B. LA GESTION DES ASSISTANTS TECHNIQUES : UN DÉFI IMPORTANT ET COMPLEXE

1. Un exemple supplémentaire de complexité et de concurrence administratives

L'idée originelle était d'externaliser auprès du groupement la gestion de la totalité des assistants techniques ; ce projet a toutefois été abandonné compte tenu de l'ampleur des effectifs concernés : près de 1.800 personnes, dont 1.410 ETPT relevant du MAE (données du projet de loi de finances pour 2006) et 320 AT/ETI financés par l'AFD, dont 180 au titre des anciens projets du FSP transférés à l'Agence.

Il reste que la nouvelle mission confiée à FCI, portant sur la gestion des 180 ETI financés par l'AFD sur crédits délégués du MAE, représente un défi en termes de ressources humaines et financières 27 ( * ) , confirme l' « autonomisme » de l'AFD, dont le plan de développement international supposait de ne pas assumer une gestion des AT perçue comme trop « hexagonale », et tend à accroître la complexité du dispositif , qui vient s'ajouter à celle des compétences des différents GIP positionnés sur la gestion de l'expertise publique.

La direction générale du GIP a ainsi souligné que ce repositionnement conduisait à un véritable changement d'identité de FCI , qui passe d'une logique plutôt « offensive » de recherche de marchés à une logique « défensive » centrée sur la protection contre les risques juridiques et financiers afférents à la gestion des AT/ETI.

Votre rapporteur spécial constate que l'on est désormais en présence de trois modes de gestion de l'expertise publique en matière de développement, sans intégrer les experts relevant des GIP d'autres ministères : les experts relevant des missions originelles de FCI, les fonctionnaires AT/ETI financés par l'AFD et désormais gérés par FCI, et les AT relevant directement du MAE. Votre rapporteur spécial estime à tout le moins qu'on ne peut maintenir durablement deux régimes distincts de mobilisation et de gestion des AT publics financés par des crédits budgétaires de même nature mais émanant directement du Quai ou de l'AFD.

2. Les efforts de prévention des risques juridiques et financiers

Durant le premier semestre 2005, l'AFD et la DGCID ont été mobilisées par les négociations portant sur l'attribution de la gestion des AT à FCI et sur la prise en charge du surcoût de cette mesure, estimé en juin 2005 à un million d'euros jusqu'à fin 2008 . La direction générale de FCI a cependant déploré d'avoir été peu associée aux discussions ni d'avoir reçu d'instructions précises de la tutelle des affaires étrangères - peut-être tributaire de la réorganisation de la DGCID 28 ( * ) - lors des réunions qu'elle a conduites avec l'AFD à partir de septembre 2005. La coopération avec l'AFD a été jugée « exemplaire » par FCI dans la phase amont de réflexion sur les mécanismes juridiques de reprise des AT, mais plus difficile durant la phase opérationnelle d'identification des projets et de mise au point de la convention de partenariat entre les deux organismes.

La nouvelle mission de FCI crée trois nouveaux types de risques :

- un double risque juridique , susceptible de contentieux : la requalification en contrat de droit public des contrats de travail de droit privé conclus par FCI avec les ETI 29 ( * ) , compte tenu de la présomption que la nouvelle responsabilité du GIP ressortisse à un service public administratif ; et la qualification de sa qualité d'employeur réel plutôt que d'intermédiaire pour le compte du MAE ou de l'AFD, ce qui conduit aujourd'hui le groupement à prendre des dispositions pour exercer effectivement et officiellement ces compétences d'employeur ;

- un aléa lié à l'innovation de la reconnaissance des Etats bénéficiaires de l'aide française comme maîtres d'ouvrage des projets d'assistance technique , et partant, décisionnaires de la part, de la composition (experts publics ou privés) et de la durée de l'assistance technique. Ceci implique dans l'immédiat de difficiles négociations avec ces Etats pour le positionnement et la rémunération des AT 30 ( * ) , dans la mesure où cette nouvelle incertitude suppose de la part de FCI des capacités de formation, d'anticipation et de négociation, compte tenu notamment du coût paramétrique élevé d'un AT (jusqu'à 150.000 euros par an) pour la plupart des Etats partenaires. FCI et l'AFD ont également conçu un contrat-type comportant deux types de clauses , respectivement destinées à :

> sécuriser le paiement de l'expertise par l'Etat bénéficiaire via une délégation de l'ordonnancement et des paiements par l'Etat à l'AFD ;

> permettre un règlement internationalisé des différends , et non pas par une juridiction locale ;

- enfin un risque financier et fiscal , conditionnant l'équilibre financier du groupement et dépendant du rythme de montée en charge des recrutements des nouveaux ETI, de la gestion des interruptions de contrat à la demande des Etats maîtres d'ouvrage, et de la mise en oeuvre d'un principe de similarité du traitement salarial et fiscal 31 ( * ) par rapport à l'employeur de référence (en l'espèce le MAE), entre les ETI de l'AFD et les AT du MAE.

Un manuel complet de procédures a d'ores et déjà été présenté au conseil d'administration, qui l'a validé le 6 mars 2006. La capacité de FCI à gérer ce changement et à offrir une plus-value dès 2006 sera déterminante pour son équilibre financier, lever les inquiétudes de la communauté des ETI et limiter les risques de contentieux.

Le directeur général de FCI a également proposé à la DGCID de mettre en place, après appel d'offres, un cycle de formation initiale d'un mois pour les ETI financés par l'AFD , qui serait obligatoire et qualifiant et dont le GIP serait maître d'oeuvre. Il existe toutefois une ambiguïté sur la provenance du financement d'une telle formation : serait-elle à la charge de l'Etat bénéficiaire ou prélevée sur la marge brute de 12 % dégagée sur la nouvelle activité de gestion des ETI ?

* 27 En particulier au regard de l'enjeu que représente la rénovation globale de l'assistance technique, qui constitue un des avantages comparatifs de la coopération française.

* 28 Un arrêté du 8 mars 2006 prévoit en particulier la création d'un bureau de la tutelle au sein du service des moyens et du réseau et d'une sous-direction chargée de la tutelle de l'AFD au sein de la direction des politiques de développement.

* 29 L'article 5 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit autorise le gouvernement à légiférer par ordonnance pour « conférer un cadre législatif aux groupements d'intérêt public ». Cette ordonnance, qui devrait permettre aux GIP de choisir la nature de leurs contrats de travail, de droit public ou privé, n'a toutefois pas encore été prise.

* 30 FCI deviendra en effet le cocontractant direct du maître d'ouvrage délégué de l'Etat bénéficiaire.

* 31 Qui se traduit par des procédures empiriques de défiscalisation locale.

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