Article 25 - Régime juridique des opérations financières

Commentaire : le présent article reprend l'article 6 bis de la loi de 1988 sur les bourses de valeurs. Il est relatif aux opérations financières publiques.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Cet article transfère au CMF la compétence de réglementation des opérations d'offre publique, garantie de cours et retrait obligatoire, actuellement détenue par le CBV qui l'effectue par le truchement de son règlement général. La rédaction en est reprise pour l'essentiel de l'article 6 bis de la loi du 22 janvier 1988 sur les bourses de valeurs, tel qu'inséré par la loi du 2 août 1989, et modifié par la loi n° 93-1444 du 31 décembre 1993.

Le premier alinéa est la reprise du premier alinéa de l'article 6 bis de la loi de 1988. Il restreint le champ d'application aux seuls marchés réglementés au sens de la directive, tels qu'ils sont définis à l'article 21.

Quatre opérations sont visées : l'offre publique d'achat obligatoire, la garantie de cours, l'offre publique de retrait, enfin le retrait obligatoire.

Le a) traite de l'offre publique d'achat (OPA) obligatoire. Il s'agit de l'offre d'acquérir une quantité déterminée de titres ( ( * )19) , qu'une personne physique ou morale, agissant seule ou de concert avec d'autres, est tenue de déposer obligatoirement dès lors qu'elle franchit un seuil de capital ou de droits de vote, défini par le Conseil des marchés financiers.

Par rapport à la loi de 1988, cet alinéa présente trois différences.

La première est qu'il y est précisé que l'action de concert doit répondre à la définition de l'article 356-1-3 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales. Cette précision va de soi, puisque cet article a été inséré dans la loi de 1966 par la loi du 2 août 1989.

La seconde est que la notion de marché réglementé remplace l'énumération de la cote officielle et du second marché. Ces deux marchés sont reconnus réglementés au sens de la directive aux termes de l'article 31 de la loi de 1988, tel qu'inséré par la loi n° 96-109 du 14 février 1996 relative aux relations financières avec l'étranger en ce qui concerne les investissements étrangers en France.

La troisième différence, plus substantielle, porte sur la privation des droits de vote. La loi de 1988 prévoyait une privation des droits de vote acquis irrégulièrement. Le présent article prévoit une privation totale, a due concurrence de la participation ou des droits de la personne en infraction.

Le b) est relatif à la garantie de cours. Lorsqu'une personne agissant seule ou de concert acquiert la majorité du capital ou des droits de vote d'une société à la suite d'une transaction unique portant sur une quantité importante de titres (application ou transaction de gré à gré) ; elle est tenue d'acheter tous les titres qui lui sont présentés au prix auquel la transaction de bloc a eu lieu. L'acquéreur doit ainsi garantir ce cours pendant dix ou quinze jours. Cette Procédure est applicable pour les titres admis à la cote officielle, au second marché ou au marché hors cote.

Cet alinéa ne modifie pas le droit existant. On y observe simplement que le compartiment hors-cote de la bourse de Paris n'y est pas assimilé à un marché réglementé. Le hors-cote ne répond en effet pas aux critères Permettant de le définir comme tel.

Le c) est relatif à l'offre publique de retrait. Cette procédure est ouverte aux actionnaires majoritaires sur leur initiative ou à la demande des minoritaires dès lors que les actionnaires majoritaires détiennent 95 % des droits de vote ou qu'ils donnent à la société la forme de commandite par action. Ce seuil, actuellement défini par le règlement général du CBV, sera laissé à l'appréciation du CMF, mais ne devrait pas changer. Initialement applicable sur la cote officielle et le second marché, cette procédure a été étendue par la loi de 1993 au hors-cote pour prévoir les cas où, à la suite d'une OPA OU pour d'autres raisons, une société était amenée à quitter le marché officiel du fait de la baisse de liquidité de ses titres.

Cet alinéa reprend le texte existant, sous réserve de modifications rédactionnelles déjà vues (précision sur la notion d'action de concert, remplacement de la cote officielle et du second marché par la notion de marché réglementé).

Le d) porte sur le retrait obligatoire. Dans cette procédure, l'adjectif "obligatoire" s'applique aux actionnaires minoritaires alors que pour les OPA obligatoires, ce sont les acquéreurs qui sont les obligés. Elle a été introduite dans notre droit à l'initiative du Sénat par la loi de 1993. Cette procédure donne la possibilité aux actionnaires détenant 95 % du capital ou des droits de vote de la société d'obliger les minoritaires à leur vendre les titres qu'ils détiennent, de façon notamment à pouvoir quitter la cote d'un marché.

Par rapport au droit existant, cet alinéa présente deux modifications.

La première est relative au prix proposé lors du retrait obligatoire. A l'initiative du Sénat, ce prix ne pouvait être inférieur au prix de l'OPR qui l avait précédé le retrait obligatoire. Dans le cas présent, il doit être le montant le plus élevé entre une évaluation objective et le prix proposé lors du retrait lui-même.

La seconde consiste à mentionner explicitement les détenteurs d'actions non identifiés, au profit desquels l'indemnisation doit être consignée. C'est notamment en raison de difficultés d'identification de certains détenteurs que la procédure de retrait obligatoire s'est révélée utile.

II. POSITION DE LA COMMISSION

Votre commission ne peut qu'approuver les dispositions de cet article qui reprend les dispositions de l'article 6 bis de la loi boursière et dont elle avait elle-même repris le contenu aux 15° à 18° de l'article 27 de sa proposition de loi.

Quelques modifications doivent cependant être apportées.

En premier lieu, au premier alinéa, il convient de ne pas restreindre le champ d'application aux marchés réglementés. En effet, certaines procédures (garantie de cours, OPR, retrait obligatoire) sont applicables aux émetteurs figurant sur la liste du marché hors-cote. Celui-ci est un marché de gré à gré à gré au sens de la directive.

Par ailleurs, cet article doit être interprété comme donnant au CMF compétence pour réglementer les seules opérations publiques explicitement prévues par la loi. En particulier, le CMF ne reprend pas du CBV la compétence de réglementation des OPA facultatives et offres publiques de vente. Actuellement, cette compétence découle du pouvoir de réglementation générale des marchés que détient le CBV.

Ce pouvoir n'est pas mentionné dans le présent projet de loi. Il ne s'agit pas d'un oubli, mais d'une position pragmatique permettant aux entreprises de marché de réglementer elles-mêmes les opérations financières sur leur marché, dès lors que les dispositions concernées ne sont pas d'ordre public. En effet, contrairement à la situation prévalant aux termes de la loi boursière, il n'y aura plus désormais en France de réglementation unique des marchés. Dans le détail, les règles d'une OPV ou d'une OPA facultative peuvent différer du fait du mode d'organisation du marché. Cela pourra être le cas par exemple entre le Nouveau marché et la cote officielle.

Il découle de ce qui précède qu'il ne convient pas de laisser figurer ces dispositions dans une section consacrée aux marchés réglementés, mais qu'il faut les insérer parmi celles relatives à la compétence réglementaire du CMF par un article additionnel après l'article 17.

En deuxième lieu, votre commission vous propose de prévoir que le dispositif relatif aux OPA obligatoires ne s'applique pas seulement aux Personnes détenant déjà une proportion déterminée de titres, mais aussi à celles qui en ont l'intention et qui dès lors agissent de façon à franchir à la hausse le seuil de déclenchement de l'OPA obligatoire.

En troisième lieu, votre commission souhaite rétablir dans le dispositif du retrait obligatoire une clause de protection des actionnaires minoritaires qui avait été adoptée à l'initiative de votre rapporteur lors du débat sur la loi de 1993. Cette clause prévoit que le prix retenu pour le retrait obligatoire ne peut être inférieur au prix de l'offre publique de retrait qui l'a Précédé ; le prix finalement retenu pouvant être celui déterminé par l'expertise objective de la société s'il lui est supérieur. En effet, le prix de l'OPR doit être attractif puisque les actionnaires minoritaires ne sont pas obligés de s'y soumettre et qu'ils n'y répondront que s'ils y ont un intérêt financier. En revanche, en l'absence d'une telle protection, le prix du retrait obligatoire peut très bien leur être défavorable puisqu'ils devront l'accepter en tout état de cause.

Enfin, à propos du partage des compétences entre la Commission des opérations de bourse et le Conseil des marchés financiers, votre commission souhaite signaler que le présent projet ne résout en rien les conflits qui Peuvent apparaître. Située sur un pied d'égalité avec l'autorité professionnelle, la COB, détentrice du pouvoir de viser les documents d'information relatifs aux offres publiques, pourra continuer de s'opposer au CMF, juge de la recevabilité des opérations, comme au CBV par le passé. L'absence de conflit récent est essentiellement liée à l'indigence de notre marché des offres Publiques, qui ne compte que quelques opérations par an (contre plusieurs milliers outre-manche et plusieurs dizaines de milliers outre-Atlantique). Cette raison de pure circonstance ne peut suffire à faire admettre le statu quo.

C'est pourquoi votre commission vous propose de contribuer à la solution du problème par une modification de la composition du CMF (voir le commentaire de l'article 12).

Décision de la commission : votre commission vous demande de supprimer cet article.

Section 2 - Dispositions applicables aux marchés à terme

Il convient d'emblée de noter que le projet de loi reprend presque intégralement (à l'exception des dispositions relatives au démarchage et à la reconnaissance des marchés financiers ne faisant pas partie de l'Union européenne) toute la partie de la loi de 1885 sur les marchés à terme, alors que les avant projets précédents procédaient par voie de législation par référence. C'est un net progrès qui mérite d'être salué.

Il convient également d'observer que la plupart des dispositions de la loi de 1885 ne sont pas reprises dans la présente section relative aux dispositions applicables aux marchés à terme, mais dans le chapitre suivant relatif aux "dispositifs de compensation".

* (19) Depuis 1992, les OPA portent nécessairement sur la totalité des titres ou droits de vote restant sur le marché, ce seuil étant laissé à l'appréciation du CBV dans son règlement général Il s'agissait de se conformer au projet de treizième directive relatif aux offres publiques, aujourd'hui enlisé.

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