B. UNE COUVERTURE ENCORE INCOMPLÈTE

1. Une densité en sites inférieure à l'optimum d'une bonne couverture

Il se trouve parfois que dans des zones censées être couvertes, et d'ailleurs situées non loin d'émetteurs, il soit impossible de capter un signal suffisant pour passer ou recevoir un appel. De nombreuses doléances de ce type sont rapportées couramment aux élus, mais également soulignées par une association comme l'UFC Que choisir.

La cause en est souvent que la densité du réseau est insuffisamment élevée et ne permet pas d'acheminer correctement de la voix et/ou des données. Les opérateurs ont en effet tendance à remplir leurs obligations ou engagements de couverture a minima , en implantant un émetteur insuffisamment puissant ou appelé à desservir plusieurs communes.

Outre l'inertie des opérateurs, il est vrai que la densification du réseau, qui passe par une augmentation de la puissance d'émission ou par l'installation de nouveaux sites de diffusion, se heurte à un obstacle d'ordre sociétal : l' hostilité croissante de la population aux antennes de téléphonie mobile. Selon l'un des opérateurs auditionnés, il faudrait désormais 36 mois en moyenne pour en déployer une, contre 18 voici quelques années.

Sans refaire un débat qui a déjà eu lieu sur cette question, votre rapporteur regrette ces réactions, qui sont sans rapport avec la réalité : ce n'est en effet pas la multiplicité d'antennes qui serait porteuse de risques sanitaires, mais au contraire leur faible nombre, qui doit alors être compensé par une augmentation de la puissance d'émission. Un réseau bien « maillé » d'antennes est ainsi un réseau dont les puissances d'émission sont faibles, et les dangers supposés pour la santé réduits d'autant.

2. Un bilan mitigé des programmes d'extension de couverture mobile
a) Un programme d'extension initial quasiment achevé

Le programme d'extension de la couverture en « zones blanches » se trouve désormais quasiment achevé , puisqu'au 31 janvier de cette année, 2 907 communes (soit 1 894 sites) étaient couvertes sur les 2 944 communes (1 923 sites) du plan initial. Sur les 1 098 sites prévus en phase 1, 24 restaient à couvrir (dont 9 dans le département de Seine-Maritime), et 5 seulement sur les 825 prévus en phase 2.

Selon les informations transmises par l'ADF, 19 sites sur les 29 restant au total seraient bloqués ou sans visibilité , dont 16 en phase 1 et 3 en phase 2. Une cinquantaine de communes est concernée, qui chacune fait l'objet d'un suivi individualisé par les opérateurs et par la Datar. 3 sites peuvent être considérés comme bloqués pour des raisons spécifiques (opposition de riverains, emplacement inadéquat, vandalisme ...) et 16 sont sans visibilité du fait de problèmes de financement et/ou des choix des opérateurs.

b) Un programme complémentaire « à la traîne »

S'agissant du programme de couverture complémentaire, le bilan est beaucoup moins satisfaisant . Au 31 janvier, 54 communes (soit 45 sites) étaient couvertes sur les 364 prévues (soit 309 sites), soit 14,5 % des objectifs initiaux . En phase 1, restent ainsi 155 des 158 sites prévus à couvrir, et 109 des 151 prévus en phase 2.

Selon les données de la Datar, il apparaît qu'en phase 1, 49 sites auraient fait l'objet d'une signature de protocole, 52 ont un protocole en cours de signature ou sont en attente de réponse, et 33 sont en cours de définition de protocole sans obstacle majeur. Au total, 134 sur les 158 prévus seraient donc en cours de traitement et devraient normalement voir le jour. En phase 2, 127 sites sur les 151 prévus seraient en état normal d'avancement selon les opérateurs.

Les retards importants de ce programme complémentaire seraient dus à divers types de difficultés techniques liées à l'identification des points hauts, à la compatibilité avec le graphe technique, aux supports de sites, à la conduite d'études préalables ... Par ailleurs, les contraintes financières pesant sur les départements depuis 2009 constituent un facteur important du retard. Or, les autorisations d'engagement financier déléguées par la Datar aux préfets de région ne pouvant être mobilisées au-delà de l'exercice 2011, devra sans doute être mise en oeuvre une procédure de réengagement des crédits très lourde.

3. Des financements globaux très conséquents et principalement privés

Le bilan réalisé par la Datar du financement public des plans d'extension de couverture sur la période 2003-2010 fait apparaître un montant total de 110,6 millions d'euros , ventilé de la façon suivante :

Personne publique

Financements alloués
(en euros)

Part du financement public total (en %)

État via le Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNDT)

36 982 811

33,4

Conseils généraux

34 284 830

31

Fonds européen de développement régional (Feder)

24 761 903

22,4

Régions

13 817 546

12,5

Intercommunalités

465 701

0,4

Source : ADF.

Les opérateurs ont assumé la majeure partie des investissements . Pour les phases 1 et 2, ils disent en effet avoir investi entre 150 et 180 millions d'euros chacun, soit entre 450 et 540 millions d'euros .

Au total, ce sont donc entre 560 et 650 millions d'euros de financements publics et privés qui auront été mobilisés pour le programme d'extension de couverture en zones blanches.

4. La difficulté de remettre en cause les obligations des opérateurs

Les trois opérateurs mobiles Orange France, SFR et Bouygues Telecom sont titulaires d' autorisations initialement délivrées au début des années 1990 et ayant fait l'objet de procédures de renouvellement .

Les premières autorisations ont été attribuées pour une durée de 15 ans à Orange France (initialement France Telecom) et à SFR par arrêtés du 25 mars 1991 et à Bouygues Telecom par arrêté du 8 décembre 1994.

Les autorisations d'Orange France et de SFR ont ainsi été renouvelées respectivement par des décisions de l'Arcep en date des 14 février et 31 janvier  2006. L'autorisation concernant Bouygues Telecom a quant à elle été renouvelée par l'Autorité le 5 novembre 2009.

Chaque opérateur s'est vu imposer une obligation de couverture de 98 % de la population française métropolitaine . Selon les critères déjà mentionnés, elle doit permettre une réception à l'extérieur des bâtiments, en situation statique, avec des terminaux classiques (de puissance 1 ou 2 watts). Elle porte sur la disponibilité du service téléphonique, mais également d'un service de messagerie interpersonnelle (SMS), d'un service de transfert de données en mode paquet (GPRS) et d'un service basé sur la localisation de l'utilisateur, dans les possibilités offertes par la norme.

Chaque opérateur a pu réaliser une couverture relativement étendue en établissant environ 15 000 sites couvrant désormais, ainsi qu'il a déjà été mentionné, 99,82 % de la population, soit 97,7 % du territoire.

Si l'on intègre les engagements pris dans le cadre des différents programmes d'extension de couverture, il apparaît donc que les opérateurs ont tenu les engagements qui figuraient dans leurs licences 2G et vont même au-delà . Il semble donc aujourd'hui difficile, sans remettre en cause l'équilibre juridico économique de ces licences -ce qui serait illégal, voire inconstitutionnel- de leur imposer des exigences de couverture supplémentaires . Et ce surtout au vu des importants investissements qu'ils doivent réaliser dans leurs différents champs d'activité (extension des réseaux 2G et 3G, achat de licences 4G, montée en débit, déploiement du très haut débit ...), dans un contexte international très concurrentiel.

Quant à la 3G , il n'y a guère davantage de levier d'action pour contraindre les opérateurs , puisque le renouvellement des licences, qui serait l'occasion de renforcer les exigences en matière de couverture, n'interviendra au plus tôt qu'en 2020, pour les licences accordées au tout début des années 2000.

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