C. UNE EXIGENCE : LUTTER CONTRE LE DOPAGE ET LA MANIPULATION DES RÉSULTATS SPORTIFS

1. Quelle position européenne contre le dopage ?

La lutte contre le dopage revêt au sein de l'Union européenne un visage différent d'un État membre à l'autre. On distingue ainsi trois catégories de pays :

• Les États disposant d'une législation en la matière, les pouvoirs publics encadrant la lutte contre le dopage. C'est notamment le cas de la France ;

• Les États où gouvernements et autorités sportives combattent conjointement le phénomène, à l'image de l'Autriche ;

• Les États où les problèmes de dopage relèvent essentiellement de la compétence des associations sportives, à l'instar de l'Allemagne.

Par ailleurs, en dépit du souhait de la Commission exprimé dans le Livre blanc de 2007 de considérer le trafic de substances dopantes comme n'importe quel trafic de drogues illégales au sein de l'Union européenne, seuls 22 États membres ont criminalisé ces opérations. Le choix de l'instrument légal diffère d'un État membre à l'autre : Code pénal pour huit États membres, loi sur les narcotiques pour quatre autres et loi sur le sport en général pour quatre autres.

Cette différence d'approche n'est pas sans nuire à l'efficacité de la lutte contre un phénomène souvent transfrontalier. L'Union européenne se doit d'être un cadre pour une plus grande convergence des plans nationaux de lutte contre le dopage. C'est dans cette optique que le Conseil des ministres des sports du 18 novembre 2010 a souhaité mettre en place une action coordonnée contre le dopage qui pourrait conduire à l'adoption de stratégies communes, associant États membres, instances internationales et monde du sport. Le Conseil estime néanmoins que ces stratégies ne doivent pas porter atteinte aux droits à la vie privée et à la protection des données personnelles des sportifs ainsi qu'à leur liberté de circulation. Le Conseil invitait les États membres à coordonner leurs positions en amont des réunions de l'Agence mondiale antidopage (AMA), afin d'avoir plus de poids dans les délibérations de ladite agence.

a) L'Union européenne et l'Agence mondiale antidopage

L'AMA a été créée en 1999. L'idée d'une coordination entre les États membres avant chacune de ses réunions avait déjà été soulevée, le 4 décembre 2000, lors d'un Conseil européen sur la lutte contre le dopage organisé, sans qu'elle ne soit suivie d'effet. Le Conseil de l'Europe a, de son côté, mis en place en juillet 2003 un comité ad hoc - le Cahama - chargé de coordonner la position des États parties à la Convention culturelle européenne 22 ( * ) , ratifiée par tous les États membres de l'Union européenne, avant chaque réunion de l'AMA. L'UNESCO a, de son côté, adopté le 19 octobre 2005 une Convention internationale contre le dopage dans le sport, également ratifiée par les 27 États membres. L'Union européenne s'est finalement dotée d'un groupe de travail informel sur la lutte contre le dopage en juillet 2008, transformé en groupe d'experts en 2010.

Le Traité de Lisbonne fournit à l'Union européenne une base juridique pour une coordination des États membres et lui permet d'établir des liens avec le Conseil de l'Europe dans le domaine du sport. Une première étape en faveur de la coordination des positions a été franchie avec l'adoption, le 20 décembre 2011, d'une résolution sur la représentation des États membres de l'Union européenne au sein du conseil de fondation de l'AMA, instance décisionnelle suprême de l'agence. Ce conseil est composé à parts égales de représentants du mouvement olympique et des gouvernements. Trois sièges sont dévolus à la zone Union européenne 23 ( * ) . Aux termes de la résolution, un siège est désormais attribué au ministre des sports d'un des États membres représentant la troïka en exercice, un autre au ministre des sports d'un des États membres de la prochaine troïka et le dernier à une personne désignée pour trois ans par le Conseil en fonction de son expérience et ses connaissances sur ce dossier 24 ( * ) .

Le texte intègre également des lignes de conduites entre le Conseil, les États membres et la Commission concernant la préparation des réunions de l'AMA. Les États membres, réunis au sein du Conseil avant chaque réunion de l'AMA, analysent l'ordre du jour de celle-ci. La présidence élabore un projet de position détaillé tenant compte des souhaits des États membres et de l'avis de la Commission sur les questions relevant de la compétence de l'Union européenne. Il convient de noter qu'une coordination semblable est mise en oeuvre avant chaque Cahama, l'objectif annoncé étant à moyen terme une adhésion de l'Union européenne à la Convention du Conseil de l'Europe contre le dopage.

La révision du code mondial antidopage, édicté par l'AMA, constitue la deuxième priorité de l'Union européenne. Le premier code a été élaboré en 2003 et a été révisé en 2007. Il est divisé en quatre parties : contrôle anti-dopage, éducation et recherche, rôles et responsabilités, acceptations, modification et interprétation. Il a été signé par plus de 400 organisations sportives. Le choix de l'instrument légal pour mettre en oeuvre le Code antidopage au niveau national diffère d'un État membre à l'autre. dix États membres, à l'instar de la France, ont fait le choix d'une loi consacrée à la lutte contre le dopage alors que cinq États membres l'ont intégré dans une loi sur le sport en général. Dix États membres ont privilégié d'autres types de loi.

La quatrième conférence mondiale sur le dopage dans le sport prévue à Johannesburg en novembre 2013 devrait être l'occasion d'adopter une nouvelle révision. Une première proposition devrait, à cet égard, être présentée en mai 2013. Le Conseil a retenu cinq thèmes prioritaires : la protection des données à caractère personnel, l'utilisation du système de management et d'administration anti-dopage (ADAMS), les groupes cibles soumis à des contrôles (RTPs - registred testing pools ) et la localisation ( Whereabouts ), l'implication des gouvernements et la diffusion publique.

Le système ADAMS, reflet de l'hétérogénéité des pratiques des États membres

Lancé en 2005 par l'AMA, le logiciel ADAMS permet de localiser les athlètes à n'importe quel moment de la journée. Deux obligations sont ainsi imposées aux sportifs : fournir une heure par jour où on peut les localiser à tout moment et remplir un semainier avec leur programme par demi-journée. Un athlète peut effectuer une modification dans son emploi du temps pour le lendemain en accédant au logiciel avant 17h. Ces données sont enregistrées sur Internet. Ce système est jugé contraignant par les athlètes. ADAMS sert aussi de plateforme de gestion des autorisations à usage thérapeutiques.

Le recours à ADAMS n'est toutefois pas obligatoire, tous les États membres n'utilisant pas le logiciel. En 2010, 10 États membres pratiquaient une utilisation illimitée de la base de donnée ADAMS, 6 l'utilisaient de façon limitée, 6 autres venaient à peine de l'introduire et 5 ne l'utilisaient pas.

L'obligation de localisation par tout autre moyen s'impose néanmoins.

Dans sa contribution adressée à l'AMA le 8 mars 2012, le Conseil a exprimé sa crainte de voir les groupes cibles construits et utilisés de manière excessive sans aucune limitation. Il demande qu'ils soient constitués, entre autres critères, sur l'évaluation des risques. Il propose en conséquence d'incorporer une référence au principe de proportionnalité dans le projet de refonte du Code.

Une telle orientation ne saurait occulter une profonde disparité entre certains États membres. En 2010, la Belgique, l'Estonie, la Lituanie ou la Slovaquie se distinguent notamment par un nombre d'athlètes ciblés très élevés au regard de la population du pays. La Bulgarie, Chypre, Malte, la Pologne et la Roumanie ne pratiquaient pas, quant à eux, un tel suivi.

Groupes cibles soumis à des contrôles :
nombre d'athlètes suivis par pays membres (chiffres 2010)

Pays

Nombre

% de la population

Allemagne

500

0,0006 %

Autriche

500

0,004 %

Belgique (Flandre)

682

0,01 %

Bulgarie

0

NS

Chypre

0

NS

Danemark

65

0,001 %

Espagne

274

0,0006 %

Estonie

133

0,01 %

Finlande

64

0,001 %

France

402

0,0006 %

Grèce

300

0,003 %

Hongrie

480

0,005 %

Irlande

230

0,005 %

Italie

1500

0,002 %

Lettonie

129

0,006 %

Lituanie

250

0,008 %

Luxembourg

34

0,007 %

Malte

0

NS

Pays-Bas

450

0,003 %

Pologne

0

NS

Portugal

500

0,005 %

République tchèque

450

0,004 %

Roumanie

0

NS

Royaume-Uni

500

0,0008 %

Slovaquie

870

0,016 %

Slovénie

44

0,002 %

Suède

96

0,001 %

( Source : TMC Asser Institut,
The implementation of the WADA Code in the European Union, 2010)

Par ailleurs, si la prévention du dopage constitue un objectif légitime, les dispositions actuelles du Code relatives à la localisation peuvent déroger aux principes de proportionnalité édictées à l'article 52 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ainsi qu'à celles de l'article 6 de la directive 95/46 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données. La référence à la protection des données ne constitue pas une première. Le Standard international pour la protection des renseignements personnels de l'Agence mondiale antidopage a ainsi été élaboré en prenant en compte deux avis de 2008 et 2009 du groupe de protection des personnes à l'égard du traitement des données à caractère personnel, dit groupe « article 29 », de l'Union européenne.

Le Conseil invite également l'AMA à revoir ses dispositions relatives à la divulgation par la presse de faits de dopage afin de garantir au sportif le respect de son droit à la défense et à la présomption d'innocence.

La deuxième contribution de l'Union adressée le 4 octobre 2012 maintient ces observations initiales, compte tenu de l'absence d'avancée au sein des contrepropositions transmises par l'Agence. Le texte insiste également sur deux autres points :

• L'abolition de l'échantillon B, souhaitée par l'Agence, qui constitue à ses yeux une atteinte à la présomption d'innocence. Un contrôle antidopage repose, en effet, à l'heure actuelle sur un prélèvement consigné au sein de deux récipients, qui constituent les échantillons A et B. L'échantillon B n'est utilisé qu'aux fins de contrexpertise en cas de contrôle positif ;

• l'instauration de sanctions collectives à l'encontre d'une équipe entière en cas de contrôle positif de l'un de ses membres est quant, à elle, jugée disproportionnée.

b) Une politique insuffisamment ambitieuse ?

Les positions adoptées par le Conseil sur la révision du Code mondial antidopage traduisent un consensus sur la protection des droits des athlètes plus que sur une intensification de la lutte contre le dopage dans le sport de haut niveau.

Il convient d'ailleurs de relever que la première prise de position de l'Union européenne sur le dopage en tant que tel concerne le sport dit récréatif. Le Conseil a ainsi demandé le 10 mai 2012 aux États membres : d'encourager l'élaboration de programmes éducatifs, de campagnes d'information ou d'autres mesures de prévention contre le dopage dans le sport de loisir. Deux programmes financés par l'Union européenne depuis 2010 « Fitness Against Doping » et « Strategy for Stopping Steroids » pourraient servir de support à ces campagnes. Les États membres sont également invités à faciliter la coopération entre autorités nationales et internationales ainsi qu'entre autorités douanières et policières. Ils sont, en outre, incités à mettre en place les moyens de procéder à des enquêtes et de prendre des sanctions.

La Commission doit, dans le même temps, lancer une étude visant à mieux appréhender le problème et à soutenir des campagnes de sensibilisation transnationales. Le groupe d'experts sur la lutte contre le dopage voit, par ailleurs, son mandat élargi. Il est désormais chargé de rassembler les bonnes pratiques de lutte contre le dopage dans le sport de loisir dans les 27 pays et de présenter, d'ici fin 2013, une série de recommandations.

Il est cependant nécessaire d'aller plus loin. Le Traité de Lisbonne permet d'adopter des directives d'harmonisation en matière pénale (article 83 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne). Le délit de trafic de produits dopants pourrait ainsi être défini avec la même terminologie de part et d'autre de l'Union européenne. Des sanctions minimales pourraient également être ajoutées à ce dispositif, ce qui faciliterait l'action des autorités policières et douanières. Si une coopération policière et judiciaire est prioritaire afin de mieux identifier les réseaux souvent paneuropéens, l'absence d'harmonisation du délit représente un réel frein.

Le Traité de Lisbonne permet également au Conseil européen, statuant à l'unanimité, après approbation du Parlement européen et après consultation de la Commission, d'instituer un Parquet européen destiné à combattre les infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union européenne (article 86 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne). En l'absence d'unanimité, le traité ouvre également la voie à une coopération renforcée, réunissant au moins neuf États membres. Le Conseil européen peut simultanément adopter dans le même temps une décision permettant d'étendre les attributions du Parquet européen à la lutte contre la criminalité grave ayant une dimension transfrontière. Une telle option constitue à long terme une opportunité pour intensifier la lutte contre le dopage, en dépassant la simple déclaration de bonnes intentions.

2. Vers une convention européenne de lutte contre la manipulation des résultats sportifs ?

La manipulation des résultats sportifs constitue avec le dopage la principale menace pesant sur le sport professionnel. Le sport européen, en particulier le football, est régulièrement concerné par des affaires de matchs truqués, comme en témoigne l'annonce d'un démantèlement par Europol le 4 février 2013 d'un vaste réseau opérant depuis Singapour, qui dispose de relais européens (Italie et Balkans) pour approcher les joueurs. 380 matchs de football organisés entre 2008 et 2011 sur le continent européen seraient ainsi concernés, plus particulièrement dans les championnats allemand, finlandais, hongrois, slovène, suisse et turc 25 ( * ) . Une enquête de la FIFpro, le syndicat des joueurs professionnels de football, publiée en février 2012 estimait à 12 % le nombre de professionnels évoluant en Europe de l'Est approchés pour manipuler le résultat d'un match. La suspicion d'un trucage concernant un match de handball entre Montpellier et Cesson en 2012 souligne à quel point toutes les disciplines sont concernées. Le tennis est également considéré comme un sport permettant facilement une manipulation du résultat.

L'Asie du Sud-Est fait, à cet égard, figure d'épicentre du trucage de matchs. Les paris sportifs sont, en quelque sorte, ancrés dans la culture locale. En 2011, entre 500 et 1 000 milliards d'euros ont été misés sur environ 15 000 plateformes de paris en ligne, dont 85 % sont considérées comme illégales. Elles sont hébergées en Chine, en Malaisie ou à Taïwan. 140 milliards d'euros auraient été blanchis par les mafias locales sur ces mêmes sites.

La France a mis en place, en 2010, une Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL) destinée à la fois à lutter contre l'addiction, protéger les populations sensibles, combattre les activités criminelles, favoriser l'équilibre des filières économiques en lien avec le jeu et préserver l'éthique sportive. La régulation des jeux en ligne appréhende ainsi le sport en tant que support de paris. L'ARJEL assure la protection du marché français et n'est compétente que sur les paris engagés depuis la France. Son action est de fait limitée par le caractère mondial du phénomène : une compétition organisée en France peut être exploitée commercialement comme support d'un pari organisé depuis n'importe quel autre territoire et ainsi être exposée à des risques de manipulation.

Répartition des mises en France en 2011

Discipline

Pourcentage

Football

55 %

Tennis

25 %

Basketball

6 %

Rugby

4 %

Volleyball

4 %

Handball

2 %

Autres (hockey-sur-glace, tennis de table et baseball notamment)

4 %

(Source : ARJEL)

Une action européenne en la matière se heurte à une hétérogénéité en matière de réglementation, qui empêche, à l'heure actuelle, la mise en place immédiate d'une véritable coopération multilatérale immédiate. La réunion des régulateurs nationaux organisée le 27 février 2012 par la Commission européenne a souligné la prégnance d'approches différentes sur une question aussi sensible que celle des jeux d'argent. La possibilité d'une directive européenne sur ce sujet s'avère, de fait, délicate à mettre en oeuvre.

Marché européen des jeux en ligne

Une directive devrait néanmoins, dans le respect du principe de subsidiarité, s'imposer aux États membres qui ouvrent leurs marchés. Elle viserait principalement la protection des populations vulnérables et les consommateurs d'une part, et la lutte contre la fraude et le blanchiment d'argent d'autre part.

Plusieurs principes pourraient ainsi être adoptés :

- Interdiction faite aux mineurs de participer à ces jeux ;

- Encadrement de la publicité ;

- Existence de modérateurs de jeu ;

- Formalisation du contrat de jeu en ligne et des règles de protection du consommateur ;

- Désignation d'un responsable juridique de l'opérateur dans chaque pays.

En ce qui concerne le sport, en application de l'article 83 tu Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatif aux directives d'harmonisation pénale, la directive pourrait permettre la définition d'un délit pénal de manipulation des résultats d'une compétition sportive en lien avec des paris. Elle pourrait faire émerger la notion de droit au pari, au terme duquel l'exploitation d'une compétition par un opérateur de paris sportifs en ligne admis sur le marché ne peut plus se faire sans l'accord de l'organisateur. Le droit au pari constitue en France l'une des dispositions phares de la loi du 12 mars 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne. Il vise à protéger l'intégrité des compétitions sportives. Il impose notamment à l'organisateur de fixer, dans le cadre du contrat d'organisation de paris, les obligations d'information et de coopération incombant aux opérateurs. La rémunération perçue par l'organisateur au titre de ce droit tient compte des frais exposés par ce dernier pour la détection et la prévention de la fraude 26 ( * ) . Considéré conforme aux règles communautaires par la Commission le 24 novembre 2010, le droit au pari est en cours d'adoption au Danemark, en Espagne et au Royaume-Uni. Une telle directive constituerait, en tout état de cause, un socle pour envisager la mise en place d'une instance européenne de régulation.

La communication sur les jeux de hasard en ligne, présentée par la Commission le 23 octobre 2012, établit un plan d'action en vue de réglementer le secteur 27 ( * ) . Son plan d'action prévoit la mise en place d'un groupe d'experts, dont la première réunion s'est tenue le 5 décembre 2012. La Commission entend également adopter trois recommandations sur la protection commune des consommateurs, la publicité responsable et la prévention et la lutte contre le trucage de matchs liés aux paris. Ce dernier texte est attendu en 2014. Pour lutter contre les dérives observées dans le sport, elle entend promouvoir des échanges d'informations plus rapides, des dispositifs de signalement de dysfonctionnements et une coopération nationale et internationale entre parties concernées : opérateurs et autorités de réglementation. L'extension du champ d'application de la directive n°2005/60 sur la lutte contre le blanchiment d'argent est également envisagée. Il s'agit de la seule mesure normative prévue par la Commission, qui privilégie coopération internationale et échange de bonnes pratiques tout au long de sa communication.

Le biais du Conseil de l'Europe semble également un moyen adapté pour aboutir à une véritable coopération internationale sur le sujet, qui dépasserait le cadre communautaire et répondrait mieux à la dimension mondiale des paris en ligne . La recommandation adoptée par le Comité des ministres de cette organisation le 28 septembre 2011 invite les États membres à oeuvrer en faveur de la mise en place d'une convention internationale sur la promotion de l'intégrité du sport 28 ( * ) . La future convention serait, à l'instar de celle contre le dopage, ouverte aux pays non-européens. Ce texte devrait permettre d'établir des règles en matière de prévention des conflits d'intérêts des acteurs des compétitions sportives, de mieux articuler ces règles avec les législations nationales et les normes sportives. Il doit aboutir à une liste de support de paris autorisés et définir le lien juridique existant entre l'opérateur de paris et l'organisateur de la compétition.

La Conférence des ministres responsables du sport du Conseil de l'Europe, réunie à Belgrade le 15 mars 2012, a invité les représentants de l'Accord partiel élargi sur le sport (APES) à entamer des négociations sur cette convention, en concertation avec l'Union européenne. Les États parties à la Convention culturelle européenne ont également été invités, par la suite, à faire partie des négociations. La Commission européenne était présente en qualité d'observateur ad hoc lors de la première réunion du groupe de rédaction de la Convention, les 9 et 11 octobre 2012. Elle a, le mois suivant, déposé un projet de recommandation de décision l'autorisant à participer, au nom de l'Union européenne, aux négociations. Ce texte est en cours d'examen par le Conseil 29 ( * ) . Il est à l'heure actuelle considéré comme insuffisant par plusieurs États membres dont la France, qui relève notamment l'absence d'objectifs clairement définis dans le mandat de négociation ou de références à l'acquis communautaire (protection des données personnelles, coopération pénale et policière ou liberté de prestation et d'établissement). Certains États s'interrogent, par ailleurs, sur la base légale sur laquelle la Commission s'appuie pour pouvoir participer aux négociations. Ils souhaitent que les compétences de l'Union européenne dans les différents domaines traités par ce texte soient clairement établies. De telles réserves soulignent bien les différences d'approche des États membres sur la question des jeux en ligne en particulier et même de l'action de l'Union européenne dans le domaine du sport en général. La Commission souhaite être présente les 22 et 23 mars 2013 au groupe de rédaction en qualité de représentant de l'Union européenne. Une telle option semble, cependant, à l'heure actuelle difficilement envisageable. Une nouvelle rédaction du mandat, plus précise et plus claire, semble dès lors indispensable en vue d'arriver, fut-ce symboliquement, à un consensus autour de la participation de l'Union européenne à la rédaction de ce texte qui marquerait un signal fort dans la lutte contre le trucage des matchs.


* 22 Le choix de cette convention et non celle de la Convention de 1989 contre le dopage s'explique par la volonté de faire de celle-ci un centre d'excellence pour les États déterminés à en faire plus que le minimum requis par les instruments universels.

* 23 L'AMA dispose d'un bureau européen à Lausanne chargé notamment des relations avec les institutions européennes.

* 24 Le 19 septembre 2012, Mme Valérie Fourneyron, Ministre des Sports, de la Jeunesse, de l'Éducation populaire et de la Vie associative a été désignée par le Comité des ministres du Conseil de l'Europe, représentante du continent européen au sein du comité exécutif de l'AMA. Le comité exécutif, composé de 12 membres, est responsable de la direction et de la gestion pratique de l'AMA, de la mise en oeuvre de toutes ses activités et de l'administration de ses fonds. Il est composé à parts égales de représentants du mouvement olympique et des gouvernements.

* 25 Ce scandale fait suite à ceux de 2006 et 2011 en Italie ( Calciopoli et Calcioscommese ) et à celui de 2009 en Allemagne où 200 résultats étaient concernés. Un scandale identique en Turquie a conduit l'UEFA à exclure le club stambouliote de Fenerbahce de la Ligue des champions lors de la saison 2011/2012.

* 26 Les revenus perçus par les organisateurs au titre du droit au pari se sont élevés à 1 067 000 € en 2011. Ils ne couvrent pas les dépenses engagées par les organisateurs pour la lutte contre la fraude. Les mises se sont élevées en 2011 à 592 millions d'euros.

* 27 Elle fait suite à la consultation lancée dans le cadre du Livre vert sur les jeux d'argent et de hasard en ligne dans le marché intérieur, publié le 24 mars 2011.

* 28 Cette démarche a été relayée par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe en avril 2012, qui a adopté une recommandation et une résolution sur « La nécessité de combattre le trucage des matchs ».

* 29 COM (2012) 655 final, déposé au Sénat le 22 novembre 2012.

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