Conclusion

Brigitte Gonthier-Maurin ,
vice-présidente de la délégation aux droits des femmes
(sénatrice des Hauts-de-Seine, groupe Communiste, Républicain et Citoyen)

Madame la présidente,

Mesdames les agricultrices,

Mes chers collègues,

Mesdames, Messieurs,

Je crois que vous serez d'accord avec moi pour dire que nous avons passé un moment très riche et très stimulant pour nos travaux à venir sur les agricultrices. Nous remercions très chaleureusement toutes celles qui, par leurs témoignages, nous ont fait partager cet après-midi leur passion, leur engagement et, j'ajoute, leurs attentes, car nous avons entendu vos appels.

À la fin de ce colloque, voici les mots que personnellement je retiendrai de nos échanges. D'abord, il y en a de positifs : les mots « défi », « passion », « courage », « volonté », « engagement », « audace », « innovation », « lien », « territoire ».

Malheureusement, sur un mode moins optimiste, il y a, comme souvent quand il est question de femmes, les mots : « préjugés », « pénibilité », « rudesse », « invisibilité ». Le mot « danger » même a été prononcé par l'une d'entre vous. J'y ajouterai, si vous le permettez, le mot « détresse », tant l'écart peut se révéler important entre le sens de l'engagement - donner à l'humanité les moyens de se nourrir - et la difficulté de l'exercice du métier.

Finalement, ce sont presque toujours les mêmes mots que l'on retrouve lorsque l'on échange sur des métiers ou des fonctions encore exercés par une forte majorité d'hommes, et où les femmes doivent conquérir leur place et lutter pour faire reconnaître leurs apports.

Nous l'avons vu à bien des reprises, à la délégation aux droits des femmes : dans ces secteurs où l'égalité n'est pas encore acquise, les femmes sont passionnées, courageuses, volontaires et engagées contre les stéréotypes, même si c'est un combat difficile à mener, comme notre présidente Chantal Jouanno nous l'a fait observer dans son introduction.

Aujourd'hui, nous avons eu la confirmation que les femmes apportent beaucoup à l'agriculture et qu'elles sont en quelque sorte l'avenir de ces métiers.

Nous pouvons dire aussi que les innovations que les femmes encouragent dans la manière d'exercer la profession agricole, par exemple pour une meilleure articulation des temps personnels et professionnels, et pour produire autrement dans un contexte d'exigence de transition écologique, sont souvent des progrès pour tous, hommes et femmes. Vous l'avez toutes dit, en réalité, et ce constat n'est pas propre à l'agriculture !

Nous avons aussi eu la confirmation que des obstacles demeurent sur leur chemin.

Parmi les premiers progrès à promouvoir - et que nous aurons intérêt à aider à promouvoir - il y a, à mon sens, et vous l'avez dit, la présence des femmes dans les instances dirigeantes du monde agricole : syndicats, coopératives, chambres d'agriculture et associations, car là où il y a des femmes, les choses bougent !

J'ai été frappée d'entendre que l'élection de femmes au bureau de la Chambre d'agriculture des Ardennes a eu lieu pour la première fois en 2013 et a été considérée alors comme une révolution. Il faut donc faire encore beaucoup de révolutions...

Je pense que Christine Valentin, présidente de la Chambre d'agriculture de Lozère, et Anne-Claire Vial, présidente de la Chambre d'agriculture de la Drôme, que nous espérons rencontrer dans les prochaines semaines, ne me détromperont pas.

S'il y a vraiment une évolution à encourager, c'est bien celle-là, car une loi de la sociologie nous apprend qu'une catégorie ne peut influencer une structure que si elle représente au moins un tiers de son effectif global.

Je vous rassure, mesdames, au Sénat, avec un quart de sénatrices, nous avons, nous aussi, du chemin à parcourir pour faire entendre notre voix.

J'espère que le prochain renouvellement du Sénat, en septembre 2017, sera l'occasion d'une progression significative des femmes dans nos instances.

Vous nous trouverez donc à vos côtés pour améliorer votre visibilité dans les instances dirigeantes de votre profession.

Un mot sur le projet de travail auquel la délégation aux droits des femmes se consacrera jusqu'au mois de juillet. La réflexion que nous avons commencée aujourd'hui, grâce à vous toutes, devrait prendre la forme d'un rapport d'information de la délégation.

Signe de notre intérêt unanime pour les questions relatives aux agricultrices, ce rapport comptera un ou une signataire par groupe politique représenté au Sénat 11 ( * ) . Tout l'éventail politique y contribuera. Je peux vous affirmer que cette méthode est source de consensus, fort utile lorsque nous examinons des lois ensuite.

Il nous a semblé plus que souhaitable, à la veille d'une nouvelle mandature, que la délégation aux droits des femmes soit force de propositions dans ce domaine.

Pour préparer ce travail, nous allons nous atteler à des sujets qui n'avaient pas tout-à-fait leur place aujourd'hui, en raison de leur particulière technicité et aussi parce que ce sont des sujets en soi.

Je veux parler bien sûr des questions sociales, que vous avez été fort nombreuses à aborder, et bien sûr surtout celle des retraites, dont on sait qu'elles sont particulièrement basses pour les agricultrices. On l'a entendu aussi, la question de la sécurisation des revenus pour vivre dignement et les questions de santé devront être abordées.

Les questions liées au statut juridique sont elles aussi très importantes, car il semble que beaucoup trop de femmes encore travaillent dans l'agriculture sans statut véritable.

Je pense aussi à l'enseignement agricole - vous savez que j'ai un engagement tout particulier s'agissant de l'enseignement agricole public - et à la formation continue, décisive pour finaliser un projet d'installation ou pour faire évoluer une exploitation. Les jeunes filles sont nombreuses dans les formations professionnelles mais, hélas, elles sont là-aussi victimes des stéréotypes dans leur répartition entre les différents secteurs d'activité.

Notre rapport sera certainement l'occasion de mieux faire connaître la contribution des femmes à notre agriculture et le dynamisme que leurs initiatives apportent à la vie rurale.

Nous espérons aussi que notre travail permettra de porter des propositions qui contribueront à faire évoluer les choses dans le bon sens au cours de la prochaine législature.

Pour cela, nous avons besoin de rassembler le plus possible de témoignages. Nous avons d'ailleurs déjà reçu - j'en ai cité une partie au début de mon intervention - des témoignages écrits. Il faut que leurs auteurs sachent que ces témoignages nous ont émus et qu'ils nous incitent à nous engager pour que les choses bougent.

Vous voyez sur l'écran apparaître l'adresse courriel de la délégation aux droits des femmes. Mes collèges et moi-même, de la délégation aux droits des femmes, de tous les groupes, nous vous invitons à nous écrire pour nous faire part de vos témoignages et propositions à l'adresse suivante : delegation-femmes@senat.fr

Nous vous donnons donc rendez-vous l'été prochain pour échanger sur notre travail. Je vous remercie de votre écoute. (Applaudissements.)


* 11 Ce groupe de travail est constitué de : Annick Billon (UDI-UC), Corinne Bouchoux (Écologiste), Brigitte Gonthier-Maurin (CRC), Françoise Laborde (RDSE), Didier Mandelli (Les Républicains) et Marie-Pierre Monier (Socialiste et républicain).

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