B. CONDITIONS PRÉALABLES À L'INTEROPÉRABILITÉ

L'interopérabilité ne peut se concevoir en dehors des normes internationales lorsque celles-ci ont été approuvées ou à défaut, des standards du marché. Toute solution spécifique aboutirait aujourd'hui à une impasse. Cependant, de nombreuses zones d'ombre subsistent car toutes les fonctions attendues d'un système d'information ne sont pas standardisées ni, a fortiori, normalisées.

1. Normes et standards

L'élaboration d'une norme suit un processus itératif techniquement complexe qui met en présence des intérêts industriels et stratégiques souvent divergents. La publication d'une norme par l'ISO 17 ( * ) au niveau international est donc le résultat de compromis longuement négociés par les nombreuses instances qui y participent (organismes nationaux et supra nationaux, industriels, associations de professionnels, universités, centres de recherche...).

À défaut de normes internationales qui tarderaient à déboucher, des standards élaborés par telle ou telle organisation s'imposent de fait et contribuent parfois à l'élaboration de la norme elle-même.

Ainsi, nombre de conventions techniques permettant d'assurer l'interopérabilité se sont imposées de fait, étant donnée l'importance industrielle de leurs promoteurs. On peut classer dans cette catégorie, les technologies du réseau Internet, le cas particulier des systèmes d'exploitation ou logiciels qui se sont développés de manière isolée puis sont devenus des standards de fait (ex. MS-Dos, Apple, logiciels de traitement de texte, tableurs...), ou les systèmes d'exploitation dont la finalité première est de favoriser l'interopérabilité entre systèmes hétérogènes (ex. UNIX et, plus récemment, LINUX).

Il arrive également que la norme en gestation ne débouche pas, parce que trop ambitieuse, mais sert de support à une version allégée opérationnelle.

Le cas de la gestion des annuaires, domaine fondamental pour assurer l'interopérabilité, est à cet égard instructif. Dans les années 90, les opérateurs de télécommunication ont élaboré, dans le cadre de l'ISO, la norme X500 destinée à normaliser les annuaires téléphoniques. L'accès aux annuaires X500 y faisait l'objet du protocole normalisé DAP (Directory Access Protocol) à visée quasi universelle en la matière.

En 1993, l'université du Michigan a élaboré une version réduite de ces spécifications qu'elle a rendue opérationnelle en l'intégrant au protocole de gestion de transactions de l'Internet 18 ( * ) . Cette version opérationnelle appelée dès lors LDAP (pour light weight DAP ou version allégée de DAP) s'est imposée aujourd'hui comme un standard de fait.

2. Contraintes induites par la normalisation

Pour rendre opérationnelle l'interopérabilité, il faut que les agents (automates ou utilisateurs finals) intervenant dans le système d'information aient le niveau minimum requis pour interpréter convenablement les contenus échangés 19 ( * ) . Or, dans un système de communications multilatérales, ce niveau minimum est déterminé par l'opérateur doté du plus bas niveau de compréhension 20 ( * ) .

Cette vision est partagée par la direction générale de la modernisation de l'Etat (DGME) pour qui l'élévation du niveau de compréhension repose nécessairement sur une approche conceptuelle du système d'information, en vue d'obtenir des outils et des vocabulaires ayant une portée universelle. Cette vue conceptuelle du système se traduit concrètement par l'élaboration de référentiels métiers. A cet égard, les contraintes apportées par l'évolution de la réglementation avec notamment la mise en oeuvre de la T2A et du DMP, obligeant à se conformer à un cadre méthodologique, encouragent l'interopérabilité.

La norme est donc bien souvent le résultat de conventions entre les parties qui reposent sur une obligation minimale pour un état donné de la technique.

Cette réalité contingente emporte une conséquence pratique déterminante : la pérennité de l'interopérabilité ne peut être garantie que dans la mesure où elle repose, autant que possible, sur les normes internationales en excluant les normes nationales qui seraient plus riches mais susceptibles de conduire à des incompatibilités dans un marché se situant au niveau mondial.

En outre, les technologies évoluant, les normes sont nécessairement évolutives 21 ( * ) et le risque de divergence au fil du temps de la part des industriels et éditeurs de logiciels n'est pas à exclure.

* 17 ISO : International Standard Organisation

* 18 TCP/IP : Transaction Control Protocol / Internet Protocol

* 19 Dans le domaine de la santé, on postule que tous les acteurs opérant en France s'expriment en français et n'éprouvent pas la nécessité de recourir à un interprète, sauf exception.

* 20 Ceci est vrai pour les systèmes techniques, mais cela vaut également pour les systèmes d'information en général.

* 21 Les normes sont accompagnées de la référence à l'état technique auquel elles se réfèrent. Une même norme est donc généralement publiée sous forme de versions numérotées qui prennent en compte les évolutions techniques successives.

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