Art. 8 - Non-recours à l'obligation alimentaire et recours sur succession

Le présent article qui était l'article 5 dans le texte originel de la proposition de loi, a pour objet, d'une part, d'exclure tout recours à l'obligation alimentaire et, d'autre part, de prévoir un recours sur succession.

Le premier alinéa de cet article prévoit, en effet, d'exclure tout recours à l'obligation alimentaire telle que définie par les articles 205 à 211 du code civil et pour plusieurs raisons. Tout d'abord, parce que l'obligation alimentaire, telle que codifiée au XIXème siècle, consiste véritablement en la fourniture d'aliments et le gîte. Or, de nos jours, cette obligation va beaucoup plus loin, notamment pour les personnes qui sont en établissement et dans la région parisienne où les sommes réclamées ne sont en rien comparables aux dépenses d'aliments. Et les enfants, à qui l'on réclamerait d'assume la dépendance de leurs parents, seraient, du fait du vieillissement de la population, soit des personnes déjà retraitées avec la baisse des revenus qui en découle, soit des gens qui ont dépassé cinquante ans et qui ont de grands enfants qu'ils doivent également aider à s'établir dans la vie, enfants qui peuvent être au chômage ou en train de terminer des études. Ces sexagénaires ou quinquagénaires sont ce qu'on appelle la génération pivot qui aide à la fois ses aînés et les plus jeunes. Il serait donc difficile, alors que le chômage pèse sur l'avenir professionnel des jeunes comme des moins jeunes, de leur imposer juridiquement cette charge de l'obligation alimentaire alors qu'ils aident déjà, fort souvent, bénévolement leurs aînés.

De plus, le fonctionnement actuel de l'obligation alimentaire semble relativement peu efficace : lourdeur des procédures, engorgement du tribunal de grande instance, difficulté de retrouver tous les débiteurs d'aliments.

Par ailleurs, l'évolution de notre société avec la baisse de la nuptialité, la croissance des familles monoparentales fait que ce type de recours sera, de facto, encore moins aisé. Un père ou une mère qui ne se sera jamais occupé de son enfant ne pourra, valablement, faire appel à cette obligation.

Ainsi, compte tenu de la réalité sociale actuelle, le recours à l'obligation alimentaire ne semble guère opérant. En revanche, selon votre commission, un recours sur la succession du bénéficiaire apparaît tout à fait légitime dans la mesure où le département aura assumé le coût de sa dépendance.

Votre commission prévoit donc d'une manière plus explicite que dans la proposition de loi, un recours en récupération des sommes équivalant à la prestation spécifique dépendance attribuée au bénéficiaire, intenté par le département. Ce recours doit s'exercer, tout d'abord, contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre sa succession mais aussi contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande ou dans les dix ans qui ont précédé celle-ci, ceci pour éviter, autant que faire se peut, l'évasion d'héritage. À cet égard, il faut remarquer que votre commission durcit les dispositions en vigueur figurant à l'article 146 du code de la famille et de l'aide sociale puisque le délai antérieur à la demande pendant lequel la donation a été effectuée et pour lequel l'administration peut exercer son droit de réexamen est doublé, passant de cinq à dix ans. Enfin, le département peut exercer son recours contre le légataire.

Par ailleurs, la proposition de loi initiale prévoyait de faire une différence entre le domicile et l'établissement concernant le recours sur succession, puisque ce recours devait s'exercer dès le premier franc pour les personnes en hébergement et à partir d'un seuil fixé par décret, mais qui pourrait être de 300.000 F 7 ( * ) , pour celles qui restaient chez elles.

Sur proposition de son rapporteur, votre commission a estimé qu'il n'était pas justifié de faire une différence entre l'hébergement et le domicile, dans la mesure où il faut laisser le libre choix aux personnes âgées de choisir leur lieu de résidence et où celles qui entrent en établissement sont les plus dépendantes. Une autre raison, pratique celle-là, plaide en faveur de l'identité du seuil. Très souvent, la personne aura bénéficié de la prestation spécifique dépendance à domicile avant de l'obtenir en établissement. Comment alors expliquer à celle-ci que tant qu'elle reste à domicile, il y a un seuil, alors que dès qu'elle entre en établissement la récupération sur succession se fait dès le premier franc ? Ceci paraît, pour le moins, peu compréhensible.

Enfin, votre commission a souhaité apporter un certain nombre de précisions traditionnelles en matière de prestations d'aide sociale. Ainsi, elle a ajouté que les recouvrements relatifs à la PSD sont opérés comme en matière de contributions directes. De même, elle a mentionné que le ministère d'avoué n'est pas obligatoire pour les recours en récupération portés devant le tribunal de grande instance ou la cour d'appel. Enfin, lorsque la PSD a été versée en établissement, elle a précisé que, pour la garantie des recours en récupération précités, les dispositions de l'article 148 du code de la famille et de l'aide sociale sont applicables et que, donc, les immeubles appartenant aux bénéficiaires de l'aide sociale sont grevés d'une hypothèque légale. L'article 148 du code de la famille et de l'aide sociale mentionne, notamment, que les formalités relatives à l'inscription de l'hypothèque ainsi qu'à sa radiation ne donnent lieu à aucune perception au profit du Trésor.

Compte tenu de ces différentes remarques, votre commission a modifié l'article 5 initial et vous propose de l'adopter ainsi modifié.

* 7 qui est le seuil à partir duquel les enfants du disparu doivent acquitter des droits de succession.

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