B. LE RÔLE DES SERVICES DE BERCY

1. Tracfin

a) Le blanchiment d'argent à travers les jeux

Autrefois, quand le concept de blanchiment d'argent sale n'était pas d'actualité, les casinos pouvaient, suivant les endroits, être plus soupçonnés d'abriter davantage des malfrats que des capitaux douteux.

Aujourd'hui, la police des jeux a pour mission de traquer les deux, et le fait sans désemparer, en particulier à l'occasion des transferts de propriété des casinos ou d'achats de parts. Au point même de vérifier scrupuleusement la nature des capitaux des fonds de pension étrangers qui s'investissent de plus en plus dans les établissements de jeux français.

Il y a donc deux niveaux de risques de blanchiment : celui des flux financiers importants autour des capitaux de possession et celui lié aux activités de jeu au quotidien.

Pour le premier, la police des jeux doit déjouer les manoeuvres subtiles des milieux experts en sociétés écrans ; pour le second sa tâche est encore plus compliquée étant donnée la multiplicité des sites, des méthodes, et des personnes à surveiller.

Les recherches de typologie de blanchiment dans le secteur des jeux démontrent que le « blanchisseur », soit achète un grand nombre de jetons ou de plaques avec l'argent à blanchir, mais ne joue pas et, dans la foulée, en demande le remboursement en espèces ou par chèque, soit joue de très fortes sommes au risque de les perdre.

Mais il risque fort, même dans ce cas, d'être interpellé pour avoir joué des sommes dont son niveau de revenus ne justifie pas la possession.

L'objectif est d'obtenir un chèque officiel. Il peut, s'il en trouve une, faire le siège de ces machines automatiques, qui débitent des jetons contre de la monnaie fiduciaire. Elles sont peu nombreuses et surveillées par vidéo, mais elles ne détectent pas les faux billets et ceux qui, tachés d'encre, proviennent des hold-up.

Tout gagnant de plus de 1.000 euros (par réunion) verra son identité complète relevée et enregistrée.

C'est à cette occasion que les « interdits de jeux » qui, ayant enfreint l'exclusion, avaient gagné aux MAS, étaient identifiés et se voyaient jusqu'alors opposer un refus de paiement dont la légalité fait aujourd'hui question.

Une étude réalisée à la demande du syndicat des casinos de France, par Maîtres Klein et Goddard, avocats au Barreau de Paris, estime cependant que « le non paiement est légal puisque dans le contrat de jeu qui s'établit entre le casino et le joueur interdit, la cause du contrat est illégale quand celui-ci aborde la machine à sous, parce que le joueur n'est pas autorisé à jouer ».

Toute personne changeant plus de 1.000 euros est soumise à la même obligation. Se posent toutefois les problèmes des changeurs multiples et des individus qui -on l'a vu- remettent ou reçoivent des moyens de paiement en échange de jetons ou de plaques, etc.

D'ici peu, la réglementation ne permettra à la caisse des MAS de n'émettre un chèque que sur présentation d'un bon de paiement, ce qui est une bonne mesure contre le change inverse.

Il sera également impossible, pour les mêmes raisons, d'introduire dans un accepteur de billets (bill acceptor), un montant supérieur à ce que requiert la MAS correspondante.

On notera que le seuil obligatoire de déclaration de soupçon n'est, pour les banques, que de 7.500 euros, et de 5.000 euros pour la FDJ selon le décret du 12 mai 2005 : que de disparités ! Il y a d'ailleurs plusieurs contentieux en cours à ce sujet, à la suite de plaintes de joueurs.

En dehors des casinos, le blanchissant tentera de racheter leurs tickets à des gagnants de la Française des jeux ou du PMU, quitte à les payer plus cher que la valeur du gain.

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