Article 8 -
(Article 259 du code rural)

Renforcement des pouvoirs d'inspection et de contrôle des agents habilités

Cet article propose de modifier l'article 259 du code rural en étendant l'inspection et le contrôle aux produits végétaux et en reconnaîssant aux agents du ministère de l'agriculture des pouvoirs de police administrative et judiciaire.

L'article 259 dans son paragraphe A reprend les dispositions actuelles sur le service d'État d'hygiène alimentaire chargé de l'inspection et du contrôle de l'application des dispositions de l'ensemble du titre IV. Ce service comprend dans sa nouvelle rédaction les vétérinaires inspecteurs, les vétérinaires qualifiés, assistés d'ingénieurs des travaux agricoles, de techniciens des services du ministère chargé de l'agriculture, de préposés sanitaires et d'autres personnels qualifiés relevant du ministère de l'agriculture et ayant la qualité de fonctionnaires ou d'agents de l'État.

L'inspection et le contrôle des végétaux, produits végétaux et denrées d'origine végétale destinés à l'alimentation humaine ou animale sont effectués par les ingénieurs chargés de la protection des végétaux, assistés de techniciens des services du ministère de l'agriculture et d'autres personnels qualifiés du ministère de l'agriculture ayant la qualité de fonctionnaires ou agents de l'État.

Ces fonctionnaires et agents peuvent être assermentés en vue de la constatation des infractions ; ils ont, dans leur domaine de compétence, accès aux locaux, installations, lieux et véhicules à usage professionnel, mais non aux domiciles et à la partie des locaux à usage de domicile. Cet accès ne peut avoir lieu qu'entre 8 et 20 heures ou, indique l'article 8, en dehors de ces heures, quand l'accès au public est autorisé ou lorsqu'une activité est en cours. Ils peuvent, en outre, recueillir tous les renseignements propres à l'accomplissement de leur mission et en prendre copie.

C'est dans un souci d'efficacité de la répression que ce paragraphe confie aux agents du ministère chargé de l'agriculture des pouvoirs de police administrative dans l'exercice de leurs missions de contrôle et de surveillance générale.

Cependant, bien que les agents de l'administration disposent de larges pouvoirs lorsqu'il s'agit d'investigations s'inscrivant dans le cadre d'une procédure administrative de contrôle, le Conseil constitutionnel a défini le régime des garanties constitutionnelles applicables au droit d'accès de l'administration aux locaux professionnels, que les agents doivent observer. Il s'agit de :

- la présence de l'occupant lors de la visite ;

- la notification du procès-verbal de visite à l'occupant, imposée par la décision n° 90-286 DC du 28 décembre 1990 ;

- le respect du principe du contradictoire (décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983) sauf urgence ou circonstances exceptionnelles et sous réserve des nécessités de l'ordre public ;

- une limitation du droit d'accès dans le temps et dans l'espace.

C'est au regard de ces garanties constitutionnelles que des pouvoirs de police administrative ont été conférés aux agents du ministère chargé de l'agriculture en vertu de l'article 8 du projet de loi.

Ce paragraphe étend donc le champ de compétences des fonctionnaires et agents de l'État de services vétérinaires de la protection des végétaux et reprend en partie les dispositions des décrets n° 67-295 du 31 mars 1967 et n° 71-636 du 21 juillet 1971 qui feraient ainsi l'objet de dispositions législatives.

L'Assemblée nationale a adopté à ce paragraphe une modification précisant la qualité de vétérinaires inspecteurs. Votre rapporteur approuve cette disposition et vous propose un amendement permettant de ne pas faire état d'un éventuel lien de subordination entre les différentes catégories d'agents. Par ailleurs, il vous propose un second amendement précisant que ces agents ne peuvent effectuer ces contrôles qu'en présence du directeur de l'établissement ou de son représentant, à défaut d'un membre habilité du personnel. Si votre rapporteur souhaite ainsi garantir une certaine transparence dans les contrôles, il ne désire pas cependant les rendre inopérants en exigeant impérativement la présence du directeur de l'établissement ou d'un de ses représentants. Il sera toujours possible à la personne présente, qui dispose d'une certaine autorité puisqu'elle est habilitée, d'avertir les responsables de l'établissement s'ils ne sont pas là lors du contrôle.

Au paragraphe B de l'article 8 , il est fait mention des pouvoirs de police administrative reconnus aux agents habilités qui figurent actuellement dans des décrets.

Les inspections et contrôles effectués pour l'application des dispositions du titre IV sont attestés par un procès-verbal dont une copie est remise à l'intéressé ou par l'apposition de marques de salubrité sur les denrées. Les agents habilités peuvent prélever des échantillons sur les animaux, les produits ou les denrées qu'ils contrôlent, échantillons qui sont ensuite analysés par un laboratoire agréé par l'autorité administrative. Votre rapporteur vous propose un amendement précisant qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du prélèvement des échantillons. Une telle dispositin permet d'harmoniser cette rédaction avec celle des articles 26 et 40 du présent projet de loi

Dans l'attente des résultats d'analyse des échantillons ou informations complémentaires qui leur sont nécessaires, les agents chargés du contrôle peuvent décider la consignation des animaux ou en interdire temporairement l'abattage ; ils peuvent de la même façon consigner les produits et denrées destinés à l'alimentation humaine ou animale.

Les animaux, produits ou denrées, objets d'une des mesures précitées, demeurent à la charge et à la garde du détenteur. La mainlevée de ces mesures peut être ordonnée à tout moment par les contrôleurs. Votre rapporteur souhaite que cette mainlevée, une fois décidée, soit exécutée sans délai afin de ne pas prolonger inutilement la consignation.

Dans son paragraphe C , l'article 8 du projet de loi contient des dispositions de police judiciaire.

Dès 1951, dans un arrêt du Conseil d'État " Baud " (CE sect. 11 mai 1951), le commissaire du Gouvernement indiquait que l'administration accomplissait des missions de police administrative lorsqu'elle exerçait des missions de contrôle et de surveillance générale et qu'il n'y avait de police judiciaire que lorsque l'opération consistait dans la recherche ou à l'arrestation des auteurs d'une infraction déterminée.

La distinction ainsi opérée par le Conseil d'État entre pouvoirs de police judiciaire et pouvoirs de police administrative a été reprise par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 décembre 1990 (décision n° 90-281 du 27 décembre 1990 relative à la loi sur la réglementation des télécommunications) puisque le Conseil reconnaît aux agents de l'administration le pouvoir non seulement de constater les infractions à la législation sur les télécommunications en dressant à cet effet un procès-verbal, mais également de les rechercher.

C'est dans le respect de cette jurisprudence constante du Conseil constitutionnel que ce paragraphe confère ainsi aux agents du ministère chargé de l'agriculture des pouvoirs de police judiciaire en vue de la recherche et de la constatation des infractions aux dispositions des titres Ier, II et III du projet de loi.

Les mesures du paragraphe C s'inscrivent donc dans le cadre de la recherche des infractions ; le procureur de la République est préalablement informé des opérations envisagées et peut s'y opposer. Les infractions sont constatées par des procès-verbaux qui font foi jusqu'à preuve du contraire et doivent, sous peine de nullité, être adressés au procureur de la République, une copie étant transmise dans ce même délai à l'intéressé. Le projet de loi initial du Gouvernement avait fixé le délai de transmission des procès-verbaux au procureur de la République à quinze jours. L'Assemblée nationale a ramené, à juste titre, ce délai à trois jours.

Comme dans l'hypothèse du paragraphe B, les agents habilités peuvent prélever des échantillons sur les animaux, produits ou denrées et, dans l'attente des résultats d'analyse de ces échantillons, consigner lesdits animaux, produits ou denrées, le procureur de la République étant informé de cette mesure sans délai.

Les opérations de consignation sont constatées par un procès-verbal transmis au procureur de la République dans les vingt-quatre heures, une copie étant remise à l'intéressé dans ce même délai.

Comme en matière de police sanitaire, les animaux, produits ou denrées, objet des mesures précitées sont laissés à la charge et à la garde du détenteur.

Enfin, la mesure de consignation ne peut excéder quinze jours que sur autorisation du procureur de la République. La mainlevée peut être ordonnée à tout moment.

Dans le paragraphe D de ce même article , il est prévu que les frais résultant des analyses des échantillons et de la mesure de consignation sont à la charge du propriétaire ou du détenteur.

Cette disposition a fait l'objet d'importantes discussions lors de l'examen du projet de loi par l'Assemblée nationale.

En raison de l'importance des charges que doivent supporter les intéressés et de l'injustice de la situation de ceux qui auront dû acquitter des frais importants si les résultats des analyses s'avèrent négatifs, votre rapporteur souhaite préciser que les frais résultant des analyses et de la consignation sont à la charge de l'Etat si les résultats sont négatifs.

Votre rapporteur propose donc à votre commission un amendement sur ce paragraphe.

Enfin, dans son paragraphe E , l'article 8 du projet de loi rappelle que les fonctions d'inspection et de contrôle ainsi définies ne font pas obstacle à l'exercice des fonctions de recherche et de constatation d'infraction dont sont chargées d'autres administrations de l'État dans le cadre de leurs compétences propres (douanes, direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes).

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

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