N° 200

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2021

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur la mission « Agriculture , alimentation , forêt et affaires rurales »
du projet de loi de finances pour 2022,

Par M. Laurent DUPLOMB, Mme Françoise FÉRAT et M. Jean-Claude TISSOT,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : Mme Sophie Primas , présidente ; M. Alain Chatillon, Mme Dominique Estrosi  Sassone, M. Patrick Chaize, Mme Viviane Artigalas, M. Franck Montaugé, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-Pierre Moga, Bernard Buis, Fabien Gay, Henri Cabanel, Franck Menonville, Joël Labbé , vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, MM. Rémi Cardon, Pierre Louault , secrétaires ; MM. Serge Babary, Jean-Pierre Bansard, Mmes Martine Berthet, Florence Blatrix Contat, MM. Michel Bonnus, Denis Bouad, Yves Bouloux, Jean-Marc Boyer, Alain Cadec, Mme Anne Chain-Larché, M. Patrick Chauvet, Mme Marie-Christine Chauvin, M. Pierre Cuypers, Mmes Marie Evrard, Françoise Férat, Catherine Fournier, M. Daniel Gremillet, Mme Micheline Jacques, M. Jean-Marie Janssens, Mmes Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Claude Malhuret, Serge Mérillou, Jean-Jacques Michau, Mme Guylène Pantel, MM. Sebastien Pla, Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Mme Patricia Schillinger, MM. Laurent Somon, Jean-Claude Tissot .

L'ESSENTIEL

En dépit d'un budget « agricole » de la « Ferme France » en forte augmentation, comme pour de nombreuses politiques publiques, grâce à des crédits budgétaires accordés en dehors du cadre de la mission, le Gouvernement est parvenu à commettre, lors de l'élaboration de ce projet de loi de finances, cinq erreurs majeures en matière agricole :

i) ne pas pérenniser le dispositif du TO-DE, garant de la compétitivité de nombreuses filières, seul outil durablement efficace pour infléchir la tendance à la consommation de produits importés ;

ii) sacrifier le budget des stages tutorés en écoles vétérinaires, en dépit de leur efficacité contre la désertification vétérinaire ;

iii) s'abstenir de réagir à la flambée du cours des engrais, malgré l'obligation votée par le Parlement de mettre en place un plan Eco'Azot ;

iv) continuer de ponctionner les crédits du Casdar alors que ces taxes agricoles financent l'innovation agricole dont la France a plus que jamais besoin ;

v) ignorer les intérêts de communes forestières dans la politique menée actuellement pour rénover la forêt française.

La commission des affaires économiques propose de corriger le tir.

Le budget de la MAAFAR, après examen par l'Assemblée nationale, est proposé à hauteur de 3,0 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) pour 2022, en augmentation de 5 millions en AE et en recul de 32 millions d'euros en CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. Les crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (CASDAR) sont eux stables à 126 millions d'euros, pérennisant le recul de 10 millions d'euros par rapport à 2020 voté l'année dernière.

I. UN BUDGET AGRICOLE STABLE POUR LA MISSION, MAIS EN FORTE PROGRESSION AILLEURS

A. DEPUIS 5 ANS, UN BUDGET DES AGRICULTEURS SE TRANSFORMANT PEU À PEU EN BUDGET DU MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE

Les rapporteurs regrettent la transformation progressive d'un budget d'action agricole, qui autrefois constituait un vrai levier d'action publique en faveur des exploitants, en un simple budget de gestion de l'agriculture par la rue de Varenne . Les outils agricoles sont aujourd'hui disséminés un peu partout dans le budget, sans aucune lisibilité globale, et relèguent la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales au rang de véhicule secondaire. Cela se traduit non seulement par l'absence de volonté gouvernementale de sincériser le budget depuis quelques années, ce qu'il faut regretter, mais aussi par la quasi-stabilité des crédits alloués.

Si le quinquennat budgétaire qui vient de s'écouler s'est traduit par un recul des crédits du budget prévisionnel annuel de l'agriculture à hauteur de près de 300 millions d'euros en autorisations d'engagement, il s'agit d'un affichage trompeur puisque, dans les faits, le quinquennat s'est traduit par une relative stabilité des crédits budgétaires de la mission alloués à l'agriculture 1 ( * ) .

In fine , les seules mesures budgétairement significatives ces cinq dernières années sont de deux ordres :

i) Des réponses exigées par une situation s'imposant de fait (c'est le cas du recrutement d'agents supplémentaires pour effectuer des contrôles sanitaires en raison du Brexit ou de la hausse tendancielle des indemnisations liées aux épidémies et épizooties). Cette situation traduit, sans doute, l'absence de réflexion stratégique globale sur le budget agricole de la France, préférant une gestion au jour le jour du système, se traduisant par une loi de finances initiale peu sincère, à un programme global et ambitieux pour notre agriculture .

ii) Une hausse structurelle des dépenses informatiques et immobilières du ministère . S'ils ne remettent pas en cause la nécessité des investissements informatiques du ministère, souvent liés à une instabilité normative, les rapporteurs s'interrogent sur la tendance de fond que connaît le budget de la mission qui revient à remplacer petit à petit les crédits dédiés aux agriculteurs par des crédits dédiés au ministère de l'agriculture .


* 1 Les deux principaux mouvements expliquant le recul des crédits relèvent davantage d'un jeu d'écriture. En effet, la volonté de remplacer les exonérations de cotisations pour les employeurs de travailleurs saisonniers et de demandeurs d'emploi (TO-DE) dans le domaine agricole par les exonérations générales financées par la sécurité sociale s'est traduite par une débudgétisation vers le champ de la sécurité sociale d'une partie du coût du dispositif pour la mission (350 millions d'euros). De même, le recul de la réserve de précaution de 110 millions d'euros par rapport à son niveau initial, s'il porte une atteinte significative à la sincérité initiale du budget, ne signifie pas que les crédits effectivement engagés chaque année pour l'agriculture reculent, dans la mesure où ils sont débloqués chaque année en cours de gestion pour couvrir effectivement les apurements communautaires et les indemnisations liées aux calamités agricoles.

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