Laurence Rossignol, ministre des Familles, de l'Enfance et des Droits des Femmes

Mesdames les sénatrices,

Messieurs les sénateurs,

Madame la présidente du Planning familial ,

Madame Neuwirth,

Mesdames, Messieurs,

C'est un moment émouvant que nous vivons aujourd'hui, car cette célébration, avec un peu d'avance, du cinquantième anniversaire de la loi Neuwirth nous donne l'occasion d'évoquer le parcours d'émancipation qui a été le nôtre depuis cinquante ans. Elle nous permet aussi de rappeler le chemin parcouru pour faire progresser les droits des femmes.

Véronique Séhier vient de le souligner : c'est, bien sûr, l'engagement des femmes et les combats qu'elles ont menés pour conquérir leurs droits qui ont rendu possibles les avancées que nous avons connues dans ce domaine.

Mais si les droits des femmes ont progressé, c'est aussi parce que celles qui luttaient pour ces conquêtes ont rencontré des hommes qui ont été des compagnons de route, comme on le disait il y a quelques années, des sympathisants des causes des femmes.

Je crois que, pour faire un parallèle, il y a des hommes qui méritent d'être qualifiés de « Justes pour la cause des femmes ». Comme il y a eu des Justes pour les Juifs, il y des Justes pour les femmes, et Lucien Neuwirth en fait partie.

Ils sont finalement peu nombreux, les hommes qui ont porté avec autant d'obstination et d'audace la cause des femmes !

Ce timbre à l'effigie de Lucien Neuwirth est un joli symbole et je voudrais en remercier chaleureusement les représentants de La Poste qui sont présents ici. En tant que ministre des droits des femmes et en tant qu'ancienne sénatrice, c'est pour moi un grand plaisir d'être à vos côtés cet après-midi pour découvrir ce timbre.

Cette cérémonie nous rappelle le cinquantième anniversaire d'une loi qui a révolutionné la vie, mais qui a aussi permis la promotion de la contraception - car c'est aussi cela, la loi Neuwirth, ne l'oublions pas.

Ce timbre permettra également de faire voyager les droits des femmes et j'espère que, malgré le développement des courriers électroniques, il ira partout : aux États-Unis, en Russie, en Iran, partout où des femmes n'ont pas accès aux droits sexuels et reproductifs, partout où la menace d'un retour en arrière n'a jamais été aussi forte.

Que ce timbre soit le petit message que nous envoyons aujourd'hui sur toute la planète pour poursuivre le combat de Lucien Neuwirth en défendant, partout où ils sont menacés, les droits des femmes.

Quand, comme vous, j'ai relu les arguments des opposants à la loi Neuwirth qui se sont exprimés dans les débats parlementaires de l'époque, je me suis dit que ce n'était pas seulement la fécondité des femmes qui était en jeu, mais bien, en réalité, leur sexualité.

Quelle obsession, quelle obstination séculaire des civilisations - et, souvent, des religions -, à contrôler le corps des femmes, leur sexualité, et à refuser aux femmes la contraception et l'avortement, avec finalement, c'est vraiment frappant, les mêmes arguments !

Lucien Neuwirth, au moment où il a porté la loi sur la contraception, a fait l'objet de la même haine, de la même violence et du même opprobre que ceux que Simone Veil subira quelques années plus tard, en défendant le droit à l'interruption volontaire de grossesse.

Il y a trois jours, c'était la Journée internationale de lutte contre les mutilations génitales faites aux femmes. Lors d'un colloque auquel participaient des sociologues des pays les plus concernés revenait cette question : comment les hommes peuvent-ils être aussi avides du contrôle de la sexualité des femmes ? Car finalement, les mutilations génitales n'ont comme seule finalité que celle d'empêcher les femmes d'avoir une sexualité fondée sur le désir, le plaisir, une sexualité propre et autonome.

C'est en cela que la loi sur la contraception n'est pas seulement une loi sur les techniques permettant la maîtrise de la fécondité. C'est tout simplement une loi de liberté pour les femmes !

De cela, nous sommes infiniment reconnaissantes à toutes celles et ceux qui ont mené ce combat et qui savaient, en le menant, que lutter pour la dépénalisation de la contraception était aussi un combat pour la liberté et pour les droits des femmes.

C'est ce combat qui nous a donné la modernité, comme l'ont relevé les oratrices qui m'ont précédée. Cette modernité qui nous permet aujourd'hui d'être ici, parlementaires, sénatrices, plus nombreuses. Car vous êtes ici, toutes, parce que vous êtes en droit de décider librement de votre destin.

Sans les droits sexuels et reproductifs, sans la maîtrise de la fécondité, il n'y a aucune liberté pour les femmes, aucune égalité possible entre les femmes et les hommes.

C'est aujourd'hui un sujet majeur sur la planète, car jamais nous n'avons vécu une telle offensive, une offensive aussi organisée contre ces droits.

Je vais régulièrement à l'ONU et j'y observe à chaque fois à quel point cette offensive, dont les femmes sont la cible, est construite et pensée dans le cadre de véritables projets politiques.

Aux États-Unis, le droit à l'avortement est remis en cause. En Russie, cette semaine, le président Poutine a signé une loi dépénalisant les violences envers les femmes.

C'est en fait un seul et même sujet qui est en jeu : le droit des femmes à disposer de leur corps, leur droit à l'autonomie, leur protection contre les violences qu'elles subissent partout dans le monde.

Merci donc une nouvelle fois à La Poste pour ce beau timbre.

Qu'il voyage loin et qu'il porte ce message partout sur la planète : les femmes sont solidaires.

Je vous remercie.

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