DEUXIÈME PARTIE - LES PERSPECTIVES POUR LE BUDGET TRIENNAL DE L'ÉTAT 2015-2017

I. LES PLAFONDS DE CRÉDITS DU BUDGET GÉNÉRAL DE L'ÉTAT POUR LA PÉRIODE 2015-2017

A. LA MISE EN oeUVRE DU PLAN DE 50 MILLIARDS D'EUROS D'ÉCONOMIES

1. Un effort de l'État permettant de faire mieux que respecter les normes de dépenses

Selon le rapport du Gouvernement, en vue d'atteindre, à l'horizon 2017, un montant d'économies sur les dépenses du budget de l'État à hauteur de 18 milliards d'euros par rapport à leur évolution tendancielle, « la loi de programmation des finances publiques 2014-2017 fixera des objectifs d'évolution des dépenses de l'État plus ambitieux que ceux définis par la précédente loi de programmation pour la période 2012-2017 ».

Pour mémoire, cette dernière avait fixé un double objectif d'évolution des dépenses :

- leur stabilisation en volume (en euros constants), c'est-à-dire une progression limitée au rythme de l'inflation (norme « zéro volume ») ;

- hors charge de la dette et pensions, leur stabilisation en valeur (en euros courants) au niveau des crédits autorisés par la LFI 2012, soit 279,5 milliards d'euros à périmètre constant et hors dépenses exceptionnelles (norme « zéro valeur »).

Comme le montre le tableau ci-après, ces normes devraient être plus que respectées en 2015 :

- sur le périmètre de la norme « zéro valeur », les dépenses de l'État seraient inférieures de 4,2 milliards d'euros à la LFI 2014 (soit une baisse de 1,5 %) ; les seules dépenses du budget général et les taxes affectées plafonnées diminueraient de 1,8 milliard d'euros ; par ailleurs, les transferts aux collectivités territoriales seraient réduits de 3,7 milliards d'euros - comme pour les deux années suivantes - dans le cadre de leur diminution en niveau de 11 milliards d'euros d'ici à 2017 ; enfin, le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne augmenterait de 0,8 milliard d'euros ;

- sur le périmètre de la norme « zéro volume », les dépenses seraient inférieures de 3,8 milliards d'euros aux prévisions de la LFI 2014 . Cette différence de 400 millions d'euros résulterait essentiellement de la révision à la hausse de la charge de la dette. En effet, le Gouvernement anticipe, par prudence, une hausse des taux d'intérêts, qui ne s'est pas réalisée à ce jour.

À l'issue de la prochaine période de programmation triennale (2015-2017), les dépenses de l'État seraient en recul, en valeur absolue, de 11,5 milliards d'euros sur la norme « zéro valeur » et de 2,5 milliards d'euros sur la norme « zéro volume » , par rapport à la LFI 2014. Les économies réalisées sur le champ de la norme « zéro valeur » seraient en effet réduites par une hausse de la charge de la dette (+ 6,8 milliards d'euros) et une augmentation des contributions au compte d'affectation spéciale « Pensions » (+ 2,3 milliards d'euros), compte tenu d'hypothèses prudentes concernant les déterminants de l'évolution de ces dépenses.

Conformément aux engagements pris par le Gouvernement, notamment à l'occasion de la présentation du programme de stabilité, 50 milliards d'euros d'économies seraient réalisées sur les dépenses des administrations publiques au cours de la période 2015-2017. Cet effort en dépenses sans précédent comprendrait, rappelons-le, 18 milliards d'euros d'économies sur les dépenses de l'État, 11 milliards d'euros sur celles des collectivités territoriales et 21 milliards d'euros sur celles des administrations de sécurité sociale (ASSO).

S'agissant de l'État, les 18 milliards d'euros d'économies réalisées sont calculées , comme cela est toujours le cas, par rapport au tendanciel d'évolution spontanée de ses dépenses : sur l'ensemble de la période de programmation, cet effort se traduit par une diminution des dépenses relevant de la norme « zéro valeur » de 0,5 milliard d'euros, hors diminution de ses concours financiers aux collectivités territoriales .

2. La maîtrise attendue des dépenses des collectivités territoriales

Concernant les collectivités territoriales, il est demandé un effort de 11 milliards d'euros, également par rapport au tendanciel d'évolution de leurs dépenses, qui correspondrait donc à une moindre progression des dépenses locales sur la période 2015-2017 ; ainsi, celles-ci augmenteraient tout de même de près de 10 milliards d'euros entre 2014 et 2017 selon le programme de stabilité 2014-2017 .

En tout état de cause, les 11 milliards d'euros d'économies demandées aux collectivités - qui apparaissent dans le tableau ci-après sous l'angle des dépenses de l'État - n'entrent aucunement dans l'effort en dépenses de 18 milliards d'euros qui sera consenti par ce dernier .

Votre rapporteur général souhaite insister sur le fait que l'enjeu n'est pas, pour l'État, d'améliorer sa situation budgétaire au détriment de celle des collectivités, à travers la diminution de ses concours financiers . En effet :

- d'une part, la norme « zéro valeur » serait respectée sur la durée de la période de programmation, sans qu'il soit besoin de prendre en compte cette diminution : ce n'est donc pas cette dernière qui permet à l'État de tenir ses engagements ;

- d'autre part, si le suivi du déficit budgétaire est une donnée utile dans le cadre de l'examen des différents projets de loi de finances, l'appréciation de la situation de nos finances publiques porte, dans le cadre des mécanismes mis en place par l'Union européenne, sur l'ensemble des administrations publiques. À cet égard, un euro dépensé par les collectivités territoriales est strictement équivalent à un euro dépensé par l'État : un transfert entre administrations publiques est sans effet sur les ratios servant au pilotage et au suivi de nos finances publiques.

Il convient donc de conserver à l'esprit que l'enjeu , s'agissant du respect de notre trajectoire de finances publiques, réside dans la maîtrise de l'ensemble des dépenses publiques , y compris locales. L'État ne pouvant pas piloter ces dernières, compte tenu du principe de libre administration des collectivités territoriales, la diminution de ses concours financiers constitue un levier de la maîtrise des dépenses locales .

Sur ce point, le Gouvernement compte notamment sur les dispositions du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, actuellement en cours de discussion au Parlement, pour rationaliser la dépense publique locale, en particulier en réduisant le nombre de structures, en favorisant les économies d'échelle et en mutualisant un certain nombre de fonctions entre collectivités.

La Cour des comptes a toutefois émis des doutes sur le report intégral de la baisse des dotations de l'État sur les dépenses des collectivités territoriales. Ainsi, lors de son audition par votre commission des finances en date du 18 juin, le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, a indiqué : « Les collectivités territoriales contribueraient pour 11 milliards d'euros : le Gouvernement anticipe un ralentissement marqué de leurs dépenses sous l'effet de l'évolution des dotations de l'État et d'une baisse des investissements. Plus précisément, il anticipe qu'un euro de dotation en moins entrainera un euro de moindre dépense. Or rien n'empêche les collectivités de relever la fiscalité locale ou de recourir à l'endettement. En 2013, alors que les communes subissaient le gel des dotations de l'État, leurs dépenses de fonctionnement se sont accrues et leur déficit, ou plutôt leur besoin de financement, a progressé. Les dépenses de personnel ont progressé de 2,6 % dans les communes et de 7,2 % dans les intercommunalités ». Lors de cette même audition, le président de la première chambre, Raoul Briet, a précisé : « Les 11 milliards d'euros de diminution des dotations de l'État correspondent à un transfert entre administrations publiques. Dans le programme de stabilité, une baisse de dépenses des collectivités locales de 11 milliards a été inscrite. Nous nous interrogeons sur le caractère automatique de cette diminution de un pour un, puisque les collectivités peuvent financer leurs dépenses autrement ».

Il convient de rappeler, en tout état de cause, que les collectivités territoriales disposent de ressources fiscales dont la croissance spontanée, liée à la seule évolution de l'assiette des différents impôts, serait de l'ordre d'une quinzaine de milliards d'euros entre 2014 et 2017, soit un montant supérieur à celui de la baisse des dotations de l'État sur la période.

En définitive, il serait donc inexact d'affirmer que l'État réduirait son niveau d'effort en reportant une partie de celui-ci sur les collectivités territoriales, de même que de considérer que ce niveau serait moins exigeant que celui demandé à ces dernières . Pour autant, la diminution des concours financiers correspond bien, pour les collectivités territoriales, à un défi particulièrement exigeant et à une rupture par rapport à la tendance passée, alors que l'État s'astreint depuis déjà plusieurs années à une forte contrainte budgétaire.

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