N° 322

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 janvier 2016

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1) sur le programme de travail de la Commission européenne pour 2016 ,

Par MM. Jean BIZET et Simon SUTOUR,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Bizet, président ; MM. Michel Billout, Michel Delebarre, Jean-Paul Emorine, André Gattolin, Mme Fabienne Keller, MM Yves Pozzo di Borgo, André Reichardt, Jean-Claude Requier, Simon Sutour, Richard Yung, vice-présidents ; Mme Colette Mélot, M Louis Nègre, Mme Patricia Schillinger, secrétaires , MM. Pascal Allizard, Éric Bocquet, Philippe Bonnecarrère, Gérard César, René Danesi, Mme Nicole Duranton, M. Christophe-André Frassa, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Pascale Gruny, MM. Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, MM. Claude Kern, Jean-Yves Leconte, François Marc, Didier Marie, Michel Mercier, Robert Navarro, Georges Patient, Michel Raison, Daniel Raoul, Alain Richard et Alain Vasselle .

AVANT-PROPOS

Comme en 2015, la commission des affaires européennes du Sénat a souhaité analyser le programme de travail annuel de la Commission européenne pour émettre un avis, qu'elle adressera au Gouvernement et à l'exécutif européen.

L'objectif est double : d'une part vérifier que la Commission européenne poursuit l'ambition affichée lors de son entrée en fonction de concentrer son action sur dix priorités et limiter toute inflation législative et d'autre part opérer une première analyse des choix de la Commission européenne et proposer d'éventuels compléments. Ce faisant, la commission des affaires européennes du Sénat entend contribuer au renforcement du dialogue politique entre les parlements nationaux et la Commission européenne, que celle-ci semble vouloir conduire en 2016.

Au-delà, la commission des affaires européennes du Sénat souhaite que la Commission européenne poursuive son effort de rationalisation de son activité, cette démarche étant à même de favoriser une meilleure lisibilité de l'action de l'Union européenne. Engagée depuis plusieurs années dans le dialogue avec la Commission européenne sur les questions de subsidiarité, elle estime que cette démarche facilite un partage des rôles plus efficace et plus visible. Elle participe en outre pleinement à la mise en avant d'une « Union du changement démocratique » mise en avant par le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, lors de son élection en juillet 2014 et au sein de laquelle les parlements nationaux doivent consolider leur place.

UN PROGRAMME DE TRAVAIL DANS LA LIGNÉE DU PRÉCÉDENT

La Commission européenne a présenté le 27 octobre dernier son programme de travail pour 2016. Il comprend 23 initiatives et 20 retraits ou modifications de texte. Le nombre de propositions est identique à celui contenu dans le programme de travail pour 2015. Le nombre de retrait ou modification s'inscrit également dans la lignée de l'exercice précédent, où 22 textes d'importance avaient été supprimés. Le programme REFIT, destiné à évaluer l'impact de la législation actuelle, sera, quant à lui, concentré sur 27 textes. L'ambition politique du programme est, par ailleurs, affichée avec un titre évocateur : « L'heure n'est plus à une gestion conventionnelle », dans la lignée de celui de 2015 « Un nouvel élan ».

La Commission européenne poursuit en tout cas sa volonté de réduire le nombre de propositions législatives et de se tourner davantage vers l'« application coopérative » de l'acquis sur le terrain. Elle estime, en effet, qu'un « point de saturation législative » a été atteint. Le souhait de rationaliser et de recentrer l'activité législative européenne autour des priorités établies fin 2014 ne souffre d'aucune contestation. Nous avions lors de l'examen du programme de travail 2015 estimé que la volonté affichée du président de la Commission européenne de légiférer uniquement si nécessaire et quand des résultats concrets et importants peuvent être obtenus était louable. Nous souhaitions que cet objectif soit maintenu dans la durée. Force est de constater que le programme de travail pour 2016 y contribue.

LES NOUVELLES PROPOSITIONS

Comme l'an dernier, la Commission européenne relie ses nouvelles initiatives, qu'elles soient législatives ou non législatives, à six des dix priorités qu'elle a définies lors de sa nomination en novembre 2014 : emploi, croissance et investissement ; marché intérieur ; Union économique et monétaire ; politique migratoire ; relations internationales et cadre institutionnel. Elle entend, dans le même temps, poursuivre les stratégies entamées en 2015 dans quatre autres domaines : commerce, marché unique numérique, justice et droits fondamentaux et énergie.

En ce qui concerne l'emploi, la croissance et l'investissement, la Commission entend promouvoir l'investissement dans le capital humain tout au long de la vie, via l'adoption d'une stratégie pour des compétences nouvelles en Europe. Celle-ci doit favoriser la reconnaissance mutuelle des qualifications, soutenir la formation professionnelle et exploiter le potentiel du secteur numérique en matière d'emploi ainsi que celui de l'économie circulaire. Dans le même temps, la Commission souhaite mieux garantir l'équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle en proposant des mesures législatives concernant les parents qui travaillent. Elle souhaite également soutenir la présence des femmes sur le marché du travail. Plus largement, elle devrait adopter une initiative non-législative destinée à définir le prolongement de la stratégie Europe 2020, au-delà de l'échéance de 2020.

Au sujet de l'Union de l'énergie, dont elle a défini le cadre en 2015, la Commission européenne entend proposer des textes relatifs à l'organisation du marché de l'électricité et à la sécurité de l'approvisionnement. Elle entend dans le même temps réviser, dans le cadre du programme REFIT, les normes actuelles en matière d'efficacité énergétique.

Le marché intérieur fera, quant à lui, l'objet de plusieurs initiatives destinées notamment à l'approfondir et à renforcer sa base industrielle, en particulier dans le domaine de la défense et de l'espace. Cette ambition se traduit par la mise en oeuvre d'une stratégie visant notamment l'aide aux PME et aux jeunes entreprises ainsi que les professions réglementées ou l'économie dite « collaborative ». La Commission entend également aborder la question de la prestation transfrontalière de services, en levant notamment les obstacles réglementaires pour les services aux entreprises et les services du bâtiment. La normalisation, la reconnaissance mutuelle ou la propriété intellectuelle devraient également donner lieu à une intervention. Un paquet fiscalité des entreprises et un plan d'action sur la TVA viendraient compléter ce dispositif. Annoncé en 2015, le paquet « mobilité des travailleurs » sera, quant à lui, finalement présenté en 2016. Il serait composé d'une communication sur la mobilité de la main d'oeuvre, d'une révision ciblée de la directive sur le détachement des travailleurs et sur une révision des règlements sur la coordination de la sécurité sociale.

L'approfondissement de l'Union économique et monétaire devrait passer par la mise en oeuvre du système européen de garantie des dépôts et la mise en place d'un pilier de droits sociaux. Il s'agit, avec celui-ci, de déterminer des principes communs et des critères de référence destinés à parvenir à terme à une plus grande convergence des performances dans le domaine social et dans celui de l'emploi.

La question de la sécurité sera également traitée via des règles améliorées sur les armes à feu et la lutte contre la fraude et la contrefaçon des moyens de paiements autres que les espèces.

L'autre question d'actualité, celle de la crise des migrants, sera traitée au travers de plusieurs textes. La Commission souhaite une révision du système de Dublin en matière d'asile et la mise en place d'un système structuré en matière de réinstallation des réfugiés. Elle entend, dans le même temps, avancer vers la création d'un corps européen de gardes-frontières et de garde-côtes, en s'appuyant sur une agence FRONTEX renforcée. Une communication sur la migration légale et l'extension de l'approche « carte bleue » est, en outre, envisagée.

Au plan international, la Commission européenne souhaite élaborer un nouveau cadre politique pour les relations avec les pays et régions ACP. Elle entend également présenter un paquet sur la réforme du secteur de la sécurité et, éventuellement, adopter un nouvel instrument spécifique pour le renforcement des capacités à l'appui de la sécurité et du développement dans les pays tiers. Elle espère, au plan commercial, la signature du partenariat transatlantique de commerce et d'investissement avec les États-Unis, souhaite une application provisoire de l'accord avec le Canada et réévaluer les traités existants avec le Chili, le Mexique ou la Turquie.

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