II. L'ÉLABORATION DE FEUILLES DE ROUTES POUR REMÉDIER À CES DÉPASSEMENTS : UN EXERCICE NÉCESSAIRE MAIS INSUFFISANT ?

A. EN RÉPONSE À L'INJONCTION DU CONSEIL D'ETAT, LE GOUVERNEMENT A PRIVILÉGIÉ L'ÉLABORATION DE FEUILLES DE ROUTE « OPÉRATIONNELLES ET MULTI-PARTENARIALES »

À la suite de la décision du Conseil d'État, le Gouvernement a annoncé, dès juillet 2017, l'élaboration par les préfets de région d'ici fin mars 2018 « en partenariat étroit avec les collectivités territoriales, de feuilles de route opérationnelles sur la qualité de l'air » 43 ( * ) afin de définir des actions locales de court terme permettant de ramener les concentrations de polluants en dessous des seuils autorisés dans chacune des zones concernées.

L'élaboration des feuilles de route a concerné 14 zones, réparties dans six régions :

- Région Auvergne-Rhône Alpes : Lyon, Grenoble, Saint-Etienne, Vallée de l'Arve et Valence ;

- Région Grand Est : Reims et Strasbourg ;

- Région Ile-de-France ;

- Région Martinique ;

- Région Occitanie : Montpellier et Toulouse ;

Région Provence-Alpes-Côte d'Azur : Aix-Marseille, Nice et Toulon.

En complément des feuilles de route, et afin de répondre aux procédures précontentieuses européennes, le Gouvernement a mis en avant l'adoption de nouvelles mesures , en particulier le PREPA adopté en 2017, et a présenté à la Commission européenne le 13 février 2018 un plan d'actions complémentaire .

Plan d'action de réduction de la pollution de l'air
présenté à la Commission européenne le 13 février 2018

Mesures relatives aux émissions des véhicules

- La convergence de la fiscalité essence et gazole se poursuit. La loi de finances 2018 permettra la convergence en 4 ans ;

- Les aides au développement des véhicules électriques : création de 20.000 infrastructures de recharge au titre du Programme des investissements d'avenir (PIA) ;

- Le renforcement de la prime à la conversion, élargie en 2018 (objectif de remplacement de plus de 100 000 véhicules par an par des véhicules faiblement émetteurs) ;

- La délivrance de certificats d'économie d'énergie (CEE) pour le covoiturage, les wagons d'autoroute ferroviaire, les lubrifiants économiseurs d'énergie pour véhicules légers et les unités de transport combiné rail-route ;

- Afin d'accompagner le verdissement des flottes, notamment des poids lourds, le dispositif de suramortissement  pour l'achat ou la location de poids lourds de plus de 3,5 tonnes au GNV ou au bioGNV a été adopté dans la loi de finances 2018 et sera prolongé. De même, la fiscalité du GNV a été gelée, afin de préserver la compétitivité de cette énergie face au diesel. En complément, dans le cadre du programme des investissements d'avenir, il est prévu de déployer 100 stations d'alimentation en GNV pour les poids lourds ;

- Le contrôle technique sur les véhicules sera renforcé pour les poids lourds et les véhicules légers. Les contrôles en bord de route seront approfondis pour rechercher les fraudes aux différents dispositifs antipollution, avec des sanctions.

Mesures relatives à la circulation

- L'instauration de zones à circulation restreinte qui permettent de lutter contre la pollution de fond et le déploiement de vignettes « Crit'air » pour identifier les véhicules en fonction de leur niveau d'émissions polluantes. Les collectivités d'Île de France ont notamment prévu de mettre en place une zone à circulation restreinte dans le périmètre de l'autoroute A86 qui permettrait de réduire de 20 à 25 % les émissions de PM 10 sur les axes routiers ;

- La réduction à 80 km/h de la vitesse maximale de circulation sur certaines routes.

Mesures destinées à réduire les émissions liées au chauffage

- La mise en place du « fonds air », pour accompagner les collectivités volontaires situées dans les zones les plus polluées, à soutenir le renouvellement des appareils de chauffage individuels au bois non performants sur leur territoire ;

- Plusieurs dispositifs, tels que le crédit d'impôt « transition énergétique » (CITE), la TVA à taux réduit, les éco-prêts à taux zéro contribueront également à la réduction des émissions de polluants atmosphériques en soutenant les actions de rénovation énergétique des logements et sont reconduits en 2018 ;

- Un fonds « air mobilité » de 100 M€ sur 5 ans sera mobilisé par l'ADEME dès 2018 pour financer des actions en faveur de la qualité de l'air (dont le renouvellement des appareils de chauffage au bois peu performants cité ci-dessus, et des aides aux mobilités propres).

Source : communiqué de presse du ministre de la transition écologique et solidaire du 13 février 2018.

S'agissant des plans spécifiques à chaque agglomération caractérisée par des dépassements, le calendrier d'élaboration des feuilles de route a été déterminé par l'échéance du 31 mars 2018 , fixée par le Conseil d'État dans son injonction.

Le processus a été concrètement lancé à partir d'octobre 2017, à l'occasion d'une réunion du ministre de la transition écologique et solidaire avec les préfets des régions concernées. La concertation avec les collectivités territoriales a débuté en novembre et s'est appuyé sur un cycle d'échanges et de réunions, alimenté par des questionnaires adressés aux différentes parties prenantes dans chaque territoire, afin de formaliser des propositions. Ces documents ont ensuite été présentés au Conseil national de l'air (CNA) 44 ( * ) lors de sa réunion du 20 mars 2018, avant leur transmission à la Commission européenne.

En termes de méthode, le Gouvernement a souhaité proposer des feuilles de route « multi-partenariales » , l'exercice restant toutefois piloté par les préfets et les services des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), pour assurer la cohérence, la coordination et l'homogénéité des mesures. Lors de cette concertation, les collectivités territoriales et leurs groupements - en particulier les métropoles - ont été mobilisés en priorité.

Quant au contenu, il a été décidé que ces feuilles de route viendraient en complément des PPA existants , sans appeler de révision directe de ces derniers 45 ( * ) . Il a donc été recommandé de s'appuyer sur l'existant, et de privilégier « des actions concrètes de court terme permettant d'aller plus loin et plus vite » 46 ( * ) , sans mener d'études complémentaires .


* 43 Communiqué commun du ministre de la transition écologique et solidaire et de la ministre de la santé sur la qualité de l'air, 13 juillet 2017.

* 44 Prévu aux articles D. 221-16 à D. 221-22 du code de l'environnement, le CNA est un organisme consultatif pouvant être saisi pour avis par le ministre chargé de l'environnement de toutes les questions relatives à la lutte contre la pollution de l'air et à l'amélioration de la qualité de l'air. Il est composé de six collèges, visant à représenter la diversité des parties prenantes à la qualité de l'air.

* 45 La décision du Conseil d'État du 12 juillet 2017 se fonde notamment sur le caractère insuffisant des PPA, eu égard à la persistance des dépassements en matière de particules fines et de dioxyde d'azote, pour enjoindre le Gouvernement à prendre des mesures supplémentaires.

* 46 Communiqué du ministre de la transition écologique et solidaire, 31 octobre 2017.

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