B. LE FONCTIONNEMENT DE LA MISS

1. Analyse succincte des missions confiées à la MISS

La mission a été créée dans le but "de renforcer la coordination de la démarche d'informatisation du système de santé afin de garantir la cohérence des choix stratégiques et techniques comme le respect des règles éthiques".

À ce titre, elle veille à la cohérence globale de la démarche d'informatisation et à la mise en oeuvre harmonieuse des différents projets dans le respect des responsabilités confiées en ce domaine aux organismes concernés et en particulier de la maîtrise d'ouvrage assurée par la CNAMTS sur le sujet SESAM-VITALE.

Elle a également la charge de coordonner l'action des différentes directions du ministère de l'emploi et de la solidarité intéressées par le projet.

La mission apparaît ainsi comme un organe central de coordination de l'ensemble du système d'information en santé chargé de coordonner les maîtres d'ouvrages et les projets et d'assurer, à ce titre, les relations avec les professionnels et les industriels du secteur.

2. Les activités opérationnelles de la MISS

Au moment de l'enquête, la mission se trouvait dans une situation transitoire. Le chargé de mission venait, en effet, de changer d'affectation sans avoir été remplacé. La Cour a donc pris l'option de le rencontrer au titre de ses anciennes fonctions.

Conformément aux textes fondateurs, les champs principaux d'intervention de la mission ont été les projets relatifs à la carte de professionnel de santé (CPS), à la carte d'assuré social (vitale1 et vitale 2), au réseau santé-social et à l'informatisation du poste de travail des praticiens.

Pour des raisons historiques liées aux difficultés rencontrées dans la montée en charge du système SESAM-Vitale, la mission s'est consacrée à la mise en oeuvre des systèmes sécurisés de communication électronique des données liés à la carte Vitale et au réseau CPS et, par voie de conséquence, aux relations avec les institutions et les professionnels du domaine.

Le chargé de mission, assisté de quatre personnes, dont deux secrétaires, a également joué un rôle important, mais probablement insuffisant, de coordination des maîtres d'ouvrage et des services ou organismes chargés des systèmes d'information en santé, tenant régulièrement des réunions de coordination avec les responsables concernés.

Selon l'opinion des interlocuteurs rencontrés au cours de l'enquête, la mission s'est toutefois trouvée confrontée à plusieurs types de difficultés :

1. Une légitimité toute relative

La mission apparaît plus comme un organe facilitateur, ayant un certain pouvoir de persuasion, que comme une unité normative qui serait le relais de la volonté politique exprimée par le ministre.

Vis à vis de ses interlocuteurs, notamment les directions opérationnelles du ministère, la mission n'apparaît pas avoir eu toute la légitimité souhaitable 70 ( * ) .

En outre, l'intérêt manifesté par le pouvoir politique pour les systèmes d'information est éminemment variable au cours du temps, et la mission n'a peut être pas bénéficié de toute l'attention qu'elle était en droit d'attendre pour mener à bien l'ensemble de ses missions.

2. La priorité accordée aux projets opérationnels

Sous la pression des événements, la mission s'est surtout investie dans le domaine du système d'information de l'assurance maladie sans arriver à s'imposer sur l'ensemble du champ des systèmes d'information en santé.

Selon son ancien responsable, on se trouve aujourd'hui, avec le DMP, dans la situation où on se trouvait avec SESAM-Vitale à la veille de sa montée en charge. Cette situation est caractérisée par l'absence d'un maître d'ouvrage unique clairement identifié, d'une part, et par la nécessité de coordonner de nombreux acteurs, d'autre part.

La mission n'a pas l'autorité voulue pour assurer la maîtrise d'ouvrage. En revanche, la coordination des acteurs peut relever de son champ de compétence, sous réserve que sa légitimité soit effectivement reconnue.

3. La faiblesse des moyens

La faiblesse des moyens de la mission explique en partie ses difficultés. Il est cependant intéressant de constater qu'elle ne constitue pas une exception. Le système d'information en santé se caractérise, en effet, par l'existence de nombreuses micro structures spécialisées dont l'importance des effectifs est souvent, l'ATIH mise à part, inférieure à une dizaine de personnes.

Cette situation découle assez naturellement de l'approche par les outils déjà relevée. Ces structures ont en effet été créées pour répondre à chaque fois à un problème particulier.

Prises dans leur ensemble, elles mobilisent cependant des moyens importants, mais une bonne partie de ces moyens est absorbée par les tâches de coordination visant à compenser les inconvénients de la dispersion, sans que l'on puisse écarter le risque de voir se développer des actions concurrentes.

3. Contribution de la MISS à l'interopérabilité

La MISS a joué un rôle majeur pour l'interopérabilité du système d'information de l'assurance maladie, notamment par son action de coordination et de pilotage du démarrage du dispositif SESAM-Vitale, et dans le domaine de la sécurisation des échanges.

Elle l'a réalisé en organisant des structures de projet mobilisant les ressources chez les différents acteurs (DHOS, DSS, DGS, DRESS, CNAMTS etc....).

La problématique développée aujourd'hui en matière d'interopérabilité des systèmes d'information en santé semble, en revanche, lui avoir en partie échappé du fait de la dispersion des structures et de la multiplicité des projets. En effet, la mission préconisait de mener en parallèle les projets orientés "patient", comme le DMP, et les expériences orientées "structures de soins", sur les grosses pathologies, les urgences, le circuit du médicament ou les plate formes interrégionales. Elle ne semble pas avoir été entièrement suivie sur ce plan.

Elle a enfin joué un rôle prépondérant dans l'émergence de nombreux projets et l'élaboration du cadre législatif et réglementaire de l'interopérabilité, notamment en ce qui concerne la sécurité des échanges et les principes de confidentialité.

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La mission apparaît comme un organe central de coordination de l'ensemble du système d'information en santé chargé de coordonner les maîtres d'ouvrages et les projets et d'assurer, à ce titre, les relations avec les professionnels et les industriels du secteur.

La Cour constate cependant qu'il y a bien eu nomination d'un chargé de mission mais pas de création d'une mission en tant que structure dotée des moyens suffisants.

Elle observe que la MISS a bien rempli les missions opérationnelles qui lui étaient confiées, notamment pour la mise en place de SESAM-Vitale.

Elle constate qu'en revanche, la MISS n'a pas totalement rempli sa mission de coordination stratégique globale, pourtant essentielle au niveau du ministère. Son positionnement dans les structures et la faiblesse de ses moyens en sont la cause probable. Elle n'a pas non plus, de ce fait, joué le rôle de maître d'ouvrage.

La MISS est, depuis 2005, rentrée en sommeil et le chargé de mission n'a été remplacé qu'au cours de l'année 2006.

Cette défaillance a laissé les organismes de mise en place du DMP et de la T2A assumer, chacun pour son compte, le rôle de maître d'ouvrage des systèmes et de leur interopérabilité, mais avec un point de vue limité à leurs propres objectifs.

Ainsi, il n'a pas été donné suite au rapport de l'IGAS de 2002, qui proposait de donner trois missions à l'État : animation d'une réflexion conceptuelle et prospective, normalisation en matière de sécurité de l'information, et normalisation des principes de l'interopérabilité des systèmes faisant l'objet de financements publics.

* 70 Le rapport de l'IGAS, déjà cité, note à cet égard que « Le positionnement de la mission a souffert de la non invitation, sauf exception, du chargé de mission, aux réunions du comité des directeurs du ministère de la santé ».

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