TRAVAUX DE LA COMMISSION : AUDITION SUR LES TRAVAUX DE LA COUR DES COMPTES RELATIFS À L'INTEROPÉRABILITÉ DES SYSTÈMES D'INFORMATION DE SANTÉ

Présidence de M. Jean Arthuis, président

Séance du mardi 16 octobre 2007

Ordre du jour

Audition de Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6 ème chambre de la Cour des comptes et MM. Michel Braunstein, conseiller-maître, Georges-François Leclerc, directeur de cabinet de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy, secrétaire générale des ministères chargés des affaires sociales, MM. Mathias Dufour, conseiller technique au cabinet de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, en charge de l'organisation territoriale au sein du pôle « modernisation de l'offre de soins » et André Loth, chef de la mission pour l'informatisation du système de santé.

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M. Jean Arthuis, président - Mesdames et Messieurs, mes chers collègues, nous poursuivons l'ordre du jour de cette journée par une audition pour suite à donner aux travaux de la Cour des comptes sur l'interopérabilité des systèmes d'information de santé.

Nous avons décidé d'organiser un suivi plus visible et plus systématique des rapports particuliers et des référés en sélectionnant certains sujets qui nous paraissent particulièrement importants. L'audition de ce jour portera sur deux travaux de la Cour des comptes :

- d'une part, le référé n°46485 du 6 novembre 2006 relatif à l'interopérabilité des systèmes d'information en santé ;

- d'autre part, le chapitre X du dernier rapport annuel de la Cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, intitulé « Le partage des données entre les systèmes d'information de santé ». Celui-ci actualise en effet certaines données comprises dans le référé précité.

La commission a décidé d'ouvrir cette audition à nos collègues de la commission des affaires sociales, au public et à la presse, afin que nos travaux connaissent une suite effective.

Je voudrais vous demander d'excuser Nicolas About, qui préside en ce moment même la commission des affaires sociales et je salue nos collègues des affaires sociales qui ont renoncé à la commission pour venir avec nous.

Je voudrais vous rappeler que la commission des finances a déjà travaillé sur ce thème des systèmes d'information dans le secteur de la santé. Notre collègue Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial de la mission « Santé », avait ainsi présenté à la commission un rapport sur le sujet, dans lequel il pointait les faiblesses des systèmes d'information de santé, et en particulier :

- les défaillances du pilotage global de la politique d'informatisation du secteur de la santé ;

- les retards pris par les établissements publics de santé dans le développement de leurs systèmes d'information ;

- le cloisonnement des systèmes d'information ;

- enfin, l'absence de formation adéquate des professionnels de santé.

Il avait également fait plus particulièrement le point sur la mise en oeuvre du dossier médical personnel - le DMP -, en estimant que le calendrier de déploiement alors affiché était irréaliste. La ministre de la santé, de la jeunesse et des sports lui a donné raison la semaine dernière, à l'occasion de l'audition sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, menée conjointement avec la commission des affaires sociales : elle a ainsi observé que le calendrier initial était trop ambitieux et s'apparentait, en effet, à un effet d'affichage, à un effet d'annonce.

Les travaux menés par la Cour des comptes, que nous examinons aujourd'hui, confirment très largement le constat posé par la commission des finances dès novembre 2005. Sans entrer dans le détail des remarques qui vont nous être présentées par Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6 ème chambre, elle souligne que les conditions nécessaires à l'amélioration de l'interopérabilité ne sont pas encore réunies, cette situation étant largement imputable à un défaut de pilotage central. Le Premier président Philippe Séguin, dans la lettre qu'il avait alors adressée au ministre de la santé et des solidarités, notait également que « les maîtrises d'ouvrage de projets tels que la T2A et le DMP, qui ne pourront aboutir sans l'interopérabilité des systèmes d'information de l'ensemble des professionnels et établissements de santé et de l'assurance maladie, ne sont pas coordonnées ».

Cette audition trouve d'autant plus d'intérêt aujourd'hui que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 comporte des dispositions relatives à ces deux projets structurants pour les systèmes d'information en santé, que sont le DMP et la tarification à l'activité.

Nous recevons, pour la Cour des comptes, Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6 ème chambre et M. Michel Braunstein, conseiller maître.

Le ministère de la santé, de la jeunesse et des sports est représenté par :

- M. Georges-François Leclerc, directeur de cabinet de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports ;

- Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy, secrétaire générale des ministères chargés des affaires sociales ;

- M. Mathias Dufour, conseiller technique au cabinet de la ministre, en charge de l'organisation territoriale au sein du pôle « modernisation de l'offre de soins » ;

- enfin, M. André Loth, chef de la mission pour l'informatisation du système de santé.

Afin de préserver une possibilité effective de dialogue et de débat, je demande que les interventions liminaires de la Cour des comptes et des administrations concernées se limitent aux observations principales.

Ensuite, chaque commissaire qui le souhaitera, pourra librement poser ses questions.

Pour commencer, je donne la parole à Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6 ème chambre de la Cour des comptes, pour présenter les points principaux des travaux réalisés par la Cour des comptes sur l'interopérabilité des systèmes d'information en santé.

Mme Rolande Ruellan - Comme vous l'avez rappelé, la Cour des comptes avait adressé un référé au ministre de la santé et des solidarités le 6 novembre 2006, portant sur le point précis de l'interopérabilité des systèmes d'information en santé.

C'était à la fois un champ intéressant, important, mais bien circonscrit à ce sujet. Nous n'avions donc pas abordé le DMP, mais ces questions nous semblaient une sorte de préalable.

Ce référé faisait suite à une enquête que nous avions menée à la fois dans le domaine hospitalier et dans la médecine de ville. L'objectif était d'apprécier si des progrès utiles à la mise en oeuvre future du DMP avaient été réalisés ces dernières années.

Comme vous l'avez rappelé, les conclusions étaient que les conditions de l'interopérabilité n'étaient pas encore réunies et que cette carence était due essentiellement à un problème de pilotage.

S'agissant des prérequis, qu'il s'agisse des choix techniques en matière de normes, de standards et d'identification des acteurs ou du cadre réglementaire pour fixer les règles d'usage de la transmission de données sensibles en matière de santé, tout cela nous paraissait encore assez peu développé.

Le cadre général était certainement fixé : il s'agissait du référentiel technique général d'interopérabilité résultant de l'ordonnance du 8 décembre 2005 - mais, bien entendu, il faut des outils propres au domaine de la santé : capacités d'identifier de manière sûre et unique le patient, le professionnel de santé, etc.

La Cour imputait les retards ou les résultats limités à un défaut de pilotage central dans un domaine où les parties prenantes sont particulièrement nombreuses et se sont accrues ces dernières années. La Cour notait bien évidemment que l'interopérabilité n'est pas une fin en soi mais qu'elle est au service de priorités qui doivent être celles du ministère de la santé, qu'il s'agisse du pilotage du système de production de soins, de la définition d'une politique de santé ou du suivi du patient.

L'Etat doit organiser la coopération entre de très nombreux partenaires, entre ses propres services mais aussi avec les producteurs ou les demandeurs d'informations.

Passant en revue la multiplicité des directions, des missions, des agences, des GIP, des GIE intervenant dans le secteur, la Cour constatait que la seule mission créée pour coordonner les directions du ministère ainsi que la CNAM ne fonctionnait pas bien.

La mission pour l'information du système de santé, dite MISS, créée en 1997, s'est d'abord centrée sur SESAM VITALE et le réseau santé social, faute de pouvoir intervenir dans le domaine hospitalier.

Puis elle est restée quelque temps sans responsable avant d'avoir un directeur qui a cumulé cette fonction avec celle de directeur du GIP DMP, ce qui lui donnait assez peu de disponibilité pour exercer cette mission d'impulsion.

Depuis peu, elle a un nouveau directeur, ici présent. Mais la Cour avait noté également que si un pilote est essentiel, il faut qu'il ait quelques moyens, une légitimité et qu'il soit porteur d'une véritable mission avec l'appui du ministre.

Or, on a eu l'impression que la MISS bénéficiait selon les gouvernements d'un appui divers de la part des ministres successifs.

Côté hôpital, la Cour des comptes a noté que la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) ne se reconnaissait qu'une responsabilité très limitée à l'égard des hôpitaux, respectant ainsi l'autonomie traditionnelle des établissements hospitaliers. Elle ne se reconnaît donc pas un rôle de maître d'ouvrage du système d'information hospitalier, lequel n'est de ce fait pas gouverné.

La DHOS délègue en fait ces responsabilités depuis quelques années à une agence technique, l'ATIH et à un groupement pour la modernisation du système d'information hospitalier.

L'ATIH est vraiment le maître d'oeuvre du PMSI et de la T2A et le groupement joue une sorte de conseil à la maîtrise d'ouvrage, la DHOS lui ayant toutefois fixé des priorités, puisqu'elle est commissaire du gouvernement auprès de lui.

La DHOS a cependant ressenti la nécessité de se doter de capacités d'action. Elle a ajouté des structures à l'existant sous forme de missions mission T2A, mission nationale d'appui à l'investissement hospitalier. Cette dernière - la MAINH - a vu sa compétence étendue aux systèmes d'information hospitaliers en 2005.

La Cour a noté que ces missions sont rattachées pour ordre à l'agence régionale de l'hospitalisation d'Ile-de-France et financées par le fonds de modernisation des établissements de santé, c'est-à-dire par l'assurance maladie, alors qu'elles sont en réalité sous l'autorité du directeur des hôpitaux.

Il résulte de ce paysage que les maîtrises d'ouvrage T2A et DMP qui impliquent une interopérabilité des systèmes d'information de l'ensemble des professions et établissements de santé et de l'assurance maladie, ne sont pas coordonnées.

La Cour avait donc recommandé un positionnement de la MISS qui la légitime par rapport aux directions du ministère, des moyens appropriés et la redéfinition des structures existantes dans une optique de complémentarité, sous l'égide de la MISS.

Dans sa réponse au référé du 23 février 2007, le ministre indiquait qu'un nouvel article avait été introduit dans le code de la santé publique sur l'identifiant unique du patient par la loi du 30 janvier 2007, qu'un décret allait sortir sur les règles communes de sécurité des échanges de données de santé - il est sorti le 15 mai 2007 -, qu'un consensus pour des règles minimales d'interopérabilité en vue du DMP était acquis et que MAINH et groupement de modernisation avaient signé une convention de partenariat.

Le ministre ajoutait enfin qu'une nouvelle gouvernance stratégique des systèmes d'information de santé se mettait en place avec un comité de pilotage réunissant l'ensemble des directions du ministère et présidé par la secrétaire générale des ministères sociaux, un plan stratégique des systèmes d'information de santé devant être proposé par la MISS.

Dans son dernier rapport sur la sécurité sociale publié en septembre 2007, la Cour est revenue sur ce sujet, compte tenu de son importance et aussi pour actualiser les données, le sujet évoluant assez rapidement.

Elle a publié quelques constats et recommandations dans ce rapport.

Revenant sur les prérequis, elle a noté les progrès constitués par la loi du 30 janvier 2007 et le décret du 15 mai ; elle a toutefois noté que le choix de l'identifiant du patient reste à faire après la position prise par la CNIL le 21 février 2007. Je ne m'y étendrai pas.

La Cour a relevé d'autres limites à l'interopérabilité, certaines de nature industrielle ou commerciale. Il y a une atomisation extraordinaire des fabricants de logiciels. D'autres, plus juridiques, tiennent aux limites apportées aux échanges de données. Il existe une typologie des échanges de données prévue par le code de la santé publique que l'interopérabilité ne devrait pas pouvoir dépasser, sauf modification des textes.

Par ailleurs, les échanges entre professionnels de santé, en dehors de l'hôpital et sauf exception, requièrent l'accord du patient, ce qui constitue également une limite.

La Cour recommandait de réduire le nombre d'opérateurs des services d'information de santé, de renforcer le pilotage stratégique par la tutelle afin d'apporter rapidement des réponses aux questions d'identification, de normes et de standards qui conditionnent l'interopérabilité.

La MISS a répondu, dans le cadre de la procédure contradictoire - la réponse ministérielle publiée en annexe du rapport est globale et ne comporte pas de mention particulière, c'est pourquoi je vise la réponse de la mission - que, depuis février 2006, elle a lancé une réflexion d'ensemble sur les systèmes d'information en santé en vue d'élaborer un plan stratégique, ce qui était la réponse que nous avions reçue du ministre au référé.

Il serait intéressant de savoir si le comité de pilotage présidé par Mme la secrétaire générale a permis de progresser dans la coordination des acteurs, où en est l'élaboration par la MISS du plan stratégique des systèmes d'information en santé et comment évoluent les différents pré-requis relevés en vue de l'élaboration du DMP.

M. Jean Arthuis, président - Voilà des constatations qui prennent la forme d'un vrai défi pour le ministère chargé de la santé, comme s'il y avait un déficit de pilotage, une absence de choix technique, un cloisonnement de l'information, chacun veillant à sa propre information plus ou moins jalousement et rendant l'exercice du dossier médical personnel pratiquement impossible, compte tenu de la diversité des systèmes à l'oeuvre.

Pour le ministère de la santé, il y a là comme un réquisitoire. Il y a bien sûr des propositions, des recommandations. Nous allons maintenant entendre les représentants de Mme Bachelot.

M. Georges-François Leclerc - Je dois tout d'abord excuser auprès de vous l'absence de Roselyne Bachelot, qui est avec le Président de la République en train d'installer à Bordeaux la mission de concertation sur l'hôpital que présidera Gérard Larcher.

Je salue tout le travail effectué par le sénateur Jégou et par la Cour des comptes. Même s'il en ressort un constat lucide très exigeant, que vous avez rassemblé en quelques mots Monsieur le Président, il est clair que, de ce point de vue, il y a effectivement un défi que la ministre et son administration entendent relever.

Je traiterai à part, à l'issue de mon intervention, la problématique particulière du DMP, dans la mesure où nous sommes suspendus à une revue de projets menée par une mission conjointe de l'IGF et de l'IGAS, qui est en train de passer au crible la conduite de ce projet très complexe et qui doit rendre ses conclusions dans les jours ou semaines à venir.

Je concentrerai mon propos sur l'interopérabilité et, d'une manière générale, sur la gouvernance des systèmes d'information en santé telle que les conçoit la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports à ce stade. Ensuite, je passerai la parole à Marie-Caroline Bonnet-Galzy et André Loth pour les informations complémentaires qu'ils jugent nécessaires de vous dispenser. Je dirai trois choses en propos liminaire, avant d'aborder les trois points sur lesquels la présidente Ruellan a mis l'accent.

Premièrement, il y a une claire conscience de la part du ministre de ce que la qualité des soins est indétachable de progrès majeurs dans les systèmes d'information en santé.

C'est vrai pour le patient mais aussi - vous l'avez très justement rappelé, M. le président - pour le pilotage de l'hôpital, au moment où celui-ci passe - ou s'apprête à passer - à la tarification à l'activité à 100 %, modulo les crédits contractuels. Ce sont les deux grands objectifs politiques et vous avez eu raison de rappeler qu'il y a aussi la gestion de l'hôpital.

Il y a aussi une claire conscience du temps qu'il faut. Tous les pays qui ont déployé progressivement et avec succès, la plupart du temps, des systèmes d'information de santé performants ont pris du temps. Roselyne Bachelot a rappelé la semaine dernière dans cette salle, lorsqu'elle était entendue sur le PLFSS, que c'est à se fixer des délais trop précis que l'on risquait de faire porter des appréciations sévères sur la conduite d'un projet lorsque celui-ci n'est pas au rendez-vous que lui a fixé la représentation nationale à l'instigation du gouvernement. Il y a donc une claire conscience des enjeux, mais aussi du temps nécessaire pour faire les choses.

Cela étant dit, le constat dressé à la fois par le rapport Jégou et par le rapport de la Cour des comptes ne nous invite pas à l'autosatisfaction. Il nous invite à réagir, que ce soit le précédent gouvernement - des actes ont été pris assez rapidement - ou ce gouvernement, qui entend y donner suite. La présence d'André Loth n'est pas un signe complètement anodin. Il bénéficiera en moyens de tout ce qui sera nécessaire pour conduire la mission exigeante dont je vais essayer très rapidement et humblement de dresser les voies.

J'aborderai trois points : le besoin d'un cadre d'interopérabilité, le besoin de gouvernance et de coordination et la question très difficile - mais pas infranchissable - du regroupement des missions des opérateurs des systèmes d'information de santé. Les différents opérateurs ne sont pas tous des opérateurs de systèmes d'information hospitaliers au sens strict et technique du terme. Ce sont des opérateurs qui agissent en appui d'une politique d'investissement et d'audit. Ne confondons donc pas les opérateurs qui s'attaquent aux questions techniques avec les opérateurs qui agissent en appui d'une politique d'investissement et d'audit.

S'agissant du besoin d'un cadre d'interopérabilité et de sécurité des systèmes d'information, le ministère de la santé, de la jeunesse et des sports travaille dans trois directions.

La première concerne la meilleure identification des patients. Mme Ruellan a rappelé qu'un travail sur la mise en place d'un identifiant de santé était en cours. La loi du 30 janvier 2007 prévoit un identifiant de santé pour tout le champ de la santé et pas seulement pour celui du dossier médical personnel. Marie-Caroline Bonnet-Galzy pourra vous donner toutes précisions sur sa mise en place opérationnelle.

Seconde direction : la meilleure identification des professionnels et des structures. Il est ici question des répertoires. On est en train de refondre les répertoires existants. Un répertoire partagé des professionnels de santé est en cours de déploiement ou sera déployé en début d'année 2008.

Troisième point : la mise en place d'un cadre juridique de sécurité, avec le décret du 15 mai 2007 sur la confidentialité des échanges, qui fixe un cadre de généralisation pour l'usage de la carte de professionnel de santé.

S'agissant du besoin de gouvernance - Mme Ruellan l'a très bien rappelé -, nous avons séparé très rapidement, en juillet, la fonction de chef de la MISS et de directeur du GIP DMP. Il était effectivement très clair que l'on ne peut être à la fois directeur d'un GIP avec un enjeu aussi important que le DMP et avoir une fonction de pilotage ou de coordination stratégique pour le compte du ministre en matière de systèmes d'information, même si le DMP est un projet structurant. Il était très difficile de conduire les deux.

Une fois ce cordon coupé, le nouveau chef de la mission a été désigné par un arrêté ministériel du 1 er août. La MISS a été rattachée au secrétariat général. Les moyens et le cadre juridique de son intervention sont en cours de précision, dans le cadre de la répartition du plafond d'emplois ministériel qui est en cours de construction, suite aux arbitrages et au dépôt du projet de loi de finances.

Troisième point : la question - qui n'est pas évidente - de la clarification et du regroupement des missions des opérateurs des systèmes d'information de santé. En effet, M. le président, une analyse panoramique peut susciter l'étonnement. Il existe au moins quatre opérateurs : la MAINH, qui sert d'appui aux investissements hospitaliers ; la MEAH, qui permet des audits de qualité ; l'ATIH, qui est le dispensateur de l'information sur l'environnement financier et qui permet de piloter l'hôpital ; quant au GMSIH, Marie-Caroline Bonnet-Galzy définira ses fonctions techniques.

L'intention du ministre est de mettre fin à ce statut hybride pour parler politiquement correct de la MAINH et de la MEAH, qui sont rattachées à l'agence régionale de l'hospitalisation d'Ile de France, alors que leur compétence est clairement nationale. Ce montage n'est pas satisfaisant et il y sera mis fin dans le courant de 2008. On est en train de préparer les arbitrages du ministre sur cette question.

M. Jean Arthuis, président - Le ministère reprend la main. C'est décidé ?

M. Georges-François Leclerc - Absolument !

Cela doit-il être l'occasion de passer en revue l'ensemble des opérateurs pour les regrouper le cas échéant ? Ce n'est pas exclu mais c'est une démarche inséparable de la démarche de revue générale des politiques publiques dont les conclusions seront rendues à l'automne. Ce n'est pas la version nouvelle des calendes grecques. C'est réel. La RGPP est en cours ; elle va procéder à un certain nombre de regroupements assez rapides. Il est clair que ces opérateurs feront partie des choses qui seront revues.

La consolidation du circuit de financement de la MAINH et de la MEAH doit elle être l'occasion de tout revoir ? Je me garderai d'être aujourd'hui trop péremptoire. Il est difficile de regrouper tout sous un seul établissement mais il est clair que l'intention du ministre est de simplifier tout cela et de clarifier les circuits de financement et d'évolution des plafonds d'emplois. Les remarques de la Cour des comptes nous conduisent à réfléchir très rapidement sur ce point.

Je laisserai Marie-Caroline Bonnet-Galzy vous donner toutes précisions sur le plan stratégique que j'ai survolé.

S'agissant du DMP, je ferai deux observations.

Beaucoup de pays développés ayant un système de santé ambitieux ont un dossier médical partagé ou, en tout cas, un système qui s'apparente à celui-ci. Ils ont tous mis beaucoup de temps pour le déployer et n'ont pas fait preuve de la même ambition que nous il y a quelques années. Ils ont tenu des délais larges.

Second point : ce gouvernement a quand même décelé dans le pilotage, tout en reconnaissant la nécessité de ceci comme outil de partage de l'information mais aussi comme outil de qualité de soins, quelques faiblesses dans le processus de développement qui l'ont conduit à demander une revue de projets assez systématique qui pourrait être à la disposition de la représentation nationale au moment de la lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le rapport devrait nous parvenir dans les jours qui viennent. Je suppose qu'il aura été discuté et que ses grandes conclusions pourront être présentées à la représentation nationale le moment venu, c'est-à-dire très prochainement.

M. Jean Arthuis, président - Merci M. le directeur. Votre propos va être complété par Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy, qui est secrétaire générale des ministères chargés des affaires sociales.

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - Merci M. le président. J'insisterai davantage sur les problématiques de gouvernance que l'on a essayé d'instituer et sur lesquelles on souhaite avoir un cap très ferme, en rappelant que j'ai été nommée secrétaire générale en septembre, il y a un an. A ce moment, les ministres m'ont demandé, dans ma lettre de mission, de travailler sur la nécessaire coordination des maîtrises d'ouvrage dans les systèmes d'information, notamment sur le sujet du système d'information de santé.

Ceci m'a conduit à voir l'ensemble des directeurs - notamment celui de la CNAM - et à mesurer l'importance d'une structure stratégique qui avait existé dans ce ministère et qui n'avait pas été reconduite. Avec l'adhésion de tous les directeurs, nous avons considéré qu'il était très opportun que le directeur de la CNAM soit dans ce comité stratégique ; ne pas l'y mettre était courir le risque de prendre des décisions que l'on n'était pas en mesure de porter collectivement jusqu'au bout.

Il en a été convenu et nous sommes dans ce processus qui a été confirmé par la pré-installation, en novembre, et par l'installation officielle, en mai, de ce comité de pilotage stratégique.

Mme Ruellan a indiqué combien tous ces sujets de systèmes d'information sont délicats. Ce sont des leviers majeurs d'évolution, qui nécessitent une très forte implication politique. En même temps, il faut que celle-ci s'appuie sur une instruction administrative concertée, régulière, organisée.

C'est un sujet qui a fait défaut dans nos modes d'organisation. On a donc parallèlement souhaité que la MISS soit définitivement positionnée auprès du secrétariat général dès sa création ; par ailleurs nous avons souhaité que ceci nous permette de travailler les dossiers, de façon très pragmatique, en articulation avec ce qui existait. Il ne s'agissait pas de confisquer des responsabilités mais de les mobiliser et de les articuler.

Le comité de pilotage stratégique doit définir les sujets relevant de sa compétence, comme la définition des grandes orientations stratégiques qui se traduisent dans le PSSIS, mais aussi identifier toutes les questions transversales qui doivent être arbitrées de manière politique et qui relèvent de tous les référentiels tout ce qui est porté par la mission dite « MARINE », évoquée par le rapport de la Cour, qui traite des répertoires en termes de professionnels de santé et d'établissements est rattaché à la MISS et doit être débattu en comité de pilotage.

Nous sommes également convenus que les caractéristiques très spécifiques du DMP, qui est le produit final d'un certain nombre de choix, nécessitent que la question soit vue dans le comité de pilotage stratégique.

En revanche, toutes les maîtrises d'ouvrage métiers des directions et de la CNAM continuent leur travail avec les outils d'ores et déjà existants de direction de projets mais sont appelés à faire remonter en tant que de besoin les questions qui justifient un arbitrage transversal.

Voilà les modalités de travail que l'on a identifiées et que l'on a essayé de caler entre nous.

Notre seconde réunion a confirmé la validation de tout le travail sur le projet de plan stratégique, lequel a été finalisé et confirmé début juillet avec l'ensemble des parties prenantes. La ministre nous a donné son accord pour l'ouvrir à la concertation. Un des sujets très particulier de tous les systèmes d'information de santé est le fait qu'ils concernent l'usager, le patient, le professionnel, l'industriel comme les administrations de santé. C'est aussi ce qui les rend extrêmement complexes dans le mode d'organisation et de pilotage.

Ceci nous conduit à réfléchir de façon très déterminée sur l'organisation et la « voilure » de cette mission d'informatisation des systèmes de santé qui n'est pas suffisante aujourd'hui, même si elle se ressource de ladite mission MARINE. Elle nécessite sûrement que l'on fasse des choix au sein du ministère. Ces choix sont d'autant plus évidents que je suis parallèlement présidente du comité de pilotage de deux autres schémas directeurs, l'un qui porte sur toute la réflexion de la relation administrative dans son ensemble administration centrale / administrations déconcentrées , l'autre sur toute la réflexion sur la perte d'autonomie et la dépendance. C'est un schéma directeur que nous avons élaboré en lien avec la DGAS et la CNSA.

C'est une façon d'urbaniser les questions qui se posent. Le système d'information de santé a une autonomie relative et des questions de frontières avec ces différents sujets. Les enjeux dans le pilotage des politiques que nous portons concernent principalement le travail avec les opérateurs et le partage de données, plutôt que des processus régaliens internes à l'administration. C'est bien sur les systèmes d'information de santé que nous devons donner toute notre force.

Nous avons une réunion le 24 octobre et nous allons travailler sur ces questions.

M. Jean Arthuis, président - Depuis 2001, l'Etat est à l'oeuvre. L'ensemble des services sont mobilisés pour doter les gestionnaires d'un certain nombre de données financières, comptables, budgétaires et d'indicateurs de gestion. Cette LOLF, vous la faites vivre au niveau de votre ministère. Y-a-t-il quelque chose d'identique qui se met en oeuvre en direction des établissements de santé et de l'ensemble des opérateurs du système de santé ? Va-t-on vers des principes communs, un langage commun, des modes de reddition de comptes qui soient lisibles et compréhensibles par tous, autrement dit une LOLF dans le secteur de la santé et, au-delà, de la sphère étatique ?

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - Cette question diffère de la problématique des systèmes d'information de santé.

M. Philippe Marini, rapporteur général - Cela n'entre pas dans la logique de la LOLF ?

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - Hélas, non, pas assez. Globalement, cela porte sur des financements « sécurité sociale » et très peu sur des financements « Etat ».

M. Philippe Marini, rapporteur général - Les financements « sécurité sociale » ont-ils vocation à être traités de façon moins rigoureuse que les financements « Etat » ?

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - Sans doute pas mais on n'est pas dans une logique de dynamique de la LOLF. On travaille plutôt dans la logique des PQE, qui essaieraient de traduire cette question. On est encore très tôt.

La Cour des comptes nous a demandé de retravailler cette dynamique d'indicateurs. On l'a lancé mais je ne puis dire que je peux traduire aujourd'hui la relation avec ces organismes dans des indicateurs de ce type.

En revanche, il y a des contrats d'objectifs et de moyens avec chacun des organismes en cours de finalisation pour plusieurs de ceux que vous avez évoqués tout à l'heure. C'est dans ces contrats que l'on identifiera les indicateurs, lesquels seront appelés à être suivis dans la démarche que vous évoquez.

M. Philippe Marini, rapporteur général - Je suis, à la différence de notre collègue Jean-Jacques Jégou, peu technicien de ce sujet et, sur les aspects d'architecture informatique, de fonctionnalité, de solutions techniques, je vous écoute avec beaucoup de respect mais, lorsque je lis dans les rapports de la Cour et dans l'organigramme cette superposition - MISS, MAINH, ATIH, GIP CPS, GIE SESAM VITALE, GMSIH, GIP DMP - j'ai tendance à poser deux questions au moins.

Première question : dans ces différents outils, quels sont les effectifs et, parmi eux, quels sont ceux qui ont vocation à faire partie des effectifs de l'administration centrale ou déconcentrée du ministère de la santé ?

Deuxième question : quelles sont les dépenses de fonctionnement engagées et, si l'on envisage une simplification de l'architecture avec un rôle plus fort de la MISS - et vous avez montré que l'on se dirige vers cette solution -, comment cette organisation et cette répartition des moyens peuvent-ils être appelés à évoluer ?

Vous avez également fait allusion - et c'est l'une des difficultés du sujet - au fait que l'on est à cheval entre les responsabilités de l'Etat et celle de la sécurité sociale, d'où ces groupements et ces formules assez empiriques mises en place finalité par finalité.

Comment voyez-vous une architecture plus limpide et plus cartésienne, sans préjuger complètement des décisions qui seront prises dans le cadre de la revue générale des politiques publiques ? Pouvez-vous nous donner une idée des objectifs que vous êtes susceptible de vous donner en termes de coût de gestion et d'effectifs affectés à ces tâches, qu'ils proviennent de l'Etat ou de la sécurité sociale ?

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - Ce qui relève directement de l'Etat, ce sont les sujets en suivi direct - comité de pilotage stratégique, tutelle directe des répertoires et du DMP.

Pour ce qui relève de chaque direction, on est en train de réfléchir en termes d'urbanisation des systèmes d'information. On part de l'existant, avec l'histoire de structures qui sont des structures projets, que l'on souhaite maintenant piloter de façon concertée et dynamique. Vouloir tout casser pour tout regrouper ne serait pas forcément adapté aujourd'hui, même si on pourrait le reconstruire autrement, sans doute.

Il faut donc essayer de bien mesurer ce qui relève du pilotage DHOS, du pilotage type DSS / lien assurance maladie, et ce qui relève du pilotage DGS, qui sera davantage Etat.

Les pilotages DSS / DHOS / lien assurance maladie sont clairement des pilotages qui sont portés par l'assurance maladie, ce qui relève du pilotage DGS en termes de processus sur l'alerte et la veille sanitaire relève des pilotages et des mises en oeuvre Etat.

J'ai un peu du mal à vous donner des chiffres. Je ne sais pas si André Loth peut en esquisser un certain nombre, en fonction des effectifs aujourd'hui constatés...

M. Jean Arthuis, président - Les pilotages sont multiples. Il n'y a pas moyen de se mettre d'accord sur un pilotage unique ?

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - Le pilotage stratégique est bien unique et il est bien concerté. Maintenant, chacun a son métier. On est bien dans des maîtrises d'ouvrage métiers. Il est légitime que l'assurance maladie travaille sur les liens avec l'assuré social.

M. Jean Arthuis, président - Oui, mais il faut que les systèmes d'information répondent aux différentes attentes ! On ne va pas avoir autant de systèmes d'information que de métiers !

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - C'est pourquoi ces systèmes d'information doivent s'inscrire dans les référentiels qui sont arrêtés avec l'instruction MISS, dans le cadre du comité de pilotage stratégique. C'est la raison pour laquelle les référentiels et les répertoires relèvent bien du comité de pilotage stratégique, qui est unique. En tout cas, c'est notre objectif.

M. Jean Arthuis, président - C'est votre « objectif », comme s'il y avait des inerties pour tendre vers celui-ci. Qu'est ce qui freine ?

M. Georges-François Leclerc - M. le président, si vous m'y autorisez, je vais répondre à ce point particulier. De manière panoramique, on peut effectivement être inquiet de voir autant d'opérateurs, au moins de manière nominale.

Deuxième point, la remarque du rapporteur général sur le statut hybride est liée à des difficultés techniques. Le financement par l'assurance maladie, qui n'est pas illégitime, est préférable sous forme de GIP. C'est difficile lorsque c'est un service de l'Etat parce qu'il faut rattacher les crédits par voie de fonds de concours, ce qui est nécessairement plus long et plus difficile à faire.

Mais il n'y a pas de réticences. Il y a un souhait très fort de regrouper les opérateurs dès lors que les métiers sont cohérents. C'est le premier point. Il n'y a pas de facteurs d'inertie, si ce n'est l'inévitable attente des résultats d'une revue qui est ambitieuse, multicritères et qui avance sur un front très large.

Ensuite, Marie-Caroline Bonnet-Galzy a bien expliqué qu'il y a des métiers différents mais aussi une démarche commune transversale qui doit vérifier, au sens scientifique du terme, que les systèmes d'information, le métier fût-il différent, sont bien cohérents et interopérables.

M. André Loth - J'ai une certaine ancienneté dans le monde des systèmes d'information de santé et j'ai pu observer, à partir des divers sujets dont j'ai eu à m'occuper - notamment le programme de médicalisation des systèmes d'information, qui est à l'origine de la tarification à l'activité ou le programme SESAM VITALE, dont j'ai été le responsable à la direction de la sécurité sociale et à la CNAM -, qu'il y a beaucoup d'acteurs. On observe aujourd'hui qu'il y a beaucoup d'opérateurs et ce sont parfois des opérateurs qui réunissent un nombre d'acteurs considérable. Le projet SESAM VITALE n'était techniquement pas très compliqué mais défiait l'imagination en termes de nombre d'acteurs entre lesquels il fallait réaliser un consensus.

Le nombre d'acteurs est donc considérable et les sujets toujours très polémiques. Le PMSI, pour ceux qui s'en souviennent, a été un sujet extraordinairement polémique dans les hôpitaux. La T2A l'est toujours ; SESAM VITALE, qui est aujourd'hui entrée dans les moeurs, a été également un sujet très polémique qui a fait dire à l'époque que ce programme pharaonique n'aboutirait jamais et que les délais annoncés étaient trop courts. Il s'est en fait réalisé, mais dans des délais beaucoup plus longs que ceux annoncés.

Avant d'examiner les budgets des opérateurs - que je ne connais pas tous par coeur - il faut connaître les enjeux financiers, qui sont considérables. On considère qu'environ 1,5 % des budgets hospitaliers est consacré aux systèmes d'information. C'est à peu près 1 milliard d'euros par an. Le consensus et l'observation des exemples étrangers ou d'autres secteurs laissent penser que l'on va rapidement vers un doublement de ces montants. Il s'agit donc d'enjeux financiers considérables, qui justifient évidemment un fort pilotage de cette évolution et qui expliquent l'afflux des offres des industriels dans ce domaine, qui est un des secteurs très porteurs de notre économie.

La France est indiscutablement dans une situation de retard en matière de systèmes d'information - c'est le cas par exemple pour le passage à l'imagerie numérique - mais, dans d'autres domaines, comme SESAM VITALE, nous avons aujourd'hui des réalisations importantes.

M. Jean Arthuis, président - Vous allez passer de 1 à 2 milliards d'euros. Deux milliards d'euros, ce sont les moyens qu'il faut mobiliser pour faire face à ce défi d'interopérabilité des systèmes d'information. Qui va payer ?

M. André Loth - En ce qui concerne les hôpitaux, on est dans un cas de figure de budgets qui sont financés par l'assurance maladie. Les hôpitaux financent leurs investissements ; certains de ces investissements sont aidés par des subventions.

M. Jean Arthuis, président - Les hôpitaux financent leurs investissements informatiques.

M. Philippe Marini, rapporteur général - Quand il s'agit de l'architecture générale, des grandes lignes du système, est-ce à l'utilisateur de les définir lui même, voire de les financer lui même ? Où passent la responsabilité de l'Etat et celle de la sécurité sociale ?

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - Je n'ai visiblement pas été claire et j'en suis désolée : la définition relève bien de l'Etat. Elle est bien dans la logique du comité de pilotage stratégique. Tous les référentiels évoqués et les répertoires doivent relever des arbitrages de l'Etat.

M. Jean Arthuis, président - Reprenez-vous dans ces référentiels la démarche LOLF, avec l'exigence de sincérité des comptes publics ? Les conseils d'administration des hôpitaux auront-ils maintenant des bilans de la situation patrimoniale de l'hôpital, des comptes de résultats qui ressemblent à quelque chose, lisibles, compréhensibles et non des cadres comptables que l'on forme sans doute à la règle de la comptabilité publique, mais totalement impropres à du management ?

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - Quand je parle de référentiels, je ne parle pas de référentiels comptables mais de référentiels de sécurité, d'intégrité de données, de transfert de données.

M. Jean Arthuis, président - Transfert d'images d'un établissement à l'autre, par exemple ?

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - Des conditions de transfert d'images, de confidentialité. Tous ces éléments sont très lourds de conséquences. Il faut que chacun les inscrive dans ses propres schémas directeurs. C'est aussi pour cela qu'il y a forcément un délai de mise en oeuvre, puisque chacun doit progressivement se mettre dans la ligne de ce que l'on aura décidé. Il y a des décisions qui sont prises, d'autres sont encore devant nous.

Les logiques d'identifiant s'ajoutent à cette question que l'on a un peu évoquée tout à l'heure. Le NIR n'est pas suffisant, il faut un identifiant santé. Où le met-on ? Comment ? A qui l'impose t-on ? Toutes ces questions nécessitent des règles du jeu.

M. Jean Arthuis, président - Et l'on va jusque chez le médecin de ville afin de lui rendre compte des actes accomplis dans les centres hospitaliers...

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - ...Sur la façon dont il peut transférer ou accéder à des données.

M. André Loth - Cela implique, M. le président, que l'on définisse des règles. On ne peut aller chez le médecin pour lui installer un logiciel. On ne peut aller dans chaque hôpital installer le logiciel qui va permettre la commande de produits sanguins, le logiciel qui va permettre la transmission des résultats des laboratoires, ni même le logiciel qui va servir au pilotage. Il est nécessaire, dans ces domaines, de définir des règles et une architecture, ce que les Anglais ont appelé « l'épine dorsale » du système d'information.

Le rapport de la Cour citait à juste titre ces éléments centraux ou structurants que sont l'identification du patient, des professionnels et des structures, les référentiels d'interopérabilité, de sécurité et le cadre juridique qui entoure tout cela.

Voilà ce qui nous semble être les sujets sur lesquels l'Etat a une responsabilité particulière, qui permet aux autres acteurs d'acquérir le logiciel qui, sur le marché, répondra à leurs besoins. Nous avons une responsabilité de structuration. Nous n'allons pas faire tout à la place des acteurs hospitaliers ou libéraux.

M. Jean Arthuis, président - C'est quand même bien l'Etat qui assure la tutelle des hôpitaux ?

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy - On était là dans les règles du jeu. Ces règles du jeu, il faut les arrêter. Il faut que l'Etat les prenne, d'autant plus qu'il va fédérer des organisations industrielles qui se mettront sur le marché en s'adaptant.

Qui va porter l'investissement pour acheter le hard et le soft en lien avec ces règles du jeu ? Il y a plusieurs cas de figure, grosso modo le cas de l'hôpital et celui du professionnel de santé.

Pour l'hôpital, l'objectif du ministre est de développer considérablement les investissements hospitaliers. Hôpital 2012 a pour objectif de multiplier par deux le budget de l'investissement hospitalier en faveur des systèmes d'information. Le rôle de la MAINH ou de ce qu'elle deviendra sera justement de donner les bons critères de fléchage des investissements qui répondent bien aux conditions vertueuses d'évolution de nos systèmes.

M. Jean Arthuis, président - M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, souhaite maintenant vous interroger.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial - Je remercie M. Leclerc des paroles aimables qu'il a prononcées à mon endroit. J'ai subi un certain autisme depuis 2005. Je ne suis pas ravi d'avoir eu raison mais j'aurais aimé que l'on puisse en discuter ! Si j'ai écrit cela, c'est parce que j'avais vu ce qui se passait à l'extérieur. J'ai décrit l'épine dorsale dans mon rapport.

J'avais reçu à l'époque la directrice générale de l'Assistance publique qui m'avait effrayé. Elle même l'était d'ailleurs. Elle ne connaissait pas le nombre de gens qui s'occupaient d'informatique à l'Assistance publique. Elle en estimait le nombre entre 200 et 300 personnes. Certains informaticiens - dont un très bon à Lariboisière - développaient seuls leur propre système informatique.

J'étais allé visiter l'hôpital Georges Pompidou, qui était doté d'un système d'information impressionnant : résultats de laboratoires, prélèvements partant par système pneumatique... Ce système fonctionnait très bien. Aucun autre hôpital de l'Assistance publique n'a voulu l'adopter !

Vous évoquez Hôpital 2012. Arrêtons cela ! Ce n'est pas parce que l'on aura investi des milliards d'euros dans un système qu'il nous impressionnera. Que veut-on en faire ? Il faut développer un système commun. C'est cela, l'interopérabilité ! Ce n'est pas que chacun travaille dans son coin ! Or, c'est ce que nous faisons actuellement, y compris dans les régions.

J'avais eu une discussion très serrée à l'époque avec M. Bertrand qui m'avait dit : « Il y aura un DMP en juillet 2007 ». Malheureusement, il n'y en a pas eu ! Il y a 5.000 dossiers actifs. C'est quand même quelque chose ! Bien sûr, je crois qu'il faut regrouper tout cela mais il faut un projet avec une épine dorsale et que nous puissions tous avoir le même système.

Aujourd'hui, les patients peuvent se retrouver du Nord au Sud ou de l'Est à l'Ouest. Il faut pouvoir disposer d'un dossier lisible dans tous les hôpitaux ! Bien sûr que l'on a une difficulté ! Vous dites que le directeur général de la CNAM va être associé à ce travail, je suis soulagé car ils étaient aussi en train de développer leur propre système.

Par certains côtés, il est intéressant, comme en Angleterre, d'être en même temps la sécurité sociale et le ministère de la santé - mais c'est là un autre problème.

J'avais l'impression d'être un opposant à la politique de l'ancien gouvernement. Aujourd'hui, je suis défendu par l'actuelle ministre de la santé qui dit qu'il faut 10 ou 15 ans pour parvenir à un résultat. Je n'avais pas dit autre chose. Les Anglais ont actuellement dépassé les 10 ans et on n'est pas sûr qu'ils y arrivent !

Il ne faut pas tout envoyer en l'air mais redéfinir les choses. Vous avez maintenant un projet cohérent en termes d'opérateurs. C'est aussi une affaire d'argent. Il y en a qui ont dépensé beaucoup et qui se désespèrent de voir que cela ne débouche sur rien mais il faut absolument que l'on ait une épine dorsale sur le projet d'interopérabilité et d'informatisation - tout cela se tient - sans parler même du DMP. Une réflexion générale est indispensable, ainsi qu'un vrai comité de pilotage. J'ai le sentiment que c'est ce vers quoi l'on va.

S'agissant des hôpitaux, qui ont une certaine indépendance en la matière, peut-on les laisser faire quelque chose chacun dans leur coin ? Certainement pas ! Aujourd'hui, beaucoup d'argent a été dépensé. Il y a eu peu d'investissements informatiques avec Hôpital 2007 et, si on n'a pas d'épine dorsale, on risque de retomber dans les travers actuels !

M. Jean Arthuis, président - Il faut que l'Etat exerce pleinement son autorité, que ce problème soit porté au plus haut niveau et qu'il y ait ce qu'il convient de directivité !

M. André Loth - Il faut de l'autorité. Il faut aussi de la visibilité, de la lisibilité de la politique de l'Etat. C'est également la conclusion qui se dégage de tous les rapports.

Le ministère s'est engagé dans une démarche de plan stratégique des systèmes d'information de santé (PSSIS) sur 6 ans. Un travail avait été fait en réalité dès l'an dernier grâce à une concertation entre les acteurs. Nous avons travaillé de nouveau au printemps et à l'été ; nous nous engageons dans une concertation avec l'ensemble des acteurs sur un projet de plan stratégique. A ce stade, ce n'est qu'un projet mais il existe. Il est d'ailleurs à votre disposition. Ce projet est destiné à montrer qu'il ne s'agit pas simplement de matériel informatique et de logiciels mais d'outils qui servent dans l'ensemble des métiers de la santé, ce qui explique qu'il y a à la fois un pilotage stratégique unique et des pilotages métiers spécifiques. Ce n'est pas anormal dans un domaine aussi vaste que la santé.

M. Jean Arthuis, président - Madame la Présidente, s'agit-il là des éléments de réponse que vous attendiez ?

Mme Rolande Ruellan - Oui, le fait qu'il y ait un comité de pilotage, une MISS avec un responsable à temps plein et qu'elle soit relégitimée va tout à fait dans le bon sens. Les acteurs sont très divers et il faut toujours rappeler que c'est un domaine extraordinairement difficile. Quand la Cour des comptes formule des jugements négatifs, c'est toujours avec l'idée d'améliorer les choses mais nous ne disons pas que rien n'a été fait. C'est particulièrement difficile. La matière l'est et les acteurs sont très nombreux.

André Loth a eu raison de rappeler la bataille d'arrière-garde que les médecins ont menée contre SESAM VITALE. Il faut donc aussi avoir une force de conviction à l'égard des partenaires. C'est dans le quotidien que cela se joue. Il faut donc un pilote et une stratégie.

Quant aux organismes, la Cour n'a pas voulu dire qu'il fallait fusionner tout ce qui existe. Il faut simplement qu'ils travaillent de façon complémentaire. Il y en a peut être qu'il faut fusionner mais au total cela ne fait pas beaucoup de monde. L'ATIH représente une quarantaine de personnes, le groupement de modernisation une dizaine, puisqu'il fait travailler en fait les capacités des hôpitaux.

S'agissant du financement de ces acteurs, dans la mesure où ils sont dans la main de l'Etat, qui a la responsabilité du pilotage stratégique, ils doivent être financés sur le budget de l'Etat. De leur côté, la CNAM et les hôpitaux développent leurs systèmes d'information et c'est l'assurance maladie qui paye. C'est la position que la Cour avait essayé de défendre : le financement doit correspondre aux responsabilités de chacun.

Je ne pense pas que l'on dégagera des économies. Il y a plutôt ici une insuffisance de moyens. Le ministère souffre toujours d'insuffisance de moyens. Nous avons souvent dit dans nos rapports que les ministères sociaux ne sont pas particulièrement gâtés et que, dans la démarche de réduction des effectifs des administrations, il faudrait penser à un redéploiement, en sachant que le secteur sanitaire et social est difficile et a des besoins croissants. Ce n'est donc pas un gisement potentiel d'économies, hélas. Il s'agit moins de réduction des capacités que de définition des bonnes capacités au bon endroit, dans une stratégie d'ensemble.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial - Suivant les observations de la Cour des comptes, le comité interministériel d'audit des programmes recommande, dans son avis du 18 septembre 2007, sur le programme « Offre de soins et qualité du système de soins » de la mission « Santé », de transférer vers ce programme les crédits destinés au financement des trois missions spécialisées dont on a parlé et dont M. Leclerc recommandait le détachement de l'ARH d'Ile de France. Sont concernées la MT2A, la MAINH et la MEAH.

Pourriez-vous nous préciser le coût des ces trois structures ? D'après les éléments que j'ai en ma possession, le fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés les financerait à hauteur de 38 millions d'euros en 2008. S'agit-il bien là des dotations reçues par ces trois missions ?

Pouvez-vous nous préciser si vous êtes prêts à suivre les recommandations du rapport d'audit du CIAP et, ainsi, à rattacher budgétairement ces structures à la mission « Santé » ?

N'y voyez pas malice mais, dans le PLFSS qui nous est présenté, on serait alors amené à faire un amendement de suppression de ces crédits et à les transférer vers le budget de l'Etat. Vous connaissez la difficulté du Parlement pour réaliser ce genre d'opération mais, puisque nous sommes là au coeur du problème, pourriez-vous nous dire si ce transfert serait envisageable ?

M. Georges-François Leclerc - M. le rapporteur spécial, je n'ai pas dit qu'on allait regrouper tous les opérateurs. On va réfléchir sur le métier qu'ils font et vérifier si l'on ne peut pas rapprocher les missions d'appui qui permettent à la DHOS de piloter le système hospitalier, ce qui permettra de faire quelques économies sur les frais d'état major et d'avoir une plus grande visibilité en terme d'organigramme. Il y aura des rapprochements mais pas un regroupement en une seule main de l'ensemble des opérateurs. Certains font des métiers radicalement différents qui méritent que l'on maintienne une forme d'individualisation.

En second lieu, j'ai indiqué qu'à ce stade, nous envisagions de suivre la recommandation de la Cour des comptes qui consistait à ne pas rattacher ces missions à l'agence régionale de l'hospitalisation d'Ile de France. Ce n'est en effet pas recevable. Ce n'est pas la bonne traçabilité, si j'ose dire. Puisque la compétence est nationale, la « mère porteuse » doit être de portée nationale. C'est le premier point.

S'agissant du financement, vous me pardonnerez mon manque de précision - ce n'est pas un rôle de composition - mais je n'imaginais pas qu'il soit à ce point anormal que l'assurance maladie participe au financement de ces agences-là. C'est la raison pour laquelle il nous paraît difficile - en tout cas, on aurait dû, pour y parvenir, le faire en construction budgétaire - d'opérer un basculement du PLFSS au PLF. Je vous avoue que, dans l'état actuel des choses, je n'ai pas plus de précision sur la source de financement de la MAINH et de la MEAH et je vous prie de m'en excuser. Cela étant dit, cela n'a pas été prévu en construction budgétaire.

M. Jean Arthuis, président - Cela fait encore de belles discussions et forcément des risques de perte de temps et d'inertie qui se prolonge !

M. Yann Gaillard - Je suis effaré par ce que j'entends. Je vois tournoyer les sigles et je n'arrive pas à comprendre réellement ce qui se passe.

Je suis frappé par deux citations dans le dossier de base qui nous avait été donné. L'une est ancienne puisqu'elle date de novembre 2006. Si j'ai bien compris le référé est signé par le Premier président Séguin. Il dit quelque part que l'identifiant unique, qui est une condition absolue, n'est toujours pas entré dans les faits. En est-on toujours là ou chaque Français a t-il son identification unique ?

Deuxièmement, une lettre du directeur de cabinet de l'époque, M. Castex, de février 2007, dit que « les conditions nécessaires à l'interopérabilité des systèmes d'information ne sont pas encore réunies ». A t-on vraiment fait des progrès depuis ?

M. André Loth - Nous n'avons en effet pas répondu avec suffisamment de précisions à ces questions.

Sur l'identifiant de santé, il y a un sujet sociétal, un sujet technique et un sujet juridique.

Le sujet sociétal réside dans le fait que nous avons tous aujourd'hui un identifiant, assurés sociaux ou ayants-droit ou bénéficiaires de l'assurance maladie. Il s'agit du NIR - numéro d'inscription au répertoire national des personnes physiques. Ce NIR existe mais, pour des raisons liées à l'histoire de la loi informatique et liberté et au souci d'éviter les rapprochements de fichiers, la CNIL, consultée par M. Bertrand, a confirmé qu'elle ne souhaitait pas qu'il serve d'identifiant de santé. Le ministre de l'époque et le gouvernement ayant choisi de suivre l'avis de la CNIL, le trajet est un peu long sur les plans technique et juridique pour mettre en place un identifiant de santé propre à chaque personne résidant sur le territoire.

Il y a eu beaucoup de va et vient. Aujourd'hui, le schéma d'un identifiant dont on pourrait vérifier l'unicité se précise. Un projet de décret est très avancé ; pendant que nous parlons, une réunion a lieu sur ce sujet. Il est prévu, d'ici la fin de l'année ou le tout début de l'an prochain - le calendrier peut encore bouger mais assez peu - d'avoir la possibilité de présenter ce décret à la CNIL en même temps que l'ensemble des dispositifs juridiques qui concernent les aspects relatifs aux systèmes d'information.

L'interopérabilité comporte un double aspect. D'un côté, on entend à juste titre des critiques sur le fait que le cadre de l'interopérabilité n'a pas été défini. En même temps, on constate aujourd'hui un assez grand consensus sur les formats de documents, les techniques de transmission de données. Ce consensus a considérablement avancé avec les travaux autour du DMP. Même si le sujet n'a pas été abordé sur le fond, il y a sur le site web du GIP DMP des documents très importants sur la « DMP compatibilité », qui constituent un ensemble d'éléments sur les formats de documents et les méthodes de transfert, qui répondent en bonne partie au souci d'interopérabilité que vous évoquiez.

Cela étant, il reste beaucoup de travail pour mettre en place les éléments de cette épine dorsale. Il s'agit de publier tous les référentiels sur l'interopérabilité et sur la sécurité, de telle sorte qu'aucun professionnel de santé ou qu'aucun hôpital n'ait à s'inquiéter de savoir si les outils logiciels qu'il emploie ou qu'il achète sont bien conformes. Ils seront en effet certifiés.

Pour cela, il faut produire ces éléments. C'est du travail. Ce travail, je tiens à le dire, est plus avancé qu'on ne le croit souvent. Les praticiens de terrain ont beaucoup avancé sur les formats et les éléments techniques qui permettent à différents logiciels de se parler. Pour se parler, il n'est pas nécessaire d'avoir tous le même logiciel mais il faut que tous les logiciels soient conformes à un référentiel.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial - La Cour des comptes a noté que la fiabilité de l'identification des professionnels de santé, condition nécessaire à l'échange d'informations, fait encore défaut. Singulièrement, la carte professionnel de santé, qui est bien diffusée parmi les libéraux, est quasiment absente dans le secteur hospitalier (4 % toutes catégories confondues et 8 % pour les médecins hospitaliers).

Une amélioration est toutefois intervenue avec la parution du décret du 15 mai 2007 relatif à la confidentialité des informations médicales, qui impose désormais l'utilisation de la CPS pour tout accès aux informations médicales à caractère personnel conservé sur support informatique et pour leur transmission par voie électronique.

Dans ces conditions, quelles mesures concrètes, administratives et budgétaires, entendez vous prendre pour rendre effective l'application de ces dispositions et conduire les établissements de santé à développer une réelle politique de sécurité de leurs systèmes d'information ?

J'insiste sur ce point car c'est une des conditions de l'appropriation du futur DMP. En Angleterre, une association de malade avait été largement consultée et avait permis de faire tomber cette inquiétude. Là, on est un peu dans le brouillard. Tout le monde peut regarder le dossier des patients. On ne sait pas qui fait quoi à l'hôpital - stagiaires, internes, etc.

M. André Loth - L'inquiétude est très présente, parfois excessive, mais elle repose sur un fondement réel : l'informatique a comme caractéristique de permettre la copie à coût nul et immédiatement. Bien sûr, les dossiers papiers sont aujourd'hui mal conservés dans les hôpitaux et sont parfois facilement accessibles mais il est difficile d'en faire des milliers de copies en une seconde, alors que l'informatique permet des fuites massives. Ce ne sont sans doute pas les plus probables, mais on peut comprendre les craintes et le fait que la CNIL et le législateur soit vigilants à cet égard.

Deuxième remarque : la France est en fait en avance dans ce domaine. La carte des professionnels de santé portée par le GIP « cartes de professionnel de santé », créée en 1993, est une spécificité française. D'autres pays se sont lancés dans des voies semblables. La carte à puce est un moyen de s'identifier de manière certaine.

Cette carte, qui existe également pour l'ensemble des acteurs du secteur de la santé, est aujourd'hui très présente en ville parce qu'elle a servi à SESAM VITALE, à la télétransmission des feuilles de soins électroniques mais elle est quasiment absente à l'hôpital, parce que les hôpitaux n'en ont pas ressenti le besoin, étant peu informatisés dans la gestion des dossiers. Lorsqu'ils l'étaient, ils se contentaient de méthodes que l'on utilise au sein d'une organisation où règne une atmosphère de confiance.

Indiscutablement, il existe là un sujet. L'informatisation des dossiers médicaux dans les hôpitaux, qui est quand même réelle et qui a progressé très vite, implique que l'on prenne davantage de précautions, dès lors que ces dossiers circulent beaucoup plus qu'autrefois.

J'étais dans un hôpital encore récemment, dans lequel les dossiers existaient sous forme électronique mais n'étaient consultables qu'à l'intérieur du service. Aujourd'hui, on les transfère lorsqu'un malade revient dans un autre service. On a en ligne sur l'écran de l'ordinateur le dossier du malade.

Cela implique des moyens dont le coût fait parfois reculer les hôpitaux. Ce coût n'est pas celui des cartes, mais de l'ensemble du système qui permet d'habiliter des personnes. C'est l'organisation qui se trouve autour des systèmes de cartes qui coûte cher.

On parlait des subventions et du plan Hôpital 2012. Les hôpitaux augmenteront de toute manière leurs dépenses informatiques ; les praticiens et les gestionnaires le demandent parce qu'ils ont besoin des outils en question. Ceux ci ont en quelque sorte un retour sur investissement immédiat. Dans le cas de ces investissements de sécurité visant à se mettre en conformité avec des règles, voilà le domaine où des subventions d'opérations du type Hôpital 2012 trouvent leur justification.

Des travaux sont menés en ce sens. Il faut évidemment que les hôpitaux ne soient pas laissés seuls devant ces projets très difficiles. J'en ai moi-même mené un à l'hôpital de Lille récemment. Ce sont des projets difficiles et coûteux. Si l'on veut faire baisser les coûts et que cela fonctionne, il faut les aider.

M. Jean Arthuis, président - Y a t il d'autres questions ?

Une question brève sur les crédits du Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS), qui s'est substitué au FAQSV et qui doit regrouper aussi les crédits de la dotation nationale de développement des réseaux.

La Cour des comptes, dans son rapport de septembre 2007, constate que, manifestement, cette dotation, allouée par l'assurance maladie, n'a pas fait progresser de façon significative l'interopérabilité des systèmes d'information des professionnels de santé participant aux réseaux. Pour le PLFSS 2008, vous avez prévu 301 millions d'euros pour le FIQCS. J'imagine que vous avez tenu compte des observations de la Cour. Comment voyez-vous l'utilisation de ces 301 millions d'euros et en quoi allez-vous pouvoir vous mettre à l'abri de nouvelles critiques de la Cour ?

M. Georges-François Leclerc - Oui. On n'en est pas à la budgétisation de ce fonds mais il est clair qu'on reprendra les recommandations de la Cour au moment où on construira cela en fin d'année.

M. Jean Arthuis, président - C'est un fonds qui a notamment pour objet de rapprocher l'hôpital et les praticiens.

M. Georges-François Leclerc - En effet. C'est un fonds qui intervient dans différents domaines : il peut intervenir sur la démographie médicale, qui est un sujet d'actualité. Il peut, par exemple, financer des maisons médicales, le support logistique ou administratif de la médecine mais il peut aussi intervenir dans le secteur que vous avez indiqué.

M. Jean Arthuis, président - C'était une audition pour suite à donner.

Avez-vous des observations à ajouter ? L'autorité est là, le pilotage est là, il y a une épine dorsale. Il faudra du temps mais vous êtes tous garants de la cohérence et de l'interopérabilité. C'est donc sous le signe de la confiance que nous allons nous séparer.

Nous serons sans doute amenés dans quelques mois à vous demander où en est votre plan de progression. Vous avez de la chance car vous avez des marges de progression considérables !

Nous pourrions envisager de publier le référé et le rapport de la Cour, ainsi que les échanges auxquels cette audition a donné lieu.

Chacun en est il d'accord ? Il en est ainsi décidé.

Merci.

La séance est levée à 18 heures 35.

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