euros.

J'ai voulu tester ce catalogue de formations, comme un chef d'entreprise le ferait s'il souhaitait engager la transition numérique de son entreprise. Le résultat est édifiant et inquiétant. En effet, j'ai indiqué sur la plateforme mon souhait de développer mon activité via une formation en présentiel, et France Num ne m'a proposé que cinq formations, toutes situées en Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA). En outre, aucun des liens prévus pour s'inscrire à ces formations ne fonctionnait. J'ai ensuite demandé à bénéficier d'une formation pour trouver de nouveaux clients, en acceptant qu'elle se fasse en ligne, et j'ai obtenu dix propositions, dont neuf en Auvergne-Rhône-Alpes et une en PACA. Lorsque j'ai demandé à faire la même formation en présentiel, seules deux m'ont été proposées, qui avaient lieu en PACA. Ainsi, malgré les fonds engagés dans ces formations-actions, le résultat n'est pas à la hauteur.

Quant aux diagnostics numériques, ils ont en réalité été conduits par le réseau consulaire, France Num n'ayant servi qu'à verser les fonds aux chambres.

Une note positive toutefois, puisque la distribution des chèques numériques a été saluée par les professionnels, et ce sont 112 000 TPE qui en ont bénéficié, pour financer des équipements numériques comme des logiciels, des ordinateurs ou des achats de sites internet. Malheureusement, en dépit de la simplicité du dispositif qui est appréciée par les premiers concernés, rien n'est prévu en la matière pour 2022.

J'en viens à présent aux métiers d'art, dont la promotion et l'accompagnement restent surtout le fait de l'Institut national des métiers d'art (INMA), association reconnue d'utilité publique qui emploie environ vingt personnes. Cet institut gère notamment le label « Entreprise du patrimoine vivant » (EPV), le dispositif « Maîtres d'art-Élèves », ainsi que des opérations de valorisation visant à donner une plus grande visibilité à ces professions qui participent du rayonnement du pays mais aussi de l'innovation, et de la transmission d'un savoir-faire rare et précieux.

L'action de l'INMA est financée à la fois par ses ressources propres, issues par exemple des études qu'elle conduit ou des frais d'adhésion qu'elle génère, par le mécénat, et par deux subventions, l'une du ministère de la culture, qui s'élevait à 630 000 euros en 2021, et l'autre du ministère de l'économie, dont le montant était de 900 000 euros en 2021. Pour 2022, son montant est fixé à 1,1 million d'euros dans le projet annuel de performance de la mission « Économie », et je me félicite de cette augmentation.

Cependant, elle ne permettra pas de compenser la baisse parallèle des ressources propres de l'Institut suite à la crise, et son budget devrait donc diminuer dans les années à venir. Or, il lui est demandé dans le même temps d'instruire un nombre croissant de dossiers pour le label EPV. En outre, certaines conventions de mécénat pourraient s'éteindre à compter de 2022. Si leur reconduction semble vraisemblable, il importe toutefois que l'hypothèse inverse soit dûment anticipée, afin de ne pas pénaliser le financement de certains dispositifs, comme le programme Maîtres d'art-Élèves. Il semble donc nécessaire d'améliorer le soutien financier de l'État à cet institut qui promeut une importante richesse immatérielle, celle de notre patrimoine.

Enfin, permettez-moi de m'éloigner quelque peu des crédits de la mission « Économie » pour dresser un premier bilan de la mise en place des foncières de redynamisation commerciale, créées l'an dernier. L'objectif de ces foncières, dont le capital est financé par la Banque des territoires et dont le déficit opérationnel est pris en charge par un fonds dédié, est d'acquérir, de rénover et de louer à bas prix 6 000 commerces d'ici 2025.

Cependant, les 53 foncières existant à ce jour portent des plans d'affaires correspondant à la rénovation d'environ 1 000 locaux, dont 105 ont été livrés à ce jour, ce qui interroge sur le réalisme de l'objectif initial de 6 000 commerces. En effet, compte tenu du rythme observé, il faudrait 300 foncières pour y parvenir. De même, la subvention de 13 millions d'euros issue du fonds de compensation a servi à traiter 165 locaux, ce qui semble attester d'un sous-dimensionnement du fonds de 60 millions d'euros. En continuant de suivre le rythme actuel, seuls 780 commerces pourront être traités avant épuisement de l'enveloppe.

Je note à cet égard une divergence entre ce que nous a dit le ministre en audition et ce qu'indique la Banque des territoires. En effet, alors que le premier a expliqué qu'il n'était pas question d'abonder à nouveau ce fonds, la Banque a affirmé : « l'abondement de la seconde tranche de financement du fonds en 2022, au-delà des 60 millions d'euros budgétés en 2021, constitue un enjeu fort de poursuite de la dynamique enclenchée ».

Mes chers collègues, le vote sur les missions budgétaires étant réservé pour le moment, je me contenterai de vous indiquer que si nous avions à nous prononcer sur la mission « Économie » dans les jours à venir, je vous proposerais de rejeter les crédits.

Mme Anne-Catherine Loisier . - Je souhaiterais poser une question sur les foncières immobilières, qui sont essentielles pour un certain nombre de territoires. Comment sont-elles réparties géographiquement ? Sont-elles notamment développées dans des territoires faisant l'objet d'opérations de revitalisation ? Ces éléments permettraient de nous assurer de leur bon déploiement dans les zones où l'on en a véritablement besoin.

M. Serge Babary , rapporteur . - Malheureusement je n'ai pas eu accès à ces éléments, mais nous pourrons tenter de les obtenir. J'ajoute qu'en moyenne chaque commerce rénové coûte 78 000 euros, sans doute beaucoup plus que prévu.

Mme Dominique Estrosi Sassone , présidente . - Je vous remercie, monsieur le rapporteur. Nous passons à présent à l'examen des crédits relatifs au numérique, aux télécommunications et aux postes.

Réunie le mardi 23 novembre 2021, la commission a examiné le rapport d'information sur les crédits relatifs au numérique, aux télécommunications et aux postes de la mission « Économie » du projet de loi de finances pour 2022.

Mme Anne-Catherine Loisier , rapporteure pour avis sur les crédits relatifs au numérique, aux télécommunications et aux postes . - Dans le cadre de la mission « Économie », des changements significatifs concernant les crédits dédiés au numérique, aux télécommunications et aux postes sont intervenus depuis l'année dernière, plusieurs de ces changements s'inscrivant dans la continuité de travaux récemment menés par notre commission.

J'ai souhaité cette année me concentrer sur trois points : la compensation des déficits des missions de service public de La Poste, le suivi de la mise en oeuvre du plan France Très haut débit, et l'évaluation de la première année de déploiement de la 5G dans nos territoires.

Sur le premier point, je souhaiterais commencer par saluer la qualité des travaux menés par mes collègues Patrick Chaize, Pierre Louault et Rémi Cardon dans le cadre de leur rapport d'information et de leur proposition de loi relative à l'encadrement des services publics de La Poste. Si ces travaux ne datent que de quelques mois, les recherches et auditions que j'ai menées en tant que rapporteure m'ont néanmoins permis d'effectuer une première « actualisation » utile, et d'identifier des éléments de satisfaction, des points sur lesquels nous avons été entendus par le Gouvernement, mais aussi quelques points d'alerte.

En ce qui concerne le service universel postal, première mission de service public de La Poste, qui permet d'assurer sur l'ensemble du territoire la distribution du courrier et des colis six jours sur sept, le déficit pour l'année 2020 est estimé à 1,1 milliard d'euros, la crise sanitaire ayant fortement accéléré la tendance structurelle à la baisse des échanges de courrier.

Afin d'éviter une réduction de la mission de service public qui se traduirait par une accélération de la fermeture des bureaux de poste, des baisses d'effectifs et un moindre passage du facteur à chaque boîte aux lettres lors des tournées de distribution, notre commission avait alerté sur la nécessité de compenser cette mission dès 2022. Dans la continuité de nos travaux et conformément aux engagements pris par le Premier ministre au mois de juillet dernier, une dotation budgétaire exceptionnelle de 500 millions d'euros est prévue par ce PLF, qui pourra éventuellement être complétée par une dotation optionnelle de 20 millions d'euros, en fonction des résultats de qualité de service de La Poste.

Au regard des enjeux financiers considérés, notre commission avait interpellé le Gouvernement et l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) sur la nécessité pour le régulateur d'évaluer chaque année le coût net de cette mission de service public, afin que la dotation de l'État puisse être déterminée sur la base d'une évaluation objective et indépendante. Dans cette perspective, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement qui confie à l'Arcep cette mission, reprenant ainsi l'une des principales dispositions de la proposition de loi du Sénat relative à l'encadrement des services publics de La Poste, que nous avons été plus de 120 à cosigner.

Si nous pouvons nous satisfaire de ces avancées, je souhaite toutefois partager avec vous quelques points d'alerte. D'une part, l'Arcep ne s'est toujours pas saisie de cette nouvelle mission d'évaluation et, au regard des délais nécessaires de préparation, il est indispensable qu'une méthodologie de calcul soit éprouvée et opérationnelle en vue du PLF pour 2023. D'autre part, il semble qu'aucune méthodologie précise n'ait été définie pour décider de l'octroi de la dotation optionnelle de 20 millions d'euros. Je me permets également de rappeler que nous attendons depuis plus d'un an qu'un nouvel arrêté ministériel relatif aux objectifs de qualité du service universel postal soit pris, alors que les attentes de nos concitoyens sont de plus en plus fortes sur le sujet.

Par ailleurs, sur la mission de contribution à l'aménagement du territoire, lors de l'examen du PLF pour 2021, notre amendement de 66 millions d'euros visant à compenser la baisse des impôts de production avait été définitivement adopté. Cette année, une dotation exceptionnelle de 74 millions d'euros est directement prévue dans le PLF pour compenser l'impact de cette baisse pour l'année 2022, ce qui est satisfaisant.

En ce qui concerne la mission de transport et de distribution de la presse, le Gouvernement a enfin décidé de mettre en oeuvre la réforme recommandée par M. Emmanuel Giannesini, et négociée avec La Poste et les éditeurs de presse. D'un point de vue budgétaire, cela se traduit par un transfert de 62 millions d'euros de crédits vers le programme 180, relatif à la presse et aux médias, alors que la baisse de crédits enregistrée dans le programme 134 est de 71 millions d'euros. Il nous faudra veiller, avec nos collègues de la commission de la culture, à ce que la mise en oeuvre de cette réforme ne masque pas une baisse injustifiée de la compensation de cette mission de service public.

J'en viens à présent au suivi du plan France Très haut débit, qui est entré dans sa phase de mise en oeuvre, après une hausse budgétaire significative en 2020, due aux 240 millions d'euros issus du plan de relance et à une rallonge de 30 millions d'euros que j'avais obtenue, en lien avec la commission des finances, dans le cadre de la loi de finances rectificative. On ne compte pas cette année d'autorisation d'engagement supplémentaire, et il nous faudra suivre avec attention les décaissements des crédits de paiement, qui augmenteront dans les années à venir pour financer les réseaux d'initiative publique (RIP) portés par les collectivités territoriales. Aujourd'hui, les efforts doivent se concentrer sur le déploiement de ces RIP dans les zones moins denses, dont 60 % des locaux, soit 10,3 millions de locaux, doivent encore être raccordés à la fibre optique. Je rappelle que l'ensemble du territoire devra en être équipé d'ici la fin de l'année 2025.

C'est également dans ces zones que les raccordements complexes sont les plus nombreux. Si un budget spécifique de 150 millions d'euros est prévu dans ce PLF, des annonces du Gouvernement sur le sujet sont attendues prochainement et nous devrons y être attentifs car la qualité de service doit être assurée jusqu'au dernier mètre.

L'Arcep, comme la Fédération française des télécoms (FFT), sont confiants quant à l'atteinte des objectifs fixés, le déploiement de la fibre optique sur notre territoire s'étant fortement accéléré, avec plus de 4 millions d'abonnements et plus de 6 millions de lignes déployées par les opérateurs en un an. À ce titre, l'année 2021 est historique. Elle marque en effet un croisement des courbes, le nombre d'abonnés à la fibre optique ayant dépassé celui des abonnés utilisateurs du réseau cuivre, dont l'opérateur historique est Orange. Il est néanmoins indispensable d'assurer une transition jusqu'au dernier abonné, l'extinction progressive du réseau cuivre étant prévue d'ici 2030, et la fermeture commerciale rapide de 13 millions d'adresses étant programmée dès l'année prochaine.

Certes, l'opérateur Orange a pris des engagements supplémentaires, l'Arcep a fixé des objectifs de qualité de service, et le Gouvernement a fait des annonces sur le sujet, mais la stratégie doit encore être largement précisée. À cet égard, j'attire votre attention sur la lenteur du déploiement territorial du plan cuivre annoncé en mai dernier par le Gouvernement, très peu de préfectures départementales ayant mis en place les « comités cuivre » prévus pour permettre d'accompagner la transition.

Enfin, je souhaiterais porter à l'attention de notre commission les difficultés rencontrées par les opérateurs télécoms alternatifs pour accéder aux réseaux et infrastructures, notamment à ceux des sociétés concessionnaires d'autoroutes. Les bons résultats du déploiement de la fibre optique par les opérateurs traditionnels ne doivent pas empêcher les opérateurs alternatifs de jouer un rôle pour accélérer la numérisation des entreprises et la connectivité des collectivités territoriales, deux sujets sur lesquels les marges d'amélioration demeurent importantes. Je suis donc favorable à davantage de transparence en ce qui concerne les difficultés d'accès rencontrées par ces opérateurs et les tarifs pratiqués à leur égard, ainsi qu'à l'organisation, par le Gouvernement et l'Arcep, d'un dialogue structuré sur le sujet.

Enfin, j'ai souhaité m'intéresser au déploiement de la 5G dans notre pays, un an après l'octroi des licences d'utilisation des fréquences les plus hautes aux quatre opérateurs d'envergure nationale. Le déploiement commercial de l'offre 5G est rapide et satisfaisant. Selon les dernières estimations de l'Observatoire du déploiement 5G mis en place par l'Arcep, près de 17 000 sites 5G étaient ouverts commercialement au 30 juin 2021, dont près de 5 000 en bande 3,4-3,8 GHz.

Je me permets toutefois d'attirer votre attention sur la nécessité de concilier une exigence de rapidité du déploiement pour rattraper notre retard au niveau européen, avec une exigence de maîtrise technique de ce déploiement. À cet égard, l'audition de l'Agence nationale des fréquences (ANFR) s'est avérée particulièrement instructive, en particulier sur les risques de brouillage de fréquences, renforcés par le déploiement de la 5G.

Par ailleurs, concernant la répartition territoriale de ce déploiement, ce sont surtout les grands centres urbains qui en bénéficient, ce qui n'est pas une grande surprise. Cela s'explique à la fois par un impératif technique de décongestion des sites 4G, mais également par un souci d'amortissement et de rentabilisation des investissements réalisés par les opérateurs. Afin d'éviter que le déploiement de la 5G ne renforce les inégalités de connectivité dans nos territoires, il est prévu que 25 % des 8 000 sites devant être déployés d'ici 2024, et des 10 500 sites qui doivent l'être d'ici 2025, se situent dans des zones peu denses ou industrielles. L'Arcep, en tant que régulateur, est chargée de faire respecter cette obligation et nous avons, en tant que sénateurs, un rôle à jouer pour informer l'Autorité des difficultés de déploiement rencontrées sur le terrain, par les entreprises, et dans les zones peu denses.

M. Patrick Chaize . - Je voudrais d'abord remercier la rapporteure pour cet exposé précis et complet. Au sujet de La Poste, qui compte quatre missions de service public, nous avons appris il y a quelques jours que l'Arcep avait modifié sa méthodologie de calcul du coût net du maillage territorial. Or, ce changement de méthodologie risque de perturber de façon considérable les équilibres financiers puisque l'on passerait d'un déficit de 230 millions d'euros à un déficit de 330 millions d'euros pour la mission de contribution à l'aménagement du territoire, traduisant ainsi le glissement comptable de 100 millions d'euros depuis la mission de service universel postal, ce qui démontre bien que les quatre missions ne sont pas indépendantes et qu'il faut appréhender les compensations de façon globale. Néanmoins, chaque mission a ses particularités, ses méthodes de contrôle et d'accompagnement. Cela pose un problème de gouvernance et d'organisation, et il serait sans doute intéressant d'insister sur ce point dans le cadre du PLF.

En ce qui concerne le très haut débit, j'observe une attitude relevant du déclaratif et de la timidité. Je regrette le manque de lisibilité, et l'absence d'un engagement politique clair, qui nous permettrait d'envisager l'avenir de façon sereine. La fibre optique doit être déployée d'ici la fin 2025 sur l'ensemble du territoire, et nous continuons d'y croire, même si beaucoup d'élus sont dubitatifs. Par ailleurs, le cuivre doit disparaître avant 2030, et il nous faut préparer des outils d'accompagnement, notamment des outils financiers. Je pense au fonds d'aménagement numérique du territoire (FANT), qui existe depuis plus de dix ans et n'a toujours pas reçu un centime. Ce fonds a intérêt à faire en sorte qu'il y ait une péréquation nationale des tarifs d'accès aux réseaux de communication électronique. Dans ce cas aussi, je regrette que cette année encore, nous n'ayons pas d'information sur le sujet.

Enfin, derrière la 5G se cache un ensemble de technologies qui sont toutes intéressantes prises individuellement, mais qui ne sont pas facilement lisibles. J'ai notamment une inquiétude en ce qui concerne l'avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) sur l'utilisation des fréquences de 26 GHz. En effet, cet avis sur la dernière fréquence de la 5G, qui devrait permettre de développer les objets connectés, n'a toujours pas été rendu, ce qui n'est pas rassurant et n'offre pas un gage de transparence. Il nous faudrait insister pour obtenir cet avis, qui donnerait plus de sérénité au déploiement de cette technologie.

M. Franck Montaugé . - Je voudrais aussi réagir à la question de la 5G, dont le véritable enjeu concerne plus les entreprises que les particuliers. Je rappelle à ce sujet que ces technologies ne seront pas encore toutes déployées avant l'année prochaine, et qu'il faudra donc attendre avant de se faire une idée claire de leur impact sur la compétitivité et la transformation des entreprises. Par ailleurs, il serait intéressant pour notre commission de se pencher sur la bataille qui oppose Gafam et opérateurs de télécommunication, en particulier français, sur le territoire national, notamment sur la question du positionnement par rapport aux futurs data centers qui accompagneront le développement de la 5G, mais aussi sur celle de la récupération du réseau hertzien actuel. Il serait intéressant d'entendre des experts sur ces sujets, afin de nous faire une idée du paysage actuel et de son évolution à venir. Il s'agit là d'un enjeu de souveraineté nationale.

Je voudrais également revenir sur l'initiative « Territoires d'industrie ». En effet, je ne comprends toujours pas la motivation de la nature géographique du critère essentiel permettant de participer à cette démarche, qui exclut ainsi certaines entreprises de la possibilité de bénéficier des aides et de l'accompagnement de l'État. Cela me semble aberrant et contribue à instaurer une inégalité entre des entreprises qui n'ont pas besoin d'affronter cette concurrence en plus des difficultés liées à la conjoncture.

Enfin, sur la question de l'équipement en data centers du territoire, l'État joue un rôle important, ce que la commission d'enquête sur la souveraineté numérique avait bien souligné. Il faudra veiller à ce que ces centres soient opérés par des acteurs nationaux.

Mme Anne-Catherine Loisier , rapporteure pour avis . - Sur la compensation des missions de service public de La Poste, les éléments de calculs sont flous, l'Arcep ne nous a pas précisé le changement de méthodologie pour la mission de contribution à l'aménagement du territoire, et nous n'avons qu'une idée générale de l'avancement de la dotation optionnelle de 20 millions d'euros. Dans mon rapport budgétaire, je demande que le Gouvernement et l'Arcep soient bien plus précis et calent les choses pour le prochain PLF.

Nous avons interrogé l'Arcep sur l'extinction du réseau cuivre, elle s'est dite prête à sanctionner tout manquement avéré, je vous incite à surveiller ce qu'il en est et à saisir l'Arcep si besoin est. Il faut également voir avec le préfet comment fonctionnent les comités « cuivre », car il semble que la plupart ne sont pas mis en place, il faut être vigilants.

J'entends l'alarme lancée par Franck Montaugé, il faut travailler sur le sujet. Je crois aussi que le dispositif visé ne concerne pas seulement les territoires non industriels, mais aussi les territoires qualifiés de « peu denses », attention aux lectures trop restrictives - je l'ai vu sur mon territoire, où j'ai dû intervenir pour faire retenir les dossiers de territoires peu denses.

Enfin, pour l'équipement des data center , j'observe que certains de ces centres sont installés et que des collectivités territoriales peinent à s'y associer, il faut mieux informer et sensibiliser sur les outils disponibles.

Réunie le mardi 23 novembre 2021, la commission a examiné le rapport d'information sur les crédits relatifs au numérique, aux télécommunications et aux postes de la mission « Économie » du projet de loi de finances pour 2022.

M. Franck Montaugé , rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à l'industrie . - Nous avions connu l'année dernière un budget d'exception pour l'industrie. Plus de cinq milliards d'euros avaient été dédiés, pour l'année 2021, au soutien d'urgence, puis à la relance de l'industrie française. Nous avions défendu et porté, collectivement, une certaine ambition en matière de réindustrialisation, de décarbonation et de modernisation.

Les crédits d'urgence et de relance ont globalement rempli leur rôle. Les niveaux d'activité industrielle ont retrouvé un niveau proche de l'avant-crise, la trésorerie des entreprises a été relativement préservée grâce aux prêts garantis par l'État (PGE), et l'impact sur l'emploi a été limité avec une perte de 2 % de l'emploi industriel total sur la période alors que l'activité avait pu chuter jusqu'à 40 %.

Je veux tirer un bref bilan de ces crédits de soutien à l'industrie que nous avons votés l'année dernière. Vous savez combien je suis attaché à ce que nous, parlementaires, effectuions ce travail de suivi et d'évaluation.

Une grande partie des enveloppes de relance industrielle prévues pour 2021 a été consommée au cours de l'année. Certains dispositifs comme les aides à l'investissement dans la chaleur bas carbone des entreprises industrielles, le fonds de modernisation automobile ou aéronautique, ou encore l'investissement dans la numérisation, ont même vu la demande excéder largement les capacités de financement et les montants prévus plutôt pour 2022 ont déjà été débloqués pour 2021.

J'apporterai deux nuances à ce constat.

Premièrement, la seule vitesse de consommation n'est pas un bon indicateur de qualité de la relance. Le comité d'évaluation de la relance estime par exemple que les objectifs de moyen-terme affichés, comme la transformation de l'industrie et la décarbonation, sont passés au second plan. Des projets sans lien avec ces objectifs, voire même en dehors du secteur industriel, ont été financés. Autre exemple : les enveloppes territoriales et nationales ont été instruites sans coordination nationale des critères d'examen, conduisant à des incohérences. La territorialisation promise est encore inaboutie. Enfin, certains dispositifs à destination spécifique des PME n'ont pas eu le succès escompté, comme le guichet pour les petits projets de décarbonation : il faut intensifier les efforts pour susciter l'intérêt des chefs d'entreprises, aider les petites entreprises à monter leurs dossiers, sous peine qu'elles ne soient les laissées pour compte de la reprise.

Deuxièmement, s'il est plutôt de bon augure que les entreprises se soient saisi des dispositifs de relance, attention au « trou d'air » pour 2022. L'épuisement des enveloppes de relance bouleverse quelque peu le calendrier annoncé. Or, l'industrie n'est pas encore tirée d'affaire et la reprise n'est que partielle. Prenons garde à ce qu'un arrêt trop brutal du soutien public ne cause une rechute. Le budget pour 2022 ne comporte pourtant presque aucun ré-abondement sur ces actions qui ont fonctionné : ne faudrait-il pas en tirer les conséquences pour compléter les budgets « ordinaires » ?

Et troisièmement, au regard de la manière si rapide avec laquelle certaines entreprises se sont saisies des dispositifs d'aides que je qualifierai de structurels, je pose la question : auraient-elles été aidées de la même manière sans la crise sanitaire alors que, covid ou pas, la transformation s'impose à elles pour garantir leur compétitivité dans la « transition - compétition » qui est engagée ?

Malgré la reprise relative, l'industrie française reste dans une situation difficile. Elle fait face à quatre grands défis, en sus de la transformation numérique.

Premièrement, deux des secteurs prépondérants de notre industrie sont encore en berne : l'automobile et l'aéronautique. Pour l'aéronautique, la demande reste réduite et le futur est incertain. Pour l'automobile, en sus de l'impérieuse et très complexe obligation de transformation de la chaîne de valeur liée au moteur électrique, une crise d'offre a pris le relais de la pandémie, notamment en raison des pénuries d'intrants essentiels (comme les semi-conducteurs) qui empêchent de retrouver un rythme de croisière. En un an et demi, le prix des matières premières industrielles a augmenté de 36 %, chiffre inédit dans l'histoire récente : 40 % des entreprises françaises connaissent aujourd'hui des difficultés d'offre. Cela renforce nos interrogations sur notre dépendance aux importations et la vulnérabilité de nos capacités de production. Le cumul des difficultés de ces deux filières risque aussi de peser durablement sur notre balance commerciale.

Deuxièmement, la flambée des prix de l'énergie est un sujet de premier ordre, tant pour les ménages que pour les entreprises. Le prix du carbone a été multiplié par deux en un an et demi, et celui de l'électricité par quatre... Cette explosion bouleverse les modèles d'approvisionnement, pèse lourd sur les coûts des entreprises (notamment électro-intensives), voire pour certaines leur fait envisager un arrêt de la production.

Je le dis en ayant en tête les chocs de 1973 et 1979 : prenons garde que cette hausse des coûts de production ne se répercute pas sur le reste de l'économie (c'est-à-dire les secteurs aval), mais aussi sur le pouvoir d'achat des ménages. J'attends de voir l'efficacité du Gouvernement, là-dessus aussi.

Troisièmement, la filière industrielle connait toujours d'importantes difficultés de recrutement : 80 000 postes seraient aujourd'hui à pourvoir, et 44 % des entreprises déclarent peiner à trouver des employés. Bien que les embauches aient fortement repris, la situation reste tendue et pourrait contraindre encore la reprise.

Enfin, il est possible que dans certains cas, les mesures d'urgence et de relance n'aient fait que décaler les difficultés des entreprises. Dans ces cas, on pourrait observer au cours de l'année 2022, avec l'arrêt progressif des soutiens publics, une dégradation des conditions financières des entreprises industrielles, des faillites jusqu'ici évitées, voire certaines fermetures de site comme cela a déjà commencé...

Face à ces défis, quelle réponse apporte le Gouvernement avec ce projet de loi de finances ?

Ce que l'on nous propose est un retour à l'ordinaire, comme si la reprise était acquise.

Les crédits de la mission « Économie » renouent avec la baisse, si l'on exclut les montants dédiés au groupe La Poste et ceux à destination du compte d'affectation spéciale « participations financières de l'État ».

Pas de moyens adaptés, en effectifs supplémentaires notamment, pour les administrations centrales et les équipes déconcentrées, donc pas d'anticipation de la restructuration des filières, des éventuelles faillites et de l'accompagnement des entreprises au moment du débranchement des aides. Pourtant, les opérateurs du budget de l'État (notamment Bpifrance, les réseaux des commissaires aux restructurations et prévention des difficultés ou le comité interministériel aux restructurations industrielles) sont déjà surchargés.

Pas de budget supplémentaire non plus pour mettre en oeuvre les contrats de filière, alors qu'ils joueront un rôle clef dans la transformation de l'industrie.

Pas d'abondement ni de pérennisation des actions du plan de relance qui ont fait leurs preuves et répondent, même hors crise, à de vraies défaillances de marché.

Pas de crédits nouveaux non plus pour financer les actions menées au niveau territorial. De surcroît, comme je l'avais souligné l'année dernière, je ne souscris pas à la logique de zonage géographique de « Territoires d'industrie ». Pourquoi deux entreprises identiques, actives dans la même branche, n'auraient pas le droit aux mêmes aides selon qu'elles sont situées dans telle intercommunalité ou dans telle autre ? Je ne suis pas convaincu par les arguments du Gouvernement sur ce point.

Je ne vois aucune politique cohérente et concrète en matière de formation des personnels, alors que la mutation sectorielle de l'industrie entraîne des destructions d'emplois et des créations dans d'autres filières. La réforme de l'assurance chômage n'aura aucun effet sur ce point. Il faut miser gros sur le volet compétences nouvelles et formation. Il est fondamental pour l'économie, sa dimension sociale et tout autant environnementale. C'est la condition pour l'attractivité de notre industrie, la transmission des savoir-faire et la base de compétences nécessaire à la réindustrialisation.

À la place de ces actions nécessaires - mais certes moins attrayantes du point de vue de la communication - le Gouvernement nous présente un énième grand plan. Depuis 2017, c'est donc le quatrième : Programme d'investissement d'avenir (PIA) 3 puis 4, France Relance, et maintenant France 2030, pour un montant total de crédits budgétaires de plus de 100 milliards d'euros, en grande partie débudgétisés. On n'attend même plus que l'un soit épuisé, ou même évalué, pour lancer le suivant. Ces divers plans sont ensuite librement re-ventilés, réorientés, redéployés, au gré des opportunités budgétaires et du calendrier politique du moment. La Cour des comptes ne cesse d'en souligner les défaillances, mais l'on continue : pourquoi se priver en 2022 d'un nouveau chèque en blanc de 34 milliards d'euros, amené par amendement à l'Assemblée nationale sans étude d'impact ? Je note que huit des dix actions indicatives de France 2030 sont déjà traitées dans le PIA 4, annoncé il y a moins d'un an et qui n'est pas encore déployé... Ces choix traduisent au mieux un manque d'anticipation préoccupant, qui conduit à présenter chaque année de nouveaux plans plus gros encore, pour financer toujours les mêmes secteurs ; au pire, un mépris du principe de sincérité budgétaire, qui permet au Gouvernement de se constituer une réserve de dépenses en période pré-électorale. Notons d'ailleurs qu'une révision de ce plan France 2030 est prévue dès juin prochain...

Je ne retrouve pas l'ambition qui devrait être portée par notre pays en matière industrielle. L'assouplissement des règles d'aides d'État et le montant colossal de la relance ne doivent pas faire tourner les têtes : avant tout, il faut une vision stratégique pour la réindustrialisation - loin des seules « relocalisations vitrines », avec un effort global de compétitivité - et entamer de manière proactive la transformation des filières. L'innovation est un levier prépondérant, mais n'oublions pas l'accompagnement de terrain et les dispositifs d'aides à l'investissement.

Je souhaiterais enfin aborder la compensation carbone. Je l'ai dit, la flambée des coûts de l'énergie remet en question le modèle d'approvisionnement énergétique de notre industrie. Elle peut même désinciter certains à investir dans l'électrification de certaines branches, ce qui est pourtant vecteur de décarbonation.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement pour un versement anticipé, chaque année, d'une partie de la compensation carbone aux industries électro-intensives. C'est une bonne chose, qui soulagera cette année les entreprises des filières concernées, mais ce n'est qu'une rustine d'urgence.

Là aussi, il faut voir plus loin : peser sur les discussions au niveau européen, pour que la France dispose d'un retour sur investissement de sa production nucléaire et plus largement de son mix énergétique, et pour garantir une compétitivité durable, au sens du développement durable, de notre industrie. Il faut aussi accélérer la mise en place du mécanisme d'inclusion carbone aux frontières, pour casser la spirale de la désindustrialisation couplée à la dégradation de notre empreinte carbone globale. Surtout, il faut amplifier l'investissement dans le verdissement - je préfère d'ailleurs parler de durabilité - de l'industrie française.

Pourtant, le comité d'évaluation du plan de relance estime insuffisant l'impact environnemental des mesures de relance ; et le budget pour 2022 ne reprend pas les recommandations du rapport récent du conseil général de l'économie (CGE) sur la décarbonation de l'industrie, c'est regrettable.

En conclusion, j'estime que ce budget pour 2022 est un budget de retour à l'ordinaire qui manque d'ambition en matière de transformation stratégique durable de l'industrie française.

Le Gouvernement a-t-il tiré tous les enseignements de la mise en oeuvre du plan de relance, plutôt positive, et des évènements récents, comme celui des prix de l'énergie et du carbone ou celui des intrants stratégiques importés qui viennent perturber considérablement la donne nationale et internationale ?

Notre commission se ralliera à cette idée que, dans les années à venir, la politique industrielle française doit être au coeur du projet national refondateur que constitue la transition du modèle énergétique, environnemental et social de la France. Pas grand-chose dans ce budget 2022 pour s'en convaincre. Et surtout pas la politique des grandes annonces actuelles qui renoue ou poursuit celles des décennies passées dont nous ne savons que trop ce qu'il en est advenu.

Vous me permettrez donc de vous dire ma circonspection et mon inquiétude après l'examen attentif de ce budget 2022.

M. Michel Bonnus . - La semaine dernière en audition, le ministre Bruno Le Maire nous a dit qu'il souhaitait un effort sur les salaires, tout en nous demandant de ne pas nous projeter à trois mois, tant le contexte était incertain. Je trouve que c'est contradictoire et un peu court, de parler des salaires alors qu'on ne sait pas ce qui va se passer dans quelques semaines, et alors même qu'on se souvient ce qui s'est passé ces dernières années dans notre pays sur le plan social - je tenais à le dire, parce que cette attitude a quelque chose de frustrant, voire dangereux.

Mme Valérie Létard . - Face à la transition majeure que nous vivons, qui est numérique, technologique et climatique, soit nous gérons les choses au coup par coup, au gré des accidents - et l'élue du territoire d'implantation d'Ascoval que je suis, sait ce qu'il en est -, soit on définit une stratégie pour anticiper, plutôt que subir. Les outils nouveaux ne manquent pas, avec le fonds friches en particulier, mais si de l'autre côté le Gouvernement enlève leurs moyens aux intercommunalités, en particulier via la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), il réduit leur rôle de cofinancement, qui est indispensable, ce qui revient à empêcher d'une main ce qu'on propose de l'autre.

Ensuite, le Gouvernement trouve une solution d'urgence pour les entreprises électro-intensives, mais le problème demeure. Aussi faut-il élargir la recherche de solution : peut-on renégocier avec l'Europe, pour permettre un accès à l'énergie à un prix raisonnable pour les industries électro-intensives, afin qu'elles puissent conserver leur compétitivité ?

Enfin, s'agissant de la taxe carbone, qui est un levier déterminant pour agir : que compte faire le Gouvernement pour qu'on anticipe, plutôt qu'on ne subisse les évolutions ?

Mme Florence Blatrix Contat . - Je partage cette analyse des défis et des enjeux pour notre industrie, et je crois également que nous avons besoin d'une ambition forte en matière industrielle. La question du numérique a été évoquée, elle est décisive et nous devons accompagner nos entreprises industrielles dans la transition numérique, pour ne pas renoncer à notre souveraineté.

Notre commerce extérieur est en berne, notre déficit s'est accru lourdement ces dernières années. Business France, qui promeut l'attractivité de la France, atteint ses objectifs et doit redéfinir prochainement sa convention pluriannuelle d'objectifs et de moyens : peut-être est-ce l'occasion de réfléchir aux façons dont nous pourrions améliorer la présentation et la vente de nos produits à l'étranger.

Quant à la protection des consommateurs, la DGCCRF voit ses moyens réduits, les associations de consommateurs nous disent que leurs moyens se réduisent également, cela tombe mal quand les prix augmentent : le Gouvernement doit revoir sa copie dans ce secteur.

M. Daniel Gremillet . - . Des pays prennent des décisions qui vont contre la COP26, la Chine par exemple a bloqué les prix de l'énergie pour retrouver sa compétitivité, c'est que la bataille économique fait rage. Et il y a l'effet domino : que va-t-il se passer pour les entreprises qui n'ont pas été choisies dans le plan de relance, alors qu'elles sont sur les mêmes marchés ? Le prix de l'énergie va avoir des conséquences sur la vie en général, sur les consommateurs, il faut mesurer ce qui arrive, nous devons avoir cette lucidité.

Mme Martine Berthet . - Une entreprise historique de mon territoire m'a alertée sur le fait qu'elle a vu son coût de l'énergie tripler, sans capacité de négocier. J'aimerais signaler aussi un autre problème, qui a trait à la réglementation sur les taux de poussières résiduelles dans les locaux industriels : un décret du Premier ministre est en préparation, il était prévu que les industriels auraient deux ans pour s'adapter aux nouvelles règles, il semble que le délai soit ramené à une année seulement, ce que les industriels disent insuffisant : est-ce le cas ? Cette réglementation est utile, puisqu'elle protège la santé des salariés, mais il ne faut pas que les conditions d'application alourdissent encore les conditions faites à nos industries
- d'autant que cette nouvelle norme n'est pas imposée à l'échelle européenne.

Mme Sylviane Noël . - Je veux souligner les difficultés de l'aéronautique et de l'automobile, ces deux secteurs doivent pouvoir bénéficier du mécanisme d'activité partielle de longue durée, au-delà des deux ans que nous venons de passer, car leur main d'oeuvre est difficile à fidéliser et la période est particulièrement sensible.

M. Franck Montaugé , rapporteur pour avis . - Merci pour toutes ces remarques et pour vos questions - je ne peux que vous recommander la lecture de mon rapport, où vous trouverez les réponses aux questions que vous me posez... L'effet domino crée un risque réel, c'est aussi pourquoi j'appelle à la définition d'une véritable stratégie en matière industrielle.

Pour terminer, je précise que si je n'ai pas assisté à l'audition mercredi dernier du ministre de l'économie, c'est pour un problème de santé ; je tenais à ce que vous le sachiez, par respect pour chacune et chacun d'entre vous et en considération de la conception qui est la mienne de notre devoir à l'égard des travaux du Sénat et de notre commission.

Mme Dominique Estrosi Sassone , présidente . - Je rappelle que nous avons réservé notre vote à la fin de l'examen de toutes les missions.

Examen en commission
(Mercredi 24 novembre 2021)

Mme Sophie Primas , présidente . - Mes chers collègues, à la suite du rejet de la première partie du projet de loi de finances pour 2022, les avis budgétaires portant sur les missions de la seconde partie du PLF sont devenus sans objet et ne seront pas discutés en séance publique.

Notre commission avait décidé de réserver son vote et de surseoir à se prononcer lors de la présentation des rapports pour avis successifs. Afin de tirer les conséquences de ce choix, il nous revient désormais d'autoriser formellement la publication sous forme de rapports d'information des différents tomes correspondant aux missions budgétaires relevant de notre commission.

Il n'y a pas d'opposition ?

Je vous remercie.

La commission des affaires économiques autorise la publication de ces rapports d'information.

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